Objets gagés, objets saisis, objets vendus par la justice à Paris (xive-xve siècles)
p. 385-402
Texte intégral
1Parmi les manières dont les biens circulent, à côté des formes de l’échange marchand (vente, échange…), du don (don, legs…), du tribut (prélèvement fiscal, confiscation…), du vol (vol, pillage, brigandage…), un cinquième type de circulation consiste dans les prises de gages destinées à garantir l’accomplissement des autres formes de circulation. Ces engagements de biens aboutissent à leur vente dans les cas où les transactions censées être ainsi sécurisées échouent. Gages, saisies, ventes de biens saisis ou gagés réalisent successivement une première mobilisation de certains biens, qui est détachée de leur fonction d’usage, puis leur immobilisation provisoire, enfin leur remobilisation. Ces mouvements successifs peuvent être volontaires ou forcés. Dans l’Île-de-France du bas Moyen Âge, les gages pouvaient être mobiliers, immobiliers, fonciers (mort-gage, vif-gage, hypothèque) et personnels. L’obligation du corps – l’engagement d’une personne à subir un emprisonnement en cas d’inaccomplissement d’un contrat1 – et la plévine (le cautionnement par une tierce personne2) étaient ainsi des mises en gage personnelles assez fréquentes aux xiiie-xve siècles. Il est plus difficile de ranger dans l’une de ces catégories la pratique, moins connue que les deux précitées, des « gardes-manjans3 » ou « sergents garnisaires ». Il s’agissait de sergents fixés au domicile d’une personne endettée et vivant à ses dépens jusqu’au paiement complet par celle-ci de sa dette4. Le gage était dans ce cas non un objet, mais bien l’ensemble domestique, qui était ainsi placé sous contrainte. Dans les limites imparties par les éditeurs du présent volume et pour la cohérence du propos, les seuls gages mobiliers ont été retenus ici, à l’exclusion des récoltes et des vendanges, c’est-à-dire des fruits encore sur pieds qui pouvaient aussi être gagés et saisis par la procédure appelée par la coutume parisienne « d’arrêt et de brandonnement ». Ces gages mobiliers pouvaient être réels ou symboliques. Réels, ils étaient en cas de défaillance du débiteur vendus ou gardés par le créancier ou celui qui avait reçu l’engagement. Symboliques, ils ne faisaient que garder la trace de l’engagement passé, comme le denier à Dieu, donné en signe de marché conclu et en principe consacré à un usage pieux ou à l’achat de vin bu par les contractants5, comme le fétu de paille jeté par celui qui s’engageait6 ou encore comme le couteau donné en gage dans certaines villes de Flandre7. Chez les historiens de la contractualité du deuxième xixe et du premier xxe siècles, une perspective évolutionniste fréquente voulait que le gage mobilier, réel ou symbolique, ait précédé le simple engagement oral, comme le contrat écrit et sécurisé par des juridictions publiques8. L’historien de la coutume parisienne, O. Martin, passait d’ailleurs rapidement sur les gages mobiliers aux xive et xve siècles9, se consacrant bien plus longuement aux méandres des évolutions de la saisie des biens immeubles10. Un évolutionnisme peu éloigné de celui-ci est perceptible dans l’histoire financière : celle-ci laisse une place étroite à cet « instrument des économies pauvres11 » et a souvent considéré que l’usage du gage mobilier a décru quand la banque s’est développée, qu’il était caractéristique d’économies archaïques et préfinancières, qu’il était d’abord le fait de prêteurs juifs ou étrangers aux communautés12 et qu’il touchait les catégories populaires et les agents économiques « prodigues » et imprévoyants13. On omet ainsi rapidement que le prêt sur gage est toujours pratiqué en Europe, non seulement par les établissements héritiers des monts-de-piété comme les crédits municipaux français, mais aussi par des banques qui financent ainsi de grosses entreprises agro-alimentaires très lucratives, produisant huile, champagne, cognac, parmesan… en prenant pour gage, pendant leur temps de maturation et jusqu’à leur vente, les marchandises produites, le prêt sur gage offrant des solutions de financement plus diversifiées que l’on ne croit.
2Les sentences civiles du Châtelet de Paris14 et les textes juridiques parisiens des xive et xve siècles fournissent l’essentiel de la documentation disponible sur la pratique du gage à Paris au bas Moyen Âge. Toutefois, le Châtelet de Paris n’a apparemment pas mis en place l’enregistrement des ventes de biens meubles qu’il ordonnait, alors qu’il existait des registres de criées des biens fonciers et immobiliers saisis et vendus par la justice15, comme il existait des rouleaux des décrets prononcés par le Parlement. Si les sergents de la prévôté royale de Paris faisaient des rapports écrits de leurs exploits, leur archivage n’a pas été organisé. On n’en conserve que de rares exemplaires, incidemment gardés par les établissements religieux intéressés par les effets de ces exploits, ainsi que des formulaires tardifs datant du début du xvie siècle. En dépit de l’absence d’archivage conservatoire de ces documents spécifiques qui étaient émis lors des saisies et ventes de gages ordonnées par la justice, tout indique que le gage, forme d’anticipation de la saisie, avait un poids considérable dans l’économie domestique parisienne, élitaire comme populaire. Malgré ses défauts, cette documentation judiciaire et juridique est d’autant plus précieuse que les inventaires après décès, dans lesquels pourrait être traquée la présence d’objets laissés en gage, ont été conservés avec parcimonie à Paris pour la période qui précède la tenue de registres de notaires au xvie siècle. Elle permet donc de saisir, si ce n’est de quantifier, la pratique du gage par le biais des transactions impayées. Elle rend ainsi possible la description des circuits qu’empruntaient ces choses gagées, saisies puis vendues, comme la situation de leur place dans l’économie et la société parisiennes tardomédiévales.
« Gage à tous les étages » : le poids du gage mobilier
3La prise de gage et la saisie de biens mobiliers étaient des solutions très fréquentes dans toutes les transactions volontaires ou forcées dont le paiement ou la réalisation était différé : achats, emprunts, amendes, taxes. Le prêt sur gage en particulier était une pratique très commune et très diffuse16, en l’absence de mont-de-piété à Paris avant la fin du xviiie siècle. Elle n’était pas réservée aux milieux populaires et elle n’était pas non plus spécifique du crédit juif ou du crédit lombard17. Au surplus, le prêt sur gage semble avoir été peu pratiqué par la filiale parisienne de la compagnie des Gallerani à la fin du xiiie et au début du xive siècle18. En revanche, des inventaires après décès révèlent l’activité de prêteurs chrétiens, non professionnels, tels que Gérard de Montaigu, avocat au Parlement, chanoine de Paris et de Reims mort en 1339, dont on a conservé l’inventaire après décès et un testament19 : il prêtait sur gage à une clientèle variée, en partie princière, composée de ses parents, de ses amis ou de nobles besogneux, et à son décès, vêtements et pièces d’orfèvrerie (ceintures, couronnes d’arnet doré…) laissés en gage s’entassaient dans sa maison20. La mère de Gaston Phebus, Aliénor de Comminges, comtesse de Foix, avait déposé chez lui draperies, fourrures, vêtements, literie, missel, un drageoir d’argent, un porte-verre en argent doré et sa litière avec son harnachement21. Cette clientèle aisée qui recourait au gage se retrouve dans les registres du Parlement du xive siècle étudiés par P. Timbal. La mise en gage d’objets précieux était une solution assez fréquente entre marchands méridionaux et italiens présents à Paris, pour garantir le dépôt et le prêt de sommes élevées22.
4Mais il ne faudrait pas croire que le prêt sur gage était ainsi typique d’un côté des plus pauvres, et de l’autre des mieux pourvus en biens précieux et qui en auraient fait commerce. Les cas révélés par les sentences civiles du Châtelet montrent la profonde diffusion sociale de cette pratique au xve siècle. Ainsi le notaire Nicolas Ferrebouc a-t-il emprunté 40 livres parisis au « ferron » (c’est-à-dire à un fabricant et vendeur d’objets de fer) Thomas Bernart, en laissant en gage « certains biens » et des « verveilles d’osel » (des anneaux utilisés en fauconnerie)23. Ainsi encore une demoiselle, « Jehanne La Forestiere vefve de feu Jehan de Vergies » a-t-elle obtenu de Colin Baudin un prêt de 30 francs 4 sous parisis contre plusieurs biens, vêtement et objets en métaux précieux, qu’elle a gagés : « ung mantel a usaige de femme fourré de gris, un diamant plat, une cuiller d’argent et une croix d’or, unes patenostres de giest et demie once de perlez ou environ24 ». En 1430, c’est une bourgeoise de Paris, Mazille La Quesnote, qui a emprunté 26 livres tournois au seigneur de Chaillot, Arnaud Bachelier, auquel elle a laissé en gage un vêtement et un livre d’heures : une « houppellande a usage de femme d’escarlate de Brucelles fourrée de menu vair et une heures escriptes en françoiz a volume de femme sans fermoirs25 ». Les exemples pourraient être multipliés qui montrent que chacun, riche ou pauvre, homme ou femme, avait recours au prêt sur gage26 et se défaisait provisoirement d’objets de quelque prix pour obtenir des liquidités. La pénurie de numéraire était ainsi palliée par une intense circulation d’objets.
5Des montages complexes faisaient parfois circuler ces objets pour remédier aux carences du crédit en numéraire. Il en est ainsi de ce Jehan Maçon qui acheta à crédit, avec Guillaume Sennion, 303 quarterons de laine à Katherine La Blanchette, pour en laisser une partie (331 toisons) en gage chez Casin de Saint Legier, afin d’obtenir de celui-ci un prêt de 8 francs, ce qui lui valut d’être emprisonné pour dette27. Perrette La Morelle, quant à elle, avait prêté 8,5 francs, non en numéraire mais en objets d’argent (« en une tasse et deux cuillers d’argent verez et martellez appreciez a ladite somme »), à Jehan Le Mire qui lui avait remis en gage « une houppelande a usage d’omme, de drap violet fourrée de gorges de martres28 ». Jehan Le Mire avait manifestement laissé son manteau pour en obtenir un objet « plus liquide », qui serait un gage de meilleur rapport que son vêtement auprès d’un prêteur. Dans cette économie où le numéraire était relativement rare, les chaînes de circulation des objets s’allongeaient pour permettre l’accès au crédit.
6Cette circulation des biens était d’autant plus intense que l’achat sur gage était encore plus fréquent que le prêt sur gage, de même que l’achat à crédit était bien plus fréquent que l’emprunt pur et simple. Pour obtenir un objet, on laissait ainsi au vendeur un autre objet, en des échanges qui ne manquent pas de fantaisie : l’un laissait des vêtements pour obtenir de la vaisselle d’argent29 – dont on vient de voir qu’elle permettait plus sûrement d’obtenir un prêt en numéraire –, l’autre du suif contre du hareng30, un manteau déchiré contre du drap31, du chanvre contre du poisson32, des armes et une armure pour payer la facture de l’hôtel33…
7Cette facilité avec laquelle chacun délaissait un bien auprès d’un quidam pour disposer de quelque valeur ou d’un autre bien révèle une très forte mobilité des choses. On peut se demander si celle-ci n’était pas d’autant plus importante que l’on était en période de famine monétaire comme dans les années 1400-1410 ou de manipulations monétaires comme dans les années 1415-1430. Mais ne s’inscrit-elle pas aussi dans une « économie de l’aléatoire » et ne manifeste-elle pas cette « préférence pour l’illiquidité » décelée par L. Fontaine pour les siècles postérieurs34 ? Les cas révélés par les archives judiciaires parisiennes suggèrent également, comme ultérieurement à Paris et comme ailleurs à la fin du Moyen Âge, la part importante prise par les femmes dans cette circulation des objets35.
8Cette fréquence du gage dans le Paris tardomédiéval implique trois choses. Tout d’abord, la propriété des biens mobiliers paraît avoir été très précaire, puisque certains d’entre eux étaient destinés à circuler. Deuxièmement, une fonction à part entière des biens meubles, et pas seulement des objets d’orfèvrerie qui pouvaient être fondus, tenait dans leur usage en tant que gage, garantie, réserve, d’autant qu’il faut ajouter aux gages constitués dans le cadre d’échanges marchands, ceux qui étaient constitués pour garantir les paiements d’amendes, qui étaient dans toutes les juridictions tardomédiévales les principales sentences prononcées36. Et de manière générale toutes les prises de gages pour garantir la coopération d’un justiciable : tel voiturier accusé d’avoir mal transporté du pain par un boulanger voit deux de ses chevaux arrêtés parce que l’on cherche à s’assurer de sa personne. Enfin, le fonctionnement de cette économie du gage reposait sur des comportements d’anticipation de la part des agents. Le « ménagier » prudent devait procéder à des acquisitions de biens meubles susceptibles de servir de gages afin de protéger les biens qu’il ne souhaitait pas gager ou voir saisis. C’est sans doute ce qui explique le « goût » si commun alors pour les tasses et cuillères en argent.
9Cette circulation était surveillée par les hommes du prévôt royal de Paris, parce que le vol était une voie d’approvisionnement possible pour ces circuits de biens meubles détachés de leur fonction d’usage. Prêteurs sur gage et vendeurs d’objets de deuxième main – fripiers, regrattiers et vendeurs de vieux fer cités par une ordonnance prévôtale de 137137 – étaient soupçonnés de receler et de revendre les objets volés, puis laissés en gage chez eux. Les détenteurs de stocks d’objets hétéroclites suscitaient la suspicion. Le seul registre criminel du Châtelet de Paris qui nous soit parvenu met en scène pour les années 1389-1392 de multiples voleurs empruntant sur gage auprès de prêteurs juifs, de fripiers ou de changeurs. Ainsi le 24 septembre 1389, Guillaume de Bruc, écuyer, avoue-t-il, parmi d’autres vols et crimes, le larcin qu’il a commis chez un Lombard38 ; il a ensuite emprunté sur gage avec les choses volées auprès d’un « fripier » tenant boutique rue Saint-Germain-l’Auxerrois39. Condamné à être traîné et décapité, il avoue au moment de mourir une litanie de vols d’objets, notamment des joyaux, qu’il a mis en gage auprès de juifs40. Jehannin Fontene confesse sous la torture le 6 novembre 1389 une série de vols et la revente des produits de ses larcins à des fripiers et à des changeurs41. L’importance de l’économie du gage contribuait peut-être à encourager le vol d’objets dans les intérieurs domestiques, puisque bien des objets étaient susceptibles d’être convertis en gage pour donner accès à d’autres biens42.
Circuits et procédures : saisies et ventes
10Théoriquement, la prévôté royale de Paris surveillait également, dans l’économie du gage, l’étape suivante de la vente des biens gagés. Si le débiteur avait laissé des gages à son créancier, en cas de non-paiement, la coutume prévoyait qu’il ne pouvait les liquider lui-même : il demandait au prévôt royal un « congé de vendre » ces gages jusqu’à paiement de son dû43. Cette précaution était destinée à éviter qu’un gage de forte valeur ne soit vendu pour une dette modeste. Mais il semble assez évident que tous les prêteurs sur gage ne s’embarrassaient pas de ces formalités qui ne devaient concerner que ceux qui étaient désireux de se distinguer ou de sécuriser leurs relations avec leurs interlocuteurs.
11En l’absence de gages, un créancier pouvait demander à être satisfait sur les biens meubles de son débiteur : il y avait alors arrêt, saisie puis vente de biens mobiliers. Si la dette avait été passée sous un sceau public (sous la forme de « lettres obligatoires »), la créance était directement exécutoire : le créancier confiait simplement son titre de créance à un sergent de la prévôté royale pour lancer la saisie de biens. En revanche, l’obtention d’un « congé de vendre » de la part du tribunal royal était nécessaire pour procéder à la vente des biens ainsi saisis. L’auditoire du Châtelet délivrait ces « congés de vendre » ou « congés de vendicion »44. Un certain nombre de privilèges concédait la possibilité de saisir des biens mobiliers. C’était le cas du privilège des bourgeois de Paris d’arrêter les biens des forains : toute dette d’un forain envers un Parisien ouvrait droit à l’arrêt de biens meubles du forain45. Le forain se voyait ainsi communément saisir les chevaux qui l’avaient mené à Paris46. Un privilège des hôteliers d’arrêter les biens de leurs hôtes existait également pour leur permettre de recouvrer les dépens d’hostelage47. Enfin, les loueurs de maisons détenaient un privilège d’arrêt sur les biens garnissant les immeubles qu’ils louaient48. Les possibilités de saisir des biens mobiliers et de constituer des gages forcés étaient ainsi assez étendues dans la coutume parisienne.
12Elles supposaient que soit résolu le problème de la garde et du stockage des biens ainsi arrêtés ou saisis quand ils n’étaient pas sous la garde du créancier – comme dans le cas de l’hôtelier se servant dans la chambre de son client. Cette gestion du stockage des gages était l’un des coûts principaux des monts-de-piété en Italie49. Les sergents saisissant des biens faisaient parfois appel aux voisins de la personne saisie50. Les chevaux saisis étaient confiés à des hôtes qui étaient rémunérés sur le prix de vente final des bêtes51. Certains objets précieux étaient déposés en des lieux plus sûrs, comme les couvents : Robert de Saint-Germain qui fit saisir chez ses débiteurs des bijoux les fit placer par le Parlement dans un coffre scellé et déposé au couvent trinitaire de Saint-Mathurin52. Autrement dit, le recours à des maisons privées semble avoir été la solution de garde la plus fréquente53, ce qui supposait la coopération des justiciables aux exploits des sergents.
13La constitution d’un « acheteur de biens par justice » permettait également de régler le problème du stockage des biens saisis. Lors même de la saisie par le sergent, un tiers ou bien l’endetté lui-même promettait de payer ultérieurement, soit la somme à laquelle le bien serait adjugé, soit la dette initiale : c’était une forme de cautionnement à retardement du débiteur initial ou bien un nouveau délai qui lui était consenti. Les biens étaient alors laissés à la personne saisie, qu’elle soit ou non l’« acheteur de biens »54. En revanche, ce dernier acceptait la saisie de son corps au cas où il n’honorerait pas son engagement. L’achat de biens se présentait donc comme la concession d’un délai à l’endetté, mais aussi comme la substitution de son corps aux biens mobiliers saisis55.
14La mise au point puis la diffusion de cette procédure de l’achat de biens à partir de la fin du xive siècle témoignent du souci de laisser ses biens mobiliers à la disposition de l’endetté. Gages et saisies des biens n’étaient d’ailleurs pas appelés à durer. Leur usage devait être rendu aux biens par leur rapide mise en vente56. Les condamnations de débiteurs à payer assorties de l’ordre de vendre leurs biens et les « congés de vendre » étaient ordonnées par le Châtelet de Paris à un rythme très variable : plus d’une vente tous les trois jours en 1430, seulement trois et demie par mois en 1454-1455. Ces variations, si elles ne sont pas liées à la conjoncture, sont peut-être purement procédurales : l’année 1430, riche en congés de vendre, fut pauvre en « cessions de biens » c’est-à-dire en faillites volontaires – aucune cession de biens ne fut alors enregistrée par le clerc civil – ; à l’inverse, l’année 1454-1455 compte 56 cessions, soit près de cinq par mois. Comptées ensemble, ventes forcées et ventes « volontaires » prononcées par le tribunal du prévôt royal de Paris s’établissent donc à un rythme moyen de huit à douze par mois au xve siècle57.
15Ces ventes judiciaires étaient réalisées en principe par un sergent58, afin de garantir à la personne dont les biens ont été gagés ou saisis, comme au créancier, que les biens soient justement évalués59. Le sergent devait réaliser la vente huit jours après que le congé de vendre ait été prononcé60. Ce délai coutumier, appelé souvent les « nuys »61, servait à assurer la publicité de la vente : il devait permettre à des acheteurs intéressés de se renseigner sur les biens à vendre62, mais il permettait aussi à la personne saisie de trouver des acheteurs parmi ses parents et amis63. Dans Paris, le lieu de la vente judiciaire des biens mobiliers se situait aux Halles, principal marché de la ville et lieu d’exécutions capitales et de publication des cris. Un emplacement spécifique y était dédié à ces ventes judiciaires à la fin du xve siècle64.
16Les résistances aux saisies et aux ventes judiciaires – appelées « rescousses » –, comme les résistances aux arrestations de personnes, n’étaient sans doute pas rares, comme l’a montré R. Telliez, à partir de la documentation du Parlement qui était loin de traiter de l’ensemble de ces affaires à caractère véniel65, mais la documentation proprement parisienne fait défaut sur ce point, ce qui nous prive de récits qui laisseraient apparaître l’attachement des hommes et des femmes à l’inviolabilité de leur maison et à certains de leurs biens66.
Quels objets ?
17Les juristes parisiens n’ont pas établi de liste des biens insaisissables, à la différence des coutumes d’autres régions qui excluent vêtements, lit, instruments de travail, ce qui signifie que le droit écrit parisien n’a fixé aucune limite aux exploits des sergents67. À Paris, seul le privilège d’une personne ou d’un espace semble pouvoir empêcher la saisie des objets : les biens mobiliers personnels du clerc sont ainsi couverts par son privilège canonique et la « franchise » d’un lieu consacré s’oppose de fait aux exploits des sergents. Les chevaux du noble ne semblent pourtant pas non plus insaisissables. Certes, par une ordonnance de la Toussaint 129668, Philippe le Bel avait prévu que les chevaux de guerre et les armes ne pourraient être saisis pour dette durant « sa guerre » et des dispositions locales couvraient parfois les combattants. Mais cette règle ne semble pas avoir été appliquée en dehors des périodes de combat. Cet objet symbolique de l’aristocrate ne semble pas avoir été spécifiquement protégé des saisies69. Les cas de saisies et de ventes de chevaux sur des nobles, forains70 ou non71, ne sont en effet pas rares à Paris au xve siècle.
18En l’absence de règle excluant certaines catégories de biens de la saisie, comment le sergent exécuteur procédait-il à un choix ? Il devait en principe veiller à ne saisir que des biens dont le prix était en rapport avec le montant réclamé. Dans le cas, appelé « déconfiture », où ce dernier était plus élevé que la valeur des biens du débiteur, une véritable casuistique devait guider le sergent exécuteur d’après la coutume. Il devait prendre en considération l’âge, la situation familiale, l’état social, la valeur du lit de la personne sur laquelle il effectuait la saisie : « Et se icelui qui est obligié n’a que ung lit, le prandra l’executeur ? Respond que se l’obligié est vieil et miserable ou qu’il soit marié ou s’il n’est marié, etait enfans, pour pitié de ce, consideré aussi l’ordonnance, il ne vendra point le lit, mais se l’obligié estoit solutus et de jeune aage ou que selon l’estat de l’obligié le lit fut de excessive valeur secus72. » Cette formulation semble plutôt rigoureuse, mais la pratique laissait parfois au débiteur des meubles et ustensiles domestiques de base73.
19Autre principe qui guidait le sergent dans son exploit de saisie : dans les cas où il avait le choix parmi les meubles à saisir, il lui était recommandé de saisir d’abord les biens mobiliers les plus liquides74, c’est-à-dire les chevaux et les vins. Au stade de la vente, ce sont les biens périssables qui doivent être les premiers visés avant qu’ils ne soient consommés, comme les chevaux, les bœufs, les porcs, etc.75. À côté du montant de la dette à honorer, liquidité, mobilité et durée de vie du bien orientent le choix du sergent exécuteur.
20Ceci nous ramène aux objets qui étaient préférentiellement mis en gage, saisis, vendus. Les exemples précités ont mentionné les objets précieux (joyaux et pierres, pièces d’orfèvrerie), les ustensiles en argent (tasses, hanaps, cuillères), les vêtements fourrés (manteaux et houppelandes76), les armures et leurs éléments77, les livres manuscrits78, les meubles en bois, les toisons de laine, les pièces de toile79 et de drap, parfois en des compositions variées80. Les chevaux et les vins81 semblent en revanche plus souvent exigés lors de l’exécution que mis en gage volontairement.
Conclusion
21Dans le Paris des xive et xve siècles, tant les pratiques de mises en gages volontaires, que les saisies et ventes judiciaires opéraient une circulation très intense d’objets et de biens meubles. Les procédures coutumières prescrivaient des délais très courts entre les saisies et les ventes et orientaient les choix des sergents effectuant les saisies vers des biens très aisément vendables. La diffusion de la procédure dite d’« achat de biens » tendait certes à allonger ces délais, mais elle révélait surtout le souci de ne pas immobiliser vainement des biens et de les laisser en usage chez leur détenteur initial. La procédure de « cession de biens » montrait quant à elle l’attachement au caractère « volontaire » de cette circulation particulière des biens. Justice et justiciables semblent avoir ainsi eu en commun la valeur positive attachée à la circulation des objets82.
Notes de bas de page
1 Nous nous permettons de renvoyer sur ce point à J. Claustre, Dans les geôles du roi. L’emprisonnement pour dette à Paris à la fin du Moyen Âge, Paris, 2007.
2 O. Martin, Histoire de la coutume de la prévôté et vicomté de Paris, Paris, 1922-1930, t. II, fasc. II, p 520-522, 540.
3 Voir A. Esmein, Études sur les contrats dans le très ancien droit français, Paris, 1883, p. 169-170.
4 Exemples : Journal de Nicolas de Baye, greffier du Parlement de Paris, 1400-1417, édité par A. Tuetey, Paris, 1885-1888, t. I, p. 60-61 : le 15 mai 1403, des sergents du Châtelet « mangeurs » furent placés en l’hôtel du receveur de l’ordinaire de Paris pour le contraindre à payer leurs gages aux huissiers du Parlement ; Journal d’un bourgeois de Paris de 1405 à 1449, édité par C. Beaune, Paris, 1990, p. 391 : pour le paiement d’une taille en 1439. Le sergent du Châtelet placé en garnison percevait quatre sous parisis (s. p.) par jour, l’ordonnance du 27 mars 1400 sur les sergents précisant bien qu’il « n’aura aucuns despens mais se vivra dessus », Archives nationales, Y 1, fol. 96v (désormais AN).
5 A. Esmein, Études sur les contrats…, op. cit., p. 25 ; O. Martin, Histoire de la coutume…, op. cit., p. 518.
6 A. Esmein, Études sur les contrats…, op. cit., p. 69 et suiv.
7 J. Balon, « Sur deux garanties coutumières : le gage symbolique du couteau et le serment laïque », RHDFE, 31, 1953, p. 567-574.
8 A. Esmein, Études sur les contrats… op. cit., passim. O. Martin, Histoire de la coutume…, op. cit., p. 518, 520-522, 530 se place dans la même perspective qui trace une évolution entre des « conceptions primitives en matière d’obligations » à « l’obligation générale de tous les biens » et à des « procédés plus raffinés » dus à « l’influence du droit romain », en passant par « des étapes successives », « à mesure que l’individualisme juridique progressait ».
9 O. Martin, Histoire de la coutume…, op. cit., p. 558-561.
10 Ibid., p. 565-572.
11 L. Fontaine, L’Économie morale. Pauvreté, crédit et confiance dans l’Europe préindustrielle, Paris, 2008, p. 105 et p. 132-133 sur la condamnation des micro-circuits du prêt sur gage par les philanthropes.
12 A. Colling, Banques et banquiers de Babylone à Wall Street, Paris, 1962, p. 42.
13 L. Baudin, Le Crédit, Paris, 1934.
14 AN, Y 5220-5232.
15 Sur ces registres de criées, tenus au plus tard à partir de 1389, voir A. Terroine et L. Fossier (dir.), Chartes et documents de l’abbaye de Saint-Magloire, III : 1330-début du xve siècle, Paris, 1976, p. 608, no 271, n. 2 : collation en 1437 par le notaire Nicolas Le Clerc d’un extrait du registre des criées de 1389.
16 Si P. C. Timbal, Les Obligations contractuelles d’après la jurisprudence du Parlement ( xiiie-xive siècles), Paris, 1973-1977, t. II, p. 129 écrivait : « le cas exceptionnel où le créancier est en possession de meubles de son débiteur, à lui remis en gage », le cas n’était exceptionnel qu’au Parlement.
17 Pour un exemple de prêteur lombard en Île-de-France, voir C. M de La Roncière, Un Changeur florentin du Trecento : Lippo di Fede del Sega, 1285 env. -1363 env., Paris, 1973, p. 179-194.
18 G. Bigwood et A. Grunzweig, Les Livres des comptes des Gallerani, Bruxelles, 1961-1962, t. I, p. 123-209. On compte un seul cas sur 244 postes (no 658 : des objets en argent sont déposés par un habitant de Mailly-Le-Château pour une dette de 13 livres [l.] 10 s. p.).
19 Analysés par A. Terroine et L. Fossier (dir.), Chartes et documents, op. cit., p. 88-93, no 84.
20 AN, S 6458, no 8, 1339, 6-28 décembre (inventaire après décès) : item quedam zona de serico ardenti cum ferratura argentea cum clavibus placis deauratis esmailliatis que dicebatur esse in pignore penes dictum defunctum, item quedam zona de visetis cum perlis et aliis lapidibus que etiam erat in pignore, item quedam corona argentea deaurata esmailiata cum perlis et due alie parve corone argentee deaurate existentes in quodam parvo coffrello ligneo et dicitur quod erant in pignore pro decem libris par. prout scriptum erat desuper dictum scrineum, item quedam alia coronoa gracilis esmailliata cum perlis et aliis lapidibus et uno gratili capello in parva cassia lignea qui dicuntur esse in pignore pro viginti libri par. ut etiam de super scriptum erat.
21 A. Terroine et L. Fossier (dir.), Chartes et documents, op. cit., t. III, p. 88 en note.
22 Pour le Parlement de Paris, voir les cas cités par P. C. Timbal, Les Obligations contractuelles…, op. cit., t. II, p. 435-437, p. 451. Henri Guilhem, bourgeois de Paris originaire de Montpellier, doit ainsi plus de 1 000 florins à Païen de Port et lui a remis 216 perles en gage (1350). Pour le tribunal du prévôt royal de Paris au xve siècle, voir AN, Y 5228, fol. 21, 13 octobre 1414 (950 livres tournois [l. t.]) : « Du consentement de Loys Gradeingo de Venise demourant a Paris en rue Neufve Saint Merry, qui confesse devoir a Pierre de Pauge marchant de Lucques demourant a Paris, la somme de neuf cens quatre vins livres tournois, laquelle lui avoit esté baillee par ledit Pierre comme en garde et commande, nous icellui Lois condempnasmes et condemnons a rendre et paier audit Pierre ladite somme de neuf cens quatre vint livres tournois pour les causes dessudictes et oultre deismes et disons que deux rubis dont l’un est en un annel d’or et l’autre en un custon d’or bailles audit Pierre en gaige de ladite somme seront vendus bailles et delivres a l’acheteur plus offrant et derrain encherisseur par le premier sergent a verge, lequel a ce faire nous commettons sans jour sans terme et sans respit etc et les deniers qui en vendront bailles audit Pierre en paiement de ladite somme. »
23 AN, Y 5228, fol. 26, 19 octobre 1414.
24 AN, Y 5228, fol. 26v, 19 octobre 1414.
25 AN, Y 5230, fol. 42, 11 août 1430, édité par O. Martin, « Sentences civiles du Châtelet de Paris (1395-1505) », Nouvelle Revue historique de droit français et étranger, 38, 1914, p. 619-620, no 245.
26 En voici quelques-uns : AN, Y 5230, fol. 8v, 12 juin 1430 : Simon Vivien, sergent du roi en Beauvaisis, a emprunté 6 l. t. à Regnault Nepveu, mercier, pour payer des dépenses d’hôtel et a donné « en seureté […] le bas d’unes cuirasses et un hauberjon de fer » ; AN, Y 5230, fol. 5, 3 juin 1430 : une femme prénommée Marguerite a emprunté 11 francs 5 s. p. en 8 saluts d’or à Jehan Chapelle sur un vêtement de « drap […] de la façon d’Almaigne […] avecques ses manches […] de drap nuefves froncees sur le poingnet » ; AN, Y 5230, fol. 10v, 17 juin 1430 (Marguerite de Chaumont).
27 AN, Y 5222, fol. 130, 3 octobre 1399.
28 O. Martin, « Sentences civiles… », art. cité, p. 620, no 246.
29 AN, Y 5228, fol. 7v, 31 mai 1414 : « De l’accort de Vidal De Leon licencié en droit canon qui confesse devoir a Berthelot Moreau orfevre et bourgeois de Paris la somme de trente trois frans d’or, pour vente bail delivrance de vaisselle d’argent, c’est assavoir quatre mars d’argent au pris de huit frans quatre solz parisis le marc, condamnons a paier ladite somme dedans six sepmaines et oultre disons que se dedans ledit temps il ne lui a paié ladite somme, en ce cas deux houppellandes, une fourree de saison de martres et l’autre de stailate fourree dectus, par lui baillees en gaige et seureté audit Berthelot soient vendus bailles et delivres a l’acheteur etc sans jour etc et pour ce faire commectons le premier sergent etc et sans despens. » AN, Y 5230, fol. 79v, 28 septembre 1430 : « Du consentement Jehan Thomassin dit de Bourgongne brodeur demourant a Paris, dit est que se dedens duy en ung moys il n’a payé a Perrette La Morelle pour ce presente devant nous la somme de huit frans et demi qu’il lui doit pour vente bail et delivrance d’une tasse martelee et troiz cuillers d’argent pesans ensemble ung marc, en ce cas ung seurcot couvert de drap vermeil fourré de menu ver par lui baillé a ladicte Perrette en gage et seurté de sondit deu avecques de ses autres biens se mestier est, seront vendus, baillez et delivrez etc sans jour et sans significacion etc, et les deniers etc baillez et delivrez a ladite Pierrette jusques a plain paiement de son dit deu. »
30 O. Martin, « Sentences civiles… », art. cité, p. 619, no 244, 10 avril 1396 : Colin Lasnier doit 4 livres parisis pour une vente de hareng à Pierre Hemery marchand et laisse en gage 80 l. de suif.
31 AN, Y 5230, fol. 82v, 2 octobre 1430 : « Du consentement de damoiselle Marie du Sault qui estoit appellee a la requeste de Jehan Le Gay marchant afin de veoir vendre et faire valoir aux nuys acoustumees une houppelande de drap de Damas noir fourree de gris dessiree par le colet appartenant a ladite damoiselle et par elle baillee en gage audit Le Gay pour la somme de XXX f. XII s. p. qu’elle lui devoit pour vente de drap et de compte fait etc., condampnee est a paier ladite somme dedans le jour de l’an prouchain venant et disons que par deffault de paiement audit terme, ledit gage sera vendu etc sans jour etc pour le paiement etc et condampnons en l’escripture et selle, fait parties presentes. »
32 AN, Y 5230, fol. 6v, 7 juin 1430 : « une piece de toile de chanres » est laissée en gage de 11 l. 12 s. p. à Jehan Larcher, vendeur de poisson de mer.
33 O. Martin, « Sentences civiles… », art. cité, p. 618-619, no 243, 22 mars 1399 : pour payer ses dépenses de bouche et d’hôtel à hauteur de 45 s. p., Charlot Panas, « routoyeur d’armée », laisse en gage une cotte de fer, un bracelet, une épée, un bouclier, un « viez plisson de peaux de lou et un viez chappeau ». Autres exemples d’achats de biens à crédit sur gage : AN, Y 5226, fol. 53, 19 avril 1407, édité par O. Martin, « Sentences civiles… », art. cité, p. 611-612, no 228 ; AN, Y 5230, fol. 6v, 7 juin 1430 : « deux hauberjons d’acier de Milan, une houpelande d’escarlate […] a usage d’omme, un surcot long d’escarlate vermeille » sont laissés en gage de 70 l. t.
34 L. Fontaine, L’Économie morale…, op. cit., p. 132.
35 B. H. Hanawalt, The Wealth of Wives. Women, Law and Economy in Late Medieval London, Oxford, 2005, p. 173-175 ; L. Fontaine, L’Économie morale…, op. cit., p. 153.
36 Exemple pour le tribunal du Parloir aux bourgeois, G. Huisman, La Juridiction de la municipalité parisienne. Appendice : Essai de reconstitution d’un répertoire de jurisprudence municipale ( xive et xve siècles), Paris, 1912, p. 211-245, ici no 55 (1407) : un sergent prend une tasse d’argent chez Girard Fortin en gage de 48 s. p. d’amende, à laquelle il a été condamné pour un vol ; il se fait ensuite payer ces 48 s. p. Exemple pour la cour du Trésor : AN, Z1f1, fol. 105v, 28 juin 1402 : Lorens Galopin a saisi un hanap d’argent à Thomas de Lestre redevable d’une amende de 100 s. ; fol. 107, 5 juillet 1402 : saisie d’une tasse d’argent pour une amende de 60 s.
37 Archives de la Préfecture de police, Livre blanc, fol. 43.
38 Ce Lombard, victime du larcin, est un prêteur évoqué en termes positifs dans le papier d’Aleaume Cachemarée : « c’estoit un lombart et homme d’armes, et qui faisoit assez de biens à ceulx de la ville et du pays, et qu’il leur prestoit de l’argent quant ilz en avoient mestier », Registre criminel du Châtelet de Paris du 6 septembre 1389 au 18 mai 1392, édité par H. Duplès-Agier, Paris, 1861-1864, t. I, p. 17.
39 Ibid., p. 18.
40 Ibid., p. 33.
41 Ibid., p. 105, 107. Autres cas similaires : ibid., p. 111 et cas no 77, 84 (mise en gage auprès de juifs d’objets volés).
42 Par exemple, le produit d’un larcin pouvait être laissé en gage d’un paiement chez un hôtelier, AN, Y 5266, 19 octobre 1488 : « Ledit Jehan Alays [dit de Paris serrurier demourant partout], Quantin Alleaulme [varlet cordier demourant partout], Pierre Guiot [plastrier demourant partout] prisonniers cy dessus [pour avoir volé une arbalète chez Guillaume de Semcourt] de ce jour arrestez prisonniers a la requeste de Jehan Pieffort hostelier demourant en la rue de Montmatrre, jusques a ce qu’ilz luy aient paié XIX s. p. et ung denier qu’ilz luy doivent pour despence de bouche et pour seurreté avoient baillé en gaige audit Jehan Pieffort une arbalaistre qu’ilz avoient mal prinse et a esté contrainct ledit Pieffort par justice a la rendre a Guillaume Senycourt a quy elle estoit. »
43 O. Martin, Histoire de la coutume…, op. cit., p. 558.
44 Exemple : AN, Y 5230, fol. 7, 9 juin 1430 : « Du consentement de Hanse de La Rue marchand forain sur lequel et ses biens Raulant de Barges… pour la somme de VIIXX salus d’or en quoy ledit Hanse est tenu et obligé envers ledit Raulant… Dit est que deux chevaulx prins en faisant ladite execucion avecques des autres biens dudit Hanse… seront venduz et livrez au plus ofrant sans jour et sans solennité par le premier sergent etc… jusques a plain paiement de son deu. »
45 Ce privilège des bourgeois de Paris, remontant au début du xiie siècle – en 1134, une charte de Louis VII confirme celle de Louis VI –, leur permettait initialement de saisir et de vendre eux-mêmes les biens de leurs débiteurs, en un droit de saisie privée commun à bien des villes dites « d’arrêt » (Reims, Compiègne, Châlons, Bourges, Rouen, etc.). En 1351, Jean le Bon rendit cette saisie publique et la confia aux sergents royaux. À la fin du xive siècle, le privilège ne s’exerçait plus qu’à l’encontre des débiteurs forains des bourgeois de Paris, O. Martin, Histoire de la coutume…, op. cit., p. 545-546.
46 O. Martin, « Sentences civiles… », art. cité, no 239, AN, Y 5223, fol. 23v, 28 juin 1401 : Jehan de Chartrez, forain, doit 68 s. à Guillaume des Poulies qui fait arrêter un cheval lui appartenant. Le cheval ne lui est rendu (« baillé et delivré ») que s’il fournit une caution bourgeoise (un plège) pour sa dette. Ibid., no 240, AN, Y 5230, fol. 77, 26 septembre 1430 : pour une dette de 24 saluts d’or de Guido de Plaisance, forain, envers Hugues de La Barre, bourgeois de Paris, une « haquenée » (un petit cheval ou une jument facile à monter) est arrêtée. Ibid., no 287, 7 mai 1407 : André Raponde fait arrêter les chevaux de Guillaume d’Authun, écuyer forain.
47 O. Martin, Histoire de la coutume…, op. cit., p. 547.
48 Ibid. Exemple : AN, Y 5230, fol. 5v, 10 juin 1430 : « Du consentement de Jehan Feullet sur lequel et ses biens, Noel procureur des religieux du Temple a Paris a procedé par voye de gaiges pour VIII l. t. d’arrerages a cause de louage d’ostel, dit est la caucion bonne et valable et que une chape d’eglise, prinse en faisant ycelle, avecques de ses aultres biens seront venduz aux nuys etc et condampné es despens. »
49 M. G. Muzzarelli, Il denaro e la salvezza. L’invenzion del Monte di Pietà, Bologne, 2001. Sur leurs coûts de gestion justifiant l’intérêt prélevé sur les emprunteurs, M. Sensi, « Un aspect singulier des deux âmes du franciscanisme : Monts de Piété à titre onéreux et monts “sine merito” », dans L. Parisoli (dir.), Pauvreté et capitalisme. Comment les pauvres franciscaines ont justifié le capitalisme et le capitalisme a préféré la Modernité, Palerme, 2008 (Franciscana, 23), p. 153-174.
50 Voir le formulaire à l’usage des officiers de justice intitulé Le prothocolle des notaires, tabellions, greffiers, sergens et autres praticiens de court laye… Avec le guydon des secretaires contenant la maniere d’escripre et adresser toutes lettres missives, nouvellement imprimé a Paris par Pierre Le Ber, Paris, s. d. [début du xvie siècle], fol. 129-130, « aultre rapport de sergent pour faire execution sur lettres obligatoires » : « Rapporté par moy Pierre B. sergent a cheval du roy nostre sire ou Chastellet de Paris que par vertu de la comission executoire donnee de monseigneur le prevost de Paris a ceste ma relacion actachee impetree et a moy presentee de la partie de Adam etc tenneur demourant etc. Et a sa requeste ie le vendredy dixiesme iour de ianvier mil cinq et dix sept me suis transporté de ceste ville de Paris au villaige de Clamart en l’hostel et domicille de Jehan le etc et de Guillaume etc laboureurs demourans oudit lieu ausquelz en parlant a leurs personnes i ay fait expres commandement de par le roy nostredit seigneur et mondit seigneur le prevost de Paris qu’ilz fissent solucion et payement audit Adam de la somme de dix livres tournois qu’ilz luy doibvent et dont ilz sont obligez ung chascun d’eulx seul et pour le tout corps et biens pour les causes a plain contenues et declairees es lectres obligatoires de ce faictes et passees par devant deux notaires dudit Chastellet et soubz le seel de la prevosté de Paris ou qu’ilz me baillassent des biens meubles exploictables iusques a la valleur de ladite somme lesquelz dessus nommez obligez ont esté de ce faire reffusans et delayans pour lequel refuz et delay i ay prins saisy arresté et mis en la main du roy nostredict seigneur ung muy de vin blanc trouvé en l’hostel dudict Guillaume etc a luy appartenant, lequel muy de vin i ai baillé en garde de par le roy nostre dict seigneur a Estienne le etc laboureur demourant audit lieu en parlant a sa personne que de ladite garde se chargea et le promist rendre toutes et quanteffois que par iustice requis en sera. Et en l’hostel dudit Jehan etc prins saisy arresté et mis en la main du roy nostre dit seigneur deux aultres muys de vin vermeil aussi a luy appartenans et baillez en garde de par le roy nostredit seigneur a Michel le etc en parlant a sa personne lequel aussi de ladite garde se chargea et promist rendre toutes et quanteffois que par iustice requis en sera. »
51 AN, Y 5226, fol. 22, 11 mars 1407 : « De l’acord et consentement de Francoys Aynin prisonnier ou Chastellet pour la debte de Andrié Damien marchant d’Ytale demourant en Avignon d’une part, et de Guillaume Lormoy procureur dudit André d’autre, ordené est senz preiudice que deux chevaux… appartenant audit Aynin prinz et arrestez a la requeste dudit Andrieu seront vendus… et les deniers de la vente baillez audit André… lez despens desdiz chevaulx premierement prinz et a paier a l’oste. »
52 P. C. Timbal, Les Obligations contractuelles…, op. cit., t. II, p. 130 (1362).
53 Rien d’étonnant à ce qu’il ait fourni la matière d’un cas juridique apprécié des juristes parisiens, BNF, fr. 10 816 (Grand coutumier de France de Jacques d’Ableiges), fol. 177v-178 ; fr. 18419 (Style du Châtelet), fol. 35v : « Prenons ung cas qui peut advenir a la requeste d’aucun creancier et apres terme passé l’en fait execution sur ung debteur qui s’oppose et pour ce les biens du debteur sont mis en garde en ung hostel qu’ilz soient ars et tous les autres biens de celui hostel par cas de fortune pendant le plait et puis le debteur est condemné ; queritur a qui le dommaige est ou au sergent ou au debteur. Respond que au debeteur car le creancier n’eut oncq la seigneurie des biens et par l’occupacion du debteur furent ilz si longuement laissez, mais se le creancier eust eu la seigneurie des biens ou qu’il eust perdu la cause aliud esset. »
54 Les Archives départementales de Paris conservent exceptionnellement un rapport d’un sergent à cheval du Châtelet de 1481, qui narre une exécution sur un débiteur et la constitution d’un acheteur de biens, AD 4AZ9 D. B2 : « luy fiz commandement de par le roy nostre sire et vous mesdits messeigneurs qu’il fist paiement et solucion audit Tahureau de ladite somme de IIIIc XXX l. XVIII sols tournois restant… ou qu’il me baillast des biens exploictables et non perissables jusques a ladite somme…, lequel Deport me respondi que pour l’eure il n’avoit nulz biens meubles, a quoy s’approchant par devers moy en sa presence Marie du Ru femme dudit Guillaume du Souchoy qui en signe de garnison pour ladite somme de IIIc XXX l. XVIII sols tournois me bailla une tasse d’argent a elle appartenant pesant ung marc et demy ou environ qui promist fournir et paier icelle somme dedans les nuys et en la maniere acoustumee comme achacteuse de biens, a laquelle baillay et delivray icelle tasse comme a personne estrange. » Un autre rapport d’un sergent à cheval du Châtelet, Nicolas de Marly, à la suite d’une saisie effectuée à la demande du Parlement à Mitry en 1488, dans lequel est narrée une constitution d’acheteur de biens, a été publié par T. Claerr, « Restauration seigneuriale et contestation paysanne en Île-de-France à la fin du xve siècle », Histoire et sociétés rutrales, 14, 2000, p. 214-216 : l’ensemble des biens saisis, laissés aux débiteurs, est symbolisé par un chapeau.
55 Voir J. Claustre, Dans les geôles du roi…, op. cit., p. 300-308.
56 Toutefois, après la vente, un ultime délai de huit jours était laissé au débiteur pour régler sa dette, avant la délivrance des biens à l’acheteur, P. C. Timbal, Les Obligations contractuelles…, op. cit., t. II, p. 131.
57 Le nombre quotidien moyen des écrous pour dette était alors de deux à trois par jour, J. Claustre, Dans les geôles du roi…, op. cit. On saisissait donc plus aisément le corps que l’on ne disposait des biens, mais le corps ainsi arrêté ne servait qu’à obtenir le paiement, par la liquidation éventuelle de biens. Sur ce point, voir aussi D. L. Smail, The Consumption of Justice. Emotions, Publicity and legal Culture in Marseille, 1264-1423, Ithaca/Londres, 2003, ainsi que sa contribution dans le présent volume.
58 Exceptionnellement, elles pouvaient être laissées au créancier par la justice, O. Martin, « Sentences civiles… », art. cité, p. 619, no 244, 10 avril 1396 : la vente du suif laissé en gage chez un marchand de poisson sera réalisée par le marchand, Pierre Hemery, « sans appeler a ce justice ».
59 O. Martin, « Sentences civiles… », art. cité, no 243, 22 mars 1399 : pour ses dépenses de 45 s. p. chez un hôtelier, Charlot Panas, « routoyeur d’armée », a laissé en gage une cotte de fer, un bracelet de fer, une épée, un bouclier, une peau, un chapeau. La veuve de l’hôtelier, sans nouvelle du client, « pour ce que les biens se povoient enrouiller et empirer et que ou temps a venir on les pourroit demander de plus grant value qu’ilz ne sont », obtient leur vente par la justice avec cette précaution que « lesdiz biens seront prisez et estimez par gens en ce congnoissans et ce fait seront venduz », un examinateur étant commis pour s’en assurer.
60 BNF, fr. 18419, fol. 34v.
61 Exemples : AN, Y 5220, fol. 220v, 3 juin 1396, ordre de vendre les biens de Pierre de Meuneville (« sept chevaulx telz quelz deux charrettes et un haquet quatre mailles de fer a batre plastre vint vint sas a mettre plastre et environ six muys de plastre crue ») ; AN, Y 5230, fol. 7v, 10 juin 1430, Jehan Feullet ; fol. 8v, 11 juin 1430, Roger Le Roy.
62 P. C. Timbal, Les obligations contractuelles…, op. cit., t. II, p. 129 (1398) : un acquéreur potentiel demande une declaratio des biens saisis au sergent.
63 O. Martin, « Sentences civiles… », art. cité, no 277, 26 décembre 1454 : Jaques Choart, marchand drapier et bourgeois de Paris, a obtenu la vente de biens de Denisot Paulmier, laboureur de Vaugirard, pour une dette de 6 l. t., 5 muids de vin claret seront vendus. Paulmier consent à ce que la vente du vin, stocké chez Choart, soit faite par un sergent et obtient que son frère, Thomas de l’Orme, soit appelé à la vente « pour y mettre enchiere ».
64 AN, Y 5266, fol. 140v et fol. 158v, novembre 1488 : « es Halles en la place ou l’en vend les biens par justice ».
65 R. Telliez, « Per potentiam officii ». Les officiers devant la justice dans le royaume de France au xive siècle, Paris, 2005 (Études d’histoire médiévale, 8), p. 515, 517.
66 P. C. Timbal, Les Obligations contractuelles…, op. cit., t. II, p. 87 a toutefois publié un arrêt du Parlement de 1348 relatant la demande de restitution d’un lit faite par l’épouse de Jean du Mez, écuyer (armiger), après la saisie (executionem… multum inhoneste et in vituperium, dampnum et contemptum ipsius) de ce lit et de bijoux (lectum et jocalia), faite selon elle contra libertatem dominarum.
67 Sur ce point et sur ce qui suit, voir P. C. Timbal, Les Obligations contractuelles…, op. cit., t. II, p. 126-128.
68 Ordonnances des roys de France de la troisième race, Paris, 1723-1849, t. I, p. 328, art. 3.
69 Le cheval du noble était dans les coutumes du Nord considéré comme un bien immobilier comme la tour, les terres, le blason, le couple de cygnes de son étang et il devait revenir à celui qui assumerait la continuité du nom et de la lignée. Pour les encyclopédistes, le cheval était réputé reconnaître son maître, le défendre, pleurer sa mort, éprouver ses joies et peines au combat. B. Prévot et B. Ribémont, Le Cheval en France au Moyen Âge : sa place dans le monde médiéval ; sa médecine : l’exemple d’un traité vétérinaire du xive siècle, la Cirurgie des chevaux, Orléans, 1994, p. 270-271 et R. Jacob, « La tour, le cheval et les cygnes. Sur la symbolique de la seigneurie dans le paysage et le droit coutumier de France du Nord », dans J. Claustre, O. Mattéoni et N. Offenstadt (dir.), Un Moyen Âge pour aujourd’hui. Mélanges offerts à Claude Gauvard, Paris, 2010.
70 Exemple : AN, Y 5228, fol. 22v (1414) : « De l’accort de Bremon de Brion escuier demourant en la senechaucee de Bequaire, nous icellui condempnons a paier a Jehan Macias demourant a la choche pierre en la rue Saint Jaques VI f. IIII s. I d. pour despence de bouche et hostelaige dedans VIIIe et ou cas que il n’aura paié, nous disons que un cheval rouge a longue queue seelle et bride sera vendu sans sans terme etc et les deniers baillez en paiement de ladite somme et si le condampnons en l’escripture et seel. » Il semble que le prix du cheval excédait assez largement le montant de la note laissée par l’écuyer chez son hôtelier, si l’on se réfère à P. Contamine, Guerre, État et société à la fin du Moyen Âge. Études sur les armées des rois de France 1337-1494, Paris, 1972, p. 19 : le prix des « chevaux » de combat dans la deuxième moitié du xive siècle devaient se situer autour de 30 à 40 l. t.
71 O. Martin, « Sentences civiles… », art. cité, no 276, 1er février 1407 au cours d’une saisie sur messire Hue Bouruel, chevalier, on a pris « entr’autres choses un cheval brun bay a courte queue… avec la seelle et bride ».
72 BNF, fr. 18419, fol. 35v.
73 AN, Y 5228, fol. 13 (1414) : « Du consentement de Maceot Hemart demourant a Paris sur lequel et sur ses biens execution avoit esté requise et encommencee a faire de par le roy nostre sire, a la requeste de maistre Pierre Cousinot pour la somme contenue es lectres obligatoires par vertu desquelles ladite execution avoit esté requise, nous disons comme tous les biens prins et arrestes a diversesfoiz sur ledit Maceot par ladite execution et les lectres et debtes trouvees et arrestees comme a lui appartenant et aussi les aultres biens que ledit Maceot laissa despieca en l’ostel dudit maistre Pierre seront venduz et delivrez le plus proffitable que faire se pourra et que les deniers qui en ystrent venront au prouffit dudit maistre Pierre et lui seront baillez en acquis et deduction de ce que ledit Maceot lui doit du contenu esdites lectres, excepté toutesvoies de la generalité des biens dessudits une table de noyer et deux treteaux un trepier un havet une paelle de fer deux plas et huit escuelles d’estain qui lui seront rendus pour s’en aidier quant a present, non obstant les lectres de respit obtenues par ledit Maceot ausquelles et a l’effect desquelles il a renoncé tant que touche ledit maistre Pierre. »
74 BNF, fr. 18419, fol. 34v : « Et de ce sommer doit a la requeste du porteur prandre premierment les meubles desquelz l’en peut plus tost avoir paiement pour la somme requise et iceulx prins adiourner a veoir vendre et celui sergent a verge avoir congié de vendre et iceulx estre venduz a VIII jours de recosse. »
75 Le prothocolle des notaires…, op. cit., fol. 131v-132v, « aultre relation de sergent faict touchant ladicte perfection d’execution nonobstant appel » : « Rapporté par moy P. B. sergent a cheval du roy nostre sire ou Chastellet de Paris que par vertu de certaines lettres royaulx a ceste ma presente relation attachees impetrees et a moy presentees de la partie de honnorable homme sire Jehan etc marchant drappier et bourgeois de Paris. Et a sa requeste, ie le vingtdeuxiesme iour du moys d’aoust mil V C et seize me suis transporté de ceste ville et cité de Paris au villaige de Pierreficte en l’hostel et domicille et par devers et a la personne de Jehan etc laboureur demourant au dessusdit lieu, auquel en parlant a sa personne iay dict et signifié que par faulte du payement par luy non faict au dessudict creancier sire Iehan etc ie alloye presentement proceder a la vente de ses deux dessudits chevaulx en la maniere acoustumee au plus offrant et dernier encherisseur ainsi comme mandé m’estoit par icelles dessusdictes lettres royaulx non obstant ledit tel appel par luy intergecté et toutes appellacions quelzconques faictes ou a faire et sans preiudice d’icelles veu que comme contenu es icelles lettres royaulx iceulx chevaulx sont bien meubles perissables et qui se pourroient perir, menger et consommer durant le long traict que pourroit avoir et durer ledit appel ainsi par icelluy debteur intergecté. Et ce dit que moy sergent dessusdict mis a exposay en vente et delivrance oudit lieu iceulx deux chevaulx en la maniere acoustumee. »
76 AN, Y 5230, fol. 14, 21 juin 1430 : un prêt de 20 saluts d’or est consenti par Me Lievin sur gage d’une « houpelande de drap de damas non figuré, a usage de femme a manches ouvertes, fourree de gris » ; l’emprunteur consent à sa vente « sans jour et sans solennité pourveu que la delivrance en sera signifiee a luy ».
77 AN, Y 5230, fol. 6, 7 juin 1430 : pour une dette de 70 l. t. « dit est que deux hauberjons d’acier de Milan, une houpelande d’escarlate… à usage d’omme, un surcot long d’escarlate vermeille » seront vendus.
78 Outre le livre d’heures déjà mentionné, le Registre des causes civiles de l’officialité épiscopale de Paris (1384-1387), édité par J. Petit, Paris, 1919, col. 263 (15 février 1386) mentionne « un Digeste neuf » laissé en gage de deux francs.
79 AN, Y 5230, fol. 6, 7 juin 1430 : un homme est reconnu endetté à hauteur de 11 l. 12 s. p. envers Jehan Larcher, vendeur de poisson de mer, « et est dit que une piece de toile de chanvre mesurant XXVI aulnes […] avecques de ses autres biens seront vendus sans jour et sans solennité et […] jusques a plein paiement de son deu ».
80 Exemple, AN, Y 5228, fol. 17 (1414) : « En la presence de Marion La Praide requerant execution sur Mahiet Nicole et sa femme et sur leurs biens pour la somme de unze livres dix huit solz et huit deniers parisis en quoy par sentence et tauxer de despens donnees de nous iceulx Mahiet et sa femme ont esté condempnes envers ladite Marion pour les causes contenues d’une part et de maistre Simon de Langres oposant a ladite execution a ce que certains biens qui prins avoient esté en faisant ladite execution a la requeste de ladite Marion sur lesdits mariés, c’estassavoir un lit et coussin de deux lez a toye de taille et a deux toyes une cousche de chesne et une couverture blanche… six oulliers une huche de fer un viel baut et unes vielle aulmones… deux coissins chascun d’une aulne et demie de le deux chaalus de blantbois et deux vielles l baut et unes vielle aulmones… deux coissins chascun d’une aulne et demie dele deux chaalus de blantbois et deux vielles l’une rayee et l’autre vermeille item deux autres coustes deux coissins chascun de le et demi deux vielles couvertures l’une raye et l’autre vermeille et une vielle cousche de chesne en grant demiciel et dossier de toille paree servans aus deux coustes et coissins item une vielle couste et coissin d’une aulne et demie de le a une toye de taille et une couverture blanche de lemme de bretaigne a papegaux deux vielles cousches de chesne et deux demis cielz et dossiers l’un de toille noire et l’autre pare telz quelz item un vielz coffre de noier tel quel item XXII cuves cinq seaulx et sept formes. »
81 O. Martin, « Sentences civiles… », art. cité, no 262, 6 juillet 1454 : Adam Binet doit 24 s. p. à Estienne Goe qui a fait arrêter une queue et un muid de vin vermeil. En fournissant une caution bourgeoise (un pleige) ou « main plaine de biens meubles », c’est-à-dire en offrant d’autres biens, il pourra retrouver son vin.
82 Sur ce point, voir G. Todeschini, Richesse franciscaine. De la pauvreté volontaire à la société de marché, Paris, 2008, qui cite un sermon de Bernardin de Sienne, le sermo 43 de contractibus et usuriis : si quelqu’un est dans la gêne parce qu’il n’a pas su gérer convenablement ses ressources, plutôt que de s’endetter et de mettre en gage le peu qui lui reste, il vaut mieux qu’il fasse faillite, de telle sorte que sa banqueroute et la vente aux enchères des vestiges d’une richesse passée remettent en circulation au moins une partie de ses ressources gaspillées.
Auteur
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne UMR 8589/Laboratoire de médiévistique occidentale de Paris
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