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Les conseillers municipaux de Paris sous la Troisième République (1871-1914)

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Nobuhito Nagaï

Première partie. Paris et son assemblée au XIXe siècle

Chapitre III. Évolution politique du conseil municipal de Paris de 1871 à 1914

Texte intégral

1Traitant un groupe d’élus, notre étude prosopographique doit tenir compte de leurs tendances politiques. Pour une époque où les partis politiques n’étaient pas aussi structurés qu’aujourd’hui, les tendances politiques des élus peuvent être connues par l’analyse de deux éléments : les élections municipales, et les groupes formés à l’intérieur de l’assemblée.

  • 1 Giard Louis, Les élections à Paris sons la Troisième République, op. cit. Cette étude, portant sur (...)
  • 2 Offerle Michel, Les socialistes et Paris, 1881-1900, op. cit.
  • 3 Jacquemet Gérard, Belleville au xixe siècle, op. cit.
  • 4 Voir la liste des sources imprimées.
  • 5 En plus des quelques mémoires de maîtrise cités dans la bibliographie, nous signalons l’article de (...)

2Fait souvent signalé, il existe peu de travaux historiques sur la vie politique parisienne de l’époque contemporaine. Malgré la thèse de sociologie de Louis Giard sur les élections législatives à Paris sous la Troisième République1, la thèse de sciences politiques de Michel Offerlé sur les socialistes au Conseil municipal de Paris2, ou l’étude monumentale de Gérard Jacquemet consacrée à Belleville au xixe siècle3, les forces politiques de la capitale et leurs activités restent mal connues. D’un autre côté, faire une étude approfondie sur ce sujet n’est pas réalisable dans le cadre que nous nous sommes fixé. Ainsi avons-nous procédé à quelques recherches sur les élections municipales de Paris de 1871 à 1914, non pas en vue d’analyser le fait électoral lui-même – qui mérite de faire l’objet d’une étude à part – mais pour connaître l’évolution politique globale du Conseil municipal et la tendance politique de chaque conseiller. Pour ce faire, nous avons consulté une dizaine de grands quotidiens nationaux, de différentes tendances4, et croisé les résultats électoraux qu’ils donnent. Nous avons également utilisé les travaux déjà réalisés en la matière5.

3Quant aux groupes constitués au Conseil, ils ne peuvent être connus dans leurs détails que par un dépouillement, tant de nombreux journaux que des archives de diverses forces politiques existant à Paris à l’époque. Nous nous sommes contenté de consulter quelques grands quotidiens de différentes tendances ainsi que les procès-verbaux du Conseil municipal.

A. Élections municipales à Paris de 1871 à 1914

4Le mode de recrutement des membres du Conseil municipal de Paris était, comme nous l’avons vu dans le chapitre précédent, le scrutin uninominal à la majorité absolue au premier tour, et à la majorité relative au second, dans le cadre du quartier. La durée du mandat était de trois ans de 1871 à 1896, et de quatre ans de 1896 à 1914. Pour la période étudiée, il y a eu treize consultations générales au total.

  • 6 Bailleux de Marisy. « La ville de Paris devant le Corps législatif », art. cit., p. 438.
  • 7 À titre d’exemple, C. Lavollée, à propos d’une éventuelle réforme à donner à l’administration pari (...)

5Les contemporains soulignaient les caractères fortement politiques des élections municipales de Paris. À la fin du Second Empire, lorsque la réforme du régime administratif de la capitale était à l’ordre du jour. Bailleux de Marisy notait déjà que « Paris n’est ni Londres, ni Washington, ni New York. Le conseil municipal serait élu surtout au point de vue politique, et un conseil de quarante, soixante ou quatre-vingts membres prétendrait bien certainement, comme représentant direct de la capitale, exercer une influence décisive sur les destinées du pays »6. D’autres auteurs, ainsi que des articles de journaux, viendront manifester la même crainte7.

TABLEAU III-1. Dates des élections municipales générales à Paris sous la Troisième République

TABLEAU III-1. Dates des élections municipales générales à Paris sous la Troisième République

6Les conseillers municipaux issus de chacun des treize scrutins peuvent être classés de la façon suivante :

TABLEAU III-2. Résultats des élections municipales générales selon les tendances politiques

TABLEAU III-2. Résultats des élections municipales générales selon les tendances politiques

N.B. : Les colonnes des républicains modérés et des républicains conservateurs sont regroupées à partir de 1884, en raison de la difficulté à distinguer ces deux tendances.
(a) Le nombre total des conseillers élus les 23-30 juillet 1871 est de 78, à cause de la triple élection de Mottu, élu à la Folie Méricourt (XIe), au Père Lachaise (XXe) et à Saint-Ambroise (XIe) ; (b) Le nombre dans la colonne « républicains radicaux » est celui des « autonomistes » : (c) Le chiffre entre parenthèses est celui des socialistes « unifiés ».

7Afin de saisir l’évolution politique de la capitale par rapport à celle de l’ensemble du pays, nous avons également réparti nos élus sur l’échiquier politique général de l’époque.

TABLEAU III-3. Répartition des élus selon le critère Droite-Gauche

TABLEAU III-3. Répartition des élus selon le critère Droite-Gauche

N.B. : Le classement est celui utilisé dans l’enquête sur les maires organisée par le Centre de recherches sur l’histoire du xixe siècle (Sorbonne). Voir Agulhon Maurice, Girard Louis, Robert Jean-Louis, Serman William et al., Les maires en France, op. cit., p. 134-135.
- Les tendances dont les chiffres sont en gras sont composantes de la majorité gouvernementale de la période.
- Nous avons regroupé certaines tendances lorsqu’il était difficile de les distinguer.
(a) Seul le légitimiste Riant y est classé ; (b) Il s’agit de deux boulangistes, Girou et Prunières ; (c) Les républicains se réclamant de l’Alliance républicaine démocratique.

8Nous pouvons apercevoir trois phases : 1) de 1871 à 1881, une décennie durant laquelle les républicains radicaux ont progressivement consolidé leur hégémonie ; 2) de 1881 à 1900, période caractérisée d’une part par la prépondérance des radicaux, et d’autre part par la poussée des socialistes au détriment des républicains modérés ; 3) de 1900 à 1914, période où Paris a basculé à droite.

1. Triomphe de la République (1871-1881)

  • 8 II s’agit toutefois du nombre minimal : l’identification des candidats, essayée auprès de quelques (...)
  • 9 Également se sont présentés sans être élus : Victor Alexandre Paillard, conseiller municipal du II (...)
  • 10 Les autres candidats sont : Achille Labat, adjoint (1860-1869) puis maire (1870) du XVIIIe arrondi (...)
  • 11 Mais Fremyn a donné sa démission en décembre 1875, pour des raisons qui nous échappent. D’autre pa (...)

9En 1871, la rupture avec le régime défunt était nette. Aux élections des 23-30 juillet, seuls 6 anciens membres du Conseil municipal de Paris s’étaient présentés8, dont 2 furent élus, tous deux dans le XVIIe arrondissement : Lucien Puteaux, entrepreneur de travaux aux Batignolles, nommé conseiller municipal en novembre 1869 ; Ernest Gouin, de la célèbre dynastie de banquiers de Tours, conseiller municipal de Paris depuis 1859, après avoir rempli les mêmes fonctions dans la commune des Batignolles de 1855 à 18599. Au même scrutin, six anciens maires ou adjoints d’arrondissement nommés sous le Second Empire avaient posé leur candidature, dont trois avec succès : Victor Auguste Frémyn, élu aux Invalides (VIIe) en 1871, adjoint au maire du VIL de 1860 à 1869 ; Victor Joseph Gavrel, élu au Petit Montrouge (XIVe) en 1871, conseiller municipal et adjoint de Montrouge depuis 1852, avant de devenir adjoint (1859-1869) puis maire (1869-1870) du XIVe arrondissement ; Léon Ohnet, élu dans le quartier de Rochechouart (IXe) en 1871, nommé adjoint du IXe en 186610. Sur ces cinq anciens édiles du Second Empire élus en 1871, seul Frémyn a siégé au deuxième Conseil municipal élu en novembre 187411.

  • 12 La Ligue proposait des candidats de tendance radicale. Il y avait à son côté le Comité de Turbigo (...)

10A l’issue de la campagne électorale durant laquelle s’étaient affrontées trois listes, dont l’une était soutenue par la Ligue d’union républicaine des droits de Paris créée pendant la Commune en vue de jouer l’intermédiaire entre Paris et Versailles12, le premier conseil municipal de Paris élu au suffrage universel s’est formé avec une majorité de républicains modérés et conservateurs.

  • 13 Avec celui de Martial Bernard, considéré par divers journaux comme « centre-gauche ».

11Au cours d’une série d’élections complémentaires organisées entre 1871 et novembre 1874, républicains et radicaux ont gagné du terrain, en enlevant 4 sièges aux conservateurs. La tendance s’est confirmée aux scrutins suivants. En 1874, l’ensemble des républicains modérés et des républicains radicaux a réussi à obtenir 67 des 80 sièges. Cette victoire s’est réalisée au détriment du camp conservateur : parmi les 37 conseillers républicains conservateurs ou monarchistes élus en 1871, seuls 12 ont conservé leur mandat en 1874. Les élections générales de 1878 ont été une défaite totale pour les conservateurs, qui n’ont obtenu que 4 sièges13.

2. Radicalisme parisien (1881-1900)

12En 1881 et en 1884, le nombre des élus républicains radicaux se maintient au niveau de la fin de la décennie précédente, tandis que la droite a regagné quelques sièges. Mais ce qui caractérise le plus ces scrutins, notamment celui de 1884, c’est l’apparition du courant autonomiste.

  • 14 Il existe une abondante littérature sur le régime administratif de Paris, mais le travail le plus (...)

13Dès 1871, une certaine autonomie pour la capitale était plus ou moins revendiquée par tous les candidats à l’assemblée municipale. Sans être mis au premier plan pendant la période de Thiers et de l’Ordre moral, ce thème a pris de l’ampleur en 1880 : des propositions et des vœux ont été adoptés au Conseil municipal, réclamant soit le retour de Paris dans le droit commun, soit une autonomie plus large. Parmi ces projets, le plus important est celui rédigé par le conseiller radical Sigismond Lacroix et adopté par le Conseil le 6 novembre 188014. Dans les campagnes électorales des années 1880, notamment dans celle de 1884, l’autonomie communale était le principal thème qui constituait le clivage politique majeur, la traditionnelle question république/monarchie étant laissée de côté momentanément. Le scrutin de 1884 a donné une large victoire aux autonomistes, qui comptaient 35 membres au Conseil.

14Quant aux républicains n’adhérant pas au programme des autonomistes, ils se faisaient appeler « républicains municipaux ». L’adjectif signifiait leur volonté de ne pas dépasser les attributions données au Conseil municipal de Paris : tout en admettant la nécessité de rendre plus libéral le régime administratif de la capitale, ils considéraient que cette question, d’ordre purement politique, ne pouvait être traitée qu’au Parlement.

  • 15 Sur les 35 autonomistes de 1884. 4 ont été élus en 1881 avec l’étiquette « républicain » (et non p (...)

15Malgré son caractère apparemment non politique, l’autonomie communale était revendiquée surtout par les élus radicaux. Quant aux républicains hostiles ou réticents à l’égard des projets autonomistes, ils étaient principalement des républicains modérés ou opportunistes15.

  • 16 Chiffre donné par l’Année politique, 1881.

16Les élections de 1881 et de 1884 ont été marquées aussi par le retour des socialistes. Après l’élection – invalidée – de l’ancien communard Trinquet en juin 1880, 57 « collectivistes ou communalistes » ont posé leur candidature aux élections municipales générales de janvier 1881, sans qu’un seul d’entre eux soit élu16. Il y eut deux socialistes à l’assemblée élue en 1884.

17De 1884 jusqu’à la fin du siècle, la part des radicaux-autonomistes se stabilise. Aux municipales de 1887, ils ont remporté 46 sièges sur 80 – la majorité absolue à eux seuls – et ainsi réalisé le succès le plus net de toute notre période. Ce scrutin marque également la fin du thème de l’autonomie communale : la revendication, tout en restant présente dans les programmes des candidats, allait s’estomper derrière d’autres points de débats, et les journaux utilisèrent de moins en moins l’appellation d’autonomiste. Après 1887, le nombre des radicaux se maintient à leur niveau précédent, avec 33 à 36 membres.

  • 17 Le Temps, 10 mai 1887.

18Sur leur gauche, les socialistes progressèrent à chaque élection. En 1896, ils comptaient 19 conseillers, soit plus nombreux que les républicains. Ces derniers subissaient l’effet, direct ou indirect, de la montée des socialistes. La feuille modérée le Temps a considéré les élections municipales de 1887 comme « l’échec des opinions républicaines modérées au profit de toutes les opinions extrêmes (...) », parce que « les candidats qui défendaient avec les idées républicaines moyennes les véritables intérêts municipaux de Paris ont été placés presque partout entre deux feux : d’une part les réactionnaires, qui leur avaient suscité des concurrents dans la plupart des quartiers, et de l’autre les autonomistes et les révolutionnaires, qui avaient redoublé de zèle pour s’assurer une pleine et décisive victoire »17.

19La droite, elle, a légèrement amélioré son score par rapport aux débuts de la République. En 1890 et en 1893, elle avait même une quinzaine d’élus, si l’on y inclut ceux se réclamant du boulangisme.

  • 18 Offerle Michel, op. cit., p. 200.

20Celui-ci n’a pas réussi à maintenir son résultat des législatives de 1889. Au Conseil municipal élu en avril 1890 – quinze mois après l’élection du général face au conseiller municipal radical Édouard Jacques – les révisionnistes n’étaient que deux, bien que l’ensemble des candidats du mouvement ait obtenu au même scrutin 27,56 % des suffrages exprimés18.

21Aux renouvellements de 1893 et de 1896, peu de changements significatifs se produisent, sauf l’augmentation de la part des socialistes. A chacun des deux scrutins, 74 conseillers sortants s’étaient représentés, dont 64 et 68 respectivement ont été réélus.

3. Basculements (1900-1914)

22La période allant de 1900 à 1914 est celle où se sont effectuées d’importantes restructurations politiques au Conseil municipal de Paris. Au cours de ces quatorze années, la capitale a basculé à droite : de la ville révolutionnaire et d’avant-garde qu’il était tout au long du xixe siècle, Paris est devenu conservateur au tournant du siècle, et le reste jusqu’en 2001.

  • 19 Sur les élections municipales de 1900, voir Szlowicz Valérie, Le conseil municipal de Paris de 190 (...)
  • 20 Les élections municipales sont organisées au même moment dans toute la France (6-13 mai). La plupa (...)
  • 21 Selon l’expression de l’Année politique, 1900, pp. 125-129.
  • 22 Les élections cantonales des 20 et 27 mai suivant ont entériné la domination des antiministériels (...)

23Les élections municipales de 1900 qui se sont déroulées au milieu des agitations nationalistes, se sont soldées par une victoire aussi éclatante qu’inattendue des antiministériels19. Le mouvement nationaliste, en recul en province20, est parvenu à conquérir la capitale. La Ligue de la patrie française, la Ligue des patriotes, ainsi que « certains groupements socialistes patriotes »21, présentaient des candidats dans presque tous les quartiers de Paris. Au terme d’une campagne très acharnée – un des points centraux de débat était l’achat voté par la municipalité sortante du livre d’Urbain Gohier, L’armée contre la nation, qui comprenait, comme le titre le suggère, des passages hostiles à l’état-major et aux officiers –, 30 nouveaux membres sont entrés à l’Hôtel de ville, parmi lesquels 24 nationalistes. Au total, 46 des 80 élus étaient plus ou moins antiministériels : 28 nationalistes, 10 conservateurs et 8 républicains. Pour la première fois dans l’histoire électorale, la droite était la maîtresse de l’Hôtel de ville22. La nouvelle assemblée municipale a annulé le crédit voté pour le livre de Gohier. À gauche, l’échec a été particulièrement cuisant pour les radicaux, qui ne comptaient plus que 14 élus, alors que les socialistes ont réussi à maintenir leur contingent.

24Le rapport de force s’est inversé quatre ans plus tard. Radicaux-socialistes et socialistes ont obtenu 44 sièges, mais c’est maintenant les socialistes qui, avec leurs 26 conseillers, avaient le dessus sur les 18 radicaux. Les nationalistes ont vu diminuer leur effectif, de 28 à 21. Le résultat du scrutin de 1908 a retrouvé à peu près le même équilibre de force entre droite et gauche, mais l’effacement du nationalisme, au moins au niveau de l’étiquette politique, a gonflé la part des républicains modérés et des progressistes.

  • 23 Les 5 conseillers élus avec l’étiquette « républicain démocratique » (proche de l’Alliance républi (...)

25A la suite de la dernière consultation avant la Grande Guerre qui a eu lieu en mai 1912, la droite a regagné le contrôle de l’Hôtel de ville, qu’elle conserve durant le xxe siècle. De fait, un changement dans la majorité municipale était survenu à l’automne 1909, au milieu des tumultes qu’a causés la nouvelle de l’exécution de l’anarchiste espagnol Francisco Ferrer. Les radicaux s’étaient divisés sur les diverses questions provoquées par la mort du militant espagnol, et une partie d’entre eux avaient fait coalition avec les conseillers de droite pour former une nouvelle majorité. Quand les élections municipales de 1912 ont eu lieu, la scission dans la gauche n’était toujours pas réparée : les « républicains progressistes et anticollectivistes » sont sortis vainqueurs à l’issue du scrutin23.

4. Quarante ans de suffrage universel

26En observant l’ensemble de la période de 1871 à 1914, nous remarquons avant tout la prépondérance des républicains radicaux.

  • 24 Clemenceau siégea de 1871 jusqu’en 1876 comme élu du quartier de Clignancourt (XVIIIe). Ranc repré (...)

27Ils étaient déjà présents en nombre non négligeable – nous en avons compté 14 – à la suite du premier scrutin de la Troisième République, qui avait eu lieu deux mois seulement après la « Semaine sanglante ». Clemenceau et Ranc ont été élus à ce moment-là24. Les républicains radicaux ont dominé l’assemblée municipale jusqu’à la dernière année du siècle, au moment où nationalistes et républicains antiministériels ont obtenu la majorité et formé la première municipalité de droite à Paris sous le régime du suffrage universel. Le nombre des républicains radicaux au Conseil municipal était d’environ 35 ; en 1887, il a même dépassé la moitié des 80 sièges. De 1874 à 1900, la majorité municipale s’est constituée, comme nous allons le voir plus loin dans ce chapitre, autour de ce pôle des républicains radicaux, tantôt avec la participation des républicains modérés, tantôt avec le concours des socialistes.

  • 25 Dans l’entre-deux-guerres, la municipalité de Paris était toujours de droite. Selon Yvan Combeau, (...)

28Après l’éclatante victoire des nationalistes au tournant du siècle, les radicaux sont revenus au pouvoir en 1904, mais distancés, cette fois, par les socialistes. À la suite de la scission survenue au sein de leur groupe en octobre 1909, les radicaux ont été de nouveau écartés du pouvoir municipal de la capitale, qu’ils ne retrouvent plus. Au cours de ce conseil de 1908-1912, Paris a basculé à droite pour longtemps25.

  • 26 Nous avons inscrit les résultats des élections municipales sur des cartes. Voir les graphiques III (...)

29Le radicalisme municipal de Paris avait ses fiefs dans les arrondissements périphériques, sauf le XVIe, mais également dans des quartiers centraux populaires, souvent à l’industrie traditionnelle, tels que le IIIe, une partie du IVe (Saint-Merri et Saint-Gervais), le Ve et le XIe. Le IIIe arrondissement, qui a élu, de 1887 à 1900, 4 conseillers radicaux à chaque scrutin, était considéré comme symbole en quelque sorte du radicalisme de la capitale. C’est dans le quartier des Enfants-Rouges que Louis Dausset, secrétaire général de la Ligue de la patrie française et étranger à la circonscription, a posé sa candidature en 1900, pour affronter le président radical du Conseil municipal Louis Lucipia, qu’il a battu en ballottage26.

30À partir des années 1880 les radicaux ont vu apparaître sur leur gauche les socialistes. Ceux-ci ont constamment augmenté leur influence à l’assemblée.

  • 27 Il a posé sa candidature aux élections municipales générales des 9-16 janvier 1881, sans réussir. (...)
  • 28 Sur ce sujet voir notamment Offerle Michel, op. cit.

31Les socialistes furent pratiquement absents des campagnes électorales dans les années 1870. Le premier socialiste entré au Conseil municipal est Trinquet. Cet ancien membre de la Commune, condamné aux travaux forcés à perpétuité, a été élu au scrutin partiel des 13-20 juin 1880 dans le quartier du Père Lachaise (XXe). Son élection invalidée27, d’autres socialistes n’ont pas tardé à entrer à l’Hôtel de ville, parmi lesquels quelques grandes figures du socialisme français : Edouard Vaillant, représentant du quartier du Père Lachaise de 1884 à 1893, Paul Brousse, élu des Épinettes (XVIIe) de 1887 à 1907, ou encore Marcel Cachin, conseiller de la Goutte d’Or (XVIIIe) de 1912 à 191428.

32Contrairement aux radicaux, les socialistes n’ont pas subi l’effet du triomphe des nationalistes en 1900. En 1904, ils ont inscrit leur meilleur score d’avant-guerre en remportant 26 sièges sur 80. Au début du xxe siècle, les socialistes étaient le parti-clé, côté gauche du Conseil.

33Leurs bastions étaient la partie nord-est de la ville : les XIe, XIIe (à l’exception du Bel-Air qui n’a jamais été conquis pendant notre période), XVIIIe, XIXe, XXe (notamment les quartiers de Belleville et du Père Lachaise). Les quartiers de Grenelle, de Javel (XVe), des Épinettes (XVIIe) ou encore de Croulebarbe (XIIIe) élurent constamment des représentants socialistes. Les fiefs électoraux des socialistes avaient souvent été ceux des radicaux, sauf le IIIe qui est resté à ces derniers.

34La colonne « conservateurs, monarchistes » du tableau III-2 se compose d’élus de nuances différentes. Y sont classés légitimistes et bonapartistes, ainsi que les élus inclassables mais considérés par divers journaux comme proches des autres conservateurs.

35Lors du classement, nous avons accordé plus d’importance à l’appartenance au groupe conservateur du Conseil municipal – ce qui est loin d’être facile à connaître – qu’à l’étiquette elle-même. La difficulté est moindre pour les périodes où le clivage entre conservateurs et républicains est net : c’est le cas des années 1880-1890. Le classement est plus délicat pour les autres périodes. Au moment où le scrutin de 1871 a eu lieu, les différents groupements politiques étaient encore en voie de formation : au Conseil municipal issu de ce scrutin, la division en groupes semblait ne pas exister. D’autre part, les élections de 1900 et de 1904 ont momentanément mis de côté les clivages politiques traditionnels.

36Au cours de la période étudiée, le nombre des conseillers conservateurs reste stable, autour de 10, sauf en 1878 où il est tombé à 3. Ce qui semble montrer la stabilité de leur électorat. Ils étaient élus presque toujours dans les mêmes circonscriptions : le VIIe arrondissement sauf le quartier du Gros Caillou, le VIIIe, ainsi qu’une partie du IXe (Chaussée-d’Antin) et du VIe (Odéon, Notre-Dame-des-Champs).

  • 29 Rémond René, Les droites en France, Aubier, 1982, pp. 157-158. Le rapport entre le nombre des élec (...)

37Le succès des nationalistes aux élections de 1900 a été spectaculaire. Après l’échec relatif du boulangisme aux élections municipales de 1890, le nationalisme a obtenu un résultat inattendu en l’emportant dans 28 quartiers, parmi lesquels quelques fiefs des radicaux comme le IIIe et le Ve, et le XVIIIe arrondissement, un des bastions socialistes. La majorité antiministérielle qu’ils ont formée avec d’autres républicains et conservateurs n’a duré que quatre ans, mais l’effet à long terme de cette expérience sur la vie politique ultérieure n’est sans doute pas négligeable. En revanche, le basculement qui s’est produit dans la composition politique du Conseil municipal ne reflète pas forcément l’opinion des électeurs parisiens. Dans le vote de 1900, la gauche restait majoritaire dans l’électorat, mais l’inégalité de représentation entre les circonscriptions privilégiait les quartiers du centre au détriment des quartiers périphériques et populaires, bastions des radicaux et des socialistes29.

38Les républicains modérés sont eux aussi hétérogènes. L’appellation se diversifie : « républicain municipal », « républicain indépendant », « républicain anticollectiviste », « républicain libéral ». Leur effectif diminue à partir du milieu des années 1880, effet en partie du progrès des socialistes. Leur petit nombre en 1900 et en 1904 tient à l’apparition du courant nationaliste, qui a attiré, semble-t-il, une bonne partie de leur électorat. Les républicains modérés étaient élus surtout dans les quartiers centraux de la rive droite, les Ier, IIe (sauf Bonne-Nouvelle, quartier acquis au radicalisme), IXe, Xe ainsi que dans le XVIe arrondissements.

39Globalement, les résultats des élections municipales de Paris étaient analogues à ceux des élections législatives de la même période dans la capitale.

  • 30 Giard Louis, op. cit.
  • 31 D’après Sternheill Zeev. La droite révolutionnaire. Les origines françaises du fascisme, 1885-1914(...)

40Selon Louis Giard30, Paris était acquis au républicanisme dès le début de la République. Du 8 février 1871 jusqu’en 1885, la capitale a envoyé à l’Assemblée et puis à la Chambre des députés une représentation presque entièrement républicaine, sauf le duc Decazes élu en 1876 et l’amiral Touchard élu en 1877. Aux élections générales de 1889, le mouvement boulangiste a réussi à élire 12 députés dans les 35 circonscriptions parisiennes. La gauche a ensuite retrouvé sa domination en obtenant 33 sièges sur 37 en 1893, et 29 sur 37 en 1898. Le scrutin de 1902 a donné 23 sièges à la droite, dont 15 aux nationalistes31, contre 6 aux radicaux et 11 aux socialistes : pour la première fois, la capitale a voté à droite, mais à la droite contestataire. La gauche a ensuite repris la majorité à Paris, en l’emportant dans 24 circonscriptions sur 40 en 1906, et dans 22 circonscriptions sur 38 en 1910. Mais la droite s’est imposée à nouveau lors des élections de 1914 : elle a obtenu 18 sièges, alors que 3 ont été attribués au Parti républicain démocratique, et 15 aux autres partis de gauche.

  • 32 Voir le chapitre I.

41Ainsi, les résultats des élections législatives à Paris ont suivi une évolution fort semblable à ceux des élections municipales. Ce fait peut être considéré comme un signe de la politisation de ces dernières. Nous avons vu que sous la Monarchie de Juillet, les deux scrutins – législatif et municipal – aboutissaient à des résultats différents32. Sous la Troisième République, aux élections législatives comme aux municipales, les Parisiens ont manifesté un attachement sans réticence au régime républicain, avant de donner leur préférence aux tendances moins centristes – conservatrices ou socialistes. Certes, il y a quelques différences entre les résultats des élections législatives et ceux des élections municipales. Par exemple, l’Hôtel de ville hébergeait toujours une dizaine de conservateurs, tandis que la députation parisienne en comptait beaucoup moins, surtout dans les années 1870-1880. Mais ce fait semble s’expliquer par le caractère des élections municipales, moins politiques par définition que les consultations législatives, et aussi par la circonscription plus petite des élections municipales, qui profitait aux notables de quartier plutôt qu’aux hommes politiques d’envergure nationale.

42D’autre part, l’évolution politique de la capitale était globalement semblable à celle d’autres grandes villes.

  • 33 Herpin Jacqueline, « Les milieux dirigeants à Bordeaux sous la Troisième République », Revue histo (...)

43Bordeaux, ville dont nous connaissons relativement bien la vie politique municipale grâce à une monographie33, a été dominé par les républicains radicaux jusqu’en 1904, sauf durant les périodes de 1874, de 1884-1888 et de 1892-1896. La cité girondine a basculé à droite aux élections de 1904, et y est restée acquise jusqu’en 1925, date à laquelle radicaux-socialistes et socialistes ont repris le pouvoir municipal sous la houlette d’Adrien Marquet. Par rapport à Paris, Bordeaux se caractérise par l’entrée tardive des socialistes sur la scène politique (à partir de 1896), et par leur influence relativement faible avant 1925.

  • 34 Agulhon Maurice et al.. Les maires en France, op. cit.

44Pour d’autres grandes villes, nous pouvons estimer l’évolution politique à partir des étiquettes des maires élus. D’après les résultats de l’enquête collective sur les maires34, la première génération de maires de grandes villes élus (en 1882) était très largement républicaine : parmi les 41 villes pour lesquelles les renseignements sont suffisants. 37 avaient un premier magistrat républicain, et seules quatre un maire conservateur. Après le tournant du siècle, certaines villes sont passées à droite : en 1913, sur 45 maires, 24 étaient de gauche, et 21 de droite. Comparée à celle d’autres grandes villes, l’évolution politique de la capitale n’était pas exceptionnelle.

45Le tableau III-3, en comparant la composition politique du Conseil municipal avec celle des gouvernements, montre que la majorité parisienne ne correspondait que rarement à la majorité gouvernementale. De 1874 à 1900, les élus de Paris étaient plus radicaux que les gouvernants. Lorsque Paris est passé à droite, d’abord en 1900 et ensuite en 1912, les ministères étaient de gauche. Les rapports difficiles de l’Hôtel de ville avec l’État venaient non seulement du cadre juridique mais aussi des écarts d’orientation politique.

B. Les groupes et leurs alliances

  • 35 « Le premier acte du Conseil consiste à nommer son bureau et, dans cette unique circonstance, une (...)

46Pour saisir l’évolution politique du Conseil municipal, nous avons suivi les groupes formés au sein de l’assemblée et leur rapport de force dans la constitution du bureau du Conseil. Il aurait été souhaitable d’examiner les votes et les délibérations portant sur des domaines tels que la laïcisation ou la politique sociale : en fait, les groupes formés au Conseil étaient pour la plupart à structure souple, et l’appartenance du conseiller à un groupe est très souvent inconnue, ce qui nécessite l’analyse de votes significatifs. Mais la nomination des membres du bureau – président, deux vice-présidents, quatre secrétaires et un syndic – constituait un enjeu important, même s’ils n’avaient pas les pouvoirs de maire ou d’adjoint. L’élection des membres du bureau résume en quelque sorte l’affrontement des partis formés par les conseillers35.

  • 36 Par exemple, le carton BA 915 des Archives de la Préfecture de police, se rapportant à l’assemblée (...)
  • 37 A la Bibliothèque historique de la ville de Paris, les papiers Fiaux (Ms 1723-1771), Manier (Ms 47 (...)
  • 38 Concernant l’évolution des groupes au sein du Conseil municipal, nous avons réalisé un graphique, (...)

47La source que nous avons utilisée est essentiellement la presse. Les procès-verbaux et autres documents émanant du Conseil municipal, qui contiennent les informations de base sur le déroulement du scrutin élisant le bureau, font rarement état des formations politiques. Les notices biographiques des édiles de Paris sont quasiment muettes sur le sujet. Quant aux archives, déjà peu nombreuses en ce qui concerne l’assemblée parisienne, elles nous informent moins que les journaux en la matière36. Les recherches que nous avons effectuées dans quelques archives privées ont été infructueuses37. Et aucun document laissé par ces groupes ne nous est connu. Toutefois, les informations obtenues dans des journaux nous ont été suffisantes pour reconstituer à grands traits les groupements des élus parisiens38.

TABLEAU III-4. Composition du bureau du Conseil par tendances politiques

TABLEAU III-4. Composition du bureau du Conseil par tendances politiques

Sigles : P = président : V = vice-président : S = secrétaire ; N = syndic.
N.B. : (a) Faute de pouvoir distinguer les élus adhérant au groupe des républicains municipaux des républicains indépendants, cette colonne n’a pas été prise en compte de 1871 à 1881 et de 1890 à 1900 ; (b) Pour la période 1908-1914.

1. Politisation de l’assemblée (1871-1881)

48Il semble qu’au cours de la décennie 1871-1881, les élus ne se divisaient guère en groupes distincts. Seuls les républicains modérés ont essayé de se regrouper formellement, sans y parvenir véritablement.

  • 39 Où se tenaient les séances, l’Hôtel de ville ayant été détruit.
  • 40 Le Temps, 19 octobre 1871. Les autres journaux que nous avons consultés ne mentionnent pas cette r (...)
  • 41 APP. BA 1170 (dossier Mallet), rapport de police, 14 juin 1875.

49En décembre 1871, un certain nombre de conseillers ont décidé de fonder une « Réunion de la Gauche républicaine libérale du Conseil municipal ». Le groupe, qui comptait une trentaine d’adhérents, s’est donné pour but de « faire au Luxembourg39 de l’administration et non pas de la politique », tout en affirmant son souhait que « la République devienne en France une paisible et glorieuse réalité ». Le bureau du groupe se composait de Charles Loiseau, président, Desouches, vice-président, et Léon Thomas et Rigaut, secrétaires40. En juin 1875, après le premier renouvellement qui avait donné la victoire aux radicaux, les républicains modérés ont voulu une nouvelle fois former un groupe séparé qui a choisi pour président Mallet41. Mais ces deux formations de modérés ne paraissent pas avoir fonctionné de façon permanente.

50Ainsi, pendant cette première décennie de la Troisième République, l’assemblée municipale était-elle moins un petit parlement qu’un rassemblement d’élus. Mais, l’orientation politique des conseillers s’aperçoit à travers les élections du bureau.

51Le premier bureau du Conseil municipal élu de Paris, constitué le 4 août 1871, le jour de la première séance, se composait de républicains, modérés et conservateurs, sous la présidence de Joseph Vautrain, ancien maire du IXe arrondissement en 1848 et futur vainqueur sur Victor Hugo à la législative partielle de janvier 1872. Vautrain, d’opinion modérée, a conservé son poste jusqu’à la fin du premier Conseil, et pendant ces quatre ans les bureaux étaient dominés par les républicains modérés. Compte tenu de la situation de l’époque, il n’est pas étonnant que la première élection de Vautrain à la présidence ait été presque unanime : il a été élu avec 69 voix.

  • 42 Et ce pendant toute notre période, alors que dans les délibérations des affaires municipales certa (...)

52Mais les républicains plus radicaux ne tardèrent pas à s’affirmer. Le premier républicain radical à entrer dans un bureau du Conseil est Charles Hérisson, futur député et ministre des Travaux publics, élu vice-président en mai 1872. Les candidats radicaux à la présidence – Hérisson, Charles Floquet ou Cantagrel – obtenaient constamment de 25 à 30 voix. N’étant pas en mesure d’identifier ceux qui ont voté pour tel ou tel candidat, puisque les votes étaient anonymes42, et sachant que ces votes ne se faisaient pas toujours sur des critères politiques, nous pouvons néanmoins estimer le nombre des partisans de chaque tendance.

53Après les élections générales de novembre 1874, le camp radical a souvent pris le contrôle de l’assemblée. La présidence est venue à Floquet en mai 1875, avant de passer à Clemenceau six mois plus tard. Ce dernier a alors formé un bureau nettement ancré à gauche, avec Henri Allain-Targé et Bonnet-Duverdier pour vice-présidents, et Sigismond Lacroix, Castagnary et Jean Lafont comme secrétaires. Jusqu’en 1881, républicains modérés et radicaux ont assuré la présidence du bureau, de façon alternative.

54Mais l’assemblée n’était pas aussi scindée qu’elle le sera dans les décennies suivantes. Le nombre des voix que chaque candidat ont recueillies montre qu’il n’y avait ni affrontement de plusieurs listes, ni consigne de vote : dans un scrutin, certains candidats ont été élus avec près de 70 voix, et d’autres avec moins de 40, et dans le scrutin suivant intervenu quelques mois plus tard, le meilleur n’a pu obtenir 50 suffrages.

2. Domination de la gauche (1881-1900)

  • 43 Concernant ce projet, voir Recueil de documents relatifs au projet d’organisation municipale de la (...)

55C’est à partir de 1881 que la division en groupes a commencé à se dessiner. Déjà, la question de la réforme de l’administration parisienne avait séparé les conseillers en deux partis, partisans et adversaires de la réforme. Depuis le milieu des années 1870, de nombreuses discussions sur le sujet avaient été engagées au Conseil municipal. Elles ont abouti au projet de Sigismond Lacroix, déposé en juillet 1880 et adopté le 6 novembre suivant sous forme de vœu, demandant des pouvoirs très larges pour la municipalité parisienne. Inspiré des traditions révolutionnaires, le projet prévoyait une municipalité avec un maire et 8 adjoints ; le maire serait choisi par le conseil municipal parmi ses membres, et révocable par celui-ci ; les conseillers seraient élus au scrutin de liste par arrondissement, à la représentation proportionnelle ; ils toucheraient une indemnité43.

  • 44 Le candidat des républicains modérés à la présidence. Henri Thulié, a été battu au bout d’un trois (...)

56Le Conseil issu du scrutin de janvier 1881 a démarré sous la présidence de Lacroix, élu le 15 février. Le bureau formé alors se composait principalement de républicains radicaux44. Mais ce bureau n’a pas été reconduit en mai 1881 : les républicains modérés se sont assuré la majorité et ont porté Maurice Engelhardt à la tête de l’assemblée. Ses deux vice-présidents, Antide Martin et Auguste Cadet, s’étaient énergiquement prononcés contre le projet d’autonomie de Lacroix adopté en 1880.

  • 45 La République française, cité dans le Temps, 11 mars 1881. Ce groupe était souvent appelé « groupe (...)
  • 46 Le Temps, 14 février 1881.

57Cet échec a amené les radicaux et les partisans de la décentralisation à se former en groupe, dit « groupe de l’autonomie communale », dont le programme s’inspirait du projet de Lacroix. Les républicains modérés, de leur côté, avaient auparavant fondé leur propre groupe qui avait pris le nom de « groupe républicain radical du Conseil municipal de Paris », avec pour président du groupe Antide Martin, et pour secrétaire Edgar Monteil45. Ce qui séparait les deux formations était moins les opinions politiques que les attitudes par rapport à la réforme de l’organisation municipale de Paris : dans une réunion des radicaux du Conseil tenue le 14 février 1881, avant la constitution des deux groupements, le projet de Lacroix avait été proposé comme principal programme que les candidats au bureau devaient approuver46.

  • 47 Le Journal des débats, 18 janvier 1881 ; le Temps, 1er février 1881.
  • 48 Ils étaient une dizaine selon la France (cité dans le Temps, 25 octobre 1882), et 15 selon Sigismo (...)
  • 49 Edgar Monteil, un des chefs du groupe républicain radical, dit que « le groupe autonomiste était f (...)

58Quant aux conseillers de droite, ils étaient au nombre de 9 en 1881, dont le chef était le légitimiste Ferdinand Riant47. Il y avait également quelques élus qui ne se rangeaient dans aucun groupe, mais demeuraient relativement proches des républicains48. Il y avait ainsi au Conseil municipal trois courants majeurs. D’ailleurs, la composition de ces formations est presque inconnue, comme leur fonctionnement dans les débats de l’assemblée49.

  • 50 La lecture de journaux nous apprend qu’avant les élections du bureau, les deux principaux groupes (...)

59Divers journaux et documents indiquent qu’autonomistes et opportunistes étaient à peu près à égalité en nombre d’adhérents, et c’était souvent les voix des élus de droite qui faisaient basculer la majorité50. Ainsi, de 1881 à 1884, les couleurs politiques du bureau du Conseil ont souvent changé, avec toutefois une domination légère des autonomistes, qui ont conservé la présidence de 1882 à 1884.

60De 1884 à 1887, nous retrouvons presque la même configuration, sauf que deux socialistes apparaissent à l’extrême gauche.

  • 51 Parmi eux, selon la Justice, Édouard Jacques, Jobbé-Duval, de Ménorval et Robinet (cité dans le Te (...)
  • 52 Le Radical, 13 mai 1884. Vaillant appartenait alors au groupe autonomiste. Celui-ci était présidé (...)

61Après le scrutin de mai 1884, un certain nombre de conseillers anciens membres du groupe républicain radical – modéré de fait – ont rejoint les autonomistes51, qui sont devenus nettement dominants : le groupe de l’autonomie communale comptait désormais 36 membres, face à 24 adhérents du groupe des républicains modérés, 9 indépendants, 10 conservateurs et un socialiste52.

62Les autonomistes ont ainsi réussi à contrôler tous les bureaux élus entre 1884 et 1887, grâce aux concours des indépendants qui votaient plus souvent pour les candidats autonomistes que pour les opportunistes. Aucun de ces derniers n’a fait partie d’un bureau pendant cette période.

63À la suite du renouvellement de 1887 siégeaient à l’Hôtel de ville 46 conseillers radicaux partisans de l’autonomie communale, et 10 socialistes proches d’eux sur les questions de l’autonomie. Mais le camp autonomiste, plus que jamais gonflé, ne tarda pas à se scinder. En décembre 1887, une partie du groupe s’en est détachée pour former un nouveau rassemblement qui a pris le nom de « groupe des autonomistes socialistes ». Comme l’indique bien l’appellation choisie, il s’agissait de la fraction du groupe autonomiste qui voulait mener une politique sociale plus radicale. Dans leur manifeste de fondation, les 15 signataires ont déclaré ainsi :

  • 53 Cité dans le Siècle, 24 décembre 1887. Les 15 signataires sont : Bassinet. Benon, Boué, Cattiaux, (...)

« Le groupe autonomiste, dans son ensemble, ne présente ni un corps ni même un embryon de doctrines économiques. A cet égard, il est d’une neutralité sinon d’une indifférence parfaite. Aussi, sa ligne de conduite a-t-elle été vacillante quand il s’est trouvé en face de problèmes qu’il n’avait pas soupçonnés et qu’il eût dû poser lui-même. Par exemple, en 1885, lorsque se présenta pour la première Ibis celte question capitale : l’adoption d’une limite normale et uniforme de la durée du travail journalier dans les ateliers et chantiers de la ville de Paris, ce furent les adeptes de la vieille économie politique, les partisans du "laisser-faire, laisser-passer" qui l’emportèrent (...) [le but des signataires est] d’extraire du sein même de l’Autonomie communale un parti socialiste. Ni plus ni moins53. »

64Cette scission démontre le caractère hétérogène du groupe autonomiste, mis en évidence par le fait que la revendication de la réforme municipale est devenue secondaire pour un certain nombre d’élus. Toutefois, la séparation n’était pas toujours nette : jusqu’en décembre 1889, les deux groupes collaboraient pour nommer les membres du bureau.

  • 54 Le Radical, 6 mai 1890. Ces conseillers ont envoyé une lettre au pape Léon XIII à l’occasion de so (...)
  • 55 L’article du Radical en date du 6 mai 1890 et cité ci-dessus distingue le « groupe du Parti ouvrie (...)

65A leur côté, nous trouvons toujours un groupe de droite54, un groupe de républicains modérés qui se faisait maintenant appeler « groupe républicain municipal », ainsi que 11 socialistes (9 possibilistes et 2 blanquistes), et trois ou quatre républicains indépendants. Nous possédons peu d’informations sur ces groupes, et particulièrement sur les socialistes, qui n’étaient vraisemblablement pas encore unis55. À part les conservateurs, tous les courants ont participé au bureau du Conseil : les socialistes ont gardé depuis février 1888 une des vice-présidences, fonctions remplies par Jules Joffrin, puis en novembre 1889 par Paul Brousse ; les républicains non autonomistes, eux, ont obtenu deux des quatre postes de secrétaires en février 1888.

66Pendant la dernière décennie du xixe siècle, l’hégémonie de la gauche n’a pas été inquiétée, mais au sein de celle-ci les socialistes sont devenus de plus en plus influents.

67Les autonomistes, divisés en deux fractions au cours du Conseil 1887-1890, se sont réunis après le scrutin de mai 1890 dans un « groupe des Droits de Paris ». Au départ, le groupe, présidé par Darlot, contenait une trentaine de conseillers. Son programme disait que :

  • 56 Cité dans l’Année politique, 1890. pp. 97-98.

« Avant qu’elle ait été réunie, la nouvelle assemblée communale de Paris, élue avec le concours de toutes les nuances de l’opinion républicaine, se voit l’objet de l’hostilité préfectorale. (...) La conséquence de cette tentative serait d’entraver absolument tout le travail du Conseil municipal et de rendre plus illusoire encore que par le passé le contrôle des dépenses communales. (...) la nécessité s’impose de grouper tous les conseillers qui revendiquent pour la ville de Paris le droit de gérer elle-même les affaires locales qui ne touchent pas l’unité du pays. Le groupe des "Droits de Paris" se constitue, non pour provoquer une agitation stérile, mais pour lutter contre les abus, défendre les deniers des contribuables et opposer aux empiétements de l’administration, conformément à notre programme et aux engagements que nous avons pris, les revendications démocratiques et sociales de la population parisienne56. »

  • 57 Voir son article « Changement de titre », paru dans Le Radical, 3 juin 1890.

68Un programme apparemment inchangé, mais le changement du titre signifie, selon Sigismond Lacroix, un des chefs de l’ancien groupe de l’autonomie communale, une certaine atténuation de la revendication autonomiste et une volonté de fédérer davantage d’élus57. Cette tendance s’est accentuée par la suite. Le manifeste du groupe adopté le 26 mai 1893 sous le nouveau président du groupe Louis Lucipia mettait l’accent plutôt sur la réalisation de la politique radicale que sur l’obtention d’une autonomie elle-même :

  • 58 Le Radical, 28 mai 1893.

« Le groupe des Droits de Paris se constitue pour la revendication des droits refusés à la grande ville contre toute justice, et pour arriver à la réalisation du programme républicain socialiste. Il prend l’engagement de lutter énergiquement pour l’abolition des monopoles. (...) Pour se conformer aux vœux du corps électoral, qui vient aux dernières élections de condamner sans appel la politique cléricale, il poursuivra sans relâche la laïcisation de ceux des services de l’Assistance publique qui sont encore aux mains des congrégations58. »

69Mais ce groupe des radicaux contenait plusieurs courants.

  • 59 Le Temps, 28 février 1894.

70La force centripète de la revendication autonomiste ayant été atténuée, diverses nuances au sein du groupe s’étaient manifestées. Le Temps y distinguait trois orientations majeures, à savoir 15 « socialistes radicaux représentant la partie la plus avancée », 10 « radicaux formant la partie la moins avancée » et 9 « radicaux socialistes constituant le centre du groupe »59. En fait, la partie la plus avancée du groupe des Droits de Paris ont rejoint les socialistes en 1896.

  • 60 En février 1894, il y avait au Conseil municipal 9 possibilistes, 2 blanquistes, 3 socialistes ind (...)
  • 61 M. Le Petit Temps, 8 mars 1894.
  • 62 APP, BA 1192 (dossier Alfred Moreau), rapport de police, 19 août 1894.
  • 63 Selon Le Radical en date du 16 mai 1896, il s’agit de Lucipia, Louis Puech. Octave Blondel, Pipera (...)
  • 64 La République française, 30 mai 1896.

71Ceux-ci, jusque-là divisés en plusieurs courants60, sont parvenus à former une union en mars 1894. Dans une réunion socialiste tenue le 7 mars, une commission a été nommée en vue d’étudier « les moyens de réaliser l’union de tous les groupes d’extrême gauche du Conseil sans distinction de parti »61. Ayant débuté avec 18 membres62, l’union élargit son influence tant par le progrès électoral des socialistes en 1896, que par l’adhésion de certains membres du groupe des Droits de Paris63. Au lendemain du scrutin de 1896, l’union socialiste comptait 28 membres, tandis que le groupe des Droits de Paris était réduit à une vingtaine seulement64. Le nouveau groupe socialiste était présidé en 1897 par l’ancien radical Navarre. Le programme adopté était celui du groupe socialiste de la Chambre des députés :

  • 65 D’après John Labusquière, interviewé par Le Radical, 16 mai 1896.

« Nous répondons aux mêmes préoccupations et avons les mêmes visées que le groupe socialiste de la Chambre. Ainsi, socialistes au Conseil municipal et socialistes à la Chambre, nous unirons nos efforts dans un but commun65. »

  • 66 Le Petit Temps, 5 mai 1900. Les 4 blanquistes dissidents sont Archain, Breuillé. Daniel et Grébauv (...)

72L’hétérogénéité au sein de l’union s’est révélée à travers les événements politiques nationaux de 1899. Face à la formation du gouvernement Waldeck-Rousseau, le groupe socialiste du Conseil municipal a décidé sa dissolution pour se reconstituer de nouveau. La plupart des anciens membres y sont revenus, au nombre de 26, mais les 4 blanquistes sont restés en dehors de l’union66. Le nouveau groupe a adopté comme programme de base : la transformation de la propriété capitaliste en propriété sociale ; la conquête des pouvoirs publics par le prolétariat organisé ; l’entente internationale des travailleurs ; la revendication des franchises communales ; la transformation des monopoles en services publics municipaux.

73De 1891 à 1900, c’est l’entente entre le groupe des Droits de Paris et les socialistes qui conduisait l’assemblée municipale. Tant qu’ils étaient numériquement prépondérants au Conseil, les autonomistes gardaient les postes clés du bureau. Mais, après l’unification des socialistes et le renversement du rapport de force entre radicaux et socialistes en 1896, un accord a été conclu entre les deux formations, selon lequel la présidence serait assurée alternativement. C’est ainsi qu’en mars 1898. Navarre, de l’union socialiste, a été porté au poste de président du Conseil municipal, comme le premier président socialiste.

  • 67 Le Matin, 11 février 1897.

74Les conseillers des autres courants étaient écartés de la gestion de l’assemblée. Les républicains municipaux, politiquement proches de la fraction modérée du groupe des Droits de Paris, ne participaient pas à la majorité municipale, sauf quelques cas rares avant 1896 ; la plupart du temps ils présentaient leur propre liste aux élections du bureau. Le groupe a été présidé de 1893 à 1897 par Hattat, membre fondateur et un des futurs vice-présidents de l’Alliance républicaine démocratique. Il y avait également quelques indépendants, qui rejoignaient souvent les républicains municipaux dans les votes ordinaires. La situation de la droite était relativement stable. Comptant environ 13 membres et présidé par Lerolle en 189767, le groupe se situait totalement dans l’opposition.

3. Passations des pouvoirs (1900-1914)

75La victoire des nationalistes et antiministériels aux élections de 1900 a renversé la majorité de gauche, qui avait régné à l’Hôtel de ville pendant presque trente ans. De cette date jusqu’au commencement de la Première Guerre mondiale, d’importants reclassements politiques se sont opérés au sein du Conseil municipal.

  • 68 Dans une réunion ayant eu lieu à l’Hôtel Continental juste après les élections, à laquelle une qua (...)
  • 69 Dans cette nomination, où 79 conseillers ont participé aux votes, environ 38 à 40 bulletins sont a (...)

76La majorité de droite sortie du scrutin de 1900 comptait 46 élus, de sensibilités fort différentes : 28 nationalistes, 10 conservateurs et 8 républicains antiministériels. Certes, cette majorité a conduit l’assemblée municipale de Paris jusqu’en 1904, mais elle était loin d’être monolithique. Il n’existait aucun groupe permanent qui engloberait tous les nationalistes, et chacun d’eux était autorisé à faire partie de l’un des groupes existants68. En dehors du groupe des républicains municipaux qui comptait alors une dizaine de membres, et du groupe de la droite en nombre à peu près égal, rien n’encadrait les conseillers de la majorité. C’est probablement cela qui a permis, lors des élections du bureau en avril 1903, aux opposants de faire élire un vice-président, trois secrétaires et le syndic69.

77La gauche, perdante pour la première fois depuis 1874, avait la même structure que par le passé. Le groupe des Droits de Paris, qui avait subi une défaite sévère aux élections, n’avait plus qu’une douzaine de membres, dirigés maintenant par Opportun. Ils ont rebaptisé leur groupe, « groupe des radicaux et radicaux socialistes pour la défense des droits de Paris ». Quant aux socialistes, leur groupe comptait une vingtaine de conseillers, toujours sous la houlette de Navarre. Aux élections des membres du bureau, ces deux groupes ont présenté une liste commune de candidats, sauf en mai 1900.

78Au Conseil municipal élu en 1904, la majorité était de nouveau à gauche. Le groupe socialiste, rassemblant 25 conseillers, était numériquement plus important que son équivalent radical, qui comptait 19 membres. Le bureau du Conseil était aux mains de l’alliance de ces deux groupes : tout comme dans les dernières années du xixe siècle, la présidence a été assurée alternativement, par les radicaux en 1904, 1906, et par les socialistes en 1905, 1907.

  • 70 La Petite République, 7 mars 1906 ; Le Temps, 27 février 1906.
  • 71 L’un des deux autres secrétaires était également un socialiste : Deslandres. Mais nous ignorons s’ (...)

79La fondation d’un parti socialiste unifié en 1905 a eu pour conséquence de séparer, au Conseil municipal, les socialistes dit « unifiés » des indépendants. Les premiers, au nombre de 12, ont formé leur groupe au début de l’année 1906, dont le secrétaire était Fribourg70. Ils ont participé à la majorité, d’abord en votant, aux élections du bureau en mars 1906, pour les candidats radicaux et socialistes « non-unifiés », puis en y étant représentés, l’année suivante, par deux secrétaires Dherbécourt et Joseph Weber71.

80Les groupements de droite, passés dans l’opposition, se sont créé eux aussi une entente, en vue des élections des membres du bureau, sans toutefois pouvoir élire leurs candidats. Il y a là un important changement à remarquer. Avant 1900, les conservateurs et les républicains modérés, même s’ils étaient écartés de la majorité la plupart du temps, ne s’unissaient pas officiellement dans les votes qui élisaient les membres du bureau : chaque camp choisissait son candidat à la présidence, et les voix étaient souvent fortement dispersées entre plusieurs noms. L’expérience de la majorité a, semble-t-il, permis aux conseillers conservateurs et progressistes de former une coalition de façon permanente face aux radicaux et aux socialistes qui savaient se rallier depuis longtemps. Et cette structure à deux grands blocs ne change pas avant 1914. C’est probablement à partir de ce moment-là que nous pouvons parler, concernant le Conseil municipal de Paris, de division droite-gauche.

  • 72 Le Temps, 9 mai 1908. Le groupe était présidé d’abord par Félix Roussel lui-même, puis par Ernest (...)

81Le rapport de force entre les deux blocs s’est renversé encore une fois, au cours du Conseil municipal 1908-1912. La gauche est sortie victorieuse du renouvellement de 1908, avec l’élection de 22 radicaux, de 11 socialistes indépendants et de 12 socialistes SFIO, contre 37 conservateurs ou progressistes. À gauche se sont formés trois groupes, comme pendant le conseil précédent : celui des radicaux, et deux groupes socialistes – les unifiés et les indépendants. Le groupe radical était maintenant lié au parti au même adjectif, qui venait de naître : restant autonome par rapport au parti, le groupe a adopté le programme du celui-ci. A l’opposé, nous trouvons le groupe de la droite, composé de 8 conseillers et présidé par Ambroise Rendu, ainsi qu’une nouvelle formation, « groupe municipal d’union républicaine démocratique ». Ce dernier groupe a été fondé à la fin de mai 1908, à l’initiative de Félix Roussel, pour réunir une vingtaine de conseillers « républicains progressistes et anticollectivistes »72.

  • 73 Le groupe municipal d’union républicaine démocratique a initialement proposé au groupe radical une (...)

82Ces deux blocs se sont opposés dans les élections du bureau, en juin 190873. La coalition radicale-socialiste, théoriquement majoritaire, n’a toutefois pas pu composer le bureau avec les siens. Dans le bureau sont entrés trois radicaux, un socialiste et 4 progressistes ou conservateurs. Certaines dissidences survenues au sein des radicaux auraient été à l’origine de ce résultat. Les socialistes unifiés, pour leur part, n’ont pas systématiquement apporté leur concours.

83La division des radicaux allait s’accentuer. A la fin de l’année 1908, au moment où il s’agissait d’élire les délégués sénatoriaux, Bellan, Mossot et d’autres conseillers radicaux, ne pouvant accepter l’alliance avec les socialistes de la SFIO, ont quitté le groupe. À la suite de cet incident, le groupe s’est dissout et reconstitué ensuite, confirmant la nécessité d’une union de gauche :

  • 74 Ordre du jour du groupe, cité dans Le Temps, 3 décembre 1908.

« Les membres de l’ancien groupe radical et radical socialiste, résolus à pratiquer au Conseil municipal la politique économique et sociale préconisée par les congrès radicaux et radicaux socialistes, décident de reconstituer le groupe conformément à la motion de Dijon, qui préconise une tactique pratiquée d’accord avec les seuls groupes de gauche (...)74. »

  • 75 Lettre de membres du groupe radical adressée à son président Patenne, cité dans le Temps, 1er déce (...)

« Mais nous ne voulons en aucun cas que, sous prétexte de concessions entre collègues, l’axe de notre politique soit complètement déplacé et orienté vers la droite. Tous nos congrès ont déclaré le contraire et décidé que le parti radical et radical socialiste n’avait pas d’ennemis à gauche ni d’amis à droite75. »

  • 76 Bellan, Beer, Gent, Miniot, Roussel et Sauton, selon le Temps, 2 avril 1909.

84Les radicaux dissidents, au nombre de 6 à 776, ont formé un groupe républicain municipal, radical et démocratique, et choisi comme président Bellan. C’est précisément l’attitude de ce groupe qui a renversé la majorité municipale le 25 octobre 1909.

  • 77 Voir notamment Robert Vincent, « “La protestation universelle” lors de l’exécution de Ferrer : les (...)
  • 78 Cinq radicaux dissidents ont voté contre : Beer, Bellan, Gent, Miniot et Sauton. Par ailleurs, qua (...)
  • 79 Aux élections du bureau qui ont eu lieu en mars et en juin 1910, et en mai 1911, tous les candidat (...)

85La nouvelle de l’exécution de l’anarchiste espagnol Francisco Ferrer avait provoqué une vague de protestations dans de nombreux pays77. Le bureau radical-socialiste du Conseil municipal de Paris, constitué en mars de la même année et présidé par le socialiste SFIO Chausse, a donné sa démission le 25 octobre, à la suite du rejet de sa proposition tendant à donner le nom de Ferrer à une rue de Paris : la proposition a été refusée par 40 voix contre 34. Dans ce vote, les radicaux dissidents ont voté contre, aux côtés des libéraux et des modérés78. Il a été ensuite procédé à l’élection d’un nouveau bureau. A l’élection du président, le candidat de droite Ernest Caron a été élu avec 42 voix contre 33 recueillies par son adversaire socialiste et président sortant Chausse. Les radicaux scissionnistes ont probablement voté pour Ernest Caron, ce que les groupes de droite ont immédiatement récompensé par les nominations de Beer et de Gent aux vice-présidences, et Miniot au secrétariat, tous les trois radicaux dissidents. Après cinq ans d’opposition, la droite est redevenue maîtresse de l’Hôtel de ville. Et l’entente de la droite règne jusqu’en 191479.

  • 80 Il s’agit de Bellan, Dausset, Gent, Lemarchand et Miniot, et tous, sauf Dausset qui avait été un d (...)
  • 81 Y ont adhéré les 5 conseillers élus avec le programme de l’ARD, plus Cornette, élu sous l’étiquett (...)

86Au plan de la répartition des sièges par tendances politiques, les élections municipales de 1912 ont donné un résultat presque identique à celui des municipales de 1908, sauf en ceci que les radicaux dissidents de l’ancien conseil étaient élus avec le programme de l’Alliance républicaine démocratique80. Ces élus se sont groupés en juin 1912 sous le nom de « groupe républicain démocratique »81, présidé par Bellan. Fidèles au bloc réalisé au cours du dernier mandat, ces républicains se sont ralliés aux libéraux et aux progressistes.

  • 82 Il avait pour programme : « revendication énergique de toutes libertés municipales, économiques et (...)
  • 83 L’Éclair, 12 juin 1912. Le président du groupe était Ernest Caron.

87Le groupe de conservateurs s’appelait maintenant « groupe libéral », formé officiellement en juin 1912 et composé d’une dizaine d’adhérents82. Le « groupe républicain municipal », héritier du groupe municipal d’union républicaine démocratique, comptait 27 membres83. La réunion de ces trois forces assurait la majorité stable à la droite. Les groupements de gauche – radicaux, socialistes indépendants et socialistes de la SFIO – restaient dans l’opposition.

88Ainsi que nous l’avons vu, le Conseil municipal de Paris était contrôlé avant 1900 par les républicains radicaux, et après 1900 par les forces de droite, sauf entre 1904 et 1909.

89Les analyses prosopographiques que nous allons effectuer sont fondées sur le résultat des recherches faites au cours de ce chapitre. Nous avons classé l’ensemble de nos 452 conseillers municipaux en 6 catégories : extrême droite, droite, centre droit, centre gauche, gauche et extrême gauche. Le classement adopté n’est pas celui de l’enquête sur les maires et utilisé pour le tableau I1I-3, mais celui que nous avons conçu pour tenir compte des spécificités parisiennes.

TABLEAU II1-5. Les conseillers municipaux selon les tendances politiques

TABLEAU II1-5. Les conseillers municipaux selon les tendances politiques

TABLEAU III-5bis. Classification du tableau précédent

TABLEAU III-5bis. Classification du tableau précédent

N.B. : (a) Radicaux proches des socialistes, adhérents du groupe autonomiste-socialiste.

  • 84 Pour notre classification, voir l’explication détaillée que nous avons ajoutée dans les annexes.

90Les élus sont classés selon les courants politiques auxquels ils appartenaient lors de leur première élection. Cette méthode, qui ne peut tenir compte des évolutions ultérieures des opinions politiques des conseillers, est toutefois la seule possible dans une étude statistique comme la nôtre. Ce classement par tendances est plus ou moins arbitraire. Notre taxinomie est plus relative qu’absolue, représentant globalement les courants existant au sein de l’assemblée municipale de Paris84.

C. Renouvellement de l’assemblée municipale

91Au cours des 43 ans que couvre notre période, le Conseil municipal se renouvelle. Ceux qui ont accédé à l’assemblée dans les débuts de la République, lorsque la ville était encore traumatisée par les souvenirs des années 1870-1871, ont progressivement quitté l’Hôtel de ville, remplacés par des hommes n’ayant pas connu cette période. Une génération succède à une autre. Derrière l’évolution politique que nous avons déjà examinée, il y a des changements sociologiques, dus au renouvellement de l’assemblée.

92Entre juillet 1871 et août 1914, 452 conseillers ont siégé au Conseil municipal de Paris. La plupart d’entre eux ont été élus à un des 13 scrutins généraux, mais certains l’ont été à des élections partielles organisées à la suite d’un décès ou d’une démission. Le rythme du renouvellement exprimé dans le tableau suivant nous montre comment les vicissitudes politiques de la capitale étaient traduites par le renouvellement du personnel politique municipal (tableau III-6).

93Le renouvellement est relativement fort et constant jusqu’en 1900, date après laquelle il s’estompe : de 30 à 35 nouveaux membres entrent à chaque conseil entre 1871 et 1900 (sauf en 1887-1890), et de 16 à 24 après 1900. Les ruptures de 1881 et de 1900, que nous avons observées au travers des élections et des groupements, n’apparaissent pas ici, au moins de façon quantitative. Certes, 35 nouveaux membres sont entrés à l’Hôtel de ville entre 1900 et 1904, à la suite d’un scrutin marqué par une victoire spectaculaire des nationalistes. Mais ce chiffre n’a rien d’exceptionnel par rapport au rythme du renouvellement des décennies précédentes ; en effet, nombre de vétérans ont continué à siéger après mai 1900. Il n’y a pas un moment précis où une masse d’élus promus durant une certaine période soit éliminée : à tous les conseils, des anciens étaient présents, et le rythme du renouvellement semble plutôt constant.

  • 85 Sur ce point, les travaux d’Yvan Combeau apportent peu. Ils se bornent à traiter les consultations (...)

94Mais les chiffres de ce tableau ne distinguent pas les diverses raisons du remplacement. Une étude minutieuse des élections permettrait de connaître ces dernières85. Dans l’impossibilité de la réaliser dans le cadre du présent travail, nous nous contentons d’examiner les durées du mandat et des motifs de sa fin.

TABLEAU III-6. Renouvellement et ancienneté : période d’accès au Conseil (colonne) période durant laquelle le conseiller a siégé (ligne)

TABLEAU III-6. Renouvellement et ancienneté : période d’accès au Conseil (colonne) période durant laquelle le conseiller a siégé (ligne)

N.B. : Le tableau peut se lire dans les deux sens : chaque colonne présente la période d’accès au Conseil, et chaque ligne la période pendant laquelle les conseillers ont siégé.
- Exemple de la lecture horizontale : La troisième ligne signifie que sur les 96 individus ayant siégé entre I87S et 1881. 25 sont élus pour la première fois en 1871-1874, 32 en 1874-1878 et 39 en 1878-1881.
- Exemple de la lecture verticale : La troisième colonne signifie que sur les 39 conseillers élus pour la première lois pendant la période 1878-1881. 24 restaient en 1881-1884. 18 en 1884-1887, ainsi de suite.

  • 86 Si nous avons préféré le nombre des réélections à la durée de l’exercice du mandat, c’est parce qu (...)

95Le nombre des réélections, calculé dans le tableau suivant, montre deux tendances majeures : l’allongement général de la durée du mandat à partir des années 1880, et la réélection moins difficile pour les hommes à la couleur politique marquée86.

TABLEAU III-7. Nombre de réélections (en moyenne)

TABLEAU III-7. Nombre de réélections (en moyenne)

96La durée de mandat relativement longue pourrait s’expliquer par l’existence de « fiefs ». Un élu peut se maintenir en place pendant longtemps, grâce aux divers réseaux et organisations que son parti possède dans la circonscription. Néanmoins, il n’est pas aisé de mettre le nombre de mandats exercés en rapport avec le phénomène de bastions électoraux. En fait, comme le mettent en évidence les trois tableaux suivants, les courants politiques où la durée de mandat est relativement longue (extrême gauche, droite et extrême droite) ne sont pas nécessairement ceux dont les représentants terminent leur fonction plutôt par une retraite volontaire que par un échec électoral.

TABLEAU III-8A. Motif de la fin du mandat selon les périodes

TABLEAU III-8A. Motif de la fin du mandat selon les périodes

N.B. : Les chiffres entre parenthèses sont des pourcentages en colonne.

TABLEAU III-8B. Motif de la fin du mandat par tendances politiques

TABLEAU III-8B. Motif de la fin du mandat par tendances politiques

N.B. : Pour les motif, voir le tableau précédent. Les chiffres entre parenthèses sont des pourcentages sur le total de chaque tendance.

TABLEAU III-8C. Nombre moyen de réélections selon les motifs de la fin du mandat

TABLEAU III-8C. Nombre moyen de réélections selon les motifs de la fin du mandat

N.B. : Pour les motifs, voir les tableaux précédents.

97En général, le taux de ceux qui ont quitté l’Hôtel de ville après avoir été battus aux élections allait en augmentant. Ce qui, semble-t-il, est un signe de l’intensification de la lutte électorale à Paris, du fait de la multiplication des partis politiques, tant à gauche qu’à droite.

98Examiné par courants politiques, le rapport entre la durée du mandat et le motif de sa fin n’est pas net. Par exemple, les élus classés à droite sont restés en fonction plus longtemps que leurs collègues appartenant au centre gauche (2,45 mandats en moyenne contre 1,66), alors que ceux-ci ont terminé leur mandat plus souvent par retraite volontaire, et moins souvent par un échec électoral, que ceux-là.

99Concernant la durée du mandat, elle est relativement courte pour les élus entrés au Conseil en 1871-1881 (voir tableau III-7). Mais cela n’est pas dû au fait que les élections soient plus disputées – en effet, elles l’étaient moins qu’après 1881. Ces élus n’ont pas subi non plus une élimination massive à un scrutin. L’explication semble être donnée par leur âge, plus élevé que celui de leurs successeurs : nous reviendrons sur ce point plus loin, dans le chapitre VII consacré aux carrières des conseillers. D’autre part, il n’y a pas de rapport net entre les tendances politiques et les motifs de la fin du mandat, comme le montre le tableau III-8B. Cela signifierait que les causes du renouvellement changent plus dans le temps que selon les courants politiques. En tout cas, nous avons ici affaire à un phénomène compliqué, que seule une étude approfondie des élections éluciderait pleinement.

Notes

1 Giard Louis, Les élections à Paris sons la Troisième République, op. cit. Cette étude, portant sur les élections législatives, analyse également les élections municipales de 1900, marquées par l’arrivée d’une majorité antiministérielle.

2 Offerle Michel, Les socialistes et Paris, 1881-1900, op. cit.

3 Jacquemet Gérard, Belleville au xixe siècle, op. cit.

4 Voir la liste des sources imprimées.

5 En plus des quelques mémoires de maîtrise cités dans la bibliographie, nous signalons l’article de Jean El Gammal sur le quartier de Javel (« Javel. Histoire politique d’un quartier de Paris sous la Troisième République », Recherches contemporaines, n° 1, 1993, pp. 27-40).
Un travail sur les élections municipales de Paris de 1870 à 1939 vient élucider une partie non négligeable de la vie politique de la capitale : Combeau Yvan, La scène capitale : les élections municipales à Paris sous la Troisième République, mémoire d’habilitation à diriger des recherches. Université Paris IV (Jean-Marie Mayeur). 1996. 2 vol.. 463 p., publié en 1998 chez l’Harmattan. Nous avons également pu consulter la version préliminaire de ce travail intitulée : Paris municipal sous la Troisième République : les élections municipales dans la capitale (1870- 1940). 1989, 326 p. + annexes, conservée au Centre de recherches sur l’histoire du xixe siècle, à la Sorbonne. Mais ce mémoire d’habilitation n’était pas achevé lorsque nous effectuions nos propres recherches sur les élections municipales. Bien que nous ayons pu bénéficier de l’apport de ce mémoire, l’analyse qui suit s’appuie essentiellement sur nos données.

6 Bailleux de Marisy. « La ville de Paris devant le Corps législatif », art. cit., p. 438.

7 À titre d’exemple, C. Lavollée, à propos d’une éventuelle réforme à donner à l’administration parisienne, disait qu’« [en] réalité, les conseillers municipaux de Paris ne sont élus qu’à raison de leurs opinions politiques, et, si on leur reproche leur attitude et leurs actes, ils sont autorisés à répondre qu’ils se conforment au mandat qu’ils ont reçu et quelquefois subi de leurs électeurs » (« La ville de Paris et l’administration municipale », Revue des deux mondes, 1er septembre 1884, pp. 159-190, p. 187).

8 II s’agit toutefois du nombre minimal : l’identification des candidats, essayée auprès de quelques journaux, n’a pas été facile. La marge d’erreur est moins grande pour les candidats anciens conseillers municipaux que pour les candidats anciens maires d’arrondissement, et cela est dû au l’ait que nous connaissons moins bien les maires que les conseillers qui, eux, ont fait l’objet d’un dictionnaire biographique sommaire (Pronteau Jeanne, op. cit.).

9 Également se sont présentés sans être élus : Victor Alexandre Paillard, conseiller municipal du IIIe arrondissement de 1869 à 1870, candidat dans le même arrondissement (Archives) en 1871 ; Jacques Achille Durand, nommé en 1869 conseiller municipal du XIIIe arrondissement, candidat en 1871 dans son arrondissement (Croulebarbe) ; Hellot, édile du XIXe arrondissement en 1869, battu par Allain-Targé en 1871 dans le quartier d’Amérique (XIXe) ; Jean Frédéric Possoz, maire de Passy depuis 1840, conseiller général de la Seine de 1844 à 1859, et conseiller de Paris à la suite de l’annexion de sa ville, candidat non élu en 1871 dans le XVIe (Muette). Aucun d’entre eux, y compris Puteaux et Gouin, n’a reçu un mandat parlementaire dans leur vie, ce qui montre, semble-t-il, le caractère relativement apolitique de ces candidatures.

10 Les autres candidats sont : Achille Labat, adjoint (1860-1869) puis maire (1870) du XVIIIe arrondissement, candidat malheureux en 1871 dans le XVIIIe (Clignancourt) contre Clemenceau ; Mullet, maire du XIXe arrondissement en 1870, candidat en 1871 dans les quartiers d’Amérique et de La Villette (XIXe) ; Héret, adjoint (1860-1869) puis maire (1870) du XXe arrondissement, battu en 1871 dans la circonscription de Belleville.

11 Mais Fremyn a donné sa démission en décembre 1875, pour des raisons qui nous échappent. D’autre part, Puteaux a été battu, et Gouin s’est retiré de la scène politique ; Gavrel et Ohnet sont tous deux décédés en fonction, en octobre 1872 et en juin 1874.

12 La Ligue proposait des candidats de tendance radicale. Il y avait à son côté le Comité de Turbigo – le nom vient de la rue où il siégeait – qui centralisait divers comités républicains d’arrondissement, et l’Union parisienne de presse, patronnée par des journaux de droite. Sur l’Union parisienne de presse, voir notamment le travail déjà cité d’Yvan Combeau.

13 Avec celui de Martial Bernard, considéré par divers journaux comme « centre-gauche ».

14 Il existe une abondante littérature sur le régime administratif de Paris, mais le travail le plus détaillé et le mieux informé reste celui de Félix, Le régime administratif..., op. cit., chapitre IV.

15 Sur les 35 autonomistes de 1884. 4 ont été élus en 1881 avec l’étiquette « républicain » (et non pas « radical »), alors que parmi les 33 républicains 8 sont entrés au Conseil en 1881 comme « radicaux ». Toutefois, la consultation de quelques journaux que nous avons effectuée nous laisse penser que l’appellation « radical » était, à l’époque, souvent appliquée à ceux qui adhéraient au programme des autonomistes.

16 Chiffre donné par l’Année politique, 1881.

17 Le Temps, 10 mai 1887.

18 Offerle Michel, op. cit., p. 200.

19 Sur les élections municipales de 1900, voir Szlowicz Valérie, Le conseil municipal de Paris de 1900 à 1904, mémoire de maîtrise. Université Paris X (Hubseher. El Gammal), 1992. 240 p.. et la thèse de l’École des chartes de Bertrand Joly. L’agitation nationaliste à Paris (1898-1900) et les élections municipales de 1900, 1981, 3 vol., 1 132 p. (résumé dans les Positions des thèses de l’École, 1981, pp. 157-167)

20 Les élections municipales sont organisées au même moment dans toute la France (6-13 mai). La plupart des grandes villes – seuls théâtres du nationalisme qui s’implantait peu dans les zones rurales – ont élu une municipalité de gauche : c’est le cas notamment de Marseille. Lille. Lyon, Bordeaux et Reims.

21 Selon l’expression de l’Année politique, 1900, pp. 125-129.

22 Les élections cantonales des 20 et 27 mai suivant ont entériné la domination des antiministériels dans la Seine : ils se sont assuré la majorité au Conseil général de la Seine.

23 Les 5 conseillers élus avec l’étiquette « républicain démocratique » (proche de l’Alliance républicaine démocratique) ont adhéré à la majorité de droite.

24 Clemenceau siégea de 1871 jusqu’en 1876 comme élu du quartier de Clignancourt (XVIIIe). Ranc représenta le quartier de Sainte-Marguerite (XIe) de 1871 à 1874.

25 Dans l’entre-deux-guerres, la municipalité de Paris était toujours de droite. Selon Yvan Combeau, la droite et le centre droit comptaient entre 48 et 55 élus (La scène capitale, op. cit.. p. 347 et s.).

26 Nous avons inscrit les résultats des élections municipales sur des cartes. Voir les graphiques III 1-13, dans les annexes.

27 Il a posé sa candidature aux élections municipales générales des 9-16 janvier 1881, sans réussir. Voir Jacquemet Gérard, « Gambetta et ses électeurs bellevillois : l’élection de Trinquet (juin 1880) ». Revue d’histoire moderne et contemporaine, juillet-septembre 1971, pp. 446-472.

28 Sur ce sujet voir notamment Offerle Michel, op. cit.

29 Rémond René, Les droites en France, Aubier, 1982, pp. 157-158. Le rapport entre le nombre des électeurs inscrits et les sièges attribués variait de un à trente selon les quartiers. Même en 1929, alors que les conseillers de droite étaient largement majoritaires à l’Hôtel de ville – 52 sur 80 selon Yvan Combeau –, les électeurs de gauche restaient en majorité.

30 Giard Louis, op. cit.

31 D’après Sternheill Zeev. La droite révolutionnaire. Les origines françaises du fascisme, 1885-1914, Seuil, 1978. p. 143. Offerlé, de son côté, ne distingue pas les nationalistes des autres courants de droite pour les législatives de 1902.

32 Voir le chapitre I.

33 Herpin Jacqueline, « Les milieux dirigeants à Bordeaux sous la Troisième République », Revue historique de Bordeaux et du département de la Gironde, n° 15, 1966. pp. 145-165.

34 Agulhon Maurice et al.. Les maires en France, op. cit.

35 « Le premier acte du Conseil consiste à nommer son bureau et, dans cette unique circonstance, une majorité politique, formée d’éléments assez disparates, a coutume de se compter. » (Lachapelle Georges, « Le Conseil municipal de Paris ». Revue de Paris, 15 novembre 1913, p. 365)

36 Par exemple, le carton BA 915 des Archives de la Préfecture de police, se rapportant à l’assemblée municipale parisienne, se compose principalement de coupures de presse. Aux Archives nationales, la série Flbll ne donne que des renseignements électoraux.

37 A la Bibliothèque historique de la ville de Paris, les papiers Fiaux (Ms 1723-1771), Manier (Ms 4738-4739) et Maury (Ms 4740-4743) ; aux Archives nationales, les papiers Floquet (49AP). Mais notre consultation des archives privées de membres du Conseil municipal est loin d’être exhaustive, et de nombreuses séries sont restées inexploitées, dont les archives Millerand.

38 Concernant l’évolution des groupes au sein du Conseil municipal, nous avons réalisé un graphique, qui se trouve dans les annexes (graphique III-14).

39 Où se tenaient les séances, l’Hôtel de ville ayant été détruit.

40 Le Temps, 19 octobre 1871. Les autres journaux que nous avons consultés ne mentionnent pas cette réunion.

41 APP. BA 1170 (dossier Mallet), rapport de police, 14 juin 1875.

42 Et ce pendant toute notre période, alors que dans les délibérations des affaires municipales certains votes se faisaient à bulletins nominatifs depuis août 1871.

43 Concernant ce projet, voir Recueil de documents relatifs au projet d’organisation municipale de la ville de Paris et discours prononcés dans la discussion de ce projet, Imp. Lahure, 1880. 261 p. Ce projet de Lacroix reste la référence pour les autonomistes.

44 Le candidat des républicains modérés à la présidence. Henri Thulié, a été battu au bout d’un troisième tour, avec 34 voix contre 35 données à son adversaire Lacroix. L’Année politique attribue l’échec des modérés au vote des conservateurs, qui ont refusé de « s’unir aux opportunistes » (L’Année politique, 1881. p. 5). Le Temps aussi remarquait trois tendances au Conseil municipal : « Tout ce qu’on peut conclure de ces chiffres [voix obtenues dans les élections du bureau], c’est que le conseil actuel est à peu près coupé en deux, sans compter la droite qui, en certains cas, pourra faire pencher la balance. Les extrêmes avaient une majorité assurée autrefois ; elle est aujourd’hui douteuse, et ils seront en minorité dans tous les cas graves » (17 février 1881).

45 La République française, cité dans le Temps, 11 mars 1881. Ce groupe était souvent appelé « groupe républicain radical » ou « groupe opportuniste ».

46 Le Temps, 14 février 1881.

47 Le Journal des débats, 18 janvier 1881 ; le Temps, 1er février 1881.

48 Ils étaient une dizaine selon la France (cité dans le Temps, 25 octobre 1882), et 15 selon Sigismond Lacroix (le Radical, 25 octobre 1882).

49 Edgar Monteil, un des chefs du groupe républicain radical, dit que « le groupe autonomiste était fermé » (« Le Conseil municipal de Paris en 1881 », Nouvelle Revue, t. 13, 1881, p. 770).

50 La lecture de journaux nous apprend qu’avant les élections du bureau, les deux principaux groupes soumettaient leurs listes aux autres, notamment aux indépendants et aux conservateurs, en vue d’assurer quelques voix en échange d’un ou plusieurs postes au bureau. « Quand il s’agit de l’élection du bureau, le groupe de l’autonomie communale et le groupe opportuniste présente naturellement leurs candidats ; mais la majorité ne peut être formée, d’un côté ou de l’autre, qu’avec l’appoint des indépendants ou celui de la droite » (Le Radical, 25 octobre 1882).

51 Parmi eux, selon la Justice, Édouard Jacques, Jobbé-Duval, de Ménorval et Robinet (cité dans le Temps, 14 mai 1884).

52 Le Radical, 13 mai 1884. Vaillant appartenait alors au groupe autonomiste. Celui-ci était présidé par Guillaume Maillard, futur député de la Seine (1885-1889), puis à partir de février 1886 par Alphonse Darlot. Le groupe républicain radical, lui, a élu son bureau en octobre 1884, avec Narcisse Leven, président, Hector Depasse, vice-président, et Alexis Muzet, secrétaire.

53 Cité dans le Siècle, 24 décembre 1887. Les 15 signataires sont : Bassinet. Benon, Boué, Cattiaux, Champoudry, Chassaing, Daumas, Emile Dubois. Hovelacque, Humbert, Levraud, Longuet, Mayer, Navarre et Patenne.

54 Le Radical, 6 mai 1890. Ces conseillers ont envoyé une lettre au pape Léon XIII à l’occasion de son jubilé sacerdotal. Le Temps cite les noms suivants : Georges Berry, Maurice Binder, Cochin, Despatys, Amédée Dufaure, Deville. Duval, Gamard, Lerolle, Marius Martin et Riant.

55 L’article du Radical en date du 6 mai 1890 et cité ci-dessus distingue le « groupe du Parti ouvrier » du « groupe blanquiste ».

56 Cité dans l’Année politique, 1890. pp. 97-98.

57 Voir son article « Changement de titre », paru dans Le Radical, 3 juin 1890.

58 Le Radical, 28 mai 1893.

59 Le Temps, 28 février 1894.

60 En février 1894, il y avait au Conseil municipal 9 possibilistes, 2 blanquistes, 3 socialistes indépendants et 3 socialistes révolutionnaires (le Temps, 28 février 1894 ; Le Radical, 1er mars 1894). Les blanquistes, Vaillant et Chauvière, refusaient de participer au bureau du Conseil municipal, alors que les possibilistes y étaient représentés, depuis l’élection de Jules Joffrin à la vice-présidence en février 1888.

61 M. Le Petit Temps, 8 mars 1894.

62 APP, BA 1192 (dossier Alfred Moreau), rapport de police, 19 août 1894.

63 Selon Le Radical en date du 16 mai 1896, il s’agit de Lucipia, Louis Puech. Octave Blondel, Piperaud, Fourest et Navarre.

64 La République française, 30 mai 1896.

65 D’après John Labusquière, interviewé par Le Radical, 16 mai 1896.

66 Le Petit Temps, 5 mai 1900. Les 4 blanquistes dissidents sont Archain, Breuillé. Daniel et Grébauval.

67 Le Matin, 11 février 1897.

68 Dans une réunion ayant eu lieu à l’Hôtel Continental juste après les élections, à laquelle une quarantaine de conseillers de la majorité assistaient, il a été décidé qu’il ne serait pas formé au Conseil de groupe nationaliste avec bureau permanent, et qu’en cas de circonstance importante une réunion plénière serait convoquée pour discuter la tactique à adopter (Le Temps, 16 mai 1900). Par exemple, Houdé et Mossot, membres du groupe des Droits de Paris au cours du Conseil 1896-1900, et réélus en 1900 avec le concours de la Ligue de la patrie française, siégeaient au sein de la majorité antiministérielle tout en restant dans leur ancien groupe.

69 Dans cette nomination, où 79 conseillers ont participé aux votes, environ 38 à 40 bulletins sont allés aux candidats de gauche, contre 36 à 38 à ceux de droite. Trois des candidats antiministériels sont parvenus à s’imposer au bout d’un deuxième voire un troisième tour. Ce qui montre qu’il y avait eu une dissidence au sein de la majorité. Par ailleurs, il y a eu 7 élections municipales partielles entre 1900 et mai 1904, mais les nationalistes, ayant perdu un siège au profit des radicaux, sont parvenus à leur en enlever deux, et à conserver ainsi, au moins théoriquement, l’effectif de 1900.

70 La Petite République, 7 mars 1906 ; Le Temps, 27 février 1906.

71 L’un des deux autres secrétaires était également un socialiste : Deslandres. Mais nous ignorons s’il était « unifié » ou non à ce moment-là, bien qu’aux élections municipales de 1908, il fût réélu en tant que candidat de la SFIO.

72 Le Temps, 9 mai 1908. Le groupe était présidé d’abord par Félix Roussel lui-même, puis par Ernest Caron en 1909.

73 Le groupe municipal d’union républicaine démocratique a initialement proposé au groupe radical une coalition, avec un roulement annuel de la présidence du bureau ; mais les radicaux ont refusé cette proposition, ce qui a amené les progressistes à se tourner vers la droite, avec laquelle ils ont formé, quelques jours avant la première séance du 10 juin, la liste commune des candidats au bureau.

74 Ordre du jour du groupe, cité dans Le Temps, 3 décembre 1908.

75 Lettre de membres du groupe radical adressée à son président Patenne, cité dans le Temps, 1er décembre 1908.

76 Bellan, Beer, Gent, Miniot, Roussel et Sauton, selon le Temps, 2 avril 1909.

77 Voir notamment Robert Vincent, « “La protestation universelle” lors de l’exécution de Ferrer : les manifestations d’octobre 1909 », Revue d’histoire moderne et contemporaine, tome 36, avril-juin 1989, pp. 245-265.

78 Cinq radicaux dissidents ont voté contre : Beer, Bellan, Gent, Miniot et Sauton. Par ailleurs, quatre radicaux se sont abstenus : Becret, Lemarchand, Petitjean et Salmon.

79 Aux élections du bureau qui ont eu lieu en mars et en juin 1910, et en mai 1911, tous les candidats de l’union de la droite furent élus sans concurrence, les radicaux et les socialistes n’ayant pas participé aux votes.

80 Il s’agit de Bellan, Dausset, Gent, Lemarchand et Miniot, et tous, sauf Dausset qui avait été un des chefs des nationalistes, s’étaient séparés du groupe radical en 1908-1909.

81 Y ont adhéré les 5 conseillers élus avec le programme de l’ARD, plus Cornette, élu sous l’étiquette « radical-socialiste ».

82 Il avait pour programme : « revendication énergique de toutes libertés municipales, économiques et religieuses, et lutte contre toute idée de sectarisme ou de surenchère démagogique ; défenses des franchises municipales et des intérêts des contribuables ; amélioration méthodique des services municipaux et réalisation raisonnée des réformes sociales » (extrait cité dans Le Temps, 12 juin 1912).

83 L’Éclair, 12 juin 1912. Le président du groupe était Ernest Caron.

84 Pour notre classification, voir l’explication détaillée que nous avons ajoutée dans les annexes.

85 Sur ce point, les travaux d’Yvan Combeau apportent peu. Ils se bornent à traiter les consultations électorales dans leur ensemble. L’analyse des réunions électorales et des processus par lesquels les candidats étaient choisis est, certes, difficile et dévoreuse de temps, notamment pour une grande ville comme Paris. Mais elle aurait donné des éclaircissements précieux sur le changement du personnel politique de la capitale. Nous regrettons de ne pas avoir fait de recherches approfondies des élections municipales sous cet angle-là.

86 Si nous avons préféré le nombre des réélections à la durée de l’exercice du mandat, c’est parce que cette dernière varie selon les périodes : de 3 ans, elle est portée à 4 en 1896, et après 1914 il y a un mandat de 7 ans (1912-1919) et deux de 6 ans (1919-1925, 1929-1935).

Table des illustrations

Titre TABLEAU III-1. Dates des élections municipales générales à Paris sous la Troisième République
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Titre TABLEAU III-2. Résultats des élections municipales générales selon les tendances politiques
Légende N.B. : Les colonnes des républicains modérés et des républicains conservateurs sont regroupées à partir de 1884, en raison de la difficulté à distinguer ces deux tendances.(a) Le nombre total des conseillers élus les 23-30 juillet 1871 est de 78, à cause de la triple élection de Mottu, élu à la Folie Méricourt (XIe), au Père Lachaise (XXe) et à Saint-Ambroise (XIe) ; (b) Le nombre dans la colonne « républicains radicaux » est celui des « autonomistes » : (c) Le chiffre entre parenthèses est celui des socialistes « unifiés ».
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Titre TABLEAU III-3. Répartition des élus selon le critère Droite-Gauche
Légende N.B. : Le classement est celui utilisé dans l’enquête sur les maires organisée par le Centre de recherches sur l’histoire du xixe siècle (Sorbonne). Voir Agulhon Maurice, Girard Louis, Robert Jean-Louis, Serman William et al., Les maires en France, op. cit., p. 134-135.- Les tendances dont les chiffres sont en gras sont composantes de la majorité gouvernementale de la période.- Nous avons regroupé certaines tendances lorsqu’il était difficile de les distinguer.(a) Seul le légitimiste Riant y est classé ; (b) Il s’agit de deux boulangistes, Girou et Prunières ; (c) Les républicains se réclamant de l’Alliance républicaine démocratique.
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Titre TABLEAU III-4. Composition du bureau du Conseil par tendances politiques
Légende Sigles : P = président : V = vice-président : S = secrétaire ; N = syndic.N.B. : (a) Faute de pouvoir distinguer les élus adhérant au groupe des républicains municipaux des républicains indépendants, cette colonne n’a pas été prise en compte de 1871 à 1881 et de 1890 à 1900 ; (b) Pour la période 1908-1914.
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Titre TABLEAU II1-5. Les conseillers municipaux selon les tendances politiques
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Titre TABLEAU III-5bis. Classification du tableau précédent
Légende N.B. : (a) Radicaux proches des socialistes, adhérents du groupe autonomiste-socialiste.
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Titre TABLEAU III-6. Renouvellement et ancienneté : période d’accès au Conseil (colonne) période durant laquelle le conseiller a siégé (ligne)
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Légende N.B. : Le tableau peut se lire dans les deux sens : chaque colonne présente la période d’accès au Conseil, et chaque ligne la période pendant laquelle les conseillers ont siégé.- Exemple de la lecture horizontale : La troisième ligne signifie que sur les 96 individus ayant siégé entre I87S et 1881. 25 sont élus pour la première fois en 1871-1874, 32 en 1874-1878 et 39 en 1878-1881.- Exemple de la lecture verticale : La troisième colonne signifie que sur les 39 conseillers élus pour la première lois pendant la période 1878-1881. 24 restaient en 1881-1884. 18 en 1884-1887, ainsi de suite.
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Titre TABLEAU III-7. Nombre de réélections (en moyenne)
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Titre TABLEAU III-8A. Motif de la fin du mandat selon les périodes
Légende N.B. : Les chiffres entre parenthèses sont des pourcentages en colonne.
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Titre TABLEAU III-8B. Motif de la fin du mandat par tendances politiques
Légende N.B. : Pour les motif, voir le tableau précédent. Les chiffres entre parenthèses sont des pourcentages sur le total de chaque tendance.
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Titre TABLEAU III-8C. Nombre moyen de réélections selon les motifs de la fin du mandat
Légende N.B. : Pour les motifs, voir les tableaux précédents.
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