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Paradis pour une reine

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Anaïs Wion

Deuxième partie. Le temps de la fondation

Le temps de la fondation

Texte intégral

1Après l’examen des sources produites par la paroisse de Qoma, nous allons replacer l’histoire de la fondation du monastère dans une perspective temporelle et spatiale large. En suivant le destin hors du commun de la reine Wäld Śä’ala, nous verrons tout d’abord que l’alliance de Susneyos et de Wäld Śä’ala est au cœur d’une stratégie visant à mener Susneyos au trône. L’accès à la terre et le pouvoir militaire sont les fondements du succès de ce roi controversé. Ce sera l’occasion de revenir sur la maturation d’un règne crucial pour l’histoire politique et religieuse de l’Éthiopie.

2Le chapitre V analyse le rôle de Wäld Śä’ala dans cette fondation et ce qu’elle doit aux hommes de sa famille, son mari Susneyos puis ses deux fils, Fasilädäs et Gälawdéwos. C’est la relation de Wäld Śä’ala à son mari que nous aborderons par le biais d’un corpus de prophéties. Cette interdépendance est en effet constitutive de l’histoire de Qoma. Ensuite, nous entrerons de plain-pied dans l’histoire de la fondation, en examinant un récit de nature légendaire : l’histoire du bœuf guidant la reine. Cette légende nous mène à parcourir le territoire de la paroisse, de Bär Adägé à Qoma. Selon ce récit, Qoma ne serait pas la première église fondée par Wäld Śä’ala. Une première église, située plus au nord sur la paroisse, n’obtint pas l’assentiment divin lors de sa consécration, et la construction de Qoma est une répétition de cette première tentative avortée. La narration de ce glissement spatio-temporel d’une église à l’autre évoque les problèmes rencontrés par la reine.

3Ces longueurs et ces équivoques qui parsèment l’histoire de la fondation sont en grande partie dues aux conflits familiaux qui se cristallisent autour de l’exercice du pouvoir. Car Qoma Fasilädäs, monastère royal de la reine Wäld Śä’ala, s’inscrit dans la politique de son fils Fasilädäs, après l’abdication et la mort de son royal époux en 1632. Cet héritage semblerait naturel, si la succession de Fasilädäs à Susneyos était simple… En effet, selon les sources orales de Qoma Fasilädäs, l’héritier de la couronne était Gälawdéwos, l’autre fils de Wäld Śä’ala et Susneyos, encore vivant en 1632, et non Fasilädäs. Après avoir analysé les sources diverses corroborant cette hypothèse, nous verrons comment ceci peut expliquer le délai dans la mise par écrit des textes fondateurs de Qoma. Cette dernière enquête nous révélera la face la plus sombre de toute cette histoire… le crime le plus atroce, le crime presque parfait…

© Éditions de la Sorbonne, 2012

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