1. Entre disciplines du biologique et sciences du socio-culturel

1Les contributions suivantes présentent trois types de décloisonnement disciplinaire à propos de quatre concepts. Pour celui de territoire, Farid Benhammou, Sarah Bortolamiol, géographes, et Nelly Ménard, éco-éthologue, mettent en parallèle leurs définitions disciplinaires, évaluent les intérêts ou les difficultés de chacune pour l’autre, montrent l’enrichissement respectif dans leur lecture des animaux, essaient une mise en communauté, au moins pour certains aspects, certaines situations, et proposent une définition commune ainsi qu’une nomination nouvelle, où le territoire devient espace de vie.

2Frédéric Louchard, anthropologue, propose un élargissement du concept de culture animale, après avoir comparé la version maniée par les éthologues, qu’il juge trop restreinte, et celle des anthropologues, puis revu et relu une situation primatologique particulière, celle des orangs-outans passés par un centre local de réadaptation – réintroduction. Une définition élargie de la culture lui permet d’insister sur les dynamiques culturelles, c’est-à-dire sur les incessantes adaptations, variations, transformations chez un individu ou dans un groupe, mais aussi entre individus et entre groupes.

3Le troisième mode de décloisonnement consiste à importer des concepts de sciences humaines rarement ou jamais utilisés jusqu’à présent. Florent Kohler, anthropologue, procède à une lecture critique du concept éthologique de dominance-subordination, qu’il considère très lié à l’agression, chère à l’éthologie classique de Konrad Lorenz, et donc à une analyse trop biologique des animaux. Acclimater le concept de galanterie aux coqs et aux poules lui permet d’essayer des concepts relationnels de préséance, de coopération, et d’insister sur les rituels sociaux à l’œuvre entre individus d’un groupe. Une procédure innovante qui rappelle le remplacement de l’empreinte par l’attachement. De leur côté, Patrice Régnié, sociologue, et Hélène Roche, éthologue, s’essaient à l’adaptation du concept de «  sauvegarde de la face  », élaboré par le sociologue Erving Goffman à propos des interactions quotidiennes entre humains. Ils entreprennent de l’adapter à des chevaux en interactions de confrontation, veillent à le désanthropiser en tenant compte du monde propre des équidés, donc à le transformer plus ou moins selon les aspects, le tout pour mesurer en quoi il peut enrichir la lecture et les analyses. Un autre exemple d’un bon anthropomorphisme de questionnement.