Paix de conciliation et diplomatie parallèle : Branting à Londres et à Paris (été 1918)
p. 501-510
Texte intégral
1Le moment où Branting s’embarquait à Bergen pour l’Angleterre, à la recherche du fil d’Ariane de la réconciliation entre Allemands, Français et Britanniques, était aussi celui, à peu de jours près, où les trois gouvernements Scandinaves semblaient encore croire possible une initiative de paix des États neutres1. Pendant plusieurs jours, d’ailleurs, ce départ resta incertain : malgré les passeports, la puissante Fédération des marins de Grande-Bretagne s’opposait à la venue des deux leaders du socialisme neutre. Puis Branting fut autorisé à passer et arriva à Londres le 23 juin le jour même où le Président de la Fédération des Marins, Havelock Wilson, confirmait l’ostracisme dont était victime le seul Troelstra. Selon Wilson, Troelstra était bel et bien victime des marins hollandais, et non britanniques, qui souhaitaient faire de ce boycottage une manifestation contre la conduite diabolique de la guerre sur les mers par les Allemands. De plus, s’apprêtant à partir pour le Congrès du Labour, Troesltra avait eu à Scheveningen des entretiens politiques avec Scheidemann, qui lui étaient maintenant reprochés. Sur son quai d’embarquement à Bergen, Branting avait lui-même confié à la presse que cette conférence avec Scheidemann avait été de la part de Troelstra "une imprudence". Branting, cependant, déplorait l’interdiction faite au Président du Parti socialiste des Pays-Bas2
Branting à Londres (23.6. – 2.7.1918)
2Le mauvais sort réservé à Troelstra, en regard de la bonne fortune de Branting, avait provoqué quelques commentaires amers : pour la presse "ultra" de Stockholm le masque était jeté, et bien jeté : Branting voyageait "comme représentant des buts de la guerre de l’Entente". Troelstra, lui, ne voulait qu’une "véritable paix de compromis", c’est pourquoi on lui refusait le passage !3 Outre les leaders du Labour, Branting put retrouver à Londres quelques vieilles connaissances venues, comme lui, pour rechercher si l’Internationale devait
3s’engager pour la paix, et pour quelle paix : Albert Thomas, Huysmans, Longuet, Renaudel, Vandervelde4. Le discours que Branting y prononça, en français, devait susciter une violente polémique. Selon les comptes rendus qui en furent donnés immédiatement jusque dans la presse libérale5 Branting se serait opposé à la reprise de toute discussion internationale avant que les Allemands ne fussent battus. Un texte rectificatif du Stockholms Telegrambyrå trouva beaucoup moins d’échos dans les colonnes des grands quotidiens de Stockholm : selon le S.T.B., Branting avait déclaré qu’il estimait le moment inopportun pour une discussion internationale et qu’il était préférable d’attendre que l’offensive allemande ait été repoussée. Ce qui était tout autre chose6. Les propos prêtés à Branting entraînèrent une protestation allemande et Hellner télégraphia immédiatement à Wrangel d’inviter Branting à observer la plus grande prudence dans ses déclarations7. La version du discours de Branting donnée en réponse par Wrangel le 2 juillet confirmait celle du S.T.B. : selon Branting "des négociations avec les socialistes majoritaires allemands ne pourraient commencer avec des chances de succès avant que l’offensive présente n’ait été repoussée et qu’une situation d’équilibre ne soit instaurée"8. Selon Wrangel les critiques formulées en Suède contre Branting semblaient plutôt viser ce qu’il avait dit à des journalistes anglais, notamment que "les sympathies pour l’Allemagne en Suède, même dans les milieux militaires, avaient sensiblement baissé, spécialement sous l’effet des événements de Finlande". Finalement la différence entre les deux versions du discours de Branting fut mise sur le compte d’une traduction défectueuse. Il était clair, en tout cas, que Branting restait fidèle à sa ligne de conduite : pas de réunion de l’Internationale aussi longtemps que les grandes offensives allemandes se poursuivraient Dans "un état d’équilibre", seulement, on pourrait discuter. Et de quoi ? Sur quel programme allait-on pouvoir s’accorder ? Voilà ce qui préoccupati Branting au delà de la "situation d’équilibre" des Fronts. Le mémorandum "allié" du 23 février avait été adressé dès le 10 mars par Huysmans à Branting pour transmission aux majoritaires allemands9. Vandervelde et Huysmans avaient simultanément sollicité Troelstra, le 15 mars, pour qu’il fût l’intermédiaire du B.S.L auprès des Allemands, des Austro-Hongrois et des Bulgares10. Ce mémorandum, favorable comme l’était la SPD, a une paix sans annexions ni sanctions, parlait cependant du droit des peuples applicable à l’Alsace-Lorraine. Sa prise en compte par les majoritaires, même comme simple base de discussion, eût signifié une considérable évolution des majoritaires allemands. La lettre de Huysmans et le document annexe confié à Branting n’avaient pu partir de Stockholm que le 29 avril, à destination de Scheidemann11, puis avaient été purement et simplement retenus par la Censure allemande. Les protestations des Suédois avaient quand même permis au destinataire de recevoir le tout... le 3 juin. La S.P.D. répondit le 26 juin à Huysmans, sous la signature de Herman Müller. La lettre était adressée à Branting pour transmission à Huysmans, à un moment où le Président du S.A.P. se trouvait déjà à Londres. Herman Müller y confirmait que la S.P.D. était prête à prendre part à une Conférence Internationale ; il rappelait que son Parti s’était prononcé pour une paix sans annexions, ni contributions sur la base du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Et il ajoutait : "La délégation de Stockholm de la S.P.D. a pris position en détail sur la question de la paix dans son mémorandum qui vous est connu"12. Malheureusement le mémorandum allemand de Stockholm faisait de l’Alsace-Lorraine une question intérieure allemande non discutable13. C’était, de toute évidence, le point crucial et Branting avait déclaré, peu avant, qu’un Parti qui trahissait le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes s’excluait lui-même de l’Internationale. Saisissant ce prétexte, 40 députés majoritaires français avaient demandé, le 20 avril 1918, l’exclusion de l’Internationale de la SPD, provoquant d’ailleurs de très vives tensions à l’intérieur de la S.F.I.O.14. La "Déclaration des 40" et le renvoi par les majoritaires allemands à leur mémorandum de Stockholm bloquait donc toute initiative de la conférence de Londres, quelle que fût par ailleurs la stratégie de Branting. Troelstra, resté aux Pays-Bas, réagissait aux propos de Branting à Bergen, regrettant que ce dernier n’agît pas en véritable médiateur15, et surtout publiait une lettre ouverte à Arthur Henderson. Selon Troelstra les socialistes de l’Entente, et Branting, se trompaient : la poursuite de la guerre depuis avril 1917 n’avait aucunement rapproché les peuples ni, en rien, créé une situation plus favorable à la paix16. Toutefois une lueur d’espoir était apparue quand on avait pris connaissance d’un article publié en plein Congrès, le 28 juin, par le Berliner Tageblatt, qui passait pour bien informé : selon ce quotidien, les majoritaires allemands consentaient à accepter le mémorandum des neutres de Stockholm (10.10.1917) "comme base de discussion"17. Des trois mémorandums susceptibles de servir de document de travail à une Internationale retrouvée, le mémorandum interallié de février 1918, celui des neutres à Stockholm du 10 octobre 191718 et celui des Allemands, également à Stockholm, de juin 191719, on pouvait penser que le mémorandum des neutres ouvrait le mieux la perspective d’une véritable discussion.
4A la veille de son départ de Londres Branting adressait alors à Troelstra le télégramme suivant : "Fais savoir à Henderson si les informations Reuter au sujet de ce qu’a dit le correspondant à Vienne du Berliner Tageblatt sont exactes. Il y est dit en effet que la S.P.D. aurait accepté le mémorandum neutre de Stockholm comme base de discussions"20. La réponse de Troelstra partie de La Haye le 3 juillet arriva à Londres alors que Branting s’embarquait pour la France : l’information était "correcte" et Troesltra, co-responsable du futur rassemblement de l’Internationale avec Branting et Huysmans, se proposait de rendre publique sa conception de ce projet, ce qu’il fit dans sa lettre ouverte à Henderson du 4 juillet dans Het Volk.
5Après les trois journées de Congrès du Labour (28-29 et 30 juin 1918) Branting partit pour la France, cependant, sans illussion excessive. Son pessimisme se trouva renforcé à son arrivée à Paris, le 4 juillet, par les rumeurs relatives à un nouvel assaut de l’armée allemande, assaut dans lequel ce pays contre lequel le temps travaillait, jetterait toutes ses forces dans une sorte de "Friedensoffenvise" désespérée. Comme en avril 1917 à Pétrograd, Branting allait se trouver aux avant-postes de l’histoire.
Branting à Paris (4.7 – 27.7.1918)
6Deux nouvelles l’y attendaient La première était que Kerenski l’y avait devancé et avait été reçu dès le 3 juillet par la C.A.P. du Parti socialiste français21. La seconde était une nouvelle relance de Stauning en faveur de cette sorte de bête du Loch Ness qu’était désormais devenue la Conférence Socialiste Internationale pour la paix22.
7Branting descendu à l’Hôtel Edouard VII fut aussitôt pris en mains par le fidèle Sjöstedt et reçut, dès le 4 juillet, la visite de Marcel Cachin et de Marius Moutet qu’il avait accueillis à Stockholm un an auparavant Les entretiens portèrent d’abord sur la situation en Russie où, plus que jamais, le régime bolchévique apparaissait à Branting comme "une tyrannie prétorienne". Le Président du S.A.P. apporta son soutien à l’intervention que Kerenski venait de faire devant la C.A.P. ; ce dernier avait révélé un "document capital"23, la résolution adoptée le 28 mai 1918 par le Comité Interfractionnel de la Constituante, c’est-à-dire de la représentation populaire légale jusqu’à ce que cette dernière fût mise dans l’impossibilité de se réunir : c’était un refus de reconnaissance du Traité de Brest-Litovsk. Puis on aborda la question de l’Internationale. Branting fît part de sa conviction que toute initiative était alors impossible en raison de l’offensive allemande. Mais, ajouta-t-il, "j’espère que vous la repousserez et alors…". Sur les conditions posées par le mémorandum de Londres, Branting estimait qu’il fallait avoir un entretien avec les socialistes allemands. Il y avait parmi eux des éléments sains qu’il n’était pas souhaitable de rejeter en bloc. Enfin "il croyait savoir que les majoritaires allemands seraient prêts à accepter le mémorandum des socialistes neutres comme base de discussion"24. Or, ce dernier reconnaissait bien que la question d’Alsace-Lorraine avait été posée par la guerre25.
8Le 5 juillet 1918 Branting et Kerenski étaient reçus ensemble, dans un grand enthousiasme, par le groupe parlementaire qui se leva à leur entrée. Branting y répéta ses déclarations de la veille et aborda la question finlandaise, se félicitant de la non-intervention suédoise, et celle de l’Accord Commercial de Londres, remerciant les socialistes français pour les efforts déployés auprès de leur gouvernement
9Il faut bien reconnaître qu’au cours de sa première semaine de séjour, Branting, suscitant partout la curiosité, la sympathie, l’admiration, fut un peu reçu comme un chef d’État26. Pendant que l’actif Sjöstedt préparait la visite des fronts qu’il souhaitait faire27, Branting faisait l’objet de véritables hommages politiques. Le 9 juillet, en compagnie de Kerenski, il était honoré d’un grand banquet de 100 participants à l’Hôtel Moderne, Place de la République. Tous les grands "leaders" du socialisme français étaient là : Dubreuilh, Cachin, Sembat, Renaudel, Varenne, Moutet, Longuet Le discours où Branting s’attacha quand même à défendre "la Conférence, base d’une paix durable" fut salué d’acclamations prolongées28. Puis, le 10 juillet, c’était au Comité Parlementaire d’Action à l’Étranger d’offrir un déjeuner à Branting, cette fois seul. Pour Branting se déplacèrent cinq anciens Présidents du Conseil : Barthou, Briand, Doumergue, Painlevé et Viviani ! Beaucoup de sympathie montait incontestablement vers lui, mais pour ce qui était de la réunion de l’Internationale il fallait bien reconnaître "qu’il rencontrait peu de succès"29. A partir du 13 juillet Branting visita successivement les fronts français, britannique et américain. Accompagné d’Albert Thomas il se rendit en particulier à Reims, la ville martyre qu’il avait déjà visitée en 191530. Sur le front américain il rencontra de nombreuses recrues suédo-américaines avec lesquelles il put s’entretenir en suédois31.
10Les perspectives de "Conférence" s’estompaient de plus en plus. Depuis le 8 juillet von Hintze, bien connu en Scandinavie puisqu’il avait été jusque là ministre à Kristiania, fut nommé à la place de Kühlmann pour mener la politique extérieure allemande. Même si les sociaux-démocrates suédois ne se faisaient plus aucune illusion sur l’indépendance de la Wilhelmstrasse par rapport à l’État-Major32 cette nomination était à l’évidence un succès des pangermanistes33. Puis la lettre de Herman Müller à Huysmans du 26 juin fut publiée dans le Vorwärts du 16 juillet. Müller, renvoyant purement et simplement au mémorandum allemand de juin 1917, qui avait été confirmé par le Congrès de Wurzburg, semblait fermer la porte à toute espérance. Quelques jours plus tard toute la presse française était pleine de commentaires définitifs : faire de l’Alsace-Lorraine une question purement allemande caractérisait suffisamment l’esprit de la S.P.D.
11Pendant que Branting visitait les fronts se produisit un autre événement propre à rejeter aux calendes la réunion de l’Internationale : l’attaque des 1ère et 3ème armées allemandes, le 15 juillet, à l’Est de Reims où elles furent instantanément stoppées par Gouraud et dans la vallée de la Marne, devant Berthelot, où elles furent arrêtées avant d’avoir atteint Épernay. Puis Branting fut le témoin du renversement de la situation militaire, de la sortie des armées Mangin et Degoutte de la forêt de Villers-Cotterets, précédées par les chars Renault qui allaient engager la France "sur le plan incliné de la victoire".
12Alors que la presse sociale-démocrate allemande continuait à démentir qu’elle fût prête à accepter le point de vue de l’Entente à propos de l’Alsace-Lorraine34, Henderson, sur la foi de la réponse de Troelstra du 3 juillet déclarant exactes les informations selon lesquelles la SPD acceptait le Manifeste neutre comme "base de discussion", affirmait que les socialistes allemands avaient adopté "une position nouvelle" dans leurs relations avec les socialistes alliés35. Avec lui, Branting "semblait s’être arrêté de nouveau à l’idée du Congrès"36.
13Dans les derniers jours de juillet, à la veille de la réunion du Conseil national du Parti socialiste, Branting quitta Paris pour Londres, première étape de son retour vers la Suède.
14De Londres Branting adressait un télégramme à Troelstra dans lequel il soulignait la contradiction existant entre le télégramme de ce dernier à Henderson du 3 juillet, confirmant que les majoritaires allemands acceptaient de prendre le mémorandum comme base de discussion, et la lettre de H. Müllier publiée par le Vorwärts du 16 juillet, qui ne mentionnait pas cette acceptation. "Pouvez-vous expliquer cette contradiction et maintenez-vous votre affirmation antérieure. Prière répondre à Henderson"37. Tandis que Branting s’efforçait ainsi d’amener les Allemands à la table de négociations, le Conseil national du Parti socialiste français adoptait, le 29 juillet, la motion Longuet. Renaudel et les majoritaires étaient battus. La minorité devenait majorité. Par l’adoption de cette motion le parti socialiste "renouvelait son adhésion entière et sans réserve à la réunion d’un Congrès international... et se déclarait prêt à répondre à la convocation des citoyens Huysmans, Branting et Troelstra, mandatés par la Conférence interalliée de Londres pour organiser cette réunion"38.
Branting à Stockholm (5.8.1918)
15Le 5 août, après six semaines d’activités au service d’une Conférence socialiste internationale qui servit véritablement la paix, Branting rentra à Stockholm. Même si les problèmes proprement suédois devaient à nouveau l’absorber, son action internationale ne cessa pas. Le 10 août Stauning lui écrivait que les Danois souhaitaient que l’on agît rapidement et, pour commencer, que Troelstra et lui convoquassent le Comité hollando-scandinave39. Branting avait bien conscience que "la Conférence" n’avait pourtant "pas avancé d’un pas” et ne le cacha pas à ses collègues du gouvernement40. Puis, le 14 août, Branting eût enfin des nouvelles de Troelstra ; il s’agissait non pas d’une réponse à son télégramme du 29 juillet, mais "d’interviews" que le Président du Parti socialiste hollandais, en cure à Vevey, avait donné à la presse. Par l’agence Wolff on apprit qu’il avait dit au correspondant de Het Volk toute la satisfaction que lui inspirait la récente décision du Parti socialiste français qui, lors de son Congrès, s’était déclaré prêt à participer à une Conférence internationale convoquée par Branting, Huysmans et Troelstra41. Et surtout le 14 août, dans l’Humanité, Salomon Grumbach (Homo) rapportait les éclaircissements obtenus de Troelstra lors d’un récent entretien à Vevey. Il apparaissait que Henderson et Huysmans étaient victimes d’un malentendu : à aucun moment lors des entretiens de Scheveningen Scheidemann n’avait indiqué que son parti était prêt à accepter le principe du referendum en Alsace-Lorraine ou même celui de l’indemnisation de la Belgique. Le malentendu provenait probablement du fait que les majoritaires allemands s’étaient montrés disposés à accepter le mémorandum neutre de Stockholm commebase de discussion, et que ce Mémorandum reconnaissait aux Alsaciens-Lorrains le droit de libre disposition d’eux-mêmes. Mais ajoutait Troelstra : "Qu’est-ce que cela veut dire en réalité : comme base ? Pas grand-chose. Cela veut dire qu’on place ce mémorandum au milieu de la discussion et que chacun reste libre de l’accepter ou de le rejeter…". Henderson et Huysmans se trompaient donc quand ils estimaient que le "vieux Parti" allemand était en train d’adopter "une nouvelle attitude"42.
16C’était, sur le fond, une réponse indirecte à la question posée par Branting dans son télégramme du 29 juillet Il était cependant en droit d’attendre une réponse plus personnelle et le 21 août télégraphiait laconiquement à Henderson : "What answered Troelstra ?"43. Henderson répondait instantanément pour dire que la réponse de Troelstra lui était arrivée... le 2 août – et sans s’expliquer sur les raisons pour lesquelles il ne l’avait pas transmise à Branting44. Sur le fond Henderson informait Branting que Troelstra avait confirmé ses déclarations antérieures relatives à l’acceptation par la SPD du Manifeste neutre comme base de discussion. Mais depuis "l’interview" à l’Humanité du 14 août Henderson comprenait que cette acceptation n’impliquait en aucune façon une "nouvelle attitude". Dans ces conditions il était d’avis que les socialistes alliés devaient se replier sur leur propre mémorandum. Comme une nouvelle Conférence socialiste interalliée devait s’ouvrir à Londres le 17 septembre, c’était un nouveau coup porté à l’espoir d’ouvrir les chemins de la paix par l’initiative des organisations ouvrières. Branting, cependant, acceptait la réponse de Henderson, "la seule possible", dès lors que les Allemands n’avaient pas donné de véritable réponse au mémorandum de Londres et que leur référence à leur propre mémorandum de Stockholm n’était qu’une échappatoire"45. Il insistait enfin pour que les Russes Axelrod et Roussanof fussent admis à la Conférence du 17 septembre, en particulier pour y dénoncer devant l’opinion la tyrannie bolchévique en Russie, ce que Henderson obtint finalement du Foreign Office46.
17Dès son retour, Branting avait tenu une grande conférence à l’Auditorium de Stockholm et rappelé les grands traits de sa tournée en Angleterre et en France. Mais il avait nié énergiquement avoir prêché la destruction de l’Allemagne, comme on l’avait parfois prétendu à Stockholm47. Peu après le Socialdemokraten écrivait "Nous ne désirons pas la victoire de l’Entente. Nous désirons la défaite de la réaction allemande"48. En fait Branting était de plus en plus conduit à s’aligner sur les positions alliées : prononçant un discours à Lund le 9 septembre il observait :
- qu’en Allemagne c’était le G.Q.C. qui gouvernait tandis que Lloyd George et Clémenceau représentaient la volonté populaire,
- que les buts de guerre du Président Wilson étaient ceux-là mêmes de la sociale-démocratie.
18Si bien qu’il ne pouvait qu’approuver les recommandations qu’Henderson s’apprêtait à faire à la Conférence interalliée du 17 septembre, en particulier le principe de la poursuite des discussions jusqu’à ce que les majoritaires allemands adoptent une nouvelle attitude49.
19Si l’on fait le bilan de l’activité internationale de Branting pendant l’été 1918, on peut arriver à cette conclusion que son dessein premier a été de tenter de réduire l’intransigeance des majoritaires allemands dans les questions de Belgique et d’Alsace-Lorraine. Il comprit vite que le noeud de la situation étant la question d’Alsace-Lorraine, c’était à cet égard qu’il convenait en priorité de faire "évoluer" la S.P.D. Mais il échoua, Scheidemann, Ebert, Müller et les autres majoritaires ne faisant finalement des concessions que sous l’effet des revers militaires de leurs armées, non sous celui des pressions des socialistes neutres50. A l’entrée de l’automne Branting ne pouvait que s’indigner de voir "un parti qui se prétend social-démocrate", n’avoir "aucun souci de savoir ce que veut la population d’Alsace-Lorraine"51. Le grand souffle de "démocratisation" de l’Allemagne dans les premiers jours d’octobre 1918, avec la démission de Hertling et de von Hintze, puis l’arrivée de Max de Bade à la chancellerie, ne devait pas ébranler le moins du monde la S.P.D., à la consternation de Branting52. Quelle "énorme différence" avec les sociaux-démocrates autrichiens qui avaient reconnu le droit à l’auto-détermination des Italiens et des Slaves !
20En fait il fallut attendre l’avant-veille de l’effondrement militaire pour voir la SPD, à la suite de la célèbre intervention au Reichstag des députés alsaciens, polonais et danois le 23 octobre, se prononcer clairement pour le droit à l’autodétermination53. Le comportement de la S.P.D., équivoque et fuyant, comme les notes de Solf, déçut Branting. Sur son impulsion le Comité Directeur envoya, le 14 octobre, un télégramme de félicitation au Parteivorstand pour l’activité qu’il déployait dans le gouvernement de Max de Bade "pour la paix et la démocratie"54. Une méfiance sourde demeurait, cependant. Malgré l’espoir nouveau qui s’était levé en Allemagne, il n’était pas question pour lui "de cesser toute critique à l’avenir contre l’attitude des majoritaires"55. Toutefois pour les sociaux-démocrates "le droit à l’autodétermination devait être reconnu aussi bien pour ceux qui voulaient quitter la communauté, que pour ceux qui voulaient y entrer"56. Et puis le S.A.P. ne pouvait malgré tout abandonner toute solidarité avec la S.P.D. à l’heure de la détresse. Il y avait à cela deux raisons principales : la victoire risquait de susciter un "impérialisme de l’Entente" tout aussi condamnable, aux yeux des sociaux-démocrates, que celui de l’ancienne Allemagne57. Ensuite l’effondrement intérieur et le reflux extérieur de l’Allemagne, et en particulier le retrait de ses troupes de Finlande et des Pays baltes comportaient pour la Suède des menaces dangereuses de contamination bolchévique. Or, en ce début d’automne 1918, les tensions entre la nouvelle Suède et la nouvelle Russie atteignaient leur point de rupture58.
Le S.A.P. et les bolchéviques
21Déjà condamné en décembre 191759 le régime bolchévique était loin de s’amender ! Les Bolchéviques "étranglaient la Constituante" et procédaient au "nettoyage de tous les groupes non maximalistes". "Aucune opposition contre Lénine n’était plus tolérée" !60. Pendant tout le premier semestre 1918 le ton de la presse sociale démocrate à l’égard du nouveau régime de Pétrograd devint de plus en plus hostile et Zetha Höglund l’accusa d’avoir mené une véritable "campagne de mensonge et de haine" contre la république ouvrière russe61. Il est vrai que depuis novembre 1917 les Socialistes de gauche s’étaient totalement engagés en faveur du "soulèvement du prolétariat russe" et que leur comité d’action (Arbetsutskot) avait lancé en leur faveur un brûlant appel62. Ainsi l’attitude envers le bochévisme triomphant contribuait puissamment à maintenir le schisme entre socialistes, alors que d’autres perspectives proprement suédoises, comme la réforme constitutionnelle, auraient peut-être pu les rapprocher. Lors du remissdebatt de janvier 1918, par exemple, Fredrik Ström porta de violentes attaques contre les Majoritaires, mais ces derniers se refusèrent à utiliser le Riksdag pour un règlement de comptes public63. A Stockholm les socialistes de gauche étaient en relations suivies avec Vorovski qui, sans être officiellement accrédité, était reconnu comme représentant "de facto" du régime bolchévique64. Mais Gulkevich, l’ambassadeur de la République de Kerenski, restait le représentant officiel du grand État voisin, dès lors qu’aucun autre gouvernement russe n’avait été reconnu. Gulkevich, lui, se trouvait proche des majoritaires comme Palmstierna qu’il tenait informé des déplacements des blochéviques camouflés et des mouvements de fonds65. On ne peut pas dire, cependant, qu’il fût persona grata auprès des représentants de l’Entente à Stockholm. Le Commandant Thomas estimait depuis l’automne 1917 qu’il était peu favorable à l’Entente et fort tiède à l’égard de la continuation de la guerre66. Trop dépendant du "Comité des réfugiés politiques russes à Stockholm", au sein duquel l’influence bolchévique semblait dominante, Gulkevich négligeait souvent le Service de Contrôle interallié des passeports. Il accorda des visas entre les deux pays voisins à beaucoup d’éléments dangereux et pour la cause alliée et, peut-être, pour le S.A.P.67. Or Stockholm, pour des raisons géographiquesévidentes, était devenue une plaque tournante de la propagande bolchévique au cours du premier semestre 1918. Cette propagande avait toutefois peu de prise sur un parti aussi cohérent et aussi organisé que l’était le S.A.P. En mars 1918, en pleine campagne électorale pour le renouvellement des Conseils Généraux, le Comité Directeur affirmait sa conviction que "tout écho de bolchévisme russe se briserait sur la maturité du peuple suédois"68.
22Il ne devait pas en être de même lors du Congrès du Parti socialiste norvégien qui s’ouvrit le 29 mars et auquel Per Albin Hansson et Gustav Möller représentaient le S.A.P. L’opposition s’y retrouva en effet en majorité et désigna Kyrre Grepp comme Président et Martin Tranmael comme Secrétaire. La nouvelle équipe dirigeante décida de s’affilier à Zimmerwald et d’entrer officiellement en relation avec les socialistes de gauche en Suède. Vidnes qui avait collaboré avec Branting au sein du Comité hollando-scandinave dut démissionner de son poste de Rédacteur en Chef du Socialdemokraten norvégien69. Le S.A.P. et le gouvernement suédois suivaient cependant avec attention les activités de la Commission Socialiste Internationale qui, dans le courant du printemps, s’était établie à Stockholm au domicile même d’Angelica Balabanov70. Cette "Commission" éditait une revue en suédois, français et allemand et recevait "d’importantes sommes d’argent" du gouvernement révolutionnaire russe71. Branting et son Parti restaient en relations régulières avec Axelrod et Roussanof et recevaient d’eux des informations sur l’évolution de la situation politique en Russie. Axelrod publiait même à Stockholm, depuis février 1918, un périodique intitulé "Les échos de Russie"72.
23Branting estima donc qu’il avait une sorte de mission pour stopper la diffusion du bolchévisme à l’intérieur du socialisme européen. Il profita de son séjour à Londres et à Paris, et des tribunes qui lui étaient offertes, pour tenter de dissiper les malentendus dont avaient pu bénéficier Lénine et consorts. Car, selon Branting, "certains socialistes français et britanniques se faisaient des illusions sur les Bolchéviques", et il fallait crier partout que les Bolchéviques "ce n’était que le pouvoir des baïonnettes"73. Ainsi les socialistes de gauche à Stockholm n’avaient-ils pas tout à fait tort de dire que la tournée de Branting dans les capitales de l’Entente avait été inspirée par la volonté de contrebattre la séduction du communisme et qu’il s’était aggloméré au front composé par les "social-chauvins" de tous bords.
24Le 29 juillet le Socialdemokraten avait publié un grand article dans lequel Axelrod et Roussanof appelaient à l’envoi d’une commission internationale d’enquête en Russie. Réunie en août la Commission exécutive du Comité Directeur du S.A.P. décida de faire sien ce projet sous réserve qu’il soit aussi accepté par les partis socialistes des autres pays74. C’était, incontestablement, un geste audacieux de la part du S.A.P., une intrusion non déguisée dans les affaires intérieures de la Russie, mais les membres de la Commission avaient estimé que "les Bolchéviques n’oseraient pas renvoyer une Commission mandatée par toute la communauté socialiste"75
25A l’entrée de l’automne les relations se tendaient aussi entre les deux gouvernements et, à Moscou, les représentants des États neutres protestèrent contre "la terreur de masse" et menacèrent d’expulser tous les bolchéviks de leurs pays respectifs76.
26Branting, du fait de l’envergure européenne qui était maintenant la sienne, et du fait d’un engagement plus aigu que jamais contre le bolchévisme, était devenu dans le courant de 1918 le principal adversaire de Lénine. En septembre Brändström communiqua à Hellner une information qui étonna, une nouvelle "sensationnelle", mais qu’il affirmait tenir d’une source absolument sûre. Les Bolchéviks avaient décidé d’éliminer Branting "leur plus dangereux adversaire"…!77. L’alerte resta sans lendemains, mais que la menace aît pu être prise au sérieux à Stockholm témoignait d’une extrême dégradation des relations entre Suédois et Russes. La propagande bolchévique en Suède avait été depuis plusieurs mois parfaitement circonscrite. Mais, à la longue, les conditions économiques faites au plus grand nombre risquaient de prévaloir. Or, en ce début d’automne 1918, rien n’était assuré. Le 27 octobre devant le groupe parlementaire F. Thorsson dut reconnaître qu’il y avait "de l’agitation dans le peuple"78. Les Bolchéviques qui faisaient passer en Suède d’importantes sommes d’argent79 ne pouvaient-ils pas tenter d’exploiter cette situation ?
Notes de bas de page
1 Cf. supra, p. 488.
2 Socialdemokraten, 25.6.1918. Troelstra avait du reste aussi rencontré les Autrichiens Seitz et Ellenbogen.
3 Nya Dagligt Allehanda, 22.6.1918.
4 Socialdemokraten, 27.6.1918. "Le Congrès du Labour s’est ouvert hier".
5 Stockholms Tidningen, 28.6.1918.
6 Socialdemokraten, 29.6.1918. "Hetspressen i arbete".
7 Stockholm. R. A. UD. 21 U 25. D. Hellner à Wrangel. 30.6.1918.
8 Ibid. Wrangel à Hellner. 2.7.1918.
9 On s’y était accordé en outre pour confier la future conférence de l’Internationale à un triumvirat Branting-Huysmans-Troelstra.
10 Amsterdam. I.I.S.G. Troesltra 547.
11 Ainsi qu’à Vikto Adler (Vienne), Buchinger (Budapest), Sakasov et Kyrkov (Sofia). Socialdemokraten, 24.5.1918.
12 La lettre de Herman Müller à Huysmans fut publiée dans le Vorwärts du 16.7.1918.
13 Cf. Supra p. 407.
14 Le Populaire du Centre, 14.5.1918.
15 Het Volk, 1.7.1918.
16 Het Volk, 4.7.1918.
17 Berliner Tageblalt, 28.6.1918.
18 Cf. supra p. 386
19 Cf. supra, p. 383.
20 Branting à Troelstra, 1.7.1918. Ce télégramme qui n’a pu être retrouvé dans les papiers de Troelstra a été publié dans le Socialdemokraten du 25.9.1918.
21 L’Humanité, 3.7.1918.
22 Socialdemokraten, 6.7.1918. "Dansk aktion för en fredskongress".
23 L’Humanité, 6.7.1918.
24 Ibid.
25 Socialdemokraten, 8.7.1918.
26 Londres. F.O. 371/3331. Earl of Derby à Balfour. 7.7.1918.
27 Stockholm. A.R.A. Brantings samling. Sjöstedt à Branting. 8.7.1918 : " Je sors de chez Tardieu qui va immédiatement s’adresser au général Pershing et espère que votre visite au front U.S. pourra être arrangée pour samedi prochain".
28 L’Humanité, 10.7.1918. Le Temps, 11.7.1918.
29 Socialdemokraten, 12.7.1918.
30 Le Temps, 14.7.1918.
31 Le Temps, 17.7.1918.
32 E. Palmstierna, op. cit., 31.5.1918.
33 Socialdemokraten, 10.7.1918. "Alltyskama ha segrat !"
34 Scheidemann dans le Kassler Volksblatt du 23.7.1918. Vorvärts, 24.7.1918.
35 Arthur Henderson. The Times, 27.7.1918. Cf. aussi l’article de Huysmans dans Le Populaire, 28.7.1918.
36 Paris. A.N. 94. AP. 410. A. Waltz à A. Thomas, 21.7.1918.
37 Londres. Labour Party. Henderson Papers. Branting à Troelstra. 29.7.1918.
38 Texte de la résolution dans Le Temps, 30.7.1918.
39 Copenhague. A.B.A. Staunings samling. Stauning à Branting. 10.8.1918.
40 E. Palmstierna, op. cit., 9.8.1918.
41 Socialdemokraten, 14.8.1918.
42 L’Humanité, 14.8.1918. "Un entretien avec Troelstra".
43 Londres. Labour Party. Henderson Papers. Branting à Henderson. 21.8.1918.
44 Londres. Labour Party. Henderson Papers. Henderson à Branting. 23.8.1918.
45 Londres. Labour Party. Henderson Papers. Branting à Henderson. 1.9.1918.
46 Londres. Labour Party. Henderson Papers. Henderson à Branting. 9 et 12.9.1918.
47 Socialdemokraten, 14.8.1918. "Brantings föredrag på Auditorium".
48 Socialdemokraten, 19.8.1918. Paris A.E. Europe 1918-29. Suède. 19. Thiébaut à Pichon. 19.8.1918.
49 Londres. Labour Party. Henderson Papers. Henderson à Branting. L2.9.1918.
50 Cf. p. ex. la réunion du 23.9.1918 du groupe S.P.D. dans Eric Matthias et Eberhard Pikart. Die Reichlagsfraktion der deutschen Sozialdemokratie 1898 bis 1918… II p. 419.
51 Socialdemokraten, 23.9.1918.
52 Socialdemokraten, 1 et 5.10.1918.
53 Vorwärts, 24.10.1918.
54 Socialdemokraten, 15.10.1918.
55 Copenhague. A.B.A. Staunings samling. Branting à Stauning, 18.10.1918.
56 Socialdemokraten, 25.10.1918. Le 21 octobre les Allemands d’Autriche avaient proclamé leur droit à l’autodétermination, alors que la double Monarchie était en cours de désintégration (J. Bérenger. La République autrichienne de 1919 à nos jours. Paris, 1971, P. 19).
57 E. Palmstierna, op. cit., 15.10.1918.
58 Compte tenu aussi de l’échange de notes germano-américaines qui se poursuivait (cf. infra p. 529) Branting estima le moment opportun de relancer le projet de conférence internationale auprès de Troelstra et de Stauning (Copenhague. A.B.A. Staunings samling. Branting à Stauning. 25.10.1918).
59 Supra p. 465.
60 Socialdemokraten, 14.1.1918.
61 Z. Höglund. Det stora förräderiet. Brytningen med Ryssland och Författningskapitulationen. Stockholm 1918, p. 6.
62 Politiken, 17.11.1917.
63 Stockholm. S.A.P. Riksdagsgruppens protokoll. 26.1.1918.
64 J. Hellner, op. cit., p. 398.
65 Stockholm. R.A.E. Palmstiernas archiv. Gulkevich à Palmstierna. 14.2.1918.
66 Stockholm. Ambassade de France. Archives Niessel. D.S. 40. Cdt Thomas à Attaché militaire à Pétrograd. 10.9.1917.
67 Stockholm. Ambassade de France. Archives Niessel. D.S. 40. Le général Niessel, Chef de la Mission militaire française en Russie, à Ministre de la Guerre. 24 octobre/6 novembre 1917.
68 Socialdemokratiska Partistyrelsens berättelse för år 1918… p. 5.
69 Socialdemokraten, 2.4.1918.
70 Stockholm. R. A. UD 55 G.9. Diverse rör. anarkister o Socialister samt uppl. om bolsjeviker.
71 Ibid.
72 Socialdemokraten, 8.5.1918.
73 Déclaration de Branting à Moutet, rapportée par la presse française, en particulier L’Humanité, 6.7.1918. Socialdemokraten, 20.7.1918.
74 Sans précision. Probablement faut-il entendre : des autres pays neutres.
75 Socialdemokraten, 23.8.1918. "Den socialistiska Under-sökningskommissionen till Ryssland".
76 R. A. UD. 6. A.35. Socialdemokraten, 9.9.1918.
77 E. Palmstierna, op. cit., 28.9.1918. Palmstierna commente ainsi l’événement "Branting sous la protection de la police ! Qui aurait dit cela il y a quelques années !
78 Stockholm. S.A.P. Riksdagsgruppens protokoll. 27.10.1918.
79 Stockholm. U.D. 55 G 12. Brandström à Hellner. 28.9.1918.
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