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L'industrialisation contemporaine des Pays-Bas

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André Fischer

Chapitre premier. La politique d'industrialisation nationale

Texte intégral

I - INDUSTRIALISER LES PAYS-BAS - LES ANNEES 1945-1965

A) - Objectifs et moyens

11) - Une politique dynamique est donc nécessaire si on veut parvenir à créer les nouveaux emplois qu'implique la rapide croissance de la population et à équilibrer la balance extérieure des paiements. Dés 1949, une Direction Générale de l'Industrialisation est créée dans le cadre du Ministère des Affaires Economiques.

2En septembre de la même année, le gouvernement soumet au Parlement le 1er Rapport sur l'Industrialisation des Pays-Bas, document présenté en annexe du Projet de loi de Budget pour l'année 1950. De 1949 à 1963, huit Rapports sur l'Industrialisation seront ainsi soumis au Parlement. Dans ces rapports, les pouvoirs publics présentent leurs grandes options et les principales orientations qu'ils proposent en matière de politique industrielle, après avoir commenté la situation économique du pays et les problèmes qu'elle soulève.

3L'analyse de la situation intérieure débouche sur une série de propositions concrètes définissant les objectifs quantitatifs minima qu'il est souhaitable d'atteindre, en matière d'investissements, de production, de création d'emplois, de productivité, si les objectifs généraux de la politique économique veulent être réalisés. Ces propositions quantifiées se concrétisent dans la présentation de trois Schémas d'industrialisation couvrant successivement les périodes 1948-1952, 1952-1957 et 1957-1962. Ces schémas ne sont ni des programmes pluri-annuels rigides ni des plans d'industrialisation obligatoires. Ils ne représentent que l'estimation quantifiée des progrès jugés indispensables, dans le domaine industriel, pour que puissent être réalisés le plein emploi et le comblement du déficit extérieur : "Il va de soi que le schéma ci-dessous proposé... ne peut être considéré que comme le schéma global définissant de grandes orientations". (1er rapport 1949 - no 58, chap III). "Aussi ce (nouveau) schéma ne donne-t-il que les lignes générales selon lesquelles, dans l'esprit du gouvernement, le développement industriel peut se réaliser". (2ème Rapport - 1950 - no 60, chap III).

4La politique industrielle veut être aussi, dès le début une politique structurelle, d'où l'importance attribuée dans ces Rapports, à l'exposé des objectifs poursuivis en matière de transformation qualitative de l'industrie Il ne s'agit pas seulement de faire croître la production intérieure, il faut surtout rendre l'industrie compétitive sur le plan international. Il est certes nécessaire de remplacer les importations par des productions nationales mais il faut surtout exporter et conquérir les marchés extérieurs, il est par conséquent indispensable de définir aussi des objectifs qualitatifs permettant de réaliser des mutations structurelles en profondeur. De 1949 à 1963, un certain nombre de thèmes reviennent ainsi comme des leitmotiv : améliorer la productivité du travail, favoriser le développement des industries de base et des productions nouvelles, améliorer la qualité des produits, favoriser le dynamisme des entreprises, rehausser le niveau technique de la main-d'oeuvre et des dirigeants, renforcer la concentration et la modernisation des moyens de production. De ces thèmes découlent les principales actions des pouvoirs publics : politique des salaires, aide aux investissements, large ouverture aux capitaux étrangers développement de la formation professionnelle et de la recherche appliquée.

5Du point de vue des pouvoirs publics, la réalisation de ces multiples objectifs ne peut se faire que dans le respect de trois principes fondamentaux :

  1. c'est l'initiative privée qui doit assurer le développement industriel. L'entrepreneur est libre mais il doit supporter ses propres risques : "la décision d'investir et l'acceptation des risques inhérents â cette décision, sont le fait des dirigeants économiques privés..." (1er Rapport 1949 - no 58 chap IV).
  2. Cela ne signifie nullement que l'Etat n'ait qu'un rôle passif à jouer. Sa tâche essentielle consiste, par des mesures d'incitation et de soutien appropriés, à créer un environnement industriel tel qu'il permette de minimiser les risques encourus par l'industriel et de stimuler le dynamisme de l'entreprise privée. Quant à l'intervention directe de l'Etat : "elle doit être strictement limitée à un nombre relativement restreint de grands projets." (1er Rapport - 1949 - no 58 chap IV).
  3. La politique libérale, le libre échange et l'absence de discrimination à l'égard des capitaux extérieurs ou des entreprises étrangères doivent être maintenus : "l'industriel étranger, aux Pays-Bas, peut être assuré d'être traité de la même manière que les investisseurs néerlandais". (4ème Rapport - 1953 - no 62 chap II).
  • 1 Même en 1938, la productivité du travail aux Pays-Bas est nettement inférieure à ce qu'elle est al (...)

62) - Le Rapport sur l'Industrialisation présenté en septembre 1949 contient un certain nombre de propositions, dont les objectifs chiffrés sont regroupés dans le 1er Schéma d'industrialisation pour la période du 1er janvier 1948 au 1er juillet 1952. 215 000 nouveaux emplois industriels doivent être créés, dont 155 000 à partir de nouveaux investissements et 60 000 sur la base d'une meilleure utilisation du potentiel existant. La production industrielle doit croître de 1,7 milliards de florins. Ces deux objectifs supposent un investissement global dans l'industrie de l'ordre de 5,6 milliards de florins dont 2,7 pour les seules créations nouvelles. Ce premier Rapport insiste sur l'indispensable amélioration de la productivité du travail. En 1948, celle-ci n'est encore qu'à l'indice 83 pour un indice 100 en 19381.

7L'objectif à atteindre, au minimum, est qu'en 1952 la productivité ait retrouvé son niveau de 1938, ce qui suppose une progression annuelle de 6,75 %. Un net progrès de la productivité est en effet nécessaire si on veut diminuer les prix de revient et faciliter les exportations. La création de 215 000 nouveaux emplois implique, bien sûr, le développement des industries de main-d'oeuvre existantes, mais déjà une orientation préférentielle vers un développement des industries de base, les plus capitalistiques, s'esquisse. La métallurgie et la chimie sont, dès ce moment, considérées comme les deux secteurs où la croissance doit être le plus vigoureusement stimulée, ce qui signifie qu'un effort particulier doit être entrepris dans les domaines de la formation et de la recherche.

  • 2 Au passage, notons que ce n'est que vers 1968-1969, que la DATAR, en France a créé aux U.S.A. un b (...)

8Les retours accélérés d'Indonésie, la relative faiblesse de l'émigration et la démobilisation accroissent la tension sur le marché du travail. La libéralisation progressive des échanges intra-européens aboutit à une nette péjoration de la balance extérieure, malgré la dévaluation du florin en 1949, en provoquant une rapide augmentation des importations bien que les prix extérieurs aient augmenté beaucoup plus vite que les prix intérieurs. La position concurrentielle de l'industrie néerlandaise ne s'est donc guère améliorée et une révision des objectifs de croissance s'impose. Le 2ème Rapport, présenté au Parlement en 1950, propose la création de 245 000 nouveaux emplois industriels, au lieu de 215 000, et une augmentation de la production de 34 % au lieu des 31 % initialement prévus. Ces nouveaux objectifs impliquent un investissement annuel moyen de 1 440 millions de florins alors que, en 1948 et 1949, celui-ci n'a atteint que 1 100 millions ; une politique plus dynamique à l'égard des investissements est donc indispensable. Mais surtout, le 2ème Rapport introduit avec force un élément fondamental de la politique des pouvoirs publics : la volonté d'attirer les capitaux extérieurs et les entreprises étrangères seules capables de procurer aux Pays-Bas les connaissances techniques nécessaires à la croissance et à la diversification de la production industrielle nationale. "Les possibilités, pour l'industrie néerlandaise, de bénéficier des résultats de la recherche et de l'expérience étrangère sont, mis à part l'acquisition de licences, essentiellement liées aux investissements d'entreprises étrangères dans l'industrie néerlandaise, soit sous la forme d'une participation dans une entreprise néerlandaise, soit par la création d'une filiale dans les Pays-Bas". (2ème Rapport--1950 - no 60 chap IV). Naturellement, il faut laisser la plus grande liberté aux investisseurs étrangers mais il faut aussi trouver le moyen de les attirer et les pouvoirs publics n'ont pas l'intention de rester passifs sur ce plan : "Pour stimuler la participation étrangère à l'industrialisation des Pays-Bas, il sera nécessaire de faire connaître, de façon efficace, à l'étranger, les possibilités existantes aux Pays-Bas, ce pourquoi une active politique d'information, en particulier dans les Etats-Unis d'Amérique est indispensable". (2ème Rapport - 1950 - no 60 chap IV).2

  • 3 Pour une valeur 100 en 1948, l'indice de la production industrielle en 1952 est de 128, alors que (...)

9La première période d'industrialisation se termine dans un contexte bien particulier : flambée générale des prix et raréfaction des matières premières sur le marché international à la suite de la guerre de Corée, et, sur le plan intérieur, une sérieuse récession qui se traduit par une forte diminution des investissements au cours de l’année 1952 (moins de 1,5 milliard de florins en 1952 pour plus de 1,8 milliard en 1951 aux prix de 1952). Cependant, les progrès réalisés depuis 1948 sont tels3 que le bilan de l'année 1952 fait apparaître, pour la première fois depuis la guerre, un solde positif de 1,7 milliard de florins de la balance extérieure des paiements. La question de l'équilibre extérieur, à l'origine même de la politique d'industrialisation, cesse dès lors d'être un problème aussi crucial. Par contre, le bilan est nettement moins favorable sur le plan des emplois : la population active totale a augmenté de 250 000 unités, soit 102 000 de plus que les prévisions de 1948 !. L'émigration a été nettement moins importante que prévue alors que les retours d'Indonésie ont été très nombreux en 1950 (plus de 48 000 personnes) et en 1951 (plus de 25 000). Or, pour les cinq années à venir, les estimations du C.P.B. prévoient une augmentation de 240 000 personnes actives. Le second Schéma d'industrialisation, couvrant la période 1952-1957 et présenté dans le cadre du 4ème Rapport gouvernemental, propose les objectifs suivants 105 000 emplois nouveaux dans l'industrie, un investissement global de l'ordre de 8,5 milliards (aux prix de 1952) et une croissance de 22 % de la production industrielle. Compte tenu de la baisse constatée sur les investissements et des tendances encore défavorable pour l'année 1953, le 4ème Rapport est essentiellement consacré à l'exposé des mesures prises par les pouvoirs publics pour stimuler les investissements industriels.

10Entre 1952 et 1957, 215 000 emplois sont créés dans l'industrie dont la production globale brute augmente de 40 % tandis que la productivité du travail progresse de 23 % et que les investissements atteignent et même dépassent 9 milliards de florins. Les objectifs du second Schéma, et même les prévisions les plus optimistes, sont donc largement dépassés. C'est dans ce contexte très favorable qu'est publié le 3ème Schéma d'industrialisation, pour la période 1957-1962. Pour ces cinq années, le gouvernement propose une augmentation de 8 % de l'emploi industriel, une croissance de 12 % de la production par travailleur et une augmentation de 21 % de la production industrielle globale, ce qui implique un investissement de l'ordre de 11,7 milliards de florins aux prix de 1957. Certes, les problèmes d'emploi et d'investissement restent fondamentaux, mais les résultats déjà acquis sont tels que l'action des pouvoirs publics, jusqu'alors surtout quantitative, peut désormais s'orienter délibérément vers une amélioration qualitative de 1'industralisation. Le 6ème Rapport, présenté en 1958, est donc surtout consacré à ces mesures d'ordre qualitatif et aux actions "en profondeur" qu'il faut mener pour transformer les structures et accroître la compétitivité de l'industrie.

11L'automation et la mécanisation, les progrès de la métallurgie et de la chimie, l'essor des produits synthétiques et des industries nucléaires, bref, toutes les mutations technologiques de l'époque imposent non seulement un investissement industriel plus sélectif mais aussi un vigoureux accroissement de l'effort public en faveur de l'enseignement technique, de la formation professionnelle, de la recherche fondamentale ou appliquée : "Cela (les progrès techniques) signifie que, bien plus que par le passé, l'enseignement et la formation devront constituer les éléments indispensables de la politique d'industrialisation." (6ème Rapport 1958 - no 65 chap VI).

12Le soutien financier de l'Etat, hors du domaine scolaire, est alors considérablement renforcé pour tous les organismes, publics ou privés, qui se préoccupent de promouvoir les progrès technologiques et l'information technico-économique des entreprises. En bénéficient notamment l'Institut pour la Recherche Scientifique Appliquée (T.N.O.), l'Institut pour le Développement Industriel (C.I.V.I.), le Service Public pour l'Information Technique à l'Industrie, l'Institut Néerlandais pour la Productivité (N.I.V.E.)· L'objectif final, bien sûr, est d'accroître la capacité d'exportation de l'industrie néerlandaise, d'autant plus que le Marché Commun est en train de se constituer et que les Pays-Bas doivent tout faire pour valoriser l'excellence de leur situation géographique et se placer au mieux dans la compétition internationale croissante.

13La politique qualitative se double donc d'une orientation plus volontaire encore vers l'exportation (qui doit croître de 5 à 6 ! par an), d'où une série de mesures pour faciliter l'information des entreprises sur les conditions et caractères des marchés extérieurs, pour établir une publicité sur les produits néerlandais à l'étranger, pour apporter une aide financière aux exportateurs (garantie de liquidité et subventions à la Compagnie pour le Financement de l'Exportation).

143) -"Les Schémas d'industrialisation correspondent à une époque où l'on craignait que, pour des raisons d'ordre structurel, l'équilibre dans la balance des paiements et un haut niveau de l'emploi ne pourraient être réalisés. Aujourd'hui, grâce à la forte croissance de notre économie, cette crainte a disparu, c'est pourquoi... la nécessité d'un nouveau schéma d'industrialisation a également disparue... Il n'y a plus non plus aucune raison pour que la problématique industrielle fasse l'objet d'un rapport annuel particulier au Parlement". Ainsi s'exprime le Ministère des Affaires Economiques dans les conclusions générales du 8ème Rapport rendu public en mai 1963. Dorénavant donc, la politique industrielle réintègre la politique économique générale et ne constitue plus un domaine spécifique de l'action gouvernementale.

15Les résultats acquis justifient-ils un tel changement ?. La balance extérieure des paiements n'a été déficitaire que jusqu'en 1952, date à partir de laquelle le bilan est largement positif, malgré un léger recul en 1956-1957, ce qui a permis de réévaluer le florin en.1961. L'évolution globale de l'emploi n'a guère été moins favorable. Le pays n'a pas connu de chômage structurel significatif au niveau national comme on le craignait à l'origine. Exception faite de l'année 1952, où le chômage masculin a atteint 4,3 % de la population active masculine, le nombre de chômeurs hommes n'a pas dépassé 3,2 % de la population masculine active et il est même resté inférieur à 2,5 % pendant 10 années. Ainsi que le montre le tableau suivant, les résultats obtenus en matière d'investissements, de production et de productivité ont été généralement supérieurs aux prévisions.

Tableau no 1 : Objectifs et réalisations pour les trois périodes

Tableau no 1 : Objectifs et réalisations pour les trois périodes

(1) Estimations
(2) Exprimés en mille homme-années (1 homme-année = 300 jours de travail/an)
Source : Ministère des Affaires Economiques - 8ème Rapport sur l'industrialisation. 1963

B) - Salaires et investissements : domaines d'intervention privilégiés

161) - Parmi toutes les actions entreprises par l'Etat pour promouvoir l'industrialisation, assurer la compétitivité de l'industrie et lui permettre d'exporter toujours plus, l'action sur les salaires et l'aide aux investissements industriels ont eu une importance exceptionnelle.

171-1) - Pourquoi une "politique salariale" des pouvoirs publics alors qu'avant la deuxième guerre mondiale, et exception faite de l'agriculture à la suite de la crise de 1934, l'Etat n'intervenait aucunement dans la fixation des salaires dont le niveau était librement débattu entre patrons et ouvriers ?. Dès 1945, l'idée s'impose qu'une étroite surveillance des salaires et des prix est indispensable au redressement économique. Seule une politique des revenus rigoureuse peut limiter les risques d'inflation tout en facilitant l'accroissement de la balance extérieure déficitaire. Maintenir bas les prix et les salaires, c'est assurer à l'industrie des productions bon marché donc des possibilités d'exportation.

18Après la période de Reconstruction, la volonté de maintenir un contrôle central des salaires ne disparaît pas car le poids très lourd des importations ainsi que la vulnérabilité de la dépendance toujours très fortes de l'économie néerlandaise vis-à-vis des marchés extérieurs imposent un effort permanent pour accroître les exportations. "De ce fait, prix, salaires, crédit, impôts et toutes les autres politiques ont eu pour principal objectif le maintien d'un niveau des prix néerlandais compétitifs sur les marchés mondiaux". (J.P. WINDMULLER - 1969 - no 537 - page 329). A partir de 1945, et jusque vers 1963, la politique salariale occupe donc une place éminente dans l'arsenal des actions gouvernementales.

191-2) - Pour comprendre l'évolution de la politique salariale, il est d'abord nécessaire de se référer au contexte très particulier dans lequel elle se développe. Exception faite de l'action sur les prix, nous connaissons déjà les principaux éléments du contexte économique ; nous insisterons donc ici sur certains aspects du contexte social qui, sans aucun doute, constitue l'une des grandes originalités des Pays-Bas d'aprés guerre.

  • 4 De 1946 à 1950, le taux de natalité annuel moyen est de 25,9 ‰

20En dépit de leur fort peuplement, les Pays-Bas se caractérisent par un taux d'activité particulièrement faible. Cette situation est, d'abord, une conséquence immédiate de la structure démographique de la population néerlandaise. La pyramide des âges de 1947 montre l'importance numérique des jeunes, résultat d'une natalité très dynamique4, mais également le nombre relativement élevé de personnes âgées, conséquence d'un taux de mortalité très faible (7,9 % par an en moyenne de 1946 à 1950) qui fait que les Pays-Bas offrent déjà la plus longue espérance moyenne de vie qui soit au monde (figure no 1).

  • 5 O.C.D.E. : politique de main-d'oeuvre et politique sociale aux Pays-Bas. Paris - 1967.

21En 1950, la proportion des personnes ayant un emploi par rapport à la population totale n'est que de 38,2 %, contre 46,6 % en France, 46,5 % au Royaume-Uni, 46 % en Allemagne Fédérale et 40,1 % en Belgique. Dix ans plus tard, les écarts n'ont guère varié puisque les taux d'activité sont respectivement de 36,5 % contre 43,2 %, 47,6 % et 38,4 %5.

22Le faible taux global d'activité est également le reflet de l'exceptionnelle faiblesse du taux d'emploi féminin : en 1960, la population féminine active ne représente que 8,1 % de la population totale (alors que cette proportion est de 17,9 % en Allemagne Fédérale, 15,9 % au Royaume-Uni,14,7% en France et 11,9 % en Belgique), 22% de l'ensemble de la population active (32,6 % en France au recensement de 1962) et 16 % seulement de la population féminine du pays. A peine 29 % des femmes de plus de 15 ans ont un emploi alors que cette proportion se situe dans la plupart des autres pays industriels entre 35 et 55 % !. La faiblesse de l'emploi féminin et le grand déséquilibre des sexes dans la population active apparaissent très nettement sur la pyramide de 1960 (figure no 2).

  • 6 Idem
  • 7 R. JURRIENS : Arbeidsmarkt en werkende gehuwde vrouw. in ESB du 26.8.1970 ainsi que : CPB : Nota i (...)

23Ce qui, ici, distingue profondément les Pays-Bas, c'est la très faible proportion des femmes mariées engagées sur le marché du travail. En 1947, moins de 10 % des femmes mariées ont un emploi ; en 1960, le taux d'activité des femmes mariées n'est que de 7 % (alors même que 7 femmes mariées sur 10 n'ont pas d'enfants à charge) contre 42 % au Royaume-Uni, 34 % en Allemagne Fédérale, 33 % en France et 23 % en Belgique6. Sans doute, la diminution rapide des emplois dans l'agriculture, l'âge assez précoce du mariage, la plus grande participation à la scolarité et l'influence de certaines traditions expliquent cette situation. Si on ne tient compte que des femmes célibataires, entre 15 et 65 ans, la situation des Pays-Bas est moins exceptionnelle puisque le taux d'activité est alors de 62 % contre 92 % en Belgique, 72 % au Royaume-Uni et 54 % en France7.

Fig.no 1 - POPULATION NEERLANDAISE. Pyramide des âges au 31-12-1947

Fig.no 1 - POPULATION NEERLANDAISE. Pyramide des âges au 31-12-1947

Source : CBS

Fig. no 2 - POPULATION NEERLANDAISE. Pyramide des âges et taux d’activité au 31/12/1960

Fig. no 2 - POPULATION NEERLANDAISE. Pyramide des âges et taux d’activité au 31/12/1960

Sources : CBS et JJ. Van der Lee in ESB du 21/11/1973

  • 8 H. EMMANUEL : De ontwikkeling der loonkostensniveaus in de verwerkende industrie der EEG landen 19 (...)

24Il est bien évident que cette situation en matière de population active a une très grande influence sur les problèmes et la politique des salaires, non seulement parce que le marché du travail est relativement étroit mais aussi par le fait que ce sont les femmes qui constituent l'essentiel de la réserve de main-d'oeuvre disponible dans le cadre national. Et il ne s'agit pas seulement d'un problème quantitatif, car ce fort potentiel féminin a une très faible qualification moyenne.8

25Les répercussions sont donc immédiates lorsqu'on envisage les rapports entre l'évolution des industries de main-d'oeuvre et celle des industries plus capitalistiques et plus orientées vers des emplois à forte qualification. Enfin, l'influence sur les questions de salaires sera d'autant plus grande que, comme on le sait, la productivité du travail aux Pays-Bas reste assez longtemps inférieure à celle des pays voisins de l'Europe occidentale.

26L'infériorité en matière de participation à la vie active reste d'ailleurs une constante des Pays-Bas. Au printemps 1968, le taux d'activité global est de 60,6 %pour les six pays de la Communauté et de 55,7 % seulement pour les Pays-Bas. C'est encore la faiblesse du taux d'activité des femmes qui est responsable de cette situation : 26,3 %des femmes âgées de 14 à 59 ans font alors partie des forces de travail, alors que les pourçentages correspondants sont de 46,6 en France, 40,3 en Allemagne Fédérale et 37,6 dans la Communauté Européenne.

27Très significative à cet égard est une comparaison entre les Pays-Bas et la France pour ce qui concerne la répartition des forces de travail par groupes d’âges. Jusqu'à 55 ans, les taux d'activité des hommes sont équivalents dans les deux pays puis plus forts aux Pays-Bas pour la tranche d'âge 55-65. Par contre, les taux d'activité féminins aux Pays-Bas sont inférieurs à ceux de la France pour tous les groupes d'âge sauf pour la population féminine âgée de 14 à 24 ans, ce qui tient sans nul doute au fait que la femme néerlandaise cesse de travailler après le mariage. L'importance du taux d'activité féminin pour le groupe d'âge 20-24 ans aux Pays-Bas est, probablement, à mettre en relation avec le très rapide essor des activités tertiaires dans le pays (figure no 3).

28Un autre élément capital du contexte est que la politique salariale n'est pas imposée par l'Etat à la nation. La fixation des niveaux de salaires et des taux de croissance de ceux-ci résulte, pour l'essentiel, d'une large concertation entre les pouvoirs publics et les partenaires sociaux. Après 1945, les partis politiques comme les organisations patronales ou les centrales syndicales reconnaissent la nécessité d'une politique de contrôle des salaires et des prix et l'acceptent comme une indispensable mesure de sauvegarde. La définition paritaire d'une politique des revenus devient bien vite une véritable institution, d'autant plus facilement que le gouvernement, par l'intermédiaire du Collège des Médiateurs fondé en 1945 à cet effet, peut dialoguer avec un patronat et un monde ouvrier très structurés et fort bien organisés et qui jouent pleinement le jeu de la concertation, surtout à travers le Fondation du Travail dont l'influence est considérable sur la vie sociale du pays.

Fig. no 3 - POPULATION ET FORCES DE TRAVAIL PAR GROUPES D’AGE -1968-

Fig. no 3 - POPULATION ET FORCES DE TRAVAIL PAR GROUPES D’AGE -1968-

Source : O.S.C.E. Stat. Soc. 6/1969

  • 9 H. JACOBS : De invloed van h et loon op de efficiency der bedrijven. in ESB du 1.11.1967

29Cependant, le résultat le plus important, sinon le plus étonnant, de cette concertation est que les syndicats eux-mêmes ont accepté durant des années que les salaires néerlandais restent inférieurs à ceux pratiqués dans les pays voisins, attitude d'autant plus "originale" que la disparité est longtemps restée considérable comme on peut en juger par les chiffres suivants : pour une valeur 100 aux Pays-Bas en 1950, l'indice du niveau moyen des salaires des ouvriers de l'industrie manufacturière est de 105 en Allemagne Fédérale, 120 en France, 125 en Italie, 155 en Belgique et 115 pour l'ensemble des six pays de la future C.E.E. En 1959, la différence est encore nette puisque l'indice du niveau moyen des salaires est de 126 en Allemagne Fédérale et en Belgique et 125 en France pour 100 aux Pays-Bas9. Comment s'explique cette attitude du monde ouvrier néerlandais ?. "Ainsi que l'admettent les syndicats eux-mêmes : l'écart entre les niveaux de salaires au cours des années Cinquante fut admis de telle façon que l'industrie puisse réaliser des bénéfices permettant d'assurer l'expansion et la modernisation de l'appareil de production. D'un point de vue social, cette politique était jugée nécessaire pour créer les emplois réclamés par une main-d'oeuvre en rapide augmentation". (J.P. WINDMULLER - 1969 - no 439 - pages 350-351). En somme, si l'on en croit cet auteur, les syndicats acceptent des sacrifices sur les salaires et sur le niveau des revenus pour pouvoir maintenir un bas niveau des prix de façon à stimuler les exportations.

  • 10 ANDRIESSEN-MIEDEMA-OORT : De sociaal-economische besturing van Nederland. 3ème éd. Groningen. Noor (...)

30L'ampleur de la concertation et le large concessus qui s'est, semble-t-il, créé quant aux choix des priorités, font que les Pays-Bas connaissent tout au long de cette période une exceptionnelle paix sociale, un climat intérieur qui n'a alors d'égal que celui de la Suède et dont on va bien entendu se servir comme un argument de poids pour attirer les investisseurs étrangers. De 1950 à 1958, on compte à peine 0,17 jours de travail perdus par actif pour faits de grèves, contre 1,97 en France et 1,15 au Royaume-Uni10. Entre 1950 et 1960, le nombre annuel total des grèves et arrêts de travail dans l'ensemble de l'industrie reste inférieur à 100 (chiffre qui ne sera dépassé qu'en 1960 en raison des mouvements des travailleurs du Bâtiment) alors que sur la totalité de la période 1958-1965, le rapport du nombre de jours de travail perdus au nombre de jours de travail disponibles est au maximum de 0,055 (en 1960) et au minimum de 0,001 (en 1957).

  • 11 J.P. WINDMULLER : Labor relations in the Netherlands. Cornell Un. Press. Ithaca. 1969 - pp. 394-39 (...)

31Rien de commun entre cette longue paix intérieure des Pays-Bas et les nombreux conflits du travail que connaissent les pays voisins : de 1956 à 1965, le nombre de jours de travail perdus pour 1 000 salariés atteint une moyenne annuelle de 27 au Pays-Bas contre 293 en Belgique, 174 au Royaume-Uni, 163 en France et 722 en Italie11.

321-3) - Entre 1945 et 1965, la politique salariale présente une évolution telle qu'on peut distinguer trois grandes périodes.

33La première période, qui couvre les années 1945-1953, correspond à celle de la Reconstruction, stricto sensu. Dés 1946, le gouvernement définit un "budget social minimum" dont le niveau varie en fonction de cinq zones géographiques déterminées selon le degré d'urbanisation et la nature des activités économiques dominantes. Ce budget de base va servir à l'établissement des grilles de salaires, grilles échelonnées selon trois niveaux de qualification (manoeuvre, ouvrier spécialisé, ouvrier qualifié), l'écart étant de 10 % entre chaque niveau. Ce système fonctionnera jusque vers 1959.

34En 1952, le S.E.R. publie son Rapport sur la Méthode Normalisée de Classification Générale des Emplois, rapport dont les conclusions sont largement adoptées, en particulier celle concernant le principe du salaire identique pour les emplois ayant reçu une même notation dans la nomenclature, quelle que soit la branche d'activité concernée (mais aussi quelle que soit la productivité de la branche !. On voit bien que le souci majeur est d'éviter les surenchères et les trop grandes inégalités régionales). Au cours de cette première phase, marquée par une bonne entente entre l'Etat, le patronat et les syndicats, la croissance du niveau moyen des salaires se fait à peu prés au rythme de la croissance des prix, l'augmentation du coût de la vie est donc relativement amortie. Le revenu réel des travailleurs augmente peu car l'essentiel des gains de productivité est affecté à la Reconstruction et non à l'accroissement du pouvoir d'achat.

35Grâce à une balance extérieure positive et au plein emploi, la situation économique intérieure s'améliore au cours des années 1953-1958. Chez les syndicats, le souci apparaît de ne plus lier la hausse des salaires à la seule augmentation du coût de la vie. Ils veulent qu'un meilleur compte soit tenu de la part des travailleurs dans la croissance du revenu national ainsi que des besoins d'amélioration du niveau de vie de la population.

36De son côté, le patronat, qui se heurte à des difficultés nouvelles nées d'une tension croissante sur le marché du travail, prêche pour un élargissement et une plus grande différentiation de l'éventail des salaires, de façon à permettre aux industries à forte productivité de payer des salaires plus élevés-pour les cadres et le personnel de haute qualification. Au cours de ces années, l'industrie réalise de gros profits mais les salaires restent à un niveau moyen relativement bas.

  • 12 De janvier 1959 à décembre 1962, le salaire horaire augmente en moyenne de 6,5 % par an. Le coût d (...)

37Une politique salariale entièrement nouvelle se développe à partir de 1959. Seul un accroissement de productivité peut, désormais, justifier une hausse des salaires et permettre à une branche d'engager des négociations avec les pouvoirs publics. Ainsi, une plus grande liberté d'action est laissée à l'industrie et la diversification des structures salariales s'accroît rapidement, sans pour autant porter un trop grand préjudice à la position concurrentielle des produits néerlandais grâce au système d'indexation sur les gains de productivité. Cependant, les négociations salariales deviennent plus difficiles, d'une part en raison du manque croissant de main-d'oeuvre, d'autre part, du fait que la définition des gains de productivité pour chaque branche soulève bien des problèmes. Si la métallurgie obtient sans trop de mal une hausse des salaires de 5 % en 1960, à la suite d'un gain de productivité estimé à 4 %, les négociations avec le secteur du bâtiment échouent, d'où la grande grève de 1960 (421 000 journées de travail perdues ; un record aux Pays-Bas). Au total, le système traditionnel est fortement remis en cause. Malgré les pouvoirs publics, les salaires augmentent plus vite que la productivité, surtout à cause du développement du travail noir et en raison de la multiplication des heures supplémentaires à tarifs élevés12.

382) - Les objectifs quantitatifs fixés en matière de création d'emplois nouveaux et de croissance de la production industrielle se traduisent par la nécessité d'investir des sommes considérables dans l'industrie : 25,7 milliards de florins au moins selon les Schémas d'industrialisation pour les années 1948-1962. De leur côté, les objectifs qualitatifs (productivité, structures, branches nouvelles...) font que la question des investissements se pose en termes particuliers parce qu'ils impliquent qu'une rigoureuse sélection soit faite dans l'orientation et la répartition des masses financières si l'on veut obtenir les transformations souhaitées des structures industrielles et l'amélioration de la qualité moyenne des productions.

392-1) - Mais, pour investir, il faut d'abord trouver des capitaux. On sait que, à cet égard, les Pays-Bas n'offrent pas à l'industrie des possibilités bien grandes, d'autant moins que l'orientation traditionnelle des capitaux vers les activités commerciales fait que les crédits bancaires sont surtout des crédits à court et moyen termes, donc à rotation rapide, alors que l'industrie, par essence même, a besoin de crédits à long terme et à rotation lente.

  • 13 En l'occurence, le mouvement a été lancé et conduit par la Banque Générale des Pays-Bas (ALGEMENE (...)

40En dehors de la période de la Reconstruction, au cours de laquelle l'industrie bénéficie des fonds du Plan Marshall, les seuls capitaux immédiatement disponibles seront les capitaux rapatriés d'Indonésie. Ils vont d'ailleurs jouer un très grand rôle dans le financement de l'industrialisation tout au long des années Cinquante, en facilitant la réorientation d'une partie des crédits bancaires vers les activités industrielles13. Par ailleurs, et ce n'est pas le moindre des handicaps au regard des problèmes de financement, la structure même de l'industrie néerlandiase n'est pas trés favorable.

41En 1952, par exemple, sur environ 107 240 entreprises employant plus de 10 salariés, 85 ! en emploient moins de 50, à peu prés 11 % ont un effectif compris entre 50 et 500 salariés et 4 200 entreprises seulement, soit moins de 4 % du total, emploient plus de 500 personnes. La prédominance globale des petites et des moyennes entreprises, c'est aussi celle des petites affaires familiales qui ne peuvent avoir recours au marché des capitaux et pour qui les problèmes de financement sont presque toujours difficiles à résoudre. Pour la plupart, ces entreprises ont un faible niveau technique, une capacité d'innovation très limitée et une rentabilité souvent déficiente.

42Tout ceci explique que l'aide publique aux investissements et au financement de l'industrialisation soit devenue l'un des fers de lance de la politique gouvernementale. Il faut, néanmoins, rappeler que cette action se développe dans le cadre des principes fondamentaux de la politique néerlandaise, à savoir : que le financement incombe à l'initiative privée et qu'il reste sous sa responsabilité ; que le rôle de l'Etat se limite à créer le cadre le plus favorable au développement de cette initiative, son intervention directe étant limitée à un petit nombre de projets considérés comme vitaux pour l'économie du pays ; que la croissance industrielle doit se faire hors de tout protectionisme et dans la libre concurrence. Plus encore que dans d'autres domaines, l'action de l'Etat est ici une action de soutien et d'incitation caractérisée par la prédominance des interventions indirectes.

432-2) - C'est d'abord dans le domaine du crédit que se manifeste l'action des pouvoirs publics. Dés novembre 1945 est fondée la Banque Nationale pour la Reconstruction (HERSTELBANK) qui deviendra bientôt la Banque Nationale pour l'Investissement (NATIONALE INVESTERINGSBANK ou N.I.B.). Conçue d'abord comme un organisme destiné à assurer les avances sur les dommages de guerre payables par l'Etat, la N.I.B. devient peu à peu la grande banque industrielle qui faisait jusqu'alors défaut et son rôle sera déterminant par le fait que, contrairement à l'appareil bancaire traditionnel, elle se spécialise dans l'attribution de crédits à moyen et longtermes aux entreprises industrielles. Bien que financéè à 51 % par l'Etat (on peut donc la considérer comme un organisme semi-public), la N.I.B. doit fonctionner comme une banque privée mais elle ne peut intervenir que dans le mesure où l'appareil bancaire normal est incapable de répondre aux besoins, et lorsqu'il n'y a pas d'autres possibilités de financement (on voit bien le souci des pouvoirs publics de restreindre le champ de leurs interventions directes de façon à ne pas empiéter sur l'initiative privée ni se substituer à celle-ci). Du fait même qu'elle doit fonctionner sur des bases commerciales normales, la N.I.B. accorde des crédits en fonction de critères précis tels que la rentabilité de l'affaire et la sécurité des remboursements.

  • 14 Banque Nationale d'investissement : rapport no 5-12-901-300-11, ronéoté sur l'industrialisation de (...)

44Lorsque le prêt demandé comporte de trop grands risques, mais que le projet est d'une réelle importance pour l'industrialisation du pays, l'Etat peut accorder une garantie totale ou partielle. Dans la pratique, cette mesure a été semble-t-il, peu utilisée puisque, au total, elle n'a concerné que 3,28 % des crédits remboursables effectivement accordés par la N.I.B. entre 1945 et 1963, soit environ 7 millions de florins sur un total de 213 millions14. Les crédits de la N.I.B. ne peuvent être affectés qu'à la constitution de capital fixe (terrains-bâtiments-machines) et doivent dépasser 100 000 florins par dossier. Cet organisme s'adresse donc surtout aux entreprises de taille moyenne.

  • 15 K.G. DE GROOT : De financiering van de industrialisatie in Nederland. Leiden. Stenfert-Kroese - 19 (...)

45Les petites entreprises, elles, peuvent recourir à un organisme spécialisé qui date déjà de 1927, la Banque des Classes moyennes (MIDDENSTANDBANK), dont les prêts à long terme sont garantis par l'Etat. Quant aux grandes entreprises, elles font plus généralement appel à l'autofinancement, au marché public des capitaux, aux crédits bancaires traditionnels, aux organismes financiers d'intérêt public tels que les compagnies d'assurance qui, entre 1946 et 1955, investissent environ 260 millions de florins dans l'industrie15.

46La N.I.B. intervient également dans le développement industriel par l'intermédiaire de la Société Néerlandaise de Participation (NEDERLANDSE PARTICIPATIE Mij. ou N.P.M.), qu'elle a créée en 1948 en collaboration avec les compagnies d'assurance, qui prend part à la constitution du capital des entreprises industrielles. Au total, l'influence de la N.I.B. est très grande au cours des années Cinquante et Soixante, d'abord dans le domaine des créations d'entreprises puis, après 1960, plutôt dans le domaine de la modernisation des moyens de production.

47Il existe d'autres types de crédits à moyen et long termes mis à la disposition des entreprises par les pouvoirs publics. Le Crédit Industriel, créé en 1952, est en principe spécialement destiné à permettre aux petites et moyennes entreprises d'acquérir, de moderniser ou de renouveller leur parc de machines. Toutefois, il peut aussi être attribué pour l'amélioration des bâtiments, dans la mesure où cela permet d'améliorer la capacité de l'entreprise. Attribué pour une période de 10 ans au plus, il doit se situer entre 30 000 et 100 000 florins. Le Crédit de Développement (ONTWIKKELINGSKREDIET), mis en place en 1953, concerne le soutien au financement de projets de mise au point de nouvelles techniques de fabrication ou de fabrication de produits nouveaux. L'Etat intervient ici, lorsque l'entreprise ne peut à elle seule financer la recherche et sous réserve que le projet en question présente un réel intérêt du point de vue économique. Il s'agit donc d'une aide au développement technique, aide qui peut concerner toutes les opérations, depuis le stade de la recherche fondamentale jusqu'à celui de la mise en production massive. Ce qui fait l'originalité de ce crédit, qui ne peut dépasser 500 000 florins, c'est que son remboursement, agios inclus, est lié aux résultats de la recherche ce qui signifie que l'Etat accepte de participer aux risques (claire illustration de son désir de promouvoir l'amélioration qualitative de l'industrie).

48Le Crédit de Coopération (SAMENWERKINGSKREDIET), enfin, est accordé pour faciliter la création commune par plusieurs entreprises d'une activité nouvelle, produit ou établissement, lorsque cette création ne pourrait se faire individuellement et sans un soutien financier temporaire.

492-3) - Autre forme d'intervention de l'Etat dans les investissements industriels et dans le financement des entreprises : la participation indirecte au capital. Dans les années d'après-guerre, la rareté des capitaux disponibles, la difficulté pour de nombreuses entreprises de trouver des crédits extérieurs et les problèmes de financement inhérents à toute création nouvelle, font craindre un développement insuffisant des entreprises existantes et un rythme trop lent des créations nouvelles dans l'industrie. Pour pallier ces inconvénients et pour faciliter le financement de l'industrialisation l'Etat crée, en 1952, le Fonds de Garantie Industrielle. Cette fondation a pour objet la participation à la constitution du capital permanent d'entreprises petites et moyennes, existantes ou à créer, qui ne trouvent pas les ressources financières nécessaires mais qui présentent un réel intérêt au regard de l'économie nationale (les entreprises d'Etat et celles ou celui-ci possède une participation directe en sont exclues). L'attribution des capitaux se fait par l'intermédiaire de deux sociétés de financement (dirigées l'une par la N.I.B. et l'autre par la Banque des Classes Moyennes). La participation au capital de l'entreprise ne peut être que minoritaire, l'Etat se retire dès que possible de l'affaire et l'entrepreneur peut à tous moments lui racheter ses parts.

  • 16 L.H. KLAASSEN : Hoofdlijnen van de economische politiek in Nederland. NEI - Rotterdam - 1965.

50Par ce système, les pouvoirs publics ont, par exemple, participé au financement de la SODAFABRIEK à Delfzijl et à celui de l'usine DAF à Born en Limburg16.

512-4) - Parallèlement à ces actions financières, des mesures d'ordre fiscal sont également prises pour stimuler les investissements. Dans l'ensemble, l'objectif visé est un allègement du poids relatif de la fiscalité imposée aux entreprises et les moyens utilisés consistent à permettre un étalement dans le temps de la charge fiscale par rapport aux bénéfices et aux investissements réalisés.

52En dehors des mesures d'ordre conjoncturel (comme la hausse de l'impôt sur les sociétés ou l'élimination de la taxe spéciale sur les bénéfices des entreprises en 1953), trois mesures fiscales peuvent être considérées comme essentielles pour le soutien aux investissements.

53La première prolonge, jusqu'en 1957, le maintien des dispositions de la loi de 1950 relative à l'amortissement différé des investissements. Cette loi permet à l'entrepreneur d'étaler sur plusieurs années l'amortissement du tiers de ses investissements initiaux, jusqu'à concurrence de 10 %chaque année, avec dégrèvement correspondant du montant de son revenu fiscal. En somme, cela représente une aide indirecte à court terme pour permettre à l'entrepreneur de faire de nouveaux investissements.

54Pour les nouveaux moyens de production acquis par l'entreprise (et sous réserve que l'investissement correspondant soit au moins de 15 000 florins dans l'année considérée), celle-ci peut, pendant cinq ans, défalquer chaque année 4 % du montant de l'investissement de son revenu fiscal. En pratique cette disposition correspond à une véritable prime accordée aux entreprises en expansion, aux industriels dynamiques, et elle vise bien entendu à stimuler la volonté d'investir dans l'industrie. En fait, cette disposition introduit une espèce d'indexation de la charge fiscale sur le rythme des investissements : plus l'entreprise investit et plus sa charge fiscale immédiate sera légère.

55La troisième mesure concerne surtout les nouvelles entreprises : pour celles-ci, les pertes subies au cours des 6 premières années peuvent entrer, en totalité, en compensation avec les gains fiscaux des années suivantes, c'est-à-dire que les pertes sont entièrement déductibles. Autrement dit, le fisc n'intervient qu'une fois épongées les pertes initiales. Cette disposition est évidemment d'une importance considérable : c'est une véritable prime à "l'investissement de création", elle diminue dans de fortes proportions les risques inhérents à toutes créations nouvelles en liant la charge fiscale à une moyenne de résultats financiers. En pratique, elle permet à des projets soutenus par des moyens limités de se réaliser quand même. Pour les entreprises qui ne sont pas nouvelles, une disposition semblable est appliquée mais, alors, la période de compensation est limitée à 6 ans.

562-5) - Dans la dynamique industrielle, l'influence de l'Etat procède également des investissements directs qu'il réalise, soit sous la forme d'un développement des entreprises d'Etat, soit par une participation massive au capital d'entreprises industrielles de très grande envergure.

57Hors des entreprises d'Etat (telles que les STAATSMIJNEN) on sait que l'intervention financière directe des pouvoirs publics est strictement limitée : elle ne concerne que les projets dont l'importance est capitale pour la réussite de l'industrialisation (non seulement en raison des emplois ou des produits nouveaux qu'ils représentent mais aussi par leurs effets moteurs et inducteurs sur d'autres activités) et des projets dont le coût de réalisation exige des investissements d'une ampleur telle que le secteur privé ne peut, seul, l'assumer.

  • 17 KG. DE GROOT : Op. cit. p. 145-147.

58Après 1945, les principaux exemples de telles interventions directes de l'Etat sont : la création du laminage et de l'usine de fer blanc de la BREED.BAND N.V. en collaboration avec la sidérurgie de Ijmuiden (au départ, l'investissement direct de l'Etat est de l'ordre de 85 millions de florins. En 1956, l'Etat contrôle plus de 90 %des actions)17, la création des grandes usines chimiques des STAATSMIJNEN et, plus tard, celle de la PIJPLEIDINGSMAATSCHAPPIJ pour la réalisation des oléoducs reliant Europoort à la raffinerie de la MOBIL OIL à Amsterdam.

  • 18 Min. Aff. Econ. : 4ème Rapport sur l'Industrialisation - chap 1.

59L'importance de ces investissements directs de l'Etat est considérable, aussi bien du point de vue quantitatif que qualitatif, surtout dans les premières années de l'industrialisation. Sous forme de souscriptions d'emprunts ou de prises de participation au capital, ces investissements directs entre 1948 et 1952 s'élèvent à environ 1,4 milliard de florins (aux prix de 1948) soit 25 % du montant total des investissements en capital fixe réalisés dans l'industrie au cours de cette période18 et, pour l'essentiel, il s'agit d'investissements à caractère intensif.

60Ce qui compte le plus, sans doute, c'est que la plus grande partie de ces investissements est orientée vers les industries de base, qui manquaient le plus aux Pays-Bas, vers les industries "capital intensive" dont le rôle est déterminant dans le processus d'industrialisation (énergie-laminage-carbochimie-aluminium). L'action de l'Etat est donc conforme aux orientations de sa politique.

61Bien d'autres interventions sont réalisées par les pouvoirs publics pour stimuler l'industrialisation. Les primes et les subventions sont nombreuses et d'objectifs variés : recherche appliquée, fabrication de produits nouveaux, enseignement technique, industrialisation régionale... etc. Une mention spéciale doit être faite de l'action sur les exportations : soutenir financièrement les exportations, n'est-ce pas apporter un "complément naturel" à l'industrie et une forme nouvelle de stimulation ?. Pour ce faire, l'Etat accorde des subventions à la Compagnie Financière pour l'Exportation (EXPORTFINANCIERINGSMAATSCHAPPIJ ou E.F.M.) ainsi qu'une garantie spéciale sur les liquidités, pour accroître la sécurité des opérations extérieures.

C) - Le bilan des années 1945-1963

62La confrontation entre les objectifs et les réalisations de la politique industrielle, telle qu'elle ressort des données du tableau no 1 de ce chapitre, ne donne qu'un aperçu bien fragmentaire des progrès de l'industrie et de son importance grandissante au sein de l'économie nationale. En fait, ce sont les structures économiques profondes du pays qui se sont peu à peu modifiées entre 1945 et les années Soixante. L'impact de l'industrialisation va bien au-delà d'une simple augmentation des emplois et de la production.

631) - Entre 1948 et 1962, la population totale des Pays-Bas s'accroît de 2 006 000 habitants et la population active augmente de 770 000 personnes. Comme l'indique le tableau ci-aprés, la croissance des emplois dans le secteur secondaire se fait sur un rythme bien plus élevé.

Tableau no 2 - Evolution de la population et des emplois (x 1 000)

Années

Population totale

Population Active (1)

Secteur Secondaire (2)

% (3)

1948

9 175

3 768

1 419

37,6

1952

10 328

3 988

1 521

38,1

1957

10 957

4 300

1 729

40,2

1962

11 721

4 538

1 856

40,8

(1) En 1 000 homme-années (1 homme-année = 1 actif ayant travaillé 300 jours pleins dans l'année).
(2) Toutes entreprises Bâtiment exclu. Util. Publiques incluses
(3) Emplois du secteur secondaire en % de la population active totale Source : CBS et 8ème Rapport sur l'Industrialisation des Pays-Bas.

64L'emploi total dans l'industrie, artisanat inclus, augmente donc de 30,7 % alors que, pendant la même période, la croissance de la population totale est de 20,6 %et celle de la population active réelle de 20,4 %. Plus significatifs sont les décalages dans les rythmes annuels de croissance : 2,05 %en moyenne pour l'industrie contre 1,37 % à la population totale et 1,36 %pour la population active (1962 inclus). L'importance croissante du secteur secondaire en matière d'emplois ressort tout autant d'une comparaison avec le comportement des autres secteurs d'activité : ceux-ci voient leurs effectifs passer de 2 139 000 en 1948 à 2 517 000 en 1962 (militaires et chômeurs exclus), soit une croissance globale de 17,6 % et une augmentation annuelle moyenne des emplois de 1,17 %. Alors que l'industrie gagne 437 000 actifs, l'agriculture et la pêche en perdent 123 000, soit 1,95 % par an, tandis que la croissance des emplois dans le secteur tertiaire n'est encore que de 95 % de celle des emplois de l'industrie.

65Pour apprécier correctement ces données, il faut se rappeler que le chômage est resté presque constamment à un niveau très faible. Exception faite de l'année 1952, pour laquelle on dénombre 138 000 chômeurs enregistrés, soit 3,4 % de la population active, le taux de chômage national moyen n'a pratiquement pas dépassé 2,5 %pendant ces quinze années. Entre 1950 et 1962, le taux de chômage masculin est en moyenne de 2,1 %, avec un maximum de 4,3 % en 1952 et un minimum de 0,8 % en 1962. Le résultat majeur de cette évolution c'est évidemment une modification sensible de la structure de répartition sectorielle de la population active :

  • 1 Population active civile ayant un emploi.

Tableau no 3 - Ventilation sectorielle des actifs %1

Années

Industries (2)

Agriculture Pêche

Services (3)

1948

39,88

15,24

44,88

1952

40,60

13,77

45,63

1957

42,00

11,43

46,57

1962

42,44

9,58

47,98

(2) Toutes entreprises Bâtiment et Util.Publiques inclus.
(3) Secteur privé + administrations publiques
Source : C.B.S.

66En réalité, le poids relatif du secteur secondaire est plus grand qu'il n'y paraît car, si l'on exclu les emplois dans l'administration, le secteur tertiaire ne représente que 36,8 % des actifs en 1948 et 39,4 %en 1962.

  • 19 CPB : De nederlandse économie in 1970 - p. 16.
    De nederlandse économie in 1973 - vol. 1 - p. 16.

672) - Les difficultés de 1952 et la crise conjoncturelle de 1957 n'ont finalement pas empêché les investissements industriels de se développer à un rythme rapide. De 1950 à 1956, le total des investissements bruts en capital fixe (logement exclu) représente 11,2 %du produit national brut et 20,1 % entre 1958 et 196219, soit un rythme global d'investissement bien supérieur à ceux de la Belgique, de la France et de la Grande-Bretagne.

68Les seuls investissements industriels réprésentent 39,7 % du total annuel moyen de l'investissement brut en capital fixe de l'ensemble des entreprises entre 1948 et 1951, 37,5 % entre 1952 et 1956 et 35,6 % au cours de la troisième période.

  • 2 Bâtiment exclu.

Tableau no 4 - Evolution des indices Investissement-Production et productivité2

Tableau no 4 - Evolution des indices Investissement-Production et productivité2

(2) Indices calculés sur la valeur des investissements aux prix de 1957
(3) Exprimée en volume
Source : 4ème, 6ème, 8ème Rapports sur l'Industrialisation des Pays-Bas.

  • 20 Idem : vol. 1 - p. 41.

69Le taux élevé des investissements a non seulement permis une croissance rapide de la production, mais également une amélioration assez sensible de la productivité du travail. Selon le Bureau Central du Plan, la productivité du travail, dont la croissance constitue l'un des grands objectifs de la politique des pouvoirs publics, a augmenté en moyenne de 4,5 % par an entre 1953 et 1963 (Bâtiment exclu), soit nettement plus que dans le secteur des services où cette croissance n'a atteint en moyenne que 2,5 % au cours de la même période20.

  • 21 Banque Nationale d'investissement : l'Evolution industrielle aux Pays-Bas. La Haye - 1966 - ronéot (...)

70Cependant, l'amélioration constatée n'élimine pas pour autant le problème d'une productivité qui reste encore assez faible, d'autant moins que son rythme de croissance reste nettement inférieur à celui de la production industrielle globale. Entre 1948 et 1951, le volume de la production industrielle s'accroît de 28 % et la production par travailleur de 14 % De 1955 à 1957, les valeurs respectives sont de 15 % et 9 %. En fin de période, les écarts diminuent puisque les valeurs sont de 11 % et 7 %21. Ce qui importe, néanmoins, c'est que l'évolution de la productivité est tout à fait favorable par rapport à celle des emplois, comme on peut le voir ci-dessous (figure no 4).

71Il ne fait guère de doute que ces résultats traduisent une amélioration progressive des structures industrielles et la pratique d'un investissement de plus en plus sélectif. Ceci ressort également de l'évolution du montant de l'investissement brut réalisé par unité d'emploi dans l'industrie : 960 florins en 1948, 1 034 en 1952, 1 474 en 1957 et 1 689 en 1962 (prix de 1957), soit une progression de 75,9 %.

723) - La création de nouvelles entreprises et de nouveaux établissements est un objectif permanent de la politique des pouvoirs publics mais aussi l'une des principales justifications de l'aide gouvernementale au financement de l'industrie, non seulement pour obtenir une croissance de la production et des emplois mais aussi, et bien plus peut-être, pour aboutir à des transformations d'ordre structurel. Malheureusement, il n'est guère commode, à cette échelle, d'obtenir une vue précise des mouvements internes qui affectent l'industrie en matière de créations et de disparitions d'entreprises ou d'établissements.

  • 22 Il s'agit ici de l'entreprise entendue comme "unité technico-économique" (en néerlandais : BEDRIJF (...)

73Les statistiques générales de l'industrie publiées par le C.B.S. montrent que, entre le 31 décembre 1946 et le 31 décembre 1960, 1 724 entreprises industrielles nouvelles ont été constituées, soit une moyenne de 123 par an, ce qui correspond à une croissance globale de 17,6 %22. Il va de soi que ce chiffre est fort peu significatif dans la mesure où on ne peut tenir compte du nombre des disparitions intervenues au cours de la même période ; le total des créations nouvelles effectives est sans doute plus important.

Fig. no 4 - EMPLOIS - PRODUCTION - PRODUCTIVITE, EVOLUTION COMPAREE

Fig. no 4 - EMPLOIS - PRODUCTION - PRODUCTIVITE, EVOLUTION COMPAREE

Source : 8eme Memorandum sur l’industrialisation

74Les données sont un peu plus précises en ce qui concerne la création des établissements (mais non leur disparition) : de 1953 à 1962 inclus, 1 517 nouveaux établissements font leur apparition, soit une moyenne de 151 par an ; ils représentent environ 43 220 emplois (les effectifs étant comptés à la fin de l'année de mise en route), soit en moyenne 28 emplois par établissement et 4 322 emplois nouveaux par an.

75Pour cette période, les créations ne concernent donc surtout que de petites unités. On ne connaît pas la ventilation de ces établissements par branches d'activité. Il est probable que la métallurgie et la chimie en comptent le plus grand nombre. Notons que la taille moyenne des nouveaux établissements ne progresse pas avec le temps : elle est de 33 en 1953 et de 27 en 1960. Reste à savoir, bien sûr, comment évoluent ces établissements au-delà de l'année de création.

76La stimulation du dynamisme de l'industriel néerlandais va de pair, dans la politique officielle, avec la volonté d'attirer aux Pays-Bas les investisseurs étrangers surtout ceux qui, en plus de leurs capitaux, sont susceptibles d'apporter des méthodes et des techniques nouvelles. Qu'en est-il à cet égard ?.

Tableau no 5 - Les implantations étrangères dans l'industrie

Périodes

Filiales directes

Participations

Total

1946-1952

33

65

98

1952-1957

91

52

143

1957-1962

171

98

269

TOTAL

295

215

510

Source : 6ème et 8ème Rapports sur l'industrialisation des Pays-Bas

77Sans pousser trop loin le parallèle, remarquons que les 412 implantations étrangères réalisées entre 1952 et 1962 inclus représentent plus de 1/4 des établissements créés entre 1953 et 1962, soit une proportion assez considérable de la génération industrielle. La répartition de ces implantations par pays d'origine montre que la politique d'information et de publicité conduite aux Etats-Unis sous les auspices du gouvernement néerlandais s'est avérée relativement efficace :

Tableau no 6 - Origine des implantations étrangères Situation au 31.12.1962

Origine

Filiales directes

Participations

Total

U.S.A.

140

79

219

Royaume-Uni

44

43

87

Suisse

21

14

35

Belgique

22

19

41

Allemagne Féd.

32

29

61

France

4

8

12

Suède

21

8

29

Divers

11

15

26

TOTAL

295

215

510

Source : 8ème Rapport sur l'Industrialisation des Pays-Bas

  • 23 Non seulement les entreprises étrangères sont traitées comme les entreprises du pays mais, de plus (...)

78Le tableau ci-dessus soulève immédiatement deux remarques : la part des implantations d'origine américaine est très forte, avec 42,9 % du total ; exception faite des implantations d'origine française, il s'agit surtout de création de filiales directes puisque celles-ci interviennent pour 57,8 % du total des implantations réalisées à la fin de 1962. On peut penser que cette prépondérance traduit deux phénomènes : d'une part, l'intérêt qu'offrent les Pays-Bas comme espace de localisation, d'autre part, une certaine faiblesse financière des entreprises néerlandaises qui n'ont pas assez de ressources propres pour multiplier les "joint ventures" avec les investisseurs étrangers. Nul doute que le niveau relativement bas des salaires, la disponibilité en main-d'oeuvre, la paix sociale qui règne dans le pays et la politique très libérale des pouvoirs publics23, expliquent, pour l'essentiel, ce développement. Il faut, bien sûr, y ajouter l'excellence de la situation géographique par rapport au monde rhénan et à l'Europe du Nord-Ouest, facteur de localisation dont l'influence ira croissant au cours de la décennie Soixante.

  • 24 D. W. JOEKES : Nederland als vestigingsplaats voor buitenlandse industrieen. in ESB no 2239 - 1960 (...)
  • 25 M. DE SMIDT : Foreign industrial establishments located in the Netherlands. in TESG - 1966 - no 1 (...)

79Quelle est l'importance de ces implantations étrangères ? Si on en connaît bien le nombre, il est plus difficile d'en apprécier l'apport réel sur le plan des emplois. Pour l'année 1959, par exemple, les emplois relevant directement des entreprises américaines sont estimés à environ 13 000, soit 0,8 % de l'emploi industriel total, auxquels s'ajoutent plus ou moins 7 000 personnes travaillant dans des entreprises dont les activités se situent immédiatement à l'amont de celles des établissements américains. Au total donc, environ 20 000 personnes sont directement concernées, soit près de 1,2 % des effectifs de l'industrie24. A propos des 510 implantations étrangères présentes à la fin de 1962, IWEMA écrit : "Selon une estimation très grossière, ces établissements emploient environ 1 % de la population active totale et à peu près 2 % de la main-d'oeuvre industrielle". (R. IWEMA - 1966 - no287p. 22). Selon De SMIDT, les filiales directes ont créé, entre le 30.08.1950 et le 30.08.1963, environ 26 500 emplois industriels, ce qui représente 15 % des 184 300 emplois industriels nouveaux créés aux Pays-Bas au cours de la même période25. Ces diverses estimations restent sans aucun doute en-deça de la réalité. Il faut également tenir compte des effets indirects sur le niveau de l'emploi dans les autres entreprises car, en règle générale, les sociétés étrangères font beaucoup plus appel à la sous-traitance technique et commerciale que leurs homologues néerlandais, ce qui accroît d'autant leur impact sur le niveau de l'emploi.

80Assurément, l'emploi n'est pas le domaine où l'influence des investissements étrangers directs est la plus importante. Celle-ci est bien plus grande encore sur le plan technologique, dans le domaine des structures de l'industrie et même sur le plan de la répartition régionale des activités industrielles. Nous reviendrons ultérieurement sur ces différents aspects. Il est, cependant, un domaine où leur influence est déterminante : celui de la capacité d'exportation, car les entreprises étrangères sont spécifiquement orientées vers les marchés extérieurs.

814) - C'est, peut-être, dans le domaine des exportations industrielles que le bilan 1945-1963 apparaît comme étant le plus favorable et que s'affirme vraiment le succès de la politique des pouvoirs publics. Le fait le plus remarquable est l'augmentation continue de la part de la production qui a pu être exportée :

Tableau no 7 - Exportations industrielles en % de la production (à prix constants)

Années

%

Années

%

1950

23

1957

32

1951

26

1958

35

1952

28

1959

37

1953

29

1960

37

1954

30

1961

38

1955

31

1962

40

1956

31

1963

41

Source : Banque Nationale d'investissement.

82On peut remarquer que les crises de 1951-1952 et 1957-1958, dont les effets sont bien visibles sur les investissements, sont fort peu sensibles ici ; elles n'ont pas provoqué de freinage des exportations. Peu à peu ces exportations se sont concentrées sur les pays membres de la Communauté Européenne : 41 % du total en 1957, 46 % en 1960 et 53 % en 1963.

83Dans l'ensemble des exportations, la part des produits industriels est prépondérante et s'accroît régulièrement :

  • 3 ne sont indiquées que les exportations de produits

Tableau no 8 - Structure des exportations néerlandaises3 (en valeur.prix de 1965. %.)

Origine produits

1955

1960

1965

Agriculture

11,0

9,8

8,8

Ind.agricoles

20,0

18,7

16,4

Autres industries

56,3

60,4

62,5

Source : C.P.B. de Nederlandse économie in 1970, pp. 79-81

84Une comparaison entre les rythmes de croissance de la production et des exportations confirme l'aspect positif du bilan de la première période d'industrialisation (après 1963, ce problème n'aura plus du tout la même signification). L'industrie des Pays-Bas est de plus en plus exportatrice.

  • 4 exprimés en volume

Tableau no 9 - Production et exportations industrielles %4

Périodes

Taux croissance Prod.

Taux croissance Export.

1948-1952

30

180

1952-1957

38

51

1957-1962

30

54

Source : R. IWEMA - Economie backgrounds of manpower trends in the Netherlands. Rotterdam - NEI. 1966 - p. 23.

855) - Comme on a pu le constater, l'industrie devient, après la seconde guerre mondiale, l'activité économique dominante du pays. La caractéristique fondamentale de cette évolution est la transformation progressive de l'industrie sur le plan qualitatif et l'élargissement de l'éventail de ses productions, surtout vers les produits chimiques et électroniques.

865-1) - Le premier aspect de la mutation, c'est le glissement qui s'opère dans la répartition des emplois entre les diverses branches, glissement qui fait apparaître une croissance régulière dans la chimie et la métallurgie, au sens large, ainsi qu'une restriction progressive dans les activités plus traditionnelles telles que les industries agricoles, la confection, le textile et les industries extractives.

  • 5 Toutes entreprises, Bâtiment et Util. Publiques exclus en x 1 000 homme-années

Tableau no 10 - Evolution de la répartition des emplois5 (x 1 000)

Tableau no 10 - Evolution de la répartition des emplois5 (x 1 000)

(2) Selon la classification A.I.S.
(3) Estimations
(4) Confection + teinture + chaussure
Source : C.B.S. et 8ème Rapport sur l'Industrialisation des Pays-Bas.

87C'est donc l'industrie chimique qui connaît entre 1948 et 1962, la plus forte croissance relative des emplois, avec 86 %, suivie de la métallurgie, 55 %, des industries graphiques, 50 % et de l'industrie du papier. Toutes les autres branches ont un taux de croissance inférieur à la moyenne nationale, qui est de 28,5 %, tandis que le déclin relatif le plus prononcé est celui du groupe confection-chaussure. Le tableau ci-dessus ne donne que les situations en début et en fin de période. Une référence aux comportements intermédiaires montrerait que le textile et les industries extractives connaissent un emploi maximum en 1957 et un déclin à partir de cette date.

88La branche 11 de la nomenclature générale AIS regroupe l'ensemble des activités liées à la métallurgie, donc aussi bien des industries en pleine expansion comme la sidérurgie, la mécanique et l'électronique, que des activités dont le déclin s'accélère à partir de 1955, comme les constructions navales.

89L'ampleur des mutations qui s'opèrent dans la ventilation des emplois par branches est en réalité plus grande que ne le montre le tableau précédent. Si on ne tient compte que des entreprises employant plus de 10 salariés, la progression des branches dynamiques apparaît plus nettement, tout comme le déclin des branches plus traditionnelles :

  • 6 Entreprises employant au moins 10 personnes

Tableau no 11 - Evolution de la répartition des emplois %6

Branche d'activité

1948

1956

1964

Métallurgie

30,3

34,7

36,5

Chimie

5,2

6,0

6,8

Ind. Graphiques

3,1

3,8

4,1

Textile

13,0

12,1

10,2

Confection

8,4

8,0

7,9

Ind. extractives

6,3

5,8

5,0

Ind. alimentaires

15,9

13,9

14,3

Source : R. IWEMA - op. cit. p. 28.

90Ce changement de répartition n'est pas dû exclusivement aux effets de tendances autonomes ; il est directement influencé par les activités d'origine étrangère qui s'implantent aux Pays-Bas au cours de cette période.

91Les implantations étrangères sont, de manière très préférentielle, orientées vers les secteurs dynamiques et en particulier vers la chimie et la métallurgie.

Tableau no 12 - Ventilation des implantations étrangères. Situation au 51.12.1962

Branches d'activité

Filiales

Participations

Total

Métallurgie

116

77

193

Ind. électrotechniques

28

6

34

Chimie

59

50

109

Textile

18

21

39

Ind. alimentaires

19

9

28

Caoutchouc

6

3

9

Divers

49

49

98

TOTAL

295

215

510

Source : 8ème Rapport sur l'Industrialisation des Pays-Bas, Annexe II.

9265,8 % du total des implantations étrangères sont donc concentrés dans les secteurs les plus dynamiques, la proportion étant encore un peu supérieure si on ne tient compte que des seules filiales. L'importance relative du textile ne doit pas induire en erreur : il s'agit pour l'essentiel d'investissements réalisés dans les textiles artificiels et synthétiques, en plein essor au cours de ces années, et non pas d'implantations dans les secteurs plus traditionnels de la laine et du coton.

935-2) - La seconde tendance majeure qui se manifeste est une concentration progressive des emplois aux profits des grandes entreprises. Cette tendance est encore bien modérée mais réelle : entre 1947 et 1962, l'emploi industriel dans les entreprises de moins de S salariés passe de 11 %à 6 %de l'emploi total tandis que les entreprises employant plus de 500 salariés concentrent environ 38,7 "s du total des effectifs à la fin de 1962. En dépit de la présence de quelques "grands", tels que PHILIPS, A.K.U. et UNILEVER, l'industrie néerlandaise reste encore largement dominée par la petite et la moyenne entreprise.

  • 7 Entreprises employant au moins 10 personnes. Bâtiment et Util. Publiques exclus.

Tableau no 13 - Evolution de la concentration des emplois %7

Tableau no 13 - Evolution de la concentration des emplois %7

Source : CBS/AIS

94De ces chiffres, il ressort que toutes les catégories d'entreprises voient diminuer leur poids relatif dans l'emploi total à l'exception de celles qui ont un effectif supérieur à 1 000 salariés. Ce qui est remarquable, à ce propos, c'est que la concentration des emplois n'est pas l'exclusivité des branches d'activité les plus dynamiques quant aux taux de croissance des effectifs, elle se manifeste tout autant dans d'autres branches. En fait, entre 1950 et 1964, l'emploi diminue partout, en valeur relative, dans les entreprises petites et moyennes et il augmente partout dans les entreprises qui comptent plus de 500 salariés. En 1964, c'est même le textile qui présente la plus forte concentration des emplois (résultat d'une restructuration profonde, comme nous le verrons ultérieurement) alors que les industries du bois, les industries graphiques et la confection sont les branches où l'emploi est le plus dispersé.

Tableau no 14 - Evolution de la concentration des emplois par branches d'activité %

Tableau no 14 - Evolution de la concentration des emplois par branches d'activité %

(1) Raffinage du pétrole inclus
(2) Y compris les ind. extractives, le Bâtiment et les Utilités Publiques
Source : d'après les statistiques CBS/AIS

95Si on considère non plus le degré de concentration en fin de période mais le rythme d'évolution de cette concentration des emplois, alors la chimie, l'industrie du papier, le cuir et même les industries alimentaires dépassent largement le textile.

  • 26 CBS : bulletin mensuel de statistiques - juillet 1965.

96Cette concentration lente mais régulière des effectifs employés dans l'industrie va de pair avec un progrès non moins constant et non moins général de la productivité du travail, progrès qui affecte également l'ensemble des branches, ce qui montre la relative efficacité des efforts de modernisation et de restructuration entrepris sous l'égide des pouvoirs publics. Ces progrès ne sont pas partout identiques, mais ils se manifestent aussi bien dans les secteurs les plus dynamiques que dans les activités en stagnation. Pour une valeur 100 en 1958, l'indice de la productivité du travail passe de 79 à 144 dans la métallurgie entre 1953 et 1964, de 84 à 139 pour le textile et de 82 à 126 pour l'industrie de la confection26. En réalité, ce sont surtout les écarts entre les gains de productivité qui distinguent les branches entre elles : de 1954 à 1963, la croissance annuelle moyenne de la productivité est de 7,5 % dans les industries métallurgiques et électrotechniques, 5,9 % dans la chimie, 4,5 % dans le textile, 2,5 %dans la confection et 1,6 % dans les industries de matériels de transport.

97Exception faite des industries extractives qui connaissent un gain de productivité très élevé (résultat d'une mutation profonde dans l'activité charbonnière du Limburg), on constate que c'est précisément dans les branches où se concentrent les implantations étrangères que la croissance de la productivité du travail est la plus grande, ce qui montre bien l'importance de ces investissements pour l'ensemble de l'industrie nationale.

985-3) - Cependant, le principal changement qui affecte l'industrie néerlandaise au cours de ces années est la rapide diversification des activités industrielles. Comparée à la structure industrielle d'autres pays développés, celle des Pays-Bas d'avant la guerre présentait quelques sérieuses lacunes. Seules étaient bien représentées les constructions navales, la production des matériels hydrauliques, la fabrication des cycles et des matériels ferroviaires, la production des machines et des outillages destinés aux industries agricoles et à la transformation des produits tropicaux, les industries textiles traditionnelles ainsi que la chimie à base de sel et de charbon. Entre 1945 et 1963, les grandes industries métallurgiques et chimiques de base se développent rapidement, ainsi qu'un large éventail d'industries de biens d'équipement. Les laboratoires, les centres de recherche appliquée, les bureaux d'engeneering se multiplient dans presque toutes les branches.

99Dans le domaine de la chimie, où le poids des investissements étrangers est très grand, l'essor le plus remarquable est à mettre au compte de la pétrochimie et du raffinage, concentrés à Rotterdam et Europoort.

100Sous l'impulsion de l'Etat, les progrès de la carbochimie sont à peine moins rapides (nous en verrons plus tard la signification dans le cadre de la conversion des Houillères du Limburg).

101La production des textiles artificiels et synthétiques, des engrais, des plastiques, des peintures... progresse aussi très vite. La création d'une grande chimie de base permet de réaliser un exceptionnel élargissement de l'éventail des productions chimiques, tant organiques que minérales. Dans le domaine de la métallurgie, la diversification résulte directement des progrès de la sidérurgie de Ijmuiden. Un essor très rapide caractérise la production des instruments, des machines comptables, des appareils de mesures, des machines du bureau et, avec le permanent leadership de l'entreprise PHILIPS, des industries électrotechniques.

102Seuls deux domaines de la métallurgie restent quelque peu en retrait : la construction navale qui a de sérieux problèmes de structures internes et qui a bien du mal à faire face à la concurrence internationale, la métallurgie des non-ferreux, qui est encore peu développée aux Pays-Bas (la production d'aluminium à Delfzijl ne démarre qu'en 1966).

  • 27 Min. Aff. Econ. : 8ème Rapport sur l'Industrialisation. La Haye - 1963.

103L'apparition de ces activités nouvelles s'accompagne d'une intégration croissante des entreprises et des productions. L'industrie néerlandaise devient de plus en plus "capital intensive", tandis que commence à s'affirmer le déclin relatif des industries de main-d'oeuvre. Finalement, la discordance progressive entre les industries traditionnelles et nouvelles s'exprime moins par des tendances divergentes en matière d'emploi que par un écart croissant entre les rythmes de production, ce que IWEMA notait déjà en soulignant que : "les différences relatives dans la production sont bien plus grandes que les différences relatives dans la répartition de la main-d'oeuvre". (R. IWEMA - 1966 - no 283 - p.34). De 1948 à 1952, le taux de croissance du volume de la production de la chimie est de 131 % et celui de la métallurgie générale de 34 %, alors qu'il n'atteint que 20 % pour l'industrie textile et les industries alimentaires. Entre 1952 et 1957, les valeurs correspondantes sont, respectivement, de 42 %, 58 %, 27 % et 22 %. Dans la troisième période, les écarts sont encore plus nets : le volume de la production de la métallurgie croît de 51 %tandis que celui du textile n'augmente que de 10 I27. Ces transformations se répercutent directement dans le domaine des exportations industrielles. Alors que les produits textiles et alimentaires ont longtemps constitués l'essentiel des exportations, leur importance relative décroît assez rapidement au cours de la décennie Cinquante tandis qu'augmente la part des produits chimiques, des machines et des produits métallurgiques divers. L'influence des entreprises étrangères est ici certaine mais à peu prés impossible à isoler.

104Selon le 8ème Rapport sur l'Industrialisation des Pays-Bas, la part des "produits chimiques divers" (pétrole exclu) dans la valeur totale des exportations industrielles passe de 8,3 % en 1952 à 11 % en 1957 et 11,2 % en 1962 ; celle des "machines et appareils" passe de 12,2 % à 13,7 % puis 19,3 %. En 1952, les "produits textiles" représentent 16,5 %des exportations et seulement 12,5 % dix ans plus tard ; le déclin des "produits alimentaires et annexes" est encore plus net puisqu'ils passent de 17,6 à 10,6 % de la valeur totale des exportations.

105Le tableau ci-après permet de mieux réaliser le dynamisme spécifique des industries chimiques et métallurgiques au regard des exportations :

Tableau no 15 - Indices d'exportation des produits fabriqués 1953 = 100

Tableau no 15 - Indices d'exportation des produits fabriqués 1953 = 100

(1) Y compris la confection
Source : Banque Nationale d'investissement. L'Evolution Industrielle aux Pays-Bas - 1966, p. 9.

106Les indices de la chimie et de la métallurgie sont donc constamment supérieurs à ceux de l'ensemble de l'industrie, et les écarts vont croissant, alors que la situation est inverse pour le textile et les industries alimentaires.

107Ces diverses tendances qui se manifestent au sein de l'industrie néerlandaise ne sont, à vrai dire, ni spécifique aux Pays-Bas ni particulièrement originales. On les retrouvent à la même époque dans la plupart des autres pays d'Europe occidentale. Ce qui distingue vraiment l'évolution néerlandaise, c'est plutôt le phénomène de rattrapage, le fait que les structures globales, tant pour l'éventail des productions que pour la répartition des emplois, tendent à se rapprocher de plus en plus de celles des autres pays industrialisés alors qu'elles en étaient assez éloignées jusqu'aux débuts des années Cinquante. Comparant les structures de dispersion de l'emploi industriel de 12 pays d'Europe occidentale, pour les seules industries "fondamentales", L. H.

  • 28 L.H. KLAASSEN : op. cit. L'indice de dispersion est tel que I = 100 si la structure de répartition (...)

108KLAASSEN montre justement que, entre 1950 et 1960, l'indice de diversification pour les Pays-Bas est passé de 76 à 82, soit la plus forte mutation enregistrée parmi les pays concernés, ce qui signifie que, comparée à la structure de l'ensemble, celle de l'emploi industriel aux Pays-Bas s'est nettement améliorée ; elle est devenue plus "favorable"28.

109Après 1952, la hantise d'un déficit structurel extérieur a peu à peu disparu. Maintenir le niveau des investissements et assurer le plein emploi restent les objectifs majeurs et permanents de la politique des pouvoirs publics tandis que les gouvernements s'efforcent aussi d'obtenir une meilleure répartition régionale et sociale des bénéfices de la croissance. Cependant, dés avant 1960, les premiers signes de changements profonds sur le plan intérieur commencent à se manifester, changements qui s'accélèrent brutalement après 1963 et qui conduisent à la mise en place d'une nouvelle politique industrielle aux Pays-Bas.

II - VERS UNE POLITIQUE PLUS SECTORIELLE - LES ANNÉES 1964-1973

A) - La transformation des conditions du marché intérieur

1101) - L'abondance en main-d'oeuvre disponible, résultat de la forte poussée démographique et du rapide déclin des emplois offerts par l'agriculture, est l'une des principales caractéristiques du marché intérieur du travail au cours des quinze premières années d'après-guerre. A l'exception de la construction navale et des industries extractives, aucune branche d'activité industrielle ne voit diminuer ses effectifs de travailleurs jusque vers la fin des années Cinquante. La paix sociale et le niveau des salaires, nettement inférieur à celui des pays voisins, ont créé des conditions particulièrement favorables à l'expansion des industries qui ont pu maintenir, assez longtemps, une position concurrentielle et un haut niveau d'exportation. Cependant, dés avant 1960, des changements profonds commencent à se manifester dans le pays, changements qui vont peu à peu accentuer l'écart existant entre les activités dynamiques et les branches stagnantes, ces dernières faisant de plus en plus figure de secteurs faibles de l'économie néerlandaise. A partir de 1963, sous la double pression du manque de main-d'oeuvre et des problèmes sectoriels de certaines branches, la politique des salaires est entièrement remise en cause tandis que s'accroît la turbulence sociale dans tout le pays, d'où l'apparition de difficultés nouvelles pour maintenir le caractère compétitif des productions nationales.

1111-1) - En tant que phénomène structurel permanent, l'insuffisance en main-d'oeuvre disponible pour l'industrie sur le marché intérieur se manifeste nettement à partir des années 1959-1960. Avant cette date, il s'agit plutôt d'un phénomène d'ordre conjoncturel, comme en 1946-1947 ou bien en 1955-1956, sauf pour ce qui concerne la main-d'oeuvre hautement qualifiée, on sait que le taux global de chômage est resté très bas tout au long de la période précédente. A partir de 1959, il diminue encore fortement alors que la demande en main-d'oeuvre augmente vite en raison du double essor des activités industrielles et du secteur tertiaire.

112Pendant plusieurs années, la demande va être largement supérieure aux réserves disponibles, d'où une tension croissante sur le marché du travail, comme le montre le tableau suivant :

Tableau no 16 - Accroissement de la pénurie en main-d'oeuvre %

Années

Taux chômage (1)

Demande de main-d'œuvre (1)

Pénurie (2)

1958

3,03

1.41

+ 1,62

1959

2,36

1,84

+ 0,52

1960

1,48

2,73

- 1,25

1961

1,07

3,44

- 2,37

1962

0,98

3,47

- 2,49

1963

0,98

3,38

- 2,40

1964

0,86

3,56

- 2,70

1965

0,97

3,45

- 2,48

(1) En % de la population active totale
(2) Différence entre la réserve, constituée par le nombre de chômeurs enregistrés, et la demande de main-d'oeuvre, également exprimée en % de la population active totale.
Source : Ministère Aff. Econ.

113Ainsi, le chômage enregistré devient un phénomène quasi marginal tandis que l'insuffisance en main-d'oeuvre par rapport à la demande devient permanente et semble acquérir un caractère structurel. A la fin de 1965, le nombre de chômeurs enregistrés dans le pays est d'environ 33 000 alors que les offres d'emploi non satisfaites s'élèvent à 139 000.

114Bien entendu, le degré de pénurie est assez variable selon les régions. Seules les provinces du Nord disposent d'un excédent de main-d'oeuvre par rapport aux offres d'emplois alors que la pénurie est déjà très forte dans l'Ouest et, à un degré moindre, dans certaines régions méridionales.

115Comme nous le verrons par la suite, ces nuances régionales du marché du travail ont une importance considérable dans le cadre de la politique régionale des pouvoirs publics.

116Fait nouveau et caractéristique : la pénurie touche désormais l'ensemble des catégories de travailleurs et tous les niveaux de qualification, alors que jusque vers 1958, le manque de main-d'oeuvre concernait surtout les emplois les plus qualifiés. Sur un plan général, on peut dire que les années 1959-1960 constituent une véritable charnière. Avant 1955, la réserve de main-d'oeuvre est très nettement supérieure à la demande globale des entreprises ; à partir de 1959, la situation est totalement inversée et la pénurie reste forte jusqu'en 1966 (figure no 5).

  • 29 L'arrivée en grand nombre des femmes sur le marché du travail ne se manifeste pas encore. Elle ne (...)

117Aucune activité n'est épargnée par la pénurie. Même les professions réputées féminines n'arrivent pas à trouver le personnel qui leur est nécessaire, malgré le grand nombre de femmes "potentiellement disponibles" dans le pays29. Quelques exemples suffisent à montrer que cette pénurie n'est en aucune façon un phénomène sectoriel ou localisé :

  • 8 Demandes et offres enregistrées par les bureaux de main-d'œuvre

Tableau no 17 - Décalages entre offres et demandes d'emplois8. Situation au 30.09.1965

Activités

Demandes

Offres

Ecarts

Ouvriers Bâtiment

1 754

11 844

- 10 090

Ouvriers Métallurg.

1 298

41 916

- 40 618

Ouvriers Ind.Alim.

137

3 976

- 3 839

Pers.services Hom.

2 076

8 793

- 6 717

Pers.Direct. Hom.

1 843

3 916

- 2 073

Couturières

362

10 001

- 9 639

Employées de maison

824

6 528

- 5 704

Pers.services Fem.

540

3 179

- 2 639

Pers.Direct. Fem.

1 949

5 914

- 3 965

Source : R. IWEMA - op.cit. p. 57.

Fig. no 5 - DEMANDES ET OFFRE D’EMPLOI, EVOLUTION COMPAREE

Fig. no 5 - DEMANDES ET OFFRE D’EMPLOI, EVOLUTION COMPAREE

Source : Ministère des Affaires Economiques

  • 30 Pour les entreprises employant au moins 10 personnes. Bâtiment exclu.

118C'est, toutefois, dans l'industrie que le manque de maind'oeuvre se fait le plus sentir. A la fin de l'année 1964, par exemple, le manque de main-d'oeuvre représente environ 2,7 % de l'emploi total pour l'ensemble des activités économiques alors qu'il atteint 6 %pour la seule industrie30. Ce qui est le plus remarquable, c'est que la pénurie touche aussi bien les branches en pleine expansion, comme la chimie, la métallurgie ou l'électrotechnique, que les industries stagnantes. Même des activités en pleine contraction sur le plan de l'emploi, comme le textile, souffrent de ce manque de main-d'oeuvre.

  • 31 R. IWEMA : Economie backgrounds of manpower trends in the Netherlands. Rotterdam - N.E.I. 1966 - p (...)

119Au 31 décembre 1964, la pénurie d'ouvriers, exprimée en pourcentage de l'emploi total de la branche correspondante, n'est inférieure à 4 %dans aucune branche d'activité industrielle, les activités les plus touchées étant la confection (12 I), la métallurgie (8 %), l'industrie du bois (7 %), le cuir, le papier et la teinturerie industrielle (6 %)31.

1201-2) - La question qui se pose alors est de savoir quelles sont, en dehors de l'accroissement démographique brut, les sources possibles de main-d'oeuvre pour le recrutement industriel au cours de ces années de transition ?.

  • 32 O.C.D.E. : op. cit.
  • 33 Entre 1953 et 1964, l'agriculture a expulsé en moyenne 10 000 actifs chaque année.

121Entre 1948 et 1962, selon l'OCDE32, l'agriculture a fourni environ 123 000 actifs aux autres secteurs. Avec moins de 9 î de la population active totale en 1964, elle n'a plus grand monde à "libérer" (sauf dans les régions septentrionales du pays) et ne peut donc pas constituer une source de main-d'oeuvre de quelque importance pour l'industrie, comme cela a été le cas jusqu'alors33. De plus, la discordance va croissant entre les besoins des entreprises, qui réclament de plus en plus des travailleurs qualifiés, et la faible qualification de la main-d'oeuvre issue de l'agriculture. Ces actifs, parmi lesquels on compte beaucoup de jeunes et de gens âgés, ne trouvent alors du travail que dans les emplois de niveau banal, emplois souvent mal acceptés, peu rémunérés et bien souvent assez mal "considérés".

  • 34 Il faut aussi ajouter, pour les régions orientales du pays, la très forte attraction exercée par l (...)

122Rien d'étonnant, donc, dans le fait que cette main-d'oeuvre présente une mobilité, voire une turbulence, assez élevée par rapport aux autres actifs industriels34.

123Qu'en est-il de la population féminine ?. Les femmes sont majoritaires dans le pays puisqu'elles représentent 50,2 % de la population totale en 1960 mais, comme nous l'avons vu précédemment, le taux d'activité de la population féminine reste faible et ne s'accroît que lentement. En 1960, moins de 25 % des femmes âgées de 15 à 64 ans ont un emploi. En 1964, ce pourcentage est de 27 seulement alors même que le taux de vacance dans les emplois réputés féminins est d'environ 6,5 % (par rapport à la population féminine active). En fait, le même problème de discordance qualitative se manifeste entre les besoins de l'industrie et le faible niveau moyen général de qualification des femmes. Seules, certaines industries de main-d'oeuvre, telles que la confection ou les industries électriques et électrotechniques, au stade du montage, s'intéressent de façon systématique à cette main-d'oeuvre et cela, bien entendu, surtout dans le cadre des régions les moins industrialisées. Même dans ce dernier cas, la concurrence, exercée par les emplois du secteur tertiaire est très forte, d'autant plus que la "valeur sociale de considération" attribuée aux emplois dans les services reste nettement supérieure à celle dont jouit le travail en usine.

  • 35 Min. Aff. Econ. Projet de Loi de Budget 1969 - Annexe no 5 au Rapport sur la Politique Régionale p (...)
  • 36 J.P. WINDMULLER : op. cit. p. 382.
  • 37 PH. VAN PRAAG : Het vrije verkeer van werknemers in de EEG. in ESB du 3.1.1968 - pp. 7-10.
  • 38 C.P.B. : Nota inzake groei en structuur van onze économie. La Haye 1966 - p. 31.

124La dernière source de recrutement possible est, évidemment, représentée par le recours à la main-d'oeuvre étrangère. N'est-il pas significatif de constater que l'année 1962 marque, à cet égard, une véritable rupture par rapport à la politique restrictive appliquée jusqu'alors tant par les pouvoirs publics que par les entrepreneurs eux-mêmes. De 1954 à 1961, la moyenne annuelle des autorisations 6fficielles d'entrée est de 25 951. Elle passe à 58 724, soit plus du double, entre 1962 et 1968 inclus35. A partir de 1962, les Pays-Bas deviennent donc un pays d'immigration alors que depuis la seconde guerre mondiale, en raison des disponibilités du marché intérieur, du manque de logements et d'une "peur quasi morbide du chômage"36, l'appel aux travailleurs étrangers était resté très limité, plus même que dans les pays voisins. En chiffres absolus, le nombre des travailleurs étrangers augmente rapidement mais, en valeur relative, leur importance reste très secondaire par rapport à la population active industrielle totale. Après comme avant 1962, la faible importance des travailleurs étrangers reste une caractéristique du marché du travail aux Pays-Bas, au même titre que le faible taux général d'activité ou que le faible taux d'emploi féminin. En 1958, on compte 29 900 salariés étrangers, soit à peine 0,99 % de la population active ayant un emploi. En 1965, on en dénombre 63 100, soit 1,77 %du total des actifs ayant un emploi (par comparaison, les données correspondantes pour l'Allemagne de l'Ouest sont,en 1958, de 127 000 et 0,65 % et, en 1965, de 1 119 000 et 5,12 %. En Belgique en 1965, les travailleurs étrangers sont au nombre de 200 000 environ, soit à peu prés 6,98 % du total des actifs ayant un emploi)37. Les immigrés originaires de la Méditerranée sont, ici comme ailleurs en Europe du Nord-Ouest, majoritaires, avec un groupe de 36 000 personnes en 1965, et travaillent presque tous dans l'industrie, en particulier dans la métallurgie et le textile où ils représentent à peu prés 5 % de la main-d'oeuvre employée38. De 1960 à 1965, le nombre des travailleurs étrangers passe de 5 028 à 21 408 dans la métallurgie, ce qui représente une augmentation de 425 1 en cinq ans, et de 1 700 à environ 5 370 dans l'industrie textile, soit une croissance de 315 %.

  • 39 C.P.B. : Centraal economisch plan 1965 - pp. 25 et suivantes.

1252) - L'apparition progressive d'une forte tension sur le marché du travail est, certes, une transformation capitale du contexte économique et social intérieur de l'expansion industrielle. La véritable explosion des salaires qui se manifeste après 1963 en est une autre, dont la portée et les conséquences ne sont pas moins grandes, alors que les salaires ont pu être maintenus à un niveau nettement inférieur à celui des pays voisins depuis 1945 et que leur rythme de croissance est resté très lent de façon à conserver à l'industrie un net avantage vis-à-vis de la concurrence internationale, ils augmentent brusquement de 15 % au cours de la seule année 1964, soit la plus forte hausse annuelle enregistrée depuis 1950. Entre 1958 et 1964, le coût unitaire de la main-d'oeuvre aux Pays-Bas s'accroît de 33 %, contre 171 seulement dans les cinq autres pays de la Communauté et 4 % au Royaume-Uni39. Que s'est-il donc passé ?.

1262-1) - L'existence d'une politique gouvernementale des salaires, donc l'ingérence des pouvoirs publics dans les discussions salariales au niveau des branches, était chose habituelle et admise de tous depuis 1945. Or, à partir de 1963, sous la double pression du patronat et des organisations syndicales, le système traditionnel est profondément bouleversé. Le patronat doit faire face à une brusque accélération de la croissance des coûts de main-d'oeuvre tandis que les syndicats réclament une hausse plus rapide des salaires et une plus grande liberté dans leurs modalités de fixation. On se souvient qu'en 1958-1959, un premier élargissement de la politique salariale est intervenu avec l'indexation des hausses des salaires sur les progrès de la productivité, ce qui a conduit à une structure salariale plus différenciée qu'autrefois. A partir de 1960, la tension sur le marché du travail et la pression sur les salaires sont telles qu'une nouvelle transformation est considérée comme indispensable.

127Au cours de l'année 1963, le contrôle administratif des salaires est transféré du Conseil des Médiateurs, organisme gouvernemental, à la Fondation du Travail, institution privée. Le Gouvernement n'est plus le principal maitre-d'oeuvre de la politique salariale, il ne conserve plus qu'un droit de veto sur les accords de salaire passés entre la Fondation et l'une ou l'autre des branches d'activité industrielle.

  • 40 - L'exemple de l'accord signé entre trois syndicats et la firme PHILIPS en 1965 est significatif d (...)

128Dés lors, les salaires réels connaissent une hausse rapide, bien plus rapide que prévus pour les quatre années suivantes L'influence du développement du travail noir se fait bien sûr sentir mais la hausse est, semble-t-il, surtout une conséquence des décisions prises par certaines grandes entreprises ou par certaines branches qui, chose nouvelle, mettent en place des accords de salaires "à long terme" avec indexation sur la hausse du coût de la vie. C'est, par exemple, le cas dans la métallurgie en 196540. 11 faut attendre 1967-1968, et la réapparition d'un certain chômage au niveau national, pour voir se rétablir quelque peu les prérogatives et l'influence directe de l'Etat en matière de fixation des grilles de salaires.

1292-2) - Dans la première moitié de la décennie Soixante, le rythme de croissance des salaires est tel que les Pays-Bas perdent peu à peu l'un de leurs atouts majeurs par rapport à leurs voisins d'Europe occidentale. Non pas que les salaires y soient plus élevés qu'ailleurs, ceux de Belgique et d'Allemagne Fédérale restent bien supérieurs, mais par le fait que l'écart diminue très rapidement entre les salaires néerlandais et ceux des autres pays européens (figure no 6).

  • 41 H. EMMANUEL : art. cit.

130Avec un indice 100 en 1950, le salaire moyen des ouvriers de l'industrie manufacturière aux Pays-Bas est nettement inférieur à celui de l'ensemble de la Communauté Européenne, qui se situe alors à l'indice 115 (l'indice étant de 155 pour la Belgique et de 120 pour la France). Par contre, en 1966, le salaire néerlandais est au même niveau que celui de la Communauté, tandis que le salaire français lui est inférieur (94 contre 100) et que le salaire belge lui est à peine supérieur avec un indice de 102. Pour les employés, la diminution des écarts n'est guère moins rapide : pour une valeur 100 aux Pays-Bas en 1950, la France est à 160 et la Belgique à l'indice 170 ; en 1966, les valeurs respectives sont de 100, 120 et 11141.

  • 42 Nederlandse Onderneming du 16.1.1970 - p. 62.

131La situation de 1966 est, en fait, encore moins favorable que la figure précédente ne le laisse paraître. Si on considère le nombre moyen d'heures de travail, il apparaît que c'est aux Pays-Bas que le coût horaire de la main-d'oeuvre est le plus élevé en 1966 : 8,32 florins, contre 8,29 en Allemagne de l'Ouest, 8,16 en France et 7,58 seulement en Belgique42.

Fig. no 6 - EVOLUTION DES SALAIRES (ouvriers des industries manufacturieres)

Fig. no 6 - EVOLUTION DES SALAIRES (ouvriers des industries manufacturieres)
  • 43 C.E.E. : Enquête sur les coûts de main-d'oeuvre dans les industries des pays de la Communauté. Cit (...)

132Cette tendance à la hausse des salaires va se poursuivre aux Pays-Bas bien au-delà de 1966, et sur un rythme très supérieur à celui de la hausse dans les autres pays du Marché Commun. Les statistiques publiées par le Bureau des Communautés Européennes montrent qu'avec une augmentation de 31,9 % pour le salaire horaire des ouvriers et de 32,4 % pour le salaire mensuel des employés, ce sont les Pays-Bas qui connaissent la plus forte hausse entre 1966 et 1969. Par comparaison, les augmentations sont en Belgique, respectivement de 26,8 % et 23,1 % et en France de 24,4 % et 19,5 %43.

1333) - La fin d'une longue tradition de main-d'oeuvre abondante ainsi que la disparition des avantages substanciels liés à l'existence de salaires nettement inférieurs à ceux des concurrents directs modifient complètement les données du problème pour l'industrie néerlandaise. A partir de 1962-1964, la question des structures s'impose de plus en plus, en particulier dans les branches où l'adaptation aux conditions nouvelles est particulièrement difficile. Avant 1963, on ne constate aucune diminution notable des effectifs employés dans les diverses industries (sauf dans certaines branches du textile et dans l'industrie charbonnière bien sûr). Il n'en est pas de même après 1965, date à partir de laquelle l'écart des tendances s'accentue fortement entre les branches où l'emploi diminue vite et celles dans lesquelles il se développe régulièrement. De 1965 à 1970, le textile perd environ 30 000 emplois et la confection en perd à peu près 19 000, tandis que la métallurgie voit ses effectifs passer de 425 300 à 447 400 et que la chimie crée 21 000 emplois nouveaux dans le pays.

134L'insuffisance quantitative se doublent de certains problèmes d'ordre qualitatif. L'industrie néerlandaise est, plus que jamais, placée devant l'obligation d'améliorer sa productivité et d'intensifier ses investissements. Mais toutes les branches n'en sont pas capables au même rythme et au même degré, d'où une accentuation des divergences dans les comportements sectoriels. La hausse rapide des coûts de main-d'oeuvre provoque l'apparition de nombreuses difficultés dans les industries traditionnelles employant un important effectif et remet en cause leurs structures internes. Une accélération des mouvements de concentration des entreprises et un glissement vers les activités les plus capitalistiques s'imposent de plus en plus.

135La politique des pouvoirs publics exprime bien entendu ces divers changements. Pour faire face aux rapides progrès de la technologie, à la hausse des coûts du travail et à la concurrence, la politique industrielle devient de plus en plus une politique structurelle visant une série de modifications à moyen et long termes de l'appareil industriel national. Par ailleurs, les difficultés croissantes qui se manifestent dans certaines branches conduisent les pouvoirs publics à développer des systèmes d'études et d'intervention plus spécifiques et mieux appropriés à la problématique d'une industrie particulière. Leur politique industrielle devient donc également une politique plus sectorielle.

B) - Contrastes dans la croissance : branches faibles et branches fortes

1361) - Les années Cinquante représentent une période de croissance générale des effectifs pour toutes les branches d'activité industrielle. Les difficultés, nées des conditions nouvelles offertes par le marché intérieur, se traduisent par le passage à une période qui voit s'accentuer les divergences dans la croissance des diverses industries. Ainsi apparaissent des branches en déclin, en stagnation ou en développement rapide.

1371-1) - Une diminution des effectifs employés ne signifie pas nécessairement un déclin véritable, elle peut traduire une amélioration de la productivité et aller de pair avec une croissance régulière de la production (comme c'est, par exemple, le cas dans certaines activités du textile). De même, une augmentation des effectifs n'est pas toujours synonyme de bonne santé économique. Il n'en reste pas moins que l'évolution des emplois est un critère souvent commode, et non dénué de valeur, pour dégager les tendances des diverses branches sur une longue période. Le tableau ci-dessous montre que, à l'exception des industries extractives et textiles pour lesquelles la diminution des effectifs s'amorce dés 1955, l'emploi est partout en augmentation jusque vers 1965, date à partir de laquelle les écarts de comportement entre les branches s'accusent fortement.

  • 9 Situation au 31.12 de chaque année

Tableau no 18 - Evolution des effectifs employés x 1 0009

Tableau no 18 - Evolution des effectifs employés x 1 0009

(2) Selon la classification AIS
Source : statistiques CBS/AIS.

138La rupture de 1965 apparaît nettement pour la confection-teinture (branche 07a+b) qui, en l'espace de 5 ans, perd 19 200 emplois, soit une moyenne annuelle de 3 840 entre 1965 et 1970. Pour les industries extractives (branche 10) et le textile (branche 15), la rupture est toute aussi nette mais correspond à une vigoureuse accélération de la baisse des effectifs employés. En cinq ans, la perte d'effectifs est de 30 000 pour le textile (soit plus du double de la perte subie au cours des dix années précédentes) et de 36 200 pour les industries extractives (où la diminution des emplois n'a été que de 3 700 entre 1955 et 1965). Si les comportements apparents de ces deux branches présentent une grande similitude, ils correspondent en réalité à des évolutions très différentes, comme nous le verrons ultérieurement.

139Exprimée en valeurs absolues, l'évolution des effectifs employés ne permet tout au plus que de dégager des tendances très générales. Par contra, l'évolution des rythmes de croissance de l'emploi fait apparaître des types de comportement bien différenciés.

Tableau no 19 - Taux de croissance des effectifs employés %

Branches d'activité (1)

1950-1960

1960-1970

1950-1970

01

9,05

- 5,07

3,53

03

47,31

24,81

83,87

05

53,30

45,68

123,34

06

- 0,96

3,38

2,39

07a+b

0,12

- 14,31

- 14,20

09

24,92

- 25,49

- 6,91

10

8,98

- 66,32

- 68,29

11

39,13

20,30

67,37

14

7,01

13,44

21,40

15

- 0,34

- 33,25

- 33,48

17

13,17

3,68

17,34

TOTAL

20,27

2,48

23,26

(1) Selon la classification AIS
Source : d'après les statistique CBS/AIS

140Au cours de la première décennie, l'emploi dans les 11 grandes branches a donc augmenté d'un cinquième et on peut constater que cette augmentation est assez largement répartie entre les branches puisque seuls le textile et les industries du bois présentent un léger recul de leurs effectifs. Au contraire, les contrastes se renforcent au cours de la décennie suivante : alors que la croissance globale est assez faible (2,48 I), cinq branches présentent une régression nette (céramique-verre, confection...) ou très forte (cuir, textile, industries extractives), tandis que dans les secteurs où l'emploi est en expansion, la croissance des effectifs est relativement moins rapide qu'au cours de la décennie Cinquante.

1411-2) - Sur l'ensemble de la période 1950-1970, et par rapport à l'évolution moyenne nationale, la croissance de l'emploi par branches est telle qu'on peut définir plusieurs groupes de comportement.

  • 44 C'est à dessein que nous n'employons pas ici le terme "d'industrie de croissance". Il nous parait (...)

142Les industries dynamiques44 voient leurs effectifs augmenter de plus de 60 %, avec une croissance régulière et toujours nettement supérieure à celle de l'ensemble des activités industrielles. Dans ce premier groupe se situent l'industrie chimique qui, avec un taux de croissance de 123,34 %, présente la plus forte augmentation relative des emplois de toute l'industrie, les industries graphiques, dont le développement est l'une des caractéristiques de l'évolution industrielle des grandes villes, et l'ensemble du secteur des industries métallurgiques, dont les taux de croissance sont assez nettement inférieurs mais qui présente la plus forte augmentation en valeur absolue. Alors que l'emploi total des 11 grandes branches croît en moyenne de 1,16 Ί par an, l'emploi dans la chimie croît de 6,16\ par an, celui des industries graphiques de 4,19 % et l'emploi de la métallurgie de 3,36 %. En 1950, ce groupe des industries dynamiques représente 38,89 % du total des emplois industriels. En 1970, il en représente 55,60 %. Un second groupe est constitué par les industries en déclin, celles dont les effectifs diminuent de plus de 30 % au cours de ces vingt années. On y trouve bien sûr les industries extractives, qui perdent en moyenne 3,16 % par an de leurs effectifs, et l'industrie textile traditionnelle, où la diminution annuelle moyenne des emplois est de l'ordre de 1,67 %. En 1950, ce groupe représente 19,68 % de l'emploi industriel total ; en 1970, il n'en représente plus que 9,18 %.

143Une catégorie particulière peut être constituée par les industries en croissance moyenne : celles dont l'augmentation des effectifs se situe entre 15 et 25 %, mais à un niveau inférieur à celui de l'ensemble de l'industrie nationale. Il s'agit ici des industres du papier et des industreis alimentaires (plus leurs annexes telles que le tabac et les boissons-). Elles représentaient 18,43 % du total des emplois en début de période. En 1970, elles en représentent 17,65 %.

144Le groupe des industries en stagnation concerne les branches dont la croissance des effectifs évolue entre - 7 % et + 4 %. Ici se retrouvent les industries du bois et de la céramique-verre, dont la croissance est légèrement positive mais avec des comportements intermédiaires opposés, et la branche cuir-caoutchouc, dont le déclin global est assez net malgré une forte croissance au cours des dix premières années.

145Un cas un peu particulier est celui de la confection. Avec une perte d'effectifs supérieure à 14 %, le déclin y est assez prononcé, mais il est ici bien plus tardif que pour les industries du "groupe déclin" puisque 1965 représente l'année du maximum avec 87 500 emplois. En 1950, la branche confection-teinture représente 9,09 % des emplois, en 1970, elle en représente 6,32 %.

146Bien entendu, une agrégation des activités industrielles en 13 grandes branches (dont 11 seulement sont prises ici en compte puisque nous éliminons la branche 02, diamant, dont le rôle est négligeable du point de vue de l'emploi, ainsi que la branche 16, les Utilités Publiques, qui a une signification géographique très différente) cache des évolutions réelles et des comportements sectoriels beaucoup plus contrastés. Si l'industrie charbonnière voit ses effectifs passer en vingt ans de 48 206 à 13 690, soit une perte de 71,6 %, les autres industries extractives, exception faite de l'exploitation des tourbières, sont en développement : 5 510 emplois en 1970 contre 4 094 en 1950. La branche 09 (cuir-caoutchouc) présente une perte globale de 6,91 % ; en fait, ce chiffre est la résultante de deux comportements contradictoires puisque l'emploi dans les industries du caoutchouc augmente assez fortement (plus de 44 t) alors que diminuent régulièrement les effectifs employés dans les industries du cuir (en particulier la main-d1 oeuvre de la chaussure). Pour l'industrie lainière, la baisse des effectifs est supérieure à 54 % contre 47 % environ dans le groupe coton-lin-rayonne. Au contraire, la croissance des emplois est considérable dans le secteur des textiles artificiels et synthétiques où les effectifs passent de moins de 3 000 à plus de 20 000, soit une augmentation d'environ 480 Comme dans bien d'autres pays, le transfert des textiles traditionnels vers les fibres chimiques est l'une des caractéristiques de l'évolution industrielle contemporaine.

147La branche 11, en particulier, offre de nombreux contrastes. La construction navale apparaît comme une activité en stagnation du point de vue de l'emploi sur l'ensemble de la période (elle ne perd au total que 0,79 % de ses effectifs initiaux). En fait, elle subit des fluctuations conjoncturelles rapides et les emplois diminuent dans la construction neuve alors qu'ils augmentent dans le secteur de la réparation. Dans la sidérurgie, la croissance des emplois est de l'ordre de 70 % et illustre bien la tendance au développement des industries de base. Cependant, l'essor le plus remarquable, dans le cadre de la branche 11, est à porter au crédit des industries électrotechniques dont les effectifs passent de 56 835 en 1950 à 123 230 en 1970, soit une croissance de 116,82 %tout à fait comparable à celle de la chimie. En début de période, les industries électrotechniques représentent 6,49 % de l'emploi industriel^ contre 11,41 % en fin de période.

148Au total, l'évolution des emplois dans l'industrie fait apparaître des "branches faibles" et des "branches fortes". Elle traduit également le transfert progressif qui s'opère, au cours de ces années, des industries traditionnelles (houille, bois, cuir, laine, coton et lin) vers des activités plus dynamiques et surtout plus nouvelles (chimie, électrotechnique, fibres artificielles...).

1492) - L'emploi, on le sait, n'est pas toujours un critère très significatif. La référence à des critères d'ordre plus économique confirme les tendances précédemment dégagées et l'opposition entre les branches faibles et fortes.

1502-1) - L'évolution de la croissance annuelle moyenne de la production fait également apparaître des secteurs très dynamiques, comme la chimie ou l'électrotechnique, et des secteurs à croissance faible ou nulle, comme le textile, la confection ou l'industrie des matériels de transport.

  • 10 exprimée par le volume de la valeur ajoutée

Tableau no 20 - Croissance annuelle moyenne de la production10 %

Activités

1955/1960 (3)

1960/1965 (3)

1963/1968 (4)

Ind.alim.prod.vég.

4,2

2,3

3,5

Ind.alim.prod.anim.

6,0

1,6

2,5

Boissons-tabac

2,7

6,5

6,0

Textile

3,2

1,9

1,7

Confeetion-chaussure

3,0

2,1

- 0,8

Papier

8,5

7,6

7,7

Chimie

9,6

12,3

16,5

Raffinage pétrole

10,4

8,6

8,4

Ind.métallurgique

12,6

9,6

9,2

Prod.métalliques machines

5,5

5,1

5,0

Ind.électrotechniques

11,9

9,7

7,5

Mat.transport

4,1

- 2,5

3,0

Total industrie (2)

6,2

5,9

7,4

(2) Bâtiment exclu. Utilités Publiques inclues
(3) cf : CPB. De Nederlandse Economie in 1970. La Haye 1966. p. 120
(4) cf : CPB. De Nederlandse Economie in 1973. La Haye 1970. p. 109

  • 45 C.P.B. : De nederlandse économie in 1973-p. 143.
  • 46 Min. Aff. Econ. : Projet de Loi de Budget 1973 - 1974.

151Les contrastes entre les diverses branches sont à peine moins grands lorsqu'on se réfère à la productivité du travail. En 1968, par exemple, la productivité par travailleur est de l'ordre de 32 900 florins dans la chimie, 32 300 florins dans les industries métallurgiques et 25 900 florins dans l'électrotechnique. Pour l'ensemble du textile traditionnel elle est de 16 100 florins, contre 15 300 dans la branche matériel de transport et 10 400 dans le groupe confection-chaussure45. En dépit des progrès réalisés dans certaines industries, les écarts entre les niveaux de productivité se maintiennent dans le temps. Ainsi, entre 1963 et 1972, la croissance annuelle moyenne de la productivité est de 11,6 % pour la chimie, 8,5 % dans la métallurgie, 7,5 % dans le textile (qui a donc progressé assez vite depuis 1968) et 2,7 % dans la confection46.

  • 47 C.P.B. : De nederlandse économie in 1973 - p. 123.

152Sur le plan financier aussi, on peut parler de branches faibles et de branches fortes. Pour la période 1964-1968, le Bureau Central du Plan a estimé que le rendement moyen du capital investi a été de 31,5 % dans les industries électrotechniques, de 17,5 % dans la chimie (raffinage pétrolier inclus) et de 14 % dans les industries métallurgiques, alors qu'il n'a atteint que 4 % dans le textile et dans la confection et 2 % seulement dans la production des matériels de transport47.

153Les critères de production, productivité et rendement ne confirment pas seulement les indications obtenues à partir du seul critère emploi, ils font ressortir le dynamisme des mêmes branches et la contraction, sinon le déclin, des mêmes activités.

154Il ne fait guère de doute que les difficultés de certaines industries sont également à mettre en compte de leurs structures internes propres. Au morcellement de la confection, des industries du bois et du cuir, d'une partie de la construction navale, s'oppose la forte concentration de la chimie, des industries de l'électronique, de la métallurgie de base, de l'industrie du papier... On peut, à titre d'exemple, se référer à la situation structurelle des branches telle qu'elle se présente au 31 décembre 1966.

Tableau no 21 - Structures internes de quelques branches d'activité industrielle en 1966

Tableau no 21 - Structures internes de quelques branches d'activité industrielle en 1966

A = % dans total entreprises
B = % dans total emplois
C = % dans total chiffre d'affaires
(1) Selon la classification AIS
(2) L'entreprise désigne ici l'unité technico-économique et non l'entité juridique (3) Raffinage pétrolier exclu
(4) A l'exclusion des industries laitières et produits laitiers
Source : statistiques CBS/AIS

155L'opposition est donc assez nette entre branches à forte concentration et branches à forte dispersion. Mais, ici encore, une désagrégation plus fine ferait apparaître des contrastes plus grands et des situations sectorielles plus variées. Prenons l'exemple de la branche métallurgie : la concentration est grande dans la métallurgie de base et dans l'électrotechnique alors que la dispersion structurelle caractérise les industries mécaniques et la production des machines et des instruments.

156Le tableau ci-dessus indique aussi très clairement que les structures internes ne suffisent pas, seules, à expliquer les difficultés d'une branche. Ainsi, le textile, l'un des secteurs les plus "faibles" de l'économie nationale, présente un degré de concentration supérieur à celui de toutes les autres branches (considérées à ce niveau d'agrégation), alors que les industries graphiques, dont le développement est rapide et constant, ont une structure très morcelée et un petit nombre de grandes entreprises. Au passage, notons que, à l'exception du textile traditionnel dont la forte concentration procède d'une évolution tout à fait spécifique, les industries qui présentent le plus haut degré de concentration sont également celles où les investissements étrangers sont les plus importants (chimie, raffinage pétrolier, électrotechnique...) alors que dans les industries à fort morcellement, ces investissements sont en général limités (confection, cuir, industries du bois...).

1572-2) - En vérité, la formation de "secteurs faibles" dans l'industrie néerlandaise est à relier à l'évolution des marchés intérieurs et extérieurs propres à chaque branche et à leur plus ou moins grande sensibilité vis-à-vis de la concurrence internationale. C'est, bien entendu, ici que se manifestent le plus clairement les conséquences de l'explosion salariale postérieure à 1963, explosion qui rend particulièrement fragiles les industries de main-d'oeuvre dans la mesure où la hausse accélérée des coûts du travail signifie une détérioration de leur position concurrentielle sur le marché international. Or, dans toutes les branches, la concurrence internationale est de plus en plus vive, au fur et à mesure que se développe la Communauté Economique Européenne. Cependant, toutes les industries "faibles" ne le sont pas de la même manière et pour les mêmes raisons. Trois exemples vont nous permettre de voir qu'il existe, ici aussi, des situations bien différentes.

158L'industrie du meuble offre l'exemple d'une branche dont les problèmes résultent surtout d'un trop grand morcellement, d'une absence d'organisation au niveau de la branche et du manque de dynamisme de nombre de ses chefs d'entreprises.

  • 48 N.E.I. : Structuur-onderzoek nederlandse meubelindustrie. Rotterdam 1969.

159En 1967, on compte environ 450 fabriques de meubles dont la plus grande emploie à peu prés 300 personnes, alors qu'en Allemagne Fédérale, par exemple, certaines entreprises en emploient plus de 2 000. Pratiquement, toute la production est le fait de petites entreprises familiales à caractère encore très artisanal. Les fabricants de meubles s'intéressent encore fort peu à la commercialisation de leurs produits (en 1968, à peine 0,5 % des fabricants font eux-mêmes de la publicité) et peu nombreux sont ceux qui exportent. 10 % de la production des meubles en bois sont exportés en 1968, contre 22 % pour les meubles métalliques48.

  • 49 Idem - Vol. I - p. 19.

160C'est d'ailleurs le secteur des meubles de bois qui est le moins dynamique et le plus retardataire. Ici, la part des importations dans la consommation intérieure atteint 35,3 %en 1968 alors qu'elle n'était que de 3,1 % en 195049, les produits belges et allemands envahissant de plus en plus le marché intérieur. L'industrie du meuble sera l'une des premières à faire faire une enquête structurelle spécifique, en accord avec l'orientation plus sectorielle de la nouvelle politique industrielle des pouvoirs publics.

161Les problèmes de l'industrie de la confection, type même de l'industrie de main-d'oeuvre à forte dispersion structurelle, semblent être surtout liés au type de main-d'oeuvre qu'elle utilise et aux conséquences de la hausse générale des salaires.

  • 50 F.A.TH. J. DEITERS : Tekort vrouwelijke personeel schept moelijke situatie voor de confectie indus (...)

162En décembre 1969, 49 741 personnes sont employés à la production dans cette industrie, dont 38 673 femmes parmi lesquelles plus de 50 % sont âgées de moins de 21 ans. Cette main-d'oeuvre féminine jeune cesse souvent de travailler dés le mariage d'où un temps moyen de travail particulièrement court, 3 ans à peine, et un coût par travailleur nettement plus élevé que dans la plupart des autres industries50.

  • 51 Une illustration de ces problèmes est le relatif échec de la décentralisation de la confection à p (...)

163La hausse des salaires est ici ressentie plus vivement qu'ailleurs parce qu'elle a été surtout forte pour le salaire minimum garanti (le plus élevé d'Europe) et pour le salaire des jeunes et des apprentis. Or, la confection est justement une branche qui emploie beaucoup de jeunes et de nombreux apprentis et dont la main-d'oeuvre est, dans sa majorité, rémunérée au niveau du salaire minimum. Rien d'étonnant, par conséquent, à ce que la confection ne parvienne pas à trouver et à garder la main-d'oeuvre dont elle a besoin, celle-ci préférant les métiers plus rémunérateurs et plus "nobles" du secteur tertiaire51.

164A ces difficultés qu'on peut qualifier d'internes, s'ajoutent les effets de la forte concurrence internationale, concurrence à laquelle les industriels néerlandais peuvent difficilement faire face compte tenu du très bas prix de la main-d'oeuvre dans des pays tels que 1'Italie, la Yougoslavie, la Pologne et surtout Formose, Macao, Hong-Kong, dont les produits entrent librement sur le marché national.

165Le résultat majeur de cette situation est que les années Soixante voient se produire un véritable éclatement de la production, et cela sous une triple forme : importations massives d'Orient--projection d'une partie des unités de production élémentaire vers l'Europe du Sud et de l'Est qui sont ainsi incorporés aux circuits géographiques de la production nationale (on voit par exemple des camions effectuer régulièrement le circuit Pays-Bas-Italie-Yougoslavie-Pays-Bas. Ils partent avec des tissus et des étoffes et reviennent chargés de robes, de costumes et de manteaux dont la finition sera assurée sur place. Il s'agit bien entendu de produits de grandes séries peu sensibles aux fluctuations de la mode)--transfert pur et simple de l'entreprise vers des pays offrant une main-d'oeuvre féminine disponible et habituée au travail en usine. En 1968, la valeur de la production néerlandaise en Europe de l'Est est estimée à 12 millions de florins. Pour 1970, cette valeur est estimée à 43 millions de florins alors que la valeur totale des "importations" réalisées à partir des entreprises néerlandaises implantées à l'étranger est de 229 millions de florins. Dés avant 1968, l'entreprise GRONINGSE KLEDING UNIE, de Groningen, réalise une grande partie de ses extensions en Pologne. En janvier 1971, la firme FORMCRAFT, de Alkmaar, se transfère en totalité en Belgique tandis que l'entreprise COJO, de Arnhem, implante tout son secteur production en Yougoslavie. En mai 1971, l'une des principale entreprises de confection de Rotterdam, HESBERGER, transfère toute sa production en Europe de l'Est où la main-d'oeuvre est abondante et bon marché.

166Troisième type de branche "faible" : la construction navale, l'une des activités les plus anciennes et les plus caractéristiques des Pays-Bas. Avant 1965, la concentration y est certes insuffisante, les problèmes de main-d'oeuvre y sont nombreux et les méthodes de production pas toujours bien adaptées. Mais l'origine essentielle des difficultés de cette industrie semble bien résider dans une situation d'infériorité quasi permanente vis-à-vis de la concurrence internationale.

  • 52 Commission de la Construction Navale Néerlandaise : Rapport de l'enquête structurelle sur la const (...)
  • 53 Cf. : Infra

167Cette infériorité est surtout sensible sur le plan financier et provient du fait que la majorité des concurrents sont fortement soutenus par l'Etat, grâce à des facilités de crédit et à des subventions de toutes sortes, alors que, à cet égard, les conditions offertes aux constructeurs néerlandais sont beaucoup moins avantageuses. Selon le rapport de la Commission KEYZER52, l'aide de l'Etat au Japon, grâce à l'attribution de crédits spéciaux à faible taux d'intérêt, représente 25 S du prix de la construction neuve pour une commande extérieure et environ 9 % pour une commande d'origine japonaise ; les valeurs correspondantes étant de 23 et 22 %en France, 21 et 19 % en Italie... contre 0 et 0 % aux Pays-Bas !. La prime d'assurance liée au crédit bancaire est plus élevée aux Pays-Bas que partout ailleurs : de 3 à 6 % contre 0,8 % au Japon. Enfin, les constructeurs néerlandais ne travaillent pratiquement qu'avec des crédits de 5 ans maximum alors que les chantiers britanniques ont des crédits à 10 ans et les japonais des crédits à 8 ans. Ce sont surtout les grands chantiers qui pâtissent de cette situation et ce sont justement les grands de la construction navale néerlandaise qui feront effectuer la première enquête structurelle de branche et qui, à partir de 1966, entreprendront une réorganisation profonde de leur branche avec l'aide des pouvoirs publics53.

1683) - La problématique liée à l'existence de branches d'activité en situation économique difficile est encore rendue plus complexe par le fait que la plupart de ces mêmes branches présentent un haut degré de concentration géographique régionale.

169Cette situation, propre à la majorité des industries traditionnelles, fait que de nombreux problèmes sociaux et régionaux s'ajoutent aux difficultés économiques propres à chaque branche. Il y a donc aux Pays-Bas un phénomène de résonance régionale particulièrement fort, et cela d'autant plus que les régions où se concentrent les activités en déclin ou en crise sont bien souvent aussi des régions très spécialisées.

170Ainsi, le Langstraat et les environs de Tilburg concentrent l'essentiel des activités du cuir et de la chaussure. La production du carton est pratiquement une exclusivité des régions orientales du Groningue. Twente et Gelderse Achterhoek concentrent la presque totalité de l'industrie cotonnière dont plus de 30 % de la main-d'oeuvre se localisent dans la seule ville de Enschede (en 1968, Enschede compte 9 560 actifs dans le textile cotonnier sur un effectif national de 32 040). Même situation pour l'industrie lainière très largement dominée par Tilburg qui, avec 7 696 actifs, représente à elle seule 71,2 % des actifs de cette branche en 1968. Et que dire de l'industrie charbonnière entièrement localisée en Limburg méridional et dont l'effectif total passe de 53 721 en 1955 à 13 690 en 1970 !.

171La conséquence est évidente : c'est la multiplication des problèmes régionaux dans toutes les régions où l'essentiel de l'activité industrielle se situe justement dans le cadre des industries en crise. La nouvelle politique industrielle, qui s'attache tout spécialement à la transformation structurelle des branches, sera donc nécessairement aussi une politique régionale.

C) - La nouvelle politique industrielle

1721) - La hausse rapide des coûts de main-d'oeuvre, les tensions accrues sur le marché du travail et l'apparition de difficultés multiples dans certaines branches ont leurs effets largement amplifiés par le fait que l'économie néerlandaise reste une économie très ouverte. A partir de 1963, la détérioration progressive de la position concurrentielle de l'industrie devient l'une des préoccupations dominantes. Sur ce plan, la situation est nettement moins favorable que pendant les années Cinquante. Si, jusque vers 1962-1963, la hausse des salaires et des prix reste en position moyenne par rapport à celle des principaux concurrents, il n'en est plus de même après cette date et les Pays-Bas prennent la tête du mouvement de hausse, derrière l'Italie.

Tableau no 22 - Hausse moyenne des salaires et des prix Période 1959-1968 en %

Tableau no 22 - Hausse moyenne des salaires et des prix Période 1959-1968 en %

Source : OCDE, cité par Minis. Aff. Econ. Projet de Loi de Budget 1970. Rapport Explicatif. Chap I.

173Les pays membres de la Communauté Economique Européenne ne sont pas seulement les principaux concurents directs de l'industrie néerlandaise, ils en constituent aussi le principal marché, et un marché dont l'importance relative va croissant. En 1957, ils reçoivent 41,5 % du total des exportations néerlandaises. En 1966, ils en absorbent 55,5 %.

  • 54 Les marges bénéficiaires pour l'industrie passent de 23 % en moyenne en 1957 à 16 % en 1966. Pour (...)

174La détérioration de la position concurrentielle relative de l'industrie apparaît comme d'autant plus grave que les produits industriels constituent l'essentiel des exportations des Pays-Bas 61 % en 1957 et 57 % en 1966, et que c'est justement dans l'industrie que la diminution des marges bénéficiaires est la plus forte54.

175L'expansion de la production industrielle est donc indispensable au maintien d'un haut niveau d'exportation, mais elle doit être surtout qualitative si l'industrie néerlandaise veut pouvoir rester compétitive. Finalement, la problématique industrielle n'est guère moins importante après 1963 qu'avant cette date : "Autant du fait que l'industrie représente le principal secteur pour le développement des exportations que par le fait que l'accroissement de la production des entreprises doit provenir essentiellement des industries, la politique d'expansion doit être surtout une politique industrielle". (Min. Aff. Econ. 1967 - no 57 chap II - p. 9-).

1761-1) - Cependant, il ne s'agit plus tout à fait du même phénomène. Jusqu'en 1963, la politique des pouvoirs publics est une politique d'industrialisation de caractère global qui cherche à développer la production, à multiplier les emplois et à assurer un relatif équilibre dans la répartition régionale des activités. Après 1963, on parle plutôt de politique industrielle. Simple changement de terminologie ?. Assurément non car, dorénavant, l'action des pouvoirs publics se veut plus orientée, aux profits du développement technologique et d'une amélioration de la productivité ainsi qu'aux bénéfices des branches et des régions en crise, plus concrète, grâce à la multiplication des interventions directes, et plus pragmatique, par une meilleure adaptation des mesures d'intervention aux situations spécifiques des diverses branches. Il ne s'agit donc plus seulement de faire croître la "masse industrielle" du pays ; il s'agit, bien plus, d'optimaliser dans tous les secteurs industriels l'emploi des moyens disponibles par une action directe au niveau des structures de façon à mieux faire face aux progrès généraux de la technologie et aux changements intervenus dans le domaine de la concurrence internationale. "Le monde des affaires est de plus en plus conscient du fait que, à la suite des rapides changements intervenus dans le domaine technologique et dans l'organisation des marchés, la structure globale des branches d'activité a pris une importance croissante comme facteur de productivité et que cette structure réclame plus d'attention qu'autrefois". (Min. Aff. Econ. 1967 - no 57 chap II p. 19).

1771-2) - Au plan général, cette politique structurelle reprend à son compte nombre d'éléments déjà contenus dans la politique d'industrialisation précédente. La promotion des activités nouvelles, l'attraction des entreprises étrangères, l'action sur l'environnement socio-technique et le soutien aux investissements sont autant de phénomènes permanents dans la politique de l'Etat au regard de l'industrie.

  • 55 Selon le C.P.B., la chimie, l'électrotechnique et l'industrie des matériels de transport représent (...)
  • 56 Comptes de la Nation 1971 - p. 97.

178Ce qui change, surtout, c'est que l'accent est mis de plus en plus sur l'aspect qualitatif de l'activité industrielle, d'où un renforcement considérable de l'aide à la recherche, à la formation des hommes, à l'information des entreprises et à l'amélioration de la productivité. Tandis qu'une Direction de la Recherche Industrielle et des Structures apparaît au sein du Ministère des Affaires Economiques, l'aide financière de l'Etat à la recherche publique ou privée fondamentale ou appliquée, augmente rapidement. Entre 1959 et 1967, la part des crédits d'Etat dans le financement global de la recherche industrielle passe de 30 à 45 %55. C'est en fait tout le développement industriel qui est de plus en plus stimulé par les crédits publics comme on peut le voir d'après les données suivantes : en 1963, 13 millions de florins sont affectés par l’Etat au développement industriel, soit 5,6 % du total des crédits publics accordés aux entreprises ; en 1971, ce sont 128 millions qui sont affectés à ce chapitre, soit 25,8 % du total des crédits publics attribués aux entreprises56.

  • 57 C.P.B. : Nota inzake groei en structuur van onze économie. La Haye 1966.

179Autre évolution significative : la politique d'industrialisation de la période précédente était une politique surtout conjoncturelle appuyée sur les prévisions à court terme du Plan Economique Central. La politique industrielle des années Soixante s'appuie plutôt sur des prévisions à moyen et à long termes, prévisions qui ne concernent pas seulement l'activité économique générale mais qui sont établies aussi au niveau de chaque branche d'activité considérée individuellement. Le Rapport Gouvernemental de 196657, traitant de la croissance et des structures de l'économie, insiste sur l'intérêt des prévisions à moyen et long terme et il devient rapidement évident qu'elles autorisent une meilleure action sur les structures, surtout dans le domaine industriel.

  • 58 C.P.B. : De nederlandse économie in 1970 (La Haye 1966) et de nederlands économie in 1973 (La Haye (...)

180Le Plan Economique Central continue d'être publié chaque année mais on voit également apparaître, dés 1966, une première étude des perspectives d'évolution à moyen terme, étude suivi dés 1970 par un second document du même genre, dans lesquels les perspectives par branches occupent une très large place, en particulier dans le document de 197058.

181L'établissement de telles prévisions n'est pas seulement indispensable comme moyen d'information, il permet aussi à l'Etat et au secteur privé de développer l'action préventive au lieu de limiter plus ou moins l'intervention publique à une action essentiellement curative.

  • 59 Nous adoptons ici la traduction littérale de "sektorpolitiek". Il est clair que le terme de sector (...)

1822) - Pour importants qu'ils soient, ces changements ne constituent pas l'essentiel de la nouvelle politique industrielle. Bien plus original est l'aspect sectoriel de cette politique, aspect dont l'importance relative va croissant au fil des années, au fur et à mesure que se multiplient les crises qui frappent les diverses branches.59

1832-1) - Pourquoi une politique "sectorielle", c'est-à-dire une action aux profits d'une branche déterminée, voire même aux bénéfices d'un nombre limité d'entreprises ?.

  • 60 Le "Défi Américain" de J. J. SERVAN-SCHREIBER a eu un certain retentissement aux Pays-Bas et à con (...)

184Avec la multiplication du nombre des activités qui sont plus ou moins en état de crise (textile, construction navale, briquetterie, industrie charbonnière, meuble...), la fréquente infériorité vis-à-vis de la concurrence internationale (confection, construction navale, industries du cuir...) et l'écart croissant entre branches dynamiques et branches faibles, nous possédons déjà quelques éléments de réponse. A cela s'ajoutent : la crainte de voir grandir le retard technologique de l'industrie néerlandaise60, l'incapacité de plus en plus évidente des seuls mécanismes de l'économie de marché à assurer l'optimalisation de l'emploi des moyens de production disponibles, l'impossibilité dans laquelle se trouve le secteur privé de réaliser seul les transformations fondamentales nécessaires au maintien de la compétitivité.

185Une politique industrielle plus orientée vers les branches est alors considérée comme d'autant plus nécessaire que : "ce sont presque toujours les mêmes branches qui se trouvent en difficultés à la moindre altération de la conjoncture... et (que) ces branches faibles étant régionalement très concentrées, les pouvoirs publics doivent affronter tous les problèmes d'emploi dans les régions concernées...".

186(W.J. Van GELDER - 1974 - no 235·p. 792). L'intervention directe et spécifique des pouvoirs publics dans certaines activités n'est d'ailleurs pas chose entièrement nouvelle, elle se pratique depuis longtemps aux bénéfices de l'agriculture, des transports ou du secteur de l'énergie. Ce qui est vraiment nouveau, c'est l'élargissement de ces interventions à l'ensemble de l'activité économique et la volonté de systématiser la prise en compte des perspectives de croissance de chaque branche considérée individuellement.

  • 61 S.E.R. : Rapport inzake sektorstructuurpolitiek. La Haye - 1969.
  • 62 Une tendance en faveur d'une politique également plus sectorialisée se manifeste, à la même époque (...)

1872-2) - Dés 1965, avec les problèmes particuliers que connaissent la construction navale et l'industrie cotonnière, l'idée de l'action "au coup par coup" commence à s'imposer. Toutefois, ce n'est qu'après 1969 que s'affirme la nouvelle orientation, après la publication du Rapport du S.E.R. concernant la politique sectorielle61. Le S.E.R. constate que l'action économique du gouvernement est encore trop globale alors que les branches en difficultés sont nombreuses, que leurs perspectives sont assez mauvaises et que les processus d'intégration communautaire, loin de les atténuer, renforcent encore ces difficultés62. Il propose donc que soit développée une action plus sectorielle, non sans avoir distingué, d'une part les branches ayant déjà de graves problèmes structurels et qui ne doivent pas être maintenues artificiellement par des subventions publiques permanentes mais qui peuvent recevoir une aide temporaire et circonstanciée pour éviter un trop grand chômage structurel régional (on pense évidemment au charbon du Limburg), d'autre part les industries dont les perspectives de croissance rendent nécessaire une adaptation structurelle et pour lesquelles une action d'assainissement doit être entreprise avec le soutien de l'Etat (construction navale, meuble...), enfin, les activités dynamiques et ayant de bonnes perspectives pour lesquelles seules des actions de complément et des interventions conjoncturelles doivent être envisagées. Dans ce cadre, le S.E.R. insiste sur la nécessité de stimuler tout particulièrement les mouvements de concentration et de coopération au sein de l'industrie.

188La politique sectorielle repose avant tout sur un système d'étude spécifiques des diverses branches : les "enquêtes structuro-sectorielles" (SECTORSTRUCTUURONDERZOEK). Du fait même que ces documents sont propres à chaque branche, il ne peut être question d'un schéma-type. En général, l'enquête comporte une analyse détaillée de la situation pour dégager le caractère structurel ou conjoncturel des problèmes de la branche (structures de répartition des entreprises et des établissements, emploi, production, rentabilité...), une étude des perspectives à moyen et long termes (évolution des marchés, des conditions de la concurrence, de la technologie...), et des propositions concernant les mesures d'assainissement et de restructuration considérées comme nécessaires pour améliorer la situation de la branche.

189Par l'intermédaire de la Commission pour la Productivité (COMMISSIE OPVOERING PRODUKTIVITEIT ou C.O.P.), les pouvoirs publics participent activement à la promotion et au financement de ces enquêtes ; un poste budgétaire spécial est d'ailleurs créé à cet effet et permet à l'Etat de prendre en charge une partie du coût de l'étude sectorielle. En principe, le rôle des pouvoirs publics n'est ici qu'un rôle de soutien financier et de participation à l'étude.

190C'est le secteur privé qui en a l'initiative, qui en reste le maître-d'oeuvre et qui doit en assurer l'aboutissement.

191La première enquête du genre est celle de 1965 concernant la construction navale. Puis sont réalisées des enquêtes concernant l'industrie du meuble, l'industrie cotonnière, le secteur de la laine peignée... etc. Au 1er août 1973, 18 enquêtes structuro-sectorielles sont achevées dans l'industrie et 7 autres sont encore en cours. Sur ce total, l'Etat a finalement assuré presque les 2/3 du financement nécessaire.

192Pendant les premières années, seules ou presque les industries en crise ont fait réaliser de telles enquêtes. Peu à peu cette pratique s'est étendue à l'ensemble des activités industrielles et elle se développe aussi dans le commerce, les transports et les autres activités de services. C'est là sans doute le reflet de la volonté de l'Etat de pouvoir engager des actions préventives au lieu de se limiter à des interventions salvatrices, et bien souvent peu efficaces, dans les secteurs en crise.

  • 63 A juste titre, on a également fait remarquer que tout follow-up donné à l'enquête structurelle imp (...)

193Document d'information essentiel pour la connaissance du présent et des perspectives d'une industrie, l'enquête structuro-sectorielle ne se justifie réellement que par les suites qui lui sont données, par les transformations concrètes auxquelles elle doit aboutir, Très vite, donc, se pose la question de l'efficacité de ces études. Ce n'est pas là un problème simple car le "follow-up" relève en grande partie du bon vouloir des industriels eux-mêmes. Il peut s'effectuer selon des rythmes très divers d'une branche à l'autre et engendrer la multiplication d'organismes plus ou moins spécialisés, d'où un certain danger d'atomisation de l'action sur les structures63.

194Pour assurer une certaines efficacité aux enquêtes tout en évitant les inconvénients de la dispersion, les pouvoirs publics créent, en septembre 1972, la Société Néerlandaise pour la Restructuration (NEDERLANDSCHE HERSTRUCTUURERINGSMAATSCHAPPIJ ou Ν.Ε.H.Ε.Μ.). Organisme public, le N.E.H.E.M. est conçu comme une institution permanente couvrant la totalité des activités économiques et pas seulement l'industrie ou les branches en crise. Son rôle est triple : stimuler le développement des enquêtes et aider à leur réalisation--en accroître l'efficacité en aidant les branches à mettre au point des programmes d'action pour réaliser les transformations internes--servir d'intermédiaire entre les entreprises et les banques ou organismes financiers distributeurs de crédits plus ou moins garantis par l'Etat (N.I.B., N.P.M., Fonds de Garantie Industrielle...). Le N.E.H.E.M. apparaît donc comme la cheville ouvrière de la politique sectorielle, à la fois par son rôle dans la recherche des solutions possibles aux problèmes sectoriels existants et par son influence sur la définition de la stratégie des branches en fonction des évolutions escomptées de l'emploi, des marchés et de la technologie.

195De même que la politique structurelle générale s'appuie sur une forte augmentation des crédits affectés au développement et à la recherche, la politique sectorielle se concrétise plus particulièrement par l'octroi de crédits d'aide à la restructuration. Attribués aux entreprises et aux branches dont la rentabilité est susceptible d'être rétablie en un temps relativement court, ces crédits ne sont données qu'à titre temporaire et, surtout, à titre conditionnel. Seules peuvent en bénéficier les entreprises ou les branches qui acceptent de donner des suites concrètes à l'enquête structuro-sectorielle en réalisant l'assainissement nécessaire en développant la coopération et en améliorant leur organisation technique, fonctionnelle et commerciale. De plus, l'attribution de ces crédits, dont on prévoit la restitution une fois les objectifs atteints en accord avec la politique définie au niveau communautaire, est liée à l'existence d'un plan de restructuration (accompagné d'un plan de financement), ceci afin d'assurer un maximum d'efficacité à l'intervention des pouvoirs publics.

1962-3) - La politique sectorielle ne doit pas être considérée comme une simple affaire intérieure, comme un nouveau système de relations secteur privé-Etat ne concernant que les seuls néerlandais. Les changements intervenus en Europe sont tels qu'il n'est guère possible de faire abstraction des aspects internationaux liés à cette politique nouvelle.

  • 64 COMMISSION CEE : Mémorandum sur la politique industrielle de la Communauté. Bruxelles 1970.

197Le Marché Commun est devenu une réalité. L'espace communautaire constitue désormais le principal marché des Pays-Bas, à la fois pour les importations et pour les exportations, et c'est au sein de la Communauté que l'industrie néerlandaise trouve ses concurrents les plus immédiats. Or, dans cette Europe des Six, il n'existe pas de politique industrielle commune (elle n'est d'ailleurs pas expressément prévue par les clauses du Traité de Rome) mais seulement une juxtaposition de politiques industrielles nationales le plus souvent antagonistes (les questions concernant le charbon et la sidérurgie constituant une exception) et chaque Etat pratique son propre système de soutien aux industries nationales, ce qui fausse sensiblement les conditions de la concurrence et rend encore plus fragile le caractère compétitif de l'industrie néerlandaise. En 1970 encore, c'est-à-dire au moment où paraît le premier grand document officiel sur la politique industrielle de la Communauté64, l'Europe des Six n'est encore parvenue ni à une politique industrielle commune, ni à une harmonisation de l'environnement juridique, fiscal et financier de l'industrie, ni même à une règlementation communautaire des interventions publiques dans le domaine des activités industrielles.

198Notre propos n'est pas l'étude de la politique industrielle européenne. Ce qui nous intéresse ici au premier chef, c'est de voir dans quelle mesure il y a accord ou discordance entre la politique sectorielle telle qu'elle est pratiquée aux Pays-Bas et les tendances communautaires telles qu'elles sont exprimées par la Commission des Communautés.

199Lorsque la Commission plaide pour la mise en place d'une politique structurelle, pour un renforcement des mouvements de concentration et pour une limitation des aides et des subventions directes avec subordination de celles-ci à une action de restructuration, elle agit dans le même sens que les pouvoirs publics néerlandais. Une autre convergence se retrouve dans le souci d'améliorer la formation des hommes et la capacité des dirigeants d'entreprises et de faire progresser la recherche ainsi que les connaissance technologiques. Mais, lorsque la Commission défend le principe d'une intervention publique aux bénéfices des seules branches dynamiques, soutient l'idée d'une certaine autarcie technologique et prêche pour l'établissement d'une "communauté fermée", alors des discordances fondamentales apparaissent entre les propositions de Bruxelles et les actions de La Haye.

200Que seraient les problèmes régionaux en Limburg, en Twente, dans les provinces du Nord, dans le Langstraat ou bien à Tilburg si l'action des pouvoirs publics se limitait à une aide en faveur de la chimie, de la métallurgie et de l'électrotechnique ?.

201Il est bien évident qu'il n'est guère réaliste de vouloir distinguer politique industrielle et politique régionale, pas plus aux Pays-Bas qu'ailleurs en Europe. L'Ouest français, le Sud gallois, le Nord-Est anglais, le Mezzogiorno italien... mais aussi la Lorraine, le Sillon wallon ou les Lowlands d'Ecosse, autant d'exemples qui suffisent à montrer que les deux phénomènes ne sont pas séparables, ni du point de vue de la seule industrialisation ni sur le plan de la conversion des activités existantes.

202Une Europe plus ou moins "fermée" et protectioniste, c'est le contraire du traditionnel principe d'ouverture et de libéralisme qui caractérise les Pays-Bas. L'ouverture aux pays tiers est une constante de la politique néerlandaise, de même que le principe de l'égalité de traitement entre nationaux et étranges. Mais c'est également une impérieuse nécessité pour ce petit pays où, on le sait, les investissements étrangers ont un rôle fondamental dans l'activité industrielle, autant du point de vue des emplois que pour le développement de productions nouvelles. Enfin, l'apport technologique des investisseurs étrangers a été tel, depuis 1945, qu'on voit mal les Pays-Bas soutenir avec enthousiasme la théorie d'une autarcie technologique dans le cadre d'une Europe limitée.

203Finalement, c'est moins sur les modalités de la politique sectorielle que sur sa nécessité même que s'exprime le plus l'influence européenne. En accroissant les difficultés de diverses branches, la concurrence internationale a rendu encore plus nécessaire une intervention spécifique des pouvoirs publics. La politique sectorielle n'est, en somme, pas autre chose qu'un ensemble de moyens utilisés pour permettre aux industries de rester compétitives, en rétablissant les conditions d'égalité dans le cadre d'une économie ouverte et dans le respect du principe de liberté et de primauté de l'initiative privée.

2043) - Mise à part l'industrie charbonnière qui fait depuis plusieurs années déjà l'objet d'une politique spécifique, plusieurs industries connaissent, à partir de 1965, de profondes transformations et une évolution rapide liées à la mise en place des nouvelles méthodes d'intervention. Ainsi en est-il par exemple de l'industrie cotonnière, de la fonderie des non-ferreux, de la production des meubles ou du secteur de la laine peignée. Sans aucun doute, l'évolution de la grande construction navale après 1965 constitue la meilleur illustration de ce qu'est la politique sectorielle des branches.

2053-1) - Depuis plusieurs années, les grands chantiers néerlandais connaissent de sérieuses difficultés, surtout dans le domaine de la construction neuve. Les tonnages lancés diminuent, les carnets de commandes ne se remplissent pas, le potentiel existant est sous-employé, bref, l'activité générale se ralentit alors que celle de certains concurrents se développe régulièrement (au Japon surtout). De 640 000 BRT en 1960, le tonnage lancé par les chantiers des Pays-Bas passe à 114 000 BRT en 1965, soit une diminution de 82,19 % en cinq ans, diminution qui traduit bien d'autres choses que les seules fluctuations conjoncturelles caractéristiques de cette activité.

Tableau no 23 - Evolution des tonnages lancés navires de mer. en BRT

Années

Tonnages

Années

Tonnages

1960

640 000

1963

420 000

1961

440 000

1964

228 000

1962

523 000

1965

114 000

Source : CBS

  • 65 Voir, entre autres, A. VIGARIE : La circulation maritime. Paris - Génin. 1968.

206L'infériorité de la situation économique et financière des chantiers néerlandais par rapport à leurs concurrents étrangers (cf. supra) ainsi que les fluctuations conjoncturelles de la demande mondiale peuvent expliquer, en partie, ce déclin. En fait, la situation générale de la construction navale a changé dans le monde et ce changement bouleverse l'économie de la branche. On peut dire qu'avant 1960, le navire est encore un produit unique et spécifique dont l'élément primordial est la qualité technique ; la construction navale mondiale est encore très hétérogène. Après 1960, le navire devient un produit de plus en plus homogène et normalisé (à mesure que se développent la spécialisation et le gigantisme), dont la qualité est plus ou moins la même quel que soit le constructeur ; c'est alors le prix du navire qui en devient l'élément essentiel65.

207Or, dans le monde, de très nombreux chantiers sont capables de construire ce produit homogène, ce qui rend la compétition entre les constructeurs beaucoup plus virulente qu'autrefois. Comme le remarque LANGMAN : "Il y a plus ou moins 150 chantiers dans le monde qui construisent des navires de plus de 5 000 T. et 50 à 60 chantiers soumissionnent à chaque offre". (H. LANGMAN - 1969 - no 438 p. 84).

208La concurrence est donc telle que l'organisation et les structures des entreprises prennent, dans ce secteur, une importance croissante.

  • 66 Résultat d'une fusion intervenue en 1926.
  • 67 Issue d'une fusion, en 1962, de la ROTTERDAMSCHE DROOGDOK avec la société DE SCHELDE.
  • 68 Fusion réalisée en 1962.
  • 69 Résultat d'une fusion intervenue en 1945 entre deux grands chantiers d'Amsterdam.

209Vers 1965, les Pays-Bas comptent 7 grandes entreprises de construction navale : VEROLME à Rotterdam-Botlek et Alblasserdam, WILTON-FEYENOORD à Schiedam66, le groupe RIJN-SCHELDE à Rotterdam et Vlissingen67, l'AMSTERDAMSCHE DROOGDOK, le groupe VAN DEN GIESSEN-DE NOORD à Krimpen - a/d-Ijssel et Alblasserdam68, les N.D.S.M. à Amsterdam69 et l'I.H.C. qui est un groupement économique de six petits chantiers.

2103-2) - La mauvaise situation financière et les perspectives d'avenir plutôt sombres conduisent, en 1965, l'organisation patronale à se tourner vers les pouvoirs publics pour rechercher, avec ceux-ci, des solutions aux difficultés de la branche. La profession et le gouvernement créent alors la Commission pour la Construction Navale (dite Commission KEYZER, du nom de son président), chargée de faire effectuer une enquête structuro-sectorielle dans le secteur des grands chantiers. Ce sera la première enquête du genre réalisée aux Pays-Bas.

  • 70 Cf. : Supra. Le plus souvent, la pratique de telles politiques est justifiée par : l'importance de (...)
  • 71 Commission de la Construction Navale. Rapport cité.

211Après avoir montré que l'infériorité des entreprise néerlandaises est en partie le fruit des soutiens financiers publics que reçoivent la plupart des concurrents70, la Commission, dans son rapport rendu public en 196671, constate que la construction navale aux Pays-Bas est encore trop "artisanale", à la fois dans les méthodes et dans les mentalités. Elle insiste sur la nécessité des regroupements, sur l'intérêt d'une plus grande spécialisation des chantiers (elle propose surtout de mieux séparer la construction de la réparation) et sur l'importance d'une meilleure coopération entre les entreprises, en particulier du point de vue technique et pour le développement de la recherche. Par ailleurs, la Commission demande aux pouvoirs publics de participer à l'assainissement de la situation financière en accordant des aides à la construction navale.

212En février 1967, le gouvernement se déclare prêt à soutenir financièrement les constructeurs, par l'octroi de crédits de compensation et de crédits à faible taux d'intérêt, si ces derniers acceptent d'étudier les propositions émises par la Commission en matière de transformation des structures de la branche. L'intervention directe de l'Etat est donc conditionnée par la volonté des industriels de donner des suites concrètes à l'enquête de 1965.

213La profession n'a d'ailleurs pas tardé à réagir en ce sens. Dés 1966, les grandes entreprises créent un Comité chargé de coordonner les actions qu'elles veulent entreprendre dans la ligne des propositions du Rapport KEYZER. Peu après on voit apparaître la Fondation de la Construction Navale, qui doit s'occuper non seulement des grands, mais aussi des petits et des moyens chantiers, et qui se charge d'étudier la réorganisation de la profession du point de vue technique, économique et structurel. La Fondation et les pouvoirs publics travaillent en collaboration étroite. Le gouvernement n'accorde d'ailleurs son soutien qu'aux chantiers participant activement aux travaux de la Fondation (ce qui est le cas de la grande majorité d'entre eux) et selon les orientations que celle-ci propose. La Fondation est tout de suite très active : elle propose l'adoption par tous les chantiers d'un schéma uniforme de gestion moderne qu'elle a elle-même mis au point, adoption que le gouvernement impose comme condition à son intervention ; elle lance également une enquête structurelle pour les petits et moyens chantiers, elle crée, en 1969, avec l'Association des Armateurs, et l'aide du centre national pour la recherche et le développement, la Fondation pour la Recherche Maritime, pour l'étude en commun des débouchés, des marchés, des productions... ; elle propose une normalisation des productions et l'emploi de méthodes modernes de planification au niveau de l'entreprise. Son influence déborde assez vite le cadre de la profession. Premier organisme du genre, elle est en fait un véritable pionnier de la nouvelle politique industrielle et servira de référence à la plupart des branches désireuses de concrétiser les propositions contenues dans les enquêtes qui les concernent.

  • 72 Min. Aff. Econ. : projet de Loi de Budget 1969-1970.

2143-3) - 1968 marque une importante étape : le début de la grande période de concentration. La situation générale est alors plutôt inquiétante. Alors que les commandes de tankers sont relativement stables au niveau mondial, la diminution des ordres est assez forte dans les chantiers néerlandais. Pour les autres types de navires, la situation est plus mauvaise encore puisque l'augmentation des commandes est très forte dans le monde et plutôt faible aux Pays-Bas. En 1968, les tonnages lancés ne représentent plus que 1,7 % du total mondial, contre 3,2 % en 1967, les commandes enregistrées ne représentant pas même un an de travail pour 3 à 4 ans en moyenne dans les grands chantiers d'Europe occidentale et du Japon72.

  • 73 Het Financieel Dagblad du 18.10.1968.
  • 74 "L'affaire Verolme" a d'ailleurs fait beaucoup de bruit aux Pays-Bas et soulevé de nombreuses crit (...)

215Cette même année 1968, l'entreprise VEROLME, premier constructeur néerlandais, propose de reprendre les N.D.S.M. d'Amsterdam qui se trouvent en fort mauvaise posture. Le nouveau groupe VEROLME-N.D.S.M. représente alors un chiffre d'affaires de 591 millions de florins et occupe environ 14 000 personnes73 ; il constitue donc l'une des grandes entreprises industrielles du pays. En "échange" de cette concentration, VEROLME obtient de l'Etat des facilités de crédit exceptionnelles pour la construction d'une nouvelle grande cale. Cette aide publique représente environ 105 millions de florins, somme considérable et qui dépasse de très loin tous les soutiens que l'Etat avait jusqu'alors accordée à une entreprise privée74. Cette intervention n'empêche d'ailleurs pas le nouveau groupe de se trouver, dés 1969, dans une situation bien mauvaise et de présenter de lourds déficits pour la partie construction neuve de son activité. L'Etat intervient alors à nouveau. Il accorde une rallonge de 25 millions de florins à la condition qu'une enquête soit faite sur la situation et les perspectives du groupe. Le rapport de la commission chargée de cette étude (la Commission BIESHEUVEL-LANGMAN) propose une intégration encore plus poussée dans le domaine de la construction des grands navires. Ainsi est mis en place la Commission WINSENIUS chargée d'étudier les possibilités de fusion entre le groupe VEROLME-N.D.S.M. et d'autres grandes entreprises du même secteur.

216Entre temps, deux autres concentrations majeurs sont intervenues dans la branche : en 1969, l'absorption du secteur construction de WILTON-FEYENOORD par le groupe RIJN-SCHELDE et, en 1970, l'union entre l'I.H.C. et le groupe v.d. GIESSEN-DE NOORD. A la fin de l'année 1970, il ne reste donc que 4 grands constructeurs aux Pays-Bas : VEROLME-N.D.S.M., RIJN-SCHELDE, v.d. GIESSEN-DE NOORD et l'AMSTERDAMSCHE DROOGDOK.

  • 75 NRC-Handelsblad du 23.11.1971. Supplément spécial sur les entreprises.

217En avril 1971, la Commission WINSENIUS dépose ses conclusions. En accord avec les intéressés, elle propose la fusion entre les groupes VEROLME-N.D.S.M. et RIJN-SCHELDE. Cette concentration concerne 4 chantiers pour grands navires dans le Rijnmond, 1 chantier à Amsterdam pour navire jusqu'à 230 000 T., 1 chantier pour navires spécialisés à Vlissingen sur l'Escaut et 2 chantiers pour unités moyennes et petites à Alblasserdam et Heusden. Le nouveau groupe RIJN-SCHELDEVEROLME (connu sous le sigle R.S.V.) se classe, en 1971, au 5ème rang des entreprises néerlandaises pour l'emploi (son personnel est alors de 28 420 salariés) et au 10ème rang pour le chiffre d'affaires75. Tant que VEROLME n'a pas éteint sa dette envres l'Etat, dette liée au prêt de 1968, celui-ci conserve le droit de nommer un représentant au conseil d'administration du groupe R.S.V. qui, par ailleurs, doit étudier de nouvelles possibilités de concentration, en particulier avec le groupe v.d. GIESSEN-DE NOORD.

218Finalement, il ne reste en 1972 que trois grandes entreprises de construction navale (pour les grandes unités) : le groupe R.S.V., v.d. GIESSEN-DE NOORD et l'AMSTERDAMSCHE DROOGD0K.

  • 76 NRC-Handelsblad du 28.11.1972. Supplément spécial sur les entreprises.

219Le premier vient au 6ème rang (27 754 salariés), le second au 67ème rang (2 101 salariés) et le troisième au 77ème rang (1 709 salariés) du classement des entreprises industrielles selon l'emploi pour l'année 197276.

220Les transformations structurelles ne touchent pas seulement les grandes entreprises. Moins spectaculaire sans doute, la réorganisation de la construction navale au niveau des petits chantiers n'en progresse pas moins assez rapidement. La situation économique ne présente pas ici une pareille gravité mais, comme le souligne le rapport intérimaire publié en mars 1971 par la Fondation, la modernisation de ces chantiers est rendue délicate par le fait qu'il s'agit surtout de petites affaires familiales souvent très spécialisées, sans grands moyens financiers et avec des marges bénéficiaires assez étroites. La Fondation propose, en particulier, un développement de la coopération entre les chantiers construisant des unités de mains de 50 mètres et une plus nette séparation entre chantiers de construction et chantiers de réparation. L'I.H.C. avait déjà montré les avantages d'un regroupement des moyens d'étude, de production et de commercialisation.

  • 77 F.H.F. OLDEVELT : Scheepsbouw zoekt kracht steeds meer in samenverking. in Ned. Ond. du 4.6.1971.

221Trois autres groupes s'organisent peu à peu entre les petits constructeurs : le groupe RIJN-WAAL dans l'Est du pays, dans lequel des chantiers de Millingen, Doest, Zaltbommel et Gendt coopèrent pour tous les achats : la HOLLANDSE SCHEEPSBOUW ASS0CIATIE, dans laquelle se retrouvent des entreprises de Zaandam, Dordrecht, Rotterdam et Hendrik-Ido-Ambacht pour tout ce qui concerne les exportations ; un groupe constitué autour de la SLEEPHELLING Mij. de Scheveningen77.

  • 78 Les entreprises de BIESBOSCH-VAN DUYVENDICK, DE GROOT-VAN VLIET, JONKER et STANS, IJSSELWERF et ZA (...)

222Au cours de l'année 1971, six autres petits chantiers décident de s'unir pour réaliser une coopération à la fois technique et économique78.

  • 79 Images Economiques du Monde - Paris - SEDES - 1972.

223Les crédits accordés par l'Etat, les fusions intervenues, l'essor rapide des diverses formes de collaboration entre les plus petits chantiers, se traduisent par une amélioration progressive de la situation de la branche qui retrouve peu à peu une activité plus conforme à son potentiel. En 1970-1971, les carnets de commandes des grands constructeurs sont à nouveau bien remplis. En 1972, le tonnage lancé par les grands chantiers représente 2,83 %du total mondial alors qu'il n'en représentait que 1,72 % en 196879. Au cours de la période des mutations structurelles, l'évolution des tonnages lancés a été la suivante :

Tableau no 24 - Evolution des tonnages lancés navires de mer. en BRT

Années

Tonnages

Années

Tonnages

1966

290 000

1970

602 000

1967

265 000

1971

568 000

1968

227 000

1972

744 000

1969

454 000

1973

896 000

Source : CBS

Notes

1 Même en 1938, la productivité du travail aux Pays-Bas est nettement inférieure à ce qu'elle est alors en Belgique, en Allemagne et en France.

2 Au passage, notons que ce n'est que vers 1968-1969, que la DATAR, en France a créé aux U.S.A. un bureau permanent pour informer les entreprises américaines sur les possibilités d'investir en France.

3 Pour une valeur 100 en 1948, l'indice de la production industrielle en 1952 est de 128, alors que celui de la productivité est de 98 (contre 83 en 1948 pour une valeur 100 en 1938).

4 De 1946 à 1950, le taux de natalité annuel moyen est de 25,9 ‰

5 O.C.D.E. : politique de main-d'oeuvre et politique sociale aux Pays-Bas. Paris - 1967.

6 Idem

7 R. JURRIENS : Arbeidsmarkt en werkende gehuwde vrouw. in ESB du 26.8.1970 ainsi que : CPB : Nota inzake groei en structuur von onze économie. 1966.

8 H. EMMANUEL : De ontwikkeling der loonkostensniveaus in de verwerkende industrie der EEG landen 1950-1966 in ESB du 9.10.1968.

9 H. JACOBS : De invloed van h et loon op de efficiency der bedrijven. in ESB du 1.11.1967

10 ANDRIESSEN-MIEDEMA-OORT : De sociaal-economische besturing van Nederland. 3ème éd. Groningen. Noordhoff. 1966.

11 J.P. WINDMULLER : Labor relations in the Netherlands. Cornell Un. Press. Ithaca. 1969 - pp. 394-396.

12 De janvier 1959 à décembre 1962, le salaire horaire augmente en moyenne de 6,5 % par an. Le coût de la main-d'oeuvre à l'unité produite s'accroît de 13,3 % entre janvier 1960 et décembre 1962.

13 En l'occurence, le mouvement a été lancé et conduit par la Banque Générale des Pays-Bas (ALGEMENE BANK NEDERLAND).

14 Banque Nationale d'investissement : rapport no 5-12-901-300-11, ronéoté sur l'industrialisation des Pays-Bas.

15 K.G. DE GROOT : De financiering van de industrialisatie in Nederland. Leiden. Stenfert-Kroese - 1957 - p. 85.

16 L.H. KLAASSEN : Hoofdlijnen van de economische politiek in Nederland. NEI - Rotterdam - 1965.

17 KG. DE GROOT : Op. cit. p. 145-147.

18 Min. Aff. Econ. : 4ème Rapport sur l'Industrialisation - chap 1.

19 CPB : De nederlandse économie in 1970 - p. 16.
De nederlandse économie in 1973 - vol. 1 - p. 16.

20 Idem : vol. 1 - p. 41.

21 Banque Nationale d'investissement : l'Evolution industrielle aux Pays-Bas. La Haye - 1966 - ronéoté p. 3.

22 Il s'agit ici de l'entreprise entendue comme "unité technico-économique" (en néerlandais : BEDRIJF) et non pas comme "unité juridique" (en néerlandais : ONDERNEMING). La langue française n'a pas de terme spécifique pour distinguer cet élément intermédiaire entre l'entreprise et l'établissement (qui correspond au néerlandais VEFSTIGING).

23 Non seulement les entreprises étrangères sont traitées comme les entreprises du pays mais, de plus, elles ont toutes facilités pour effectuer leurs mouvements de capitaux et même, ce qui est essentiel, pour rapatrier dans leur pays d'origine les bénéfices qu'elles ont pu réaliser aux Pays-Bas.

24 D. W. JOEKES : Nederland als vestigingsplaats voor buitenlandse industrieen. in ESB no 2239 - 1960 - pp. 637-640.

25 M. DE SMIDT : Foreign industrial establishments located in the Netherlands. in TESG - 1966 - no 1 - p. 6.

26 CBS : bulletin mensuel de statistiques - juillet 1965.

27 Min. Aff. Econ. : 8ème Rapport sur l'Industrialisation. La Haye - 1963.

28 L.H. KLAASSEN : op. cit. L'indice de dispersion est tel que I = 100 si la structure de répartition du pays est la même que celle de la moyenne des 12 pays concernés - I=0 lorsque la déviation est maximale

29 L'arrivée en grand nombre des femmes sur le marché du travail ne se manifeste pas encore. Elle ne commence vraiment qu'à partir de 1968.

30 Pour les entreprises employant au moins 10 personnes. Bâtiment exclu.

31 R. IWEMA : Economie backgrounds of manpower trends in the Netherlands. Rotterdam - N.E.I. 1966 - p. 59. Pour l'industrie de la confection, les difficultés de recrutement semblent aussi tenir au fait que le personnel féminin qu'elle emploie est de plus en plus réticent à l'égard du travail offert par cette branche, qui a mauvaise réputation, et de plus en plus attiré par les emplois du secteur tertiaire considérés comme plus "nobles".

32 O.C.D.E. : op. cit.

33 Entre 1953 et 1964, l'agriculture a expulsé en moyenne 10 000 actifs chaque année.

34 Il faut aussi ajouter, pour les régions orientales du pays, la très forte attraction exercée par les industries allemandes qui offrent des salaires nettement supérieurs. En Drenthe comme en Twente ou en Limburg, les industries ont parfois du mal à recruter leur main-d'oeuvre sur place, en dépit d'une forte disponibilité potentielle, en raison de cette fuite vers les emplois en Allemagne.

35 Min. Aff. Econ. Projet de Loi de Budget 1969 - Annexe no 5 au Rapport sur la Politique Régionale pour la période 1969-1972. A l'exclusion des ressortissants de Belgique, du Luxembourg et de l'Indonésie.

36 J.P. WINDMULLER : op. cit. p. 382.

37 PH. VAN PRAAG : Het vrije verkeer van werknemers in de EEG. in ESB du 3.1.1968 - pp. 7-10.

38 C.P.B. : Nota inzake groei en structuur van onze économie. La Haye 1966 - p. 31.

39 C.P.B. : Centraal economisch plan 1965 - pp. 25 et suivantes.

40 - L'exemple de l'accord signé entre trois syndicats et la firme PHILIPS en 1965 est significatif du débordement des pouvoirs publics par le secteur privé en matière salariale. Cet accord prévu pour une période de trois ans est tout à fait contraire au système alors en vigueur : il prévoit une augmentation de 6 % des salaires pour la seule année 1965 (soit bien plus que le taux proposé par le gouvernement) et comporte une clause d'indexation sur la hausse du coût de la vie. Le retentissement de cet accord particulier est très grand car PHILIPS représente, en 1965, 45 000 travailleurs, 10 % du total des exportations industrielles et environ 2 % du revenu national. Cf. J. P. WINDMULLER - op. cit. p. 372.

41 H. EMMANUEL : art. cit.

42 Nederlandse Onderneming du 16.1.1970 - p. 62.

43 C.E.E. : Enquête sur les coûts de main-d'oeuvre dans les industries des pays de la Communauté. Cité par Ned. Ond. du 10.9.1971 - p. 828.

44 C'est à dessein que nous n'employons pas ici le terme "d'industrie de croissance". Il nous parait préférable de réserver cette dénomination pour désigner une activité ayant des fonctions motrices, qui ne peuvent procéder du seul critère emploi, et des effets d'entrainement régionaux sur des activités situées à l'amont ou à l'aval.

45 C.P.B. : De nederlandse économie in 1973-p. 143.

46 Min. Aff. Econ. : Projet de Loi de Budget 1973 - 1974.

47 C.P.B. : De nederlandse économie in 1973 - p. 123.

48 N.E.I. : Structuur-onderzoek nederlandse meubelindustrie. Rotterdam 1969.

49 Idem - Vol. I - p. 19.

50 F.A.TH. J. DEITERS : Tekort vrouwelijke personeel schept moelijke situatie voor de confectie industrie, in Ned. Ond. du 6.11.1970.

51 Une illustration de ces problèmes est le relatif échec de la décentralisation de la confection à partir d'Amsterdam vers le Nord de la province de Noord-Holland, échec lié à l'impossibilité de recruter et de conserver une main-d'oeuvre féminine pourtant disponible sur place.

52 Commission de la Construction Navale Néerlandaise : Rapport de l'enquête structurelle sur la construction navale.
La Haye 1966.

53 Cf. : Infra

54 Les marges bénéficiaires pour l'industrie passent de 23 % en moyenne en 1957 à 16 % en 1966. Pour les services, les valeurs correspondantes sont de 25 et 20 % et pour l'agriculture de 22 et 19 %. Cf. : Min. Aff. Econ. Projet de Loi de Budget 1968. Rapport explicatif. Chap I.

55 Selon le C.P.B., la chimie, l'électrotechnique et l'industrie des matériels de transport représentent, ensemble, en 1964 environ 65 % du total des investissements affectés à la recherche industrielle. Cf. : De Nederlandse économie in 1973. Vol. I - p. 135.

56 Comptes de la Nation 1971 - p. 97.

57 C.P.B. : Nota inzake groei en structuur van onze économie. La Haye 1966.

58 C.P.B. : De nederlandse économie in 1970 (La Haye 1966) et de nederlands économie in 1973 (La Haye 1970).

59 Nous adoptons ici la traduction littérale de "sektorpolitiek". Il est clair que le terme de sectoriel ne se rapporte pas aux trois grands secteurs de l'activité économique mais à la notion de branches d'activité industrielle.

60 Le "Défi Américain" de J. J. SERVAN-SCHREIBER a eu un certain retentissement aux Pays-Bas et à contribué à la mise au premier rang des problèmes de capacité technologique.

61 S.E.R. : Rapport inzake sektorstructuurpolitiek. La Haye - 1969.

62 Une tendance en faveur d'une politique également plus sectorialisée se manifeste, à la même époque, au sein de la Commission des Communautés Européennes. Celle-ci propose en particulier de soutenir les industries les plus dynamiques, celles pour lesquelles l'Europe est bien placée dans la compétition internationale. Voir, entre autres, le rapport COLONNA DI PALIANO du 19.6.1969.

63 A juste titre, on a également fait remarquer que tout follow-up donné à l'enquête structurelle implique des mutations d'ordre psychologique. Il suppose, en effet, une modification de l'attitude des industriels d'une même branche qui ne doivent plus, comme c'est très généralement le cas, se considérer seulement comme des concurrents directs, mais qui doivent, s'ils veulent réaliser les mutations souhaitées, envisager le devenir de leur entreprise dans le cadre de la croissance de la branche toute entière.

64 COMMISSION CEE : Mémorandum sur la politique industrielle de la Communauté. Bruxelles 1970.

65 Voir, entre autres, A. VIGARIE : La circulation maritime. Paris - Génin. 1968.

66 Résultat d'une fusion intervenue en 1926.

67 Issue d'une fusion, en 1962, de la ROTTERDAMSCHE DROOGDOK avec la société DE SCHELDE.

68 Fusion réalisée en 1962.

69 Résultat d'une fusion intervenue en 1945 entre deux grands chantiers d'Amsterdam.

70 Cf. : Supra. Le plus souvent, la pratique de telles politiques est justifiée par : l'importance de la construction navale comme client de la sidérurgie et comme donneur d'ordres à des activités industrielles multiples (moteurs, équipements électriques, appareils de mesure...), son importance du point de vue de l'emploi, surtout au niveau régional (que l'on songe à la Clyde, à la Tyne, à Saint-Nazaire, à Trieste...) le rôle qu'elle est susceptible de jouer, en cas de conflit, du point de vue de la sécurité et de la défense nationales.

71 Commission de la Construction Navale. Rapport cité.

72 Min. Aff. Econ. : projet de Loi de Budget 1969-1970.

73 Het Financieel Dagblad du 18.10.1968.

74 "L'affaire Verolme" a d'ailleurs fait beaucoup de bruit aux Pays-Bas et soulevé de nombreuses critiques.

75 NRC-Handelsblad du 23.11.1971. Supplément spécial sur les entreprises.

76 NRC-Handelsblad du 28.11.1972. Supplément spécial sur les entreprises.

77 F.H.F. OLDEVELT : Scheepsbouw zoekt kracht steeds meer in samenverking. in Ned. Ond. du 4.6.1971.

78 Les entreprises de BIESBOSCH-VAN DUYVENDICK, DE GROOT-VAN VLIET, JONKER et STANS, IJSSELWERF et ZAANLANDSE SCHEEPSBOUW. cf. : Het Financiele Dagblad du 3.1.1971 - p. 13.

79 Images Economiques du Monde - Paris - SEDES - 1972.

Notes de fin

1 Population active civile ayant un emploi.

2 Bâtiment exclu.

3 ne sont indiquées que les exportations de produits

4 exprimés en volume

5 Toutes entreprises, Bâtiment et Util. Publiques exclus en x 1 000 homme-années

6 Entreprises employant au moins 10 personnes

7 Entreprises employant au moins 10 personnes. Bâtiment et Util. Publiques exclus.

8 Demandes et offres enregistrées par les bureaux de main-d'œuvre

9 Situation au 31.12 de chaque année

10 exprimée par le volume de la valeur ajoutée

Table des illustrations

Titre Tableau no 1 : Objectifs et réalisations pour les trois périodes
Légende (1) Estimations(2) Exprimés en mille homme-années (1 homme-année = 300 jours de travail/an)Source : Ministère des Affaires Economiques - 8ème Rapport sur l'industrialisation. 1963
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Titre Fig.no 1 - POPULATION NEERLANDAISE. Pyramide des âges au 31-12-1947
Légende Source : CBS
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Titre Fig. no 2 - POPULATION NEERLANDAISE. Pyramide des âges et taux d’activité au 31/12/1960
Légende Sources : CBS et JJ. Van der Lee in ESB du 21/11/1973
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Titre Fig. no 3 - POPULATION ET FORCES DE TRAVAIL PAR GROUPES D’AGE -1968-
Légende Source : O.S.C.E. Stat. Soc. 6/1969
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Titre Tableau no 4 - Evolution des indices Investissement-Production et productivité2
Légende (2) Indices calculés sur la valeur des investissements aux prix de 1957(3) Exprimée en volumeSource : 4ème, 6ème, 8ème Rapports sur l'Industrialisation des Pays-Bas.
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Titre Fig. no 4 - EMPLOIS - PRODUCTION - PRODUCTIVITE, EVOLUTION COMPAREE
Légende Source : 8eme Memorandum sur l’industrialisation
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Titre Tableau no 10 - Evolution de la répartition des emplois5 (x 1 000)
Légende (2) Selon la classification A.I.S.(3) Estimations(4) Confection + teinture + chaussureSource : C.B.S. et 8ème Rapport sur l'Industrialisation des Pays-Bas.
URL http://books.openedition.org/psorbonne/docannexe/image/37429/img-7.jpg
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Titre Tableau no 13 - Evolution de la concentration des emplois %7
Légende Source : CBS/AIS
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Titre Tableau no 14 - Evolution de la concentration des emplois par branches d'activité %
Légende (1) Raffinage du pétrole inclus(2) Y compris les ind. extractives, le Bâtiment et les Utilités PubliquesSource : d'après les statistiques CBS/AIS
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Titre Tableau no 15 - Indices d'exportation des produits fabriqués 1953 = 100
Légende (1) Y compris la confectionSource : Banque Nationale d'investissement. L'Evolution Industrielle aux Pays-Bas - 1966, p. 9.
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Titre Fig. no 5 - DEMANDES ET OFFRE D’EMPLOI, EVOLUTION COMPAREE
Légende Source : Ministère des Affaires Economiques
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Titre Fig. no 6 - EVOLUTION DES SALAIRES (ouvriers des industries manufacturieres)
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Titre Tableau no 18 - Evolution des effectifs employés x 1 0009
Légende (2) Selon la classification AISSource : statistiques CBS/AIS.
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Titre Tableau no 21 - Structures internes de quelques branches d'activité industrielle en 1966
Légende A = % dans total entreprisesB = % dans total emploisC = % dans total chiffre d'affaires(1) Selon la classification AIS(2) L'entreprise désigne ici l'unité technico-économique et non l'entité juridique (3) Raffinage pétrolier exclu(4) A l'exclusion des industries laitières et produits laitiersSource : statistiques CBS/AIS
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Titre Tableau no 22 - Hausse moyenne des salaires et des prix Période 1959-1968 en %
Légende Source : OCDE, cité par Minis. Aff. Econ. Projet de Loi de Budget 1970. Rapport Explicatif. Chap I.
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