Chapitre 8. L’expansion au service de la « grandeur » ? (1960-1978)
p. 275-331
Texte intégral
1À partir du milieu des années 1950, les pouvoirs publics enclenchèrent une dynamique exportatrice durable destinée à soutenir le maintien d’un flux important d’importations, indispensables pour nourrir la croissance économique nationale. Les piliers édifiés à la Libération furent renforcés et diversifiés : première régionalisation du dispositif public d’appui, élargissement de la palette des procédures financières, création d’un secrétariat du Commerce extérieur. Dans une large mesure, la IVe République finissante porta les aspirations et formula les moyens d’action et les finalités d’une politique commerciale extérieure qui s’épanouit dans les décennies ultérieures. Le recul de la zone franc dans les échanges extérieurs français, amorcé, en 1953, au profit de la zone européenne1, fut amplifié par l’entrée en vigueur de traité de Rome le 1er janvier 1958 et par l’achèvement du processus de libération des échanges industriels au sein de la zone constituée par les pays de l’OCDE et de la zone dollar. L’équilibre auquel tendit la balance commerciale française à partir de 1959 vint couronner les efforts antérieurs déjà accomplis par les entreprises et le dispositif public. Si la tendance au déficit réapparut rapidement, il n’en demeura pas moins que se répandit une ambiance nouvelle autour de ces questions, entretenue par les pouvoirs publics, faite de mobilisation des acteurs économiques et d’opérations destinées à sensibiliser l’opinion publique.
2La politique du commerce extérieur fut intégrée au dessein plus vaste de renforcement de l’indépendance de la France dans un contexte de compétition internationale accrue. À côté de l’affrontement idéologique et politique des blocs occidental et soviétique, il y eut un affrontement économique qui trouva dans les pays en voie de développement un champ d’expansion nouveau. Au sein même du bloc occidental, les partenaires politiques rivalisèrent dans le domaine commercial pour se tailler de nouvelles parts de marché. Dès lors, la France n’échappa pas à ce mouvement qui fit de la diplomatie commerciale une arme politique, détenue par les États ou par les organisations internationales. La plupart du temps restrictive du fait de l’édiction d’une politique d’embargo vis-à-vis de pays mis au ban de la communauté internationale2, cette arme se fit aussi intrusive afin de pénétrer de nouveaux marchés et d’y exercer une influence sur d’autres États.
3Durant cette période, les États tinrent une place centrale comme instances régulatrices des échanges, qu’ils aient agi dans un cadre bilatéral ou multilatéral. Néanmoins les organismes privés, déjà très présents, eurent un rôle moteur dans l’impulsion ou l’inflexion des politiques mises en œuvre : ils furent des acteurs à part entière de la diplomatie commerciale et pas seulement parce qu’ils appuyèrent les démarches gouvernementales. Dans le cas français, il est frappant de constater que les banques et entreprises françaises devancèrent les pouvoirs publics tant dans l’ouverture d’un dialogue avec les pays de l’Est du continent européen que dans le redéploiement partiel de leurs activités dans des régions n’appartenant pas à la zone franc. En France comme en Italie, comme en Allemagne fédérale ou en Grande-Bretagne, la redéfinition des objectifs économiques nationaux dut tenir compte de la logique commerciale et financière des entreprises. Dans le cas français, une véritable convergence s’établit au sein de l’administration sur la nature de ces objectifs qui devaient à la fois accompagner la politique d’indépendance nationale et d’autonomie énergétique de la France et participer à la rénovation de l’image de celle-ci dans le monde en valorisant, à côté des valeurs traditionnelles véhiculées par les instruments classiques de sa diplomatie culturelle, ses capacités technologiques. La diplomatie commerciale française eut ainsi une véritable finalité politique. Établir des performances sur les marchés extérieurs fut un acte d’affirmation de la puissance française dans le monde ; diffuser sa culture technique fut une des voies renouvelées de sa politique d’influence.
Les outils de la grandeur dans le domaine commercial
4Les années 1960 virent le développement d’une communication inédite sur le commerce extérieur français et une mobilisation nouvelle des entreprises pour qu’elles se tournent vers les marchés les plus lointains. Sur le terrain, les diplomates ne pouvaient que constater les difficultés des entreprises françaises à rompre avec cette caractéristique des échanges français : le tropisme du « marché privilégié ». Quelle que fût la période considérée, s’observait une forte concentration géographique des exportations françaises. Celle sur la zone impériale, accrue dans les années 1930, puis sur la zone franc, composée des DOM-TOM et d’une quinzaine de colonies africaines à partir de 1945, céda la place à la fin des années 1950 à une concentration nouvelle des ventes dans les pays européens voisins de la France : l’Allemagne, l’Union économique belgo-luxembourgeoise, les Pays-Bas, l’Italie, etc.3. En 1959, la France réalisait 31 % de ses ventes dans la zone franc et 39,8 % dans la zone de la CEE ; dix ans plus tard, les pourcentages étaient respectivement de 11,5 % et de 47,5 %. À partir de 1960, on constata une dégradation nouvelle des échanges avec les États-Unis et avec le Canada, qui allait s’étendre à d’autres grands pays industrialisés. Dans quelle mesure l’importance du déficit avec les pays industrialisés ne reflétait-elle pas l’inadaptation des entreprises industrielles françaises ?
La mobilisation des partenaires privés
5Depuis la fin des années 1940, les conseillers commerciaux des ambassades incriminaient la qualité des produits français. Ceux-ci souffraient toujours des difficultés d’approvisionnement et de fabrication engendrées par la guerre, d’une certaine approximation dans leur réalisation par rapport aux échantillons présentés, voire de défauts dorénavant inacceptables par les marchés développés. La publicité donnée aux produits français devait être modernisée : « Nos catalogues sont fréquemment mal présentés, mal rédigés, parce qu’ils contiennent trop de ces affirmations de supériorité, mal étayées, et trop peu d’indications techniques, de références, d’attestations, d’analyses4. » La documentation devait également tenir compte de nombreux détails, comme des mesures de longueur, de poids ou de volume usitées dans les pays acheteurs. Les prix français devaient être fermes, indiqués franco de port et, surtout, ajustés à ceux pratiqués par la concurrence internationale. D’autre part, les services commerciaux de la majorité des entreprises s’avéraient encore insuffisants selon les conseillers diplomatiques. La correspondance, qui n’était trop souvent encore assurée qu’en français, était en outre traitée avec retard, voire laissée sans réponse. Seule une minorité d’entreprises pouvaient entretenir un représentant exclusif sur place, voire créer une filiale. Aussi le rôle des PEE demeurait essentiel pour aider les firmes françaises à trouver un représentant, en leur faisant parvenir des renseignements de notoriété sur les candidats, en mentionnant les maisons françaises ou étrangères déjà représentées par ces derniers. Enfin les entreprises devaient tenir compte de manière plus attentive des réclamations déposées par les clients et leur donner satisfaction d’une manière ou d’une autre. Ces considérations valables pour tous les marchés se doublaient de recommandations spécifiques dès lors que les entrepreneurs français abordaient des pays « neufs ». Ces marchés très particuliers étaient très ouverts sur l’extérieur et tenus par un petit nombre de négociants expérimentés et très bien informés des moindres variations de prix sur le marché mondial5. La France avait dès lors un gros effort à produire pour faire connaître ses produits industriels et rompre avec l’image qui lui était traditionnellement accolée d’exportatrice de produits de luxe.
6Au début des années 1960, hélas, les difficultés endémiques des entrepreneurs français, qui devaient dorénavant faire face à la mise en place du Marché commun, perduraient. Dans la seule Allemagne de l’Ouest, ils semblaient encore peu connaître les réseaux de vente allemands, faisaient très peu de publicité pour leurs produits et n’ouvraient encore que trop peu de succursales et de services après-vente6. L’organisation du Comité des foires apparaissait inadaptée aux besoins d’expansion dans un espace économique intégré : « L’étroite imbrication des économies entre les pays du Marché commun ne s’accommode plus des méthodes de promotion de ventes en usage avec l’Amérique latine, les pays Scandinaves ou même les États-Unis7. » Dans le même ordre d’idées, la diplomatie française soulignait l’inertie du Conseil national du patronat français qui semblait avoir tablé sur l’échec de la candidature du Royaume-Uni à la CEE en n’entreprenant aucune étude sur le marché britannique, alors que le Board of Trade avait déjà déployé un effort d’investigation sur le marché français8. Autre signe des lenteurs de l’adaptation, le niveau encore trop faible des investissements intercommunautaires imputé à l’attitude circonspecte des industriels face aux perspectives d’intégration européenne.
7Sur les autres marchés, les faiblesses structurelles des entreprises continuaient également à être soulignées. Informé par le conseiller commercial pour les pays de la mer Rouge, le quai Branly attira en décembre 1965 l’attention du directeur du Service exportation de la société André Citroën sur la faiblesse de l’activité de ses représentants locaux dans certains pays du Proche-Orient : « L’activité de votre agent à Khartoum, Bittat et Cie, serait à peu près nulle. Il serait impossible, pour les possesseurs de voitures Citroën, de se procurer les pièces de rechange indispensables, au point que notre ambassadeur dans ce pays manifeste son regret d’avoir acheté une I.D.9 » Face à cette situation, l’État considéra qu’il lui appartenait de pallier les insuffisances des entreprises et entreprit de définir, de concert avec elles, une politique destinée à soutenir leur expansion sur les marchés extérieurs. Il fit des « Journées du commerce extérieur » le premier instrument d’une politique de communication interne vers les entreprises. Le secrétaire d’État aux Affaires économiques Bernard Lafay s’appuya sur la chambre de commerce de Paris et son puissant président Jacques Fougerolle, représentant du secteur du bâtiment et des travaux publics10, élu en janvier 1950, pour mettre sur pied une première Semaine du commerce extérieur en mars 1954 à laquelle le président du Conseil Edgar Faure souhaitait donner « un très grand retentissement » dans le cadre du Plan d’expansion de dix-huit mois présenté en février 195411.
8La communication mise en œuvre passa d’abord par la vulgarisation de nouveaux mots d’ordre, censés hâter la conversion culturelle des entrepreneurs. Répudiant la vision libre-échangiste mécaniciste classique – « L’exportation-réflexe, celle qui permet la satisfaction des besoins-limites en matières premières ou en biens d’équipement, serait à la mesure médiocre d’un pays découragé, vieilli »– et la vulgate keynésienne qui avait prévalu depuis la Libération, l’État entendit faire de l’exportation plus qu’un élément d’équilibre de la balance des paiements12, le véritable moteur de la croissance économique : « Non, nous sommes contraints d’exporter parce que nous avons choisi l’expansion : l’essor de notre industrie, celui de notre agriculture dépendent de l’ouverture de débouchés extérieurs ; un marché plus étendu est la condition d’un niveau de vie plus élevé pour tous les Français13. » À l’idéologie des grands équilibres succédait en quelque sorte celle de la croissance continue, qui reléguait progressivement au second plan l’objectif de l’équilibre rigoureux des comptes publics. Les Journées du commerce extérieur furent ainsi l’occasion de délivrer, à partir de 1954, un certain nombre de messages, repris dans la presse14, visant à instaurer un nouvel état d’esprit chez les entrepreneurs, et, au-delà, dans la société. L’idée d’une intégration croissante des économies fut au cœur des discours gouvernementaux : « Il n’y a plus aujourd’hui, à proprement parler, d’économie intérieure et d’économie extérieure, mais l’une et l’autre sont étroitement liées15. » Contrairement à d’autres nations comme le Royaume-Uni, l’Allemagne, la Suède qui, par nécessité historique, avaient dû exporter, l’exportation était restée en France une « collection d’efforts insuffisamment concertés16 ». Ce que les pouvoirs publics entendaient dorénavant susciter, c’était « cette cohésion qui donnera[it] à nos exportations le caractère d’un grand mouvement national ». Mais l’appui des pouvoirs publics devait s’effacer devant l’initiative privée, clé de voûte de l’expansion : « C’est sur l’initiative, l’esprit de compétition, le goût du risque des producteurs et des professionnels que nous devons fonder nos espoirs17. »« Expansion », « croissance », « initiative » et « goût du risque », tels furent les mots d’ordre du discours volontariste marquant l’entrée de la politique économique extérieure française dans une nouvelle phase. Dans cet esprit, la création des « Oscars de l’exportation » par l’hebdomadaire Les Informations eut lieu en 1956 : des mentions d’excellence devaient être décernées aux entreprises ayant pris une part significative dans l’effort d’expansion économique au-delà des frontières18.
9Autre signe d’un état d’esprit encourageant les initiatives hors des frontières hexagonales : la généralisation du réflexe comparatif. Les principaux dispositifs d’appui au commerce extérieur firent l’objet d’un examen systématique qui permit en particulier de souligner l’avance prise par de nombreux pays en matière de décentralisation de la gestion des problèmes du commerce extérieur19. En Grande-Bretagne, le ministère du Commerce disposait de services locaux dans douze régions, au sein desquels œuvraient des Export Regional Officers. Ces fonctionnaires spécialisés remplissaient essentiellement un rôle d’informateurs, mais pouvaient aussi, avec l’appui des chambres de commerce locales, aider à régler les problèmes des exportateurs. En Allemagne, l’appui aux entreprises était confié aux chambres de commerce et aux organismes patronaux.
La régionalisation du dispositif public français
10Dans les faits, il revint aux entrepreneurs, distingués par le titre de conseillers du commerce extérieur de la France, de contribuer à porter sur le devant de la scène l’impératif extérieur que les premiers débats parlementaires sur la décentralisation tendaient à délaisser, et de lier aménagement du territoire et intégration accrue dans l’espace communautaire et international. Le thème, déjà ancien, s’inscrivait dans un mouvement amplifié par la parution en 1947 de l’ouvrage de Jean-François Gravier, Paris et le désert français. Pour y remédier, Eugène Claudius-Petit avait créé en 1949 une direction de l’aménagement du territoire au sein de son ministère de la Reconstruction et de l’Urbanisme. En février 1963, la création de la DATAR, Délégation à l’aménagement du territoire et à l’action régionale, confiée à Olivier Guichard et rattachée au Premier ministre, vint confirmer la volonté étatique. Elle devait coordonner les efforts des différents ministères en matière d’action régionale20. Le congrès de Cannes des conseillers du commerce extérieur en juin 1963 eut une influence certaine pour inciter à la régionalisation du dispositif public d’aide au commerce extérieur21. Leur préoccupation rencontra celle du quai Branly, soucieux de renforcer son efficacité. Le CNCE avait fait jusque-là l’objet de mesures insatisfaisantes. En 1954, il apparaissait encore relativement sous-développé par rapport à sa principale référence, l’Institut italien du commerce extérieur22. À partir de 1957, le comité de direction s’ouvrit aux représentants de tous les ministères intéressés par le commerce extérieur : Affaires étrangères, Finances, Affaires économiques, Industrie, Agriculture et Transports23. Maître des requêtes au Conseil d’État, proche collaborateur d’Edgar Faure, Jacques Duhamel en devint le délégué général par un arrêté du 4 janvier 1960 et entreprit de le réformer24. Le CNCE se vit accorder le statut d’établissement public industriel et administratif (EPIC) pour disposer d’une plus grande souplesse de fonctionnement et de gestion, en particulier dans ses relations avec les milieux professionnels25. Son directeur général s’imposa comme une personnalité centrale à partir de cette date26. Haut fonctionnaire nommé par le ministère de l’Économie et des Finances, il s’appuyait sur deux secrétaires généraux, également fonctionnaires, détachés auprès du Centre pour quatre ans. De 1962 à 1963, Jean Filippi succéda à J. Duhamel, puis le poste demeura quelques mois sans locataire. Tour à tour, les noms de Max Fléchet, de Wilfrid Baumgartner, puis d’Antoine Pinay furent avancés dans la presse27. La nomination d’Hubert Roussellier vint évidemment donner aux professionnels un signe fort de l’intérêt nouveau que portait l’État à l’action du Centre.
11Si l’exercice est difficile, il est impossible de ne pas évoquer ce fonctionnaire méconnu, à la personnalité flamboyante, sur lequel abondent les témoignages enthousiastes et contradictoires, et dont le nom est resté associé à la renaissance du commerce extérieur français après 1945. Pour sa génération, Roussellier occupa une place à part dans l’administration : il fut l’homme de l’exportation française, celui qui œuvra pour le développement de la France à l’étranger en relançant de grandes manifestations, et un interlocuteur privilégié du patronat français28. Le service de l’État était une tradition familiale. Son père Amédée Roussellier avait été membre du Conseil d’État. Il avait occupé la fonction de délégué général du haut-commissariat français installé à Coblence en 1920, au sortir de la Première Guerre mondiale29. C’est une nouvelle occupation française en Allemagne que le fils eut à gérer après 1945, nommé sous-directeur du Service des affaires allemandes de la DREE. Titulaire d’une licence de droit, diplômé de l’École libre des sciences politiques, Hubert Roussellier avait auparavant débuté sa carrière en 1936 comme rédacteur principal au sein du ministère du Commerce et de l’Industrie. C’est à cette époque qu’il rencontra Michel Debré, qui lui exprimera à plusieurs reprises son amitié dans ses mémoires30. Membre actif de la Résistance, il partit en février 1943 comme engagé volontaire en Algérie. Michel Debré le retrouva à Chartres, peu après la Libération, à la tête d’un bataillon de la 2e DB31. Roussellier poursuivit à partir de 1945 une ascension rapide au sein du nouveau ministère de l’Économie nationale. Sa maison de campagne, où gravitait toujours une foule d’amis, se trouvait à Héricy, près de Fontainebleau, près de celles d’autres hauts fonctionnaires de l’époque, tels Paul Delouvrier, Stéphane Hessel ou François-Xavier Ortoli32. Après avoir dirigé le service de l’Expansion économique à l’étranger, il quitta donc la DREE en février 1963 et remplaça Jacques Duhamel à la direction générale du CNCE.
12Au même moment, André Grandpierre, président honoraire de Pont-à-Mousson, fut nommé président du Centre en juillet 1964. En 1963, la mission de celui-ci fut redéfinie : il devait « orienter et coordonner les activités des organismes publics et parapublics participant au développement des exportations françaises33 », en l’occurrence, l’action des chambres de commerce françaises à l’étranger ainsi que des organismes parapublics du dispositif français : le Comité permanent des foires et manifestations économiques à l’étranger (CPFMEE) créé en 1923, la SOPEXA, Société pour l’expansion des ventes des produits agricoles et alimentaires, nouvellement créée en 1961, dans le cadre défini par la loi d’orientation agricole du 5 août 1960 pour promouvoir tant à l’étranger qu’en France les produits agricoles et alimentaires français34.
13Centré jusque-là sur son rôle d’informateur – dans la continuité de l’ancien ONCE –, le CNCE développa enfin une mission de soutien aux entreprises. Si les PME « ne venaient pas à l’information, l’information viendrait à elles », déclarait Hubert Roussellier35. Progressivement, le Centre commença à réaliser, à la demande des entreprises, des études de marché spécialisées sur un produit ou un secteur particulier. En 1965, un service d’assistance aux entreprises fut mis en place pour coordonner les actions de prospection collective menées par les professionnels dans les pays étrangers : la direction des programmes et opérations (DPO). Il s’agissait d’orchestrer des « actions concertées », d’inciter à terme à la création de groupes d’exportateurs. Roussellier engagea des prospecteurs contractuels, installés auprès des PEE dans les pays à niveau de marché comparable (Grande-Bretagne, Scandinavie, Canada, États-Unis, etc.). En 1966, ils étaient une quinzaine chargés d’évaluer les marchés porteurs, puis d’aiguiller au mieux les entreprises françaises. Surtout, Roussellier accentua le mouvement de décentralisation du CNCE. Depuis la fin des années 1940, il existait une dizaine de délégations régionales du Centre. À partir du milieu des années 1950, les pouvoirs publics annoncèrent la « provincialisation des organes du commerce extérieur », afin de stimuler les petites et moyennes entreprises françaises, ainsi que la création de centres régionaux du commerce extérieur appelés à prolonger en province l’action du CNCE36. De 1956 à 1958, le Centre mit en place un réseau complet de délégations régionales, gérées par les régions économiques, et de correspondants agréés auprès de certaines chambres de commerce, qui couvrait la totalité des régions économiques. Au 30 juin 1958, il y avait 19 délégations régionales et six correspondants au Havre, à La Rochelle, à Nîmes, à Nice, à Mulhouse et à Besançon37. Leur rôle fut d’intensifier immédiatement la prospection dans leur circonscription des entreprises pouvant présenter un intérêt pour l’exportation. Dans la même logique – « rendre l’exportation plus accessible à l’exportateur, en rapprochant de lui les informations nécessaires, en facilitant ses contacts avec les clients étrangers, en suscitant éventuellement des groupements de producteurs38 »–, il fut créé des postes de conseillers commerciaux en région. André Grandpierre obtint en 1966 qu’un « conseiller commercial en mission régionale » vînt s’établir à Nancy pour superviser le commerce extérieur des régions de l’Est de la France. Le premier nommé à ce poste fut Pierre Gudin du Pavillon, en janvier. Puis le suivirent en région la même année, en février, Pierre Mouterde à Lyon, et, en octobre, Édouard Secrétan à Bordeaux ; en juillet 1967, Jean-Pierre Lescuyer fut nommé à Rennes, et, en octobre 1968, ce fut le tour d’André Sellier, nommé à Lille39. Leurs services constituèrent l’embryon des directions régionales du commerce extérieur, créées en 1982. Jusqu’à cette date, ils fonctionnèrent de manière assez informelle. Les conseillers en mission disposaient de beaucoup d’autonomie dans leurs relations avec les chambres de commerce, les conseillers du commerce extérieur et les organismes professionnels. À la fin des années 1960, le CNCE apparaissait donc comme une structure rénovée par l’action conjointe de plusieurs hommes : son président Grandpierre, son directeur général Roussellier, ses deux secrétaires généraux, les conseillers commerciaux Georges Lacombe, nommé en février 1967, et Henri Chazel, nommé en 1969. Ce dernier, demeuré seul secrétaire général, désireux de moderniser l’image de marque du Centre, convainquit Roussellier de modifier l’appellation de ce dernier en Centre français du commerce extérieur, afin d’affirmer son identité dans le reste d’un monde où l’anglais s’imposait comme la langue véhiculaire40.
14Enfin, l’on procéda à la redéfinition des missions des conseillers du commerce extérieur par le décret du 22 septembre 1966. À côté de leur mission consultative traditionnelle, une nouvelle mission leur était conférée : une mission d’animation du commerce extérieur, particulièrement en province et en direction des petites et moyennes entreprises. Négociant de produits chimiques et industriels, président du Comité Alsace des conseillers du commerce extérieur, Philippe Orttner expliqua que le souhait étatique était que les conseillers les aident « à apprendre aux petites et moyennes entreprises à travailler sur les marchés étrangers, non seulement dans le domaine des grands travaux de l’équipement, de l’industrie lourde, mais aussi au niveau des biens de consommation et des firmes moins importantes de province, celles qui ne se sont pas encore intéressées aux marchés extérieurs et qui pourraient le faire si on les aidait41 ».
La création d’un secrétariat au Commerce extérieur
15Les années 1960 marquèrent ainsi la naissance d’une préoccupation nouvelle des pouvoirs publics : susciter l’engagement des petites et moyennes entreprises en faveur de l’exportation. L’État chercha à leur donner un interlocuteur politique capable de les écouter et de les stimuler. Les principaux groupes de pression des industries exportatrices se déclaraient favorables de longue date à la création d’un ministère du Commerce extérieur. Roger Pichard du Page, directeur du Comité d’action et d’expansion économique (CAEE)42, et Robert Altermann, vice-président de l’Union des industries françaises exportatrices (UFIE), l’avaient réclamée, par exemple, lors d’un déjeuner-débat organisé par la Société de chimie industrielle en février 195343. Relayant leurs demandes, l’Assemblée nationale fut une tribune privilégiée pour l’expression de vœux en ce sens. Une première résolution avait été déposée le 4 juillet 1952 sur son bureau. Le Comité national des conseillers du commerce extérieur de la France formula le 23 décembre 1952 un souhait analogue. En juin 1953, ce fut le tour du Conseil économique et social. Le député Joseph-André Hugues, chargé d’un rapport sur la réforme du commerce extérieur, se prononça publiquement en 1953 pour la création d’un grand ministère chargé du Commerce intérieur et extérieur au nom d’une vision globale des intérêts économiques français44. L’actualité de la question fut aussi soulignée par le ministre Lafay en 1954 : « Il n’est pas exagéré de parler chez les parlementaires et les professionnels d’un véritable courant d’opinion en faveur d’un ministère du Commerce extérieur, qui regrouperait des services actuellement dispersés entre les Affaires étrangères, les Finances, les Affaires économiques et les ministères techniques45. » Dans la foulée, Joseph-André Hugues et d’autres députés déposèrent en juillet 1954 une proposition de loi visant à unifier les services assurés par l’État en un ministère du Commerce extérieur46. Hugues mit en cause tour à tour la direction des finances extérieures, la direction des affaires économiques et financières, les Services des ministères techniques. « On a vu des fonctionnaires de la direction des finances extérieures convoquer des dirigeants d’industries exportatrices et leur donner des instructions impératives pour détourner, sans délai, leurs exportations sur telle zone monétaire ou sur tel pays. Il y a incontestablement, dans ces errements, confusion d’autorité et de responsabilité ». Il contesta la « création, au Quai d’Orsay, d’une direction qui est pratiquement la réplique de la direction des relations économiques extérieures du ministère des Affaires économiques. Au lieu de se borner à plaider un dossier déjà tout préparé, les fonctionnaires du Quai d’Orsay l’instruisent à nouveau ». Il dénonça le rôle des ministères techniques qui avaient construit dans leurs services « des bureaux analogues à ceux du ministère des Affaires économiques qui étudient les marchés, instruisent des opérations ». Rappelant la position de la Commission des finances favorable en la matière à la suppression de tous ces doublons, les parlementaires proposaient une solution plus rapidement applicable : la création d’un ministère du Commerce extérieur qui aurait sous son autorité la DREE et les autres services ministériels en charge du commerce extérieur et des négociations commerciales, ainsi que le SGC147.
16Cette demande radicale demeura sans effet. Les initiatives parlementaires se multiplièrent jusqu’à la loi du 4 août 1956, qui vint rappeler, dans son article 35, que les Services du commerce extérieur relevaient exclusivement du ministère chargé de l’Économie nationale48. Le décret d’application parut le 18 avril 195749. Il confortait le ministère des Finances et des Affaires économiques dans son rôle traditionnel de préparation des plans et programmes généraux d’importation et d’exportation, et d’élaboration des accords commerciaux (art. 1). Le Quai d’Orsay était confirmé dans son rôle de négociateur des accords commerciaux dans le cadre des instructions arrêtées par le ministre de l’Économie nationale. La liste des membres des délégations appelées à négocier les accords était établie conjointement par les deux ministres, et le président de chaque délégation devait également faire l’objet d’une décision conjointe (art. 2). En cas de litiges persistants, la question était portée devant le président du Conseil (art. 3). Loin d’être affaibli, le ministère des Finances et des Affaires économiques voyait repoussée pour un temps encore la création d’un ministère du Commerce extérieur et affermie sa position dans le condominium exercé avec le ministère des Affaires étrangères dans la gestion des relations économiques extérieures.
17Il fallut donc attendre les années 1960 pour qu’apparaisse un embryon de ministère du Commerce extérieur. Si l’on excepte le passage de Max Fléchet à la tête d’un secrétariat d’État aux Affaires économiques extérieures, en novembre 1959, les premiers titulaires d’un poste de secrétaire d’État au Commerce extérieur furent Gilbert Grandval, du 15 avril au 16 mai 1962, puis Charles de Chambrun, du 8 janvier 1966 au 1er avril 1967. Outre la nécessité de participer au dosage classique des formations politiques au sein du gouvernement, l’apparition du ministère fut fondamentalement engendrée par la nécessité de rendre visible, comme jamais, aux yeux de l’opinion publique, l’intérêt porté par le gouvernement aux questions commerciales. Avec Chambrun, la fonction de communication attachée au nouveau ministère, tournée vers les entrepreneurs, apparut au grand jour. Multipliant les interventions dans les journaux et les déplacements à l’étranger, il s’appliqua à traduire la volonté d’action politique et administrative affichée par le gouvernement dans le domaine des échanges50. Dorénavant, la promotion des produits français à l’étranger serait assurée non plus par le responsable d’un ministère technique, mais par un ministre ad hoc. Commentant les chiffres du commerce extérieur en décembre 1966, Chambrun affirma « vouloir développer l’esprit marchand en France. Dans un pays qui n’a pas la tradition anglo-saxonne ou néerlandaise [...], il est véritablement prioritaire de réhabiliter la fonction commerciale, quand on mesure le développement prodigieux des échanges internationaux51 ». S’attribuant la suppression du contrôle des changes, il estima que la France pouvait « reconquérir la place qui fut la sienne avant 1913 [...]. Il fallait supprimer les contrôles désuets, il faut maintenant créer les marchés à terme qui feront de la France un centre du commerce mondial comme l’Angleterre ou l’Allemagne ». Sous la présidence gaulliste, l’expérience d’un ministère autonome fut intermittente. Sous la présidence giscardienne et à partir de la crise économique, elle se transforma et devint pérenne, reconduite sous les gouvernements socialistes. Confirmant l’État comme un acteur essentiel de l’action économique extérieure, la naissance de ce ministère fut en réalité le signe que les entreprises n’étaient toujours pas parvenues à s’imposer de manière autonome sur les marchés étrangers, et une réponse apportée prioritairement aux difficultés rencontrées par les petites et moyennes entreprises.
18Les difficultés des PME à l’exportation devinrent une antienne du discours politique. À partir de 1967, la revue du CNCCEF retraça les parcours exemplaires de patrons de PME ayant réussi à imposer leurs produits sur la scène internationale : en avril, elle donna la parole à Jean Mantelet, patron de Moulinex, l’année suivante à Georges Parrot, qui reçut, pour sa société Rexor de fabrication de fils en aluminium destinés aux vêtements d’apparat, l’Oscar 1967 de l’exportation au titre des biens de consommation52. Le ministre du Commerce extérieur fit dès lors des PME ses interlocutrices privilégiées et nombre de mesures et de « plans » tentèrent, dans les décennies suivantes, de soutenir leur expansion internationale.
19En avril 1966, un sondage effectué par Havas et l’IFOP sur la vocation exportatrice des Français et commenté dans L’Aurore tendit à prouver que cette politique volontariste commençait à porter ses fruits dans l’opinion publique. 73 % des personnes interrogées estimaient que les industriels n’avaient pas de débouchés suffisants en France et qu’ils avaient besoin de vendre à l’étranger. Il apparaissait anormal à 67 % d’entre elles que certaines entreprises qui pourraient exporter s’intéressent uniquement au marché national. Pour près de la moitié d’entre elles, l’exportation ne pouvait demeurer l’apanage exclusif des seules grandes entreprises. Selon L’Aurore, « la fonction commerciale n’[était] plus du tout dévalorisée aux yeux des couches les plus dynamiques de la population, soit chez les jeunes, soit chez les personnes ayant fait des études supérieures53 ». Pourtant, à cette interprétation très optimiste, on peut opposer la vision contemporaine, très mitigée, de l’auteur d’un « Que sais-je ? » sur Le commerce extérieur paru en 1969, Alain Bavelier, qui exerçait en fait comme administrateur civil au sein de la direction des relations économiques extérieures, en charge des garanties au commerce extérieur en 1957, et qui était par conséquent un spécialiste de ces questions. Avec réalisme, il estimait que le discrédit relatif de la fonction commerciale en France, la mentalité de repli n’avaient pas encore disparu54. À sa suite, nombre de fonctionnaires et de responsables politiques firent le même constat, justifiant le maintien, voire le renforcement de l’intervention étatique dans ce domaine. La création d’un ministère spécifique peut enfin être interprétée comme la sanction d’une partition qui commençait à s’opérer, de manière implicite, au sein de l’administration. À ce nouveau ministère revenait la gestion quotidienne des relations avec les petites et moyennes entreprises. Le Quai d’Orsay comme le quai Branly s’affirmèrent comme les interlocuteurs des grandes entreprises, des banques et du gouvernement.
20Ce dispositif mis en place, la question qui se pose est celle de la part respective prise par un État omniprésent et volontariste, et par les milieux privés dans les décisions relatives aux modalités de l’expansion économique extérieure. Celle-ci fut conçue par le premier comme le moteur de la croissance et de l’emploi, comme un stimulant de la modernisation des entreprises et comme un adjuvant de l’expansion politique. Or, si l’État continuait à se placer au centre du dispositif exportateur, dans la pratique, les initiatives des milieux privés devancèrent souvent sur le terrain les initiatives politiques, mues par leur propre logique de conquête de marchés. Elles interférèrent, en retour, sur les options débattues de la politique étrangère. Ainsi, bien avant que le général de Gaulle n’érigeât la diversification des relations diplomatiques de la France en fondement d’une politique d’indépendance nationale, une partie des milieux économiques tant privés que publics firent de cette diversification le socle de l’expansion extérieure. En particulier, si les représentants des industries exportatrices recommandaient de continuer à « concentrer les efforts de prospection et de vente sur les marchés sterling », ils incitaient aussi à « se préparer à l’éventualité d’une reprise des négociations commerciales avec les pays de l’Est55 ».
Les modalités de la guerre froide économique française
La participation de la France au COCOM
21Il faut se souvenir que, à la suite de la rupture politique intervenue entre l’Europe de l’Est et l’Europe de l’Ouest, les États-Unis déclarèrent, en décembre 1947, l’embargo sur les exportations de biens stratégiques vers tous les pays menaçant leur sécurité. À partir de mars 1948, ils décidèrent la généralisation de cette mesure à l’ensemble des États d’Europe occidentale et suspendirent la livraison d’un produit au titre de l’aide Marshall à sa non-réexpédition vers les pays ne recevant pas cette aide. Deux réunions en novembre 1949 et en janvier 1950 conduisirent à la création d’un groupe consultatif et d’un organisme permanent, le COCOM (ou Coordinating Commuttee for Multilateral Strategic Export Control), destiné à assurer le contrôle des transferts de produits et de technologies à destination des pays communistes56. Trois listes avaient été établies lors des réunions préparatoires : une liste I de produits prohibés, selon des critères militaires, technologiques et stratégiques, une liste II de produits contingentés, et une liste III de produits qui faisaient l’objet d’un simple échange d’informations statistiques. L’embargo portait non seulement sur les matériels militaires, mais aussi sur les produits civils susceptibles d’être détournés à des fins militaires. En vue d’éviter les représailles, il fut décidé de conserver secrète cette politique discriminatoire, ce que la France accepta d’autant plus volontiers qu’elle ne souhaitait pas affronter une éventuelle opposition de l’opinion publique ou du Parlement sur le principe de l’embargo57.
22Dès l’origine, elle en défendit une interprétation différente58. Les États-Unis entendaient entraver durablement le développement économique de l’URSS en maintenant la supériorité technologique des équipements de l’OTAN sur ceux du bloc oriental, tandis que la France se préoccupait d’interdire la vente de marchandises présentant un danger immédiat du fait de leur caractère stratégique. Dans cette opposition à la vision américaine, elle n’était pas seule : pour les Britanniques, pour les Italiens et même pour les Allemands de l’Ouest, l’essor des échanges commerciaux entre les blocs était le moyen de contribuer à normaliser leurs relations politiques, alors que l’application de mesures trop rigides ne pourrait que consolider le bloc communiste59. De son côté, dès 1950, la Grande-Bretagne s’opposait à son alliée américaine sur la nature des relations Est-Ouest et entendait œuvrer en faveur de la détente en développant les liens commerciaux60. De leur côté, les États du bloc soviétique avaient eux aussi pratiqué une politique commerciale restrictive. Toutefois, en 1949, le nouveau commissaire soviétique au commerce extérieur Menchikov avait renoué le dialogue avec la France en proposant des échanges de marchandises : des matières premières (maïs, orge, brai de houille, minerai de chrome, cellulose, amiante, manganèse) contre des produits industriels (rails, pompes, excavateurs, grues sur chenilles, compresseurs, etc.)61. Un accord permit que les achats et ventes français fussent réglés en francs français et non en dollars. En 1950, les échanges tendaient à l’équilibre, mais restaient à un niveau très modeste. Les échanges commerciaux de la France avec les pays de l’Est représentaient 3 % de ses échanges globaux, une part sans cesse décroissante62. Les importations françaises en provenance d’URSS représentaient 1,2 % de ses importations en provenance de l’étranger, et ses exportations vers l’URSS 1,3 % de ses ventes, au cours des dix premiers mois de 195163. De manière générale, le niveau des échanges de l’Est européen avec les pays occidentaux était tombé à un niveau très bas : de 42 % en 1948 à 14 % en 195364.
23L’instauration d’un régime d’embargo des échanges en Chine suscita des débats plus vifs au sein de l’administration américaine, le secrétaire d’État Dean Acheson, peu au fait des affaires asiatiques, paraissant hostile à toute sanction économique trop drastique65. En effet, depuis la fin des années 1940, le marché chinois offrait de considérables opportunités aux Occidentaux. Pour les milieux d’affaires américains, la sortie de scène des rivaux traditionnels allemand et japonais créait une occasion sans précédent pour se redéployer en Chine, et, au printemps précédant l’établissement de la République populaire de Chine, le 1er octobre 1949, de nombreuses compagnies américaines y avaient déjà pris pied. La Mission économique française présente sur place souligna l’emprise américaine comme une « caractéristique de la "Chine 1945"66 ». Au début de la guerre de Corée, le 28 juin 1950, le gouvernement américain avait décidé un embargo sur toutes les exportations américaines à destination de la Corée du Nord67. L’intervention de la Chine dans la guerre contre la Corée du Sud en octobre-novembre 1950 modifia la politique chinoise des États-Unis68. Un contrôle de l’exportation de produits susceptibles d’accroître son potentiel militaire fut décidé par les États-Unis, la Grande-Bretagne et la France, et une liste spéciale de produits stratégiques fut établie en ce sens69. Puis il y eut un durcissement sensible qui conduisit à la décision d’un embargo total, prise en décembre 1950, à l’encontre de la Chine communiste, de la Corée, de Hong Kong et Macao, en dépit de la forte opposition de l’allié britannique, soucieux de préserver ses positions en Chine70. L’arme économique apparaissait aussi importante que l’arme militaire aux États-Unis dans ce conflit71. Ils furent immédiatement suivis par le Canada72. En France, le Quai d’Orsay demanda au quai Branly de faire respecter par les fabricants français la décision temporaire prise à Londres par les trois États occidentaux de ne pas accepter de nouvelles commandes de matériel ferroviaire pour le compte du gouvernement chinois, dans l’attente de la prochaine réunion du groupe consultatif du COCOM, prévue pour le 29 novembre. Les contrats en cours pourraient en revanche continuer à être honorés73.
24Le 18 mai 1951, l’assemblée générale des Nations unies adopta une résolution décrétant l’embargo sur les expéditions d’armes, de munitions et matériel de guerre, sur les matériaux nécessaires à la production d’énergie atomique, sur le pétrole, sur le matériel de transport d’importance stratégique, ainsi que sur les produits utiles à la production d’armes, de munitions et de matériel de guerre74. Elle donnait de fait à ces sanctions une légitimité que l’embargo secret à l’encontre des pays d’Europe de l’Est n’avait pas. Le 5 juillet, le gouvernement français fit savoir qu’il appliquerait cette recommandation. Pendant l’été 1951, il fut tenu au courant de manière très précise des premiers effets de l’embargo occidental par le conseiller commercial en poste à Hong Kong, Robert Douteau, qui adressa une série de courts télégrammes à la DAEF et à la DREE75. En novembre 1951, le gouvernement britannique durcit sa politique chinoise, ajoutant à la liste des produits sous embargo (liste I du COCOM), les produits de la liste II, qui étaient alors soumis à un contrôle quantitatif, et une soixantaine de produits, dont la plupart, sur la liste III, ne faisaient l’objet que d’un simple échange d’informations. Les États-Unis, la Belgique et les Pays-Bas firent connaître leur accord de principe pour l’extension de cette mesure aux autres pays membres du COCOM, mais la France manifesta ses réticences, redoutant que la mesure nuise à l’ensemble de ses intérêts économiques dans cette partie du monde76. En mars 1952, après plusieurs mois de résistance, la France accepta de placer sous embargo la liste 1177, puis, le 29 mai 1952, ce fut le tour de la liste 11178.
Les modalités de la normalisation : prudence étatique, impulsion privée
25Ces approches gouvernementales différenciées de l’arme économique se développèrent dans l’ambiance nouvelle du début des années 1950 où les tensions militaires s’accrurent (conflit indochinois, début de la guerre de Corée) mais où les milieux privés occidentaux, une fois la rupture politique consommée, exprimèrent dans des instances multilatérales comme la chambre de commerce internationale leur souhait d’une reprise d’un commerce avec l’Est de l’Europe. Dès août 1951, une conférence de la Commission économique pour l’Europe de l’ONU prit position pour l’intensification des échanges intra-européens, déclaration réitérée en mars 1952 à Genève79. Dans ce contexte, la conférence économique internationale qui se tint à Moscou en avril 1952 modifia la donne : les Soviétiques y manifestèrent publiquement leur volonté d’accroître leurs exportations vers l’Ouest80. Les États comme les entrepreneurs durent préciser leur position au terme de reclassements souvent très rapides. La conférence avait été organisée à l’initiative du Conseil mondial pour la paix, créé par des intellectuels des deux blocs en 1948, avant d’être placé sous l’hégémonie du Kominform. Présidé par le physicien français Frédéric Joliot-Curie depuis 1949, le Conseil avait, lors de son congrès de Varsovie, en 1950, fait du développement des échanges économiques l’un des vecteurs de son influence81. Appel était lancé aux hommes d’affaires occidentaux afin qu’ils contribuent à la relance du dialogue entre l’Est et l’Ouest. Les gouvernements occidentaux refusèrent d’y envoyer leurs représentants82, mais les milieux d’affaires trahissaient des positions plus ambiguës. Au sein du Conseil des fédérations industrielles d’Europe (CIFE), créé en mai 1949, le patronat belge prit position en faveur d’un boycott de la manifestation, suivi par les patronats allemand (BDI), britannique (FBI) et français (CNPF). Seules la Suède et la Norvège devaient s’y déclarer hostiles au sein du bloc occidental. Toutefois, comme le remarquaient les Français, cela n’empêchait pas des hommes d’affaires britanniques de se trouver à Moscou au même moment et l’industrie britannique d’y envoyer des représentants83. Les déclarations des fédérations patronales masquaient difficilement la réalité sur le terrain. La délégation française, forte de 36 membres, fut la plus présente à Moscou, suivie de la délégation britannique, avec 29 membres84. Les entrepreneurs français qui firent le déplacement, comme Jean-Baptiste Doumeng ou Charles Hilsum, étaient très proches ou engagés au sein du Parti communiste français. Les entrepreneurs ouest-allemands n’étaient pas en reste, avec une vingtaine de représentants85. L’opinion allemande comme le monde industriel commencèrent à soulever publiquement la question d’une reprise du commerce avec l’Est.
26Pour la France, la question était liée à l’évolution de ses alliés, et néanmoins rivaux commerciaux, sur les marchés de l’Est. À l’instar des chancelleries étrangères, elle avait les yeux rivés sur ce que faisaient ses partenaires. Soutenue par le Board of Trade et son président Peter Thorneycroft, une délégation d’hommes d’affaires britanniques se rendit à Moscou en janvier 1954 et en revint avec des demandes de contrats substantiels. Le Premier ministre Winston Churchill, le 25 février 1954, assuma ouvertement une politique d’intensification des échanges avec l’Est, que l’opposition travailliste appelait de ses vœux depuis de longs mois86. Le 24 mars, il écrivit au président Eisenhower en ce sens87. L’avènement d’une nouvelle équipe dirigeante en URSS, à la suite de la mort de Staline survenue un an plus tôt, encourageait cette évolution. Dès la première session du COCOM qui suivit la conférence de Moscou le 30 avril 1952, le représentant allemand Hans Kroll avait fait remarquer que la solidarité occidentale ne pourrait être maintenue qu’au prix d’un abaissement du niveau de l’embargo et que des États comme la France, l’Italie et la Grande-Bretagne commençaient à regarder d’un œil nouveau le développement du commerce Est-Ouest88. La classe politique britannique unanime se prononçait en faveur d’une réduction des listes d’embargo des exportations vers l’URSS89. Dès juillet 1954, les États-Unis durent accepter une révision libérale des listes du COCOM, qui devint effective en août.
27Avec la Chine, l’agenda des relations commerciales était décalé. La création du CHINCOM avait été une conséquence directe de la conférence économique de Moscou d’avril 1952. Le 28 juillet 1952, les États-Unis, le Canada, le Japon, la France et la Grande-Bretagne décidaient d’établir un China Committee à Paris, au sein du COCOM, dont la première réunion eut lieu en novembre90. Ce Comité Chine, ou CHINCOM, gérait des procédures spéciales, « plus sévères que celles imposées au reste du bloc soviétique91 ». L’engagement de la France en Indochine, sa position de « principal partenaire des États-Unis pour la défense du monde libre en Extrême-Orient92 » la contraignirent à adopter, dès l’origine, une ligne plus souple dans le dossier de l’embargo chinois que dans le dossier soviétique. Sa tactique était alors de devancer les demandes américaines en proposant un certain nombre de restrictions nouvelles sur le commerce français avec la Chine dans le but d’éviter un blocus total. Les diplomates devaient là aussi tenir compte d’initiatives privées qui leur échappaient en partie. Pour certains industriels français, la conférence avait été l’occasion de prendre contact avec les envoyés du gouvernement communiste chinois93. Le président d’Interagra, Jean-Baptiste Doumeng, signa quelques mois plus tard à Berlin, avec le représentant de la China Import and Export Corporation, un premier contrat portant sur environ un milliard de francs de marchandises. Le gouvernement français donna son accord sous réserve que les exportations françaises prévues (produits sidérurgiques et pharmaceutiques) ne comportassent aucun produit stratégique et que J.-B. Doumeng ne tentât pas d’établir le monopole de sa société sur le commerce avec la Chine. Le Quai d’Orsay redoutait clairement que le commerce franco-chinois ne fût accaparé par des groupements d’extrême gauche94. Les conditions posées ayant été satisfaites, le quai Branly put délivrer les licences d’exportation95. D’autre part, à la suite de la conférence de Moscou, des Comités nationaux pour le développement du commerce international avaient vu le jour96. Le président du Comité français, Bernard de Plas, fut invité au début de l’année 1953 par le président de la Banque centrale de Chine et du Comité chinois pour le développement du commerce international, Nan Han Cheng, à se rendre en Chine à la tête d’une délégation d’entrepreneurs français. Les visas leur furent délivrés par la représentation diplomatique chinoise en Suisse97. La diplomatie française demeura en retrait, en raison de l’évolution de la guerre d’Indochine et de la situation politique en Extrême-Orient. Le CNPF interdit une nouvelle fois la participation de représentants patronaux, et nombre d’industriels ne s’engagèrent pas, de crainte de représailles américaines98. La délégation fut donc composée de nombreuses personnalités communistes, comme Jean-Baptiste Doumeng. P.-D.G. de la Banque commerciale pour l’Europe du Nord, par ailleurs conseiller municipal communiste en Haute-Garonne et président des Coopératives agricoles du Sud-Ouest, il était identifié par les Affaires étrangères comme l’« organisateur véritable de ce voyage à Pékin ». Figuraient aussi les représentants de sociétés commerciales. « Toutes ces personnes ont assisté à la conférence de Moscou, précisait le Quai d’Orsay. Interagra, BERIM, SORICE et le Comptoir européen sont des sociétés parisiennes connues pour leurs relations commerciales constantes avec le bloc soviétique99. » La mission dura un mois, de mai à juin 1953. De retour, Bernard de Plas tenta d’éveiller l’intérêt des exportateurs français pour cet autre marché oriental en accordant des entretiens à la presse100. La diplomatie française portait pour sa part un regard négatif sur les effets de ce voyage, remarquant que la mission avait coïncidé avec l’arrestation de nouveaux missionnaires français.
28Dans cette nouvelle phase dominée par la conclusion de l’armistice en Corée, les intérêts politiques l’emportèrent nettement sur ceux de la diplomatie commerciale101. En proie aux pressions américaines, la politique chinoise de la France se définit à partir de l’été 1953 et de l’armistice en Corée, en fonction de deux paramètres. Sa volonté constante d’indépendance au sein du bloc occidental la conduisait au pari que le commerce avec les pays communistes constituait un moyen de combattre la logique de guerre froide. Sa préoccupation, plus conjoncturelle, de ne pas exporter vers la Chine de produits susceptibles d’être utilisés contre ses soldats en Indochine et de ménager son allié américain dans la région102 lui fit adopter une position officiellement rigoureuse jusqu’à la fin des négociations de Genève, qui mirent un terme à la guerre en Indochine103. En cela, elle évolua moins vite que les dirigeants britanniques qui annoncèrent au printemps leur volonté de s’ouvrir au commerce avec la Chine104.
29Les responsables britanniques avaient pourtant été très prudents vis-à-vis de la Chine depuis la fin de la guerre. Le dirigeant du Joint Intelligence Committee, Victor Cavendish-Bentinck, estimait que la Chine n’était pas un élément vital du dispositif assurant le maintien de l’Empire105. Les diplomates pas plus que les entrepreneurs, qui se risquaient en mission en Chine ou qui étaient représentés par le groupe de pression China Association, ne se montraient pressés de vendre à crédit à un pays à la monnaie faible, ce qui n’aurait fait qu’accroître le déficit de la balance des paiements106. En outre, comme les entreprises françaises, les entreprises britanniques furent contraintes par le nouveau gouvernement chinois à la fermeture, à partir de mai 1952, non par la menace ou la force, mais par un excès de taxes et de réglementations107. Mais à partir de 1954, l’activisme commercial des Anglais avec les pays communistes réapparut. Le Labour reprochait au gouvernement de Churchill de « subir trop passivement la pression qu’exer[çai]ent les autorités de Washington » et d’appliquer de manière trop stricte le Battle Act du 26 octobre 1951, stipulant que toute aide économique, financière et militaire devait être supprimée à un pays ne respectant pas l’embargo vers les pays socialistes108. De fait, la direction française d’Asie signala en janvier 1954 les encouragements prodigués par le Board of Trade au développement des échanges avec la Chine et l’Europe orientale. Elle n’en incitait pas moins à la prudence ; dans la course engagée entre les nations occidentales, elle recommandait au gouvernement français de rester en retrait, concluant que « ce sont les banques qui, d’après les tendances manifestées ces derniers temps, pourraient le plus utilement prendre l’initiative de nouer les contacts dont il s’agit109 ». Le 27 mai 1957, le délégué britannique au COCOM annonça la décision de son gouvernement d’aligner les listes et procédures CHINCOM sur celles du COCOM, et donc d’assouplir sa politique chinoise. Cela eut pour effet de conduire progressivement les différentes délégations à adopter la même attitude, en dépit de l’opposition américaine : en France, un avis aux exportateurs fut publié en ce sens le 20 juin 1957. Lors de sa réunion de juillet 1958, le Groupe consultatif consacra implicitement cette situation110. Dans ce contexte, la diplomatie française tenta de maintenir son contrôle sur les initiatives croissantes des milieux patronaux français et veilla à ce qu’elles se situassent toujours dans le cadre de ses obligations envers le CHINCOM.
30En janvier 1956, à l’instar des missions que la Grande-Bretagne, le Danemark ou la Belgique avaient déjà montées, le Quai d’Orsay favorisa la constitution par le CNPF d’une mission économique, placée sous la présidence du sénateur Émile Rochereau, président de la Commission des affaires économiques du Conseil de la République111. En juin 1957, l’ancien président du Conseil Edgar Faure se rendit à son tour à Pékin où il fut reçu par Zhou Enlai : à cette occasion, le principe d’une nouvelle mission conduite par E. Rochereau fut arrêté112. Une réunion préparatoire se tint au siège du secrétariat du Syndicat d’études pour l’Extrême-Orient en juillet, réunissant le président de la Fédération nationale des travaux publics et des représentants des sociétés Schneider, Alsthom, Neyrpic, Saint-Gobain, Pechiney et Fives-Lille. Il en fut rendu compte au Département113. Dans la mesure où la mission devait conserver un caractère privé, le Quai d’Orsay s’opposa à la participation de l’attaché financier Jacques Hirsch-Girin et du conseiller commercial Raymond Grimaud, tous deux en poste à Hong Kong. La présence du directeur de la BFCE, d’un représentant de la COFACE et de deux spécialistes des réglementations COCOM et CHINCOM du quai Branly et du ministère de l’Industrie suffisait amplement aux yeux du ministère des Affaires étrangères114. Le voyage eut lieu fin août 1957 et se solda par l’annonce chinoise de faire prochainement appel à la collaboration technique de la France dans deux domaines déterminés : l’implantation d’industries chimiques et l’électrification des chemins de fer115.
La place des acteurs non gouvernementaux dans le commerce avec l’Europe de l’Est
Le rôle de défricheur des banques
31Les banques françaises entreprirent de se réimplanter de manière active sur les marchés de l’Est. Le Crédit lyonnais se targua d’avoir été « l’une des premières banques occidentales à rétablir des liens avec l’URSS, après la période dite de guerre froide116 ». Dès mai 1954, deux représentants du Crédit lyonnais rencontrèrent Hippolyte Cau, conseiller commercial à Moscou, et, sous son égide, commencèrent à prendre des contacts avec les institutions bancaires soviétiques117. De manière générale, les années 1950 et 1960 furent marquées par la nouvelle poussée de l’investissement industriel des banques françaises, ainsi que par l’élargissement des prestations de services offertes aux entreprises118. La Banque de Paris et des Pays-Bas, très présente avant la guerre sur ces marchés119 et sortie affaiblie du conflit mondial, entreprit de s’y redéployer une fois achevée la modernisation de ses structures sous l’égide de son nouveau directeur général, Jean Reyre120. Elle se fixa dès 1947 l’objectif de devenir un grand groupe industriel et international. En organisant les emprunts industriels pour la reconstruction, puis en multipliant les prises de participation dans les entreprises françaises, en favorisant fusions, concentrations ou rapprochements, elle affermit sa position de banque industrielle, avec un certain nombre de secteurs de prédilection, comme la construction, l’énergie, la mécanique lourde, l’électronique121. Certaines des entreprises soutenues s’engagèrent dans la conquête des marchés de l’Est, comme Fives-Lille, devenue sous son impulsion Fives Lille-Cail en 1958122, et Babcock et Wilcox pour les industries de mécanique lourde, les Ateliers et Chantiers de Bretagne pour la construction navale, TSF-CSF, Bull pour l’électronique. Les activités internationales furent prises en charge par un petit groupe d’hommes agissant au sein du département étranger de Paribas dirigé par Bernard de Margerie123.
32En un temps où les industriels français avaient peu de contacts avec les industriels des démocraties populaires, la banque assura la liaison entre eux. Forte des réseaux établis en France, au sein de l’appareil d’État et du système bancaire, ainsi qu’avec les entreprises exportatrices, elle construisit des réseaux similaires dans les États socialistes en tenant compte de leur organisation spécifique. Les prises de participation dans le capital de sociétés privées y étaient rigoureusement interdites et la seule activité possible était le financement des exportations des entreprises du groupe vers les marchés est-européens. Elle établit ainsi des contacts avec les banques d’affaires yougoslaves, parmi lesquelles la Banque nationale d’investissements tint un rôle particulier, car elle finançait, outre les investissements de base, les échanges de biens d’équipement. En Roumanie, la Banque nationale de Roumanie et la Banque roumaine du commerce extérieur étaient ses interlocutrices privilégiées, tout comme les grandes sociétés habilitées à commercer avec l’étranger124. C’est donc par son intermédiaire que les appels d’offres transmis par les centrales d’achat et les banques des pays de l’Est parvenaient aux industriels français. Le projet de modernisation des mines de Bor, en Yougoslavie, illustre bien le fonctionnement du circuit mettant en jeu la banque, l’État et les entreprises. La société yougoslave Invest-Import fit appel en janvier 1956 au concours de Paribas pour le financement des installations industrielles en Yougoslavie. Une semaine plus tard, la banque entra en relations avec le Service des accords commerciaux de la DREE125, qui manifesta l’intérêt pris par l’État à la participation française à cette affaire126. Paribas saisit l’occasion pour faire admettre la participation d’entreprises de son groupe (Commentry, Forges et Ateliers de la Loire, Constructions métalliques et Entreprises) à la modernisation des mines127. L’essor de ce type de relations passa par la conclusion de protocoles de financement avec la Yougoslavie (1960), la Pologne (1961), l’URSS (1964), la Tchécoslovaquie (1967), et la création de bureaux de représentation commerciale, comme la Société commerciale franco-polonaise en 1963128. La pénétration des marchés se faisait généralement dans le cadre de contrats « exclusifs » passés entre le fournisseur français et l’importateur étranger. L’obtention de la garantie de la COFACE contre les risques de non-paiement ne posait pas de problème et était obtenue très rapidement. Dans le cas d’une commande plus importante, les entreprises françaises pouvaient être conduites à collaborer entre elles, comme ce fut le cas pour la modernisation des mines de Bor. Cette collaboration commença, dès les années 1950, à s’effectuer aussi dans un cadre européen. La construction d’une usine de produits azotés lancée en Yougoslavie en 1953 fit ainsi l’objet d’un montage liant Paribas, la Société belge de banques, l’entreprise française Spie-Batignolles, l’entreprise allemande Lurgi et l’Union chimique de Belgique129. Ce type de collaboration présentait l’avantage d’introduire la banque, et, dans son sillage, les entreprises qui lui étaient affiliées, sur des marchés où ses concurrents européens étaient omniprésents : la Slovénie et la Croatie faisaient figure de « chasse gardée » de l’Italie et de l’Allemagne en Yougoslavie. Il permettait aussi d’affermir un pôle d’entreprises européennes face à l’implantation d’entreprises anglo-saxonnes en Yougoslavie. Enfin, certains contrats pouvaient être « groupés » pour permettre d’offrir les mêmes conditions de crédits à des contrats plus petits sous la tutelle de sociétés commerciales. Certaines étaient l’émanation de banques comme la Société anonyme de transactions internationales (SATI), créée par Paribas elle-même en 1951, ou la Société d’expansion commerciale et industrielle (SODEX), rattachée à la Banque générale de l’industrie. La CIFAL, ou Comptoir industriel et commercial franco-allemand, fut l’une des sociétés privilégiées intervenant dans les contrats financés par Paribas130. Chargées de la prospection, ces sociétés faisaient ensuite figure d’interlocuteur unique pour l’importateur étranger. Les premiers contrats récupérés par les sociétés françaises furent décrochés et négociés directement par Paribas. Dans les années 1950, les contrats négociés par Paribas se faisaient le plus souvent suivant un plan de financement type : 20 % d’acompte, 80 % payables en dix semestrialités, à un taux variant de 6 à 8 %. Il s’agissait de crédits fournisseurs amortissables sur cinq ans131.
33En Russie, le redéploiement fut plus tardif. Dans une première phase (1952-1959), les contrats de vente de biens d’équipement aux centrales d’achat soviétiques étaient assortis de modalités de paiement au comptant. Ce n’est qu’à partir de 1959 que l’URSS s’orienta vers des formules de règlement à crédit. Le Crédit lyonnais entra en relation avec la Banque d’État de Moscou en 1958-1959, puis relança ses voyages d’études en septembre 1965 : Jean Deflassieux, de la direction des affaires internationales, s’imposa comme l’un des spécialistes des relations bancaires franco-soviétiques. Paribas et ses succursales européennes affermirent dans le même temps, bien qu’avec difficulté, leurs relations avec l’URSS. Comme dans les démocraties populaires, les banques étrangères ne pouvaient pas être accréditées en qualité de banques, il fallait recourir à la création de sociétés commerciales, qui faisaient office de bureaux de représentation. Le Crédit lyonnais et la Société générale établirent leurs sociétés de représentation à Moscou : SORICE pour la première, et Intercontinentale pour la seconde132. L’activisme des banques, l’information qu’elles recueillaient servirent grandement leurs clients industriels sur le marché soviétique en établissant les contacts avec les centrales d’achat et facilitèrent leurs relations avec l’État français. L’industriel désireux d’exporter allait rencontrer le responsable du secteur des crédits à l’exportation de la DREE pour prendre connaissance de l’avis de l’État, puis retournait voir son banquier « chef de file » pour monter son dossier s’il était nécessaire d’obtenir la garantie de l’État133. Paribas commença dans les années 1961-1963 à discuter la possibilité de financer avec l’appui de l’État l’exportation vers l’URSS de biens d’équipement fabriqués par les sociétés Fives-Lille, Neyrpic, Ateliers et Chantiers de Bretagne, Ateliers et Chantiers de Nantes134. Cela fraya la voie au premier protocole financier signé le 9 juillet 1964 par la Banque avec la Vnechtorgbank (Banque du commerce extérieur), qui, depuis 1961, s’était vu confier l’activité internationale de la Gosbank (Banque centrale d’État). Ainsi l’affermissement des courants d’échanges, initié par les milieux privés français, précéda indubitablement le rapprochement politique et économique institutionnalisé en juin 1966.
34À partir de 1966, Michel Debré, devenu ministre des Finances, poussa, on l’a dit, à l’engagement accru des banques dans les échanges commerciaux internationaux. C’est à cette époque que les banques d’affaires perfectionnèrent leurs techniques de financement des opérations d’exportation. Dans cette seconde moitié de la décennie, Paribas était l’archétype de la banque d’affaires présente en URSS, finançant environ 70 % des contrats industriels entre les deux pays. Elle ouvrit en avril 1966 à Moscou les bureaux de la SOFRACOP, société franco-soviétique de coopération industrielle, destinée à assurer sa représentation et à fournir aux industriels français information et assistance technique sur place. Cette société fonctionna comme le bureau permanent de la banque à Moscou jusqu’à ce que celle-ci fût officiellement accréditée auprès de la Banque d’État soviétique le 22 juillet 1971. Sous l’égide de la SOFRACOP, les équipementiers français comme Alsthom, Neyrpic, Fives-Lille, CSF, prirent pied sur le marché soviétique. Au sein du groupe Paribas, Bernard de Margerie, le directeur général adjoint, fut l’un des interlocuteurs privilégiés de la DREE135. Paribas soutint aussi l’implantation de Renault grâce aux échanges d’informations entretenus par son directeur général Jean Reyre et Pierre Dreyfus, le patron de Renault136. Des contacts eurent lieu entre celui-ci et le ministre français de l’Économie et des Finances : « M. Dreyfus a jugé nécessaire de ne pas s’engager dans une négociation technique et commerciale sans avoir au préalable au niveau politique une assurance du gouvernement français aux termes de laquelle, s’il s’avérait que des contrats intéressants pouvaient être conclus, les concours nécessaires de l’État seraient obtenus. M. Dreyfus en a parlé personnellement à M. Debré et a obtenu de ce dernier une telle assurance, en particulier à propos de l’allongement de la durée classique des crédits export137. » L’intervention gouvernementale se justifiait par la nature d’entreprise publique de la Régie Renault, par le prestige attaché à l’image de celle-ci, par la dynamique de rapprochement avec l’URSS initiée en 1964, comme par l’engagement de la garantie étatique sur les contrats éventuels qui seraient conclus.
Interview de Pierre Dreyfus, le P.-D.G. de Renault, à la suite de la signature d’un contrat, le 3 novembre 1971, en présence des responsables français et soviétiques

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35Ainsi, si le redéploiement des banques en Europe orientale fut lié à une appréciation autonome des intérêts qu’elles pourraient retirer de leur rétablissement dans la région, leurs démarches s’effectuèrent dans une collaboration étroite avec les pouvoirs publics. Les dirigeants de Paribas rencontraient fréquemment les hauts fonctionnaires pour obtenir leur avis sur certains de leurs projets138. Leur proximité avec l’administration pouvait les conduire à aller loin dans la formulation de leurs demandes, comme celle qu’ils firent en mars 1956 de permettre d’associer la banque « à la négociation des accords commerciaux et à leur réalisation139 ».
36Pour la majorité des hommes d’affaires, le renouveau de leur activité dans les États de l’Est de l’Europe était en grande partie subordonné à l’évolution des relations politiques entre la France et le bloc soviétique, ainsi qu’à l’évolution interne des démocraties populaires. À cet égard, la crise politique entre la Chine et l’URSS, qui redoubla d’intensité à l’orée des années 1960, eut des répercussions indéniablement importantes sur l’orientation des échanges chinois. Dans la mesure où l’URSS diminua sensiblement ses livraisons de biens d’équipement à la Chine et rappela de manière brusquée ses techniciens de Chine en juillet 1960, celle-ci se tourna vers les Occidentaux. Parmi ceux-ci, la Grande-Bretagne manifesta son intérêt immédiat, bien perçu par les responsables français140. Fin 1961, la conclusion d’un contrat de vente stipulant la livraison de six appareils britanniques Vickers Viscount à la Chine fit grand bruit, suscitant l’ire des États-Unis car des instruments de navigation de fabrication américaine équipaient les Viscount et tombaient, comme l’équipement radar britannique de ces mêmes Viscount, sous le coup de la législation interdisant la vente de matériel stratégique aux pays communistes141. La commande de la Chine avait été passée à la Grande-Bretagne à la suite du refus de l’URSS de lui vendre six avions de transport142. La Grande-Bretagne entendait passer outre aux observations américaines et développer son commerce avec la Chine, comme le confirma un fonctionnaire de la direction Extrême-Orient [Far Eastern Department) du Foreign Office à un diplomate français en poste à Londres143.
Les sociétés commerciales et les entreprises, acteurs de la pénétration française en Chine
37La Chine fit également, à partir de 1962, des ouvertures à la France par l’entremise des services commerciaux de son ambassade établis à Berne. La ville suisse fut ainsi une plaque tournante du développement des contacts entre la France et la Chine, avant l’établissement des relations diplomatiques en janvier 1964. Depuis les missions Rochereau de 1956-1957, les relations économiques avec Pékin passaient par le poste d’Expansion économique français (PEE), dirigé par Serge de Tschaïkowski144. Le PEE de Berne était à cette date au cœur du dispositif d’information économique français sur la Chine, conjointement avec celui de Hong Kong145. À Berne, la France avait appris à connaître le fonctionnement de la machine chinoise en charge des affaires économiques extérieures. Le Wai Jiao Bu, ministère des Affaires étrangères chinois, ne jouait pas un rôle majeur dans le dispositif146, si l’on excepte le soutien politique fondamental prêté par ses dirigeants Zhou Enlai puis Chen Yi, à partir de 1958, à l’ouverture du dialogue avec l’Occident. Le grand responsable des relations économiques avec l’étranger était le ministère du Commerce extérieur. Son dirigeant était Yie Tsi-Tchouang, un vétéran de la Longue Marche, aux fonctions essentiellement honorifiques147. Les véritables responsables des relations avec le monde non socialiste étaient l’un des (dix) vice-ministres du commerce extérieur, Lu Hsu-Tchang, considéré comme leur primus inter pares148, ainsi que Chen Ming, chef du 3e bureau en charge des relations avec l’Europe occidentale. Ce ministère coordonnait l’action effectuée par les autres institutions étatiques en charge des relations commerciales extérieures. En tête, il y avait l’influent Conseil chinois pour le développement du commerce international (China Council for the Promotion of International Trade), dont le président, Nan Han-Chen, membre permanent du Congrès national, était aussi le vice-président de la Banque de Chine. Cette dernière, élément important du dispositif, était en fait la banque du commerce extérieur, différente de la Banque centrale, People’s Bank of China149. Autre spécificité du dispositif chinois : le rôle tenu par les sociétés nationales chinoises d’import-export, ou corporations, organisées de manière sectorielle. On trouvait ainsi la China National Technical Import Corp., la China National Import & Export Machinery Corp., la China National Foreign Trade Transportation Corp., la China National Metals & Minerais Import & Export Corp., la China National Chemicals Import & Export Corp., la China National Textiles Import & Export Corp., etc. Elles furent les interlocutrices directes des industriels français. S’ajoutaient encore une kyrielle d’instituts et de centres techniques, comme l’Institut d’information scientifique et technique de Chine, créé en 1956, qui renseignait les bureaux d’études chinois sur les projets étrangers concernant la construction d’usines nouvelles150.
38Parmi les acteurs privés, les sociétés commerciales furent une source d’information essentielle sur le marché chinois. Spécialisées dans le commerce de produits de consommation courante (blé, sucre, etc.), elles tenaient un rôle officieux d’intermédiaire sur ces marchés réputés difficiles (Chine, URSS) où le commerce extérieur était contrôlé par l’État et régi par des règlements souvent opaques. Certaines existaient souvent depuis longtemps, comme la société Louis-Dreyfus dont l’histoire débuta avec la fondation, en 1850, d’une maison de commerce de grains à Bâle, qui s’épanouit très rapidement dans le négoce international de matières premières151. Goldschmidt, fondée en 1866, à Mulhouse, avait un passé de courtage international et se mit au négoce des céréales au début des années 1950152. Leur histoire se confondait parfois avec l’histoire coloniale. Fréquemment originaires des milieux d’affaires des ports français, elles travaillaient principalement en Afrique et en Asie. Elles émanaient d’anciennes sociétés de comptoir créées dans les pays d’outre-mer de la zone franc ou dans quelques États africains ou asiatiques. Des sociétés comme la CFAO, Compagnie française de l’Afrique occidentale, fondée en 1887153, ou la SCOA, Société commerciale de l’Ouest africain, furent conduites, en raison de l’infrastructure commerciale limitée de ces pays, à jouer un rôle multiforme de négociant international, de bureau d’achat et de société de représentation, pour la vente de biens d’équipement par exemple. Il existait aussi des bureaux et centrales d’achat pour la vente à l’étranger, se distinguant par leur indépendance vis-à-vis des fabricants français auxquels ne les liait aucun accord contractuel. C’était le cas des grossistes ayant une politique de vente mondiale sous leur propre marque, comme Dormeuil en France, des grands magasins, des magasins populaires ou à succursales multiples, des sociétés de vente par correspondance ayant des succursales à l’étranger, et des commissionnaires-exportateurs qui achetaient soit pour des grands magasins étrangers, soit pour des importateurs et grossistes d’outre-mer. Il existait enfin quelques sociétés liées à des fabricants par un contrat de représentation exclusive, de longue durée, des bureaux de vente communs à plusieurs industriels, comme Davum-Exportation ou l’Alliance des constructeurs de machines-outils.
39Régulièrement présentes à la Foire de Canton, comme les sociétés Optorg, Impex, Dreyfus, spécialisée dans l’acheminement de céréales vers la Chine, ou encore la SORICE, elles avaient leurs entrées au Quai d’Orsay comme au quai Branly154. Parmi elles, établie rue d’Astorg à Paris, la maison Olivier était l’un des acteurs prépondérants des relations économiques entre la France et les pays socialistes155. Comme ses consœurs, la familiarité établie avec ses réseaux chinois la conduisait souvent à court-circuiter les relations officiellement établies par la diplomatie française. Ainsi, en 1956, lors de la constitution de la première mission Rochereau, le directeur d’Olivier avait téléphoné directement au conseiller commercial de l’ambassade de Chine à Londres en lui demandant d’insister pour que sa firme disposât de deux représentants dans la délégation française. L’ambassadeur français à Londres avait alors jugé le geste « inadmissible » et demandé au Quai d’Orsay d’adresser des remontrances à la maison Olivier156. Il n’en demeurait pas moins que celle-ci restait un partenaire indispensable de la diplomatie française. Au début des années 1960, son président-directeur général Maurice Rosier continuait, à l’instar des représentants du CNPF, à avoir ses entrées au Quai d’Orsay, notamment à la direction d’Asie où il venait s’entretenir avec Étienne Manac’h et plaider en faveur de la normalisation des relations diplomatiques franco-chinoises157. Au printemps 1963, Serge de Tschaïkowski organisa une première rencontre officielle entre Lu Hsu-Chang, vice-ministre du Commerce extérieur, et un certain nombre de ces sociétés françaises (Olivier, Brambilla, Optorg et Impex), qui permit de préciser les attentes réciproques158. Des affaires aéronautiques, navales et chimiques furent principalement au centre du développement du dialogue franco-chinois sur fond de rivalité franco-britannique. Les entreprises françaises (Pechiney, Saint-Gobain, Air-Liquide, Sud-Aviation) se montrèrent très réceptives aux avances chinoises qui s’intensifièrent au début de 1962159. Du 28 juin au 21 juillet 1962, une mission d’ingénieurs chinois se rendit en France sur l’invitation du CNCE et du GENEMA, Groupe d’exportation de navires et d’engins de mer en acier, et entreprit une visite systématique des Chantiers de l’Atlantique, des Chantiers Augustin-Normand, des Chantiers de Provence et des Chantiers navals de La Ciotat, et d’une série d’autres établissements160. À l’issue de cette visite, la Chine, sur la suggestion de la société Olivier, fit savoir qu’elle était prête à recevoir des offres françaises pour la fourniture de divers bateaux dont l’ensemble pourrait s’élever à 10 ou 15 millions de dollars161. Mais dans le même temps, la mission chinoise se rendait en Grande-Bretagne, et la France s’attendait à ce que celle-ci fît des offres très avantageuses à la République populaire. La négociation avec la Chine ne pourrait à l’évidence débuter avant septembre, date du retour de la mission chinoise à Pékin.
40Dans ce contexte, la diplomatie entendait demeurer en retrait tout en contrôlant étroitement les initiatives privées. Afin de définir la politique commerciale chinoise de la France, une réunion avait rassemblé à Paris, le 1er février 1962, le directeur du CNCE, Clappier, et Roussellier pour la DREE, et Hirsch-Girin et Valls pour la direction des finances extérieures. La plus grande prudence devait être observée : « Les nouvelles approches chinoises ne [devaient] pas susciter d’enthousiasme immodéré162. » Il fut jugé « préférable de laisser cette affaire se développer sur le plan privé, en dehors de tout patronage officiel163 ». Toutefois, les responsables français donnèrent leur accord pour que l’administration apportât son appui discret aux entreprises françaises pour la négociation, voire la bonne exécution de leurs contrats164. Ils rappelèrent aussi la nécessité de se conformer aux règles du COCOM165. En matière financière, la Chine ne montrait pas encore d’exigence particulière, se contentant, à cette date, de facilités de crédit étendues de trois à cinq ans.
41À la suite du séjour d’une mission de techniciens chinois en France s’amorça, en février 1962, la longue discussion sur la vente éventuelle à la Chine de Caravelle françaises, construites par Sud-Aviation. L’attention de la corporation chinoise en charge du secteur aéronautique à Pékin avait été éveillée par des envois antérieurs de documentations sur les différents appareils français (Superbroussard, Potez 840, Caravelle, Alouette II et III), fournies par le poste d’Expansion économique166. Les premiers pourparlers franco-chinois relatifs à la vente de Caravelle filtrèrent au printemps dans la presse britannique, suscitant une demande d’information de la direction Extrême-Orient du Foreign Office sur l’évolution des tractations. L’ambassadeur français à Londres ne put s’empêcher de souligner avec ironie la « remarquable discrétion du Foreign Office lorsqu’il s’agit de ventes d’avions britanniques à Pékin167 ». Le 18 mai, la Caravelle arriva à Hong Kong pour y être présentée aux autorités chinoises ; le 21 mai, ce fut le tour du Comet britannique168. En octobre, une nouvelle mission chinoise vint visiter les installations de Sud-Aviation à Marignane et à Toulouse, demandant des informations complémentaires sur la Caravelle et les divers types d’hélicoptères fabriqués par la compagnie française. En novembre 1962, le chef de la mission chinoise, directeur du département mécanique de la Chinese Ocean Transport Co, déclara que la Chine pourrait effectuer une commande de quatre appareils si un crédit de six ans lui était consenti169.
42Un an plus tard, Sud-Aviation fit connaître que, après l’étude minutieuse conduite par ses services techniques, l’avion Caravelle n’était soumis qu’à de rares restrictions découlant des textes COCOM170. « Nous vous serions gré de bien vouloir confirmer votre accord sur cette interprétation, écrivait la société à la Délégation pour l’armement, qui constitue un élément important pour les négociations d’exportation de notre avion Caravelle. » Le Quai d’Orsay prit acte que la vente de ces avions à la Chine n’était pas contraire aux règles du COCOM, et que, si certains appareils de bord, tels que le radar ou les compas gyroscopiques, figuraient sur les listes COCOM, les experts de Sud-Aviation avaient « réussi à faire admettre aux experts américains compétents que les exceptions administratives aux règles d’embargo en permettaient l’exportation171 ». Un conseil restreint tenu le 22 octobre 1963 vint d’autre part autoriser l’exportation éventuelle vers la Chine des Alouette II et 111172. Définis conformément à leurs certificats de navigabilité civile, les hélicoptères n’étaient soumis à aucune restriction173. Peu de temps après, le représentant de Sud-Aviation C. Marchetti effectua un voyage d’un mois et demi en Chine. Au retour de sa mission, il confirma l’intérêt de celle-ci pour l’achat de Caravelle qu’elle destinait aux lignes qu’elle voulait ouvrir vers le Sud-Est asiatique : Rangoon, Phnom Penh, Djakarta et Colombo, même si l’achat des appareils britanniques Comets n’était toujours pas écarté174. Le 15 janvier 1964, une proposition de vente de 25 hélicoptères Alouette III fut présentée par la France au directeur de la China National Machinery. Elle prévoyait une réponse de la Chine avant le 30 juin 1964175.
Le CNPF, acteur du rapprochement Est-Ouest
43Parallèlement à ces tractations secrètes, le CNPF entra en scène afin de préparer l’opinion publique à l’officialisation du rapprochement politique avec la Chine communiste. Cette affaire confirma après bien d’autres le rôle particulier que jouait la centrale patronale auprès des pouvoirs publics. A l’instar de celui que tenait au même moment le Bundesverhand der Deutschen Industrie (BDI) auprès des autorités ouest-allemandes, sous l’égide de son président Fritz Berg176, elle se retrouvait, depuis sa création en 1945, au centre de nombreuses consultations de la diplomatie française, au cœur du dialogue entre les entreprises et l’État. Elle était, de manière générale, une pièce maîtresse de la diplomatie économique concertée qui était mise en œuvre. Georges Villiers, son président depuis la Libération, avait des entretiens fréquents avec les grandes directions ministérielles. Le CNPF fut en particulier étroitement associé à la réflexion gouvernementale dès le début de la construction européenne177.
44En 1964, Villiers relaya la demande des milieux patronaux français de « renforcer leur liaison avec l’Administration sur les questions relatives au commerce extérieur, et spécialement aux exportations178 ». Valéry Giscard d’Estaing approuva de sa main leur note en ce sens, le 14 mars 1964. Le CNPF fut ainsi très actif pour hâter la réflexion parallèle des banques et de l’administration sur la nécessité d’améliorer les procédures financières de soutien à l’exportation par l’adoption de la procédure des crédits acheteurs et de l’extension de la garantie de l’État aux investissements industriels et commerciaux à l’étranger. Une rencontre eut ainsi lieu le 2 juillet 1964, au siège du CNCE, en présence du ministre, de Georges Villiers, des représentants de la Banque de France, le gouverneur Brunet et le sous-gouverneur Clappier, et des hauts fonctionnaires engagés dans le suivi de ces questions. Les entrepreneurs présents représentaient les principaux secteurs exportateurs : automobile (Jean-Pierre Peugeot et Maurice Jordan pour la SA des automobiles Peugeot, Pierre Dreyfus pour la Régie Renault), électronique et gros matériel électrique (Maurice Ponte, P.-D.G. de la Compagnie générale de TSF, Jean Faye, P.-D.G. de la Compagnie électromécanique, Georges Glasser, P.-D.G. d’Alsthom, président des établissements Neyrpic, Ambroise Roux, directeur général de la Compagnie générale d’électricité, etc.) chimie, aéronautique, sidérurgie et mécanique, textiles, travaux publics, industries alimentaires, chantiers navals, transports, etc.179. Le CNPF avait fait réaliser un épais dossier bleu, broché, en vue de la réunion, à la suite d’une enquête préliminaire par questionnaire auprès de ses membres. Pour pallier les faiblesses structurelles des entreprises françaises, il encourageait le développement de leur implantation à l’étranger par la création tant de réseaux de distribution et de services après-vente que d’usines destinées à assurer une fabrication locale. D’autre part, il s’agissait de répondre aux demandes des acheteurs privés étrangers désireux de voir leurs fournisseurs prendre une participation dans le capital de l’entreprise à laquelle l’équipement était destiné. « De telles prises de participation posent de sérieux problèmes pour les fournisseurs : un problème de risque commercial que le vendeur doit en toute logique raisonnablement assumer, un problème de risque politique (risque de non-rapatriement des dividendes et du capital, risque de nationalisation) et un problème de financement180. » Par conséquent, le CNPF demandait qu’une garantie spéciale fût accordée « au moins aux "investissements connexes à des exportations" », notion qui venait d’être introduite par les textes modifiant les statuts de la COFACE et l’autorisant à couvrir certains crédits bancaires destinés à favoriser les ventes de biens d’équipement à l’étranger. À cette date, cette proposition suscita le rejet du Trésor qui la commenta en ces termes : « Non. Il serait absurde à l’époque actuelle d’entrer dans la voie de la garantie des investissements à l’étranger181. » Mais elle rencontra l’approbation de la DREE qui, en avril 1964, estimait qu’ainsi « les firmes françaises seraient associées à la gestion des entreprises étrangères bénéficiaires de nos crédits à l’exportation182 ». Deux décrets du 12 avril 1967 vinrent établir cette garantie pour les investissements connexes à des opérations d’exportations183.
45Autre vecteur discret de l’influence du CNPF, ses comités bilatéraux (Comité franc-dollar, Comité franc-sterling, Comité France-Europe de l’Est, etc.) qui lui permettaient de soutenir les efforts engagés dans des régions particulières. Au début des années 1950, le Comité franc-dollar présidé par Jean-Jacques Guerlain avait été mis en place à la demande du gouvernement pour soutenir sa politique d’exportation vers les pays à devises fortes. Montant des expositions spécialisées aux États-Unis et au Canada, il s’employait aussi à mettre en relation les industriels français avec les bureaux d’achat parisiens des grands magasins américains ou canadiens, et aussi à diffuser les appels d’offres lancés sur des crédits en dollars par certains pays en voie de développement, comme Formose, les Philippines, l’Indonésie. Son rôle était alors de transmettre aux entreprises françaises intéressées les spécifications des produits recherchés et la documentation devant leur permettre de soumissionner. Sur le territoire américain, le comité avait établi des bureaux à Ottawa et à Washington, à partir desquels il tentait d’intervenir au cœur du système, menant une action de lobbying en lien avec certaines organisations professionnelles américaines en faveur des intérêts de l’exportation française auprès du Congrès américain184. Les comités ou les sociétés émanant du CNPF étaient donc d’utiles relais de l’État dans des domaines ou des régions du monde où celui-ci ne voulait pas apparaître sur le devant de la scène. En 1964, il fut suggéré d’étendre l’intervention des comités patronaux à d’autres zones géographiques, suivant en cela les orientations géographiques de la Commission Jeanneney185.
46À la suite du voyage en Europe, au début de l’année 1963, du vice-premier ministre chinois du Commerce extérieur, Lu Hsu-Chang, une première rencontre importante eut lieu lors du voyage à Berne d’une délégation du CNPF, conduite par Guillaume Georges-Picot, ancien diplomate, président du groupe d’études France-Extrême-Orient186, et Claude Evain, le directeur des relations internationales du CNPF, du 27 avril au 6 mai 1963. Elle permit une entrevue entre Lu Hsu-Chang et Guillaume Georges-Picot le 29 avril 1963, ainsi que des entretiens individuels entre le ministre chinois et les industriels français, membres de la délégation, comme le vice-président de Schneider, Forgeot, dont le groupe négociait alors la vente d’une usine de butanol et d’une usine de désulfurisation de gaz naturel187. La rencontre de Berne fraya la voie au premier déplacement officiel du CNPF en Chine : une mission partit pour la Chine le 18 septembre 1963 et y séjourna jusqu’en octobre de la même année188. Sur les conseils du nouveau conseiller commercial à Hong Kong, Jean Allègre, la composition de la mission avait été élargie à une vingtaine de représentants de sociétés commerciales, de grandes entreprises et de banques intéressées par le marché chinois : IMPEX, Brambilla, Olivier, Optorg, S.N. Marep, Chantiers de l’Atlantique, Pechiney, Ugine, Massey-Fergusson-France, Société alsacienne de constructions mécaniques, Kuhlmann, GENEMA, Speichim, Davum Exportation, Sud-Aviation, Régie Renault, Comptoir d’escompte de Paris, BFCE189. En revanche, l’administration s’opposa avec une belle unanimité à ce que le conseiller commercial accompagnât en Chine la délégation patronale : il était encore trop tôt pour conférer à ce voyage une portée politique190. De retour à Paris, Georges-Picot se rendit dès le 8 octobre à la direction d’Asie. Ses contacts officiels avec les autorités chinoises s’étaient approfondis puisque, outre ses interlocuteurs commerciaux « habituels » (Lu Hsu-Chang), il avait été reçu à Pékin par le vice-premier ministre, ministre des Affaires étrangères chinois, le maréchal Chen Yi, et avait même échangé quelques mots avec Zhou Enlai avant un banquet. La « "normalisation prochaine" des relations politiques entre les deux pays avait été évoquée, et la Chine souhaitait que des représentations commerciales et culturelles officielles fussent dès à présent constituées191. »
47Les pouvoirs publics tempérèrent jusqu’à la reconnaissance officielle l’ardeur des professionnels du commerce avec la Chine. À titre d’exemple, l’idée, soutenue principalement par deux sociétés commerciales, Olivier et Brambilla, depuis le mois d’avril 1963, d’organiser une exposition technique en Chine, comme cela avait pu se faire à Moscou ou à Mexico, leur paraissait tout à fait prématurée192. L’exposition intitulée « Science et Technique françaises » commença néanmoins à s’organiser sous l’égide du Conseil pour le développement du commerce international. Le problème de fond demeurait : celui de son patronage. Le conseiller commercial à Berne eut beau s’employer à faire admettre à son homologue chinois, Huang Ching-Tang, l’idée d’un comité formé d’industriels, l’attaché commercial chinois répéta « qu’il préférait qu’un organisme syndical ou semi-gouvernemental accorde son patronage à [la] manifestation ». Il fallait donc trouver un organisme susceptible de correspondre au Conseil pour le développement du commerce international. Pour trouver une idée, de Tschaïkowski éplucha un rapport de son homologue britannique à Pékin, Stewart Ross, sur la manifestation montée en juillet par la Grande-Bretagne, « premier pays occidental à avoir organisé une exposition en Chine depuis 1949 ». Elle avait été parrainée par le Sino-British Trade Council, ce qui conduisit de Tschaïkowski à proposer que la commission pour l’Extrême-Orient du CNPF tînt le même rôle193. Le Quai d’Orsay estima cette suggestion prématurée, subordonnant, encore à cette date, sa décision au retour de la mission du CNPF à Pékin : il demanda à de Tschaïkowski de s’en tenir à des contacts purement exploratoires194. Or, il semble que, sans l’en prévenir, le service de l’Expansion économique du quai Branly ait commencé à pousser les feux de manière indépendante, en mettant sur pied un comité comprenant le directeur du CNCE, celui de la COFACE et Jacques Duhamel. Philippe Baudet, ambassadeur de France à Berne, s’inquiétait du « manque de coordination entre les services de l’Expansion commerciale et notre ministère. La direction des affaires économiques jugera sans doute utile de se mettre en relations sans délai à ce sujet avec le quai Branly195 ».
48Le second semestre de 1963 préluda au rapprochement politique. Des informations contrastées parvenaient aux autorités françaises : optimistes, si l’on suivait les analyses contenues dans le dernier rapport du conseiller commercial de France à Hong Kong, sur le départ196, plus circonspectes, à lire le rapport de son collègue, conseiller financier pour l’Asie. Après des considérations techniques, celui-ci développait une analyse politique soulignant la « hargne avec laquelle les Chinois évoquent encore la période de domination impérialiste », ce qui laissait mal augurer d’une discussion sur les créances financières françaises, et pointant l’« extrême irritation » suscitée par la réglementation CHINCOM. Le conseiller financier suggérait à la diplomatie française de bien tenir compte de la psychologie chinoise : « L’introduction au sujet s’est faite sur le thème de l’erreur commise par les Occidentaux lorsqu’ils pensent pouvoir et devoir fournir à la Chine un matériel de pays sous-développé, démuni des plus récents perfectionnements197. » Au demeurant, peu de temps avant l’officialisation des relations diplomatiques entre la France et la Chine, les réseaux de la diplomatie économique avaient créé un climat propice au rapprochement, mais étaient loin d’avoir conduit à une implantation véritable et profonde des industriels français en Chine. Les missions qui s’étaient multipliées à partir de 1962 avaient eu une vertu essentiellement exploratoire et politique, au sens propre du terme, et avaient permis aux acteurs étatiques, parapublics et privés de s’identifier mutuellement.
49Sur les marchés étatisés comme ceux de la Chine et de l’URSS, un État comme la France, fondé sur un système d’économie mixte et une multiplicité d’organismes parapublics, ne pouvait que rassurer les pouvoirs publics. S’ajoutait un paramètre économique : le désir de Pékin d’une diversification de ses sources d’approvisionnement pour ne pas se retrouver dans la situation antérieure de dépendance vis-à-vis de l’URSS. Et un paramètre politique tout aussi important, formulé par Lu Hsu-Chang : « Ce que nous aimons beaucoup dans la France, c’est que, bien qu’étant un petit pays, elle refuse de se laisser satelliser198. » Toutefois, ces initiatives ne pouvaient dissimuler la timidité des entrepreneurs français à se lancer sur ce nouveau marché par comparaison avec les contacts noués par les Britanniques, les Hollandais, les Italiens et les Japonais dans le même laps de temps. A Shanghai, notait le nouveau conseiller commercial à Hong Kong, « la Machinery Corporation est en rapport avec 21 sociétés françaises. Elle correspond avec 200 firmes anglaises. Il faut donc que les chefs de nos industries entreprennent le voyage de Pékin et de Shanghai199 ». Dans l’attente de la reconnaissance officielle, c’était lui qui continuait à assurer les relations commerciales entre les deux pays. Une nouvelle fois soumis aux pressions des autorités chinoises, désireuses de parvenir à l’institutionnalisation de ces contacts, il estimait, le 21 janvier, qu’« une éventuelle reconnaissance du gouvernement de Pékin ne nous apporterait pas de grands avantages sur le plan de nos échanges avec la Chine ». Toutefois, « le climat qui règne dans la capitale chinoise fait que, si une telle décision devait être prise, elle devrait, selon lui, intervenir sans trop tarder si l’on veut qu’elle conserve tout son intérêt politique200 ». La reconnaissance de la République populaire de Chine par la France eut lieu le 27 janvier 1964, au terme d’un processus de mieux en mieux connu201. Initié par le général de Gaulle qui envoya Edgar Faure en mission exploratoire à Pékin du 18 octobre au 5 novembre 1963, il se poursuivit par l’ouverture de la négociation à Berne, où le directeur d’Europe du Quai d’Orsay eut quatre entretiens entre le 12 décembre 1963 et le 23 janvier 1964, à l’issue desquels un communiqué en date du 27 janvier 1964 annonçait l’établissement de relations diplomatiques et la désignation d’ambassadeurs avant trois mois. Préludant à l’envoi des ambassadeurs, des chargés d’affaires furent échangés le 26 février. Puis, le 3 avril, Lucien Paye fut désigné par le Conseil des ministres pour être le premier ambassadeur de France en Chine populaire202.
50Bien avant cette date, en février, lors d’une réunion du Comité consultatif interministériel des conseillers et attachés commerciaux, Guillaume Guindey, qui assurait alors l’intérim à la tête de la DREE, évoqua le double problème pratique que la reconnaissance posait au ministère de l’Économie et des Finances : soumettre dès que possible à l’ambassadeur pressenti, Paye, des candidats valables pour pourvoir le poste de conseiller commercial et proposer sans attendre un agent intérimaire pour remplir cette fonction, « du fait de l’attraction exercée par ce marché sur les commerçants et industriels qui s’agitent déjà ». Pour le poste de conseiller commercial à Pékin, la candidature de Robert Richard fut retenue par l’ambassadeur. Il commença à travailler au début de l’été203. Il fut officiellement présenté, le 4 juillet, par son ambassadeur Lucien Paye à Lu Hsu-Chang204. Son témoignage atteste que l’établissement des relations diplomatiques n’améliora nullement la qualité du dialogue entre les deux États, marqué par la méfiance : « Le caractère particulier que les processus de pensée de mes interlocuteurs chinois et leurs inhibitions de tous ordres confèrent à ces entretiens vaut d’être noté. Attendant les questions plus souvent qu’ils ne les posent, ne fournissant pas d’explications spontanément et n’en donnant que si l’on insiste, avares de détails et de précisions même lorsqu’il est aisé de les connaître auprès des Français avec lesquels ils traitent, les fonctionnaires chinois que j’ai rencontrés sont dès l’abord d’une circonspection qu’encourage la présence à tous les entretiens de secrétaires chargés d’en faire le compte rendu exhaustif et qui tient essentiellement à la crainte de parler trop – ou sans fard. Il est bon, lorsqu’on aborde un sujet, d’en connaître le dossier à l’avance pour n’attendre de ses interlocuteurs que des confirmations, ou, avec de la chance, des précisions. En outre, le truchement d’interprètes souvent inexpérimentés ajoute à l’approximation de la pensée le risque de contresens qui rendent incertaine la communication des paroles205. » La normalisation diplomatique n’eut pas non plus d’effet immédiat sur les relations commerciales, ni sur le dossier des ventes de Caravelle206.
51La question de l’exposition technique française à Pékin fut de nouveau abordée à la mi-avril 1964207. Elle se tint finalement du 5 au 25 septembre 1964. Elle fut inaugurée, en présence de Lucien Paye, par de hauts responsables chinois qui manifestèrent ainsi leur désir « d’entourer la première manifestation industrielle française dans leur capitale d’un éclat particulier208 ». Le conseiller commercial rapporta la satisfaction de l’ingénieur et du décorateur français éprouvée pour l’ardeur et la dextérité des ouvriers chinois qui assurèrent le montage, et « dont le rendement, et plus encore l’honnêteté étaient sans commune mesure avec ceux des ouvriers soviétiques qu’ils avaient pu juger lors de l’Exposition française de Moscou en 1961 et qui avaient été, selon eux, au-dessous du médiocre ». Il souligna la cordialité particulière manifestée par le ministre chinois des Affaires étrangères, le maréchal Chen Yi, pour Bertrand de Gaulle, neveu du président de la République, qui se tenait au stand de sa société L’Électronique appliquée. Toutefois les sociétés de premier plan comme Thomson ou la TSF ne s’étaient pas déplacées, ce qui attira au directeur d’Asie Manac’h ce reproche à peine voilé du premier conseiller de l’ambassade de Chine à Paris, expliquant « avec un sourire plein de sous-entendus, que son gouvernement avait regretté que le niveau technique de cette exposition "n’eût pas été très élevé", ce qui pouvait porter à croire, a-t-il précisé, que les techniciens français sous-estimaient le degré d’avancement de leurs collègues chinois209 ». Au terme de cette première année ayant suivi l’établissement des relations diplomatiques, peu de changements étaient observables dans les relations économiques entre les deux pays. Aucun accord commercial n’avait été conclu. Les échanges restaient d’un volume très modeste et déséquilibré en faveur de la France. La conclusion de quelques affaires en cours de négociation avait certes été accélérée par la reconnaissance de la Chine populaire, mais la vente de matériel aéronautique (Caravelle et Alouette) semblait ne plus devoir aboutir. Jouait néanmoins en faveur de la France la volonté politique de Pékin de la distinguer au sein du groupe des pays occidentaux, en lui attribuant certains marchés210. Dans le domaine de l’aviation civile, il fallut attendre 1968 pour que la Chine acquît 15 hélicoptères Alouette 111211.
Les voies nouvelles de l’influence
52Sanction ou intrusion, la diplomatie commerciale de la France pendant la guerre froide explora aussi, comme le firent ses voisins, des voies plus douces de pénétration des marchés. Cette démarche reposait sur la conviction maintenue qu’elle pouvait dans ce domaine exporter non seulement des marchandises et des prestations de services, mais des valeurs qu’elle estimait universalisables. Elle le fit en s’appuyant sur les vecteurs traditionnels de son influence à l’étranger, mais, sans verser comme son voisin ouest-allemand dans une sorte d’obsession de l’image qu’elle donnait alors à l’étranger212, elle était consciente que l’enjeu résidait aussi dans sa capacité à modifier cette image, dans ses capacités d’innovation technologique et de transmission de ses savoir-faire. Au même titre que les expositions artistiques ou que les tournois sportifs, les foires internationales213, les expositions techniques à l’étranger, en renouant avec la tradition des grandes expositions de l’industrie et des expositions universelles du xixe siècle, inaugurèrent une diplomatie commerciale de prestige qui participa de l’affirmation de la grandeur recouvrée.
L’entreprise publique, vecteur d’influence : le cas de Renault
53Renault bénéficiait sans conteste de son statut d’entreprise nationale, de l’influence de son principal syndicat, la CGT, ainsi que du renom de son président, Pierre Dreyfus, dont l’engagement socialiste était connu. Elle fut un véritable acteur de la diplomatie économique de l’époque dans la mesure où ses dirigeants furent investis par les États socialistes d’une fonction de représentants du gouvernement français. Ainsi, lors de ce voyage à Leipzig en 1966, durant lequel le représentant de Renault laissa entendre que, si la Régie nationale obtenait des contrats avec des entreprises est-allemandes susceptibles d’entraîner la présence en France de personnels compétents de ces entreprises, Renault pourrait intercéder auprès de l’administration française pour que la politique draconienne de délivrance des visas fût alors infléchie214. Le caractère emblématique de Renault, son histoire déjà longue comme sa capacité d’innovation technique participèrent de cette « représentation extérieure215 », du renouvellement de l’image d’elle-même que la France entendait projeter à l’étranger au lendemain de la guerre. De manière générale, les fleurons de l’industrie nationale furent des motifs récurrents de cette image tant en France que dans les autres pays : il n’est que de songer au rôle tenu par Krupp à la même époque dans la diplomatie économique de la jeune République fédérale et à la manière dont le groupe industriel parvint à transformer son image de « roi des canons » (Kanonenkönig) et de criminel de guerre grâce aux campagnes publicitaires, aux livres scolaires, à sa participation aux foires industrielles, et à l’associer dorénavant au miracle économique allemand. La visite des installations Krupp devint dans les années 1950 une étape obligée des visites d’État préparées dans une concertation étroite avec les pouvoirs publics216.
54Autre cas symbolique de la force de la Régie : les circonstances de son désengagement du marché israélien au lendemain de Suez. Toutes les entreprises françaises avaient pâti de l’intervention militaire : l’exemple le plus spectaculaire fut celui de Renault, qui, à la suite de la conclusion d’un contrat avec Israël en 1956, s’était vu interdire les marchés proche-orientaux. La Ligue arabe s’était prononcée pour le boycott, suivie par tous les pays arabes à l’exception du Liban, du Maroc et de la Tunisie217. Renault dénonça le 31 mars 1958 le contrat de montage signé avec la société Kayser Frazer of Israël. Soutenue dans ses démarches par l’ambassade de France au Liban, la Régie envoya un directeur commercial prospecter en Égypte et se mettre en relation avec le secrétariat de la Ligue arabe. En février 1959, Israël éleva le problème « du plan économique au plan politique », exerçant de fortes pressions tant sur Renault que sur le Quai d’Orsay pour que les livraisons reprissent. L’ambassadeur de France en Israël vint alors, en personne, expliquer au cabinet du ministre français des Affaires étrangères que la chaîne de montage Renault et la Mission archéologique étaient les deux piliers de l’influence française en Israël218. Revenant sur sa position, la Régie accepta aussi de satisfaire une commande de livraison de 2 400 véhicules, ce qui entraîna de nouvelles menaces de boycott de la Ligue arabe à l’encontre non seulement de Renault, mais de tous les fournisseurs de celle-ci et de toutes les sociétés nationales françaises, comme Air-France ou EDF. La situation était intenable.
55Le quai Branly intervint alors pour faire admettre au Quai d’Orsay que l’abandon du montage de ses matériels par Renault ne priverait pas la Régie de son débouché israélien dans la mesure où il s’agissait d’un marché captif : la plus grande partie des voitures israéliennes étaient des Renault et aucun constructeur européen ne menaçait la position française. En revanche, la dénonciation du contrat aurait des effets bénéfiques : « La Régie peut escompter le maintien et l’accroissement de ses ventes au Liban (en 1958, 25 % du chiffre d’affaires d’Israël), la reprise d’un marché important sur la République arabe unie, la Libye et l’Arabie séoudite et l’essor de ses ventes au Soudan, au Maroc et en Tunisie. Des projets d’usines de montage soit à Alexandrie, soit à Beyrouth pourraient alors être envisagés pour alimenter l’ensemble des pays du Moyen-Orient219. » Ainsi les considérations économiques postulaient en faveur de l’élargissement des positions françaises dans les pays arabes au détriment de l’entente avec Israël220. En septembre 1959, la Régie décida de confirmer la dénonciation du contrat effectuée dix-huit mois plus tôt et d’arrêter aussi la livraison des véhicules acceptée en février 1959. Elle en informa officiellement le Quai d’Orsay le 8 septembre 1959221. Christian de Margerie, responsable des Accords bilatéraux, en prit acte le 10 septembre. En réalité, Renault et le Quai d’Orsay, « après consultation du Service juridique et en plein accord avec Afrique-Levant », avaient dans les jours précédents mis au point cette formalité destinée au Bureau du boycott. La rédaction des lettres n’impliquait pour le Quai « ni reconnaissance du principe du boycott, ni garantie par nous des engagements pris par Renault ». Mais elle devait permettre de satisfaire la Ligue arabe. « Il est entendu par ailleurs que la copie de la lettre de rupture de Renault avec la Kayser Frazer of Israël sera certifiée conforme par un commissaire de police dont la signature sera légalisée par notre Service des chancelleries. Cette procédure, qui aura l’avantage de permettre aux Arabes d’avoir en main un document couvert de cachets officiels, ne présente aucun danger pour nous. » Le Quai recommanda par ailleurs la plus grande prudence à son ambassadeur au Liban, ajoutant : « J’espère que nous touchons enfin au but et que le boycott de Renault par les pays arabes ne sera bientôt plus qu’un mauvais souvenir222. » Devant les nouvelles protestations émises par Israël tant auprès du Quai d’Orsay que du quai Branly, Olivier Wormser marqua personnellement au chargé d’affaires d’Israël en France qu’il s’agissait d’une « affaire purement commerciale » dont la Régie avait la responsabilité, ce que confirma peu après Maurice Couve de Murville223.
Les vecteurs culturels traditionnels au service du commerce
56Les modalités de la rentrée française sur la scène proche-orientale au lendemain de la crise de Suez permirent à l’un de ses acteurs principaux, le diplomate Christian d’Aumale, d’écrire de manière révélatrice que « la langue suit le commerce (et quelquefois les armes)224 ». La réouverture des missions économique et culturelle au Caire fit l’objet d’un processus de trois ans. Depuis le milieu des années 1950, la présence économique française au Proche-Orient avait été grevée, en partie, tant par sa politique algérienne que par la crise de Suez225. Le retour de la présence française en Égypte fut orchestré par le biais du règlement de la question des biens français mis sous séquestre le 1er novembre 1956 et de la réouverture des principaux centres culturels français. Au lendemain de la crise de Suez, si la France avait conservé des relations normales avec la majorité des pays de la région (Liban, Iran, Irak, Koweït, Éthiopie, Soudan, Libye), ses relations commerciales étaient suspendues avec l’Égypte, la Syrie et la Jordanie226. Soucieuse de ne pas être enfermée dans un tête-à-tête avec l’URSS, l’Égypte envoya rapidement des signaux favorables au rétablissement de ses relations avec la France227. Le gouvernement du Caire s’inquiétait aussi de l’écoulement de la récolte de coton de 1956-1957, matière première qui représentait 80 % de ses exportations : or, la part de coton acheté par la France en représentait 10 96. Elle était le troisième acheteur après l’URSS et la Tchécoslovaquie. Une négociation entre les deux pays s’ouvrit à Genève en août 1957 : elle aboutit aux accords de Zurich du 22 août 1958 qui devaient permettre le rapatriement des avoirs français déséquestrés ou liquidés et la relance des relations commerciales entre les deux pays. Les intérêts français étaient alors représentés par l’ambassade de Suisse au Caire.
57Envoyé par Olivier Wormser « recoller les morceaux avec l’Égypte », Christian d’Aumale arriva au Caire à la fin du mois d’octobre qui suivit pour présenter aux autorités égyptiennes la Commission des biens français en Égypte prévue par les accords228. Il l’installa dans les locaux de la Maison de France dont une partie des étages était encore sous scellés. S’il fut sensible à l’accueil favorable réservé par l’Égypte à l’arrivée du général de Gaulle à la présidence du Conseil, il fut aussi marqué par le renforcement de la position soviétique, à la suite de l’intervention occidentale au Liban et en Jordanie, et qui se traduisait par une politique culturelle plus offensive, incitant les élèves sortant des classes secondaires à se rendre en Russie229. Les diplomates français étaient pleinement conscients des efforts accrus de la pénétration du Bloc communiste au Moyen-Orient, confirmés par Khrouchtchev à la tribune du XXIe Congrès, en février 1959. La plus grande part (48 %) de l’aide du Bloc était consacrée à cette zone en 1959 : elle n’était encore que de 25 % en 1956. En outre, depuis Suez, les crédits s’étaient diversifiés, même si les projets à dimension stratégique étaient privilégiés, comme la construction de docks et d’aérodromes ainsi que les projets spectaculaires comme la construction de la première tranche du barrage d’Assouan.
58La France devait par conséquent se hâter de reprendre toute la place qu’elle occupait jusqu’à présent dans le domaine culturel pour améliorer la position des entreprises françaises sur le marché égyptien. L’Institut français d’archéologie orientale (IFAO) et l’Institut français des hautes études juridiques, tous deux sous séquestre, étaient les vecteurs traditionnels de la culture française, comme les lycées et les collèges de la Mission laïque française. Lors des négociations de Genève, l’Égypte avait donné son accord de principe à la restitution de l’IFAO à la France, ainsi qu’à la restitution des lycées d’Alexandrie et du Caire à la Mission laïque. Il s’agissait que ces décisions devinssent effectives et, au-delà, que la France s’en servît pour affermir sa présence dans le pays. Au moment de l’inauguration de l’Institut allemand du Caire, C. d’Aumale avait relevé que la RFA « poursuivait avec méthode l’effort de pénétration en Égypte qu’elle a[vait] engagé depuis cinq ou six ans » et ajoutait ce commentaire : « Les résultats les plus cités ont trait au commerce, mais les efforts culturels vont de pair et sont étroitement liés [...]230. » L’un des premiers combats du diplomate français fut d’obtenir que l’Égypte revienne sur une loi promulguée par le très anti-occidental ministère égyptien de l’Éducation et qui entendait réserver aux seuls citoyens de la République arabe unie (RAU) la propriété et la gestion des écoles et de l’enseignement. L’autre fut de favoriser l’envoi réciproque de représentants commerciaux officieux alors que la reprise de relations diplomatiques entre les deux États n’avait pas encore été amorcée231.
59Du côté français, des pressions étaient également exercées par les milieux privés désireux de poursuivre leurs affaires dans la région. La Commission des biens français reçut ainsi la visite du directeur de SOGREAH, société d’ingénierie dans le domaine hydraulique, chargée depuis 1953 d’études relatives au haut barrage d’Assouan et saisie de nouvelles demandes relatives à l’agrandissement du canal de Suez, à l’établissement d’un laboratoire d’études à Ismaïlia et aux réseaux d’irrigation du delta. Ce fut l’occasion pour Aumale de plaider pour le développement des relations techniques entre la France et les autres États. « Le manque de considération dont souffre notre pays dans les sphères dirigeantes (et que M. Dannel232 a parfaitement senti) résulterait du fait que nous ne sommes que trop ignorés dans ce domaine, et au contraire trop connus sur le plan littéraire et artistique233. » Le 11 août 1959, un conseiller commercial fut affecté au Caire pour y exercer les fonctions de chef de la mission commerciale française234. Il relança les activités de son poste avec une équipe de trois personnes. Peu après, un conseiller commercial fut désigné officiellement235. Le 22 octobre 1959, le ministre français des Affaires étrangères autorisa Christian d’Aumale à signer avec les autorités égyptiennes la lettre relative à l’échange de missions économiques et culturelles entre la RAU et la République française236.
60Il fallut attendre le milieu des années 1960 pour que la France effectuât sa véritable « rentrée » sur les marchés arabes : le Liban, l’Égypte, l’Iran redevinrent des clients privilégiés237. Les relations diplomatiques avec l’Égypte reprirent en mai 1963 et un accord commercial fut signé en juillet 1964. « Notre commerce, profondément affecté dans les pays arabes par les événements de Suez, n’avait pas connu depuis lors de reprise véritable et bénéficiait en Israël d’une année exceptionnelle » grâce à la livraison d’un paquebot, notait la DREE en 1965238. De manière générale, les ventes de produits français connurent un nouvel essor de 1963 à 1969, sauf dans les pays répartis de part et d’autre du sud de la mer Rouge, encore peu prospectés par les Français et soumis tant à l’influence britannique qu’à une forte concurrence indienne et japonaise. Si la part des importations de produits français dans les importations totales des pays arabes était beaucoup plus faible que celle des importations en provenance des autres grands pays occidentaux, leur croissance fut sensiblement plus rapide dans les années 1960239. L’administration spéculait une fois de plus sur la volonté politique d’États qui, comme l’Irak ou le Liban, souhaitaient ne pas trop se lier économiquement aux États-Unis ou à l’URSS. Elle ne tablait pas, en revanche, sur les effets d’éventuelles mesures de rétorsion que certains pays arabes comme la Syrie, l’Irak ou la Libye avaient annoncé vouloir prendre contre les États-Unis, la Grande-Bretagne et la RFA à la suite de leur position dans la guerre des Six Jours en juin 1967. Certes, ces pays occidentaux étaient les plus solides concurrents de la France dans le secteur des biens d’équipement mais, d’une part, d’autres concurrents sérieux étaient apparus dans la région (l’Italie, les pays de l’Est) et, d’autre part, les possibilités de substitution lui apparaissaient faibles240.
61En revanche, la France fondait sa stratégie sur une pratique de plus en plus libérale en matière de crédits à l’exportation. Il y eut, dans ces années-là, la claire anticipation de la politique qui fut suivie par la France à partir de 1973 : développer une politique de crédits en lien avec la situation financière des pays du Proche-Orient. Elle privilégia les pays disposant de ressources importantes en raison des revenus du pétrole (l’Arabie, le Koweït, Bahrein)241, tout en veillant à ne pas négliger des pays à revenus plus faibles (Irak, Syrie, Égypte), appelés à se développer et qui bénéficiaient de l’existence d’une nouvelle classe moyenne. Pour l’administration, l’effort de la France devait « être général et adapté certes spécifiquement à chacun de ces pays, mais jamais discriminatoire242 ». Jean Chapelle intensifia les efforts de l’administration dans la région, prenant l’initiative en janvier 1969 d’organiser avec la direction économique du Quai d’Orsay une réunion commune au Caire pour définir les grands axes du redéploiement économique de la France au Proche-Orient243. La France disposait d’un réseau de PEE qui s’était étoffé depuis le début des années 1950 : des postes étaient établis au Liban (le seul à avoir continué à fonctionner normalement entre 1956 et 1963), en Égypte, en Libye, en Irak, en Arabie Saoudite, au Koweït. Le directeur de la DREE souhaitait que les effectifs fussent étoffés. Pour consolider la présence française, il prônait le renforcement de la coopération technique, en critiquant la politique antérieure – « nos actions ont été partielles, peu coordonnées avec l’objectif commercial »–, ainsi que le renforcement des liens entre industriels français et fonctionnaires des pays arabes. Il tablait sur la tenue de la foire de Djeddah à l’automne 1969 pour être le point de départ de ces relations nouvelles244.
62En ce qui concernait les secteurs industriels à soutenir, il marquait ses distances vis-à-vis d’une politique faisant la part trop belle à l’exportation de biens d’équipement lourds et aux réalisations industrielles dans le Proche-Orient arabe. En premier lieu, les réalisations françaises en la matière s’étaient trop souvent soldées par des déconvenues et de « graves problèmes contentieux » comme en Libye, en Irak ou en Arabie Saoudite durant la décennie écoulée. Les projets de construction de nouveaux aéroports à Beyrouth et à Amman ne lui paraissaient pas devoir être soutenus, car ils absorberaient l’ensemble des moyens financiers que la DREE souhaitait voir autrement répartis : « Il existe en effet des besoins impérieux de fournitures de matériel de transport ou de construction d’entreprises fabriquant des produits alimentaires ou des biens de consommation courants pour lesquels notre participation serait certainement la bienvenue et qui porterait un aussi bon témoignage de nos capacités et de notre assistance245 ». Aussi Jean Chapelle préconisait-il le relèvement des plafonds d’engagement alors très stricts sur certains de ces pays pour encourager l’essor des ventes des biens de consommation et d’équipement légers en Égypte et en Syrie notamment. D’autre part, plusieurs études des services de l’administration montraient que le marché des pays arabes était plutôt tourné vers l’importation de biens de consommation et d’équipement léger. Le cas de l’État d’Abu Dhabi, « territoire pauvre et retiré du monde moderne jusqu’en 1962 », devenu grâce à l’exploitation pétrolière le plus riche pays du monde par tête d’habitant, était exemplaire. Le pays, immense chantier, continuait à développer ses infrastructures (routes, aqueducs...), mais ne se lançait pas dans une industrialisation galopante et était aussi demandeur de véhicules et de biens de consommation divers246. Dans une certaine mesure, cette analyse appliquée au Proche-Orient venait renforcer les arguments favorables à la diversification sectorielle des exportations françaises, encore trop peu écoutés.
Les grandes manifestations commerciales
63Autre modalité d’action, l’organisation de grandes opérations commerciales destinées à frapper l’opinion marqua le début des années 1960. Moscou (1961), Mexico (1962), Pékin (1964) inaugurèrent un cycle de manifestations commerciales qui permirent à la France de faire connaître ses produits sur de nouveaux marchés. Suivirent Djeddah (1969), São Paulo (1971), Kuala Lumpur (1973). Elles allèrent de pair avec des réalisations d’envergure, comme les métropolitains construits à Mexico, Montréal, Santiago par les ingénieurs français. L’organisation d’une exposition technique française à Mexico à l’automne 1962 fut exemplaire des ambitions françaises et de leurs modalités d’expression247. Elle se tint à l’auditorium national, situé dans le bois de Chapultepec, en plein cœur de Mexico. L’exposition de Moscou avait été inaugurée le 15 août 1961, deux jours après la construction du mur de Berlin, au lendemain d’une des crises les plus graves de la guerre froide248. Celle de Mexico avait pour contexte la crise de Cuba. Les deux expositions furent d’ailleurs comparées : pour Le Monde, « ce ne fut pas le grand jeu coûteusement étalé l’an dernier à Moscou, avec le vif désir de faire envier aux naturels soviétiques le paradis français. Plus modeste à Mexico, la présentation fut tout aussi claire et soignée. [...] Cette fois du moins nous avons entendu au fil des stands de la part des exposants français : "Ici, ce n’est pas comme à Moscou, on travaille" et des : "J’en connais qui regretteront de ne pas être venus" débordants d’optimisme249 ». Le ministre Valéry Giscard d’Estaing se déplaça pour inaugurer en personne l’exposition le 19 octobre, comme son prédécesseur Wilfrid Baumgartner avait fait le déplacement à Moscou l’année précédente. Le temps n’était plus où, en 1951, on avait délégué le ministre de la Marine marchande à Mexico pour une manifestation similaire.
64L’événement eut une couverture de presse importante pour une manifestation commerciale : Le Monde, le Figaro, La Vie française, L’Économie, Combat en rendirent compte avec enthousiasme. Le stand Renault-Dina fut salué comme une « véritable exposition d’art », car mêlant une chaîne de montage en partie réelle et une chaîne en partie dessinée, sous des effets de lumière et de musique concrète250. « Le vieux vélodrome d’hiver mexicain est méconnaissable. Nos architectes ont fait, les premiers, en le transformant pour les usages de l’exposition française, la démonstration de la sûreté et du goût de nos techniques : c’est une arène parfaitement cylindrique, gainée tout entière à l’extérieur des couleurs françaises et mexicaines. Sur cette gorge chatoyante, la Régie Renault a posé en sautoir sept Dauphine rutilantes. [...] L’opération "Prenez le volant", organisée aux portes mêmes de l’exposition, connaît le plus franc succès : sept cents essais sur Dauphine par jour. La Dauphine est en passe de devenir une voiture nationale mexicaine251. » On célébrait la première place acquise par la Régie Renault au Mexique et la réussite de la collaboration avec la Diesel Nacional S.A. (Dina), fondée par le gouvernement mexicain en juillet 1951 pour le montage, la fabrication et la distribution d’automobiles, de camions et d’autobus. En janvier 1960, à la suite de l’arrêt de la fabrication de modèles Fiat par Dina, les deux sociétés avaient signé un contrat pour le montage, la fabrication et la distribution locale de la Dauphine. En moins de deux ans, 14 000 véhicules, expédiés en caisses de Billancourt, étaient sortis assemblés du complexe de Sahagun et la construction d’autres modèles étaient en cours252.
65L’exposition de Mexico visait les acheteurs mexicains, mais au-delà elle entendait être une vitrine des techniques françaises pour l’ensemble des pays d’Amérique latine. Trois cents entreprises présentaient donc sur 20 000 mètres carrés leurs matériels les plus représentatifs dans le domaine des biens d’équipement, soit une superficie inférieure de moitié à celle de Moscou (44000 mètres carrés). Toutes les grandes sociétés industrielles étaient représentées : Rateau, Neyrpic, Alsthom, Jeumont, le CEM, Merlin-Gérin, qui avaient commencé à équiper les centrales électriques mexicaines. Mais ce qui frappa également les esprits, ce fut la capacité des entrepreneurs français à coordonner leurs efforts et à se présenter sous l’égide de chambres syndicales ou de groupements d’exportations. Ainsi la Fédération des industries mécaniques put à plusieurs reprises délivrer un message clair par la bouche de son président François Peugeot : ce premier succès devrait se prolonger par une prospection opiniâtre du marché mexicain afin de ne pas retomber dans l’erreur de la précédente exposition à Mexico (1951)253. Le Syndicat général de la construction électrique par la voix de son président Henri Davezac rappela la part déjà prise par les constructeurs français à l’équipement du pays254. On salua aussi la capacité manifestée pour la première fois par une région économique, en l’occurrence celle de Lyon-Saint-Étienne, à présenter dix-neuf entreprises régionales de toutes tailles, avec le concours de l’université, de l’industrie et de la banque255.
66Cette manifestation comme la proposition de l’octroi du prêt mixte par le ministre V. Giscard d’Estaing256 eurent lieu, rappelons-le, avant les rencontres qui scellèrent le rapprochement politique voulu par le général de Gaulle entre la France et le Mexique. La visite en France du président Lopez Mateos du 25 au 29 mars 1963, qui s’insérait entre l’offre de prêt en octobre 1962 et sa signature en juin 1963, prolongea l’influence positive de l’exposition et inaugura le rapprochement politique entre les deux États257. Une commission de coopération franco-mexicaine fut instaurée à l’issue du séjour du président mexicain. Puis, dans un second temps, le président français visita en mars 1964 le Mexique, avant d’entreprendre sa célèbre tournée en Amérique latine du 20 septembre au 16 octobre 1964 qui le consacra le « commis voyageur de notre exportation », selon le mot ironique du Nouvel Observateur258. Vivement critiquée aux États-Unis259, la démarche se fondait dans la continuité des liens culturels et intellectuels tissés aux xviiie et xixe siècles par les deux États260. La diplomatie commerciale vint appuyer la stratégie gaulliste de soutien à l’émancipation de la tutelle des États-Unis261, mais elle permit aussi aux constructeurs français d’affirmer leur présence sur un continent où la concurrence était très vive.
67Une première réunion interministérielle eut lieu le 24 novembre 1964 afin de donner suite aux conversations engagées. La première fut consacrée à la Colombie : il y fut décidé de participer au programme de développement de l’industrie pétrochimique, fondé sur le développement de la société nationale Ecopetrol et la limitation des activités des filiales américaines, notamment dans le domaine du raffinage. La Colombie demandait une assistance technique étrangère autre qu’américaine et, dans ce domaine, la France était bien placée. La DREE estimait que le quai Branly et le Quai d’Orsay pourraient travailler de pair à un programme commun d’aide en recourant à l’expertise de la direction des carburants et de l’Institut du pétrole262. Entre décembre 1964 et janvier 1965, quatre nouvelles réunions interministérielles furent de nouveau consacrées à l’Amérique latine263, « zone privilégiée en ce qu’elle a[vait] bénéficié des premiers prêts publics consentis en dehors de la zone franc264 ». L’importance attachée à la région se traduisait aussi dans les 48 % dévolus à l’Amérique latine sur le total des crédits consacrés à la coopération technique bilatérale économique. Au printemps 1968, la France décida d’octroyer un prêt gouvernemental à la Colombie pour soutenir son programme d’électrification conçu par l’organisme national Electraguas, en sus d’un crédit acheteur dont le Comité des directeurs avait admis le principe le 14 février 1968. Plusieurs raisons expliquaient sa décision : si le programme ne comportait pas la livraison de grands ouvrages spectaculaires de type « clés en main », sa variété technique et son étendue géographique procureraient une bonne publicité pour la technique et les matériels français dans tout le pays265. Le protocole fut signé à Bogota le 10 décembre 1968, comportant un prêt du Trésor de 10 millions de francs. Il fraya la voie à une nouvelle décision colombienne de confier à la Régie Renault le soin de construire une usine de mécanique et de montage d’automobiles dans le cadre d’un nouveau prêt gouvernemental français266.
68En 1965, la France se mit sur les rangs lorsque le Mexique décida de créer un métro dans sa capitale. La bataille fit rage entre les entreprises françaises et les entreprises américaines, et l’engagement français suscita le déclenchement d’une campagne de presse hostile à la France aux États-Unis267. La France obtint le marché. Un contrat d’assistance technique pour les études, la construction, les équipements fixes, les matériels roulants et la mise en service du réseau fut signé le 15 juin 1967 entre la ville de Mexico et un groupe mixte d’engineering, dont la composante française était le groupe formé par la SOFRETU, Société française d’études et de réalisation de transports urbains, et la Société générale de traction et d’exploitation, animée par la RATR Les délais d’exécution étaient très courts : la première ligne devant entrer en service le 1er juin 1969, les travaux de construction commencèrent dès le 19 juin 1967. Le matériel roulant était du type sur pneumatiques utilisé à Paris et à Montréal. Les entreprises chefs de file des livraisons de matériel étaient Brissonneau et Lotz et CIMT-Lorraine ; les autres entreprises associées : les Ateliers de construction du Nord de la France, Alsthom, la Compagnie électromécanique et Jeumont-Schneider268. Le protocole financier pour sa réalisation fut signé le 21 juin 1968 à Mexico : il combinait crédits fournisseurs sur dix ans, prêt du Trésor sur quinze ans et crédits bancaires sur cinq ans269. Lorsque la France se porta de nouveau candidate lors de la construction d’un métro à Santiago du Chili, Jean Chapelle, le directeur de la DREE, demanda à son ministre de soutenir le projet autant pour des raisons économiques intérieures que pour des raisons de prestige. « Une telle réalisation, écrivait-il, confirmerait sur le plan international les réussites de la technique française dans ce domaine qui s’est déjà affirmée avec succès à Mexico et à Montréal [...]270. »
Notes de bas de page
1 Jacques Marseille, « Empire colonial ou Europe ? L’enjeu des années 1950 », dans Jacques Marseille (dir.), Le commerce extérieur français de Méline à nos jours, Paris, CHEFF, p. 85-94.
2 C’est l’interprétation majoritaire qui sous-tend l’emploi de termes comme Economic Statecraft, Economic Diplomacy, Economie Warfare, dans la littérature abondante sur la mise en place de la politique d’embargo vis-à-vis des pays de l’Est (Economie Cold War).
3 Jacques Marseille, Empire colonial et capitalisme français. Histoire d’un divorce, Paris, Albin Michel, 1984, rééd. 2005.
4 Archives de la chambre de commerce et d’industrie de Paris (ACCIP), VI-2.12 (3), brochure Journées du commerce extérieur, 8-13 mars 1954, compte rendu des séances, exposé de M. Biclet, conseiller commercial en Suède.
5 Ibid., exposé de M. Herrenschmidt, conseiller commercial en Égypte. Cf. Philippe Chalmin, Négociants et chargeurs. La saga du négoce international des matières premières, Paris, Economica, 1984.
6 Archives du ministère des Affaires étrangères (AMAE), DE-CE, Papiers directeurs O. Wormser, Questions administratives, 134, sd. Attributions de la DE, note de la DAEF du 13 décembre 1962 a/s Le régime de marche de nos relations commerciales avec les pays de la CEE.
7 Ibid.
8 Ibid.
9 Centre des archives économiques et financières (CAEF), B 54 917, Proche-Orient, sd. Relations économiques avec les pays arabes ou du Moyen-Orient (1952-1969), lettre du directeur de la DREE à M. Noël, directeur du Service exportation de la société André Citroën, du 17 décembre 1965.
10 Cf. Robert Frank, « Se moderniser face aux grandes mutations (1945-1970) », dans Chambre de commerce et d’industrie de Paris (éd.), La chambre de commerce et d’industrie de Paris, 1803-2003. Histoire d’une institution, Paris, Droz, 2003, 245-246.
11 ACCIP, VI.2.12 (3), note des services administratifs pour M. le directeur général du 26 janvier 1954 a/s conversation téléphonique de M. Bernard Lafay.
12 L’archétype de cette vision est le cours délivré par Roger Nathan et Paul Delouvrier à Sciences-Po : université de Paris – Institut d’études politiques 1957-1958, Politique économique de la France, par Roger Nathan, fascicule 1, coll. « Les cours de droit », 158, rue Saint-Jacques, Paris Ve.
13 ACCIP, VI-2.12 (3), plaquette « Journées du commerce extérieur, 8 au 13 mars 1954 ».
14 Cf. les articles « Les Journées du commerce extérieur », Le Monde, numéro du 9 mars 1954, « Les conseillers commerciaux exposent leurs problèmes aux parlementaires », Le Monde, numéro du 10 mars 1954.
15 ACCIP, VI-2.12 (3), Brochure Journées du commerce extérieur, 8-13 mars 1954, compte rendu des séances, discours de M. Bernard Lafay du 8 mars 1954.
16 Ibid., discours de synthèse de M. Bernard Lafay du 13 mars 1954.
17 Ibid., discours de M. Bernard Lafay du 8 mars 1954.
18 A la suite de la fusion des Informations avec Entreprise intervenue en 1975, ce fut Le Nouvel Économiste, issu de cette fusion, qui organisa dorénavant cette manifestation.
19 ACCIP, VI-2.12 (3), Brochure Journées du commerce extérieur, 8-13 mars 1954.
20 Cf. Rémi Baudouï, « L’aménagement du territoire en France, antécédents et genèse, 1911- 1963 », François Caron, Maurice Vaïsse (dir.), L’aménagement du territoire, 1958-1974, Paris, L’Harmattan, p. 9-27 ; dans le même ouvrage, l’article de Michel Phlipponneau, « L’action régionale », p. 213-226.
21 Daniel Lefeuvre, Histoire d’un groupe de pression libéral : le comité national des conseillers du commerce extérieur de la France, 1898-1998, mémoire original d’habilitation à diriger des recherches, université Paris 1, octobre 2001, p. 157.
22 Sara Nocentini, « L’ICE e la distribuzione degli aiuti postbellici in Italia (1943-1950) », Studi Storici, a. 46, 2005, 1, p. 155-186.
23 Cf. Alice Ferrière, L’histoire du Centre national du commerce extérieur entre 1943 et 1972 : renaissance et expansion d’un service public de l’information économique. Entre continuité et ruptures, dir. Robert Frank, université Paris 1, septembre 2003, p. 27. Cf. CAEF, 1 A 438/1, Ramadier.
24 Article « M. Jacques Duhamel est nommé délégué général du Centre national du commerce extérieur », Le Monde, numéro du 6 janvier 1960.
25 Décret du 4 mai 1960.
26 Ce nouveau titre de « directeur général » se substitua à celui de « délégué général ».
27 Article « M. Pinay n’a pas été pressenti pour présider le CNCE », Le Monde, numéro du 7 janvier 1964.
28 Archives orales du Comité pour l’histoire économique et financière de la France (AO/ CHEFF), entretien de Michel de Boissieu du 20 février 1992, entretien n° 3, cassette n° 4. Michel de Boissieu a évoqué sa forte personnalité, son rayonnement, ses multiples relations : « Tout Paris l’appelait Hubert. »
29 Stanislas Jeannesson, Poincaré, la France et la Ruhr, 1922-1924. Histoire d’une occupation, Strasbourg, Presses universitaires de Strasbourg, 1998, p. 34-37.
30 Michel Debré, Trois Républiques pour une France. Mémoires, t. 1, Paris, Albin Michel, 1984, p. 90 : « Notre installation s’améliore, note Michel Debré, alors secrétaire d’un comité de révision douanière, et j’ai la chance d’avoir comme adjoint Hubert Roussellier, ami exceptionnel, précieux entre tous. » Cf. aussi le MOCI, n° 1185-1986, 21-24 août 1972, Hommage à Hubert Roussellier, témoignage de Michel Debré.
31 Ibid., t. 1, 1984, p. 317-318.
32 Entretien de M. Bertrand Larrera de Morel avec l’auteur du 18 avril 2005.
33 Arrêté du 5 mars 1963, article 1.
34 Sa naissance s’inscrivit dans le contexte général de modernisation de l’agriculture française soutenu par Edgard Pisani. Elle exprima la volonté conjointe des professionnels et des pouvoirs publics de mener une politique agricole orientée vers la conquête des marchés, à une époque où le solde de la balance commerciale agro-alimentaire de la France était très déficitaire. Or, la promotion des produits agricoles était jusqu’à cette date assurée par le CFCE, qui risquait de se sentir dépossédé. Le problème fut résolu en partie par Hubert Roussellier qui endossa la double casquette de directeur du CFCE et de la SOPEXA. Alors que les entreprises industrielles françaises parvenaient difficilement à s’imposer en Allemagne de l’Ouest, la Société était considérée dès 1962 par la diplomatie française comme l’« avant-garde des méthodes de vente concertées en Allemagne » [AMAE, DE-CE, Papiers directeurs O. Wormser, Questions administratives, 134, sd. Attributions de la DE, note de la DAEF du 13 décembre 1962 a/s Le régime de marche de nos relations commerciales avec les pays de la CEE]. Dès lors, elle soutint la modernisation des structures agricoles françaises et développa conjointement une pédagogie active à destination des milieux agricoles afin de favoriser leur implantation sur les marchés internationaux, en les sensibilisant par exemple aux techniques modernes du marketing. Réduisant la part de son budget consacrée aux foires et aux expositions, elle mit l’accent sur les missions de prospection, sur l’organisation de semaines commerciales dans les grands magasins et de campagnes publicitaires d’envergure. Enfin, l’importance nouvelle acquise par le secteur agricole eut des conséquences sur les PEE en les étoffant de nouveaux attachés spécialisés : les attachés agricoles, qui apparurent dès le milieu des années 1950.
35 Cité par Alice Ferrière, L’histoire du Centre..., op. cit., p. 88.
36 ACCIP, VI-2.12 (3), brochure Journées du commerce extérieur, 8-13 mars 1954, compte rendu des séances, discours inaugural de M. Bernard Lafay, p. 3.
37 Rapport d’activité du CNCE, 1er juillet 1956-30 juin 1958.
38 ACCIP, VI-2.12 (3), brochure Journées du commerce extérieur, 8-13 mars 1954, compte rendu des séances, discours de M. Bernard Lafay, « Le commerce extérieur de la France ».
39 L’ensemble de ces précisions nous ont été fournies par M. André Sellier dans une note du 12 novembre 2006, Propos sur l’Expansion économique à l’étranger et sur son syndicat autonome. Elles ont confirmé les informations d’une brochure du ministère de l’Économie et des Finances, Service de l’information, Synthèses récapitulatives, DREE, 1967, « Les relations économiques extérieures (1966) », p. 14.
40 Entretien de l’auteur avec M. Henri Chazel du 25 avril 2005.
41 Cité par Daniel Lefeuvre, Histoire d’un groupe de pression libéral..., op. cit., p. 161.
42 Association née en 1951 de la fusion du Comité d’action économique et douanière et de l’Association nationale d’expansion économique. Cf. Laurence Badel, Un milieu libéral et européen : le grand commerce français, Paris, CHEFF, 1999, p. 421.
43 Article « Les problèmes de l’expansion commerciale française à l’étranger », Combat, numéro du 27 février 1953.
44 Article « Où en est notre commerce extérieur ? Une interview de Joseph-André Hugues », Combat, numéro du 10 octobre 1953.
45 ACCIP, VI-2.12 (3), Brochure Journées du commerce extérieur, 8-13 mars 1954, compte rendu des séances, discours de M. Bernard Lafay, « Le commerce extérieur de la France ».
46 Assemblée nationale, session de 1954, annexe au procès-verbal de la séance du 9 juillet 1954. Proposition de loi tendant à la réorganisation des services du commerce extérieur, présentée par MM. Ramonet, Catrice, Francis Vals, Maurice Lenormand et André Hugues.
47 Ibid., p. 23.
48 JO du 7 août 1956.
49 JO du 21 mai 1957, décret du 18 mai 1957 portant règlement d’administration publique pour l’application de l’article 35 de la loi du 4 août 1956 et relatif aux pouvoirs du ministre chargé de l’Économie nationale en matière de commerce extérieur.
50 Article « M. Debré : notre commerce extérieur a doublé depuis 1959 », Le Monde, numéro du 27 janvier 1966.
51 Article « Le commerce extérieur de la France en 1966, par Charles de Chambrun, secrétaire d’État au Commerce extérieur », Le Courrier du Parlement, 27 décembre 1966.
52 Exemples analysés par Daniel Lefeuvre, Histoire d’un groupe de pression libéral..., op. cit., p. 164-165.
53 Article « Les Français veulent de plus en plus les "frontières ouvertes" », L’Aurore, numéro du 26 avril 1966.
54 Alain Bavelier, Le commerce extérieur, Paris, Presses universitaires de France, 1969 (1re édition), p. 71.
55 « L’assemblée générale du comité d’action et d’expansion économique », Le Monde, numéro du 5 juin 1953.
56 Cf. Bent Boel, « La France, les États-Unis et la politique occidentale d’embargo, 1948-1954 », Revue d’histoire diplomatique, n° 1, 2001, p. 35-40. Également : Philip Funigiello, American-Soviet Trade in the Cold War, Chapel Hill, NC, University of North Carolina Press, 1988 ; Diane Kunz, Butter and Guns. America’s Cold War. Economic Diplomacy, New York, Free Press, 1997 ; Sibylle Le Bellour, Le COCOM de 1953 à 1962 : un comité uni et efficace ?, mémoire de maîtrise, dir. Marie-Pierre Rey, université Paris 1, 1999 ; Ian Jackson, The Economic Cold War : America, Britain, and East-West Trade, 1948-1963, New York, Palgrave, 2001 ; Frank Cain, Economic Statecraft during the Cold War : European Responses to the US Trade Embargo, Londres, Routledge, 2007.
57 AMAE, Asie-Océanie 1944-1955, Chine, vol. 281, note Problèmes du commerce avec la Chine (17 p.), non datée (printemps 1953). Cf. Bent Boel, « La France, les États-Unis... », art. cité, p. 48-49.
58 Cf. Marie Lavigne, Les économies socialistes soviétiques et européennes, Paris, Armand Colin, 1979, p. 386 ; Bent Boel, « La France, les États-Unis... », art. cité, p. 41.
59 Sibylle Le Bellour, Le COCOM, op. cit., p. 51-52.
60 Curtis Keeble, Britain, the Soviet Union and Russia, Basingstoke, Macmillan Press Ltd, 2000, p. 232.
61 Cité par Arnaud Marty, Les acteurs publics de la diplomatie économique française en URSS de 1930 à 1964, mémoire de maîtrise, dir. Robert Frank, université Paris 1, juin 2005, p. 57.
62 « Le commerce extérieur de la France avec les pays étrangers en 1950 », Perspectives, numéro du 28 avril 1951.
63 « Les États-Unis restent nos meilleurs fournisseurs et les Britanniques nos meilleurs clients », Le Monde, numéro du 22 novembre 1951.
64 Bertrand Nezeys, Les relations économiques extérieures, Paris, Economica, 2e éd., 1984, p. 152.
65 Shu Guang Zhang, Economic Cold War. America’s Embargo against China and the Sino-Soviet Alliance, 1949-1963, Washington DC, Woodrow Wilson Center Press, 2001.
66 AMAE, Asie-Océanie 1944-1955, Chine, vol. 291, note de H.C. Maux sur la situation de l’industrie en Chine au regard des intérêts français du 18 mai 1945.
67 AMAE, Asie-Océanie 1944-1955, Chine, vol. 281, Secrétariat des conférences. Note à la direction générale des affaires économiques a/s contrôle des exportations vers la Chine et la Corée du Nord, sans date.
68 Georges-Henri Soutou, La guerre de cinquante ans. Les relations Est-Ouest, 1943-1990, Paris, Fayard, 2001, p. 241-245.
69 AMAE, Asie-Océanie 1944-1955, Chine, vol. 281, secrétariat des Conférences, lettre du ministre des Affaires étrangères à M. le secrétaire d’État aux Affaires économiques du 23 novembre 1950 a/s commerce avec la Chine ; cf. aussi la note Problèmes du commerce avec la Chine (17 p.), non datée (printemps 1953).
70 Shu Guang Zhang, Economic Cold War, op. cit., p. 35.
71 Telle est la vision défendue par Shu Guang Zhang, Economie Cold War, op. cit., p. 49.
72 AMAE, Asie-Océanie 1944-1955, Chine, vol. 281, dépêche d’Hubert Guérin, ambassadeur de France au Canada, à Robert Schuman, ministre des Affaires étrangères, du 13 décembre 1950.
73 Ibid., lettre du ministre des Affaires étrangères à M. le secrétaire d’État aux Affaires économiques du 23 novembre 1950 a/s commerce avec la Chine.
74 Ibid., copie de la résolution adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies.
75 Ibid., folios 138-146.
76 Ibid., note pour la direction d’Asie du 2 novembre 1951 de la direction des Affaires économiques et financières.
77 Bent Boel, « La France, les États-Unis... », art. cité, p. 45.
78 AMAE, Asie-Océanie 1944-1955, Chine, vol. 281, note pour la direction d’Asie du 2 novembre 1951 de la direction des affaires économiques et financières.
79 Karsten Rudolph, Wirtschaftsdiplomatie im Kalten Krieg. Die Ostpolitk der Westdeutschen Großindustrie, 1945-1991, Francfort, Campus Verlag, 2004, p. 35.
80 Sur cette conférence, cruciale pour la reprise du dialogue entre l’Est et l’Ouest, cf. Thierry Robin, « Les relations commerciales de la France et de la Grande-Bretagne avec la République populaire de Chine, à la lumière de la conférence économique internationale de Moscou d’avril 1952 », Revue d’histoire diplomatique, n° 1-2007, p. 55-72.
81 Thierry Robin, « Les relations commerciales de la France... », art. cité, p. 56.
82 Bent Boel, « La France, les États-Unis... », art. cité, p. 45.
83 Karsten Rudolph, Wirtschaftsdiplomatie im Kalten Krieg op. cit., p. 36.
84 Thierry Robin, « Les relations commerciales de la France... », art. cité, p. 62.
85 Karsten Rudolph, Wirtschaftsdiplomatie im Kalten Krieg, op. cit., p. 38.
86 Bent Boel, « La France, les États-Unis... », art. cité, p. 43.
87 Curtis Keeble, Britain, the Soviet Union..., op. cit., p. 244 : « Je tiens beaucoup à promouvoir et à faciliter la reprise de relations avec la Russie soviétique et à encourager et aider tout essor de vie russe qui puisse conduire les masses russes à profiter plus largement des biens de consommation dont vous parlez » (1 am anxious to promote an easement of relations with Soviet Russia and to encourage and aid any development of Russian Life wich leads to a wider enjoyment by the Russian masses of the consumer goods of which you speak).
88 Karsten Rudolph, Wirtschaftsdiplomatie im Kalten Krieg op. cit., p. 42.
89 AMAE, Asie-Océanie 1944-1955, Chine, vol. 281, lettre de l’ambassadeur de France en Grande-Bretagne à Georges Bidault, ministre des Affaires étrangères, du 26 mars 1956.
90 Ibid., note Problèmes du commerce avec la Chine (17 p.), non datée (printemps 1953). Cf. Frank Cain, « The US-Led trade embargo on China : the origins of CHINCOM, 1947-1952 », Journal of Strategic Studies, vol. 18, n° 4, décembre 1995, p. 33-54.
91 Sibylle Le Bellour, Le COCOM..., op. cit., p. 18.
92 AMAE, Asie-Océanie 1944-1955, Chine, vol. 281, note de la direction d’Asie-Océanie du 19 mars 1953.
93 Thierry Robin, « Les relations commerciales de la France et de la Grande-Bretagne avec la République populaire de Chine... », art. cité.
94 AMAE, Asie-Océanie 1944-1955, Chine, vol. 281, note Problèmes du commerce avec la Chine (17 p.), non datée (printemps 1953).
95 Ibid.
96 Thierry Robin, « Les relations commerciales de la France et de la Grande-Bretagne avec la République populaire de Chine... », art. cité, p. 67-68.
97 AMAE, Asie-Océanie 1944-1955, Chine, 292, sd. Mission Bernard de Plas à Pékin (20 mai 1953-20 juin 1953), note du 18 mai 1953 sans auteur, intitulée La prochaine rencontre économique de Pékin.
98 Ibid., 281, note Problèmes du commerce avec la Chine (17 p.), non datée (printemps 1953).
99 Ibid., 292, sd. Mission Bernard de Plas à Pékin (20 mai 1953-20 juin 1953), note du 18 mai 1953 sans auteur, intitulée La prochaine rencontre économique de Pékin.
100 « "Sans échanges avec l’Est, notre économie s’asphyxiera", déclare à Combat M. Bernard de Plas » (propos recueillis par Claude Delmas) », Combat, numéro du 4 janvier 1954. Cf. également l’entretien accordé à Pierre Drouin dans Le Monde du 28 juin 1953.
101 AMAE, Asie-Océanie 1944-1955, Chine, vol. 281, note du 8 juillet 1953 de la direction d’Asie-Océanie.
102 Ibid., note Problèmes du commerce avec la Chine (17 p.), non datée (printemps 1953).
103 Bent Boel, « La France, les États-Unis... », art. cité, p. 47.
104 Ibid.
105 S.R. Ashton, « Keeping a foot in the door : Britain’s China policy », Diplomacy and Statecraft, 15, 2004, p. 79-94, ici p. 80 : « Nous pouvons agir sans commercer avec la Chine » (We can do without our China trade).
106 Ibid., p. 87.
107 Ibid.
108 AMAE, Asie-Océanie 1944-1955, Chine, 281, lettre de l’ambassadeur de France en Grande-Bretagne à Georges Bidault, ministre des Affaires étrangères du 28 mai 1953.
109 Ibid., note du 9 janvier 1954 de la direction d’Asie-Océanie.
110 Ibid., Asie-Océanie 1956-1967, Chine, 485, sd. Mission Sud-Aviation, note du 22 octobre 1963 a/s alignement CHINCOM-COCOM.
111 Ibid., 483, circulaire de la DAEF du 25 janvier 1956. La mission comprenait, entre autres industriels, les représentants de la Fédération des industries mécaniques, du Groupement d’exportation de gros équipement électromécanique français pour la Chine, du Syndicat des industries téléphoniques et télégraphiques, du Syndicat des fabricants de fils et câbles électriques, du Groupement syndical des constructeurs d’automobiles, du Syndicat général des cotonniers, etc. [AMAE, Asie-Océanie 1956-1967, Chine, vol. 483, liste de la Mission Chine (folio 17)].
112 Ibid., télégramme à l’arrivée de Hong Kong, reçu le 22 juin 1957, signé Raoul-Duval.
113 Ibid., note de la DAEF du 10 juillet 1957.
114 Ibid., note de la direction d’Asie du 28 juin 1957.
115 Ibid., télégramme à l’arrivée de Hong Kong, reçu le 30 septembre 1957.
116 Cité par Hubert Bonin, « L’émergence de la coopération industrielle, bancaire et commerciale franco-soviétique dans les années 1960 », dans Maurice Vaïsse (dir.), De Gaulle et la Russie, Paris, CNRS Éditions, 2006, p. 239, note 27.
117 Ibid., p. 235, note 16.
118 Éric Bussière, « Les banques d’affaires françaises au xxe siècle : des établissements en quête d’identité ? », dans Maurice Lévy-Leboyer (dir.), Les banques en Europe de l’Ouest de 1920 à nos jours, Paris, CHEFF, 1995, p. 231.
119 Cf. Philippe Marguerat, Banque et investissement industriel : Paribas, le pétrole roumain et la politique française 1919-1939, Genève, Droz, 1987.
120 Éric Bussière, Paribas, l’Europe et le monde, 1872-1992, Anvers, Fonds Mercator, 1992, p. 152 et suiv.
121 Ibid., p. 168.
122 Ibid., p. 169.
123 Ibid., p. 175.
124 Édouard Geffray, Les relations bancaires et d’affaires entre Paribas et les pays d’Europe de l’Est dans les années 1950 et 1960 : exemples de la Yougoslavie et de la Roumanie, maîtrise d’histoire, dir. Éric Bussière, université Paris 4, juin 2000, p. 52-55.
125 Bottin administratif, 1955, p. 338.
126 Édouard Geffray, Les relations bancaires et d’affaires..., op. cit., p. 69, note 25 (Archives historiques de Paribas, AHP, DE 44, épi 5, travée 9, étage 9, Yougoslavie 1966-1964, compte rendu de l’entretien avec M. Mennesson au quai Branly du 19 janvier 1956, 2 p.).
127 Ibid., p. 62.
128 Éric Bussière, Paribas..., op. cit., p. 177.
129 Édouard Geffray, Les relations bancaires et d’affaires..., op. cit., p. 63.
130 Ibid., p. 64.
131 Ibid, p. 67.
132 Hubert Bonin, « L’émergence de la coopération industrielle... », art. cité, p. 237, note 20.
133 Entretien de Bertrand Larrera de Morel avec l’auteur le 30 mai 2005.
134 Hubert Bonin, « L’émergence de la coopération industrielle... », art. cité, p. 238.
135 Entretien de Bertrand Larrera de Morel avec l’auteur le 30 mai 2005.
136 Hubert Bonin, « L’émergence de la coopération industrielle... », art. cité, p. 240-242 ; Éric Bussière, Paribas, op. cit.
137 Extrait de l’entretien entre Jean Reyre, directeur général de Paribas, et Pierre Dreyfus, président de Renault, du 15 juillet 1966, conservé dans les archives de Paribas et cité par Hubert Bonin, « L’émergence de la coopération industrielle... », art. cité, p. 245.
138 CAEF, B 54 922, Pays de l’Est, sd. Europe orientale. Ensemble, ssd. Relations économiques et financières (1955-1969), note pour le ministre de la DREE/SAC5, du 27 mars 1956, faisant état d’une visite récente de Paribas relative à la création d’une société d’économie mixte destinée à suivre les échanges avec l’Est.
139 Ibid.
140 AMAE, Asie-Océanie 1956-1967, Chine, 485, compte rendu de la réunion tenue au Quai d’Orsay, le 1er février 1962, sous la présidence d’Olivier Wormser, en date du 5 février 1962.
141 Ibid., télégramme à l’arrivée d’Alphand, Washington, reçu le 17 janvier 1962.
142 Ibid., télégramme à l’arrivée de Dejean, reçu le 21 janvier 1962.
143 Ibid., télégramme à l’arrivée de Chauvel, reçu le 16 janvier 1962.
144 Ibid., rapport général de la mission du CNPF en République populaire de Chine (septembre-octobre 1963).
145 Cf. Laurence Badel, « L’information économique extérieure en France au xxe siècle : redistribution des rôles entre les acteurs étatiques et privés », dans Sébastien Laurent (dir.), Entre l’État et le marché. L’information et l’intelligence économique en France, Paris, Nouveau Monde éditions, 2010, p. 205-241.
146 Selon Robert Richard, conseiller commercial à Pékin à partir de 1964, il n’avait pas de direction économique et financière comme le ministère français.
147 AMAE, Asie-Océanie 1956-1967, Chine, 486, note de Robert Richard, conseiller commercial à Pékin, du 17 juillet 1964.
148 Selon les mots de Robert Richard, dans sa note du 17 juillet 1964.
149 AMAE, Asie-Océanie 1956-1967, Chine, 485, lettre d’André Mancel-Bize, conseiller commercial à Hong Kong à M. le ministre des Finances et des Affaires économiques (DREE) du 8 juin 1963.
150 Ibid., sous-dossier CNPF (septembre-octobre 1963), compte rendu de François de Crouy-Chanel.
151 Philippe Chalmin, Négociants et chargeurs..., op. cit., p. 201-203.
152 Ibid., p. 31-33, 167 et 115.
153 Hubert Bonin, CFAO. Cent ans de compétition (1887-1987), Paris, Economica, 1987.
154 Les liens étaient renforcés par le fait que ces sociétés engageaient couramment d’anciens hauts fonctionnaires spécialisés dans les relations économiques extérieures : en 1964, c’était l’ancien directeur de la DREE, Jean Filippi, qui était le directeur général de la société Louis-Dreyfus, en même temps que le président de la Banque Louis-Dreyfus. Olivier Wormser, ancien directeur de la DAEF, fut recruté par le groupe Continental.
155 Cf. le commentaire du Quai d’Orsay à propos de la société Olivier : « Laquelle semble jouer un rôle d’intermédiaire important dans les liaisons commerciales avec la Chine populaire », dans AMAE, Asie-Océanie 1956-1967, Chine, vol. 485, note d’information du 24 août 1962. Cf. aussi la liste annexe établie par le conseiller commercial français en Suisse dans son courrier du 17 février 1964. Sur les enjeux de la maîtrise de l’information, cf. Philippe Chalmin, Négociants et chargeurs, op. cit., p. 128-131.
156 AMAE, Asie-Océanie 1956-1967, Chine, 483, lettre de l’ambassadeur de France en Grande-Bretagne à Son Excellence M. Antoine Pinay, ministre des Affaires étrangères du 12 janvier 1956.
157 Ibid., Chine, 485, note de Manac’h (direction d’Asie) du 27 avril 1963.
158 Ibid., compte rendu du conseiller commercial à Berne des conversations entre industriels français et M. Lu Hsu-Chang, du 14 mai 1963, adressé à la DREE.
159 Ibid., compte rendu de la réunion tenue au Quai d’Orsay, le 1er février 1962, sous la présidence d’Olivier Wormser.
160 Ibid., télégramme en clair de Baudet du 8 juin 1962 ; note d’information du 24 août 1962.
161 Ibid., 486, lettre du conseiller commercial près l’ambassade de France à Pékin à la DREE du 3 octobre 1963.
162 Ibid., 485, compte rendu de la réunion tenue au Quai d’Orsay, le 1er février 1962, sous la présidence d’Olivier Wormser.
163 Ibid. Souligné dans le compte rendu.
164 Ibid.
165 Ibid.
166 Ibid., lettre du conseiller commercial près l’ambassade de France en Suisse à M. le ministre des Finances et des Affaires économiques (DREE/Service des accords commerciaux), du 9 février 1962.
167 Ibid., télégramme à l’arrivée de Courcel, Londres, reçu le 1er mai 1962.
168 Ibid., télégramme à l’arrivée de Saint-Mieux, Hong Kong, du 20 mai 1962.
169 Ibid., télégramme à l’arrivée de Baudet, Berne, reçu le 23 novembre 1962.
170 Ibid., document Interprétation des services techniques de Sud-Aviation des textes COCOM applicables à l’avion Caravelle, émanant de Sud-Aviation (de C. Marchetti), transmis le 20 septembre 1963 à la direction technique industrielle de la Délégation pour l’armement (à l’ingénieur en chef Lecamus).
171 Ibid., sd. Mission Sud-Aviation, note du 22 octobre 1963 a/ s vente de Caravelle à la Chine.
172 Ibid., note du 22 octobre 1963. Très secret. Extrait du procès-verbal du conseil restreint tenu le 22 octobre 1963 au sujet des exportations de matériels d’armement.
173 Ibid., document Interprétation par les services techniques de Sud-Aviation des textes COCOM pour les hélicoptères Alouette II et III, émanant de Sud-Aviation (de C. Marchetti), transmis le 20 septembre 1963 à la direction technique industrielle de la Délégation pour l’armement (à l’ingénieur en chef Lecamus).
174 Ibid., télégramme à l’arrivée du consul général de France à Hong Kong, reçu le 9 novembre 1963.
175 Ibid., 486, télégramme au départ de la DAEF pour l’ambassade de France à Pékin le 24 juin 1964.
176 Werner Bührer, « Die Wirtschaftsdiplomatie des BDI von 1949 bis Mitte der 1970er Jahre », dans Johannes Paulmann (hg.), Auswärtige Repräsentationen. Deutsche Kulturdiplomatie nach 1945, Köln, Böhlau Verlag, 2005, p. 121-137. Cf. aussi Karsten Rudolph, Wirtschaftsdiplomatie im Kalten Krieg. Die Ostpolitk der Westdeutschen Großindustrie, 1945-1991, Francfort, Campus Verlag, 2004.
177 Cf. Marine Moguen-Toursel, L’ouverture des frontières européennes dans les années 50. Fruit d’une concertation avec les industriels ?, Berne, PIE-Peter Lang, 2002 ; Matthias Kipping, La France et les origines de l’Union européenne (1944-1952). Intégration économique et compétitivité internationale, Paris, CHEFF, 2002 ; Laurent Warlouzet, Quelle Europe économique pour la France ? L’intégration économique par la CEE : entre marché commun et politiques communes, 1956-1969, thèse de doctorat, dir. Éric Bussière, université Paris 4, 30 novembre 2007, version dactylographiée, p. 135-153.
178 CAEF, B 26 416, Idées de réforme sur le financement des exportations, sd. Financement des exportations. II. Projets de réforme, ssd. Notes CNPF, note de B. Larrera de Morel et observations du Trésor, note pour le ministre d’André de Lattre et Guillaume Guindey du 9 mars 1964.
179 Ibid., sd. Commerce extérieur. Idées de réforme, 1964. Journée d’études du 2 juillet 1964, Liste des personnalités invitées à la Journée d’études du commerce extérieur.
180 Ibid., dossier bleu du CNPF en vue de la réunion du 2 juillet 1964, rapport du 29 mai 1964, p. 8-9.
181 Ibid.
182 Ibid., sd. Financement des exportations. II. Projets de réforme, ssd. Notes du CNPF, notes de Bertrand Larrera de Morel, observations du Trésor, Note pour le directeur du 10 avril 1964 de la DREE/SEEA2.
183 En 1970, Valéry Giscard d’Estaing, revenu au ministère des Finances, se proposa de l’étendre à l’ensemble des investissements commerciaux.
184 CAEF, B 26 416, Idées de réformes sur le financement des exportations, sd. Financement des exportations. II, Conseil de la République. Année 1953, annexe au procès-verbal de la séance du 10 décembre 1953. Rapport fait au nom de la Commission des finances sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif au développement des crédits affectés aux dépenses du ministère des Finances et des Affaires économiques pour l’exercice 1954 (III. Affaires économiques) par M. Alric, sénateur.
185 Ibid.
186 Le dernier poste diplomatique occupé par G. Georges-Picot fut la Représentation permanente de la France à l’ONU de 1957 à 1959. Il devint le président de l’Union internationale de gestion et d’investissement. Il était le frère aîné de l’inspecteur des Finances Jacques Georges-Picot (cf. Jacques Georges-Picot, Souvenirs d’une longue carrière. De la rue de Rivoli à la Compagnie de Suez (1920-1971), Paris, CHEFF, 1993, p. 51-52).
187 AMAE, Asie-Océanie 1956-1967, Chine, vol. 485, compte rendu du conseiller commercial à Berne des conversations entre industriels français et M. Lu Hsu-Chang, du 14 mai 1963 adressé à la DREE.
188 Ibid., télégramme à l’arrivée de Baudet, Berne, reçu le 18 avril 1963.
189 Ibid., lettre de Jean Allègre, conseiller commercial à Hong Kong à M. le ministre des Finances et des Affaires économiques (DREE) du 1er août 1963.
190 Ibid., télégramme au départ de la DAEF à Hong Kong, communiqué à Berne, du 11 septembre 1963.
191 Ibid., note pour le cabinet du ministre du 9 octobre 1963 de la direction d’Asie-Océanie.
192 Ibid., télégramme au départ de la DAEF à Hong Kong, communiqué à Berne, du 24 avril 1963.
193 Ibid., lettre du conseiller commercial près l’ambassade de France en Suisse à M. le directeur du CNCE du 9 septembre 1963.
194 Ibid., télégramme au départ de la DAEF à Berne, du 21 septembre 1963.
195 Ibid., télégramme à l’arrivée de Philippe Baudet, Berne, à la direction d’Asie-Océanie, reçu le 23 septembre 1963.
196 Ibid., lettre d’André Saint-Mieux, consul général de France à Hong Kong, à son Excellence M. le ministre des Affaires étrangères (DAEF) du 12 juin 1963.
197 Ibid., lettre de J. Hirsch-Girin, conseiller financier français pour l’Asie, à la direction des finances extérieures du ministère des Finances du 8 juin 1963.
198 Ibid., 486, note de Jean Allègre, conseiller commercial à Hong Kong, à la DREE, du 28 janvier 1964.
199 Ibid.
200 Ibid., télégramme à l’arrivée du consul général de France à Hong Kong, reçu le 21 janvier 1964.
201 Cf. L’établissement des relations diplomatiques entre la France et la Chine populaire (27 janvier 1964). Actes du colloque organisé par l’Institut Charles-de-Gaulle, dans Cahiers de la Fondation Charles-de-Gaulle, n° 1, 1995 ; Angelina Boulesteix, Les relations entre la France et la Chine populaire de 1964 à 1969, maîtrise d’histoire, dir. Robert Frank, université Paris 1, 1997.
202 Bernard Krouck, « La première année de Lucien Paye à Pékin (1964-1965) », Revue d’histoire diplomatique, n° 4, 2001, p. 309-328.
203 CAEF, B 54 810, sd. Comité consultatif interministériel des conseillers et attachés commerciaux, 5e réunion du 21 février 1964, 6e réunion du 29 mai 1964.
204 AMAE, Asie-Océanie 1956-1967, Chine, vol. 486, télégramme à l’arrivée de l’ambassade de France à Pékin reçu le 6 juillet 1964.
205 Ibid., lettre de Robert Richard, conseiller commercial près l’ambassade de France à Pékin à la DREE du 17 juillet 1964.
206 Ibid., télégramme à l’arrivée de l’ambassade de France à Pékin reçu le 27 juin 1964.
207 Ibid., note reçue par la direction d’Asie le 17 avril 1964.
208 Un compte rendu précis de 9 pages fut adressé par le conseiller commercial de France à Pékin à la DREE le 12 octobre 1964.
209 AMAE, Asie-Océanie 1956-1967, Chine, 486, note pour la DAEF de la direction d’Asie du 16 octobre 1964.
210 Ibid., note de la DAEF du 4 décembre 1964.
211 Ibid., 714, Relations économiques avec la France. Airbus, Concorde (1968-1972), note de la direction d’Asie du 11 septembre 1970.
212 Johannes Paulmann (hg.), Auswärtige Repräsentationen. Deutsche Kulturdiplomatie nach 1945, Cologne, Böhlau Verlag GmbH & Cie, 2005, p. 2.
213 Karsten Rudolph, Jana Wüstenhagen, Große Politik – Kleine Begegnungen : die Leipziger Messe im Ost-West-Konflikt, Berlin, Vorwärts-Buch, 2006.
214 Anecdote rapportée par F. Kern, L’implantation de Renault dans les pays de l’Est entre 1968 et 1974, maîtrise d’histoire, dir. Robert Frank, université Paris 1, 1998, p. 36.
215 Nous empruntons le concept de « auswärtige Repräsentation » à Johannes Paulmann, « Deutschland in der Welt : Auswärtige Repräsentationen und reflexive Selbstwahrnehmungen nach dem Zweiten Weltkreig – eine Skizze », dans Hans Günther Hockerts (hg.), Koordinaten deutscher Geschichte in der Epoche des Ost-West-Konflikts, Munich, 2004, p. 63-78.
216 Simone Derix, « Gruppenbild mit Industrielandschaft : wie Krupp die Bundesrepublik Deutschland bei Staatsbesuchen bebilderte », dans Johannes Paulmann (hg.), Auswärtige Repräsentationen, op. cit., p. 165-184.
217 Cf. Jean-Louis Loubet, Citroën, Peugeot, Renault et les autres. Soixante ans de stratégies, Paris, Le Monde Éditions, 1995, p. 516.
218 CAEF, B 54 917, Proche-Orient, sd. Relations économiques avec les pays arabes ou du Moyen-Orient (1952-1969), note au ministre de Bernard Clappier du 15 avril 1959.
219 Ibid.
220 Ibid. Cf. le témoignage de Pierre Dreyfus cité par Jean-Louis Loubet, Citroën, Peugeot, Renault et les autres, op. cit., p. 516.
221 AMAE, Papiers d’agents-archives privées (PA-AP) – 349 Christian d’Aumale, vol. 31, lettre de Jean Myon, directeur général de la Régie nationale des usines Renault au ministre des Affaires étrangères du 8 septembre 1959.
222 Ibid., lettre de la DAEF à Jean Garnier des Garets, conseiller à l’ambassade de France à Beyrouth, du 18 septembre 1959.
223 Ibid., note de la DAEF du 5 octobre 1959. Cf. Frédérique Schillo, La politique française à l’égard d’Israël, 1946-1959, thèse de doctorat de l’Institut d’études politiques de Paris, 2008, version dactylographiée, tome 2, p. 1089.
224 AMAE, Papiers d’agents-archives privées (PA-AP) – 349 Christian d’Aumale, vol. 31, note du 16 décembre 1958.
225 Pour une analyse de la politique française depuis la fin de la guerre, cf. Sofia Papastamkou, La France au Proche-Orient, 1950-1958. Un intrus ou une puissance exclue ?, thèse de doctorat d’histoire, université Paris 1, dir. Robert Frank, avril 2007.
226 AMAE, PA-AP – 349 Christian d’Aumale, vol. 31, note de la DAEF du 28 décembre 1956. Cf. aussi CAEF, B 54 917, Proche-Orient, sd. Relations économiques avec les pays arabes ou du Moyen-Orient (1952-1969), note de la DREE du 14 septembre 1956 et lettre de la DREE au CNCE du 11 décembre 1956.
227 Sofia Papastamkou, La France au Proche-Orient, 1950-1958, op. cit., p. 651.
228 Christian d’Aumale, L’oreille vagabonde. En activité, texte dactylographié, 2000, p. 62.
229 AMAE, PA-AP – 349 Christian d’Aumale, vol. 31, note du 1er novembre 1958.
230 Ibid., note du 16 décembre 1958.
231 Ibid., télégramme au départ de la DAEF du 3 janvier 1959.
232 Il s’agit du directeur de la SOGREAH.
233 AMAE, PA-AP – 349 Christian d’Aumale, vol. 31, lettre de Christian d’Aumale à Maurice Couve de Murville, ministre des Affaires étrangères, du 5 mars 1959.
234 Ibid., DREE. Copie de l’arrêté portant affectation d’un conseiller commercial, 11 août 1959.
235 Ibid., lettre de Christian d’Aumale à Maurice Couve de Murville, ministre des Affaires étrangères, du 22 juin 1959.
236 Ibid., lettre de Maurice Couve de Murville à Christian d’Aumale du 22 octobre 1959.
237 CAEF, B 54 917, Proche-Orient, sd. Relations économiques avec les pays arabes ou du Moyen-Orient (1952-1969), note sur les exportations françaises vers les pays du Moyen-Orient pendant l’année 1965 de la DREE, s.d.
238 Ibid.
239 Ibid., note pour le ministre de Jean Chapelle du 5 mars 1969.
240 Ibid., note pour le ministre de Jean Chapelle du 5 juillet 1967.
241 Ibid., note sur les exportations françaises vers les pays du Moyen-Orient pendant l’année 1965 de la DREE, s.d.
242 Ibid., note pour le ministre de Jean Chapelle du 5 mars 1969.
243 Ibid., lettre de Jean Chapelle, DREE, à Pierre-André Dumont, DAEF, du 24 janvier 1969.
244 Ibid., note pour le ministre de Jean Chapelle du 5 mars 1969.
245 Ibid.
246 Ibid., note sur l’évolution récente des pays et émirats du golfe Persique (Koweït exclu) de la DREE transmise au CNCE le 22 octobre 1968.
247 B 54 915, sd. Échanges commerciaux, note pour le ministre du 15 octobre 1962 de la DREE/SAC 2.
248 Thomas Gomart, Double détente. Les relations franco-soviétiques de 1958 à 1964, Paris, Publications de la Sorbonne, 2003, p. 148.
249 Article « L’exposition technique française de Mexico a ouvert d’intéressantes perspectives aux exportateurs français », Le Monde, numéro des 4-5 novembre 1962.
250 Article de Combat du 2 novembre 1962.
251 Article « Succès de l’exposition technique française », Figaro, numéro du 1er novembre 1962.
252 Sur l’engouement suscité par l’Amérique latine auprès des constructeurs automobiles français, cf. Jean-Louis Loubet, Citroën, Peugeot, Renault et les autres, op. cit., p. 505-506.
253 Déclaration au Monde du 27 octobre 1962 ; article « L’industrie française a fait un remarquable effort de rationalisation », Combat, numéro du 2 novembre 1962.
254 Article « La mise en valeur du Mexique bénéficie de l’expérience technique des industries électriques et électroniques françaises », L’Information, du 29 décembre 1962.
255 Article « L’exposition technique française de Mexico a ouvert d’intéressantes perspectives aux exportateurs français », Le Monde, numéro des 4-5 novembre 1962.
256 Cf. chapitre 7, p. 254.
257 Maurice Vaïsse, La grandeur, op. cit., p. 505.
258 Article « Des tournées peu rentables », Le Nouvel Observateur, numéro du 20 mai 1965.
259 Cf. Vincent Jauvert, L’Amérique contre de Gaulle, Paris, Seuil, 2000, p. 118 et suiv.
260 Denis Rolland, Vichy et la France libre au Mexique. Guerre, cultures et propagandes pendant la Deuxième Guerre mondiale, Paris, Publications de la Sorbonne, 1990.
261 Maurice Vaïsse, La grandeur, op. cit., p. 593.
262 CAEF, B 54 914, Amérique latine, sd. Colombie, compte rendu de la réunion tenue chez M. Van Ruymbeke le 24 novembre (1964) à 15 h 30.
263 Ibid., B 54 913, Amérique latine, Amérique centrale, sd. Échanges commerciaux, nature, statistiques, comptes rendus des réunions des 9, 15 et 29 décembre 1964 et du 22 janvier 1965.
264 Ibid., sd. Échanges commerciaux, nature, statistiques, note de la DREE pour le ministère des Affaires étrangères (direction des Nations unies et des organisations internationales du 3 mai 1965).
265 Ibid., B 54 914, Amérique latine, sd. Colombie, note pour le ministre de Jean Chapelle du 7 mars 1968.
266 Ibid., note pour le ministre de Bertrand Larrera de Morel du 29 janvier 1969.
267 Maurice Vaïsse, La grandeur, op. cit., p. 510.
268 CCFAL, circulaire, septembre 1967, Mexique.
269 CAEF, B 54 915, note pour le ministre du 20 novembre 1967 de la DREE.
270 Ibid., B 54 914, Amérique latine, sd. Chili, note pour le ministre du 14 novembre 1969 de Jean Chapelle.
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