Jean Monnet et le « Victory Program » américain
p. 97-109
Texte intégral
1Jean Monnet arriva à Washington après la chute de la France et partit deux ans et demi après rejoindre le gouvernement provisoire français à Alger. De cette position privilégiée sur le Potomac, il fut le témoin de la mobilisation conduite sur une échelle non seulement inconnue jusqu’alors, mais généralement considérée comme impossible, il observa un président habile et à la vision large, manœuvrant une nation hésitante à entrer dans la guerre, il découvrit les voies parfois étranges que le pouvoir et l’influence empruntent dans la capitale. Là, il construisit les amitiés indispensables à ses réalisations ultérieures ; il en revint avec la confiance de savoir comment la France et l’Europe pourraient être réformées, modernisées et restaurées. Dans Washington en guerre, Monnet apprit comment rebâtir l’Europe1.
2Mais quelle part a-t-il joué dans la victoire ? La plupart des témoignages à ce sujet ont porté sur le Victory Program initié en 1941, et complété fin novembre de la même année2. Indiscutablement, Monnet mérite le crédit qu’on lui accorde d’avoir guidé et conduit à terme la « déclaration combinée anglo-américaine sur les besoins stratégiques », titre de travail de ce qui est décrit, après septembre 1941, dans la correspondance officielle américaine comme le Victory Program. Pourtant le document avait peu d’importance opérationnelle. L’industrie américaine fut rapidement mobilisée dès l’élaboration du Victory Program ; l’entrée des Soviétiques dans la guerre contre l’Allemagne souleva une foule de nouvelles questions et de problèmes qui allaient au-delà du programme et les augmentations dramatiques de production d’armements en 1942 et 1943 seraient survenues sans lui. Le contrôle économique centralisé appliqué pour un plan tel que le Victory Program n’avait jamais existé aux États-Unis. Le mode de décision technocratique n’était pas une des sources de la puissance américaine. Celle-ci provenait d’une immense base de ressources et d’un accès aux ressources mondiales pour la plupart des matières premières, des réserves industrielles et de travail et, profondément inscrites dans les traditions fondatrices, la mobilité, l’autonomie et le goût d’entreprendre.
3L’histoire du Victory Program ne se termine pas à ce moment-là. Sa formulation aida l’Amérique à se préparer pour la guerre. La période de neutralité qui lui servit de toile de fond fut celle durant laquelle, bien que le cours des événements devint de plus en plus clair avec le temps, la nation dut se mobiliser contre un ennemi ou des ennemis qu’elle ne devrait jamais affronter dans des circonstances que personne ne pouvait prédire ; période pendant laquelle les espoirs de paix se partageaient avec la peur de la guerre et où à la fois l’éloignement d’avec le conflit et le retour de la prospérité firent ignorer trop facilement les dures réalités internationales. Le président Roosevelt préféra affronter le défi extérieur indirectement ; il dut faire – ou du moins pensa-t-il qu’il le devait – entrer les États-Unis dans la guerre européenne. Pourtant cet objectif ne fut jamais exprimé et dans la réalité des événements la guerre s’imposa à la nation par l’attaque sur Pearl-Harbour avant que le Congrès ne la déclare.
4Le travail de préparation d’un Victory Program pour une nation encore en paix fut mené en arrière-plan. Dans cet effort, comme si souvent dans sa carrière, Monnet servit de catalyseur, de mouche du coche, de stimulant, d’instigateur, d’aiguillon pour l’action, de lumière. Grâce à ses prises de positions claires, son exemple et son engagement infatigable il informait et inspirait les hommes capables de modifier les événements. En développant un plan de production, Monnet augmenta la prise de conscience des responsabilités globales de l’Amérique. Il révéla l’ampleur de la tâche économique nécessaire pour y répondre, et éclaira les nombreux défis particuliers à relever pour vaincre l’Allemagne nazie. Le Victory Program était peut-être une étape des décisions cruciales concernant la guerre, mais il facilita le travail pour la victoire.
I. Les origines
5Le Victory Program résultat de multiples efforts commencés au début de 1941, dont l’objectif était de dresser l’état des besoins de guerre américains et britanniques, des productions actuelles et potentielles, des stocks de matériaux existants et à rassembler. Les Britanniques nommaient cette liste « la déclaration de référence », et les Américains « le bilan » (« balance-sheet »). Monnet fit que le Victory Program serve deux objectifs peu compatibles. Le premier était de faciliter la gestion de l’économie de guerre alliée et le second de fournir des « munitions » intellectuelles à ceux qui, comme lui, pensaient que la production d’armement américaine pourrait constituer la marge de supériorité décisive dans la guerre. Sa responsabilité était d’accroître la production aussi rapidement que possible tout en obtenant dans le même temps l’aide nécessaire à la Grande-Bretagne.
6L’histoire du Victory Program, souvent racontée, et bien, commence avec l’arrivée de Monnet à Washington en août 1940 comme adjoint de son ami Arthur Purvis, président du Comité d’achat britannique, renommé Conseil des approvisionnements britanniques en janvier 1941. S’appuyant sur ses amitiés d’avant-guerre avec les riches et les puissants dans la capitale américaine, Monnet acquit bientôt une réputation d’avocat convaincant et décidé de l’effort totale pour la guerre à l’échelle mondiale, en étroite coopération avec la Grande-Bretagne. L’annonce du prêt-bail par le Président Roosevelt en décembre 1940 fit basculer le sort en faveur de Monnet et de ceux qui pensaient comme lui : la promesse d’approvisionner la Grande-Bretagne quel qu’en fut le prix –, exprimant dans un langage simple mais inoubliable la responsabilité de l’Amérique pour la défense de la liberté du monde, lia les destins des deux nations.
7Le 18 février 1941 le chef de l’Office de la gestion de la production (Office of Production Management, OPM), William (« Big Bill ») Knudsen annonça aux Secrétaires de la Guerre et de la Marine qu’il avait l’intention d’établir un programme conjoint anglo-américain pour tous les besoins actuels et futurs de la production, souhaités par le prêt-bail. Il ordonnait la préparation d’un programme américain de défense totale pour 19423. Un état des besoins britanniques devait être inclus dans le document. A ce moment toutefois, Monnet et Purvis avaient déjà commencé de travailler à un bilan établissant les besoins que les États-Unis en effet devraient satisfaire pour combler le déficit en armements des Britanniques vis-à-vis des puissances de l’Axe4. Ces estimations initiales étaient cependant hautement conjecturales.
8L’organisation de l’Office central statistique britannique au commencement de l’année, tout comme les travaux du bureau américain de recherches et de statistiques à l’Office de la gestion de la production rendirent possible la mise à disposition de résumés « assez adéquats » de programmes et besoins pour la Défense, établis à hauteur de 47 milliards $ autour de mars 1941 par le chef du bureau, Stacy May5. Ils fournirent les bases des états combinés. En août, May se rendit à Londres pour éliminer les contradictions et incompatibilités des différentes estimations des données des productions américaines et anglaises. Le premier de nombreux états conjoints anglo-américains de production fut prêt à la fin du mois suivant. Une mesure de l’immense travail qui attendait existait maintenant.
9Dans des notes manuscrites, rédigées avant sa mort dans un accident d’avion le 14 août, Purvis énumérait 22 étapes qui permettraient de parvenir à une estimation commune des besoins et possibilités conduisant à un effort de guerre totale. Le Victory Program devait être la premières de ces étapes. D’après les Mémoires du patron de l’Office de la gestion de la production, Donald Nelson, « cela nous montra ce que nous devions demander à l’économie pour réaliser un programme de défense ou de production de guerre. Cela nous montra que nous devions accroître de plus en plus la production d’aluminium, de cuivre, d’acier et autres produits qui étaient devenus rares. Si nous devions devenir l’Arsenal de la Démocratie nous devrions aussi, ajouta-t-il, être obligé de produire des matières premières et des produits manufacturés sur une échelle justifiant cette définition »6. Nelson reconnaît au bilan d’avoir été une aide pour le choix des décisions concernant les priorités à long et à court terme, mais conclut à regret que les impondérables de la guerre, les difficultés de la coopération transatlantique et le profond embarras des autorités militaires chargées des fournitures firent obstacle aux processus de prise de décisions rationnels7.
10L’attaque sur Pearl-Harbour du 7 décembre 1941 élimina les timorés ; il n’était plus possible de se boucher les yeux. Convaincu que la production américaine d’armes pouvait être augmentée de 50 % et armé de son récent bilan, Monnet persuada aisément Lord Beaverbrook qui représentait les Britanniques à la première session du planning de guerre avec le président Roosevelt après l’attaque japonaise – la Conférence Arcadia – de réclamer un engagement américain de produire 24 000 avions au lieu de 5 000 ainsi que 45 000 tanks au lieu de 24 000 et, en somme, d’augmenter la production globale d’armements d’un quart. Bien que les experts sourirent de ces chiffres, Roosevelt surmonta les doutes et augmenta même les chiffres ; le 6 janvier 1942 il plaida devant le Congrès pour que dans l’année à venir les États-Unis puissent produire 60 000 avions et 100 000 tanks8. Le déclenchement de la guerre rendait futile la fixation des objectifs précis. La tâche désormais ne serait pas d’augmenter la demande d’armements mais de limiter le gaspillage et la consommation inutile.
II. L’économie américaine de guerre
11Les chercheurs américains ont négligé l’économie américaine de guerre ; une seule et courte étude, mais utile, sur le sujet existe9. Il reste que l’industrie américaine a fourni la marge de la victoire : en 1943 et 1944 les États-Unis ont fabriqué 40 % des armements mondiaux et nourri une grande partie de la population mondiale tandis que le niveau de vie augmentait aux États-Unis. Beaucoup de technologies responsables de la croissance durant le dernier demi siècle proviennent de cet effort pour gagner la guerre. Ce fut pendant la guerre que les bases économiques de la Paix américaine d’après-guerre s’élaborèrent.
12Ces résultats remarquables eurent trois origines principales. La première était les crédits généreux alloués par le Congrès à la défense. Même durant la période de neutralité plus de fonds furent disponibles qu’il ne fut possible d’en dépenser. Une seconde origine, liée à cette générosité, fut le refus du président Roosevelt de nommer un « tsar de l’armement » du style 1914-1918, pour gérer la mobilisation. Celui qui fut le plus tacticien et le plus secret des présidents avait envisagé une approche différente. Il encouragea une lutte d’influence perpétuelle entre les représentants des divers intérêts économiques et politiques, en partie pour maintenir l’illusion que tout le monde pouvait dans une certaine mesure avoir prise sur les événements, en partie aussi pour décourager les défis à son autorité mais, dans le fond, parce que la confusion et le conflit fournissaient un opportun rideau de fumée derrière lequel les producteurs américains pouvaient entreprendre le vrai travail de mobilisation économique.
13L’approche de Roosevelt était probablement inévitable. En mobilisant l’économie il devait non seulement affronter l’isolationnisme et les tenants « des affaires comme d’habitude » mais aussi les pressions de la gauche. Les perspectives de la guerre entraînèrent l’espoir d’une réforme économique de grande ampleur tout autant que la détermination à combattre le fascisme. La marée radicale grandit plutôt qu’elle ne diminua pendant la guerre et l’opinion progressiste trouva dans le vice-président Henry Wallace et le Secrétaire au Trésor Henry Morgenthau des représentants proches de la Maison Blanche. Bien qu’au fur et à mesure des réorganisations administratives successives, l’influence de tels hommes diminua dans les affaires économiques intérieures, ce fut le contraire pour les affaires extérieures, et comme le jour de la victoire approchait et la démobilisation et la reconversion venaient à l’ordre du jour, l’exigence d’un large changement devint insistante10.
14Les propositions pour « réaliser la promesse du New-Deal » variaient, mais toutes impliquaient la punition du « big business ». L’administration devait être vigilante de peur que le monde des affaires ne regagne durant la guerre le pouvoir et le prestige perdus dans les années trente. En effet, l’État devait contrôler l’industrie privée si possible, la réguler profondément sinon, et à tout le moins créer une nouvelle concurrence pour lui rendre la vie difficile11. Les producteurs se défendaient aussi vigoureusement, exerçaient des pressions et engageaient des campagnes d’opinion. Cependant comme aujourd’hui ils trouvèrent bien peu de défenseurs désintéressés. La recherche américaine contemporaine fait le plus souvent l’impasse sur la question du « miracle de la production » ou le dénigre, tout en présentant les années de guerre comme une opportunité ratée d’exorciser ce système économique diabolique12. Les capitaines d’industrie et leurs représentants au gouvernement, les « dollar-year men » ou « millionnaires bénévoles »13, s’efforcèrent d’améliorer et de simplifier le plan. Ils réorganisèrent la production de base, développèrent de nouvelles technologies, des produits, des méthodes et des systèmes et atteignirent souvent par une coopération informelle ce qu’une organisation dirigiste aurait desservi autrement. Pour le moins leur contribution méritait d’être reconnue.
15Une description de l’économie de guerre américaine doit d’abord souligner le montant des crédits de défense. Ils atteignirent environ 20 milliards $ en 1941 et un peu plus de 110 milliards en 1942. Puis ils déclinèrent à environ 75 milliards $ en 1943 avant d’atteindre à nouveau en taux annuels 100 milliards $ en 1944 et 194514. Plus d’argent était disponible pour la Défense que l’économie ne pouvait en absorber, particulièrement, ce que l’on oublie souvent, dans les premières phases de la mobilisation – i.e. dans les mois d’élaboration du Victory Program –, quand d’énormes quantités de main-d’œuvre nouvelle et de remplacement devait être recrutées, déplacées, formées et logées15. Autour de la mi 1942 quelques 20 milliards d’ordres de fabrication de 1941 ou plus anciens restaient en souffrance. La persistance de hauts niveaux de consommation civile reflétait de tels décalages ; 1941, par exemple, fut la meilleure année de toute l’histoire de l’industrie automobile.
16La persistance d’un grand secteur civil pendant cette année n’indique pas nécessairement que les préparatifs de guerre auraient pu ou auraient dû être accélérés tel que l’affirmaient les acharnés comme Monnet. Il n’y avait pas besoin de beaucoup de nouvelles capacités industrielles. Les pénuries critiques menaçaient de se développer uniquement pour une production, le caoutchouc naturel, cette situation particulière résultait du contrôle japonais sur les sources traditionnelles de ravitaillement d’Asie du Sud-Est. Dans les secteurs comme l’acier, de nouvelles usines furent construites en 1941 et 1942 et restèrent inutilisées durant la guerre. Les usines converties contribuèrent bien plus aux productions générales d‘armements que les usines nouvelles et elles produisirent beaucoup. Faisant partie de la production générale, la production de guerre atteignit un sommet au milieu de 1943 et put être ensuite graduellement diminuée. Les crises de ravitaillement du temps de guerre ne résultèrent pas d’un manque de produits industriels mais d’un étranglement administratif tout autant que l’action militaire ennemie.
17Le miracle de la production, d’une certaine façon, fut moins extraordinaire qu’il ne sembla. En 1940 les conditions d’une quasi dépression subsistaient encore dans l’économie américaine. Le chômage atteignait 14,6 % et le PNB n’excédait celui de 1929 que de 9 %16. L’absorption des chômeurs, quelques huit millions, compensa largement les pertes de main-d’œuvre d’environ 10 millions dues à la conscription. Le transfert vers les usines de 5 millions de fermiers sous-employés et de noirs, auquel s’ajoutait un nombre égal de femmes antérieurement au chômage, signifiait que le travail au rythme des « 3 huit » pouvait devenir la norme17. Ces nouveaux salariés, dont la semaine de travail moyenne grimpa de 38 heures en 1940 à 45 heures en 1943, peuvent partager le crédit de l’augmentation spectaculaire de la productivité pendant le temps de guerre, officiellement estimée à 25 %, avec ceux qui introduisaient des méthodes efficaces de production dans les usines. Avant d’examiner leur contribution on doit cependant considérer les particularités de l’organisation de guerre dans l’Amérique de Roosevelt.
18Le refus du président de nommer « un tsar de l’armement » conduisit à la multiplication de bureaux, agences et autorités de tous types avec des rôles et des liens d’une complexité presque indescriptible18. Le principe opératoire était, selon Harold Vatter, « le contrôle par personne » et bien que ceci resta une constante, l’organisation passa du microscopique au gargantuesque19. La pièce centrale de la structure fut initialement appelée VAdvisory Commission auprès du Council of national défense, créé durant la défaite de la France. Il comprenait des personnalités prestigieuses du monde des affaires, « millionnaires bénévoles » enrôlés pour aider les forces armées à développer un programme de défense. Mais il comprenait aussi des industriels comme William Knudsen de General Motors, son directeur exécutif, des hommes comme Sidney Hillman, président du syndicat du vêtement et d’autres représentants d’intérêts économiques particuliers tels que les petites entreprises. L’Office du Coordinateur de la production de guerre de Donald Nelson fut attaché à ce corps en juin. En janvier 1941, Knudsen devint le chef de l’Office of Production Management (OPM) qui, après juin, fut subordonné à Nelson nommé directeur exécutif du nouveau Supply Priorities and Allocation Boord20.
19Nelson avait été président de Sears Rœbuck, la chaîne de grands magasins américains et de ce fait avait une longue expérience de la gestion des achats et approvisionnements, ainsi qu’une formation de base commerciale. Ainsi, non seulement savait-il acheter mais également organiser la vente de la production et la distribution. Au SPAB, Nelson avait pourtant les mains liées. Il n’avait aucune autorité, même minime, sur les forces armées, la marine marchande ou les acheteurs en prêt-bail. Il pouvait décider des priorités de production et de distribution seulement dans le secteur civil. De plus la politique de la main-d’œuvre et des relations sociales échappait à son pouvoir, tout comme la politique des prix. De plus, lorsque des problèmes particuliers se manifestèrent, des « mini-satrapes » furent nommés pour l’huile, le caoutchouc, les métaux et ainsi de suite21.
20Une super-organisation de 18 000 bureaucrates, le War Production Board (WPB) fut créée en janvier 1942 comme successeur du SPAB/OPM. Elle ne corrigea aucun de ces problèmes mais en créa de nouveaux en générant des organisations parallèles doublant les satrapies des secteurs spéciaux. La concurrence régulière avec les forces armées continua aussi. Il en résulta « une inflation énorme de contrats, de matériels, des fabrications et même des constructions d’usines en 1942 ; un mélange inattendu qui généra des surplus ou des pénuries... et mit... certains secteurs de l’économie civile en danger jusqu’à la fin de cette même année »22. Enfin, en août 1943, un Congrès rétif et insatisfait agit selon les recommandations du comité d’investigation Truman du Sénat ; il créa encore une autre super-organisation, l’Office of War Mobilisation (OWM) et nomma à sa tête l’un des siens, James Bymes de Caroline du Sud. A cette période, toutefois, la production d’armements avait atteint le maximum désirable et le nom de l’office fut bientôt changé en celui W Office of Demobilization and Reconversion pour exprimer plus précisément ses responsabilités23. En 1943 le pouvoir de guider l’économie passa aux mains d’obscurs responsables chargés de réaliser le Controlled Materials Plan (CRP) conçu en novembre précédent. Ce fut notamment le travail de Ferdinand Eberstadt, un banquier international qui réussit le tour de force de persuader les services de l’armée et les industries d’accepter un système général d’allocation. Calqué sur le modèle britannique de rationnement des matières premières, le CRP réglementa la distribution d’acier, de cuivre et d’aluminium et, indirectement, des composants communs24. Les agences demandeuses ou les industries devaient fournir aux principaux utilisateurs des programmes de production et les utilisateurs les plus importants étaient requis de faire de même avec les utilisateurs secondaires. La distribution était aussi liée au plan de production. « Pour suivre les fournitures dans l’industrie, selon l’histoire officielle de la mobilisation industrielle, chaque lot devait porter à chaque stade de fabrication une longue identification consistant en une lettre symbole indiquant l’agence demandeuse..., quatre chiffres identifiant le programme particulier de l’agence demandeuse..., trois chiffres identifiant le programme de production particulier de l’utilisateur principal et deux chiffres indiquant le mois pour lequel l’allocation était valide... »25
21Ce système de suivi au moyen du contrôle des matières premières, qui commença à fonctionner effectivement au milieu de 1943, était semblable au système adopté par les Allemands à la fin des années trente. Cependant, au cours des mêmes mois de l’introduction du fonctionnement du CRP, Albert Speer réorienta l’économie de guerre nazie vers une approche plus régulatrice reposant sur la réduction et la simplification des produits finis. Ce système fonctionnait du haut vers le bas, en partant du produit fini, en d’autres termes, il recherchait la standardisation des composants et des économies de consommation de matières premières. Grâce aux nouvelles méthodes, la production d’armes dans le Troisième Reich atteignit son point culminant en août 194426.
22L’absence d’un tel contrôle à Washington, à vrai dire le désordre administratif prédominant, excluait un plan de production anglo-américain conjoint et une allocation de matières premières pour lesquels Jean Monnet avait fait pression sans succès27. Ainsi eut-on recours au terme « combiné » pour la nomenclature des bureaux créés pour régler les approvisionnements anglo-américains. Ils fonctionnèrent le mieux dans le secteur des matières premières où, bien que les sources étrangères aient été parfois partagées, des surplus demeurèrent souvent disponibles, particulièrement lorsque le CRP prit effet et quand le démantèlement de l’économie d’armements éliminait les carences28. Un plan commun de production ne fut jamais réalisé même après la création du CRP. En principe les États-Unis prirent dans les surplus, sur une base prioritaire, ce qui manquait aux Britanniques pour soutenir l’ordre de bataille ; en pratique, selon un rapport officiel britannique, ceci se faisait sur la base « d’un ajustement continuel » souvent déterminé par la disponibilité du tonnage maritime29.
23Les bureaux combinés, d’après le résumé des mêmes séries, « ne rendirent pas, de leur propre pouvoir, le partenariat anglo-américain efficace. En dépit de l’existence de ce mécanisme leur importance n’était pas exclusive ni prédominante la plupart du temps. Le partenariat anglo-américain existait avant la création des bureaux combinés ; il se poursuivit en dehors d’eux et au-delà d’eux, après leur création. Sa caractéristique dominante était une interpénétration réciproque des deux administrations nationales, un système reposant à de nombreux niveaux, sur des relations personnelles – fortifié parfois par des amitiés personnelles – et un fond commun d’expérience et de connaissance. Voila les fondations de ce partenariat de guerre unique »30.
24L’inclusion des Soviétiques dans le prêt-bail conduisit les Britanniques à protéger le mécanisme des bureaux combinés ; éliminant ainsi une source potentielle de conflit avec l’autre principal bénéficiaire de l’aide américaine et, pour l’ensemble de la guerre, garantissant aux Britanniques la plus large part. L’aide à l’URSS se fit sous l’autorité spéciale du Secrétaire au Trésor Morgenthau et de son adjoint, Harry Dexter White, un admirateur déclaré et un avocat inconditionnel des Soviétiques. La réciprocité était absente des relations Etats-Unis/URSS. Une fois les États-Unis d’accord pour ouvrir des quotas de marchandises, le représentant russe présentait simplement une liste de besoins et les Etats-Unis l’honorèrent en posant bien peu de questions31. Par comparaison avec la Grande-Bretagne, les cargaisons d’armements étaient d’importance secondaire dans l’aide à l’URSS32. Staline voulait et obtint beaucoup de moyens pour reconstruire son économie : matières premières, machines, usines entières. L’aide prêt-bail aux Soviétiques totalisa environ 11 milliards $ – proche du total de 13 milliards pour l’aide Marshall à l’Europe de l’après-guerre, mais beaucoup moins que les 30 milliards $ reçus par les Britanniques durant la guerre33.
25Le miracle de la production a moins de relation avec la sagacité de la politique menée à Washington qu’avec la disponibilité de matières premières. Alors que les exportations totales, résultant largement de l’assistance militaire, plus que doublèrent durant la guerre, les importations restèrent aux niveaux d’avant guerre. Charbon, pétrole et minerai de fer étaient aisément disponibles, tout comme le cuivre, grâce à de nombreuses mines non rentables qui furent rouvertes. La bauxite était aussi abondante, mais des usines électriques supplémentaires durent être construites pour produire de l’aluminium pour l’immense programme de construction aéronautique. Le Canada, second plus grand producteur mondial d’aluminium, était heureusement proche. L’échec du stockage du caoutchouc naturel en 1940-41 parut rétrospectivement presque inexplicable – 90 % de la consommation d’avant-guerre venait du Sud-Est asiatique –, mais une année de ravitaillement était disponible. Grâce en partie au rationnement, les stocks suffirent jusqu’à l’introduction de la production de caoutchouc artificiel sur une grande échelle, au début de 194334.
26En résumé, les contraintes qui limitèrent la puissance stratégique allemande, menacèrent à certains moments de détruire l’économie britannique et bloquèrent les Japonais, étaient absentes aux États-Unis. De plus, les réserves de main-d’œuvre américaines étaient relativement plus grandes que celles des autres grands belligérants35. Et, bien sûr, à l’exception d’un bombardement japonais sans succès dans la forêt d’Oregon et de quelques coups de canons inefficaces et aveugles de sous-marins allemands sur la péninsule de Demarva et les Outer Banks, les États-Unis ne furent jamais sous le feu de l’ennemi.
27Ces circonstances propices ne réduisent en rien la réputation des extraordinaires exploits de l’industrie américaine, qu’on les mesure en termes de quantité ou de qualité de production. Elle représentait la fabrication de 299 000 avions militaires ou spéciaux (un tiers de bombardiers, les deux tiers de chasseurs), la construction de 72 100 bateaux, équivalent à 8,5 millions de tonnes, et la production de 86 700 tanks36. Ces statistiques étonnantes, tout comme la rapidité de la mobilisation, l’abaissement radical des coûts de production et l’adoption de nouvelles technologies et de procédés de fabrication sont le témoignage d’une réussite sans pareille.
28Dans cette brève analyse on doit insister sur Détroit où l’industrie automobile poussa les autres à la suivre. Elle employait un demi million de personnes avant la guerre, elle était le plus grand réservoir de compétences technique et mécanique, elle consommait plus de la moitié du fer du pays, les trois quarts du verre plat, plus des deux tiers du cuir, pas moins de 80 % de son caoutchouc, pour ne pas parler des 20 % de la production totale d’acier, 10 % de la production d’aluminium, un peu plus de cuivre, et un tiers de plomb. L’industrie pétrolière était évidemment liée à l’automobile. Les fabricants de voitures et de camions produisirent environ un quart de la production totale de guerre américaine, plus de la moitié étaient des avions et des pièces détachées, mais incluait aussi des armes et, bien sûr, des véhicules blindés et chenillés de tous types. Le chef du WPB, Nelson, attribua justement cette réussite à la maîtrise des techniques de production de masse, une tradition de coopération, la persistance d’une éthique de la concurrence et d’une expertise technique unique37.
29La décision de convertir l’industrie des moteurs en industrie aéronautique date d’octobre 1940. L’association des fabricants d’automobiles, baptisée « Automotive Council for War Production », au début de 1942, organisa le processus d’adaptation avec l’assentiment et la coopération personnelle des industriels. Toutes les compagnies, sauf Ford, préférèrent se spécialiser dans la production d’assemblages et de moteurs ; à Willow Run (Michigan), Ford construisit une usine d’un mile de long et large de 250 yards, de loin la plus grande et la plus moderne en son genre. De là sortirent les premiers Consolidated Bomber de Ford en janvier 194238.
30Le recoupement de données était important en vue des résultats à obtenir. Le Conseil de l’Automobile pour la production de guerre établit un modèle « d’équipe de travail industrielle » impliquant le partage des informations sur les techniques de production de masse, les procédures de gain de temps, l’amélioration du produit, l’outillage et le développement. Des progrès techniques furent réalisés dans une variété de domaines et incluant par exemple de nouvelles méthodes pour fraiser les bielles, pour le moulage centrifugé de cylindres métalliques, le façonnage de métaux légers peu familiers, le refroidissement des surfaces dans le processus de rectifïage, la dissipation de la chaleur de friction sur les parois d’un cylindre et, dans le cas de l’usinage de l’aluminium, des améliorations spécifiques trop nombreuses pour être énumérées39.
31Les industriels de l’automobile introduisirent aussi la production de masse des moteurs d’avions et la mécanisation de l’assemblage des structures de l’Aéronautique, encore largement artisanales. Dans les usines d’avions, la coopération industrielle calquée sur les chaînes de Détroit produisit un haut degré de spécialisation de la production des pièces détachées et, dans le même temps le partage des contrats d’assemblage. Aussi, par exemple, d’une part un ralentisseur du Vultee fut monté sur le North American P. 61 Mustang et un moteur Boeing sur le B-32 Dominator de Consolidated ; alors que, d’autre part, un autre côté, Consolidated-Vultee, Douglas, Ford et North American assemblèrent le Liberator, de même que Lockheed et Consolidated le Lightning. « Notre industrie aéronautique, conclut Nelson dans son rapport, devint en réalité, une unité »40.
32Aucune autre branche de l’industrie ne vécut la même expérience que l’automobile ou l’aéronautique. Certaines étaient complètement nouvelles, comme le caoutchouc artificiel ou l’empire des constructions navales de la côte ouest de Henry Kaiser ; d’autres, comme la production de l’acier de base, restaient relativement inchangées. Étant donné que les réserves de matières premières et de main-d’œuvre, indisponible ailleurs, donnaient aux États-Unis de larges marges pour les erreurs et les mauvais calculs, Nelson a raison de souligner : « Aucune autorité centrale à Washington, même stable et ferme, n’était capable d’intégrer d’une manière aussi efficace les divers branches de l’industrie, grandes, petites, simples et complexes, comme l’ont fait ces Américains libres de leur propre volonté »41.
33A la fin des années 30, l’économiste de Harvard, Wassily Leontief, développa pourtant une méthode qui bien que requérant une certaine centralisation, aurait pu permettre de substantielles économies de main-d’œuvre, de matières premières, ainsi que des gains de production – l’analyse entrées-sorties. Elle s’appuie sur l’idée classique que tous les acheteurs sont des vendeurs et vice versa, ainsi que sur les relations relativement constantes prévalant dans une économie. Selon Leontief, « le concept de l’analyse entrées-sorties a pour base la reconnaissance du fait que toutes les interconnections possibles des différents secteurs de l’économie nationale peuvent être considérées comme des exemples spéciaux de la solution générale d’un grand système d’équations d’une matrice algébrique »42. Leontief créa aussi un outil conceptuel qui rendit facilement compréhensible l’application pratique. Il s’agissait d’un tableau, divisé en 80 ou 90 secteurs, selon les cas, avec des colonnes horizontales pour les données en entrée et des verticales pour les données en sortie. Pour déterminer quel changement dans une entrée pourrait modifier les sorties, des coefficients étaient élaborés à partir des données brutes – un immense travail de compilation. La cascade des changements à la sortie sur les entrées et celle des entrées sur les sorties ont constitué en outre une tâche de comptabilisation impressionnante à cette époque précédant l’introduction de l’ordinateur. En 1943, Leontief présenta une version complétée du premier tableau entrées-sorties, conçu pour l’économie américaine de 1939 et destinée aux organisateurs du CMP. Bien qu’il eut peu d’application immédiate après la guerre, l’armée de l’air fournit 1,5 millions $ au « Project scoop » pour élaborer un tableau de 95 secteurs pour l’année 1947, qui, grâce au développement de puissants ordinateurs fut réalisé cette même année43. Il devenait dès lors possible de déterminer comment la commande de 50 000 avions affecterait non seulement la demande en aluminium – quelque chose de relativement simple à déterminer – mais aussi les besoins en autres métaux tel que le cuivre ou, même les entrées et sorties dans les autres secteurs de l’économie. L’outil idéal cherché par Robert Nathan, Stacy May, Monnet, Purvis et d’autres impliqués dans l’établissement d’un « bilan » était désormais disponible.
III. Monnet et l’intervention américaine
34La chute de la France qui conduisit Jean Monnet à Washington fit de la Grande-Bretagne la première ligne de défense des États-Unis et rendit inévitable l’entrée en guerre de l’Amérique. Les événements extérieurs et les réactions du président Roosevelt à ceux-ci déterminèrent comment et quand cette entrée se produirait. Les choix du président dépendaient à tour de rôle du Congrès et de l’opinion publique américaine. Évidemment, Monnet n’eut aucune influence sur les Allemands ou les Japonais et peu d’impact sur ce que les Américains pensaient ou sur l’action de leurs élus. Il put cependant modifier la politique par l’entremise de ceux qui la conduisaient, même s’il est impossible de déterminer précisément l’ampleur de son influence parce que des hommes en position de pouvoir comme Félix Frankfurter, Harry Hopkins, Henry Stimson et John McCloy partageaient ses vues sur la guerre. Ce qui manquait à toutes ces personnalités était l’expérience de préparation de Monnet. Peu d’hommes dans le monde en avait plus que Monnet. Ceux qui le rencontraient à Washington manquaient rarement d’être impressionné par son talent pour saisir le point essentiel des problèmes, pour en saisir rapidement la mesure et pour trouver des concepts simples pour les décrire. L’affirmation que fait Monnet dans ses Mémoires d’avoir forgé le terme « arsenal de la démocratie » semble être apocryphe, mais elle indique une plus grande vérité : Monnet comprit peut-être plus tôt et plus profondément que presque tout le monde comment les États-Unis devraient changer et ce qu’ils devraient devenir pour répondre aux défis auxquels ils étaient confrontés.
35La contribution de Monnet à la victoire doit être considérée dans le contexte historique de l’intervention américaine. La chute de la France a convaincu la plupart des Américains que des mesures drastiques s’imposaient pour empêcher la victoire allemande. Durant l’été 1940 le Congrès multiplia par 5 les crédits de défense (les portant à 10,5 milliards $), introduisit la conscription et appuya Roosevelt en fournissant toute l’aide aux Britanniques à la limite d’entrer en guerre. L’accord de septembre prévoyant la fourniture de destroyers en échange de l’utilisation de bases, – imaginé à l’époque par un comité interventionniste de New Yorkais influents pour apaiser les Congressistes préoccupés par la défense de l’hémisphère américain – fut un pas définitif vers l’abandon de la neutralité américaine. Selon Robert Divine, « en donnant 50 navires de guerre à la Grande-Bretagne, les États-Unis venaient de déclarer publiquement leur soutien à l’Angleterre dans la guerre contre l’Allemagne »44. Le mouvement décisif vers une acceptation publique de cette politique arriva par défaut durant la campagne électorale. Le candidat républicain, Wendell Wilkie – en privé un ardent internationaliste profondément décidé à une intervention – refusa de faire un enjeu politique de l’accord des destroyers en échange des bases, isolant ainsi l’aile isolationniste de son parti. La victoire de Roosevelt eut non seulement le prêt-bail comme conséquence, mais aussi « ABC/I », un plan stratégique commun anglo-américain pour vaincre l’Allemagne nazie. Le célèbre discours de Roosevelt du 27 mai déclarant « un état d’urgence national illimité », qui avait été reporté pendant de nombreuses semaines du fait de la maladie du président, confirmait simplement le cours de la politique présidentielle45.
36L’invasion allemande de l’Union soviétique et la campagne japonaise d’agression diplomatique qui culmina par l’attaque de Pearl Harbour (et la politique américaine d’embargo qui était cause et conséquence de l’action japonaise) marquèrent le début d’une ultime étape dans l’implication des Américains. Après six semaines de peur que l’URSS s’effondre, Washington inclut les Soviets dans le programme de prêt-bail. Ses besoins, bien qu’impossibles à prévoir, étaient immenses. La planification économique comme celle qui était en cours pour le Victory Program devait s’incliner devant l’impérieux besoin d’une production d’armements maximum. En juillet 1941, l’industrie automobile se mit d’accord pour réduire la production civile d’ici la fin de l’année. L’ampleur du projet fut rapidement augmentée et le terme du service élargi. Le Congrès et la plupart des Américains réalisaient alors, toutefois avec réticence, « que le président Roosevelt avait conduit la nation au bord de la guerre »46.
37Monnet, contrairement à ce que ses Mémoires le laissent entendre, n’a vraisemblablement pas écourté la guerre d’un an. Mais il fut certainement l’un de ceux, au troisième ou quatrième banc de la politique, qui méritent d’être reconnus comme les concepteurs, les fondateurs et les responsables de l’Arsenal de la Démocratie47. Un petit nombre d’autres sont Arthur Purvis, Donald Nelson, William Knudsen, Ferdinand Eberstadt et Henry Kaiser. Les années de guerre à Washington donnèrent à Monnet une expérience formatrice de grande valeur. C’est dans son immense œuvre d’après-guerre qu’on trouve la preuve que Jean Monnet en tira avantage48.
Notes de bas de page
1 John Gillingham, Coal, Steel and the Rebirth of Europe, 1945-1955 : the Germans and French from Ruhr Conflict to Economie Community, New York 1991, p. 96.
2 Parmi eux François Duchêne, Jean Monnet. The First Statesman of Interdependence, New York 1994, pp. 83-87 ; Jean Monnet, Memoirs, Londres 1978, pp. 150-177 ; Robert R. Nathan, « An unsung Hero of World War II », in Douglas Brinkley, Clifford hackett (éd.), Jean Monnet and the Path to European Union, New York 1991, pp. 67-85 ; Éric Roussel, Jean Monnet, 1888-1979, Paris 1996, pp. 252-279.
3 Industrial Mobilization for War. History ofthe War Production Board and Predecessors Agencies, 1940-45, vol. 1 : Program and Administration, Washington DC, 1947, p. 134.
4 H. Duncan Hall, North American Supply, London 1955, 264 p.
5 Industrial Mobilization for War (voir n. 3), p. 135.
6 Donald Nelson, Arsenal of Democracy. The Story of American War Production, New York 1946, p. 137.
7 Ibid., p. 138.
8 Gillingham (voir n. 1), p. 89.
9 Harold G. Vatter, The US Economy in World War II, New York 1985.
10 Louis Fischer, Men and Politics : An Autobiography, New York 1941, pp. 641-658.
11 Stuart Chase, Goals for America : A Budget of our Needs and Resources [Guidelines to America’s Future as Reported to the Twentieth Century Fund], New York 1942.
12 Alan Brinkley, The End of Reform. New Deal Liberalism in Recession and War, New York 1995.
13 Riches personnalités américaines au service du gouvernement pour une rémunération symbolique de un dollar par an.
14 Bureau of the Budget, The United States at War : Development and Administration of the War Program by the Fédéral Government, Washington DC, 1946, p. 112.
15 Vatter (voir n. 9), p. 17.
16 Ibid., p. 7.
17 Ibid.
18 Bruce Catton, The Warlords of Washington ?, pp. 13-65.
19 Vatter (voir n. 9), p. 33.
20 Catton (voir n. 18), p. 40-50.
21 Vatter (voir n. 9), p. 72.
22 Bureau of the Budget (voir n. 14), pp. 461-502.
23 Ibid., p. 306 et sq.
24 Industrial mobilization (voir n. 3), pp. 464-465.
25 Ibid.
26 Albert Speer, Inside the Third Reich, New York 1970.
27 Monnet (voir n. 2), p. 74.
28 Hall (voir n. 4), pp. 371-374.
29 Ibid., p. 306.
30 W. Keith Hancock, Margaret M. Gowing, British War Economy, Londres 1949, pp. 400-401.
31 David Rees, Harry Dexter White, A Study in Paradox, New York 1973 ; George D. Herring, Aid to Russia, 1941-1946 : Strategy, Diplomacy. The Origins of the Cold War, New York 1973, pp. 26-48.
32 Herring (voir n. 31), pp. 145-178.
33 Hancock, Gowing (voir n. 30), p. 375.
34 Industrial mobilization (voir n. 3), pp. 355-383.
35 Ibid., p. 965.
36 Ibid., p. 962.
37 Nelson (voir n. 6), pp. 212-216.
38 Ibid., p. 220.
39 Ibid.
40 Ibid., p. 235.
41 ibid., p. 241.
42 Wassily Leontief, « The Structure of the United States Economy », Scientific American, April 1965, v. 212/4, 11.
43 Ibid., p. 3.
44 Robert A. Divine, The Reluctant Belligerent : American Entry into World War II, New York, 2e éd., 1979, p. 95.
45 Ibid., p. 110.
46 Ibid.., p. 141.
47 Monnet (voir n. 2), p. 177 ; Divine (voir n. 44), p. 141.
48 Nous remercions M. Michel P. Montet, attaché commercial auprès de l’ambassade du Canada à Paris pour son aide apportée à la traduction de cette contribution (G.B./A.W.).
Auteur
Professeur à l’Université de Missouri, St. Louis.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
L’Europe des Français, 1943-1959
La IVe République aux sources de l’Europe communautaire
Gérard Bossuat
1997
Les identités européennes au XXe siècle
Diversités, convergences et solidarités
Robert Frank (dir.)
2004
Autour des morts de guerre
Maghreb - Moyen-Orient
Raphaëlle Branche, Nadine Picaudou et Pierre Vermeren (dir.)
2013
Capitales culturelles, capitales symboliques
Paris et les expériences européennes (XVIIIe-XXe siècles)
Christophe Charle et Daniel Roche (dir.)
2002
Au service de l’Europe
Crises et transformations sociopolitiques de la fonction publique européenne
Didier Georgakakis
2019
Diplomatie et religion
Au cœur de l’action culturelle de la France au XXe siècle
Gilles Ferragu et Florian Michel (dir.)
2016