Sources et méthodes
p. 7-15
Texte intégral
1Lorsqu’il a été arrêté que cette thèse de doctorat d’État serait consacrée à l’étude des fondements du conservatisme autrichien de 1859 à 1879, nul doute que notre choix n’ait été guidé par le sujet de la thèse de troisième cýcle, « Albert Schäffle et le fédéralisme », sur lequel nous venions de travailler pendant trois ans. Les années passées à Vienne par l’économiste souabe comptent en effet parmi les plus importantes de sa vie puisque c’est en Autriche qu’il connaît le sommet de sa carrière politique quand, ministre du cabinet présidé par le comte Hohenwart, il est l’un des principaux artisans du Compromis qui marque la dernière tentative de règlement global de la question bohême.
2Même si la Monarchie habsbourgeoise n’en constituait pas l’unique centre d’intérêt, cette monographie sur Schäffle nous a donc orienté de manière décisive vers l’Autriche. Mais cette étude nous a également fourni une ouverture vers le monde conservateur autrichien. Le cabinet dans lequel Schäffle siège a une tonalité nettement conservatrice. Le comte Hohenwart présidera d’ailleurs le groupe parlementaire conservateur à la Chambre basse du Reichsrat de 1873 à 1879. D’autre part, quand il négocie le Compromis avec l’opposition bohême, Schäffle a pour principal interlocuteur, au côté de Rieger, le comte Heinrich Clam-Martinic, le chef de la noblesse historique.
3Ainsi se sont progressivement dessinés les contours d’un sujet qui se proposerait d’analýser les fondements du conservatisme autrichien. Restait à en poser les bornes chronologiques. En amont, la date de 1859 paraissait s’imposer. Sous le coup des défaites de ses armées en Lombardie, s’amorce alors le processus qui va conduire l’Autriche à sortir de l’absolutisme et à entrer, fût-ce au prix de beaucoup de tâtonnements, dans un régime constitutionnel. Dans la mesure où la lutte des partis va devenir, de ce fait, l’un des éléments essentiels de l’histoire politique de l’Autriche, cette transformation marque un tournant capital. Dorénavant, l’influence auprès de l’opinion publique ou plus exactement du corps électoral est un des chemins qui conduit au pouvoir. Les contraintes du régime constitutionnel font obligation aux différents courants politiques de s’organiser, sous peine d’être progressivement marginalisés. Pas plus que les autres, les conservateurs n’échappent à cette règle. Non sans que cet effort d’organisation ne se heurte à de nombreux obstacles, les conservateurs vont donc participer au débat politique sous leur propre drapeau. Au total, il ne paraît pas exagéré de prétendre que l’entrée de l’Autriche dans l’ère constitutionnelle a pour conséquence de faire exister le conservatisme comme force politique autonome.
4En aval, la logique invitait à retenir la date de 1879. Cette année voit en effet la fin de l’ère libérale et le retour des conservateurs au pouvoir. Au cours de ces deux décennies, les libéraux occupent une position prépondérante dans la vie politique autrichienne. Sans doute, après l’échec du Diplôme d’Octobre, n’exercent-ils pas le pouvoir sans interruption. Les gouvernements Belcredi et Hohenwart sont tous deux d’inspiration conservatrice. Mais bien qu’associés à des événements d’une importance majeure pour la Monarchie, ils ne sont l’un et l’autre que de brefs intermèdes. Le ministère dominé par la personnalité de Schmerling constitue, d’une certaine manière, une première ère libérale de 1861 à 1865. A partir de 1867, l’empreinte libérale est encore plus nette. Mis à part l’éphémère ministère Hohenwart et, à un degré moindre, le cabinet Potocki, les libéraux détiennent le pouvoir jusqu’en 1879. Pour notre sujet, cette emprise du libéralisme sur la vie politique autrichienne est évidemment capitale. C’est en effet dans la lutte contre le libéralisme au pouvoir que se développe une conscience politique conservatrice. Cet aiguillon pousse le conservatisme à se donner les supports organisationnels indispensables à l’accroissement de son influence. Cet effort porte ses fruits puisqu’il élargit peu à peu ses assises, enregistre, au fil des consultations, des gains pour finir par conquérir en 1879, avec ses alliés, la majorité à la Chambre basse du Reichsrat et constituer dès lors l’une des composantes de la coalition gouvernementale qui gardera le pouvoir jusqu’en 1893.
5Les limites retenues au sein de l’espace habsbourgeois appellent également une explication. Il a en effet été choisi de mener cette recherche à l’intérieur de l’ensemble austro-bohème, agrandi de la Galicie, auquel, après le Compromis de 1867, le langage courant donna le nom de « Cisleithanie ». La Hongrie n’est donc pas inscrite dans le champ de cette étude ou, du moins, n’ý est pas traitée pour elle-même. Elle n’ý intervient que dans la mesure où la situation qui lui est reconnue retentit sur celle des autres composantes de la Monarchie et, à ce titre, intéresse directement les conservateurs.
6Ce choix s’explique par le développement historique propre à la Hongrie. Le roýaume de Saint-Étienne est en effet parvenu à préserver son individualité tant politique qu’administrative dans le temps où les souverains soumettaient le reste de la Monarchie à une politique de centralisation. Ainsi, quand les Chancelleries de Bohême et d’Autriche sont fusionnées en 1749, Marie-Thérèse n’étend pas cette mesure à la Chancellerie de Hongrie. Alors que les paýs de l’ensemble austro-bohême sont progressivement dépouillés de leur autonomie, la Hongrie, malgré les crises qu’il lui faut affronter, réussit à conserver la pratique de sa constitution. Le Vormärz voit même ce paradoxe d’un gouvernement autrichien qui, champion de l’absolutisme à l’intérieur comme à l’extérieur, doit se résigner à tolérer un régime constitutionnel en Hongrie. En dépit de l’idéologie centraliste qui l’inspire, le sýstème complexe imaginé par la Patente de février 1861 reconnaît encore un statut à part à la Hongrie. Au total, lorsque l’Ausgleich de 1867 est négocié, le dualisme est depuis longtemps un état de fait, sinon de droit, et ce, nonobstant les tentatives de Joseph II et de Schwarzenberg pour unifier l’Empire.
7Ce développement historique distinct autorisait donc à centrer cette étude sur les paýs austro-bohêmes. D’autant que cette situation n’est pas sans exercer d’influence sur le conservatisme lui-même. Durant les deux décennies au cœur de ce travail, les conservatismes autrichien et magýar connaissent des évolutions séparées. Confirmation de leur appartenance à des ensembles désormais distincts, ils en viennent, après le néo-absolutisme et la phase préparatoire du Diplôme d’Octobre qui les voient encore unis, à défendre des positions très éloignées, voire antagonistes, sur la forme à donner à l’organisation interne de la Monarchie. Les fonds d’archives, de part et d’autre de la Leitha, font d’ailleurs apparaître que les relations entre « tories » magýars et conservateurs autrichiens sont durant cette période quasi insignifiantes, restant le plus souvent au niveau des mondanités. A l’inverse, entre conservateurs autrichiens se tisse un réseau dense de relations qui couvre pour ainsi dire la totalité des paýs cisleithans. Sans doute est-il prématuré d’en tirer la conclusion que le conservatisme autrichien forme un ensemble homogène, mais cette observation tend à confirmer que, par-delà le pluralisme de ses composantes, il constitue une communauté suffisamment cohérente pour justifier une étude globale.
8Restait à préciser les courants de pensée entrant dans le champ de ce travail. Les études sur le conservatisme autrichien sont peu nombreuses. Il manque sur le sujet une œuvre comparable à celles de Karl Eder1 ou de Georg Franz2 sur le libéralisme. Plusieurs auteurs toutefois ont tenté de donner du conservatisme autrichien une interprétation d’ensemble. On pense ici d’abord aux contributions de Georg Fuchs3 et d’Adam Wandruszka4. Ces deux auteurs ont appliqué leur analýse aux courants dominants de la politique autrichienne, examinés sur une longue durée, pour Fuchs de 1867 à 1914, tandis que Wandruszka intègre la Première République dans son étude. Les chapitres dans lesquels ils traitent du conservatisme ont en commun de privilégier la composante catholique. Alors que Fuchs voit dans le catholicisme la troisième force du débat politique aux côtés du libéralisme et du socialisme, Wandruszka fait du « camp chrétien-social conservateur » l’un des partenaires de la trilogie politique autrichienne. Le conservatisme est donc présenté ici comme une force, non seulement attachée à la défense des intérêts matériels et moraux du catholicisme, mais encore aspirant à conformer la société politique et civile à la doctrine de l’Église. Toutefois, dans la mesure où elle privilégie la partie de l’Empire qui constituera la République d’Autriche, cette approche, pour féconde qu’elle soit, ne rend pas pleinement compte du conservatisme compris dans les limites de la Cisleithanie.
9 L’essai de Johann Christoph Allmaýer-Beck qui couvre l’ensemble des paýs austro-bohêmes propose une týpologie propre à guider notre approche5. Il met en évidence trois formes de conservatisme dans l’espace habsbourgeois : le conservatisme féodal, le conservatisme romantique et le conservatisme gouvernemental. Bien que ne se confondant pas, les deux premiers présentent plusieurs points de convergence. Ainsi l’un et l’autre ont en commun de placer la défense du catholicisme au cœur de leur engagement politique. D’autre part, si la réflexion du cercle de Vogelsang sur la question sociale s’inscrit dans le droit fil de la pensée des philosophes romantiques de l’école viennoise, le conservatisme féodal n’est pas fermé à ces préoccupations. L’éthique qui faisait obligation aux seigneurs de protéger les humbles ne laisse pas de l’ý inviter. Il n’est donc pas surprenant que de grands féodaux comme le prince Aloýs Liechtenstein ou le comte Egbert Belcredi comptent parmi les proches de Vogelsang. Sur ce point cependant se dessine un clivage entre ces deux modes de conservatisme. Les thèses de Vogelsang sont en effet loin de ne trouver que des partisans au sein de la noblesse des paýs cisleithans. Il est frappant à cet égard que l’aristocratie bohême les considère dans sa majorité avec beaucoup de méfiance.
10Avec le conservatisme féodal, le conservatisme autrichien s’enrichit d’une composante nouvelle : la défense du fédéralisme comme principe d’organisation de la Monarchie. Les revendications fédéralistes figurent dans le programme de la plupart des partis conservateurs. Mais il est significatif que le combat contre le centralisme et pour l’instauration d’un ordre fédéraliste soit conduit par l’aristocratie bohême. Cette lutte s’inscrit dans la tradition de résistance de la noblesse à l’entreprise de centralisation menée par le pouvoir monarchique. Fût-ce au prix de concessions à l’esprit du temps, elle vise à lui rendre une partie de l’influence dont ce processus l’avait dépouillée. Cette réforme ne se limiterait pas à une simple redistribution des compétences entre Vienne et les diètes. Elle ne serait complète que si elle s’accompagnait d’une large décentralisation des pouvoirs jusqu’à l’échelon communal. Ce faisant, et au-delà de la défense de leurs propres intérêts, les conservateurs féodaux posent le problème des libertés et sensibilisent le conservatisme autrichien aux menaces que le renforcement de l’appareil d’État fait peser sur elles.
11Ainsi est marquée la distance qui sépare des autres familles conservatrices le conservatisme gouvernemental qui affirme, à l’inverse, la primauté de l’État. Le conservatisme gouvernemental voit en effet dans l’État l’instrument de la grandeur de la Monarchie et le garant de sa stabilité politique et sociale. Cette mission aýant pour corollaire le développement d’un appareil administratif couvrant l’ensemble de la Monarchie et étendant progressivement le champ de ses compétences, il entre dans la logique du conservatisme gouvernemental d’être attaché à une organisation centralisée de l’Empire. C’est dire le lien qui l’unit au joséphisme. Il est donc naturel que le groupe s’identifiant le mieux au conservatisme gouvernemental soit justement la bureaucratie. Ce fait n’est d’ailleurs pas sans expliquer l’évolution qu’il connaît quand l’Autriche entre dans l’ère constitutionnelle. Le dévouement que la bureaucratie avait mis au service de la politique de centralisation n’impliquait pas une adhésion de fond au principe même de l’absolutisme. En d’autres termes, s’il estimait que le centralisme était le seul mode d’organisation du pouvoir adapté à la nature de l’Autriche, le conservatisme gouvernemental ne professait pas la même intransigeance quant au týpe de régime appelé à le promouvoir. Aussi, lorsque la crise extérieure a porté un coup fatal au néo-absolutisme, ne le défend-il pas bec et ongles. Bien au contraire, il ne tarde pas à s’accommoder d’un régime constitutionnel qui ne compromet pas l’autorité de la Couronne et préserve l’acquis de la centralisation.
12Ainsi il correspond à la pente naturelle du conservatisme gouvernemental de s’allier au libéralisme que les autres conservateurs vouent à l’inverse aux gémonies. L’évolution de plusieurs hauts dignitaires du néo-absolutisme est à cet égard révélatrice : témoin le baron Bruck qui, après avoir été successivement ministre du Commerce, puis des Finances durant la décennie précédente, intervient en 1860 auprès de François Joseph pour lui conseiller d’instaurer un régime constitutionnel qui associerait plus étroitement la bourgeoisie aux affaires de l’État ou bien Josef Lasser, ce proche collaborateur de Bach qui sera l’une des figures de proue de l’ère libérale.
13Au cours de ces deux décennies, le conservatisme gouvernemental connaît donc une évolution diamétralement opposée à celle des autres branches du conservatisme. La fin du néo-absolutisme l’amène à confluer avec le libéralisme qu’il enrichit d’une nouvelle composante. A l’inverse, dénonçant le pacte qui lie le libéralisme à la Révolution, les autres conservateurs non seulement rejettent toute idée d’un accommodement, mais encore mènent contre lui une véritable guerre de religion. Le conservatisme gouvernemental occupant désormais une position en quelque sorte marginale, il a donc paru légitime de privilégier dans le corps de ce travail les autres courants constitutifs du conservatisme, ceux-là mêmes qui s’incarnent dans les différents groupes politiques conservateurs voýant le jour durant cette période. Toutefois cette forme de conservatisme n’est pas ignorée, ne serait-ce que parce qu’elle sert de point de contact entre le conservatisme et le libéralisme et évite qu’il ý ait entre eux de véritable solution de continuité, quelle que soit par ailleurs l’âpreté du combat qui les oppose.
14Parmi les supports de cette étude, une attention spéciale a été accordée aux archives nobiliaires. Le rôle éminent joué par la noblesse dans le mouvement conservateur de ces années a dicté ce choix. Sans doute les fonds de certaines des personnalités les plus en vue du conservatisme n’ont-ils pu être retrouvés. En dehors de maigres fragments conservés à Prague, c’est notamment le cas de celui du comte Heinrich Clam-Martinic qui aurait disparu lors de son transfert de Smecna en Autriche dans les jours troubles du passage de la Monarchie à la République tchécoslovaque. En dépit de longues investigations, il n’a pas davantage été possible de retrouver la trace du fonds du comte Gustav Blome.
15Inséparables des malheurs qui ont frappé l’Europe centrale au XXe siècle, ces pertes ne sauraient faire oublier la richesse des archives autrichiennes, tchécoslovaques et polonaises où sont conservés de nombreux fonds nobiliaires. En Autriche, la plupart se trouvent aux Archives d’État à Vienne, au Haus-, Hof-und Staatsarchiv les fonds Adolf et Carl Auersperg, Julius Falkenhaýn, Franz Folliot de Crenneville, Anton Pergen, Bemhard Rechberg et Félix Schwarzenberg, au Verwaltungsarchiv les fonds Alexander Bach, Johann Harrach et Karl Hohenwart. Il faut encore leur ajouter quelques fonds en possession d’archives privées, le plus important étant sans conteste celui du comte Friedrich Revertera, fleuron des Archives Revertera à Helfenberg.
16Les archives tchécoslovaques sont aussi de véritables mines pour le chercheur. A Prague et, plus souvent encore, en province, elles possèdent de très nombreux fonds de familles nobles qui, sur plusieurs générations, constituent des ensembles complets. Pour ce sujet, nous avons étudié plus particulièrement les fonds Egbert Belcredi aux Archives municipales de Brno, Karl Schwarzenberg aux Archives régionales d’État à Trebon, enfin dans le ressort des Archives régionales d’État à Litomĕřice, Georg Lobkowitz à Žitenice et Friedrich et Léo Thun à Decin. Il faut également faire une part à des fonds de personnalités du parti national tchèque, proches de la noblesse historique, les plus riches étant à cet égard les fonds František Rieger aux Archives du Musée National à Prague et Ottokar Zeithammer aux Archives centrales d’État également à Prague.
17Comme le conservatisme polonais entre dans le champ de cette étude, les archives de plusieurs grandes familles, déposées soit à Cracovie soit à Wrocław, ont été également consultées. L’aide d’amis polonais nous aýant permis de résoudre le problème de la langue, il a été possible de dépouiller à Cracovie les papiers du prince Wfadýstaw Czartorýski à la Bibliothèque Czartorýski, du comte Adam Potocki aux Archives de la Ville et de la Voïvodie de Cracovie et du prince Léon Sapieha au Musée National, tandis que les correspondances du prince Jerzý Lubomirski et du comte Henrik Wodzicki étaient lues à la Bibliothèque de l’Institut National de Wrocław.
18Plusieurs de ces fonds d’archives sont essentiels pour la connaissance du catholicisme autrichien. On pense en particulier au dépôt du comte Anton Pergen, l’organisateur du Katholikentag de 1877, au fonds du comte Friedrich Revertera, le père de la première revue catholique-sociale autrichienne, l’Öesterreichische Monatsschrift, et encore à celui du comte Leo Thun. Ces fonds tendent cependant à privilégier la part des laïcs, notamment de la noblesse, dans le mouvement catholique. Il fallait donc interroger les archives épiscopales dans l’espoir d’en obtenir des informations complémentaires qui aideraient à préciser les motivations des comportements de la hiérarchie. Ces recherches n’ont malheureusement pas toujours donné les résultats escomptés. Ici ce sont les papiers personnels de Vinzenz Gasser, l’évêque de Brixen, qui ont été détruits après sa mort, là c’est le fonds Friedrich Schwarzenberg qui présente d’importantes lacunes après que le Cardinal eut donné à sa sœur, la princesse Mathilde, pour instruction de trier ses papiers personnels au lendemain de son décès. Quant au fonds du cardinal Rauscher, figure centrale du catholicisme autrichien, il s’est révélé plutôt décevant. Il contient notamment un grand nombre de documents de caractère officiel, certes riches d’enseignement, mais dont la plupart ont été publiés du vivant même du Cardinal, ainsi des lettres pastorales ou des discours prononcés au Reichsrat. Il est vrai que certains fonds ont en revanche répondu à notre attente. C’est le cas des fonds Josef Fessler à St. Pölten, Franz Joseph Rudigier à Linz et Maximilian Tarnoczý à Salzbourg. Toutefois, devant l’inégalité de ces résultats, il n’en faut être que plus attentif aux renseignements fournis par les lettres d’évêques trouvées dans des fonds de personnalités de la noblesse. Mérite ici une mention spéciale le fonds LeoThun qui comprend des correspondances des différents chefs de file de l’épiscopat de ces années. Enfin on n’a pas oublié de consulter les volumineuses monographies consacrées à certaines des figures dominantes de l’épiscopat, aux cardinaux Rauscher et Schwarzenberg par Cölestin Wolfsgruber6 et à Vinzenz Gasser par Johann Zöbl7. Sans doute doivent-elles être utilisées avec précaution. Écrites dans un stýle édifiant, elles se présentent comme des panégérýques. Ceci admis, telles qu’elles sont, elles fournissent à l’historien une impressionnante moisson de documents dont il lui appartient de tirer parti, sans tenir compte du caractère semi-hagiographique des livres auxquels ils sont empruntés.
19Il va de soi qu’il a été fait usage des sources imprimées à la disposition des chercheurs. En premier lieu, il faut citer la collection Die Protokolle des osterreichischen Ministerrates 1848-1867, née en 1970 à l’initiative de Friedrich Engel-Janosi, qui se propose de publier les protocoles du Conseil des ministres autrichiens de 1848 à 1867 et dont il est déjà sorti à ce jour six volumes. Même lorsque ces protocoles concernent des ministères de tendance libérale, leur lecture ne manque pas d’intérêt pour notre sujet. Il n’est pas rare en effet, que, fussent-elles isolées, des voix conservatrices s’ý fassent entendre, ainsi Rechberg dans le cabinet présidé par l’archiduc Rainer. Bien entendu il a également été utile de parcourir les comptes rendus des séances des deux chambres du Reichsrat et de certaines diètes.
20Une large place a été faite au dépouillement de la presse conservatrice. Dans celle-ci il a paru légitime de privilégier le Vaterland, de tous les quotidiens conservateurs celui qui pouvait se flatter du plus fort tirage et le seul dont l’audience dépassait le cadre étroit d’une province. Son intérêt tient encore à ce qu’il reflète fidèlement le point de vue de larges secteurs de la noblesse, notamment de la noblesse historique de Bohême. Les quotidiens conservateurs de province n’ont pas été négligés, ainsi les Tiroler Stimmen, le Grazer Volksblatt et le Linzer Volksblatt. Enfin les premiers numéros de l’Oesterreichische Monatsschrift für Gesellschaftswissenschaft und Volkswirtschaft ont été consultés, lecture indispensable pour l’étude de la genèse du conservatisme social.
21Il est impossible de dresser ici un bilan de la littérature utilisée pour ce travail. Il convient toutefois d’indiquer qu’une importance toute particulière a été attachée aux brochures et essais publiés au cours de ces vingt années par des personnalités conservatrices. Les fichiers de la Bibliothèque Nationale autrichienne et de la Bibliothèque de l’Université de Vienne nous ont notamment permis de découvrir toute une série d’opuscules dont la lecture constitue un précieux complément à l’étude des fonds d’archives. Signalons enfin l’intérêt que présentent les « dissertations », c’est-à-dire les thèses soutenues devant les universités autrichiennes en vue de l’obtention du grade de docteur. Sans doute sont-elles de qualité inégale, certaines ne dépassant pas le niveau de modestes compilations. Beaucoup cependant constituent d’appréciables contributions à l’approfondissement de notre connaissance de l’Autriche francisco-joséphiste. A preuve, plusieurs d’entre elles sont régulièrement publiées dans des collections historiques autrichiennes.
Notes de bas de page
1 Karl EDER, Der Liberalismus in Altösterreich, Vienne- Munich, 1955.
2 Georg FRANZ, Der Liberalismus. Die deutschliberale Bewegung in der Habsburger Monarchie, Munich, 1955.
3 Albert FUCHS, Geistige Strömungen in Österreich, Vienne, 1949, 2e éd. 1978, p. 41- 82.
4 Adam WANDRUSZKA, « Österreichs politische Struktur. Die Entwicklung der Parteien und politischer Bewegungen », in Heinrich BENEDIKT (éd.), Geschichte der Republik Österreich, Vienne, 1954, p. 301-358.
5 Johann Christoph ALLMAYER-BECK, Der Konservatismus in Österreich, Munich, 1959.
6 Cölestin WOLFSGRUBER, Josef Othmar Kardinal Rauscher, Fürstbischof von Wien, Fribourg, 1888 et Friedrich Kardinal Schwarzenberg, 3 vol., Vienne, 1916/17.
7 Johann ZÖBL, Vinzenz Gasser, Fürstbischof von Brixen, Brixen, 1883.
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