Le réseau de l’impératrice Théodora : une analyse prosopographique de la cour byzantine au vie siècle
p. 231-244
Note de l’auteur
Je remercie Davide Gherdevich pour son aide quant au tableau généalogique.
Texte intégral
1L’impératrice Théodora1, célèbre épouse de Justinien, est connue pour être issue du milieu des spectacles de l’hippodrome de Constantinople et donc étrangère aux réseaux qui structurent la vie politique à Byzance2 Tout au plus lui reconnaît-on habituellement une influence dans la constitution de l’Église syrienne monophysite, appelée aussi jacobite. Dans ce domaine, si le patronage qu’elle exerce sur des évêques et des moines est incontestable, ses interventions demeuraient très encadrées par les orientations définies par Justinien3 Volker Menze a d’ailleurs montré que nous manquons de preuves fermes sur les liens entre Théodora et les monophysites avant 535-536 et que, d’après la correspondance de Sévère d’Antioche, elle ne manifestait pas un intérêt profond pour la théologie4 Dans son Histoire secrète, Procope invective par ailleurs le couple impérial, et en particulier Théodora, pour sa prétendue brutalité à l’égard des élites de cour : en somme, l’impératrice se serait bornée à démanteler les milieux aristocratiques afin d’asseoir l’autorité d’une parvenue5.
2Or l’analyse prosopographique des élites de Constantinople au vie siècle permet de renouveler cette histoire politique traditionnelle. Clive Foss a été l’un des rares historiens à esquisser la description d’un groupe de protégés de Théodora, au-delà des clercs monophysites et des membres de la faction des Bleus à l’hippodrome6 Pour comprendre le rôle politique de l’impératrice, il importe de recourir à une prosopographie systématique prenant en compte les règnes antérieur et postérieur à ceux de Justinien (527-565) et de son oncle Justin Ier (518-527), à savoir ceux d’Anastase (491-518) et de Justin II (565-574). Au moyen de cette méthode, je recenserai les principaux personnages liés à l’impératrice afin d’évaluer les différentes facettes de son influence à la cour. J’évoquerai d’abord la famille de Théodora, puis ses protégés et enfin la persistance de son réseau après sa mort en 548.
Figure 1 – La parenté d’Anastase, Théodora et Justin II

La famille de Théodora
3Le cas de l’impératrice Théodora montre la manière dont une parvenue a su implanter sa famille au sein de l’aristocratie de cour (figure 1). Le mariage le plus important du point de vue politique est celui de sa nièce Sophie avec le curopalate Justin, neveu de Justinien et futur empereur Justin II7 D’après Jean d’Éphèse, historien contemporain, lui-même monophysite, Sophie était adepte de cette confession depuis son enfance, mais elle défendit le chalcédonisme environ trois ans avant l’avènement de son époux, afin de faciliter la succession8 Jean d’Éphèse y voit une stratégie politique plutôt qu’un changement de convictions personnelles ; la présence de nombreux monophysites dans l’entourage de Sophie sous le règne de Justin II tend à le confirmer.
4L’autre mariage important est celui de la sœur de Théodora, Comito, avec le maître des milices, Sittas, d’origine arménienne ou au moins caucasienne9 Malalas situe ce mariage en 52810 La même année, Sittas fut le premier titulaire du poste de magister militum per Armeniam et recruta ses collaborateurs (scriniarii) parmi des Arméniens connaisseurs de la région11 Le fils d’une fille de Théodora, Anastasius, fut, quant à lui, uni à Ioannina, la fille de Bélisaire12, ce qui permet à la famille de Théodora d’être introduite dans la maison du plus prestigieux protagoniste du règne de Justinien. Enfin, un autre fils de la même fille de Théodora, Ioannes, devint consul honoraire13.
5Ces deux derniers personnages, Anastasius et Ioannes, donnent un autre indice sur le réseau familial de Théodora : on sait qu’ils appartenaient à la famille de l’empereur Anastase14, ce qui signifie que la fille de Théodora fut unie à un parent du prédécesseur de Justin Ier. Christian Settipani a suggéré que cet époux était un petit-neveu d’Anastase, l’impératrice appartenant à une génération située entre celle d’Anastase et celle de sa fille. Ce personnage est probablement Anastasius15 (consul en 517), fils du neveu d’Anastase, le patrice monophysite Probus (consul en 502)16 Ce mariage contribuait à contrecarrer les prétentions impériales d’un autre neveu d’Anastase, Hypatius, lors de la sédition Nika de 532 : l’union constituait en effet un moyen de neutraliser la légitimité issue d’Anastase en l’intégrant dans la parentèle de Justinien. Ce mariage s’insérait également dans un réseau monophysite hérité d’Anastase et patronné par Théodora.
6Le petit-fils de Théodora, Ioannes, joua un important rôle politique. Théophane rapporte l’action commune, le 3 mai 562, de Ioannes, mentionné comme ancien consul, et de Georgius17, curator de la domus de Marina18 Or Ioannes était l’oncle de Proba, épouse de Georgius19 : un lien familial étroit redoublait donc l’association politique entre les deux hommes. Ces deux parents de Théodora accusèrent alors Zemarchus20, curator de la domus de Placidia, de mauvais propos contre l’empereur.
7Georgius avait lui-même été victime deux ans auparavant, en 560, d’une accusation calomnieuse, selon les dires de Théophane21 Il aurait soutenu Theodorus22, fils du magister officiorum Pierre le Patrice, dans un projet d’accession au trône. Dans cette accusation, Georgius fut associé à Aetherius23, curator de la domus d’Antiochus – un personnage parfaitement inséré dans le réseau de Théodora. Aetherius paraît en effet au centre d’un complot d’assassinat ourdi contre Justinien en novembre 562, d’après les informations de Malalas24, reprises et complétées par Théophane25 Parmi les instigateurs du complot, se trouvaient Sergius, neveu ou cousin (ἀνεψιός) d’Aetherius, et le banquier (ἀργυροπράτης) Marcellus appartenant à la maison d’Aetherius26 Après l’échec du complot, Marcellus se suicida. Sergius fut torturé et il révéla la complicité de deux membres de la maison de Bélisaire, qui dénoncèrent Bélisaire lui-même. Parmi les juges chargés de l’enquête, le questeur du palais Constantinus et le magister scrinii Iulianus27 furent démis pour avoir agi au service d’Aetherius, au motif qu’Aetherius lui-même était au courant du complot28 Cela indique que ces deux juges protégèrent Aetherius. Une première cour de justice présidée par l’empereur et réunie le 5 décembre 562 déposa Sergius et Bélisaire lui-même. D’après Théophane, Bélisaire fut réintégré le 19 juillet 563, ce qui tend à prouver que les charges contre lui et les membres de sa maison étaient infondées.
8Il apparaît donc que ce complot fut principalement orchestré par Marcellus pour le compte d’Aetherius, ainsi que par le neveu de ce dernier, Sergius, tandis qu’Aetherius lui-même était au moins au courant : la conspiration avait pour foyer la maison d’Aetherius, curator de la domus d’Antiochus. Son entourage fit tout pour se disculper, d’une part, en corrompant le questeur du palais Constantinus, d’autre part, en rejetant la responsabilité du complot sur la maison de Bélisaire.
9Or les événements des années précédentes permettent de préciser dans quel groupe aristocratique s’insérait la maison d’Aetherius. Rappelons qu’en 560 Aetherius fut accusé à tort en compagnie de Georgius (époux de l’arrière-petite-fille de Théodora) et de Theodorus (le fils de Pierre le Patrice) ; par ailleurs, en 562, c’est à nouveau Georgius, en compagnie du petit-fils de Théodora, Ioannes (son oncle par alliance), qui lança une accusation. Toutes ces mises en cause croisées révèlent une intense rivalité entre les curateurs des divers biens impériaux, les maisons d’Antiochus et de Marina, d’un côté, et celle de Placidia, de l’autre : on peut soupçonner qu’ils se disputaient des allocations de ressources. Par ailleurs, des liens unissaient Aetherius à la famille de Théodora (par Georgius et le petit-fils de l’impératrice Ioannes) et à celle d’Anastase (par les deux mêmes ainsi que le fils de Pierre le Patrice, Theodorus) et enfin à des monophysites, en l’occurrence Ioannes et Theodorus. On peut ajouter que ce groupe aristocratique était enraciné dans le nord du diocèse d’Orient, car Theodorus était issu de Dara, tandis que le banquier Marcellus, membre de la maison d’Aetherius, était originaire de Cilicie. Cette faction était profondément hostile à Bélisaire et l’on ne peut s’étonner qu’à la mort de ce dernier ses biens aient été intégrés dans la maison de Marina, gérée par le parent de Théodora, Georgius. En outre, Aetherius, accompagné du Syrien Addaeus29, préfet de Constantinople, fut celui qui exila le patriarche Eutychius à la fin du règne de Justinien, en janvier 565. L’éloignement d’Eutychius s’explique peut-être par l’ultime rapprochement de Justinien avec les monophysites30 Dans tous les cas, le rôle joué par Aetherius dans cette affaire accrédite l’idée d’une intervention de la faction syrienne et monophysite de la cour qui, depuis la mort de Théodora en 548, avait continué à prospérer, en dépit de la perte de sa puissante protectrice.
Les protégés de Théodora
10Le proche entourage monophysite de Théodora est surtout documenté par les deux eunuques cubiculaires, Misael et Iulianus31 Ils sont connus par l’intermédiaire d’une lettre de Sévère d’Antioche de 537, qui leur demande de transmettre à Théodora l’un de ses traités théologiques32 Misael, cubiculaire sous Anastase, était alors diacre à Constantinople, tandis que Iulianus se trouvait au service de Théodora. À ces personnages, s’ajoutent les deux frères Ioannes et Theodorus33, deux cubiculaires monophysites, qui étaient des proches de Misael puis qui firent partie du cubiculum sous Justinien34 Theodorus occupa le poste déterminant de castrensis, c’est-à-dire intendant du palais impérial, pendant les deux ans réglementaires pour cette charge35 Le cas de Misael et de ses proches montre l’importance du legs monophysite de la cour d’Anastase.
11Théodora protégea aussi la carrière de deux eunuques issus de la frontière orientale, les célèbres Narsès et Solomon. Narsès, né en Persarménie (la partie de l’Arménie sous domination perse), était un eunuque élevé à la cour36 Il est attesté comme cubiculaire entre 531 et 55237 Il est connu comme sacellaire (cubiculaire chargé de la cassette privée de l’empereur) entre 530 et 53838 En 532, il est en outre spathaire, c’est-à-dire cubiculaire garde du corps de l’empereur : lors du dernier jour de la révolte Nika, le 18 janvier 532, il fut envoyé pour diviser les factions en tentant, moyennant finances, d’obtenir le soutien des Bleus, ce qui correspond au clientélisme pratiqué par Théodora39 En 535-536, il tenta en vain de réinstaller à Alexandrie le patriarche monophysite Theodosius – un épisode dans lequel Théodora joua un rôle important, même s’il est peut-être exagéré par le chalcédonien Libératus de Carthage40 Narsès, lui-même de confession monophysite, constituait donc une personne de confiance aux yeux de l’impératrice. En mai 541, sur ordre de Théodora, il dirigea avec Marcellus, comes excubitorum (chef d’une garde impériale), une troupe chargée de l’assassinat du préfet du prétoire Jean de Cappadoce41 : cette opération révèle les liens étroits entre Narsès et Théodora. L’apogée de la carrière de Narsès intervint après la mort de Théodora en 548, mais sa place au sein du cubiculum comme son attachement au monophysisme témoignent de la marque imprimée par l’impératrice sur la destinée de ce singulier personnage. Jean d’Éphèse le considère comme fidèle à sa foi, c’est-à-dire au monophysisme42 En outre, il fonda, avant 551, un monastère en Bithynie peuplé de moines monophysites expulsés de Cappadoce43.
12Théodora protégea moins directement la famille de Solomon, qu’elle soutint par l’intermédiaire de l’épouse de Bélisaire, sa grande amie Antonina44 Solomon est né à Idriphthon, dans la région de Solachon, proche de Dara ; à en croire Procope, il était eunuque depuis un accident survenu quand il était enfant45 Il devint chef d’état-major (magister militum) et préfet du prétoire en Afrique. Il fut aidé dans l’exercice de ces importantes fonctions par ses neveux, en particulier par Sergius, qui lui succéda en 544 comme préfet du prétoire d’Afrique et magister militum. L’incompétence de Sergius entraîna cependant d’importantes difficultés militaires46 Justinien refusa d’abord de le démettre de ses fonctions par respect pour son oncle Solomon47, mais il finit par s’y résoudre à la fin de l’année 54548 Procope explique que Sergius était également protégé par Théodora car il voulait épouser la petite-fille d’Antonina49 Il faut se souvenir qu’Antonina était la belle-mère d’Ildiger, un proche collaborateur de Solomon50 Théodora et Antonina protégeaient donc le cercle qui entourait Solomon. Cette protection n’est peut-être pas sans lien avec le fait que Solomon était issu de la région de Dara, abritant nombre de monophysites, à qui allait la sympathie de Théodora. Et malgré le renvoi de Sergius en 545, on le retrouve ensuite à la tête de troupes en Italie en 54751 et en Thrace en 55952 À cette date, il est attesté comme patrice53, ultime preuve de la protection dont il bénéficia.
13La protection accordée par Théodora à l’entourage de Solomon s’observe surtout en 545-546, particulièrement en Afrique. En effet, Guntharis, ancien officier de la garde (doryphoros) de Solomon, s’est révolté après le départ de Sergius d’Afrique54 Guntharis a donc cherché à affirmer ses prétentions alors que la famille de Solomon n’exerçait plus le pouvoir et à prendre le relais de ce puissant clan. La révolte de Guntharis survint lorsque Areobindus, le neveu par alliance de Justinien, obtint le commandement unique sur l’Afrique en 54555 Or cet Areobindus était certainement le petit-fils d’Areobindus, qui fut en 512 le candidat au trône impérial des chalcédoniens face à Anastase56 Le magister militum Africae Areobindus représentant une branche chalcédonienne de la famille de Justinien, il n’est guère étonnant qu’il rencontre l’opposition d’un groupe d’officiers protégé par Théodora. Il est finalement assassiné par Guntharis en 546.
14En même temps qu’Areobindus, Justinien a envoyé Artabanes, qui succéda au premier comme magister militum per Africam et prit le relais dans le conflit avec Guntharis, qu’il parvint à éliminer57 Artabanes envisagea d’épouser la nièce de Justinien et veuve d’Areobindus, Praeiecta58 Cette dernière venait de le combler de richesses pour l’avoir délivrée de Guntharis. Le couple obtint de l’empereur son retour à Constantinople59 Cette même année 546, Artabanes fut nommé magister militum praesentalis (chef d’état-major d’une armée centrale), comes foederatorum (chef des troupes alliées) et consul honoraire60 Son projet de mariage avec Praeiecta fut cependant contrecarré par Théodora, qui sauvegardait ainsi les droits de la première femme d’Artabanes, une parente de l’impératrice, épousée dans l’enfance61.
15La protection de Théodora s’exerça aussi envers un autre grand ministre d’origine orientale, Pierre Barsymès62 Né en Syrie, il fut changeur de monnaie puis fonctionnaire (sans doute financier) de la préfecture du prétoire d’Orient. C’est alors qu’il fut visiblement repéré par Théodora63 Il est attesté comme comte des largesses sacrées, consul honoraire et patrice en 54264 Il succéda à Theodotus comme préfet du prétoire d’Orient entre 543 et 54665 Les difficultés du ravitaillement en blé de Constantinople conduisirent Justinien à le démettre de cette charge, mais, grâce à l’intervention de Théodora, il fut à nouveau nommé, dès 547, comte des largesses sacrées, poste qu’il occupa au moins jusqu’en 55066 Il retrouva la fonction de préfet du prétoire entre 555 et 56367.
16On constate donc que Théodora patronna à la cour un groupe de personnages d’origine orientale. Ce tropisme oriental, également attesté par la carrière militaire de son beau-frère Sittas en Arménie, concorde avec l’implantation du monophysisme et les deux facteurs s’expliquent en partie par l’héritage du règne d’Anastase.
La persistance du réseau de Théodora sous Justin II (565-578)
17Ce réseau se maintient après la mort de Théodora en 548, sous le règne de Justin II, en raison de l’influence de son épouse, l’impératrice Sophie, nièce de Théodora. Averil Cameron a souligné l’important rôle diplomatique de Sophie entre 572 et 57468 Si la maladie mentale de Justin se déclara en 573 après la chute de Dara, elle avait connu des signes annonciateurs. Le 7 décembre 574, le comes excubitorum Tibère69 fut nommé césar et adopté par Justin II comme son fils, sous le nom évocateur de Constantinus, ce qui en faisait l’héritier du trône. Évagre le Scholastique souligne l’influence de Sophie sur ces décisions70 Selon Jean d’Éphèse, Sophie aurait espéré épouser le nouveau césar et aurait réussi à empêcher l’accès au Grand Palais de l’épouse de Tibère, Ino, qui prend en 578 le nom d’Anastasia71 Théophane ajoute que, selon certains, Sophie aurait été la maîtresse de Tibère quand Justin était encore en vie72 En outre, il semble qu’elle ait joué un rôle dans l’élimination de Iustinus, fils aîné du cousin de Justinien Germanus73 Dès 566, Iustinus fut accusé de complot et banni à Alexandrie74 ; il fut assassiné sur ordre impérial, sans doute à l’initiative des partisans de l’impératrice Sophie75 Si ce renseignement, fourni par le chroniqueur Jean de Biclar, est bien exact, la rivalité entre Sophie et Iustinus pourrait être un héritage du règne de Justinien : on sait en effet que Théodora, tante de Sophie, était particulièrement hostile au cousin de l’empereur Germanus, père de Iustinus76.
18Par ailleurs, Sophie continua, à la suite de Théodora, à protéger des monophysites à la cour, en premier lieu, ses cubiculaires Andreas (également sacellaire) et Stephanus77 Outre les eunuques de l’épouse de Justin II, il faut inclure le curator augustae Petrus78, parent de Theodorus (fils de Pierre le Patrice). Les monophysites étaient donc en position de force au sein de la maison de l’impératrice, où ils géraient à la fois les biens immobiliers de Sophie et son trésor personnel. Enfin, le consul honoraire Ioannes, petit-fils de Théodora, ainsi que le comte des biens privés Eudaemon semblent aussi avoir eu des opinions monophysites 79Eudaemon renforce encore la présence des monophysites dans la gestion des biens impériaux (alors que Theodorus était lui-même comte des largesses sacrées). Par ailleurs, Ioannes, Petrus et Theodorus80 étaient apparentés à l’empereur Anastase et furent tous envoyés comme ambassadeurs en Perse en 576 ; le troisième, on l’a vu plus haut, était originaire de la région de Dara. Le tropisme oriental et monophysite caractéristique du règne d’Anastase se ressentait encore sous Justin II. Quant au cubiculaire de Justinien, Narsès, si étroitement protégé par Théodora, il fut d’abord maintenu dans son commandement en Italie, où il s’illustra surtout pour son action religieuse81 Il refusa de se laisser influencer par les idées trithéites qui gagnaient la péninsule82 En 571, il fut stigmatisé par le patriarche Jean le Scholastique comme étant prêt à soutenir les évêques monophysites que l’empereur envisageait d’envoyer à Rome83 – un ultime indice de son adhésion au monophysisme.
Conclusion
19Avant Théodora, l’empereur Anastase penchait personnellement pour la doctrine monophysite. Or une fille naturelle de l’impératrice fut mariée à un parent d’Anastase, probablement l’un de ses petits-neveux. Quant à la nièce de l’impératrice, Sophie, elle épousa le futur Justin II, neveu de Justinien. De la sorte, le réseau familial de Théodora prit place parmi les alliances dynastiques les plus prestigieuses. Pendant le règne de Justinien, son épouse patronna un groupe d’eunuques monophysites, dont certains étaient déjà installés à la cour sous Anastase : il s’agit là du rôle traditionnel endossé par l’impératrice à l’égard de la Chambre impériale (cubiculum).
20Plus originale est la protection accordée par Théodora à de hauts fonctionnaires et à de grands officiers d’origine orientale. Ce réseau affronta celui des parents de Justinien, en particulier lors des révoltes militaires en Afrique en 536-546. Après la mort de Théodora en 548, ses fidèles – des parents, des Orientaux et des monophysites – se trouvèrent en 562 au cœur d’un complot contre un Justinien vieillissant. Par la suite, sous le règne de Justin II (565-578), l’impératrice Sophie poursuivit le patronage d’un réseau hérité de sa tante, dans lequel on retrouve des Orientaux et des monophysites.
21L’étude du personnel politique dans la longue durée montre que le réseau de Théodora fut particulièrement présent au sein de l’administration financière, ce qui était un gage de puissance. Les historiens du vie siècle, Procope et Évagre le Scholastique, mettent en avant un partage des rôles gouvernementaux au sein du couple formé par Justinien et Théodora84 Une telle stratégie fut certainement mise en œuvre dans les orientations religieuses. Mais l’analyse prosopographique révèle que l’impératrice patronna un véritable réseau politique, correspondant certes à une orientation monophysite mais défendant aussi des intérêts bien plus larges.
Notes de bas de page
1 John Martindale, The Prosopography of the Later Roman Empire. Volume III, A.D. 527-641 (abrégé PLRE), vol. IIIA et IIIB, Cambridge, Cambridge University Press, 1992. Ici PLRE IIIB : Theodora I.
2 Voir en dernier lieu David Potter, Theodora. Actress, Empress, Saint, Oxford, Oxford University Press, 2015. Rappelons que, fille d’un montreur d’animaux à l’hippodrome de Constantinople, elle était elle-même actrice et reçut sous le règne de Justin Ier la dignité de patricienne dans le but d’épouser le futur empereur Justinien, ce qu’elle fit avant 527 et sans doute dès 525 quand il devint césar.
3 Charles Pazdernik, « “Our Most Pious Consort Given Us by God”: Dissident Reactions to the Partnership of Justinian and Theodora, A. D. 525-548 », Classical Antiquity, 13, 1994, p. 273-281, ici p. 281.
4 Volker Menze, Justinian and the Making of the Syrian Orthodox Church, Oxford, Oxford University Press, 2008, p. 208-228, ici p. 220.
5 Procope, Histoire secrète, éd. par Jacob Haury, trad. par Henry Bronson Dewing dans Procopius, Secret History, Cambridge (Mass.)/Londres, Harvard University Press, 1935, IX, 31 : δύναμιν τοίνυν ἐξαισίαν τινὰ καὶ χρήματα ἐπιεικῶς μεγάλα περιβαλέσθαι ἡ Θεοδώρα εὐθὺς ἴσχυσε (« Or, aussitôt, Théodora réussit à acquérir une extraordinaire puissance et des richesses assez considérables ») ; XVII, 27 : Αὕτη ἅπαντα πρυτανεύειν αὐτογνωμονοῦσα τὰ ἐν τῇ πολιτείᾳ ἠξίου. τάς τε γὰρ ἀρχὰς καὶ ἱερωσύνας ἐχειροτόνει (« Cette femme prétendait exercer un pouvoir absolu sur toutes choses dans l’État. Elle contrôlait les élections aux magistratures et aux sacerdoces »).
6 Clive Foss, « The Empress Theodora », Byzantion, 72, 2002, p. 141-176, ici p. 158 et 174.
7 PLRE IIIB : Aelia Sophia I ; PLRE IIIA : Iustinus 5. Par souci d’harmonisation, la Prosopography of the Later Roman Empire retient la forme latine des noms : je conserverai cet usage même si la forme grecque (Ioustinos) était bien davantage utilisée par les contemporains.
8 Jean d’Éphèse, Histoire ecclésiastique, III, 2, 10 (indique aussi tous les liens de parenté de Sophie) : Iohannis Ephesini Historiae ecclesiasticae pars tertia, éd. et trad. par Ernest Walter Brooks, Louvain, Peeters, 1935-1936.
9 PLRE IIIA : Comito ; PLRE IIIB : Sittas I ; Christian Settipani, Continuité des élites à Byzance durant les siècles obscurs. Les princes du Caucase et l’empire du vie au ixe siècle, Paris, De Boccard, 2006, p. 458, n. 1.
10 Jean Malalas, Chronique, XVIII, 10 : Ioannis Malalae Chronographia, éd. par Hans Thurn, Berlin/New York, De Gruyter, 2000.
11 Code Justinien, I, 29, 5 : Corpus Iuris Civilis, t. 2, Codex Justinianus, éd. par Paul Krueger, Berlin, Weidmann, 1877 ; Jean Malalas, Chronique, XVIII, 10 ; Procope, Guerre contre les Perses, I, 15, 24-25 : Procopius, History of the Wars. Books I-II, éd. par J. Haury, trad. par Henry Bronson Dewing, Cambridge (Mass.)/Londres, Harvard University Press, 1914 ; Procope, Édifices, III, 6, 6-7 : Procopius, Buildings, éd. par Jacob Haury, trad. par Henry Bronson Dewing, Cambridge (Mass.)/Londres, Harvard University Press, 1940.
12 PLRE IIIA : Anastasius 8 ; PLRE IIIA : Ioannina ; PLRE II : Fl. Belisarius 1 : John Martindale, The Prosopography of the Later Roman Empire, vol. 2, A. D. 395-527, Cambridge, Cambridge University Press, 1980.
13 PLRE IIIA : Ioannes 90.
14 Jean d’Éphèse, Histoire ecclésiastique, III, 2, 11.
15 PLRE II : Fl. Anastasius Paulus Probus Sabinianus Pompeius Anastasius 17.
16 Christian Settipani, Continuité gentilice et continuité familiale dans les familles sénatoriales romaines à l’époque impériale. Mythe et réalité, Paris, De Boccard, 2000, p. 422-423. En 542, le neveu d’Anastase Probus, pardonné après la révolte Nika, accueillit à Constantinople Jean d’Éphèse, confirmant ainsi son adhésion au monophysisme (Jean d’Éphèse, Vies des saints orientaux, 10 : John of Ephesus. Lives of the Eastern Saints, éd. et trad. par Ernest Walter Brooks, Paris, Firmin Didot, 1923-1926).
17 PLRE IIIA : Georgius 7.
18 Théophane, Chronographie, AM6054 : Theophanis chronographia, éd. par Carl de Boor, Leipzig, Teubner, 1883-1885.
19 Georgius était un parent (συγγενής) de l’impératrice Théodora (Théophane, Chronographie, AM 6054). Il doit être certainement identifié à Georgius, mari de Proba (PLRE IIIA : Proba 2) : Nicéphore, Chronographikon Syntomon, dans Nicéphore, Opuscula historica, éd. par Carl de Boor, Leipzig, Teubner, 1880, p. 104. Voir Settipani, Continuité gentilice, op. cit., p. 423. Proba étant la fille d’Anastasius (fils d’Anastasius, petit-neveu de l’empereur Anastase, consul en 517 et époux d’une fille de Théodora), Georgius a donc épousé une arrière-petite-fille de Théodora.
20 PLRE IIIB : Zemarchus 2.
21 Théophane, Chronographie, AM6053.
22 PLRE IIIB : Theodorus 34. Jean d’Éphèse, Histoire ecclésiastique, III, 2, 11 : il était apparenté à Petrus (PLRE IIIB : Petrus 17), lui-même membre de la famille d’Anastase (Jean d’Éphèse, Histoire ecclésiastique, III, 6, 12).
23 PLRE IIIA : Aetherius 2.
24 Jean Malalas, Chronique, XVIII, 141.
25 Théophane, Chronographie, AM6055.
26 PLRE IIIB : Sergius 6 ; PLRE IIIB : Marcellus 4.
27 PLRE IIIA : Constantinus 4 ; PLRE IIIA : Iulianus 15.
28 Jean Malalas, Chronique, XVIII, 141.
29 PLRE IIIB : Fl. Marianus Iacobus Marcellus Aninas Addaeus.
30 Pierre Maraval, « La politique religieuse de Justinien », dans Luce Pietri (dir.), Histoire du christianisme, t. 3, Les Églises d’Orient et d’Occident (432-610), Paris, Desclée, 1998, p. 389-426, ici p. 423-425.
31 PLRE II : Misael ; PLRE IIIA : Iulianus 5.
32 Frédéric Alpi, La route royale. Sévère d’Antioche et les Églises d’Orient (512-518), Beyrouth, Institut Français du Proche-Orient, 2009, I, p. 121 n. 63.
33 PLRE IIIA : Ioannes 53 ; PLRE IIIB : Theodorus 3.
34 Jean d’Éphèse, Vies des saints orientaux, 57.
35 Roland Delmaire, Les institutions du Bas-Empire romain, de Constantin à Justinien, t. 1, Les institutions civiles palatines, Paris, Cerf, 1995, p. 60-66.
36 PLRE IIIB : Narses I. Delmaire, Les institutions, op. cit., p. 149-172, ici p. 170-171 ; Dariusz Brodka, Narses. Politik, Krieg und Historiographie, Berlin, Peter Lang, 2018 ; Procope, Guerre contre les Perses, I, 15, 31 : Περσαρμένιος γὰρ καὶ αὐτὸς γένος ἐτύγχανε ; Agathias, Histoires, I, 16, 1-2 : Agathiae Myrinaei Historiarum libri quinque, éd. par Rudolf Keydell, Berlin, De Gruyter, 1967.
37 Jean Malalas, Chronique, XVIII, 66 (531) ; ibid., XVIII, 116 (552).
38 Procope, Guerre contre les Perses, I, 15, 31 (530) ; Procope, Guerre contre les Goths, II, 18, 3 (538) : Procopius, History of the Wars. Books V-VIII, éd. par Jacob Haury, trad. par Henry Bronson Dewing, Cambridge (Mass.)/Londres, Harvard University Press, 1919-1928.
39 Jean Malalas, Chronique, XVIII, 71.
40 Libératus de Carthage, Histoire, 20 : Libératus de Carthage, Abrégé de l’histoire des Nestoriens et des Eutychiens, éd. par Eduard Schwartz, trad. par François Cassingena-Trévedy et Philippe Blaudeau, Paris, Cerf, 2019 : en juin/juillet 535 il est envoyé par Théodora à Alexandrie réinstaller le patriarche monophysite sévérien Theodosius et exiler Gaianus, son rival monophysite julianiste ; Narsès s’acquitte de la tâche et fait face à une forte opposition pendant seize mois ; tandis que Theodosius reste à Alexandrie, il existe un état de guerre civile virtuelle et ses opposants mettent le feu à une partie de la ville ; à l’automne 536, Theodosius abandonne le siège et s’enfuit à Constantinople, sans doute accompagné par Narsès.
41 Procope, Guerre contre les Perses, I, 25, 24-29.
42 Jean d’Éphèse, Histoire ecclésiastique, III, 2, 46.
43 Ibid., III, 1, 39. Son corps y fut transporté de Rome et inhumé à sa mort en 574.
44 PLRE IIIA : Antonina I.
45 PLRE IIIB : Solomon I ; Georges Tate, Justinien. L’épopée de l’Empire d’Orient, Paris, Fayard, 2004, p. 363 ; Zacharie, Histoire ecclésiastique, IX, 2 : Historia ecclesiastica Zachariae Rhetori vulgo adscripta, éd. et trad. par Ernest Walter Brooks, Paris, 1919-1924 ; Procope, Guerre contre les Vandales, I, 11, 6 et 9 : Procopius, History of the Wars. Books III-IV, éd. par Jacob Haury, trad. par Henry Bronson Dewing, Cambridge (Mass.)/Londres, Harvard University Press, 1916 ; Théophylacte Simocatta, Histoires, II, 3, 13 : Theophylactus Simocatta, Historiae, éd. par Carl de Boor et Peter Wirth, Stuttgart, Teubner, 1972.
46 Procope, Guerre contre les Vandales, II, 21, 19 ; PLRE IIIB : Sergius 4 ; Procope, Guerre contre les Vandales, II, 22.
47 Ibid., II, 22, 11.
48 Yves Modéran, Les Maures et l’Afrique romaine (ive-viie siècle), Rome, École française de Rome, 2003, p. 623 : entre octobre et décembre 545.
49 Procope, Histoire secrète, V, 32-33 : « Serge était en effet un homme mou et impropre à la guerre […] Mais comme il était devenu le fiancé de la fille d’Antonina, femme de Bélisaire, l’impératrice ne voulait absolument pas lui infliger de punition ou le décharger de son commandement. »
50 PLRE IIIA : Ildiger ; Procope, Guerre contre les Vandales, II, 8, 24.
51 Procope, Guerre contre les Goths, II, 24, 16.
52 Agathias, Histoires, V, 23, 8 ; Jean Malalas, Chronique, XVIII, 129 ; Théophane, Chronographie, AM6051.
53 Victor de Tunnunna, Chronique, a.559 : Victoris Tonnennensis episcopi chronica, éd. par Theodor Mommsen, dans Monumenta Germaniae Historica, Auctores Antiquissimi, 11, Berlin, Weidmann, 1894.
54 PLRE IIIA : Guntharis 2 ; Modéran, Les Maures, op. cit., p. 623 : entre décembre 545 et février 546.
55 Procope, Guerre contre les Vandales, II, 24, 1-4 ; Modéran, Les Maures, op. cit., p. 624 : probablement vers les mois d’août ou de septembre 545.
56 PLRE II : Fl. Areobindus Dagalaiphus Areobindus 1.
57 PLRE IIIA : Artabanes 2.
58 PLRE IIIB : Praeiecta I.
59 Procope, Guerre contre les Goths, III, 31, 2-7.
60 Ibid., III, 31, 10.
61 Ibid., III, 31, 11-16. À la mort de Théodora en 548, Artabanes répudia sa première épouse, mais la nièce de Justinien Praeiecta avait fait entre temps une alliance plus prestigieuse avec Ioannes, fils d’Hypatius, neveu de l’ancien empereur Anastase.
62 PLRE IIIB : Petrus qui et Barsymes 9. Roland Delmaire, Les responsables des finances impériales au Bas-Empire romain (ive-vie siècle), Bruxelles, Latomus, 1989, p. 269-272.
63 Procope, Histoire secrète, XXII, 3-5 : « [Justinien et Théodora] tombèrent inopinément sur un changeur de monnaie [ἀργυραμοιβόν] appelé Pierre, Syrien d’origine, qu’on surnommait Barsymes […] Enrôlé dans les services de la préfecture, il en vint à un tel degré d’impudence qu’il plut extrêmement à Théodora. »
64 Édit VII, 6 : Corpus Iuris Civilis, t. 3, Novellae, éd. par Rudolf Schoell et Wilhelm Kroll, Berlin, Weidmann, 1895.
65 Novelle 118 (16 juillet 543) et Novelle 123 (1er mai 546) : dans ibid.
66 Procope, Histoire secrète, XXII, 33 : « Aussi est-ce avec peine que l’empereur le releva de l’office qu’il détenait auparavant, mais comme Théodora l’en pressait vivement, il l’établit peu après maître des trésors » ; Ernest Stein, Histoire du Bas-Empire, t. 2, De la disparition de l’Empire d’Occident à la mort de Justinien (476-565), trad. par Jean-René Palanque, Paris, Desclée, 1949, p. 769.
67 Novelle 159 (555). Jean Malalas, Chronique, XVIII, 135.
68 Averil Cameron, « The Empress Sophia », Byzantion, 45, 1975, p. 5-21.
69 PLRE IIIB : Tiberius Constantinus I.
70 Théophylacte Simocatta, Histoires, III, 1, 1, 4 ; Théophane, Chronographie, AM6067 ; Chronique pascale, a. 574 : Chronicon Paschale, éd. par Ludwig Dindorf, Bonn, E. Weber, 1832 ; Évagre le Scholastique, Histoire ecclésiastique, V, 13 : Évagre le Scholastique, Histoire ecclésiastique, éd. par Joseph Bidez et Léon Parmentier, trad. par André-Jean Festugière, Bernard Grillet et Guy Sabbah, Paris, Cerf, 2011-2014.
71 Jean d’Éphèse, Histoire ecclésiastique, III, 7 ; PLRE IIIA : Aelia Anastasia (Ino) 2.
72 Théophane, Chronographie, AM6071.
73 PLRE IIIA : Fl. Mar. Petr(us) Theodor(us) Valent(inus) Rust(ic(i)us) Boraid(es) Germ(anus) Iust(inus) 4 ; PLRE II : Germanus 4.
74 Jean d’Antioche, Chronique, fr. 315 : Ioannis Antiocheni Fragmenta ex Historia chronica, éd. et trad. par Umberto Roberto, Berlin/New York, De Gruyter, 2005, p. 544 ; Théophane, Chronographie, AM6063 ; Évagre le Scholastique, Histoire ecclésiastique, V, 2.
75 Jean de Biclar, Chronique, a.568 : factione Sophiae Augustae : Jean de Biclar, Chronicon, éd. par Roger Collins, Turnhout, Brepols, 2001. Le chroniqueur espagnol Jean de Biclar s’est formé à Constantinople. Une forme de confirmation du rôle de partisans de Sophie dans l’assassinat de Iustinus est fournie par Évagre le Scholastique, Histoire ecclésiastique, V, 2 : « Justin lui-même et son épouse Sophie ne se départirent de leur colère et ne se rassasièrent pleinement de leur bouillant ressentiment que lorsqu’ils eurent contemplé la tête coupée et l’eurent foulée aux pieds. »
76 Procope, Histoire secrète, V, 8.
77 PLRE IIIB : Andreas 8 ; PLRE IIIB : Stephanus 19 ; Jean d’Éphèse, Histoire ecclésiastique, III, 2, 9.
78 PLRE IIIB : Petrus 17. Consul honoraire, curator augustae et ambassadeur en Perse en 576 : Jean d’Éphèse, Histoire ecclésiastique, III, 2, 11. Monophysite : ibid., III, 4, 35.
79 PLRE IIIB : Ioannes 90 ; monophysite : Jean d’Éphèse, Histoire ecclésiastique, III, 4, 35. Ambassadeur en Perse en 576 : ibid., III, 2, 11 ; III, 4, 35 ; III, 6, 12 ; Ménandre Protecteur, Histoire, fr. 20.1 : The History of Menander the Guardsman, éd. et trad. par Roger Blockley, Cambridge, Francis Cairns, 1985 ; Jean d’Éphèse, Histoire ecclésiastique, III, 2, 11 : sa mère était la fille de Théodora. PLRE IIIB : Eudaemon 3 ; Jean d’Éphèse, Histoire ecclésiastique, III, 2, 11 : consul honoraire et comes rei privatae ; l’auteur le désigne comme membre de l’ambassade chez les Perses en 576, mais doit le confondre avec le comte des largesses sacrées Theodorus, dont la fonction était proche (selon les conjectures de John Martindale).
80 Ibid. Rappelons que Ioannes était, par son père Anastasius (consul en 517), le petit-fils du neveu d’Anastase, le patrice monophysite Probus (consul en 502) ; par ailleurs, Ioannes épousa Georgia, la fille d’une dame monophysite, Antipatra. Ibid., III, 6, 12. Ibid., III, 2, 11 : parent d’Anastase en raison de sa parenté avec le curator augustae Petrus.
81 Paul Diacre, Histoire des Lombards, II, 4 (Paul Diacre, Historia Langobardorum, éd. par Ludwig Bethmann et Georg Waitz, dans Monumenta Germaniae Historica, Scriptores Rerum Langobardicarum et Italicarum, Hanovre, Hahn, 1878).
82 Jean d’Éphèse, Histoire ecclésiastique, V, 1. Pierre Maraval, « L’échec en Orient : le développement des Églises dissidentes dans l’empire », dans Luce Pietri (dir.), Histoire du christianisme, t. 3, op. cit., p. 457-481, ici p. 462-464 : le trithéisme, tendance interne au monophysisme, confère trois natures aux trois personnes de la Trinité.
83 Michel le Syrien, Chronique, X, 4-5 : Chronique de Michel le Syrien, patriarche jacobite d’Antioche (1166-1199, éd. et trad. par Jean-Baptiste Chabot, Paris, Ernest Leroux, 1899-1924.
84 Procope, Histoire secrète, X, 14 : « Pendant longtemps, ils semblèrent aller à l’opposé l’un de l’autre, et par leurs opinions, et par leurs activités ; plus tard cependant, on reconnut que cette impression avait été créée par eux à dessein, pour que leurs sujets, s’ils ne partageaient pas leurs vues, ne s’opposent pas à eux, mais que les opinions sur eux puissent être différentes chez tous » ; XIV, 8 : « l’empereur et sa compagne feignaient la plupart du temps d’avoir des vues différentes sur les questions en litige, mais ce qui l’emportait, c’est ce qui avait été convenu entre eux à ce sujet ». Évagre le Scholastique, Histoire ecclésiastique, IV, 10 : « Justinien, quant à lui, était très noblement attaché à ceux qui s’étaient rassemblés à Chalcédoine et aux dispositions qu’ils avaient prises ; mais Théodora, son épouse, l’était à ceux qui disent une nature, soit qu’il en fût ainsi en vérité […] soit qu’ils fussent convenus d’une sorte d’arrangement, pour que l’un s’attachât à ceux qui disent qu’il y a deux natures dans le Christ, notre Dieu, après l’union, et que l’autre s’attachât à ceux qui prônent une seule nature. Quoi qu’il en soit, ils ne cédèrent ni l’un ni l’autre. »
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