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Le village médiéval et son environnement

 | 
Laurent Feller
, 
Perrine Mane
, 
Françoise Piponnier

Les habitants et leurs objets

Autour des celliers dijonnais : des mobiliers aux activités des vignerons (XIVe-XVe siècle)

Françoise Piponnier

Texte intégral

  • 1 Cf. J.-M. Pesez, Une maison paysanne en Bourgogne médiévale, dans Rotterdam Papers II, Rotterdam, (...)

1Lorsque Jean-Marie Pesez me confia le bâtiment II incendié du village de Dracy, dont il avait commencé la fouille l’année précédente, il n’était guère prévisible que l’étude de cette maison paysanne de la Côte viticole beaunoise1 se poursuivrait jusque dans les intérieurs de vignerons dijonnais, tels que les révèlent leurs inventaires mobiliers. Le cheminement fut long. La fouille minutieuse d’une couche d’incendie révéla un important ensemble d’objets céramiques et surtout métalliques fort bien conservés, à l’exception des étains, fondus sur place par la chaleur de l’incendie. Si l’identification d’outils tels que les faucilles ou la serpe à vigne, dont la forme a peu évolué depuis le Moyen Âge, était aisée, d’autres objets gardaient leur mystère après consultation des travaux ethnographiques, seule référence accessible à l’époque.

  • 2 B. et H. Prost, Inventaires mobiliers et extraits des comptes des ducs de Bourgogne de la maison V (...)
  • 3 Fonds de la justice de la mairie de Dijon, conservé aux Archives départementales de la Côte d’Or s (...)

2La publication d’inventaires paysans du XIVe siècle par Prost2 inspira la recherche d’autres documents analogues dans les registres comptables des archives bourguignonnes. La quasi totalité du corpus ainsi constitué correspond à la seconde moitié du XIVe siècle ; il est donc contemporain de l’incendie du bâtiment II de Dracy, daté par les trouvailles monétaires des années 1360. Dans l’énumération très sèche des biens possédés par des mainmortables, des bâtards, des personnes mortes sans descendance, pour la plupart villageois, la terminologie, souvent plus proche des patois du XIXe siècle que de l’ancien français littéraire des dictionnaires, opposait une difficulté de taille. L’existence d’un fonds d’inventaires dijonnais3 massif devait ouvrir de nouvelles perspectives. Grâce à leur rédaction plus soignée et surtout plus diserte, certaines caractéristiques des outils, des ustensiles domestiques, des meubles ou des vêtements énumérés, tels que leurs matériaux, leur couleur, leur destination, etc. constituaient autant d’indices susceptibles de faciliter leur confrontation avec les objets archéologiques. En outre, bon nombre des documents, en replaçant ces mobiliers dans les différentes pièces de l’habitation, donnaient une idée précise de son importance et de son organisation. Ce type d’information, toujours omis dans les inventaires paysans, permettait de mener les comparaisons avec les données archéologiques, par-delà l’énumération des ensembles d’objets domestiques, jusqu’aux modalités d’occupation de l’espace construit. Certes, les documents dijonnais conservés sont tous postérieurs à 1390, et donc aux données archéologiques de Dracy, comme à la plupart des inventaires paysans. Pourtant le corpus dijonnais, qui couvre un siècle entier, ne révèle pas des évolutions si rapides et si décisives qu’elles interdisent la comparaison entre des données urbaines et rurales distantes de quelques décennies seulement.

  • 4 Leur liste fait l’objet de l’annexe I. Les références à un inventaire sont données ci-après par l’ (...)

3Une soixantaine d’inventaires dijonnais désignent nommément le propriétaire des biens décrits comme « vigneron4 » et à peu près un quart d’entre eux offrent une localisation totale ou partielle des mobiliers dans l’habitation. Neuf seulement situent pièce par pièce tous les objets inventoriés. Six autres ne précisent la situation que d’un petit nombre d’objets dans une ou deux pièces ; le plus souvent, c’est le cellier qui est ainsi privilégié, confirmant son rôle central dans l’activité viticole. La plupart des listes de biens, localisés ou non, dressées au moment du partage entre le parent survivant et les héritiers mineurs, ne comporte que la part de ces derniers. Les absences constatées ne sont donc pas significatives et, comme dans le cas de l’inventaire archéologique, les conclusions ne peuvent s’appuyer que sur les mobiliers présents.

Le cellier dans la maison vigneronne

  • 5 Sur ce thème voir J.-M. Pesez, Cave, cellier et maison vigneronne au Moyen Âge, dans Vignerons, Bu (...)
  • 6 La forte pente sur laquelle sont édifiées les maisons de ce village et l’appui pris par certains b (...)

4Une première constatation s’impose : les ensembles habités figurés schématiquement (Fig. 1) sont très divers. Disposées sur un à trois niveaux, les pièces sont au nombre de deux à huit et il leur arrive de se répartir entre deux corps de bâtiments. En dépit de leurs différences, ces habitations de vignerons comportent toutes un cellier. Quatre d’entre eux dits « cellier dessoubs », vraisemblablement installés en sous-sol, ou du moins excavés, seraient sans doute appelés caves au XXe siècle5. Il est bien sûr impossible d’affirmer que les cinq autres celliers mentionnés sans préciser s’ils sont ou non « dessoubs » sont établis au niveau du sol. Même dans ce cas, certains aménagements observés sur le site de Dracy, en particulier l’habitude de recouvrir les planchers qui surmontent plusieurs des resserres d’une épaisse couche d’argile, peuvent assurer des conditions acceptables, sinon optimales, pour la conservation des vins. En effet, le cellier complètement excavé sous la maison n’apparaît pas à Dracy6, mais il est déjà courant dans les constructions de qualité, ecclésiastiques ou civiles. Il n’y a donc pas lieu de refuser la possibilité qu’à Dijon, et même dans ses faubourgs, certaines maisons vigneronnes aient été pourvues de caves dès le XIVe siècle.

  • 7 Jehan Mercier (1396).
  • 8 Depasques (1396).
  • 9 Jehan Maulmeu (1394).

5Le terme n’est pas inconnu à Dijon, mais n’apparaît que dans la description de riches intérieurs, par exemple ceux de marchands où sont répertoriés plusieurs celliers et des stocks de vin considérables. Chez l’un d’entre eux7, la « cavote » est étroitement associée au « grant cellier », puisqu’il est précisé qu’elle « est audit cellier ». Elle-même ne contient que de la futaille et un coffre, mais c’est dans le grand cellier qu’est conservé l’essentiel du vin. Chez un autre personnage, qui tient une « buverie », la cave est « de costé ledit cellier sous la chambre dudit Jehannin »8. Un autre inventaire9 apporte une précision intéressante concernant la dénomination des caves à vin. Cette fois, le gros du stock, constitué de vin et de verjus, est localisé « En la vote dessoubz ladite maison ». Il est peu vraisemblable que soit désignée sous ce terme autre chose qu’une cave couverte par une voûte de pierre.

  • 10 J.-M. Pesez, op. cit. à la note 1.

6Il convient de souligner que les mentions de « cellier dessoubs » concernent aussi bien des maisons situées en ville que dans le faubourg Saint-Nicolas où demeurent, hors les murs, de nombreux vignerons. Elles caractérisent un ensemble habité de huit pièces réparties entre deux corps de bâtiment ou le très modeste logement de Pierre Savoie, composé seulement, outre le cellier, d’une chambre et d’une cuisine Il faut noter toutefois que l’unité d’habitation ne correspond pas forcément à une maison, grande ou petite. L’inventaire décrit les biens meubles d’une personne ou d’une communauté conjugale mais ne comporte généralement aucune information concernant l’espace bâti, en dehors de l’énumération des pièces. L’étude des maisons archéologiques de Dracy a prouvé qu’un même toit pouvait abriter deux foyers10. Parallèlement, l’un de nos textes précise que Michelot Bardeaul avait acheté, huit ans avant l’inventaire, et occupait sans doute lorsqu’il a été dressé en 1414, « la tierce partie de une maison, fonx, mex et appartenances d’icelle ».

  • 11 Ce terme désigne toute pièce habitable, quel que soit son mode d’utilisation au moment de l’invent (...)
  • 12 Cf. J.-M. Pesez, Le village et la maison de la Côte viticole en Bourgogne : passé lointain et pass (...)

7La plus médiocre des habitations de vigneron ne compte qu’un cellier et une « chambre »11. D’après le mobilier qu’elle contient, celle-ci servait à la fois de cuisine, de pièce à vivre et de chambre à coucher. Avec leurs deux, trois ou quatre pièces (y compris le cellier), réparties sur un seul niveau, plusieurs maisons du faubourg Saint-Nicolas évoquent la disposition des bâtiments mis au jour à Dracy. La présence d’un « solier » distingue trois des maisons de quatre pièces. Ce trait caractérise aussi quelques bâtiments de Dracy, dont une pièce, le plus souvent une resserre ou un cellier, était surmontée par un plancher « terré ». Aucune en revanche n’atteignait le développement sur trois niveaux de certaines maisons dijonnaises qui, pourvues de celliers « dessoubs » et de pièces à l’étage, préfigurent l’organisation de la maison vigneronne traditionnelle12.

8C’est un tout autre genre de vie et de niveau économique que laissent deviner les habitations à deux corps de bâtiment. De vraies pièces habitables dites « chambres » et non plus des « soliers » surmontent les pièces du rez-dechaussée, tant dans la « maison devant » que dans la « maison derriere » de Demoingin Grosbieuf (1397). La première, classique maison de ville construite sur la rue, compte cinq pièces ; elle est séparée par une cour ou un jardin de la seconde, où se trouve le « cellier dessoubs » surmonté d’une seule pièce au rez-de-chaussée ainsi qu’à l’étage. Résumé à la fin de l’inventaire, l’acte d’acquisition de cette maison, située en pleine ville, confirme sa valeur considérable : elle a été payée 120 « frans d’or » en 1389.

  • 13 Voir l’annexe Π.

9L’inventaire de Bertrand Depasques13, autre propriétaire d’une unité d’habitation répartie entre deux bâtiments, ne procure malheureusement aucune information sur ses biens immobiliers. La comparaison des prix d’achat aurait été intéressante, car ce vigneron dispose d’un patrimoine immobilier analogue à celui de Demoingin Grosbieuf. La situation de sa demeure, dans la « rue chaude » du faubourg Saint-Nicolas, est certes moins valorisante. Donnant sur la rue, son habitation comporte le même nombre de pièces que celle de Grosbieuf, auxquelles s’ajoute un cellier. Il occupe en outre « dans la meme rue » deux autres celliers, localisés dans une maison qui lui appartient mais n’est pas autrement décrite. Les biens énumérés dans chacun des celliers précisent leurs fonctions : les deux derniers sont voués au stockage du vin en tonneaux, tandis que le premier joue, dans l’habitation, le rôle de resserre à futaille.

Caves à vin

  • 14 Savoie (1396) : « une queuhe de despence » ; Grosbieuf (1397) : « une queuhe de despence » ; de Mo (...)
  • 15 Grosbieuf (1397) : « un poinson ou il a du vin que l’on despence, une queuhe de despence ».

10Tous les celliers « dessoubs » remplissent cette fonction, même si l’un d’entre eux ne contient que de la « despense »14. Cette appellation, que remplace dans certains inventaires dijonnais celle de « petit vin », est sans doute réservée à la piquette. À côté de cette boisson de consommation courante ne figure qu’une fois « du vin que l’on depence »15. Comme il voisine avec de la « despense », il ne se confond pas avec elle et l’on peut penser que, dans cette maison aisée, certains de ses habitants boivent de la piquette et d’autres du vin de meilleure qualité. La valeur de la « despense », lorsqu’elle est donnée, est nettement inférieure à celle des vins en fûts.

11Comparer la quantité de vin en cave pour tenter d’évaluer la production des vignerons n’aurait guère de signification. Les inventaires sont dressés à différents moments de l’année et, même lorsqu’ils interviennent dans les premiers jours d’octobre, rien ne prouve que tout le fruit de son travail parvient jusqu’au cellier du vigneron.

  • 16 Le mesurage des vins se fait à Dijon en queues de 32 setiers et setiers de 8 pintes. D’après une p (...)
  • 17 Michiel alias Barouhet (1420) : « vin nouvel du creu de Poussot et de Dessoubz la Ville » ; Salign (...)
  • 18 Naault (1419) et Depasques (1423).

12Plus intéressantes sont les indications qualitatives concernant le vin stocké. Le vin est dit « novel » dans un document du début d’octobre 1396, mais aussi dans un autre de mai 1397. Cette mention est omise de la description des biens de Oudot Garlot (4 octobre 1464), où il est précisé en revanche que les trois queues16 de vin en cave sont « du creu de Pornieres et de Lochieres » ; d’autres crus du terroir de Dijon sont également cités17. Deux de nos vignerons, qui comptent parmi les plus aisés18, n’ont en cave que du « vin vermeil » dont les prisées, au taux de 4 F ou 5 F la queue, paraissent relativement élevées par rapport à celles des autres vins rencontrés dans les celliers de leurs confrères, mais il faudra les comparer aussi aux évaluations données dans les autres inventaires dijonnais. Il ressort en effet clairement de leur analyse que les « vignerons » ne sont pas les seuls viticulteurs habitant Dijon ou sa banlieue ni, de loin, les plus gros producteurs de vin.

13Certains celliers sont consacrés exclusivement à la conservation du vin. Tel est le cas de celui où Pierre Savoie garde son vin et sa « despense » et aussi celui des celliers séparés de l’habitation, appartenant à Bertrand Depasques, où est conservé son « vin vermeil ». Pourtant, la plupart des celliers de vignerons, en particulier ceux qui ne contiennent pas de vin, recèlent bien d’autres objets.

Cuveries et resserres

  • 19 Contrairement à celle de Mercier (1396), où se trouvait une « cavote » ; « ung treul garni a truil (...)
  • 20 Depasques (1423) et Garlot (1464).
  • 21 Entre autres : Savoie (1396) : « environ demi quartaul de tourte » ; de Moloy (1404) : « une arche (...)

14Aucune des maisons de vignerons inventoriées ne possède de pressoir19, en revanche certaines d’entre elles disposent de cuves où la vendange pouvait être foulée et mise à fermenter. Parfois conservées dans le cellier, celles-ci figurent dans deux des maisons les plus importantes20 parmi les objets énumérés « en l’esmay ». Une pièce ainsi nommée apparaît avec régularité dans les inventaires de Dijonnais aisés. Son contenu l’y désigne, plus encore que chez les vignerons, comme un espace spécialisé. L’« esmay » de Bertrand Depasques compte trois cuves de capacité différente, une « petite » tenant trois muids, une autre de six muids et une « grant cuve » évaluée à « environ 12 muys ». Il est intéressant de noter que le volume de ces cuves est presque le double du stock de vin conservé dans son autre cellier. Véritable « laboratoire » du viticulteur, cet « esmay » est aussi pourvu de « rondeaux » pour tirer le vin, d’entonnoirs de bois pour l’entonner et aussi de « poulains », souvent mentionnés à Dijon pour le transport et la mise en cave des tonneaux. La présence d’un van vient rappeler toutefois qu’à Dijon, comme dans les villages de la Côte bourguignonne, la spécialisation des vignerons n’est pas totale. Dans l’autre « esmay », des faucilles s’ajoutent à un van pour attester la pratique de la polyculture, confirmée par les réserves de céréales et de légumineuses, aussi fréquentes dans les inventaires de vignerons que le vin ou la « despense »21. Le reste des biens énumérés dans l’« esmay » de Garlot évoque une autre compétence du viticulteur : les osiers fendus, les douzaines de « cercles de muyz et demy muys », le chanvre « pour relié » suggèrent l’activité déployée pour remettre en état la vaisselle vinaire chaque année avant les vendanges. Les tonneaux vides, « queues » ou « poinçons » et les « mars », grosses barres de bois sur lesquels ils reposent, se rencontrent dans l’« esmay » comme dans un grand nombre de celliers, où ils sont souvent accompagnés de cuves, cuveaux ou autre accessoires utilisés pour la vinification.

  • 22 Depasques (1423).
  • 23 Piteau (1438) ; Garlot (1464).
  • 24 Naault (1419).
  • 25 Depasques (1423) : « Il entonneurs de bois garniz de moiche de fer tauxés II gros » ; Garlot (1464 (...)
  • 26 Desforges (1412).

15Dans le commun des celliers, les cuves « a mettre vendange » sont généralement de petite taille, les « beslonges » relativement rares. Plus fréquent, le « rondeau a traire vin »22 ou les « tynes a porter vin »23 sont accompagnées d’entonnoirs ; l’un d’eux est fait « de douves »24 ; d’autres, également en bois, comportent des éléments métalliques, un seul n’est fait que de métal25. Présentes un peu partout et souvent citées en même temps que les entonnoirs, les écuelles « a roigier vin » sont probablement employées pour ouiller ; en effet, l'iconographie montre parfois le vigneron en train de parfaire le remplissage de ses tonneaux au moyen d’un entonnoir et d’une grande écuelle et l’un de nos inventaires comporte « II escuelles a entonner, l’une grant et l’autre petite »26.

  • 27 Bardeaul (1414).
  • 28 Sur les « tenoz a fere buee », voir F. Piponnier, Les Dijonnais et l'eau à la fin du Moyen Âge, da (...)
  • 29 Bardeaul (1414) : « Il chasieres » ; chez Garlot (1464), c’est au solier que se trouve la « chasie (...)
  • 30 Naault (1419) : « une petite mait a pestrir paste » ; Lobereaul (1413) : « une mait a prestir past (...)
  • 31 Lobereaul (1413) : « deux grers et quatre escuelles tout de bois ».

16La vaisselle vinaire n’est pas le seul type de futaille ou de mobilier en bois stocké dans les celliers. Un « cuveaul a mettre farine »27 peut y voisiner avec un ou plusieurs cuveaux à lessive28, des garde-manger à fromages29, une maie30 et de la vaisselle de bois31.

  • 32 De Moloy (1404) : « ung petit bacon salé » ; Lefavey (1438) : « demy lar tauxé VIII gros,... une p (...)
  • 33 De Moloy (1404) : « une petite quasse ronde » ; Bardeaul (1414) : « ΙII poz de terre ».
  • 34 Lobereaul (1413).
  • 35 Lefavey (1438).
  • 36 Cf. note 48.

17Dans les maisons où il n’y a pas de vin, l’inventaire du cellier se diversifie à l’extrême et assigne à cette pièce une fonction de simple resserre. Des provisions alimentaires32, des récipients33 y côtoient des matériaux de construction, ici un « tas de pierre »34, ailleurs quelques milliers d’« aissainces »35 attendant la réfection d’une toiture de bois. Chez l’un des vignerons, dont le mobilier n’est que partiellement localisé, on voit même le cellier transformé en atelier textile36. Il est intéressant de noter que le clerc persiste, dans tous ces cas, à user du terme cellier, alors que bien des « chambres » jouent le rôle de resserre ou d’atelier textile. Bien que les éléments descriptifs n’apparaissent pas dans des documents qui ne concernent, en principe, que les « meubles », on peut en conclure que le cellier se distingue des autres locaux d’habitations par certaines caractéristiques architecturales qui lui restent propres et/ou par sa position dans le bâti.

De la viticulture aux autres activités des vignerons

  • 37 De Moloy (1404) : « En ung solier hault dessus la cusine... II fessours a fessourer » ; Bardeaul ( (...)
  • 38 Grosbieuf (1397) : « En une chambre haulte...deux hostes » ; de Moloy (1404) : « Ou solier dessus (...)

18Les celliers, et en particulier les celliers excavés dont l’humidité naturelle favorise la conservation du vin et de la futaille, ne sont pas l’observatoire privilégié pour retrouver les indices des activités annexes des vignerons dijonnais. Même les outils du travail de la vigne, les houes (« fessours »), les pioches (« pioiches »), les serpes (« goix ») sont conservés dans la cuisine, l’« esmay » ou une chambre37, tandis que les hottes et les paniers à vendanges figurent dans un solier ou une étable38.

  • 39 Levoillardet (1413).
  • 40 Savoie (1396) : « une chievre rousse » ; Prevost (1422) : « une chievre tauxee VI gros » ; Olivier (...)
  • 41 Monin Maingnot était, en 1396, exempté de l'imposition urbaine des « marcs » en sa qualité de « sa (...)
  • 42 Maingnot (1399) : « X vaisseaulx de moichotes presees la piece ΙII gros vaillent II F demi » ; Mal (...)

19Un seul des inventaires signale la possession de deux chevaux et d’un char39, utilisables certes pour le transport de la vendange, mais probablement rentabilisés à d’autres fins pendant le reste de l’année. Bien attestée, on l’a vu, la céréaliculture doit fournir un appoint de ressources, ne serait-ce qu’au bénéfice de la consommation domestique. Il en va sans doute de même pour l’élevage ; il arrive qu’une chèvre, ou plus souvent une vache, soit élevée dans le cadre familial40. Plus rarement, la possession d’animaux en bail à cheptel traduit la capacité d’investissement d’un vigneron prospère ; tel est le cas de Monin Maingnot, dépendant des moines de Saint-Bénigne41 : les baux inventoriés après son décès concernent 3 juments, 1 taureau, 16 bœufs de trait, 8 vaches, 2 veaux, 2 génisses et 190 « menues bestes laine pourtans ». Enfin, des ruches42 procurent à certaines familles leur cire et leur miel.

  • 43 De Moloy (1404) : « II siseaulx de fer a maçon » ; Chaudron (1413) : « une truelle a maçon ».
  • 44 Appelées « berrou » et « barrou » dans nos documents, ces vrilles servent à percer le logement des (...)
  • 45 L’ensemble d’outils de tonnellerie le plus complet est répertorié chez Legrillet (1409) : « une pl (...)
  • 46 Par exemple, chez Grosbieuf (1397) : « II pieces d’enfonceures de cuves ».

20Parfois l’intitulé d’un inventaire précise l’activité artisanale exercée parallèlement à la viticulture ; tel est le cas de Pierre Savoie, « vigneron et natier », ce que confirme la présence dans sa chambre de « III esguilles de fer a fere nates ». Le plus souvent, c’est la seule analyse de l’outillage qui révèle les compétences que possède le vigneron ou un membre de sa maisonnée. Comme dans un certain nombre d’inventaires ruraux, la rencontre de ciseaux de fer ou d’une truelle43 évoquent la participation à des travaux de construction, avec ou sans le contrôle de spécialistes. Mais les indices du travail du bois, en particulier de la tonnellerie sont ceux qui apparaissent avec le plus de régularité. Aucun de ces vignerons ne dispose pourtant d’un outillage assez complet pour que l’on puisse supposer qu’il fabriquait entièrement ses tonneaux. Une simple comparaison de leur équipement avec celui des tonneliers, nombreux à Dijon, suffit pour montrer qu’aucun de leurs outils ne permettait de façonner des douelles. En revanche, le compas, la scie, sont susceptibles de servir au tracé et à la taille des fonds, assemblés sur le chevalet (« aisole ») où ils sont retenus par le « chien ». Plus fréquents, les barroirs44, le jabloir, utilisé pour creuser dans les douelles la rainure dans laquelle s’insère le fond, ou le « taillant » (ciseau) polyvalent évoquent des travaux de réparation45, au même titre que le bois d’œuvre destiné à confectionner des fonds, ou encore les fonds déjà prêts46, les cercles, ou l’osier utilisé pour les lier.

  • 47 Renseignement communiqué par Anne Galanaud.

21L’environnement dans lequel est retrouvé tout un assortiment d’outils de charron doit cependant inspirer une certaine prudence avant d’affirmer que le vigneron exerce réellement, au moment où est dressé l’inventaire, l’artisanat correspondant à son équipement. En 1403, scies, cognées, perceurs, marteau, chevalet, rabot et doloire « a rouhier » sont entassés chez Hugues de Moloy, avec des paniers à vendange et un vieux collier de cheval, dans un « solier hault dessus la cuisine », que rien ne permet de considérer comme un atelier. Aucun stock de bois ou de produits semi-finis ne témoigne à cette date de l’activité de charron qu’il exerçait en 1396, d’après les registres fiscaux47.

  • 48 Parisot (1416) : « Ou cellier dudit hostel, ung mestier de tixiere garni de pignes, de trois tours (...)

22Comme on l’a déjà mentionné, le cellier d’un vigneron peut avoir pour emploi principal celui d’atelier textile, autour d’un métier de tisserande, d’un ourdissoir et de leurs accessoires48. Ailleurs, un « meschant meustier » est répertorié, sans être localisé dans l’habitation ; comme son propriétaire est nommé « Letixerandet » c’est probablement lui qui exerçait le métier de tisserand, ou l’avait exercé avant d’entrer par mariage dans une famille vigneronne connue.

  • 49 De Poiseul (1392) : « I boisseau de chenevey » ; Garlot (1464) : « pour deux boisseaulx et demi de (...)
  • 50 Piteau (1438).
  • 51 De Bere (1394).
  • 52 Galois (1481).

23Les autres travaux textiles, dont témoignent des outils fort répandus dans tous les inventaires, dijonnais ou ruraux, devaient être réalisés par les femmes de la maison. Une servante pouvait être mise à cette tâche, comme en témoigne l’inventaire d’un homme comme Pierre Savoie : n’ayant à son foyer ni épouse, ni fille, ni autre ayant-droit, seule est mentionnée sa « chambriere ». Le chanvre brut pouvait être acheté ou cultivé dans le jardin familial – certains inventaires comportent une réserve de chènevis49 – la fibre est, comme dans les campagnes, entièrement traité dans le cadre domestique. L’outil appelé « seris » ou « serex » sert, après trempage et broyage, à débarrasser la fibre des éléments ligneux de la tige ; il est un peu moins souvent cité que le « ferrot a ferreter chanvre » ou peigne, employé pour rendre les fibres parallèles en vue du filage. Plusieurs outils en fer, pourvus de courtes dents, qui semblent correspondre à cette définition, ont été découverts dans les ruines des maisons de Dracy ; ils confirment la diffusion du travail du chanvre, bien attestée aussi par les inventaires paysans. Détruits dans le sol ou par les incendies, les fuseaux en bois, qui devaient être employés sans fusaïole à Dracy, n’apparaissent qu’à titre exceptionnel dans les documents. Aucun fuseau n’est cité parmi les biens de vignerons, sinon une « fusee » c’est-à-dire un fuseau rempli de fil50. Ici ou là, un « eschavour a desvuidié fil »51 doit témoigner pour beaucoup de dévidoirs omis. Fil d’étoupe, « gros fil » ou « filé de chanvre » blanc ou gris en écheveau ne sont habituellement stockés qu’en quantités modestes. Sans doute étaient-ils vendus ou confiés au tisserand au fur et à mesure de leur production ; pourtant, un inventaire totalise soixante quatre livres de fil « tant de chenove que d’estoupe »52.

  • 53 Savoie (1396) : « II tours garnis a faire laine » ; Liduchoz (1401) : « ung tour a fillé laine » ; (...)
  • 54 Liduchoz (1401) : « V paires de gardes viéz a gardé lainne ».
  • 55 Parisot (1416) ; G. De Poerck, La draperie médiévale en Flandre et en Artois. Technique et termino (...)
  • 56 Voir F. Piponnier, Dijon au XVe siècle, l'entreprise dans une ville commerçante et artisanale, dan (...)

24Inconnu dans les campagnes, d’après les inventaires paysans, ou encore effectué au fuseau – ce qui ne laisse guère de trace dans l’écrit, car les fuseaux et quenouilles, de faible valeur, sont systématiquement omis –, le travail de la laine ne fait qu’une apparition fugace dans les familles vigneronnes. Encore médiocre dans ses performances, la roue à filer53 n’est employée que pour la laine et on lui préfère la laine filée à la quenouille (« a la coloigne ») pour tisser les draps de qualité. C’est sans doute une laine peignée qui est filée par nos Dijonnaises car le rédacteur de l’inventaire a trouvé dans l’une des maisons, à côté de la roue à filer, les outils à longues dents de fer utilisés pour la traiter, appelés ici cardes54 et, dans une autre, trois « tours » et deux « escourseures »55. L’absence de laine brute ou filée dans ces inventaires est normale ; l’énumération des biens de grands marchands drapiers56 montre que ces derniers sont propriétaires des stocks importants qui sont distribués en ville « chez les fileresses », ainsi que d’un nombre notable de roues à filer. Prêtés et remis aux fileuses en même temps que la laine, ces « tours » n’auraient aucune raison de figurer dans leur inventaire. Aussi les femmes occupées à filer la laine étaient-elles peut-être plus nombreuses que ne le suggère la fréquence des mentions de roues à filer. Sauf dans le cas du cellier transformé en atelier textile, équipé d’un métier à tisser et de ses accessoires, d’un ourdissoir et d’« escourseures », l’outillage textile est plutôt inventorié dans les cuisines, lieu de stockage et, probablement, d’utilisation, tandis que la fibre brute ou filée est gardée dans la chambre des maîtres de maison, comme tous les biens les plus précieux de la famille.

  • 57 Voir F. Piponnier, Fortune et genre de vie des vignerons dijonnais (fin XIVe-XVe siècle), dans Vig (...)
  • 58 Nombre d’entre eux sont encore désignés par le nom de leur village d’origine (voir liste, annexe I (...)

25Ceux que les autorités urbaine désignent comme vignerons constituent un groupe fort divers, par leurs niveaux de vie et de fortune57. Par la manière aussi dont la viticulture s’insère dans l’ensemble de leurs activités. Comme dans les autres groupes professionnels, le même nom de métier désigne aussi bien le propriétaire des moyens de production – dans leur cas, les vignes et tout l’équipement de la vinification et du stockage –, que l’ouvrier travaillant à façon pour autrui. Se livrer à d’autres tâches est sans nul doute une nécessité pour les familles les plus pauvres, qui restent à cet égard proches du monde rural. Divers indices montrent qu’elles en sont issues depuis peu et gardent avec lui des liens étroits58. Aux franges de la ville, elles s’imprègnent cependant de ses façons de vivre, de travailler, de consommer. La maison peut être plus spacieuse, les espaces habités plus spécialisés. C’est surtout l’abondance des objets mobiliers, des outils à la vaisselle de table, une garde-robe plus colorée aussi, qui différencient le vigneron citadin, ou quasi citadin, même peu fortuné, de l’habitant du village. La ville, avec son marché du travail diversifié, offre à certains l’occasion d’exercer toutes sortes d’activités, d’en changer, ou encore de remplir des fonctions lucratives et de s’enrichir.

26Bon nombre de Dijonnais qui, d’après l’inventaire de leurs biens, avaient le même genre de vie et s’adonnaient aux même travaux, n’étaient pas désignés comme vignerons. S’agit-il d’un simple oubli des clercs ? La possession de vignes, de vin en cave et de tout l’équipement nécessaire à sa production est enfin largement répandue parmi les habitants de la ville, surtout dans les catégories les plus aisées. L’investissement était assurément rémunérateur, élément du bien vivre aussi, pour des bourgeois, des marchands, de riches artisans, des clercs et même des membres de la cour ducale. Pour une vue d’ensemble de la viticulture et du vin produits à Dijon aux XIVe-XVe siècles, il faudra donc prendre en compte toute la population dijonnaise, sans se limiter à ceux que les rédacteurs des documents appelaient vignerons.

Annexes

Annexes

I - Liste des inventaires de vignerons conservés dans le fonds de la justice de la mairie de Dijon. Archives Départementales de la Côte d’Or (B II/356)

cote

date

défunt(s) dont les biens sont inventoriés

l/II bis

1394

Berthelomin de Bere59

1/V2

1392

Guiot de Poiseul

2/IX

1396

Pierre de Savoie

2/XI

1397

Demoingin Grosbieuf de Damberaing

2/XI

1399

Monin Maingnot

3/XIV

1401

Odot Liduchoz et Jehanne sa femme

3/XXVI

1404

Jehannote femme Hugues de Moloy

4/XXII

1409

Millot Legrillet

5/III

1409

Etiennot Journin

5/XI

1410

Jehannote femme Jehan Lifleuriet

6/XIV

1413

Andrier Barrot

6/XVIII

1413

Jehan Chaudron

6/XIX

1413

Millot Loberaul et Ysabeaul sa femme

6/XX

1413

Juenote femme Nicolas Levoillardet

6/XXVII

1413

Nicolas Lecasaudet

7/VI

1414

Guillemin Ponchassaut

7/X

1414

Girarde femme Michellot Bardeaul

7/XV

1414

Fleurance femme Guillemin Nouherete

7/XVIII

1414

Jaquot Beroignot

7/XX1

1414

Guillemin de Montot

7/XX2

1414

Hugote femme Aliot Garnier

7/XXVI

1415

Symone femme Perrenot Lecroisiet

7/XXVII

1415

Symonnot Chouote

7/XXV1II

1415

Perrenot Leportier

8/XVIII2

1416

Jehannote femme Guillaume Parisot de Balenoul

9/II

1418

Jehan Malcorant

9/V

1419

Symonnote femme Oudot Lecarnoiset

9/XXV

1419

Jehan Lebailli

9/XXXIII

1419

Etienne Naault

10/XI

1420

Jehan Pahuot et Marguerite sa femme

10/XVII

1420

Hugote femme Oudot Michiel alias Barouhet

11/X

1421

Huguenot Letixerandet

11/XI3

1421

Oudot Lemarquis

11/XXII

1422

Guillemin Prevost

11/XXXI

1423

Guillaume Poissenot

11/XXXV

1423

Bertrand Depasques et Arambour sa femme

14/XXVIII

1428

Jehan Bonno

15/XXVIII

1430

Perrenot Toulquoy

16/X

1431

Aliot Garnier

16/XI

1431

Jehan de Chenges

18/VIII

1439

Perreau Lechouet

18/X

1435

Sebille femme Hugues Jouachin

18/XXVI

1437

Viennot Bricardet

18/XXXII1

1437

Andrieu Breton

18/XXXII2

1438

Jacote femme Andrieu Breton

19/XXI

1438

Morisot Piteau

19/XXIV

1438

Etiennot Guedin

19/XXVII

1438

Symonnot Lefavey le jeune

20/1

1438

Jehan Fremiot

20/VII

1439

Symonnot Olivier

20/XII

1439

Perrenin Benoit

20/XIII bis

1439

Perreau dit Thierriot

22/VII

1440

Pierre Bergier

22/VIII

1440

Gaulterote premiere femme de Clement RyoteJehannote Desloiges sa seconde femme

22/XII

1441

Roberte femme Nardin Bonnot

22/XXIX

1446

Guillaume Vincent

23/XI

1456

Thevenote femme Guillaume Grailot

24/IV

1464

Oudot Garlot alias Courtot

25/11

1481

Perrenot Galois

25/XVII

1481

Henry Salignon

25/XXV

1495

Pierre Laurent

25/XXVIII

1497

Huguenin Roy

II. Inventaire de Bertrand Depasques et Arambour sa femme. (B II/356 cote 11 pièce XXXV)

Inventoire fait par moy Jehan Bolier, clerc de la court de la maierie de Dijon, commis a ce de honorable homme Estienne Chambellan, clerc, maieur de la ville et commune de Dijon, a la requeste de Joffroy Perrenin, vigneron demorant a Dijon, curateur de Henryete et Jehannote, seurs moindres d’ans, filles de feu Bertrand Depasques, jadis demorant a Dijon, vigneron et de Arambour jadis sa femme, des biens demorant des decéz desdits feu Bertrand et Arambour, trouvéz en l’ostel ou lesdits mariéz tenoient a leurs vivans leurs demorances, assise es feursbourgs de Saint-Nycolas de Dijon, en me chaude, de costé la maison Perrenin le Villottet d’une part et la maison de Jehan Aulis d’autre part, le second jour de juing l’an mil IIIIc vint et trois. Presens Jehan Celerier, vigneron demorant a Dijon, tuteur desdites moindres, Estienne Grillot de Poilley et Odot Lordelot, courdier, demorant audit Dijon et Jehannote femme Julien Dasnieres. Lesquelx biens ont esté tauxés et prisiés par lesdits Etienne Grillot, Odot Lordelot et Jehannote par serment en la maniere cy après declairee.

Et premierement en la chambre devant de ladite maison, en laquelle ledit feu Bertrand gesoit :

Dix linceulx60 de chenoves61 neuf, chacun de II toiles62, la piece tauxee par les dessusdits IIII gros, vaillent

III F IIII g63

Item XV autres linceulx de chenoves, que bons que maulvaix, chacun de II toiles, la pièce tauxee l’un parmi l’autre dix blans, vaillent

III F VI bl

Item une cultine64 a femme gesant65 contenant XV aulnes, tauxee

dix g

Item IIII chemises de chenoves a homme, garnies de brayes, tauxees

VI g

Item VIII touailles66 de chenoves que petis que grandes et tant viéz que neufves, contenant en tout XXX aulnes, tauxees

deux F

f. lv

Item XXXIII aulnes de tergeures67 que viéz que neufves, tauxees

XIII g

Item III livres de fy de chenoves, tauxees

I g

Item une piece de toille de lin a baptizé enflant68, contenant II aulnes, tauxee

II g

Item IIII aulnes de blanchot69, l’aune tauxee VI gros vaillent

II F

Item une aune de drap rouge, tauxee

VIII g

Item une robe de pers70 doublé de blanc dudit feu Bertrand, ja menee71, tauxee

III florins

Item une viele robe de retoul72 saingle73 a homme, tauxee

VIII g

Item II chapperons viéz a homme, l’un rouge et l’autre de griz, tauxés

III g

Item une robe de pers viéz a femme et ung chapperon de violot, tauxés

ung F

Item une arche de nouhiers74 fermant a clef, tauxee

ung F

Item une autre petit archote de fol75 et une besaces, tauxee

III g

Item une autre viele archote tauxee

I g

Item ung lit de plume garny de coultre76, de cuissin77 et d’une sarge78 royé, tout tauxé

III F

Item ung chaulit79 de pieces de bois, tauxé

VI bl

Item ung autre petit lit de plume garny de coultre, de cuissin, d’un petit orillier80 et d’une sarge royé, et ung pelisson81, tauxé

deux F

Item une viele robe a homme de vert doublé de pers, tauxee

X g

Item ung viéz goix82

II g

Ou chas83 de ladite maison

Ungs grans viéz aumaires84 de bois ferréz, tauxéz

II F

Item ungs autres petiz armaires de bois, tauxés

IIII g

Item ung petit buffot de bois a IIII piéz, III formes85 de bois a seoir sus que grans que petiz et une tauble de sappin

X g

f. 2

Item une may a prestir, une ratoire de fer86, ung tournot87 et ung brucheon88 de bois ensemble ung petit bainchot, tauxés

III g

Item XXVI escuelles d’estain que grant que petites, tauxees l’une parmi l’autre la piece ung g vaillent

III F II g

Item VIII plait d’estain que grans que petiz et une saloirete89 d’estain, tout tauxé

ung F

Item VI pintes rondes et II pintas d’estain pesant XXVI livres, la livre tauxee ung gros, vaillent

II F II g

Item III poz de couvre90 noirs, l’un grand et les II petiz, pesant XXIII livres, la livre tauxee ung gros, vaillent

XXIII g

Item ung seau a laver mains de couvre et une chauderote d’arain pesant VII livres, vaillent

VIII g

Item III vieles paelles91 d’arain, tauxees

IIII g demi

Item une autre paelle blainche

IIII g

Item ung chauderon d’arain

VI g

Item deux viéz trepier, ung grappin, une viele grille, ung viéz haste92 tout de fer, tauxé

IIII g

Item deux viéz paelles grasses d’arain, l’une grand et l’autre petite, tauxees

Vg

Item une viele bassole93, une viele quassote94 senz queue, une viele dresseure95, une escramoire96 et une viele coloire97, d’arain tout, tauxé

II g

Item une lampe de couvre

VI bl

Item ungs viéz soillot98 de bois ferrés

I g

Item ung soicle99 de fer et une corde poisseure100 garnie de chayne de fer, tauxee

ung g

Item ung seris101, tauxé

IIII bl

Item III fessours102 et II pioches, tout tauxé

VIII g

Item IIII anapz de bruyere dont les III sont garniz de clox103 d’argent, tauxé

VI g

Item ung cromasle104 de fer, tauxé

[blanc]

f. 2v

En la chambre haulte derriere de ladite maison

Ung lit de plume garny de coultre, de cuissin, d’une toie de cuissin et d’une meschant viéz coultrepointe ensemble le chaulit de bois, tauxé

II F

Item ung autre lit de plume garny de coultre, de cuissin et d’une meschant gouverte105 ensemble le caulit106 tauxé

II F

Item une arche de chaigne, tauxee

IX g

En la chambre derriere

Ung petit buffot a IIII piéz107, VI selles108 a seoir sus, ung ban a IIII piéz, II tresteaulx, une petite table, une viele arche, une rondote, une may a prestrir, II tines, une plote et ung grey109, tout de bois, tauxé

ung F

En l’esmay

Une grand cuve tenant environ XII muys, tauxee

IIII F

Item une autre cuve, tenant environ VI muys, tauxee

II F

Item une autre petite cuve tenant III muys, tauxee

X g

Item II petiz rondeau a traire110 vin

II g

Item II entonneurs de bois a entonner vin, garnie de moiche111 de fer, tauxee

II g

Item ung van a venner blé et une paire de poulains112

VI bl

Ou sellier de ladite maison

Une queue vuilde et deux tenois a fere buye113, tauxés

V g

En une autre maison estant en ladite rue, appartenant audit feu Bertrand en l’un des selliers de ladite maison

III muys de vin vermeil, tauxé

IIII F

Item une queue vuilde

III g

En l’autre sellier de ladite maison

Quatre queues de vin vermeil, tauxé la queue IIII F, vaillent

seze F.

Fig. 1. Représentation schématique des habitations de vignerons dijonnais. (dessin B. Parent)

Notes

1 Cf. J.-M. Pesez, Une maison paysanne en Bourgogne médiévale, dans Rotterdam Papers II, Rotterdam, 1975, p. 139-150 ; F. Piponnier, Une maison paysanne en Bourgogne médiévale : le mobilier, Ibid., p. 151-170.

2 B. et H. Prost, Inventaires mobiliers et extraits des comptes des ducs de Bourgogne de la maison Valois (1363-1477), 2 vol., Paris, 1902-1913.

3 Fonds de la justice de la mairie de Dijon, conservé aux Archives départementales de la Côte d’Or sous la cote B II/356. Sur l’ensemble de ces documents, voir F. Piponnier, Inventaires bourguignons (XIVe-XVe siècle), dans AAG Bijdragen, 23, Probate inventories, Wageningen, 1980, p. 127-140.

4 Leur liste fait l’objet de l’annexe I. Les références à un inventaire sont données ci-après par l’indication du nom de son titulaire et de l’année où il a été établi.

5 Sur ce thème voir J.-M. Pesez, Cave, cellier et maison vigneronne au Moyen Âge, dans Vignerons, Bulletin du Centre Pierre Léon d'histoire économique et sociale, 3-4, 1996, p. 11-16. D’autres inventaires dijonnais confirment cette hypothèse en précisant que le cellier se trouve « dessoubs la maison » : Lemoutardier (1397) ou « dessoubs ladite salle » : Quetigney (1400).

6 La forte pente sur laquelle sont édifiées les maisons de ce village et l’appui pris par certains bâtiments sur la falaise ou sur de gros blocs rocheux, font que certains celliers ou resserres peuvent être considérés comme partiellement excavés.

7 Jehan Mercier (1396).

8 Depasques (1396).

9 Jehan Maulmeu (1394).

10 J.-M. Pesez, op. cit. à la note 1.

11 Ce terme désigne toute pièce habitable, quel que soit son mode d’utilisation au moment de l’inventaire : pièce à vivre, réserve de meubles ou de marchandises, mais aussi, bien sûr, chambre à coucher. La chambre à coucher des maîtres de maison est généralement indiquée par la mention « chambre ou gisoit ledit... ».

12 Cf. J.-M. Pesez, Le village et la maison de la Côte viticole en Bourgogne : passé lointain et passé récent, dans Géographie historique du village et de la maison rurale, Paris, 1979, p. 121-135 ; R. Bucaille, J.-M. Pesez, L'habitat paysan en Bourgogne viticole du XIVe au XIVe siècle. Approche anthropologique, dans Archeologia medievale, VH, 1980, p. 73-82.

13 Voir l’annexe Π.

14 Savoie (1396) : « une queuhe de despence » ; Grosbieuf (1397) : « une queuhe de despence » ; de Moloy (1414) : « II poinçons de despances, IIII autres petis poinçons ou il a de la despance » ; Lefavey (1438) : « trois muys de despence X gros » ; Garlot (1464) : « trois muys de despense ».

15 Grosbieuf (1397) : « un poinson ou il a du vin que l’on despence, une queuhe de despence ».

16 Le mesurage des vins se fait à Dijon en queues de 32 setiers et setiers de 8 pintes. D’après une pinte-étalon datant de 1560 conservée à la mairie de Dijon, la queue de Dijon aurait alors compté 431,10 litres. Il n’est pas certain toutefois que les mesures soient restées fixes entre la fin du XIVe et le milieu du XVe siècle. Cf. H. Dubois, Les foires de Chalon et le commerce dans la vallée de la Saône à la fin du Moyen Age (v. 1280-v. 1430), Paris, 1976, p. 471-472. Deux muids équivalent à une queue.

17 Michiel alias Barouhet (1420) : « vin nouvel du creu de Poussot et de Dessoubz la Ville » ; Salignon (1481) : « vin vermeil du creu de Grant Champ et de Gemois ».

18 Naault (1419) et Depasques (1423).

19 Contrairement à celle de Mercier (1396), où se trouvait une « cavote » ; « ung treul garni a truiller vin » figure chez ce dernier, « en la cour darriere » ; il est donc distinct mais proche du bâtiment d’habitation. Le « treul » peut être complètement séparé de la maison : celui d’un riche dijonnais, Poissenot (1412) qui demeurait en ville est situé « hors la Porte Neuve ».

20 Depasques (1423) et Garlot (1464).

21 Entre autres : Savoie (1396) : « environ demi quartaul de tourte » ; de Moloy (1404) : « une arche de chaisgne en laquelle il a environ ung bichot de froment » ; Lefavey (1438) : « Premierement une quartranche et demye de poix... VII gros, item une quartranche de feves taxee VI gros, item pour la portion desdits moindres d’un peu de millot Π gros, item sept quartranches d’orge, la quartranche tauxee V gros vaillent [blanc], item dix quartranches de froment, la quartranche tauxee VIII gros » ; Garlot (1464) : « quinze quartheranches froment et trois quartheranches seigle tauxees tout ensemble XVI gros ».

22 Depasques (1423).

23 Piteau (1438) ; Garlot (1464).

24 Naault (1419).

25 Depasques (1423) : « Il entonneurs de bois garniz de moiche de fer tauxés II gros » ; Garlot (1464) : « ung petit de fer blanc ».

26 Desforges (1412).

27 Bardeaul (1414).

28 Sur les « tenoz a fere buee », voir F. Piponnier, Les Dijonnais et l'eau à la fin du Moyen Âge, dans MÉFRM, 104-2, 1992, p. 485486. Garlot (1464) : « IIII viéz tenots a fere buye tant grans que petiz » ; deux « tenots » sont conservés dans les celliers de Bardeaul (1414), Depasques (1423) ; un seul chez Grosbieuf (1397), de Moloy (1404), Lobereaul (1413), Malcorant (1418).

29 Bardeaul (1414) : « Il chasieres » ; chez Garlot (1464), c’est au solier que se trouve la « chasiere a tenir fromaiges ».

30 Naault (1419) : « une petite mait a pestrir paste » ; Lobereaul (1413) : « une mait a prestir paste ».

31 Lobereaul (1413) : « deux grers et quatre escuelles tout de bois ».

32 De Moloy (1404) : « ung petit bacon salé » ; Lefavey (1438) : « demy lar tauxé VIII gros,... une pinte de sain de porc tauxé II gros,... une pinte d’uille tauxee ΙII gros ».

33 De Moloy (1404) : « une petite quasse ronde » ; Bardeaul (1414) : « ΙII poz de terre ».

34 Lobereaul (1413).

35 Lefavey (1438).

36 Cf. note 48.

37 De Moloy (1404) : « En ung solier hault dessus la cusine... II fessours a fessourer » ; Bardeaul (1414) : « En la chambre darriere, deux fessours » ; Lebailli (1419) : « En la chambre basse devant II fesseurs prisés II gros » ; Naault (1419) : « Ou chas [= cuisine]... ung goix, deux foussoux et une pioiche » ; Depasques (1423) : « Ou chas... III fessours et II pioiches tout tauxé VIII gros » ; Fremiot (1438) : « En la chambre ou couchoit a son vivant ledit Jehan... une pioiche I gros » ; Garlot (1464) : « En l’esmay sur le jardin derriere... cinq fosseurs, une coignie, ung pic, une trainche tauxés tout ensemble VIII gros ».

38 Grosbieuf (1397) : « En une chambre haulte...deux hostes » ; de Moloy (1404) : « Ou solier dessus la cuisine... IIII viels benatons » ; Malcorant (1418) : « en l’estable... une XIIne de benastons » ; Lebailli (1419) : « ou soullier... une benaste de bagettes (sic) a porter terre » ; Garlot (1464) : « Ou solier dessus la chambre... deux benastons ».

39 Levoillardet (1413).

40 Savoie (1396) : « une chievre rousse » ; Prevost (1422) : « une chievre tauxee VI gros » ; Olivier (1439 : « une chievre ». Des vaches, veaux et/ou génisses se rencontrent chez Journin (1409), Lifleuriet (1410), Levoillardet (1413), Leportier (1415), Lecarnoiset (1419), Naault (1419), Bonno (1428), Olivier (1439), Bergier (1440), Bonnot (1441), Vincent (1446).

41 Monin Maingnot était, en 1396, exempté de l'imposition urbaine des « marcs » en sa qualité de « saintual » de l’abbaye (renseignement communiqué par Anne Galanaud). Le terme de « saintual » désigne dans ce fonds d’archives les dépendants des institutions ecclésiastiques (H. Dubois, Sur les comptes des « marcs » de Dijon, dans Les cadastres anciens des villes, Rome, 1989, (Collection de l’É.F.R., 120), p. 165.

42 Maingnot (1399) : « X vaisseaulx de moichotes presees la piece ΙII gros vaillent II F demi » ; Malcorant (1418) : « quatre vaisseaulx de moichotes tauxés ung franc ».

43 De Moloy (1404) : « II siseaulx de fer a maçon » ; Chaudron (1413) : « une truelle a maçon ».

44 Appelées « berrou » et « barrou » dans nos documents, ces vrilles servent à percer le logement des chevilles qui fixent la barre des fonds de tonneaux.

45 L’ensemble d’outils de tonnellerie le plus complet est répertorié chez Legrillet (1409) : « une plainche garnie de fer... une jaubloire, I viéz barrou, ung fer a bondener queveaulx, I compas, une aissole, I chien a tonnellier ».

46 Par exemple, chez Grosbieuf (1397) : « II pieces d’enfonceures de cuves ».

47 Renseignement communiqué par Anne Galanaud.

48 Parisot (1416) : « Ou cellier dudit hostel, ung mestier de tixiere garni de pignes, de trois tours, deux escourseures, I bobine, I ordour et une viéz archote, tout tauxé X gros ».

49 De Poiseul (1392) : « I boisseau de chenevey » ; Garlot (1464) : « pour deux boisseaulx et demi de chenevey dix blancs ».

50 Piteau (1438).

51 De Bere (1394).

52 Galois (1481).

53 Savoie (1396) : « II tours garnis a faire laine » ; Liduchoz (1401) : « ung tour a fillé laine » ; Parisot (1416) « trois tours » ; Garlot (1464) : « ung vielz tourt a filler lainne ».

54 Liduchoz (1401) : « V paires de gardes viéz a gardé lainne ».

55 Parisot (1416) ; G. De Poerck, La draperie médiévale en Flandre et en Artois. Technique et terminologie, 3 vol., Bruges, 1951, I, p. 49, 57, note que les peigneuses de laine devaient être munies d’un tablier de cuir appelé « escourcheul ».

56 Voir F. Piponnier, Dijon au XVe siècle, l'entreprise dans une ville commerçante et artisanale, dans La France n'est-elle pas douée pour l'industrie ?, L. Bergeron, P. Bourdelais (dïr.), à paraître.

57 Voir F. Piponnier, Fortune et genre de vie des vignerons dijonnais (fin XIVe-XVe siècle), dans Vignerons, Cahiers du Centre Pierre Léon d’histoire économique et sociale, 3-4, 1996, p. 41-48.

58 Nombre d’entre eux sont encore désignés par le nom de leur village d’origine (voir liste, annexe I) et parfois restent soumis à la mainmorte du seigneur du lieu : tel est le cas de Hugues de Moloy (1404), et aussi de Huguenin Roy (1497).

59 Les graphies adoptées pour la transcription des noms et prénoms sont celles portées sur nos documents.

60 Draps de lit.

61 Chanvre.

62 Larges de deux lés de toile.

63 Les abréviations F pour franc, g pour gros, bl pour blanc ont été normalisées dans la transcription. Un franc compte 12 gros et un gros 4 blancs.

64 Courtine.

65 Accouchée.

66 Serviettes ou nappes.

67 Serviettes.

68 Voile posé sur le nouveau baptisé au cours de la cérémonie.

69 Blanchet.

70 Drap bleu.

71 Portée et usée.

72 Étoffe retournée ? Des tailleurs dijonnais effectuent ce type de travail.

73 Non doublée.

74 Noyer.

75 Hêtre.

76 Matelas.

77 Oreiller volumineux.

78 Serge, sorte de tenture qui peut être soit tendue sur les murs, soit plus souvent employée comme couverture.

79 Châlit.

80 Moins diffusés que les « coussins » et généralement plus décorés, les « oreillers » correspondraient plutôt à ce que l’on appelle coussin à l’époque contemporaine.

81 Vêtement de fourrure porté par les femmes sous la robe ou la cotte.

82 Serpe.

83 La pièce ainsi nommée dans certains inventaires dijonnais remplit la fonction de cuisine, comme le prouve son mobilier.

84 Armoire ou placard.

85 Banc sans dossier.

86 Racloir de pétrin.

87 Planche sur laquelle étaient « tournés » (modelés) les pains sphériques.

88 Panier ou corbeille, la forme habituelle est « beruchon ».

89 Salière.

90 Cuivre.

91 Poêles.

92 Broche.

93 Appelée aussi « bassin a queue », elle est utilisée pour puiser l’eau dans le seau.

94 Petite casserole.

95 Cuillère à pot.

96 Écumoire.

97 Passoire.

98 Seille ou seau.

99 Cercle.

100 Corde à puits, dite habituellement « corde poiseure ».

101 Séran.

102 Houe.

103 Appliques décoratives fixées par un rivet.

104 Crémaillère.

105 Couverture.

106 Châlit.

107 Petite table à pieds attenants, par opposition à la table sur tréteaux ; peut être pourvue d’une étagère ou d’un tiroir.

108 Tabourets.

109 Jatte ou écuelle. Un autre inventaire dijonnais mentionne « I grant grey de bois et Π autres petites ecuelles de bois ».

110 Tirer, soutirer.

111 Ce terme semble désigner le tuyau de l’entonnoir ; trois tuyaux métalliques correspondant à cet usage ont été découverts à Dracy, deux sont en tôle de cuivre, le troisième en fer.

112 Sorte de civière servant à transporter ou décharger le vin en tonneaux.

113 Cuveaux à lessive.

Table des illustrations

Légende Fig. 1. Représentation schématique des habitations de vignerons dijonnais. (dessin B. Parent)
URL http://books.openedition.org/psorbonne/docannexe/image/23637/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 197k

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