Avant-propos
p. 9-11
Texte intégral
1Organiser un colloque sur Jean Monnet, l’Europe et les chemins de la Paix répondait aux vœux anciens de quelques historiens. Les progrès de la construction européenne doivent beaucoup à Monnet. Mais son action était souvent présentée comme allant de soi. Il aurait été l’inspirateur de l’intégration européenne, le père de l’Europe unie. Nous savions bien que Monnet venait après Briand, Coudenhove-Kalergi ou Churchill. Il n’avait pas participé au Congrès de La Haye, il n’était pas membre du Mouvement européen. Quelle était son rôle dans l’unité européenne ?
2Le colloque de Paris, tenu du 29 au 31 mai 1997, a répondu à la question du rôle de Monnet dans l’établissement de la paix en Europe par la construction européenne et par l’action internationale depuis le temps de la SDN. Il fallait proposer à des historiens compétents de mener une recherche approfondie dans les archives et mémoires des États, des grands décideurs, d’associations privées et de Monnet lui-même à propos des règlements de la paix en Europe après la Première Guerre mondiale, de la lutte contre le nazisme, de l’organisation politique et économique de l’Europe après les libérations, de l’entente franco-allemande, de l’unité européenne du plan Schuman à l’Euratom, enfin d’apprécier l’impact sur les hommes politiques du Comité d’Action pour les États-Unis d’Europe de 1955 à 1975. L’objectif était de sortir de la célébration ou de l’anathème, pour faire un vrai travail d’historien. On notera que ce colloque a été le premier colloque d’histoire sur Jean Monnet. Le lecteur appréciera par lui-même les conclusions des historiens et les remarques des témoins. En tous cas nous sommes certains que le rôle de Monnet aura été précisé et par là même démythifié.
3Les organisateurs tenaient à faire cet inventaire sur une base européenne. Quoi de plus significatif que l’unité retrouvée des Européens ? Le noyau franco-allemand a fonctionné encore une fois, puisque la coopération universitaire de l’Institut Pierre Renouvin de Paris I et de l’Institut Historique Allemand de Paris a donné ce résultat, en relation avec la Fondation Jean Monnet pour l’Europe de Lausanne, conservatrice des archives de Jean Monnet. Les réseaux universitaires européens ont été mis à contribution efficacement pour une coopération intellectuelle de grande ampleur qui a commencé en avril 1997 à Lausanne quand certains de ceux qui avaient connu Monnet ont bien voulu accepter de donner leur témoignage. Les historiens ont pu se servir de ces entretiens pour le colloque.
4Les contributions scientifiques sont venues de toute l’Europe et même des États-Unis ; les chercheurs et professeurs, spécialistes d’histoire européenne et d’histoire de la construction européenne ont bien voulu donner de leur temps à la préparation de ce colloque. La mémoire d’un personnage si éminent n’était, en tout cas, aucunement contradictoire avec une recherche scientifique poussée sur son action.
5La table ronde de fin de colloque avait son originalité et sa fonction : mettre en parallèle la réflexion des historiens, le témoignage de certains acteurs et comprendre comment l’action de Jean Monnet pouvait encore guider des décisions, car Monnet a une postérité pour les inventeurs de l’Europe actuelle. Les interventions de hauts responsables politiques ont été les bienvenues, à commencer par celle de l’ancien chancelier Helmut Schmidt. Leur témoignage a manifesté l’immense pouvoir d’influence de Jean Monnet sur la classe politique européenne, parfois même au delà de ce que Monnet a réellement dit. Sa présence intellectuelle parmi eux est pour les historiens source d’une réflexion plus générale et d’une admiration aussi : l’action de Monnet est devenue pour les élites pro-européennes, sinon pour les citoyens européens, un creuset conceptuel ou un modèle tout à fait étonnant. Les uns et les autres auront contribué à mieux faire comprendre Jean Monnet au service d’une action internationale pacifique en ce siècle si terrible par ailleurs. Pour le déroulement fructueux des débats nous sommes redevables à ceux qui ont bien voulu accepter la tâche de diriger les séances et la table ronde finale : MM. René Girault (Paris), Horst Môller (Institut für Zeitgeschichte, Munich), Raymond Poidevin (Strasbourg), Gilbert Trausch (Luxembourg), Robert Frank (Paris).
6De nombreuses institutions ou organisations ont contribué au financement de ce colloque international et à la publication qui en est sortie. Sans leur soutien généreux rien n’aurait été possible : la DG X et le Secrétariat général de la Commission européenne auprès de qui les premiers soutiens ont été acquis ; la ASKO Europa-Stiftung (Sarrebruck), la Friedrich-Ebert-Stiftung (Paris/Bonn), l’institut Historique Allemand de Paris, l’Office Franco-Allemand d’Échanges Universitaires (Paris/Bonn) pour l’Allemagne ; l’Université de Cergy-Pontoise, le Ministère de l’Éducation nationale, le CNRS ainsi que le Conseil Scientifique et la Commission des Publications de la Sorbonne de l’Université de Paris I (Panthéon-Sorbonne) pour la France ; l’Institut d’études européennes de l’Université catholique de Louvain-la-Neuve pour la Belgique et, enfin, le Centre d’études et de recherches européennes Robert Schuman de Luxembourg. Nous tenons à leur exprimer nos plus vifs remerciements.
7Les séances du colloque ont pu se tenir dans deux endroits prestigieux de Paris : le Palais du Luxembourg et l’Institut Historique Allemand de Paris grâce à leur président respectif, MM. René Monory et Wemer Paravicini. L’organisation de notre manifestation ainsi que la publication des actes a pu bénéficier, on s’en doute, d’autres collaborations diverses et variées. En particulier, que Mme Cécile Vrain, doctorante à Paris-I, Mmes Brigitte Brachet, Sabine Bröhl, Ursula Hugot, Margarete Martaguet, Ulrika Saga de l’Institut Historique Allemand trouvent ici la manifestation de notre chaleureuse gratitude pour leurs aides respectives.
8Ce colloque, avons-nous dit, a témoigné de la coopération franco-allemande dans le domaine universitaire. A cette coopération s’ajoute la rencontre si utile avec la Fondation Jean Monnet pour l’Europe qui conserve les archives de Jean Monnet. La Fondation, chargée par Jean Monnet de conserver et de faire connaître la documentation dont il s’est servi durant des années, mais aussi ses réflexions et décisions, a su favoriser le travail de recherche internationale nécessitée par ce colloque. Nous remercions toute l’équipe de la Ferme de Dorigny pour ce voyage entre histoire et mémoire à propos de Jean Monnet.
9 Aucun des historiens ayant participé à ce colloque et ayant fourni un texte ici publié ne peut dire que le sujet du colloque a été épuisé. Il faut poursuivre ces travaux sur la place si éminente et si originale de ce Français des Charentes, épris de paix pour son temps et surtout pour cette Europe qu’il ne pouvait imaginer désunie, c’est-à-dire en guerre. Seuls désormais les citoyens de l’Union européenne et de la plus grande Europe peuvent accomplir l’idéal tracé par Monnet.
10Paris, en juin 1998
Auteur
Institut Historique Allemand, Paris.
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