Le village médiéval et son environnement
| , ,Le finage
« Il est bien difficile de tuer un village » : l'exemple champenois de Montfélix
Texte intégral
- 1 J.-M. Pesez, Sources écrites et villages désertés, dans Villages désertés et histoire économique, X (...)
1Montfélix est l'un de ces villages désertés qui ont précocement attiré l'attention de Jean-Marie Pesez, auquel nous empruntons cette réflexion sur la difficulté de « tuer un village », tant le phénomène est complexe1. L'établissement perd, dès les XIIIe et XIVe siècles, son château et son prieuré mais, placé à la tête et au cœur d'une riche paroisse, il s'étiole pendant six siècles. Le village n'est plus – c'est celui de Chavot, à quelque 600 m de distance, qui a pris la relève – mais son église, dédiée à saint Martin, se dresse toujours en position dominante sur un replat de la côte d'Ile-de-France qui s'avance, ici, en éperon à 4 km au sud-est d'Épernay, à l'interfluve des vallons du Cubry et du Darcy (Fig. 1). L'édifice, doté à son entrée d'une tour-clocher des XIIe-XIIIe siècles, puis d'une nef et d'un chœur du XVIe siècle, occupe un emplacement exceptionnel qui contribue pour une large part à expliquer les aléas du site. Mais l'enquête menée sur la longue durée en puisant dans un stock documentaire, sinon complet, du moins assez diversifié, montre que d'autres éléments interfèrent.
- 2 A. Renoux, Le château des comtes de Champagne à Montfélix (Xe-XIIIe siècle). Bilan d'une expérience (...)
2Montfélix et Chavot relèvent principalement, au Moyen Âge et à l'époque moderne, de quatre autorités. La première est celle du comte de Champagne et de ses héritiers, qui se démettent progressivement de leurs biens. La deuxième émerge au XIIe siècle et ne cesse ensuite de croître : c'est celle des proches seigneurs de Brugny qui ont laissé d'abondantes sources écrites des XIVe et XVe siècles. Les deux dernières sont les seigneuries ecclésiastiques des abbayes de La Charmoye (Cisterciens) et de Saint-Martin d'Épernay (chanoines de Saint-Augustin), moins riches localement en archives. L'étude archéologique menée parallèlement a été précieuse. Les fouilles du château que les comtes de Champagne érigent à Montfélix, dès le Xe siècle, ont permis de dater l'occupation qui se développe au sommet du coteau, surplombant de 40 à 60 m de dénivellation l'église Saint-Martin. L'examen du terroir, fondée sur une enquête au sol doublée d'une étude microtoponymique et d'un examen des cadastres, photographies et relevés anciens, contribue à éclairer l'environnement2. Seules les cartes modernes ont été décevantes.
- 3 J.-M. Pesez, E. Le Roy Ladurie, op. cit. à la note 1, p. 214 sq.
3La France est peu touchée, globalement, à la fin du Moyen Âge, par les désertions définitives. Le tissu villageois y est ancien et la paroisse tient bon. Ce sont les marges ingrates, tardivement mises en valeur, et les établissements les plus récents et les moins peuplés qui font essentiellement les frais du phénomène. La Champagne offre ceci d'original que nombre d'abandons y remontent à l'époque moderne et doivent beaucoup aux ravages des guerres qui accablent la région, au XVIIe siècle notamment3. Montfélix n'est pas localisé dans une zone répulsive, bien au contraire, et l'abandon final y est très récent : il y a encore des maisons sur les photographies aériennes de 1936. L'exemple ne serait donc pas représentatif ? Pour tenter de décrypter ces problèmes et d'éclairer la lente agonie du site, la recherche a été élargie à l'étude du micro-terroir si caractéristique que constituent le Val du Cubry et son arrière-pays de “montagne”.
Une coulée de villages et de hameaux
4Le complexe occupe un site favorable éminemment stratégique : il est en position dominante dans une riche zone de contact sur un axe majeur de peuplement et de communication.
5La côte d'Île-de-France surplombe assez abruptement d'une centaine de mètres, à l'est, la Champagne pouilleuse, qui forme un monde à part avec ses amples et mornes horizons céréaliers et ses villages groupés. À l'ouest, se développe le plateau de la Brie champenoise, dont les hautes terres (200 à 240 m d'altitude) ont longtemps été considérées comme peu hospitalières, car trop argileuses et trop humides. C'est le domaine des forêts que parsèment encore de nombreux étangs et que viennent trouer de vastes clairières où alternent labours et prairies. L'habitat y juxtapose de grosses fermes isolées et de rares villages. Entre ces deux secteurs, les coteaux offrent, à l'inverse, une grande diversité et un aspect particulièrement riant. Le réseau hydrographique y a créé de belles percées et des tracés dentelés. À 5 km au nord de Montfélix, la Marne a creusé une large échancrure qui rompt d'est en ouest la cuesta et ouvre, d'un côté, sur Paris et, de l'autre, sur le Châlonnais et l'Est. La ville d'Épernay, que les Montféliciens dominent, est longtemps restée un nœud vital de communication. Elle contrôle l'axe est-ouest et verrouille, par ses ponts, les liaisons nord-sud (Reims-Troyes). Au pied même de Montfélix, c'est la rivière du Cubry et ses affluents qui ont dégagé une courte et attrayante vallée, sorte de petite oasis particulièrement peuplée, qui prend la côte par le travers (L = 5 à 6 km et 1 = 2 km). Sept villages s'y égrènent (Fig. 1). Ils sont logés soit au fond du val, non loin du ruisseau (Moussy, Vaudancourt...), soit à mi-pente ou au tiers supérieur de la pente, là où l'eau sourd ou du moins est proche (Brugny, Chavot-Montfélix et Courcourt). La côte aligne de bas en haut : des labours et éventuellement des prairies, puis des vignobles et enfin des forêts au sommet des versants et sur les revers de plateaux. De nombreuses voies unissent le val à la “montagne”. La vallée du Cubry n'est pas un cul-de-sac. Elle est séparée de la plaine champenoise par la vallée du Darcy et la montagne d'Avize.
- 4 Pour respecter les impératifs éditoriaux sur le plan quantitatif, on se permettra, dans cet article (...)
6Cette zone de contact, aux riches perspectives économiques, est aussi un secteur de marche. Deux peuples celtiques, voire trois, s'y côtoient : les Tricasses, au sud, et les Rèmes, au nord, qui contrôlent les Catalaunes de l'est. La limite avec les Suessiones est décalée vers l'ouest et se perd dans les forêts briardes. Au Moyen Âge, la situation est parfaitement répercutée : du haut de la motte du château de Montfélix (223 m) le champ de vision s'étend à deux diocèses et trois pagi4. Le site relève du siège épiscopal de Soissons et du comté d'Omois, mais l'on y aperçoit, sans peine, les terroirs du diocèse de Reims (Épernay) et ceux des pagi du Raincien (Épernay) et du Vertusais (Cuis), dont les limites passent respectivement à l'entrée – ou peu s'en faut – du val du Cubry et au pied du flanc oriental de l'éperon qui sert en partie d'assiette au ressort paroissial.
7Ces divers atouts n'ont pas toujours joué à l'avantage des autochtones, mais il est certain qu'ils ont créé des conditions spécifiques et très tôt attiré l'implantation humaine. La diversité des terroirs a engendré un peuplement et une mise en valeur contrastés.
- 5 E. Nègre, Toponymie générale de la France, 3 vol., Genève, 1990-1991-1992, I, p. 163 (sparno, épine (...)
- 6 Sur tous ces problèmes archéologiques voir : E. Schmit, Répertoire abrégé de l'archéologie du dépar (...)
- 7 L'information vient surtout de Flodoard, Historia Remensis ecclesiae, MGH, ss, ΧΙΠ, p. 409-599 et A (...)
8Ici comme ailleurs, les vallées ont précocement constitué des axes majeurs de peuplement. La Marne est l'une de ces artères vitales jalonnée d'anciennes traces d'humanisation. Le nom même d'Épernay est d'origine gauloise5. Quelques trouvailles y attestent une occupation durant la Préhistoire et l'Antiquité6. C'est aux époques mérovingienne et carolingienne le centre d'un riche domaine de l'Église de Reims. Il est, au Xe siècle, désigné tour à tour sous l'appellation de villa, vicus ou castrum (et ses synonymes)7, et c'est un enjeu majeur dans les rivalités qui opposent princes et rois. Au XIe siècle, c'est une importante résidence comtale.
- 8 E. Nègre, op. cit. à la note 5, I, p. 444 et 575.
9Les vallées du Cubry et du Darcy, et dans une moindre mesure le plateau qu'elles délimitent à leur confluence, sont touchés par cette précoce vague d'implantation, mais les trouvailles révélatrices d'une occupation préhistorique, protohistorique et antique ne se signalent ni par leur densité, ni par leur caractère exceptionnel. Quelques toponymes de fond de vallée peuvent remonter à la période gallo-romaine (Moussy)8.
- 9 Id, Ibid., Π, p. 761, 908 et 990 ; Flodoard, op. cit. à la note 7, Π, cap. X.
- 10 Des six ensembles du Xe siècle qui sont évoqués dans le val et ses abords, quatre (villae et châtea (...)
10Pour le début du Moyen Âge, le témoignage le plus probant reste celui des fouilles du château de Montfélix sous lequel est apparu un petit habitat (fortifié ?) en bois de la fin IVe-début Ve siècle, probablement lié au phénomène des grandes invasions. Deux indices confirment la présence d'une occupation dans le val et à ses abords. Il s'agit des toponymes de Brugny et de Vaudancourt, formés à partir de noms d'hommes germaniques, et de la mention dans Flodoard, pour la seconde moitié du VIIe siècle, d'une villa de l'Église de Reims à Monthelon (Mons Allonis)9. Doit-on faire remonter la fondation de Saint-Martin de Montfélix à la période mérovingienne ? Peut-être, mais cela reste à prouver. La dédicace est ancienne et le toponyme (Morts Felicis) a pu se former à cette époque. Sa genèse est identique à celle de Monthelon avec mons (montagne) en préfixe, suivi d'un nom d'homme, à cette différence près qu'Allo(n) est un nom germanique alors que Félix est un nom antique. Ces formations toponymiques remontent généralement au haut Moyen Âge. Ce qui frappe localement, c'est leur relative abondance, puisque apparaissent, à proximité, Montbayen et Morangis. L'habitat de la période est placé en sentinelle, ce qui invite à considérer que l'implantation d'une part notable de ces sites est liée à un contexte troublé et nous reporte peut-être plutôt au IXe et surtout au Xe siècle. La période carolingienne est mieux éclairée. Au Xe siècle, le val et ses abords forment un vrai bastion frontalier pour les Herbertiens, comtes de Vermandois et d'Omois mais aussi abbés laïques de Saint-Médard de Soissons, qui ambitionnent d'étendre leur puissance territoriale vers Reims où ils se heurtent aux archevêques – quand ils n'ont, du moins, pas mis la main sur la charge – et aux Carolingiens10. La région sparnacienne et ses environs est un enjeu crucial dans cette progression. C'est l'un des pôles majeurs d'affrontements, comme en témoigne la densité de châteaux qui y sont érigés par les uns et les autres (Chausot, Châtillon, Épernay, Mareuil et Montfélix).
- 11 Flodoard, op. cit. à la note 7, années 952 et 954.
- 12 Contexte champenois des Xe-XIe siècles : M. Bur, op. cit. à la note 7, p. 87 sq
- 13 H. d’Arbois de Jubainville, Histoire des ducs et des comtes de Champagne, I, Paris, 1869, p. 482 ; (...)
11Les circonstances de la création de la fortification de Montfélix sont bien connues. C'est en 952 que les fils du comte Herbert II, Herbert et Robert, érigent une forteresse11. L'enjeu est Épernay que les Herbertiens réussiront d'ailleurs à obtenir. Ce château de la seconde moitié du Xe siècle a été fouillé. S'insère-t-il dans un tissu antérieur structuré ? Il est difficile d'en juger à l'heure actuelle, mais il est certain que le contexte avec les incursions normandes, comme celle de 882, et mieux encore les raids hongrois qui s'exercent localement, en 937 notamment, créent des conditions favorables à la création d'un établissement de hauteur fortifié, à vocation temporaire ou non. Quoiqu'il en soit, l'ouvrage se mue rapidement en un pôle de commandement fixe, car il est bien situé au sein des possessions comtales à un moment où les comtes de Champagne portent leurs ambitions vers le nord et font de la Marne et d'Épernay un des pivots de leur politique12. Deux des milites castri de Montfélix sont mentionnés en 1042 et le site devient le centre de l'une des plus petites et des plus anciennes châtellenies comtales ; en 1172 : 22 vassaux en dépendent dont 13 sont tenus à Testage ou à la garde. Le castrum est doté d'une collégiale à Saint-Aignan transformée en prieuré placé sous la tutelle de Saint-Martin d'Épernay, en 113513. C'est donc un centre politique, administratif et religieux. Est-ce un centre de peuplement ?
- 14 Voir les critères donnés par R. Fossier, Villages et villageois au Moyen Âge, Paris, 1995, p. 8.
12À partir de quand peut-on parler du village de Montfélix ? Tout dépend bien sûr d'abord du sens que l'on donne au terme. Sans entrer dans la polémique14, disons que l'on entendra par “village” tout ce qui, à partir du XIIe siècle, est désigné, hors contexte urbain, sous l'appellation de villa, (ville, village), tout en sachant pertinemment que ces villages ne sont parfois que des hameaux ; une réalité qui n'émerge, très timidement, dans nos sources qu'à partir du XVIe siècle et renvoie à de petits établissements inorganisés, pour lesquels on serait bien en peine de fixer un seuil quantitatif valable pour toute la période. On ne mettra donc, souvent, guère plus de précisions sous le mot village que ne le font, par exemple, les receveurs seigneuriaux de Brugny aux XIVe et XVe siècles qui confondent, sans état d'âme, tant sur le plan quantitatif que structurel, village et hameau.
- 15 A. Longnon, op. cit. à la note 13, I, no 1033 et 6162 et Π, p. 137, no 3.
- 16 Id., Ibid., I, no 6158 et 6162 ; ID., Rôles des fiefs du comté de Champagne sous le règne de Thibau (...)
13Concrètement, le “village” de Montfélix est évoqué en 1172 sous l'appellation de villae. L'emploi du pluriel est curieux ; a-t-on une structure polynucléaire ou ne s'agit-il que d'une erreur de transcription ? Au XIIIe siècle, la “ville” est clairement évoquée et l'on en possède même un descriptif daté de 1276-127815. Ne sont pris en compte que les biens qui relèvent directement du pouvoir comtal. Il ne s'agit donc que d'une estimation minimale. Le comte détient à Montfélix des cens sur 13 maisons. L'évocation d'un « hébergement », de deux celliers, d'une grange, de bains, de vieux « estauz » et d'« estaus au merciers » (marchands) donne un certain dynamisme, une certaine consistance et une vie inattendue à cette petite localité. D'autres documents complètent l'information. Vers 1249-1265, quatre au moins des (ex ?) milites castri possèdent à Montfélix une domus qui, étant donné la date des mentions et la superficie réduite de l'ouvrage, a peu de chance d'être localisée dans la forteresse16. Avec un minimum de dixsept habitations, on dépasse le stade du hameau.
- 17 M. Bur, Châteaux et peuplements dans le Nord et l'Est de la France au Moyen Age, dans Châteaux et p (...)
- 18 1526 : masure « tenant au grand chemin » (AD Marne 16 H 34). Le village moderne est autour de l'égl (...)
- 19 A. Nicaise, op. cit. à la note 13, Π, p. 23, 27, 113 et 130.
14Où est situé ce village et quel en est l'élément fixateur ? En Champagne, les châteaux du Xe siècle n'ont pas souvent réellement vocation à cristalliser le peuplement17. Mais l'installation d'un pôle fixe de commandement, dès le XIe siècle au moins, a pu jouer ce rôle. Simplement, la topographie se prête mal au développement d'un lien organique entre village et forteresse car les pentes sont abruptes au sommet de l'éperon. On y voit cependant quelques restes maçonnés que la céramique invite à dater des XIe-XIIe siècles. Ce sont sans doute les vestiges de la collégiale, puis du prieuré, qu'un texte de 1145 situe in castello (voir infra), ce qui n'est pas à prendre au pied de la lettre ; on y reviendra. Le village, lui, est plus bas à environ 300 m de l'extrémité sud de la fortification, autour de l'église, sur un replat et « le long du grand chemin » qui passe au pied du « moustier » ; c'est du moins ce que suggèrent des données plus récentes'18. L'établissement peut remonter au moins au XIe siècle car, en 1032, le comte Eudes de Champagne remet l'autel Saint-Martin de Montfélix à l'abbaye du même nom située à Épernay. L'église est citée en 1145. Plusieurs lieux de culte en dépendent alors : Brugny, Vaudancourt et Vernai (Vinay ?), mais aussi, et cela est attesté pour la fin du XIIe siècle, Monthelon et Molins19. Aurait-on l'une de ces églises-mères de fondation ancienne et régnant sur un ample ressort paroissial ? C'est possible car, vu sa dédicace, l'édifice peut être antérieur au castrum du Xe siècle. Et dans cette hypothèse ce pourrait être un précoce élément fixateur, mais resterait à savoir dans quel contexte (domanial ?) et sous quelle forme.
- 20 AD Marne 16 H 34 (1237 et 1266) ; A. Longnon, op. cit. à la note 13, I, p. 399, no 166.
15Le reste du terroir montfélicien est relativement bien documenté. Au XIIIe siècle, il y a deux autres petits centres de peuplement qui n'en sont apparemment qu'au stade du hameau. L'un est à Chavot (locus), à mi-pente du côté est du château. Il y a quelques maisons. L'une d'elles au moins est dotée d'un pressoir et d'un verger dont héritent les moines de la Charmoye. Le second est mentionné sous l'appellation de « rue des Chauffours » (vicus). Ce chemin longe à mi-pente le coteau ouest qui borde la forteresse. On y voit des maisons et une tuilerie vers 1274-127520. En sorte que la fortification est entourée sur trois côtés par une auréole de peuplement qui a son cœur à l'emplacement de l'église Saint-Martin et s'égrène à mi-pente des versants qui entourent l'éperon. La « vallée de Montfélix » est souvent évoquée. C'est le val des Chauffours mais peut-être aussi, en partie, celui de Moussy, en bas de pente, à 1 km au nord, un autre centre de peuplement qui relève de la paroisse.
- 21 A. Longnon, Dictionnaire topographique du département de la Marne, Paris, 1891.
- 22 AD Marne 16 H 32.
- 23 A. Nicaise, op. cit. à la note 13, II, p. 152.
16D'autres villages et hameaux parsèment la vallée du Cubry. Ils forment une véritable nébuleuse tant ils sont rapprochés les uns des autres. Toutes les localités et de nombreux écarts connus à ce jour sont en effet évoqués dès le XIIIe siècle sinon avant (Ablois, Brugny, Courcourt, Le Sourdon, Montbayen, Moussy, Pierry, Saint-Julien, Vaudancourt, Vinay...)21. Brugny est assurément après Montfélix, et si on laisse de côté Ablois et sa maison forte, l'un des ensembles les mieux structurés et les plus prestigieux du val. Le village est doté d'une mairie. La seigneurie est aux mains de la puissante famille de Châtillon, dont le berceau est le château du même nom, en aval d'Épernay. Le lignage intervient localement dès 1162-1176. En 1185, Guy et son frère Gaucher donnent à la Charmoye leur bois du plateau à essarter22. Une grange fortifiée, évoquée en 1209 et appelée par la suite la Grange-leComte, y est implantée au cœur de la réserve. La famille érige, dès le début du XlIIe siècle au moins, une domus située à l'écart du village, à mi-pente d'un vallon riche en sources23. Les accensements sont rassemblés dans le val, mais les villageois ont des usages dans les pâtis du plateau.
17La mise en valeur du plateau a connu une autre genèse. L'ensemble est resté longtemps forestier. Des traces d'occupation pré et protohistoriques mais aussi antiques y ont été repérées, mais ce n'est pas un pôle majeur de l'humanisation. Les défrichements des XIIe et XlIIe siècles, menés sous l'impulsion des seigneurs laïques (comtes de Champagne, seigneur de Brugny...) et des nouvelles communautés religieuses (Cisterciens de La Charmoye...), entraînent un autre type d'occupation du sol articulé sur la mise en place de granges seigneuriales isolées (Le Jard, Le Bétin, La Grange-le-Comte...), placées au sein d'amples clairières forestières (Fig. 1).
18L'image qui se dégage de ce terroir au XlIIe siècle est claire et cohérente. Elle oppose la vallée densément peuplée, domaine des accensements, des “villages” et des maisons fortes, au plateau, domaine du saltus et des vastes granges seigneuriales. Le tout est dominé par le castrum de Montfélix. L'impression d'ensemble est celle d'une certaine aisance dans un cadre densément et rationnellement exploité.
Déclin, redistribution des pouvoirs et du peuplement
- 24 A. Longnon, op. cit. à la note 13, I, no 2253, 3229, 6134 et 6136 ; ID., op. cit. à la note 16, art (...)
- 25 A. Longnon, op. cit. à la note 13, II, Le domaine comtal, Paris, 1904, p. 303.
19C'est pourtant au XIIIe siècle que la situation commence à se détériorer à Montfélix. La châtellenie décline brutalement. Au début du siècle, il n'y a plus qu'un vassal et l'ensemble est absorbé par la châtellenie d'Épernay avant 1214. Les derniers services de garde mentionnés remontent à 1249-125224. Parallèlement, l'activité au sein du château décroît et l'ouvrage est démantelé. Aucun élément des XIVe et XVe siècles n'a été exhumé sur le site qui relève de la puissance en charge d'Épernay, à la suite des comtes, et est inclus dans le « bois ou buisson » de Montfélix25. En fait, le complexe est victime d'une triple concurrence : celle d'Épernay, bourg en pleine expansion et grande résidence comtale donnée en douaire à Blanche de Navarre, en 1199 ; celle de Montaimé, ce nouveau château que la régente Blanche érige vers 1210, sur une butte témoin près de Vertus ; et celle de Brugny, dont le seigneur, bouteiller comtal et comte de Saint-Pol, se révolte en 1230 contre la puissance comtale et dont la domus est fortifiée dans le courant du XIIIe siècle.
- 26 A. Longnon, op. cit. à la note 13, I, no 1033, 1856, 2252-2253, 3229, 5280, 6116, 6119, 6133, 6134, (...)
20C'est volontairement que les comtes se désengagent à Montfélix. Avec la disparition du château, le village perd son centre politique et administratif, mais il perd aussi ses milites qui, ici comme ailleurs, se reportent vers leurs terroirs originels. Le mouvement a pu contribuer à déstabiliser la localité. Au XlIIe siècle, le terroir est fragmenté en une poussière de fiefs dont l'intérêt décline avec le démantèlement castrai. Huit lignages, extérieurs pour la quasi totalité, se partagent les lieux. Aucun d'eux n'a le titre de dominus de Montfélix26. D'où les restructurations qui s'opèrent ensuite et dont bénéficient, au terme du Moyen Âge, le seigneur de Brugny, La Charmoye et le prieuré Saint-Aignan. À l'époque moderne, le « seigneur de Chavot » est le détenteur de Brugny et ce sont les religieux de la Charmoye qui détiennent le secteur de l'ancienne motte. En favorisant l'émiettement féodal, en démantelant la forteresse et en évitant de la confier en fief à l'un de ses vassaux, le comte prive les Montféliciens d'un support immédiat de remplacement apte à renforcer un noyau villageois en difficulté, celui de la seigneurie châtelaine.
- 27 AD Marne 2 J (censiers et/ou comptes de 1367-1381, 1417, 1461, 1470, 1473-1475, 1488-1490, 1490-149 (...)
21Ensuite, les épreuves s'enchaînent. Les censiers et les comptes relatifs à Brugny et divers autres témoignages éclairent, à partir de 1367 et surtout au XVe siècle, les crises puis les ébauches de reprise qui, à l'instar de ce qui se passe en France, affectent le terroir au terme du Moyen Âge. La zone a été particulièrement sinistrée. Les ruptures chronologiques, qui apparaissent, correspondent aux dates de rédaction des documents. La réalité peut donc, bien sûr, être décalée dans le temps, car nos séries sont discontinues (1367, 1417..,)27. Comparée à celle du XIIIe siècle, la situation qui se dégage est curieuse. Elle laisse peu de place à Montfélix, alors même que l'on est en plein dans son ressort territorial. Le fait tient à la structure de la seigneurie mais pas uniquement.
- 28 AN P 182, f. 152.
- 29 AN P 182, f. 300.
22En 1362, la seigneurie de Brugny s'exerce sur les “villes” de Brugny, Courcourt, Chavot, Vaudancourt et Vinay, et sur un certain nombre de terres et de droits à Moussy et ailleurs28. Montfélix apparaît, en 1367 notamment, mais jamais en tant que village. Disons de suite que ce n'est pas l'indice d'une désertion précoce. La “ville” est mentionnée dans un aveu de 139529. Simplement, le seigneur de Brugny n'y est pas le principal détenteur de biens et de droits. Mais cet effacement est symptomatique d'un affaiblissement et d'une recomposition. Le terroir dit de Montfélix éclate et se rétrécit en tant que tel, même si la paroisse conserve, elle, son extension primitive. Chavot s'y individualise en force. Ce village est signalé comme relevant de Brugny, dès 1362, mais l'ensemble ne prend vraiment corps dans les censiers qu'à partir de 1417 et son importance ne cesse ensuite de croître. C'est sans doute l'effet d'une restructuration consécutive au désengagement des héritiers comtaux et des sires en charge de fiefs locaux.
- 30 Nous reprenons ici les chiffres de G. Noël, La seigneurie rurale de Brugny aux XIVe et XVe siècles,(...)
- 31 AD Marne 2 J 94, f. 13.
23La crise frappe localement avec une grande violence. La seigneurie connaît une énorme et durable ponction démographique. Le premier chiffre approximatif de feux que l'on peut restituer, en s'appuyant sur les patronymes, ne remonte qu'à 136730. Il est postérieur aux ravages de la peste du milieu du XIVe siècle et traduit donc, sans doute, déjà une baisse notoire. Le nombre total de feux de l'ensemble des lieux soumis à l'autorité du seigneur est de 230. Brugny pour sa part en compte 34 : c'est le groupement le plus important, suivi de près par Vinay. Par comparaison, ces deux localités ont respectivement, en 1689-1691, 70 et 54 feux (voir infra). Même après les ravages de la peste, ces deux petits villages paraissent encore finalement assez peuplés. Ensuite, après 1367, la baisse est constante jusqu'en 1461. Après avoir atteint un total de 140 feux en 1417, on arrive au plus bas en 1461 avec 80 feux seulement. Il manque les maisons qui relèvent des autres seigneurs, mais la baisse est tout de même spectaculaire puisqu'elle est d'environ deux tiers par rapport à 1367. Vaudancourt arrive quantitativement en tête devant Brugny et Vinay. Les habitants de Chavot sont alors beaucoup plus souvent cités. Le nombre de foyers s'y rattachant rejoint pratiquement celui de Vaudancourt. La progression de Moussy est elle aussi notable. Ensuite la tendance s'inverse à partir de 1474 (95 feux). Chavot dispose alors d'au moins 22 feux et Vaudancourt de 14. À titre comparatif, en 1689-1691, l'ensemble Chavot-Montfélix a 59 feux et Vaudancourt-Courcourt 44. Les autres localités stagnent. Au terme du XVe siècle, la seigneurie, qui a pourtant élargi sa domination (Chavot ?), n'a que la moitié des feux de 1367. Les comptes de 1488-1490 évoquent encore ces terres en « savarts » « faute de peuple »31. Mais la reprise, quoique lente, s'amorce (1488 : 101 feux ; 1490 : 112). Chavot reste le plus peuplé suivi par Brugny et Vaudancourt puis Vinay. Avec plus de 20 feux, ce n'est plus un hameau mais un village doté d'une identité propre.
- 32 G. Noël, op. cit. à la note 30, p. 68-71.
24Du point de vue qualitatif, cette chute démographique s'accompagne d'un grand renouvellement de la population. Cette mobilité n'est propre ni au secteur, ni à la Champagne (Bordelais...), mais elle est ici très ample. Seuls sept des patronymes de 1367 se retrouvent en 1490, mais la majorité des noms de familles connus en 1474 réapparaît à la fin du XVe siècle32. La stabilisation est bien en marche, mais la reconstruction s'est incontestablement appuyée sur l'arrivée de nouveaux venus. C'est là, avec “l'allant” démographique de Chavot, l'un des points notables pour la compréhension de l'évolution.
- 33 Id., Ibid., p. 105 sq.
25La crise économique frappe avec la même brutalité. Les recettes seigneuriales de 1367 sont relativement bonnes, si l'on considère que la crise est en place depuis quelques décennies, dans la mesure où elles ne sont que légèrement déficitaires. Un siècle plus tard, la situation est catastrophique. En 1474, les recettes sont au plus bas. Les équipements de la réserve (château, moulins, pressoirs) sont en ruine et le restent encore, pour nombre d'entre eux, au terme du XVe siècle. Les comptes de 1488-1491 témoignent cependant d'une amorce de reprise, mais on est encore loin d'atteindre le niveau de 136733. Le mouvement frappe par sa lenteur et sa médiocrité.
- 34 Diagramme réalisé à partir des chiffres donnés par G. Noël, op. cit. à la note 30 et J. Charles, La (...)
- 35 Ils sont ici anormalement majorés par le fait que les superficies des jardins et des prés sont infé (...)
26Le tableau de l'évolution de l'occupation du sol, des accensements entre 1367 et 1491, reflète bien ces évolutions et montre quels sont les secteurs qui ont le plus souffert (Fig. 2)34. Le fondement de l'économie est une classique polyculture qui associe vignes, cultures de céréales et élevage. Au XVe siècle, la vigne a été plus touchée que la céréaliculture, car elle est beaucoup plus lente à se reconstituer et, de ce fait plus vulnérable. Les savarts sont à leur maximum d'extension en 1474 et la reprise qui s'ébauche ensuite donne une part notable aux prés et aux jardins. Ces deux points n'ont rien d'original (Thiérache...)35. Le développement de l'élevage est stimulé par la proximité de la ville d'Épernay. Celui des jardins est fréquent en temps de crise. Mais la polyculture reste de mise, même si les terroirs voient se développer des cultures plus rentables et plus spéculatives. Le diagramme des accensements de Chavot et Courcourt en 1490-1491 apporte quelques nuances (Fig. 3). Dans ces deux ensembles, c'est surtout la céréaliculture qui s'est effondrée. La part des savarts montre que la crise à Courcourt est plus durable. Chavot par contre repart et, sans doute stimulé par la demande urbaine et la perspective de prix intéressants, le village mise en partie sur le vin pour opérer un redressement. C'est très vraisemblablement l'un des éléments de l'“élan” qui l'affecte, comparativement, à la fin du XVe siècle. Il y a donc au sein de cet ensemble des différences tant dans la crise que dans la reprise.
- 36 Châlons, BM, Registre des conclusions du Conseil de ville, BB 1, p. 323 et 349 ; AD Marne 2 J 1, li (...)
- 37 AD Marne 2 J 92, f. 4, 2 J 94, f. 6 et 12.
27Ces évolutions sont classiques mais l'aspect tardif et médiocre de la reprise tout comme l'ampleur de la saignée démographique et des remplacements de population qui s'opèrent méritent réflexion. Intervient ici, en plus des données “nationales” un facteur propre à ce micro-terroir. Particulièrement rude, localement, a été l'impact des guerres. Au XIVe siècle, Épernay subit maints assauts et maintes épreuves (1358, 1368, 1373, 1420, 1432...). La forteresse de Brugny est directement concernée par les événements qui suivent le traité de Troyes, en 1420. C'est un repaire de routiers anti-Français, une base de pillages d'où rayonne une « importante garnison » dont on craint les attaques jusqu'à Châlons. Cette redoutable occupation est attestée dès 1420 et prend fin en 1422 avec la reddition du château36. Les censiers de Brugny sont les censiers d'une zone sinistrée. Il ne faut dès lors plus trop s'étonner du dépeuplement et de l'état de délabrement qui règne encore au terme du XVe siècle. La reconstruction des équipements de la réserve est différée. En 1473-1475, le château, qui « a été depuis longtemps brûlé, ruiné, démoli, détruit par le fait des guerres et, de présent, il n'y a plus que des murailles », est déserté. En 1488-1489, la Grange-le-Comte ne rapporte rien car elle est « démolie, ruinée et détruite du fait des guerres ». Et il en est de même des fours banaux et des moulins37. Mais, en 1498-1499, on commence à faire des travaux de restauration au château et la population est affectée d'un certain dynamisme, notamment celle de Chavot.
28Reste le problème de Montfélix. L'établissement ne disparaît pas, pas définitivement du moins, puisqu'il est mentionné sous l'appellation de « ville » ; un terme qui ne doit toutefois pas nous abuser. En 1395, date du document incriminé, Les Chauffeurs sont qualifiés de village, or le site n'a jamais dépassé le stade du hameau. Touché par la crise, à l'égal des autres centres de peuplement, il est certain cependant que le complexe n'a pu que s'affaiblir. Deux éléments supplémentaires y contribuent.
- 38 A. Nicaise, op. cit. à la note 13, Π, p. 183-184.
29Le premier est un coup dur, spécifique au lieu : Montfélix perd son prieuré. Ce dernier a laissé peu de traces. Son prieur Arnoul envoie, en 1379, une longue lettre à l'abbé de Saint-Martin d'Épernay, dont il relève, pour se plaindre de la situation de l'établissement. Situé « au sommet du mont », il est constamment battu par le vent et les intempéries, ce qui est préjudiciable à la santé, et il demeure passablement inaccessible, loin des terres cultivées, ce qui rend difficile l'exploitation et la gestion38. Ce petit ensemble isolé n'a plus guère de raisons, après la destruction du château, de rester en un site qui a surtout des atouts défensifs et se révèle à l'usage peu commode, vu la raideur des pentes qui l'entourent. Le prieur demande et obtient le transfert du complexe en contrebas, vers Moussy, là où il a des biens. La paroisse garde donc son prieuré, mais l'agglomération perd le dernier des éléments structurants liés au château. Le transfert affaiblit le village mais c'est aussi l'un des symptômes de son affaiblissement. Il contribue à expliquer l'essor de Moussy et de ses abords.
30Le second point, propre à minimiser la part de Montfélix au sein de la paroisse, se lit dans les censiers de Brugny au moment de la reconstruction. Au XIIIe siècle, le territoire de Montfélix est ample. Il inclut Chavot, Les Chauffours, la « Vallée » et des terres sur le plateau. Paroisse et terroir se confondent, même si deux lieux-dits dotés de noyaux de peuplement émergent, à savoir Chavot et Les Chauffours (sans oublier Moussy). À la fin du Moyen Âge, l'ensemble a éclaté et le bloc montfélicien s'est rétréci devant la vitalité de ses voisins. Chavot, simple locus au XIIIe siècle, arrive au premier plan. Son finage s'est individualisé. Il est bien structuré, vaste et densément exploité. Il correspond au ressort cadastral du XIXe siècle avec en plus des extensions sur le rebord du plateau et en moins les abords de l'église SaintMartin qui appartiennent encore – mais pour relativement peu de temps – au terroir de Montfélix. On y retrouve les trois quarts des lieux-dits connus au XIXe siècle. Il y a eu, avec la remise en culture des « brousses », un phénomène d'absorption de finage vacant au bénéfice d'un noyau de peuplement plus entreprenant. On manque de sources, mais le phénomène a dû se reproduire aux Chauffours et à Moussy.
- 39 G. Noël, op. cit. à la note 30, p. 49.
- 40 J.-M. Pesez, E. Le Roy Ladurie, op. cit. à la note 1, p. 156-157 (mais on n'a pas ici le témoignage (...)
31Cette conquête de terroir s'accompagne d'une redistribution du peuplement et, si l'on se réfère aux données suggérées pour le XIIIe siècle, d'une progression démographique. Cette percée tient aux conditions de la reconstruction. Les nouveaux venus, ceux qui assurent la reprise et qui sont nombreux dans cette seigneurie, n'ont aucune raison sentimentale de s'installer à Montfélix plutôt qu'à Chavot. Leur intérêt est d'occuper les meilleures places aux meilleures conditions. Or Chavot est, comme l'indique son nom, dans un « petit creux » (cavus) qui le place à l'abri des vents d'ouest. Ce n'est pas le cas de Montfélix, qui, de toute la vallée, est probablement le site d'habitat le plus exposé. Et puis le seigneur de Brugny est actif. Son intrusion massive dans le secteur indique qu'il a sans doute bénéficié des restructurations évoquées ci-dessus. Il intervient efficacement en matière de réaccensements39, en proposant des exemptions d'arriérés, des « amodérations » de cens et des baux perpétuels. Il donne une impulsion économique en accensant les terres de la réserve. Par comparaison, à Montfélix rien ne dit que l'on ait l'équivalent ; bien au contraire même, si l'on s'en tient à l'attitude du prieur. Les conditions y sont a priori moins favorables. Lors des restructurations qui marquent la reprise, s'installer à Chavot a pu apparaître comme plus intéressant pour un nouveau venu. Le mouvement serait finalement un peu comparable à celui que l'on observe en Alsace où certaines communautés villageoises très entreprenantes absorbent les terroirs des ensembles voisins affaiblis en limitant ainsi les possibilités de retour40.
32Le hameau de Chavot est devenu village. Par contre en ce qui concerne Montfélix, on est dans l'expectative faute de sources mais, si l'on en juge par la suite de l'évolution, c'est sans doute l'inverse qui s'est produit. Mais l'ensemble n'a pas sombré et d'ailleurs, malgré l'ampleur de la crise, aucun des écarts et aucun des habitats groupés du val et même du plateau n'a disparu définitivement. Le hameau des Chauffeurs tient. Il y a des chutes brutales de population, des abandons temporaires, concernant les habitats isolés notamment, mais on retrouve ensuite les mêmes centres de peuplement. Le phénomène global majeur n'est pas celui d'une concentration drastique au bénéfice de certains villages, mais plutôt celui d'une redistribution modulée.
Une fin en deux temps
- 41 Sur tout ceci, cf. les Registres... de la ville d'Épernay de 1540 à 1749, dans A. Nicaise, op. cit.(...)
33Après un court répit et une reprise, dont témoigne la reconstruction d'une grande partie de Saint-Martin de Montfélix, au XVIe siècle, les épreuves reprennent et s'amplifient. Les guerres, les crises démographiques et la pression fiscale font de l'époque moderne une époque particulièrement rude en Champagne. Nœud de communication vital, Épernay subit nombre de sièges et de sévices (incendie de 1544, sièges de 1592, 1615, 1634...). Et quand elle n'est pas sous le feu des canons, la ville se doit de loger et de ravitailler les troupes qu'on lui impose. Il est difficile de mesurer concrètement, faute de sources, l'impact de ces événements sur le Val du Cubry, mais il est certain que, dans leur ensemble, les villages proches d'Épernay ont beaucoup souffert : outre les pillages auxquels les prédestine leur situation, ils sont souvent mis à contribution pour fournir des vivres et parfois aussi des hommes41.
- 42 AD Marne 16 H 34, no 38 et 40.
- 43 Mémoire de Claude Haton contenant le récit des événements accomplis de 1553 à 1582 principalement d (...)
- 44 AD Marne 16 H 34, no 51 et 78.
- 45 Brugny stagne avec 70 feux et Vaudancourt passe de 42 à 44 feux. Cf. J. Dupaquier, Statistiques dém (...)
- 46 AD Marne E 318 (registre d'État civil).
34Dans ce difficile contexte, Montfélix vivote, soutenu par sa fonction religieuse. Au XVIe siècle, le « village » tient avec ses maisons et ses habitants (1527, 1536...)42. Les évocations sont rares, ce qui suggère plutôt le développement d'un hameau qu'autre chose mais les ravages protestants de 1562-1567 n'ont pas eu raison du site. Si Montfélix a été touché, ce qui est fort possible vu sa situation sur la route des pillards qui viennent de Sézanne et stationnent durant trois jours à Épernay43, les destructions n'ont pas été irrémédiables. Au XVIIe siècle, ses habitants agissent de concert avec ceux de Chavot et des communautés voisines (1609, 1688...)44 Mais la documentation fiscale montre bien que l'ensemble fonctionne en binôme. C'est une sorte de village double sur le plan topographique et administratif. À l'ouest, Montfélix est le siège paroissial, peu peuplé mais important du fait de son église, tandis que le greffon, Chavot, à l'est, l'emporte numériquement et économiquement. En 1664, puis en 1690, les listes de feux sont dressées au nom des deux groupements et l'ensemble progresse de 50 à 59 unités45. Mais Montfélix n'est ni un village, ni même un gros hameau. Une liste des confirmations opérées dans la paroisse, en 1705, occulte même son existence46. L'établissement aurait-il sombré ?
- 47 AD Marne E 318 et 2 E 159/1 (28 juillet 1709).
- 48 J. Dupaquier note le recul sérieux de la population champenoise avec les crises de 1694 à 1709.
- 49 La peste est à Épernay en 1634-5 et 1668 (A. Nicaise, op. cit. à la note 13,I, p. 180, 187,201 et 2 (...)
35La situation bascule en effet à la fin du XVIIe et/ou au début du XVIIIe siècle, époque à laquelle le hameau disparaît temporairement. Il est en effet question, en 1709, à l'occasion de l'enregistrement d'un baptême, d'un couple que l'on présente comme les « premiers habitants de Montfélix depuis la destruction et (le) rétablissement » du lieu47. Cette période est difficile en Champagne. La récession et une série de grandes mortalités affectent la Généralité de Châlons48. Ces crises ont eu raison du hameau, dont on devine qu'il ne devait tout de même guère être peuplé. La mention d'une « destruction » est d'interprétation plus délicate. On ne sait quelle en fut l'ampleur, ni si elle fut volontaire ou accidentelle (incendie, épidémies...)49. Ce qui est certain, c'est que tout le val a été démographiquement touché pendant la période, suivant en cela l'évolution provinciale. En 1709, le groupement Chavot-Montfélix n'a plus que 50 feux et le retour au niveau de 1690 ne s'opère qu'en 1720.
- 50 AD Marne 2 E 159 et E 318.
36Cet effacement temporaire de Montfélix correspond en fait à un tournant bien répercuté dans les registres d'état civil. De 1615 à 1683, l'en-tête des documents est au nom de la paroisse Saint-Martin de Montfélix. Ensuite l'usage se dérègle. En 1684, il n'est question que de la paroisse de Chavot : est-ce à ce moment que le hameau de Montfélix s'éteint ? Puis, jusqu'en 1705, il y a quelques flottements : les mentions relatives à Montfélix l'emportent, mais parfois seule Chavot est mentionnée (1703) ou bien les deux groupements sont évoqués de concert. À partir de 1706, il n'y a plus d'ambiguïté ; la seule paroisse qui figure désormais en en-tête, sous une forme groupée, c'est celle de Montfélix, Chavot et Moussy50.
- 51 AD Marne : vente des biens nationaux (1 Q 898 et 3052), biens du prieur en 1791 (1 L 1394).
- 52 AD Marne C 429 (1691) et C 430 (1773) et J.-P. Brancourt, L'intendance de Champagne à la fin du XVI (...)
37Ce nouvel usage entérine l'évolution. Le hameau de Montfélix a disparu mais le prestige attaché au nom de son église et de sa vieille paroisse et la pérennité des cadres ecclésiastiques invitent à conserver l'appellation. Seulement l'ancienne structure est inadaptée. Le conflit s'est déplacé. Chavot confirme sa position, mais une autre rivalité se profile : celle qui l'oppose au village de Moussy avec pour enjeu l'église Saint-Martin. Les liens avec Moussy sont anciens. Le prieuré de Montfélix y a été transféré et le prieur, qui est aussi curé de Saint-Martin et, comme tel, sûrement très actif dans le mouvement, y a des biens importants51. Au XVIIIe siècle, les rapports des Intendants montrent que la situation économique et démographique penche nettement en faveur de Moussy. Son emplacement en fond de val, non loin d'Épernay, a attiré les investissements de la bourgeoisie sparnacienne, rémoise et châlonnaise, soucieuse de placements lucratifs. La viticulture, qui autorise de fortes densités de population, y connaît ainsi un essor notoire soutenu par la qualité d'un vin qui est l'une des richesses de la région et que l'on exporte vers Paris et la Flandre. De 1690 à 1773, l'établissement progresse de 103 à 125 feux et, en 1773, il comporte 220 hectares de vignes. Chavot par comparaison a, environ, deux fois moins de feux et moitié moins de vignes et, qui plus est, son vin passe, aux yeux des Intendants, pour « médiocre »52.
- 53 AD Marne 1 Q 899.
- 54 A. Nicaise, op. cit. à la note 13, I, p. 95, n. 2. A. Longnon, op. cit. à la note 21 : 1391.
- 55 AD Marne C 1828 (1765), 2075 (1791).
38Chacune des deux communautés a des prétentions sur l'église. En 1791, les Chavotais n'hésitent ainsi pas à faire de Saint-Martin « l'église de Chavot »53. Et l'édifice aurait pu connaître le sort de l'église paroissiale de Saint-Julien, aux portes d'Épernay, qui, en 1700, est démolie avec l'accord des autorités ecclésiastiques, sur la demande d'un certain nombre de notables d'Épernay : ces derniers, ayant leurs vendangeoirs dans le proche village de Pierry, veulent y faire bâtir une église et y transférer la cure. Saint-Julien ne comporte plus alors qu'une seule maison, alors qu'au XIIIe siècle le site est qualifié de « ville » tout comme celui de Pierry d'ailleurs, qui relève toutefois du précédent sur le plan religieux54. On a donc ici un renversement un peu du même ordre que celui que nous étudions. Mais, à Montfélix, comme il y a deux prétendants, le consensus paroissial vise au maintien du statu quo. Dans les actes de la pratique, la paroisse reste au nom de Montfélix et les sources du XVIIIe siècle sont très explicites. Elles insistent sur l'ancienneté du chef-lieu paroissial et les atouts majeurs de sa situation. L'église est au cœur d'une « vaste » paroisse (environ 750 ha), bien peuplée, qui rassemble deux villages structurés, avec syndics, Chavot et Moussy, ainsi que de nombreux hameaux et des fermes isolées dont certains sont en pleine “montagne”, d'autres sur les pentes et les derniers en fond de val55. Elle est à égale distance de tous, à mi-chemin entre la montagne et la vallée. En bref, son isolement et son emplacement central ménagent toutes les susceptibilités et sa situation facilite le travail du curé.
- 56 AD Marne C 560(1756, 1784, 1827, 1832...).
- 57 AD Marne B 9660 et C 1597 (1774). Le cadastre du XIXe siècle montre bien la faible extension de l'é (...)
39L'entité et la conscience paroissiales, nourries par les conservatismes religieux et cimentées par les antagonismes villageois, restent fortes. L'école est à Montfélix, en terrain neutre, près de l'église, et les habitants de Moussy y veillent tout particulièrement jusqu'en 1832 au moins56. C'est là qu'est le cimetière de la communauté. Même les seigneurs des Conardins, à Moussy, dont le château est pourtant doté d'une chapelle funéraire, tiennent à se faire inhumer au sein de l'église de Montfélix. Quant on connaît la raideur de la pente qui sépare, sur 1 km, leur résidence de l'édifice, on peut affirmer qu'il y a bien là une forte intention symbolique. C'est cette volonté de maintenir Montfélix en charge de la fonction ecclésiastique qui contribue à expliquer la résurrection, un peu artificielle et quasiment symbolique, du hameau du même nom dont les rares maisons et habitants sont encore mentionnés au détour des textes. Mais l'habitat est exsangue et le terroir réduit à un lieu-dit de faible extension57. En 1789, c'est bien au nom de Chavot qu'est rédigé le Cahier de Doléances et Moussy a bien évidemment le sien.
40Le cadre religieux est menacé de démembrement. L'administration fiscale, plus au fait des réalités économiques et topographiques, en faisant de Chavot et de Moussy deux collectes distinctes, prend acte des évolutions et annonce l'avenir. Après l'apogée de la paroisse vient le déclin et la clarification. La Révolution affaiblit la fonction religieuse du lieu, détend les liens entre Chavot et Moussy et habitue les uns et les autres à œuvrer séparément. Elle prive le curé de sa fonction en matière d'état civil au bénéficie des deux communes et elle provoque la suppression du prieuré de Montfélix. Reste l'école, toujours entourée de quelques maisons. En 1832, Moussy et Chavot veillent de concert à l'agrandir et achètent pour cela des masures autour de Saint-Martin. Puis Moussy avec la loi Guizot se construit, dès 1835, une école et l'on y érige une église. La paroisse de Montfélix se rétrécit comme peau de chagrin. L'église Saint-Martin devient enfin « l'église de Chavot » qui a ainsi définitivement absorbé Montfélix et écarté Moussy. Les derniers bâtiments du hameau disparaissent après 1936 face à la progression du vignoble : le secteur est classé en Appellation d'Origine Contrôlée (AOC), on a donc tout intérêt à y planter de la vigne. Seul le cimetière et l'église ont été respectés.
41Le hameau des Chauffours connaît un destin similaire, mais le cas est particulier car son abandon, au XXe siècle, est dû à la crise qui affecte les tuileries et briqueteries qui y sont installées depuis longtemps. Mais comme la zone n'est pas en AOC, on y voit encore des ruines. Et nombreux sont les écarts et hameaux qui ont sombré dans le val et ses hauts de pente, assez récemment, autour de Brugny par exemple. Cette clarification de l'habitat, au détriment des petits centres et au bénéfice des villages, illustre parfaitement le cas français en matière de désertion. Sur le plateau, l'habitat dispersé tient mieux, même si quelques granges ont disparu en tant que telles (Le Jard, La Grange-aux-Bois) à la suite des rassemblements fonciers opérés ces dernières décennies et des déboires du mouton ; les effets sont analogues, mais on est dans une autre logique économique.
42L'originalité de l'exemple montfélicien tient surtout au fait que l'on est ici dans un secteur éminemment favorable à l'occupation humaine et à la date extrêmement tardive de la désertion finale, mais pour le reste on retrouve, avec des nuances, des caractéristiques connues par ailleurs. Le phénomène est complexe, lent, saccadé et parfois réversible – il y a des résistances – car l'abandon est conditionné par une multiplicité de facteurs internes et externes qui font de chaque cas un cas particulier ou peu s'en faut.
43L'histoire du site, c'est l'histoire du double échec d'un chef-lieu politique et ecclésiastique à prétention hégémonique, face à des restructurations où les données topographiques, les désengagements (et les réengagements) seigneuriaux ainsi que les restructurations économiques et démographiques ont joué une part notable. Le schéma de départ assez classique – une ancienne et « vaste » paroisse où d'excellentes conditions naturelles engendrent un pullulement d'habitats doté d'un cœur à vocation de commandement et de hameaux satellites – s'inverse avec les crises et la reprise de la fin du Moyen Âge au bénéfice des noyaux secondaires les plus favorables. Ces redistributions n'ont rien d'original dans l'histoire du peuplement. Mais pour autant qu'on le sache aucun des habitats du val, ni même du plateau, n'a alors disparu : le terroir est bon et l'habitat ancien.
44La « phase traumatique » de 1560-1715 est bien marquée à Montfélix. Le hameau est victime des multiples crises qui accablent la région ; la guerre intervenant de façon surtout indirecte. Mais le facteur clef à l'époque moderne, et surtout au XVIIIe siècle, est cette redistribution des cartes que provoquent les investissements bourgeois en fond de vallée, dans les villages proches d'Épernay, consécutivement à l'essor de la viticulture. Ces communautés en plein essor veulent leur église. Certaines agissent brutalement (Pierry). D'autres sont plus conciliantes (Moussy) ; d’où la brève et artificielle résurrection de Montfélix. La fin du conflit avec Moussy, enfin dotée d'un lieu de culte, et l'essor de la vigne contribuent à expliquer la désertion finale du XXe siècle. Reste cette église isolée, postée en sentinelle à l'entrée du val, qui témoigne, comme bien d'autres, de l'existence d'un ancien village déserté.
Notes
1 J.-M. Pesez, Sources écrites et villages désertés, dans Villages désertés et histoire économique, XIe-XVIIIe siècle, Paris, 1965, p. 83-102 et J.-M. Pesez, E. Le Roy Ladurie, Le cas français : vue d'ensemble, dans Ibid, p. 127-252 : p. 139 : « En fait il est bien difficile de tuer un village : il y faut souvent diverses séries causales qui convergent sur un même lieu ».
2 A. Renoux, Le château des comtes de Champagne à Montfélix (Xe-XIIIe siècle). Bilan d'une expérience en cours, dans La vie en Champagne, 408, 1990, p. 3-9 et Id., L'animal et son impact dans l'environnement champenois : deux exemples issus des marges briardes et sénonaises (XIe-XVIIIe siècle), dans Pour une histoire de l'environnement, C. Beck, R. Delort(éd.), Paris, 1993, p. 135-139 (programme Piren).
3 J.-M. Pesez, E. Le Roy Ladurie, op. cit. à la note 1, p. 214 sq.
4 Pour respecter les impératifs éditoriaux sur le plan quantitatif, on se permettra, dans cet article, de renvoyer pour l'apparat critique et les données comparatives à une publication à venir sur les fouilles de Montfélix.
5 E. Nègre, Toponymie générale de la France, 3 vol., Genève, 1990-1991-1992, I, p. 163 (sparno, épine).
6 Sur tous ces problèmes archéologiques voir : E. Schmit, Répertoire abrégé de l'archéologie du département de la Marne des temps préhistoriques à l'an mille, dans Mémoires de la Société d'agriculture, commerce, sciences et arts du département de la Marne, XXVII, 1929, p. 105, 134, 151, 172, 206, 273... et les Fiches du Service régional de l'archéologie, Champagne-Ardenne.
7 L'information vient surtout de Flodoard, Historia Remensis ecclesiae, MGH, ss, ΧΙΠ, p. 409-599 et Annales (919-966), P. Lauer (éd.), Paris, 1905. Précisions dans J. Devisse, Hincmar, archevêque de Reims, 845-882, 3 vol., Genève, 1975-1976, M. Bur, La formation du comté de Champagne, Nancy, 1977 et M. Sot, Un historien et son église. Flodoard de Reims, Paris, 1993.
8 E. Nègre, op. cit. à la note 5, I, p. 444 et 575.
9 Id, Ibid., Π, p. 761, 908 et 990 ; Flodoard, op. cit. à la note 7, Π, cap. X.
10 Des six ensembles du Xe siècle qui sont évoqués dans le val et ses abords, quatre (villae et château), placés en lisière de pagus, Brugny, Montfélix, Vauriennes et Vinay, ont des liens avec les Herbertiens.
11 Flodoard, op. cit. à la note 7, années 952 et 954.
12 Contexte champenois des Xe-XIe siècles : M. Bur, op. cit. à la note 7, p. 87 sq
13 H. d’Arbois de Jubainville, Histoire des ducs et des comtes de Champagne, I, Paris, 1869, p. 482 ; A. Longnon, Documents relatifs au comté de Champagne et de Brie (1172-1361), I, Les fiefs, Paris, 1901, no 626 à 645 ; Cartulaire de Saint-Martin, dans Épernay et l'abbaye Saint-Martin, A. Nicaise (éd.), Châlons, 1849, Π, p. 126.
14 Voir les critères donnés par R. Fossier, Villages et villageois au Moyen Âge, Paris, 1995, p. 8.
15 A. Longnon, op. cit. à la note 13, I, no 1033 et 6162 et Π, p. 137, no 3.
16 Id., Ibid., I, no 6158 et 6162 ; ID., Rôles des fiefs du comté de Champagne sous le règne de Thibaud le Chansonnier (1249-1252), Paris, 1877, art. 236 et 288.
17 M. Bur, Châteaux et peuplements dans le Nord et l'Est de la France au Moyen Age, dans Châteaux et peuplements en Europe occidentale du Xe au XVIIIe siècle, Flaran, 1, 1980, p. 83 sq.
18 1526 : masure « tenant au grand chemin » (AD Marne 16 H 34). Le village moderne est autour de l'église.
19 A. Nicaise, op. cit. à la note 13, Π, p. 23, 27, 113 et 130.
20 AD Marne 16 H 34 (1237 et 1266) ; A. Longnon, op. cit. à la note 13, I, p. 399, no 166.
21 A. Longnon, Dictionnaire topographique du département de la Marne, Paris, 1891.
22 AD Marne 16 H 32.
23 A. Nicaise, op. cit. à la note 13, II, p. 152.
24 A. Longnon, op. cit. à la note 13, I, no 2253, 3229, 6134 et 6136 ; ID., op. cit. à la note 16, art. 288.
25 A. Longnon, op. cit. à la note 13, II, Le domaine comtal, Paris, 1904, p. 303.
26 A. Longnon, op. cit. à la note 13, I, no 1033, 1856, 2252-2253, 3229, 5280, 6116, 6119, 6133, 6134, 6158, 6162, 7166, 7150, 7166 ; Id., op. cit. à la note 16, art. 236, 288 et p. 377, art. 136. AD Marne 16 H 24, no 2 (1202)... Pour le titre de dominus, on signalera un cas ambigu : AD Marne 16 H 34, no 1, avec en 1204, X, frater domini Yvermundi militis Montefelicis. Yvermond est miles de Montfélix, mais son titre seigneurial peut être rattaché ailleurs !
27 AD Marne 2 J (censiers et/ou comptes de 1367-1381, 1417, 1461, 1470, 1473-1475, 1488-1490, 1490-1491, 1496-1497).
28 AN P 182, f. 152.
29 AN P 182, f. 300.
30 Nous reprenons ici les chiffres de G. Noël, La seigneurie rurale de Brugny aux XIVe et XVe siècles, Maîtrise, Université de Reims, 1978, p. 62-67.
31 AD Marne 2 J 94, f. 13.
32 G. Noël, op. cit. à la note 30, p. 68-71.
33 Id., Ibid., p. 105 sq.
34 Diagramme réalisé à partir des chiffres donnés par G. Noël, op. cit. à la note 30 et J. Charles, La propriété à Chavot et son morcellement du XVe au XVIIIe siècle, dans Mémoires de la Société d'agriculture, commerce, sciences et arts du département de la Marne, XXX, 1956, p. 161-165. Il s'appuie sur le nombre des parcelles et non sur les superficies afin de pouvoir opérer des comparaisons avec la situation développée en 1367, où la taille des tenures n'est pas évoquée. Il ne faut prendre ces données qu'à titre indicatif, car la superficie des tenures s'est accrue avec la reprise (G. Noël, op. cit. à la note 30, p. 40-45).
35 Ils sont ici anormalement majorés par le fait que les superficies des jardins et des prés sont inférieures à celles des autres tenures.
36 Châlons, BM, Registre des conclusions du Conseil de ville, BB 1, p. 323 et 349 ; AD Marne 2 J 1, liasse 18, no 25. L'épisode est malheureusement occulté dans la maîtrise de G. Noël.
37 AD Marne 2 J 92, f. 4, 2 J 94, f. 6 et 12.
38 A. Nicaise, op. cit. à la note 13, Π, p. 183-184.
39 G. Noël, op. cit. à la note 30, p. 49.
40 J.-M. Pesez, E. Le Roy Ladurie, op. cit. à la note 1, p. 156-157 (mais on n'a pas ici le témoignage d'une organisation communautaire particulièrement forte).
41 Sur tout ceci, cf. les Registres... de la ville d'Épernay de 1540 à 1749, dans A. Nicaise, op. cit. à la note 13,I, p. 133-230.
42 AD Marne 16 H 34, no 38 et 40.
43 Mémoire de Claude Haton contenant le récit des événements accomplis de 1553 à 1582 principalement dans la Champagne et la Brie, F. Bourquelot (éd.), 2 vol., Paris, 1857, I, p. 494 et 499. D'après A. Nicaise, op. cit. à la note 13, Π, p. 26 : la chapelle du prieuré de Montfélix (et non l'église) est brûlée par les Huguenots en 1567 et réparée en 1579.
44 AD Marne 16 H 34, no 51 et 78.
45 Brugny stagne avec 70 feux et Vaudancourt passe de 42 à 44 feux. Cf. J. Dupaquier, Statistiques démographiques du Bassin Parisien, 1636-1720, Paris, 1977, p. 231-232 et H. Boucher, Paroisses et communes de France. Dictionnaire d'histoire administrative et démographique. Marne, Paris, 1984, p. 173, 174 et 229. Ces deux auteurs, peu sensibilisés aux problèmes qui sont les nôtres, induisent en erreur car ce n'est pas le couple Montfélix-Chavot qu'ils présentent mais celui de Chavot-Courcourt créé en 1852.
46 AD Marne E 318 (registre d'État civil).
47 AD Marne E 318 et 2 E 159/1 (28 juillet 1709).
48 J. Dupaquier note le recul sérieux de la population champenoise avec les crises de 1694 à 1709.
49 La peste est à Épernay en 1634-5 et 1668 (A. Nicaise, op. cit. à la note 13,I, p. 180, 187,201 et 202).
50 AD Marne 2 E 159 et E 318.
51 AD Marne : vente des biens nationaux (1 Q 898 et 3052), biens du prieur en 1791 (1 L 1394).
52 AD Marne C 429 (1691) et C 430 (1773) et J.-P. Brancourt, L'intendance de Champagne à la fin du XVIIe siècle. Edition critique des mémoires « pour l'instruction du duc de Bourgogne », Paris, 1983, p. 236 (1698), 455 (1689-1691).
53 AD Marne 1 Q 899.
54 A. Nicaise, op. cit. à la note 13, I, p. 95, n. 2. A. Longnon, op. cit. à la note 21 : 1391.
55 AD Marne C 1828 (1765), 2075 (1791).
56 AD Marne C 560(1756, 1784, 1827, 1832...).
57 AD Marne B 9660 et C 1597 (1774). Le cadastre du XIXe siècle montre bien la faible extension de l'établissement.
Table des illustrations
Légende | Fig. 1. La région à la fin du Moyen Âge. |
---|---|
URL | http://books.openedition.org/psorbonne/docannexe/image/23703/img-1.jpg |
Fichier | image/jpeg, 348k |
Légende | Fig. 2. Accensements : évolution de l'occupation du sol de 1367 à 1491. |
URL | http://books.openedition.org/psorbonne/docannexe/image/23703/img-2.jpg |
Fichier | image/jpeg, 152k |
Légende | Fig. 3. Chavot et Courcourt : répartitions des accensements en 1490-1491 |
URL | http://books.openedition.org/psorbonne/docannexe/image/23703/img-3.jpg |
Fichier | image/jpeg, 73k |
Le texte et les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont sous Licence OpenEdition Books, sauf mention contraire.