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    Plan détaillé Texte intégral Les termes du débat Les biens communs et les propriétés simultanées L’exemple de Milan Retour au débat Notes de bas de page Auteur

    Les biens communs en perspectives

    Ce livre est recensé par

    • Nicolas Guillet, Lectures, mis en ligne le 1 septembre 2021. URL : https://journals.openedition.org/lectures/50903 ; DOI : https://doi.org/10.4000/lectures.50903
    • Armelle Mazé, Œconomia, mis en ligne le 30 décembre 2022. URL : https://journals.openedition.org/oeconomia/13434 ; DOI : https://doi.org/10.4000/oeconomia.13434
    • Laurent Dalmas, Sociologie du travail, mis en ligne le 14 novembre 2023. URL : https://journals.openedition.org/sdt/44258 ; DOI : https://doi.org/10.4000/sdt.44258
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    Table des matières

    Quels biens communs y avait-il dans les communes ?

    Quelques remarques à partir d’un cas d’Ancien Régime

    Michela Barbot

    p. 45-58

    Texte intégral Les termes du débat Les biens communs et les propriétés simultanées L’exemple de Milan Retour au débat Notes de bas de page Auteur

    Texte intégral

    Les termes du débat

    1Au cours des dernières années, la question des Urban Commons a connu un fort intérêt, comme en témoigne une série de publications récentes1 ainsi que la première conférence mondiale entièrement consacrée à cette problématique, organisée à Bologne en novembre 20152. À l’intérieur de ces initiatives, le thème des Commons est souvent associé à une autre question qui fait débat au sein des études urbaines : celle du droit à la ville.

    2Théorisé dans les années 1960-1970 par Henri Lefebvre3, le concept de droit à la ville a été repris par David Harvey4 et d’autres auteurs5 dans une perspective de critique radicale des effets du capitalisme et de l’intervention étatique sur les villes contemporaines. Par opposition à la situation actuelle, « où planificateurs, promoteurs et autres experts détiennent un pouvoir immense sur la production de l’espace urbain6 », les partisans du droit à la ville revendiquent une nouvelle centralité pour une figure mise à l’écart par les politiques néolibérales : celle de l’habitant-usager. Dans le sillage de la théorie lefebvrienne, le droit à la ville est défini comme une revendication à la fois d’appropriation et de participation : lorsque l’appropriation renvoie à la légitimité des pratiques d’usage des espaces urbains au-delà de leur titularité formelle (publique ou privée), la participation implique que les habitants-usagers aient une voix significative dans toutes les décisions susceptibles d’affecter leurs lieux de vie et de travail7.

    3Dans le cadre de ces réflexions, les références aux biens communs s’avèrent très hétérogènes. Certains auteurs défendent au sens large une équivalence « ville-bien commun8 » dont la portée serait d’abord politique et symbolique : considérer la ville comme un « bien » signifie s’opposer à l’idée qu’elle soit réduite à une « marchandise » — et donc mettre en avant sa valeur d’usage par rapport à sa valeur d’échange9 —, tandis que l’adjectif « commun » renvoie à la volonté de dépasser le binôme État-marché10 pour proposer une gestion plus directe et « citoyenne » des espaces urbains11, avec des retombées vertueuses en termes de redistribution des ressources sociales.

    4D’autres auteurs, en revanche, dialoguent d’une manière plus ponctuelle avec la théorie des common-pool ressources élaborée par Elinor Ostrom, soulignant une convergence entre son interprétation de la propriété comme « faisceau de droits » et les concepts d’appropriation et d’usage mis en valeur par l’idée de droit à la ville12. Dans la même perspective, une forte correspondance est envisagée entre la revendication à la participation propre au droit à la ville et la centralité qu’Elinor Ostrom accorde à l’autogouvernance des ressources locales13.

    5Une dernière position consiste à l’inverse à marquer une distance par rapport à la théorie ostromienne. David Harvey, par exemple, évoque la difficulté de transposer le concept de common-pool ressources dans un espace plus large que celui considéré par Ostrom, dont le terrain d’enquête le plus important se limite à quinze mille personnes14. Harvey soulève également le problème des effets d’exclusion liés à certaines formes de gestion communautaire des espaces urbains : c’est le risque notamment des gated communities, dont le principe d’organisation ne diffère pas « de celui qui pousse cinquante utilisateurs à se partager des ressources communes en eau sans tenir compte des autres15 ». Une dernière critique que cet auteur formule à l’égard de la théorie ostromienne porte sur le concept de « système polycentrique ». Emprunté aux études de Vincent Ostrom, Robert Warren et Charles Tiebout sur le fédéralisme américain16, ce concept est utilisé par Vincent et Elinor Ostrom pour montrer que la production et la fourniture de services publics à l’échelle urbaine peuvent efficacement s’appuyer sur une « structure emboitée de plusieurs juridictions17 », dans laquelle Harvey, en revanche, envisage un péril de décentralisation susceptible d’accroître les inégalités produites par la néolibéralisation18.

    6À l’intérieur de ce riche débat, la référence à l’histoire19 se réduit très souvent à l’évocation d’une institution considérée comme une sorte de paradigme perdu des commons urbains : la commune médiévale. Plusieurs éléments de l’expérience communale sont mobilisés afin de justifier cette référence : l’existence d’un droit de citoyenneté défini à une échelle urbaine ; une très faible diffusion du droit de propriété privée et individuelle ; la présence d’un tissu sociopolitique dense d’associations et de corps intermédiaires ayant des règles écrites (des statuts) et amplement recours aux techniques de la délibération participative20.

    7La puissance de cet ensemble de références est devenue tellement forte que très peu d’études se sont jusqu’ici interrogées sur sa pertinence à plus long terme21. Pourtant, nombre de communes ont continué à exister bien au-delà de la fin du Moyen Âge. C’est le cas notamment de l’Italie22, où les autonomies municipales ont prospéré dans des cadres institutionnels très différents, des seigneuries du xive siècle aux états régionaux et aux empires territoriaux de l’époque moderne, tout en survivant à la formation de l’État-nation en 1861. En effet, après l’expérience communale, les villes italiennes sont longtemps restées les lieux principaux du pouvoir et de l’administration, ainsi que les centres de l’élaboration des critères d’inclusion sociale et politique. Cette configuration à la fois dynamique et multi-échelle, où l’institution communale a évolué dans une interaction constante avec d’autres instances politiques, devrait alors permettre de répondre aux questions suivantes : quel type de biens communs peut-on retrouver dans la longue histoire de l’expérience communale ? Et quel rapport peut-on concrètement envisager entre cette expérience historique et les catégories d’analyse forgées par les théories sur les commons et le droit à la ville ? D’une manière plus générale, comment l’histoire peut-elle trouver une place dans ce débat ? L’objectif de ce texte est précisément de donner quelques éléments de réponse à ces questions. Pour ce faire, une fois rappelées synthétiquement les acquisitions de l’historiographie médiévale sur les biens communs, je me concentrerai sur l’un de mes principaux terrains de recherche — la ville de Milan à l’époque moderne — en essayant de mettre ce cas d’étude en perspective avec les discussions autour des commons urbains.

    Les biens communs et les propriétés simultanées

    8Dès le début du xxe siècle23, les spécialistes de l’Italie médiévale ont abordé la question des biens communs en faisant appel à des matériels empiriques très variés : statuts urbains, chroniques populaires, textes théologiques et juridiques, documents judiciaires24, jusqu’aux sources iconographiques mises récemment en valeur par Patrick Boucheron25.

    9Les études menées sur ces sources révèlent une profonde liaison entre la théologie politique du bien commun, telle qu’elle est définie par le De bono communi du frère dominicain Rémi de Florence (1301-1302)26, et les biens tangibles (les bona communia, ou simplement communia) permettant de traduire dans la pratique cette forme idéale de gouvernement. Parmi les communia, on retrouve d’abord les biens de la commune, que la ville possède en propre. Il s’agit d’un patrimoine composite27, dont les institutions municipales peuvent parfois disposer jusqu’à le soustraire complètement à un usage collectif : c’est le cas, par exemple, des murailles, qui sont susceptibles d’être privatisées sans que cela lèse l’intérêt de la commune28. Ensuite, il y a les biens communautaires, c’est-à-dire les biens sur lesquels des groupes de familles, ou le plus souvent des institutions urbaines (confréries, corps de métier, hôpitaux, etc.), exercent des droits spécifiques, y compris le droit d’exclusion, dans l’objectif principal d’assurer le bien-être de ceux qui rentrent dans leur sphère d’influence29. À côté de ces deux types de biens, les sources médiévales parlent aussi de loci communes vel publici, c’est-à-dire de biens ou d’espaces (notamment les rues ou les fleuves) qui sont en mesure de faciliter la circulation intra-muros et qui, par conséquent, relèvent directement de la ville, qui les met à disposition des utilisateurs30.

    10Cet aperçu permet de comprendre que la catégorie de communia couvre des biens très variés, à mi-chemin entre ce que la théorie économique contemporaine qualifierait de biens publics et de biens de club31. L’appellation « commun » de ces biens découle précisément du fait qu’ils sont tous fonctionnels à la réalisation des missions propres au bien commun : satisfaire les besoins de la population (et surtout de sa catégorie la plus fragile : celle des « pauvres de la ville »32), régler les conflits33, favoriser la prospérité économique, défendre la commune des attaques extérieures. La liste de ces biens, par ailleurs, n’est jamais figée une fois pour toutes, puisqu’elle peut être allongée autant que l’exigent les circonstances. En effet, la manifestation d’un état de nécessité a pour conséquence de réduire toutes les ressources, y compris celles des particuliers, à l’état de bien commun34, et cela sans devoir forcément opérer un changement dans leur régime propriétaire. Cette précision permet de soulever un point important, à savoir le fait que les communia — dans la triple acception précisée plus haut — peuvent simultanément faire l’objet de plusieurs formes d’appropriation, non nécessairement collectives mais aussi individuelles.

    11À l’époque médiévale, le droit des biens est en fait charpenté par la théorie de la division du domaine, à la base de laquelle on retrouve une conception plurielle des propriétés, saisies comme autant de lieux de rencontre, de coordination et de conflit entre des droits fractionnés ou partagés35. La théorie du domaine divisé considère la propriété pleine et exclusive comme une forme juridique parmi d’autres (et il s’agit par ailleurs d’une forme parmi les moins répandues)36. En distinguant entre un domaine éminent (lié au fructus) et un domaine utile (lié à l’usus), cette théorie légitime plutôt l’existence de plusieurs ayants droit sur un même bien et permet de vendre, de transmettre et de sous-louer ces deux domaines (ou leurs parties) à une personne, un groupe ou une institution. Très souvent, la division des domaines n’est pas uniquement verticale, mais aussi horizontale, dans la mesure où elle peut s’attacher aux différentes « utilités » et aux différents « fruits » qu’un bien peut donner37. Dans la pratique, ces dissociations peuvent être tellement nombreuses qu’elles se prêtent à multiplier les occasions de conflit38. Ce risque étant très tangible, l’ensemble de ces droits est réglementé et reconnu par les cours de justice, et les changements susceptibles de les affecter demandent une coordination de la part de tous leurs titulaires : chaque conflit, tout comme chaque aliénation, transmission, sous-location d’une fraction du domaine utile ou éminent, doit aboutir à un nouvel accord dans lequel l’ensemble des droits en jeu est à nouveau vérifié et négocié. C’est précisément dans ce contexte juridique que la gestion des biens communs évolue pendant l’époque moderne39. Comme on le verra dans le cas de Milan, le « commun » n’est pas une troisième voie entre un « public » et un « privé » qu’à cette période il serait impossible de définir univoquement, mais il participe à plein titre au système de propriétés juxtaposées et « simultanées40 » que nous venons de décrire.

    L’exemple de Milan

    12À l’époque moderne, Milan est un centre urbain d’environ cent mille habitants41 qui est marqué par une complexité institutionnelle croissante. Dès le xiiie siècle, la ville fait partie d’un territoire plus large (d’abord une seigneurie et ensuite un duché de taille régionale, appartenant dès 1535 à l’empire des Habsbourg), dans lequel les anciennes autonomies locales cohabitent avec plusieurs autorités supra-locales42. Cette configuration politique n’est pas sans conséquences sur la définition et l’évolution des biens communs.

    13En 1411, en plein régime seigneurial, le conseil municipal demande à l’une des principales magistratures urbaines (le Vicario di provvisione) de faire un recensement des communia de la ville43. La plupart des terres et des pâturages communaux ayant été complètement aliénés un siècle et demi auparavant44, le Vicario di Provvisione rappelle au conseil municipal que les seuls biens sur lesquels la ville maintient un domaine exclusif sont des boutiques et des espaces de vente localisés à différents endroits du territoire urbain45. En cela le cas de Milan n’est pas isolé : dans leur acception de biens municipaux, les communia sont soumis à un processus d’aliénation que plusieurs études montrent déjà à l’œuvre à partir de l’apogée de l’expérience communale46. La raison de ce phénomène est essentiellement financière : sous la pression d’imposants besoins de liquidités, les administrations municipales sont obligées de vendre des portions de plus en plus importantes de leurs domaines.

    14Voyons alors de plus près quels sont les biens que le recensement de 1411 qualifie de communs. La liste dressée par le tribunal milanais comprend les boutiques et les espaces de vente que nous venons de citer ; les six portes d’accès à la ville ; les fortifications et les terrains qui y sont adossés ; certains puits et moulins ; la place de la commune ; le marché principal et ses halles ; les rues, les ponts et les canaux artificiels dont la ville est parsemée47. Une série de bilans comptables et d’actes notariés rédigés sous la domination des Habsbourg permet d’observer l’évolution des communia dans la période 1535-1796. Ces documents montrent que tous les biens indiqués dans la liste de 1411 sont désormais entre les mains d’une ample multitude d’acteurs : le conseil municipal, l’empereur, plusieurs particuliers et de nombreuses institutions urbaines48. Les domaines dont ces différents sujets sont titulaires sont associés à des prérogatives qui vont de la définition des critères d’accès jusqu’au pouvoir juridictionnel le plus important : celui d’administrer la justice en cas de conflit49. De surcroît, ces prérogatives ne sont ni distribuées selon un principe complètement vertical ou hiérarchique, ni totalement unifiées ou articulées selon les modes de la délégation et de la représentation50. D’une part, l’empereur et la commune peuvent occuper la position de propriétaires utiles ou éminents selon les cas, ce qui rend leur domaine très rarement absolu51 ; d’autre part, le domaine utile sur les communia — et donc leur usage concret — peut prévaloir sur le domaine éminent jusqu’au point de conférer des pouvoirs beaucoup plus amples que celui-ci.

    15C’est ce que montre, par exemple, l’administration des équipements hydrauliques urbains. Plusieurs études ont prouvé que la gestion des usages et des partages de l’eau constitue une part essentielle de l’idéologie du bien commun52. Cela est vrai en particulier pour Milan, une ville où les conditions géologiques facilitent le creusement de petites dérivations à partir des navigli, le réseau de canaux artificiels construit au Moyen Âge pour transporter les matériaux nécessaires à l’édification de la cathédrale53. Afin de gérer ce complexe système hydraulique, en 1346 la commune crée la charge du juge des eaux, qui est ensuite remplacé par une magistrature centrale54. De la fin du xive siècle jusqu’au moins la fin du xixe siècle, cette magistrature devra interagir avec deux partenaires également puissants : les détenteurs (individus, familles ou collectifs) des droits d’usage, qui règlent directement l’accès et l’entretien des canaux et contrôlent le débit régulier de l’eau55, et la Fabrique du Dôme, l’institution chargée de la construction de la cathédrale, qui s’occupe des travaux d’amélioration, et qui fait également office de juge dans les conflits opposant les usagers56.

    16La configuration institutionnelle de la Fabrique du Dôme, en particulier, montre bien à quel point l’interprétation du commun comme une alternative au binôme public-privé n’est pas en mesure de rendre compte des modes de gouvernance des communia. Dès sa naissance en 1386, la Fabrique du Dôme est gérée par un chapitre dans lequel des représentants de l’Église siègent à côté des membres du conseil municipal et des dirigeants de plusieurs corporations urbaines57. Grâce à son vaste patrimoine immobilier et à l’importance de son activité édilitaire, la Fabrique est capable de donner à la fois un logement et un travail à tous ceux qui vivent dans sa sphère d’influence. Cela vaut notamment pour les membres des corps de métier dont elle est la protectrice58, mais aussi pour la main-d’œuvre saisonnière provenant des alentours de Milan, constamment attirée par les opportunités de travail offertes par l’économie urbaine. À côté de ces activités, la Fabrique joue un rôle primordial dans l’assistance aux pauvres59 et dans le ravitaillement de la ville. On la retrouve de fait protagoniste de la gestion d’un autre bien commun essentiel à la vie urbaine : le plus grand marché de Milan, spécialisé dans les denrées de première nécessité, qui se déroule chaque jour autour de la place de la cathédrale.

    17Loin d’être un espace ouvert et accessible à tous, cette place est un territoire saturé de droits différents. Entre le xve et le xvie siècle, le duc de Milan et puis l’empereur, propriétaires éminents du sol de la place, cèdent sa propriété utile à la Fabrique du Dôme, qui commence tout de suite à louer des parcelles aux différents vendeurs qui prennent part au marché60. En 1477, à la place d’une église démolie, la Fabrique édifie une halle à deux étages, le Coperto dei Figini, avec une vingtaine de boutiques surmontées par autant d’appartements à usage résidentiel. À l’autre extrémité de la place, on trouve d’un côté l’hôtel de ville et, de l’autre, la Cour ducale, flanquée par une autre halle, le Coperto delle Bollette, dont les droits d’usage sont partagés entre la municipalité, des marchands et des corporations artisanales. Tout au bord de la place, une grande quantité de bancs de colportage anime un échange permanent de produits alimentaires, tissus, quincailleries. De temps en temps la place est vidée pour assurer le déroulement de rituels religieux et de cérémonies civiques ou impériales, mais ce désencombrement n’est pas sans difficultés61. Chaque altération, bien que minimale, du statu quo déclenche en effet des conflits dont la résolution exige une patiente activité de recomposition de tous les intérêts en jeu. Obligée à intervenir à chaque fois que le désaccord se prolonge trop longtemps, l’autorité impériale cherche essentiellement à faire en sorte que les conflits n’empêchent pas le déroulement du marché et le ravitaillement de la population urbaine62. L’intervention de ce pouvoir ressemble à celle d’un tuteur ou d’un garant qui veille à ce que les autres gérants du bien commun se coordonnent pour conserver et reproduire celui-ci63. Loin d’être une puissance complètement souveraine, l’autorité impériale doit elle-même trouver un terrain d’entente avec les autres ayants droit : c’est d’ailleurs pour cette raison que, tout au long de l’époque moderne, aucune instance n’arrivera à désencombrer complètement la place de toutes ses entraves.

    Retour au débat

    18Essayons maintenant de mettre notre cas d’étude en perspective avec le débat sur les commons et le droit à la ville. Il convient d’abord de distinguer dans l’analyse trois dimensions essentielles à la définition des biens communs : celle de leur régime propriétaire ; celle de leur gouvernance ; celle de l’accès à ces biens.

    19Pour ce qui concerne le premier aspect, on a vu que sur les communia médiévaux et modernes peuvent se superposer des droits différents, à la fois individuels et collectifs. À première vue, cette superposition pourrait évoquer l’idée de « faisceaux de droits » qui est au centre de la théorie d’Elinor Ostrom. Schématisant sa théorie, Ostrom décompose la propriété en cinq droits majeurs — accès, prélèvement, gestion, exclusion, aliénation —, qui relèvent de deux niveaux hiérarchiques. Le premier niveau est inférieur, « opérationnel », et inclut les droits à l’accès et au prélèvement. Au niveau supérieur, « de choix collectif », se définissent les règles qui seront appliquées au niveau opérationnel. On y trouve les droits de gestion, qui visent à fixer les conditions du prélèvement, à réguler
    l’utilisation de la ressource et à permettre les changements nécessaires à son amélioration ; les droits d’exclusion qui déterminent qui va bénéficier du droit d’accès et comment ce dernier peut être transféré ; et les droits d’aliénation consistant à vendre ou à céder entièrement l’un ou les deux droits d’exclusion et de gestion64. Comme le résume Fabienne Orsi, « eu égard à ces cinq types de droits, Ostrom développe quatre types de détenteurs des droits de propriété : le propriétaire [owner] détient les cinq droits, alors que le propriétaire sans droit d’aliénation [proprietor] a tout, sauf l’aliénation ; le détenteur de droits d’usage et de gestion [claimant] dispose, quant à lui, des trois premiers, mais pas de l’exclusion, ni de l’aliénation ; et enfin, l’utilisateur autorisé [authorized user] n’a que les deux premiers65 ». Revenons maintenant au système des propriétés simultanées d’Ancien Régime. Du fait que les domaines utiles et éminents sont susceptibles d’être fractionnés, loués ou même vendus, et que leurs titulaires peuvent exercer des actions qui relèvent à la fois des deux niveaux (opérationnel et de choix collectif66), on est face à des « faisceaux de droits » dont la distribution et la substance dépassent largement la catégorisation proposée par Ostrom. Il y a toutefois un autre concept de la théorie ostromienne qui se prête bien à dialoguer avec l’histoire des communia : celui de « gouvernance polycentrique ». Il convient de rappeler que le contexte dans lequel Vincent et Elinor Ostrom ont commencé à développer ce concept est éminemment urbain : il s’agit du débat autour de la réforme des zones métropolitaines aux États-Unis dans les années 1960-1970. À ce moment, ces découpages territoriaux sont caractérisés par la présence de juridictions superposées (overlapping juridictions) où se confrontent une multiplicité de centres de décision « multiniveaux » (multilevel), à la fois publics (l’État, les régions et les communes), privés (les entreprises et les familles) et associatifs (les organisations professionnelles, etc.)67. Lorsque la plupart des analystes de l’époque qualifient cette configuration d’inefficiente en raison d’un niveau excessif de redondance, le parti pris des Ostrom est d’affirmer que cette redondance permet au contraire « de construire des capacités considérables », dans la mesure où « chaque unité dispose d’une autonomie suffisante pour expérimenter avec des règles diverses et avec différentes capacités de réponse à des chocs externes ; à travers ces expérimentations les citoyens et les agents gouvernementaux ont accès aux connaissances locales et peuvent apprendre des expériences d’autres unités parallèles68 ». De plus, contrairement à la critique qu’en fait David Harvey, la polycentricité n’est pas une autre manière de nommer la décentralisation : ni bottom-up, ni top-down, l’approche des Ostrom envisage dans les institutions étatiques tout comme dans les organismes privés des acteurs parmi d’autres, réfutant ainsi l’idée que la solution institutionnelle la plus efficace soit nécessairement monocentrique69.

    20Or, le concept de polycentricité n’est pas sans rappeler le pluralisme juridictionnel qui caractérise l’espace politique de l’Ancien Régime (et celui des villes en particulier)70. On a vu dans le cas de Milan que le territoire urbain n’est pas un, mais qu’il est une mosaïque de juridictions relevant d’institutions qui participent avec des droits différents à la production et à la gouvernance des biens communs. Il convient d’insister encore sur le fait que l’autorité centrale n’est pas absente de cette arène institutionnelle : tout au contraire (on l’a évoqué dans le cas de la place du marché), son intervention peut s’avérer essentielle afin de garantir la survie des communia. Il est vrai toutefois que ce système de gouvernance « multiniveaux » est très exigeant en termes de coordination. On peut même avancer l’hypothèse que les conflits qu’il suscite en permanence, quoique coûteux et chronophages, seraient une modalité — voire la modalité — pour assurer et réaliser la coordination elle-même : c’est en fait à travers la résolution des conflits que les différentes instances qui gèrent les biens communs entrent en relation, se reconnaissent mutuellement et négocient pour recomposer leurs intérêts. D’ailleurs, Elinor Ostrom elle-même a insisté à plusieurs reprises sur le fait que le conflit est une composante structurante des commons : d’où la nécessité d’une série de règles d’arbitrage, de sanction, de contrôle, qu’elle considère comme incontournables afin d’éviter que « quelques individus puissent commencer à s’accaparer des bénéfices » et en « fassent payer le prix le plus élevé aux sans-pouvoir et sans-défense »71.

    21Dans ce dernier passage, Ostrom touche à l’une des questions sans doute les plus controversées dans le débat actuel : le problème de l’accès aux biens communs. Qui bénéficie concrètement de ces biens ? On a vu en ouverture de ce texte que les défenseurs de l’idée du droit à la ville se partagent entre ceux qui envisagent dans l’autogouvernance une voie pour garantir une répartition plus égalitaire des ressources urbaines, et ceux qui, à l’opposé, soulignent les risques d’exclusion associés à la non-universalité de ce choix politique. L’histoire des communia médiévaux et modernes nous dit des choses intéressantes à ce sujet. Reprenons l’exemple de la Fabrique du Dôme. Cette institution intervient dans plusieurs secteurs essentiels à l’accomplissement du bien commun : le gouvernement des eaux urbaines, l’échange des denrées de première nécessité, l’offre de logements dans la ville. Nous avons pu montrer dans d’autres occasions que la possibilité de jouir de ces ressources est directement liée aux différents degrés d’appartenance à cette institution, et que ces degrés sont charpentés par des critères qui accordent la plus grande importance à la durée de la résidence dans la ville72. Une telle différenciation produit inévitablement des inégalités en termes d’accès aux biens communs. Cependant, ni la Fabrique du Dôme, ni les autres institutions urbaines ne sont des organismes complètement immobiles ou fermés. D’une part, ces institutions peuvent élargir ou restreindre leur base sociale en fonction des conjonctures démographiques et économiques de la ville ; d’autre part, elles sont en relation constante les unes avec les autres, comme en témoignent les rapports privilégiés que la Fabrique du Dôme entretient avec plusieurs corporations. Bien qu’avec des modalités pyramidales et hiérarchiques, ces institutions finissent par répartir les ressources locales bien au-delà de la stricte communauté de leurs adhérents73. De surcroît, ces derniers ne sont pas obligés de s’engager dans une relation exclusive avec une seule institution74 : tout au contraire, l’une des caractéristiques des villes occidentales est d’offrir aux individus l’opportunité d’intégrer simultanément plusieurs communautés, ce qui fait de la multi-appartenance une pratique très répandue75. Le système de redistribution qui en découle est à la fois largement inclusif et profondément inégalitaire : c’est finalement cette spécificité qui empêche de lire l’expérience des communes d’Ancien Régime à travers les lunettes de la théorie contemporaine du droit à la ville.

    Notes de bas de page

    1Voir par exemple S. R. Foster, « Collective Action and the Urban Commons », Notre Dame Law Review, 87, 2011, p. 57-134 ; C. Borch, M. Kornberger (dir.), Urban Commons: Rethinking the City, Londres, Routledge, 2015.

    2Il s’agit de la 1st ISAC Thematic Conference on the Urban Commons, promue par l’International Association for the Study of the Commons, et ayant pour titre The City as a Commons. Reconceiving Urban Space, Common Goods and City Governance (Bologne, 6 et 7 novembre 2015).

    3Voir notamment H. Lefebvre, La révolution urbaine, Paris, Gallimard, 1970.

    4D. Harvey, Villes rebelles. Du droit à la ville à la révolution urbaine, Paris, Libella, 2015 (éd. orig. Rebel Cities: From the Right to the City to the Urban Revolution, Londres, Verso, 2013).

    5D. Mitchell, The Right to the City: Social Justice and the Fight for Public Space, New York, Guilford Press, 2003.

    6Ainsi M. Purcell, « Le droit à la ville et les mouvements urbains contemporains », Rue Descartes, 63, 2009, p. 40-50, ici p. 43.

    7M. Purcell, « Le droit à la ville... », art. cité.

    8Voir par exemple « La ville comme bien commun. Planification urbaine et droit à la ville », Les cahiers d’architecture, 9, 2013.

    9Voir N. Brenner, P. Marcuse, M. Mayer (dir.), Cities for People, and Not for Profit: Critical Urban Theory and the Right to the City, New York, Routledge, 2011.

    10M. R. Marella (dir.), Oltre il pubblico e il privato. Per un diritto dei beni comuni, Vérone, Ombre Corte, 2014.

    11La plupart de ces réflexions sont liées aux mouvements sociaux qui ont encouragé un sentiment actif de « citoyenneté insurgée », pour reprendre la formule de J. Holston, Insurgent Citizenship, Princeton, Princeton University Press, 2006.

    12E. Ostrom décompose en fait la propriété en plusieurs droits différents, en admettant l’existence d’usagers et non seulement de pleins propriétaires. On reviendra sur le concept de faisceau de droits dans le dernier paragraphe de ce texte.

    13Voir notamment E. Ostrom, Gouvernance des biens communs. Pour une nouvelle approche des ressources naturelles, Bruxelles, De Boeck, 2010.

    14D. Harvey, Villes rebelles…, op. cit., p. 135-137.

    15Ibid., p. 140.

    16Voir M. Barbot, « Villes et polycentricité », dans M. Cornu, F. Orsi, J. Rochfeld (dir.), Dictionnaire des biens communs, Paris, PUF, 2017, p. 1207-1211, et surtout V. Ostrom, C. M. Tiebout, R. Warren, « The Organization of Government in Metropolitan Areas: a Theoretical Inquiry », American Political Science Review, 55/4, 1961, p. 831-842. Dans ce texte (p. 831-832), les auteurs définissent la polycentricité comme une forme de gouvernement dans laquelle « de nombreux éléments sont capables d’entreprendre des ajustements mutuels ordonnant leurs relations les uns avec les autres au sein d’un système ou chaque élément agit indépendamment des autres ». Nous discuterons ce concept dans la partie finale de ce texte, à laquelle nous renvoyons.

    17Ainsi E. Ostrom, « Beyond Markets and States: Polycentric Governance of Complex Economic Systems », American Economic Review, 100/3, 2010, p. 641-672.

    18D. Harvey, Villes rebelles…, op. cit., p. 160.

    19Il faut souligner par ailleurs que les historiens se sont intéressés plus aux commons ruraux qu’à leurs homologues urbains : c’est ce qui est remarqué par G. Bravo, T. De Moor, « The Commons in Europe: from Past to Future », International Journal of Commons, 2, 2008, p. 155-161.

    20Voir par exemple F. Treggiari, « Bene comune: la città medievale », dans M. R. Marella (dir.), Oltre il pubblico e il privato…, op. cit., p. 221-230.

    21Une exception est représentée par T. De Moor, qui propose de considérer les corporations urbaines d’Ancien Régime comme des commons à part entière : T. De Moor, « The Silent Revolution. The Emergence of Commons, Guilds and Other Forms of Corporate Collective Action in Western Europe from the late Middle Ages Onwards », The International Review of Social History, 53, 2008, p. 175-208.


    22En particulier du nord de la pénsinsule : voir A. Varni (dir.), Storia dell’autonomia in Italia tra Ottocento e Novecento, Bologne, Il Mulino, 2001.

    23L’une des premières études sur ces thèmes est l’ouvrage de M. Roberti, Dei beni appartenenti alle città dell’Italia settentrionale dalle invasioni barbariche al sorgere dei comuni, Modène, Archivio Giuridico, 1903.

    24Parmi une large bibliographie, voir J.-C. Maire-Vigueur (dir.), I beni comuni nell’Italia medievale, fonti e studi, Mélanges de l’École française de Rome. Moyen Âge, Temps modernes, 99, 1987.

    25Nous pensons notamment à l’analyse de la fresque du buon governo d’Ambrogio Lorenzetti realisée par P. Boucheron, Conjurer la peur. Sienne, 1338. Essai sur la force politique des images, Paris, Seuil, 2013.

    26R. de Girolami, « De bono communi », Memorie domenicane, 16, 1985, p. 1-198.
Sur la reformulation médiévale du concept aristotélicien de bien commun, voir M. S. Kempshall, The Common Good in the Late Medieval Political Thought: Moral Goodness and Political Benefit, Oxford, Oxford University Press, 1999 ; É. Lecuppre-Desjardin, A.-L. Van Bruaene (dir.), De bono communi. The Discourse and Practice of Common Good in the European City (13th-16th Centuries), Turnhout, Brepols, 2010.

    27Ses composantes peuvent varier d’un contexte à l’autre : voir R.Rao, « Le risorse collettive nell’Italia medievale », Reti medievali, 2007 (http://rm.univr.it/repertorio/rm_riccardo_rao_communia.html).

    28De plus, ces fortifications sont considérées comme des biens communaux en dépit de la nature privée du terrain sur lequel elles peuvent être bâties : voir J. Heers (dir.), Fortifications, portes des villes, places publiques dans le monde méditérranéen, Paris, Presses de l’université de Paris Sorbonne, 1985.

    29Voir A. I. Pini, Città, comuni e corporazioni nel Medioevo italiano, Bologne, CLUEB, 1994.

    30P. Boucheron, « Espace public et lieux publics : approches en histoire urbaine », dans P. Boucheron, N. Offenstadt (dir.), L’espace public au Moyen Âge. Débats autour de Jürgen Habermas, Paris, Puf, 2011, p. 99-118.

    31Certains auteurs parlent de semicommons : voir par exemple H. E. Smith, « Semicommon Property Rights and Scattering in the Open Fields », Journal of Legal Studies, 29/2, 2000, p. 131-169.

    32Sur la liaison entre le bien commun et l’assistance aux pauvres, voir G. Todeschini, « Participer au Bien Commun : la notion franciscaine d’appartenance à la Civitas », dans P. Boucheron, N. Offenstadt (dir.), L’espace public au Moyen Âge…, op. cit., p. 225-237.

    33Comme le rappelle P. Boucheron, la paix est considérée comme une victoire sur le désaccord plutôt que comme absence de conflits : P. Boucheron, « Politisation et dépolitisation d’un lieu commun. Remarque sur la notion de Bien Commun dans les villes d’Italie centro-septentrionales entre commune et seigneurie », dans É. Lecuppre-Desjardin, A.-L. Van Bruaene (dir.), De bono communi…, op. cit., p. 237-252.

    34C’est ce qui est remarqué, pour le cas français, par A. Rigaudière, « Donner pour le bien commun et contribuer pour les biens communs dans les villes du Midi français du xiiie au xve siècle », dans ibid., p. 11-53.

    35Sur la théorie du domaine divisé, voir notamment P. Grossi, Il dominio e le cose: percezioni medievali e moderne dei diritti reali, Milan, Giuffré, 1992.

    36Sur la faible diffusion de la pleine propriété immobilière urbaine en Italie et en France, voir O. Faron, É. Hubert (dir.), Le sol et l’immeuble. Les formes dissociées de propriété immobilière dans les villes de France et d’Italie, Rome, École française de Rome, 1993. À Milan, encore au xviie siècle, la pleine propriété individuelle ne couvre que 7 % du parc édilitaire de la ville : S. D’Amico, Le contrade e la città, Milan, Franco Angeli, 1994.

    37Dans le cas des eaux, par exemple, ces différentes utilités sont liées à l’irrigation, à la production manufacturière, au transport de marchandises, à la navigation de plaisance : je renvoie à M. Barbot, « Non tutti i conflitti vengono per nuocere. Usi, diritti e litigi sui canali lombardi fra XV e XX secolo », dans L. Mocarelli (dir.), Quando manca il pane. Origini e cause della scarsità delle risorse alimentari in età moderna e contemporanea, Bologne, Il Mulino, 2013, p. 35-56.

    38Nous avons analysé ces conflits dans M. Barbot, « Incertitude ou pluralité  ? Les conflits sur les droits fonciers et immobiliers dans la Lombardie d’Ancien Régime », dans J. Dubouloz, A. Ingold (dir.), Faire la preuve des droits sur le sol. Droits et savoirs en Méditerranée, Rome, École française de Rome, 2011, p. 275-301.

    39C’est ce qui est montré, dans une perspective d’histoire du droit, par A. Dani, « Pluralismo giuridico e ricostruzione storica dei diritti collettivi », Archivio Scialoja-Bolla. Annali di studi sulla proprietà collettiva, 1, 2005, p. 64-73.

    40Ce système de propriété a été qualifié de « propriétés simultanées » par la jurisprudence du xixe siècle : voir A.-M. Patault, Introduction historique au droit des biens, Paris, PUF, 1989.

    41Plus précisément, la taille démographique de la ville oscille entre les 120 000 unités de la fin du xvie siècle et les 100 000 habitants recensés au milieu du xviiie siècle. Entre ces deux périodes, la peste de 1630 réduit de moitié la population urbaine : voir D. Sella, « Premesse demografiche ai censimenti austriaci », Storia di Milano, Milan, Fondazione Treccani, t. 12, 1959, p. 459-478.

    42Cela est le cas de plusieurs villes d’Ancien Régime : voir C. Tilly, W. Blockmans (dir.), Cities and the Rise of State in Europe, A.D. 1000 to 1800, Oxford, Westiew Press, 1994.

    43Voir E. Saita, « I beni comunali a Milano ed alcuni esempi della loro amministrazione fra Tre e Quattrocento », dans L. C. Mauri, L. De Angelis, P. Mainoni (dir.), L’età dei Visconti. Il dominio di Milano tra XIII e XIV secolo, Milan, La Storia, 1993, p. 217-268.

    44Sur les biens de la commune de Milan à l’époque communale, voir P. Grillo, « Il Comune di Milano e il problema dei beni pubblici fra XII e XIII secolo: da un processo del 1207 », Mélanges de l’École française de Rome. Moyen Âge, Temps modernes, 113, 2000, p. 433-451.

    45E. Saita, « I beni comunali a Milano… », art. cité, p. 221.

    46Voir par exemple R. Rao, I beni del comune di Vercelli. Dalla rivendicazione all’alienazione (1183-1254), Vercelli, Società Storica Vercellese-Università del Piemonte Orientale, 2005.

    47E. Saita, « I beni comunali a Milano… », art. cité, p. 221.

    48Voir L. Mocarelli, « La gestione dei beni della Città nella Milano dell’età moderna », Annali di Storia moderna e contemporanea, 11, 2005, p. 169-182 ; S. Agnoletto, Lo Stato di Milano al principio del settecento. Finanza pubblica, sistema fiscale e interessi locali, Milan, Angeli, 2000, p. 198-203.

    49Le pouvoir juridictionnel des actes de possession est très bien montré par T. Herzog, Frontiers of Possession. Spain and Portugal in Europe and the Americas, Cambridge, Cambridge University Press, 2015.

    50Sur cette question, voir E. Conte, « Comune proprietario o Comune rappresentante? La titolarità dei beni collettivi tra dogmatica e storiografia », Rivista di diritto agrario, 78/2, 1999, p. 183-189.

    51Dans ce sens, on ne peut pas parler d’un véritable domaine public, comme l’observe L.Patetta, « Il ruolo del demanio e del patrimonio pubblico nella costruzione della città. Il caso di Milano », dans A. Acuto (dir.), Demanio e patrimonio pubblico nella gestione della città, Milan, Comune di Milano, 1980, p. 19-20.

    52Voir, à ce titre, P. Boucheron, « Usage et partage de l’eau à Milan et dans le milanais (xiiie-xve siècle) », dans É. Crouzet-Pavan, J.-C. Maire-Vigueur (dir.), Water Control in Western Europe, 12th-16th Centuries, Milan, s. l., 1994, p. 123-138.

    53G. Albini, L’acqua a Milano. Uso e gestione nel basso medioevo (1385-1535), Bologne, Cappelli, 1990.

    54G. Bigatti, La provincia delle acque. Ambiente, istituzioni e tecnici in Lombardia tra Sette e Ottocento, Milan, Angeli, 1995.

    55La plupart de ces usagers sont regroupés dans des sociétés (consorzi) dont plusieurs existent encore aujourd’hui. Sur leur fonctionnement, voir A. Ingold, « Les sociétés d’irrigation : bien commun et action collective », Entreprise et histoire, 50, 2008, p. 19-35.

    56J’ai analysé ces conflits dans M. Barbot, « Non tutti i conflitti vengono per nuocere… », art. cité.

    57Sur l’organisation de la Fabrique, M. Barbot, Le architetture della vita quotidiana. Pratiche abitative e scambi immobiliari a Milano in età moderna, Venise, Marsilio, 2008.

    58Parmi les corps de métier liés à la Fabrique du Dôme, il y a les professions édilitaires, alimentaires, textiles, les ouvriers du secteur métallurgique. D’un côté, cette institution est chargée d’assurer le respect des normes corporatives, de juger les conflits professionnels, de décider de la carrière des membres de ces corporations. De l’autre, elle est le principal loueur des boutiques, ateliers, espaces de colportage, ce qui lui permet d’avoir un rôle très important dans la réglementation du marché de travail urbain : M. Barbot, L. Mocarelli, « L’ombra lunga della cattedrale. L’impatto del cantiere del Duomo di Milano sullo spazio urbano (secoli XVI-XVIII) », dans P. Boucheron, M. Folin (dir.), I grandi cantieri del rinnovamento urbano: esperienze italiane ed europee a confronto (secoli XIV-XVI), Rome, École française de Rome, 2011, p. 251-277.

    59Délivrant des certificats de pauvreté, cette institution participe elle-même à la construction de la catégorie de « pauvre », et ce depuis l’époque médiévale : voir P. Boucheron, « À qui appartient la cathédrale ? La fabrique et la cité dans l’Italie médiévale », dans P. Boucheron, O. Mattéoni (dir.), Les espaces sociaux de l’Italie urbaine, Paris, Publications de la Sorbonne, 2005, p. 286-330.

    60E. Salvatori, « Spazi mercantili e commerciali a Milano nel medioevo: la vocazione del centro », dans A. Grohmann (dir.), Spazio urbano e organizzazione economica nell’Europa medievale, Naples,
    Edizioni Scientifiche Italiane, 1994, p. 248-249.

    61Voir R. Canosa, La vita quotidiana a Milano in età spagnola, Milan, Longanesi, 1996.

    62Plusieurs exemples de cette intervention dans M. Barbot, L. Mocarelli, « L’ombra lunga della cattedrale… », art. cité.

    63Nous empruntons la métaphore du tuteur à L. Mannori, Il sovrano tutore. Pluralismo istituzionale e accentramento amministrativo nel Principato dei Medici (sec. XVI-XVIII), Milan, Giuffrè, 1994.

    64E. Ostrom, « Private and Common Property Rights », dans B. Bouckaert, G. De Geest (dir.), Encyclopedia of Law and Economics, t. 2 : Civil Law and Economics, Cheltenham, Edward Elgar, 1999, p. 332-379.

    65Voir F. Orsi, « Elinor Ostrom et les faisceaux de droits : l’ouverture d’un nouvel espace pour penser la propriété commune », Revue de la régulation, 14, 2013 (https://regulation.revues.org/10471).

    66Ces deux niveaux ne sont pas préalablement hiérarchisés. On peut citer, à cet égard, une très éloquente déclaration du Vicario di Provvisione, qui en 1545 affirme que « la Fabrique du Dôme a sur la place un domaine utile qui l’emporte sur le droit éminent de la Commune » : L. Mocarelli, « La gestione dei beni della città… », art. cité, p. 172.

    67Voir V. Ostrom, « Polycentricity–Part I », dans M. D. McGinnis (dir.), Polycentricity and Local Public Economies. Readings from the Workshop in Political Theory and Policy Analysis, Ann Arbor, University of Michigan Press, 1999, p. 52-74 ; M. Barbot, Villes et polycentricitité, op. cit.

    68P. Aligica, Rethinking Institutional Analysis and Development: the Bloomington School. Interviews with Vincent and Elinor Ostrom, Fairfax, George Mason University, 2003, p. 14.

    69Ainsi J.-P. Chanteau, A. Labrousse, « L’institutionnalisme méthodologique d’Elinor Ostrom : quelques enjeux et controverses », Revue de la régulation, 14, 2013 (http://regulation.revues.org/10555).

    70Sur le pluralisme juridictionnel de l’Ancien Régime, A.-M. Hespanha, « L’espace politique dans l’Ancien Régime », Boletim de la Faculdade de Direito, Universidade de Coimbra, LVIII, 1982, p. 455-510.

    71E. Ostrom, X. Basurto, « Façonner des outils d’analyse pour étudier le changement institutionnel », Revue de la régulation, 14, 2013 (https://regulation.revues.org/10437).

    72Le critère de la résidence se croise par ailleurs avec d’autres (le genre, l’âge, la profession, etc.) : voir M. Barbot, « La résidence comme appartenance. Les catégories spatiales et juridiques de l’inclusion sociale dans les villes italiennes sous l’Ancien Régime », Histoire urbaine, 27, 2013, p. 29-48.

    73Sur le role inclusif joué par les institutions urbaines vis-à-vis des étrangers, voir S. Cerutti, Étrangers. Étude d’une condition d’incertitude dans une société d’Ancien Régime, Montrouge, Bayard, 2012, p. 111-126.

    74C’est par ailleurs la thèse défendue par M. Weber dans La ville, Paris, Aubier 1992 (1re éd. 1921).

    75Voir H. J. Berman, Law and Revolution: the Formation of the Western Legal Tradition, Cambridge/Londres, Harvard University Press, 1983 ; K. A. Lynch, Individuals, families and communities in Europe, 1200-1800: the Urban Foundations of Western Society, Cambridge, Cambridge University Press, 2003.

    Auteur

    Michela Barbot

    IDHE.S/ENS Paris-Saclay

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    1Voir par exemple S. R. Foster, « Collective Action and the Urban Commons », Notre Dame Law Review, 87, 2011, p. 57-134 ; C. Borch, M. Kornberger (dir.), Urban Commons: Rethinking the City, Londres, Routledge, 2015.

    2Il s’agit de la 1st ISAC Thematic Conference on the Urban Commons, promue par l’International Association for the Study of the Commons, et ayant pour titre The City as a Commons. Reconceiving Urban Space, Common Goods and City Governance (Bologne, 6 et 7 novembre 2015).

    3Voir notamment H. Lefebvre, La révolution urbaine, Paris, Gallimard, 1970.

    4D. Harvey, Villes rebelles. Du droit à la ville à la révolution urbaine, Paris, Libella, 2015 (éd. orig. Rebel Cities: From the Right to the City to the Urban Revolution, Londres, Verso, 2013).

    5D. Mitchell, The Right to the City: Social Justice and the Fight for Public Space, New York, Guilford Press, 2003.

    6Ainsi M. Purcell, « Le droit à la ville et les mouvements urbains contemporains », Rue Descartes, 63, 2009, p. 40-50, ici p. 43.

    7M. Purcell, « Le droit à la ville... », art. cité.

    8Voir par exemple « La ville comme bien commun. Planification urbaine et droit à la ville », Les cahiers d’architecture, 9, 2013.

    9Voir N. Brenner, P. Marcuse, M. Mayer (dir.), Cities for People, and Not for Profit: Critical Urban Theory and the Right to the City, New York, Routledge, 2011.

    10M. R. Marella (dir.), Oltre il pubblico e il privato. Per un diritto dei beni comuni, Vérone, Ombre Corte, 2014.

    11La plupart de ces réflexions sont liées aux mouvements sociaux qui ont encouragé un sentiment actif de « citoyenneté insurgée », pour reprendre la formule de J. Holston, Insurgent Citizenship, Princeton, Princeton University Press, 2006.

    12E. Ostrom décompose en fait la propriété en plusieurs droits différents, en admettant l’existence d’usagers et non seulement de pleins propriétaires. On reviendra sur le concept de faisceau de droits dans le dernier paragraphe de ce texte.

    13Voir notamment E. Ostrom, Gouvernance des biens communs. Pour une nouvelle approche des ressources naturelles, Bruxelles, De Boeck, 2010.

    14D. Harvey, Villes rebelles…, op. cit., p. 135-137.

    15Ibid., p. 140.

    16Voir M. Barbot, « Villes et polycentricité », dans M. Cornu, F. Orsi, J. Rochfeld (dir.), Dictionnaire des biens communs, Paris, PUF, 2017, p. 1207-1211, et surtout V. Ostrom, C. M. Tiebout, R. Warren, « The Organization of Government in Metropolitan Areas: a Theoretical Inquiry », American Political Science Review, 55/4, 1961, p. 831-842. Dans ce texte (p. 831-832), les auteurs définissent la polycentricité comme une forme de gouvernement dans laquelle « de nombreux éléments sont capables d’entreprendre des ajustements mutuels ordonnant leurs relations les uns avec les autres au sein d’un système ou chaque élément agit indépendamment des autres ». Nous discuterons ce concept dans la partie finale de ce texte, à laquelle nous renvoyons.

    17Ainsi E. Ostrom, « Beyond Markets and States: Polycentric Governance of Complex Economic Systems », American Economic Review, 100/3, 2010, p. 641-672.

    18D. Harvey, Villes rebelles…, op. cit., p. 160.

    19Il faut souligner par ailleurs que les historiens se sont intéressés plus aux commons ruraux qu’à leurs homologues urbains : c’est ce qui est remarqué par G. Bravo, T. De Moor, « The Commons in Europe: from Past to Future », International Journal of Commons, 2, 2008, p. 155-161.

    20Voir par exemple F. Treggiari, « Bene comune: la città medievale », dans M. R. Marella (dir.), Oltre il pubblico e il privato…, op. cit., p. 221-230.

    21Une exception est représentée par T. De Moor, qui propose de considérer les corporations urbaines d’Ancien Régime comme des commons à part entière : T. De Moor, « The Silent Revolution. The Emergence of Commons, Guilds and Other Forms of Corporate Collective Action in Western Europe from the late Middle Ages Onwards », The International Review of Social History, 53, 2008, p. 175-208.


    22En particulier du nord de la pénsinsule : voir A. Varni (dir.), Storia dell’autonomia in Italia tra Ottocento e Novecento, Bologne, Il Mulino, 2001.

    23L’une des premières études sur ces thèmes est l’ouvrage de M. Roberti, Dei beni appartenenti alle città dell’Italia settentrionale dalle invasioni barbariche al sorgere dei comuni, Modène, Archivio Giuridico, 1903.

    24Parmi une large bibliographie, voir J.-C. Maire-Vigueur (dir.), I beni comuni nell’Italia medievale, fonti e studi, Mélanges de l’École française de Rome. Moyen Âge, Temps modernes, 99, 1987.

    25Nous pensons notamment à l’analyse de la fresque du buon governo d’Ambrogio Lorenzetti realisée par P. Boucheron, Conjurer la peur. Sienne, 1338. Essai sur la force politique des images, Paris, Seuil, 2013.

    26R. de Girolami, « De bono communi », Memorie domenicane, 16, 1985, p. 1-198.
Sur la reformulation médiévale du concept aristotélicien de bien commun, voir M. S. Kempshall, The Common Good in the Late Medieval Political Thought: Moral Goodness and Political Benefit, Oxford, Oxford University Press, 1999 ; É. Lecuppre-Desjardin, A.-L. Van Bruaene (dir.), De bono communi. The Discourse and Practice of Common Good in the European City (13th-16th Centuries), Turnhout, Brepols, 2010.

    27Ses composantes peuvent varier d’un contexte à l’autre : voir R.Rao, « Le risorse collettive nell’Italia medievale », Reti medievali, 2007 (http://rm.univr.it/repertorio/rm_riccardo_rao_communia.html).

    28De plus, ces fortifications sont considérées comme des biens communaux en dépit de la nature privée du terrain sur lequel elles peuvent être bâties : voir J. Heers (dir.), Fortifications, portes des villes, places publiques dans le monde méditérranéen, Paris, Presses de l’université de Paris Sorbonne, 1985.

    29Voir A. I. Pini, Città, comuni e corporazioni nel Medioevo italiano, Bologne, CLUEB, 1994.

    30P. Boucheron, « Espace public et lieux publics : approches en histoire urbaine », dans P. Boucheron, N. Offenstadt (dir.), L’espace public au Moyen Âge. Débats autour de Jürgen Habermas, Paris, Puf, 2011, p. 99-118.

    31Certains auteurs parlent de semicommons : voir par exemple H. E. Smith, « Semicommon Property Rights and Scattering in the Open Fields », Journal of Legal Studies, 29/2, 2000, p. 131-169.

    32Sur la liaison entre le bien commun et l’assistance aux pauvres, voir G. Todeschini, « Participer au Bien Commun : la notion franciscaine d’appartenance à la Civitas », dans P. Boucheron, N. Offenstadt (dir.), L’espace public au Moyen Âge…, op. cit., p. 225-237.

    33Comme le rappelle P. Boucheron, la paix est considérée comme une victoire sur le désaccord plutôt que comme absence de conflits : P. Boucheron, « Politisation et dépolitisation d’un lieu commun. Remarque sur la notion de Bien Commun dans les villes d’Italie centro-septentrionales entre commune et seigneurie », dans É. Lecuppre-Desjardin, A.-L. Van Bruaene (dir.), De bono communi…, op. cit., p. 237-252.

    34C’est ce qui est remarqué, pour le cas français, par A. Rigaudière, « Donner pour le bien commun et contribuer pour les biens communs dans les villes du Midi français du xiiie au xve siècle », dans ibid., p. 11-53.

    35Sur la théorie du domaine divisé, voir notamment P. Grossi, Il dominio e le cose: percezioni medievali e moderne dei diritti reali, Milan, Giuffré, 1992.

    36Sur la faible diffusion de la pleine propriété immobilière urbaine en Italie et en France, voir O. Faron, É. Hubert (dir.), Le sol et l’immeuble. Les formes dissociées de propriété immobilière dans les villes de France et d’Italie, Rome, École française de Rome, 1993. À Milan, encore au xviie siècle, la pleine propriété individuelle ne couvre que 7 % du parc édilitaire de la ville : S. D’Amico, Le contrade e la città, Milan, Franco Angeli, 1994.

    37Dans le cas des eaux, par exemple, ces différentes utilités sont liées à l’irrigation, à la production manufacturière, au transport de marchandises, à la navigation de plaisance : je renvoie à M. Barbot, « Non tutti i conflitti vengono per nuocere. Usi, diritti e litigi sui canali lombardi fra XV e XX secolo », dans L. Mocarelli (dir.), Quando manca il pane. Origini e cause della scarsità delle risorse alimentari in età moderna e contemporanea, Bologne, Il Mulino, 2013, p. 35-56.

    38Nous avons analysé ces conflits dans M. Barbot, « Incertitude ou pluralité  ? Les conflits sur les droits fonciers et immobiliers dans la Lombardie d’Ancien Régime », dans J. Dubouloz, A. Ingold (dir.), Faire la preuve des droits sur le sol. Droits et savoirs en Méditerranée, Rome, École française de Rome, 2011, p. 275-301.

    39C’est ce qui est montré, dans une perspective d’histoire du droit, par A. Dani, « Pluralismo giuridico e ricostruzione storica dei diritti collettivi », Archivio Scialoja-Bolla. Annali di studi sulla proprietà collettiva, 1, 2005, p. 64-73.

    40Ce système de propriété a été qualifié de « propriétés simultanées » par la jurisprudence du xixe siècle : voir A.-M. Patault, Introduction historique au droit des biens, Paris, PUF, 1989.

    41Plus précisément, la taille démographique de la ville oscille entre les 120 000 unités de la fin du xvie siècle et les 100 000 habitants recensés au milieu du xviiie siècle. Entre ces deux périodes, la peste de 1630 réduit de moitié la population urbaine : voir D. Sella, « Premesse demografiche ai censimenti austriaci », Storia di Milano, Milan, Fondazione Treccani, t. 12, 1959, p. 459-478.

    42Cela est le cas de plusieurs villes d’Ancien Régime : voir C. Tilly, W. Blockmans (dir.), Cities and the Rise of State in Europe, A.D. 1000 to 1800, Oxford, Westiew Press, 1994.

    43Voir E. Saita, « I beni comunali a Milano ed alcuni esempi della loro amministrazione fra Tre e Quattrocento », dans L. C. Mauri, L. De Angelis, P. Mainoni (dir.), L’età dei Visconti. Il dominio di Milano tra XIII e XIV secolo, Milan, La Storia, 1993, p. 217-268.

    44Sur les biens de la commune de Milan à l’époque communale, voir P. Grillo, « Il Comune di Milano e il problema dei beni pubblici fra XII e XIII secolo: da un processo del 1207 », Mélanges de l’École française de Rome. Moyen Âge, Temps modernes, 113, 2000, p. 433-451.

    45E. Saita, « I beni comunali a Milano… », art. cité, p. 221.

    46Voir par exemple R. Rao, I beni del comune di Vercelli. Dalla rivendicazione all’alienazione (1183-1254), Vercelli, Società Storica Vercellese-Università del Piemonte Orientale, 2005.

    47E. Saita, « I beni comunali a Milano… », art. cité, p. 221.

    48Voir L. Mocarelli, « La gestione dei beni della Città nella Milano dell’età moderna », Annali di Storia moderna e contemporanea, 11, 2005, p. 169-182 ; S. Agnoletto, Lo Stato di Milano al principio del settecento. Finanza pubblica, sistema fiscale e interessi locali, Milan, Angeli, 2000, p. 198-203.

    49Le pouvoir juridictionnel des actes de possession est très bien montré par T. Herzog, Frontiers of Possession. Spain and Portugal in Europe and the Americas, Cambridge, Cambridge University Press, 2015.

    50Sur cette question, voir E. Conte, « Comune proprietario o Comune rappresentante? La titolarità dei beni collettivi tra dogmatica e storiografia », Rivista di diritto agrario, 78/2, 1999, p. 183-189.

    51Dans ce sens, on ne peut pas parler d’un véritable domaine public, comme l’observe L.Patetta, « Il ruolo del demanio e del patrimonio pubblico nella costruzione della città. Il caso di Milano », dans A. Acuto (dir.), Demanio e patrimonio pubblico nella gestione della città, Milan, Comune di Milano, 1980, p. 19-20.

    52Voir, à ce titre, P. Boucheron, « Usage et partage de l’eau à Milan et dans le milanais (xiiie-xve siècle) », dans É. Crouzet-Pavan, J.-C. Maire-Vigueur (dir.), Water Control in Western Europe, 12th-16th Centuries, Milan, s. l., 1994, p. 123-138.

    53G. Albini, L’acqua a Milano. Uso e gestione nel basso medioevo (1385-1535), Bologne, Cappelli, 1990.

    54G. Bigatti, La provincia delle acque. Ambiente, istituzioni e tecnici in Lombardia tra Sette e Ottocento, Milan, Angeli, 1995.

    55La plupart de ces usagers sont regroupés dans des sociétés (consorzi) dont plusieurs existent encore aujourd’hui. Sur leur fonctionnement, voir A. Ingold, « Les sociétés d’irrigation : bien commun et action collective », Entreprise et histoire, 50, 2008, p. 19-35.

    56J’ai analysé ces conflits dans M. Barbot, « Non tutti i conflitti vengono per nuocere… », art. cité.

    57Sur l’organisation de la Fabrique, M. Barbot, Le architetture della vita quotidiana. Pratiche abitative e scambi immobiliari a Milano in età moderna, Venise, Marsilio, 2008.

    58Parmi les corps de métier liés à la Fabrique du Dôme, il y a les professions édilitaires, alimentaires, textiles, les ouvriers du secteur métallurgique. D’un côté, cette institution est chargée d’assurer le respect des normes corporatives, de juger les conflits professionnels, de décider de la carrière des membres de ces corporations. De l’autre, elle est le principal loueur des boutiques, ateliers, espaces de colportage, ce qui lui permet d’avoir un rôle très important dans la réglementation du marché de travail urbain : M. Barbot, L. Mocarelli, « L’ombra lunga della cattedrale. L’impatto del cantiere del Duomo di Milano sullo spazio urbano (secoli XVI-XVIII) », dans P. Boucheron, M. Folin (dir.), I grandi cantieri del rinnovamento urbano: esperienze italiane ed europee a confronto (secoli XIV-XVI), Rome, École française de Rome, 2011, p. 251-277.

    59Délivrant des certificats de pauvreté, cette institution participe elle-même à la construction de la catégorie de « pauvre », et ce depuis l’époque médiévale : voir P. Boucheron, « À qui appartient la cathédrale ? La fabrique et la cité dans l’Italie médiévale », dans P. Boucheron, O. Mattéoni (dir.), Les espaces sociaux de l’Italie urbaine, Paris, Publications de la Sorbonne, 2005, p. 286-330.

    60E. Salvatori, « Spazi mercantili e commerciali a Milano nel medioevo: la vocazione del centro », dans A. Grohmann (dir.), Spazio urbano e organizzazione economica nell’Europa medievale, Naples,
    Edizioni Scientifiche Italiane, 1994, p. 248-249.

    61Voir R. Canosa, La vita quotidiana a Milano in età spagnola, Milan, Longanesi, 1996.

    62Plusieurs exemples de cette intervention dans M. Barbot, L. Mocarelli, « L’ombra lunga della cattedrale… », art. cité.

    63Nous empruntons la métaphore du tuteur à L. Mannori, Il sovrano tutore. Pluralismo istituzionale e accentramento amministrativo nel Principato dei Medici (sec. XVI-XVIII), Milan, Giuffrè, 1994.

    64E. Ostrom, « Private and Common Property Rights », dans B. Bouckaert, G. De Geest (dir.), Encyclopedia of Law and Economics, t. 2 : Civil Law and Economics, Cheltenham, Edward Elgar, 1999, p. 332-379.

    65Voir F. Orsi, « Elinor Ostrom et les faisceaux de droits : l’ouverture d’un nouvel espace pour penser la propriété commune », Revue de la régulation, 14, 2013 (https://regulation.revues.org/10471).

    66Ces deux niveaux ne sont pas préalablement hiérarchisés. On peut citer, à cet égard, une très éloquente déclaration du Vicario di Provvisione, qui en 1545 affirme que « la Fabrique du Dôme a sur la place un domaine utile qui l’emporte sur le droit éminent de la Commune » : L. Mocarelli, « La gestione dei beni della città… », art. cité, p. 172.

    67Voir V. Ostrom, « Polycentricity–Part I », dans M. D. McGinnis (dir.), Polycentricity and Local Public Economies. Readings from the Workshop in Political Theory and Policy Analysis, Ann Arbor, University of Michigan Press, 1999, p. 52-74 ; M. Barbot, Villes et polycentricitité, op. cit.

    68P. Aligica, Rethinking Institutional Analysis and Development: the Bloomington School. Interviews with Vincent and Elinor Ostrom, Fairfax, George Mason University, 2003, p. 14.

    69Ainsi J.-P. Chanteau, A. Labrousse, « L’institutionnalisme méthodologique d’Elinor Ostrom : quelques enjeux et controverses », Revue de la régulation, 14, 2013 (http://regulation.revues.org/10555).

    70Sur le pluralisme juridictionnel de l’Ancien Régime, A.-M. Hespanha, « L’espace politique dans l’Ancien Régime », Boletim de la Faculdade de Direito, Universidade de Coimbra, LVIII, 1982, p. 455-510.

    71E. Ostrom, X. Basurto, « Façonner des outils d’analyse pour étudier le changement institutionnel », Revue de la régulation, 14, 2013 (https://regulation.revues.org/10437).

    72Le critère de la résidence se croise par ailleurs avec d’autres (le genre, l’âge, la profession, etc.) : voir M. Barbot, « La résidence comme appartenance. Les catégories spatiales et juridiques de l’inclusion sociale dans les villes italiennes sous l’Ancien Régime », Histoire urbaine, 27, 2013, p. 29-48.

    73Sur le role inclusif joué par les institutions urbaines vis-à-vis des étrangers, voir S. Cerutti, Étrangers. Étude d’une condition d’incertitude dans une société d’Ancien Régime, Montrouge, Bayard, 2012, p. 111-126.

    74C’est par ailleurs la thèse défendue par M. Weber dans La ville, Paris, Aubier 1992 (1re éd. 1921).

    75Voir H. J. Berman, Law and Revolution: the Formation of the Western Legal Tradition, Cambridge/Londres, Harvard University Press, 1983 ; K. A. Lynch, Individuals, families and communities in Europe, 1200-1800: the Urban Foundations of Western Society, Cambridge, Cambridge University Press, 2003.

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    Bessy, Christian, et Michel Margairaz, éditeurs. Les biens communs en perspectives. Éditions de la Sorbonne, 2021, https://doi.org/10.4000/11yiw.
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