Définir et rendre visible une frontière fluviale
Le cas de la Meuse moyenne du xiiie au xvie siècle
p. 77-90
Texte intégral
1L’historien du pays mosan ne dispose d’aucun texte antérieur au xiiie siècle qui permette d’apporter la moindre précision à propos des concepts relatifs à la « frontière » ou aux limites. En outre, l’état des pouvoirs et un peuplement clairsemé ne peuvent guère produire l’établissement de véritables « frontières » avant cette époque1. Dès lors, nous n’aborderons pas cette question ici2. Il s’agira plutôt de définir le rôle du fleuve dans l’organisation de l’espace par les différents seigneurs, princes ou souverains à partir de 1200. On examinera tout d’abord quelles fonctions remplit le cours d’eau dans ce contexte jusqu’au xvie siècle. Trois « records » scabinaux de la fin du xiiie siècle permettront d’observer le rôle précis joué par la rivière dans la détermination des juridictions princières. Enfin, une enquête de 1328 illustrera comment le comte de Namur cherche et parvient à accroître son pouvoir le long du fleuve.
Rôle de la Meuse dans l’organisation de l’espace du xiiie au xvie siècle3
2De manière générale, du xiiie au xvie siècle, les modifications survenues dans la configuration des seigneuries et des principautés se caractérisent par une précision et une simplification toujours croissantes. D’une part, les frontières commencent à se fixer au xiiie siècle, grâce aux polyptyques, censiers, « records » de coutumes et répertoires de fiefs4. Les lignes se font plus nettes encore au xive siècle : on les matérialise par des bornes ou des marques en cuivre5. Parfois ce tracé s’interrompt, là où subsistent des zones à l’autorité toujours morcelée, mais les solutions de continuité deviennent l’exception6. D’autre part, on observe alors une reconstitution progressive des cadres politiques, mais privée dans l’Empire de l’ultime échelon, le monarque. En effet, la mort de Frédéric II en 1250 consacre l’échec définitif du pouvoir impérial, qui s’évanouit7. Ainsi, l’évêque de Liège et le comte de Namur deviennent autonomes8. Mais leurs terres ne présentent encore aucune homogénéité juridique et se décomposent en éléments très divers ; elles consistent en fait en un conglomérat de droits9. Là où ces deux grands féodaux partagent l’autorité avec d’autres seigneurs, ils cherchent à faire valoir leur haute protection ou « souveraineté ». À la fin du xiiie siècle, celle-ci transcende la suzeraineté et se manifeste dans le maintien de la paix et l’exercice de la haute justice10. Ainsi, la disparition des terres contestées et des petites seigneuries simplifie le paysage politique. En outre, d’importants regroupements s’opèrent au xiiie et plus encore aux xive et xve siècles11. Le rassemblement territorial réalisé par les Bourguignons règle bientôt la question de la féodalité multiple. À côté d’un nombre de plus en plus restreint de petites seigneuries ne coexistent plus au xvie siècle que deux unités, de véritables États, Liège d’un côté, Bourgogne puis Espagne de l’autre. En matière territoriale, on conçoit alors de façon très nette la « frontière », qui tend à se fixer12.
3Étudions à présent de manière détaillée la fonction remplie par le fleuve dans la délimitation des différents espaces de pouvoir. Il faut attendre le xive siècle pour pouvoir préciser quelque peu les contours de l’évêché de Liège, quand apparaissent les polyptyques des diocèses voisins. Mais le plus ancien pouillé liégeois ne date que de 1497, peu avant que ne survienne l’érection de nouveaux évêchés dans les Pays-Bas, en 155913. Il semble que la Meuse sépare les provinces liégeoise et rémoise à proximité du confluent de la Semois/Semoy (figure 1). On observe que la rivière constitue, plus qu’auparavant, une ligne de référence commode. Au xive siècle, la limite entre Lothier (Basse-Lotharingie) et Lorraine (Haute-Lotharingie) correspond toujours au confluent Meuse/Semois. Mais la signification politique du duché de Lothier se trouve alors réduite à néant14. Quant à la frontière entre France et Empire, elle se dessine avec précision, marquée par des bornes en cuivre à hauteur de Mézières à la fin du xive siècle15. Cette limite se voit aussi repoussée vers l’est par le dynamisme de la première et l’étiolement du second. Depuis Philippe le Bel, le comté de Rethel permet même à la mouvance française de déborder le cours d’eau aux environs de Mézières. En 1297, un mémorandum développe la théorie de la frontière entre Royaume et Empire le long des quatre fleuves : Escaut, Meuse, Saône et Rhône. Cette limite entre les deux États paraît admise depuis la fin du xiiie siècle. Ensuite, le roi établit un poste de péage au début du xive siècle à Mézières. Puis, en 1405, Charles VI ordonne qu’on fasse le guet jour et nuit, entre autres, à Mézières. Une frontière symbolique du royaume est devenue réalité16.
4À l’échelon des principautés, on note que, dès le xiiie siècle, l’évêque de Liège, le comte de Namur et le duc de Brabant s’efforcent d’arrondir leur espace de pouvoir en profitant de toutes les occurrences, et ce notamment le long de la rivière18. De manière plus précise, on observe que, dès le xiiie siècle, certaines sections du cours d’eau forment la frontière entre principautés. De Revin jusqu’à l’amont de Namur, le fleuve sépare la prévôté luxembourgeoise de Poilvache et le comté de Namur, entre 1199 et 1344-1357, puis ce dernier et la principauté de Liège, depuis l’aval d’Andenne jusqu’à l’amont de Huy (figure 2)19.
Définition précise de la frontière dans des « records » scabinaux du xiiie siècle
5Mais quand la Meuse constitue une frontière, peut-on préciser où celle-ci se marque ? Trois « records » scabinaux du xiiie siècle, qui définissent les ressorts des princes là où la rivière voit leur pouvoir s’affronter, illustrent l’intérêt de ces derniers pour la délimitation des juridictions respectives aux lisières de leur « État », alors que les frontières tendent à se fixer. Ainsi les échevins épiscopaux (Liège) et ducaux (Brabant) de Maastricht déterminent en 1243-1245 et en 1284 les ressorts de chaque cour sur la Meuse. L’évêque détient la justice sur les eaux du fleuve depuis les deux rives en amont du pont. On suppose que la juridiction brabançonne s’exerce de la même manière en aval de l’ouvrage21. En 1293, les habitants de Bouvignes et de Dinant, deux villes situées de part et d’autre de la rivière, précisent les limites entre les justices de leurs seigneurs, le comte de Namur et l’évêque de Liège. Ils affirment que, si « tost que li neif [...] flottoit sur l’iaue, que cis de Dinant n’y avoit povoir ne point de justice » (« tant que le bateau [...] flotte sur l’eau, ceux de Dinant n’y ont aucun pouvoir de justice »). Ainsi, la disposition de la partie navigable du fleuve appartient au comte, la berge droite et les eaux qui la bordent à l’évêque22. À la fin du xiiie siècle, à hauteur de Namur, le cours de la Meuse relève aussi du comte, mais le prélat détient la juridiction sur la rive droite, à Jambes. En effet, lorsque les officiers épiscopaux de cette localité désirent arrêter un homme qui se trouve sur un bateau halé, ils ne peuvent le faire que si celui-ci est « sil prest dele terre que nef [ne] puist flotter » (« si près de la terre que le bateau ne peut flotter ») ou sur le chemin de halage, là où les « chevaulx trayans [...] fuissent à plaine terre et nient en l’eaue » (« les chevaux de trait sont sur la terre ferme et non en l’eau ») ; ensuite, « sachier polroi[en]t [...] le corde dont li chevaulx auroit trait [et] se chieux qui en le nef seroit, laissaist le nef atraire par le corde et venist à le rive » (« ils pourront tirer [...] la corde que les chevaux auront tiré [et] si ceux qui sont dans le bateau laissent le bateau se faire tirer par la corde et gagnent la rive »)23. Détenir le pouvoir ou non de confisquer une cargaison ou d’arrêter un homme confirme que la disposition de la berge appartient à l’évêque, celle de la partie navigable du fleuve au comte. On peut dès lors supposer que, pour les princes, l’essentiel consiste à s’assurer le contrôle du trafic par la disposition de la partie « utile » de la Meuse, à savoir le chenal de navigation. Dinant, seule parmi les villes de la vallée à se trouver du côté opposé au lit mineur (le « chemin » navigable), s’acharne, du xiiie au xvie siècle, à obtenir le contrôle de son pont et du cours d’eau. Elle s’empare de la rive gauche et empiète sur le comté de Namur24. La répartition des pouvoirs à Maastricht ne contredit pas cette interprétation, puisque, sur plusieurs kilomètres de part et d’autre de la ville, le chenal s’élargit à la majeure partie du lit ordinaire (l’espace entre berges). En fait, ici, le critère du partage des juridictions s’avère très différent. Le duc de Brabant, héritier depuis 1204 des derniers droits impériaux dans cette cité, détient la paroisse de Saint-Servais et l’évêque de Liège celle de Notre-Dame, dont les limites respectives se prolongent en amont et en aval du pont25.
Renforcement de la présence namuroise sur le fleuve par l’intermédiaire d’une enquête ordonnée en 1328
6Une enquête diligentée en 1328 par le comte de Namur Jean Ier à propos des droits de « winages » (tonlieux) perçus sur le transport du vin entre Mézières et Namur, illustre encore la préoccupation importante de maîtriser la Meuse. Entre le 17 février et le 3 avril, les agents du comte interrogent cinquante-neuf personnes originaires de différentes localités de la vallée, pour l’essentiel situées entre Mézières et Dinant. Les officiers se rendent très certainement sur place pour recueillir les témoignages26. Ceux-ci sont consignés sur des morceaux de parchemin cousus bout à bout, en forme de rotulus27.
7Parcourons tout d’abord ces dépositions. En dépit de nombreuses divergences enregistrées, on peut restituer ainsi la trame des événements. Un témoin oculaire, Baudouin le Jeune, de Bouvignes, nous explique qu’il y a plus de quarante ans, soit aux environs de 1288, des bourgeois de Liège, Huy et Dinant se sont rendus au château de Namur auprès de Guy de Dampierre, comte de Flandre et de Namur. Ils se sont plaints des malversations commises à l’endroit des marchands aux divers « winages » perçus sur la rivière. Selon eux, on y prélevait « plus que ons ne doient ». Aussi ces bourgeois demandèrent-ils au comte de faire en sorte que « li winaiges de vins soient pris à point ». Guy de Dampierre ordonna dès lors à un de ses officiers de régler cette question. On pria deux artisans de Bouvignes de fabriquer des « justes » (cruches) en laiton aux armes du comte de Namur, que Guy fit envoyer à Warcq, petite localité à l’aval immédiat de Mézières, pour y être « ajustées » (étalonnées). Enfin, on livra des mesures aux différents péages établis sur le fleuve28. La majorité des personnes interrogées s’accordent pour préciser que l’étalon de ces mesures se trouve bien à Warcq et confirment que ces cruches, aux armes du comte de Namur, ont été livrées aux « winages » mosans. À l’inverse, les dépositions paraissent peu précises en ce qui concerne les péages auxquels ces « justes » ont été distribuées. Mais on peut, malgré tout, dresser une liste de tous les tonlieux mentionnés, soit, d’amont en aval : Mézières, Deville, Revin, Fumay, Vireux, Givet, Hastière et Waulsort. Les avis divergent aussi quant à l’époque à laquelle on a livré ces cruches aux différents « winages », soit trente-six ans, soit plus de quarante-cinq années. Enfin, seuls quelques témoignages précisent la capacité des étalons conservés à Warcq. Ces cruches servent à mesurer le vin et contiennent un demi-setier ou deux lots. On prélèverait ainsi une taxe de deux « justes », soit un setier ou quatre lots. Cependant, la majorité des témoins affirment que les mesures sont trop grandes ou que l’on a augmenté le taux du péage.
8Le deuxième point qui doit retenir notre attention touche aux droits du comte sur les tonlieux de la vallée selon les dépositions. Celles-ci mettent en lumière plusieurs prérogatives namuroises, l’une assez générale, et d’autres plus particulières, dont celle qui se rapporte aux mesures. Tout d’abord, le comte « doit droiturier le cour de Meuze delle saich de Reving [...] al poplier desous Andenalle » (« doit rendre la justice sur le cours de la Meuse depuis le saule de Revin [...] jusqu’au peuplier d’Andenelle »)29. En outre, la garde des marchands et de leurs biens sur le fleuve incombe au prince, qui est « soverains delle rivière ». De manière plus précise, les péages mosans sont tenus en fief du comte de Namur. Il revient à ce dernier, pour ces raisons, de « prendre les mesures de winages à la mesure de Warcq » et, le cas échéant, de les « radrechier » (« corriger »). On notera encore ces deux dépositions selon lesquelles d’autres seigneurs ont exercé des prérogatives sur certains tonlieux, comme le comte d’Agimont, probablement à Givet, et le comte de Luxembourg, à Fumay, Haybes et Vireux.
9Pour éclairer ces affirmations, il importe d’apporter quelques précisions. Les comtes de Namur parviennent à rassembler au xiie siècle une véritable principauté territoriale, qui s’étend de part et d’autre de la rivière. Toutefois, ils ne peuvent imposer leurs droits tout au long du cours d’eau et se voient confrontés à une puissante rivale, l’Église de Liège. Dans la partie la plus cloisonnée de cet espace, en amont de Dinant, cela a favorisé l’éclosion de petites seigneuries et contribué à diluer encore les pouvoirs. Ce n’est pas un hasard si deux dépositions mentionnent les prérogatives du comte de Luxembourg. Mais, en 1184, le comte de Namur est élevé par l’empereur au titre de marquis et détient dès lors le droit de conduit, taxe perçue sur les marchands pour assurer leur « paix ». Ensuite, cette principauté est vendue en 1263 au comte de Flandre Guy de Dampierre. À sa mort, en 1305, le marquisat revient à son demi-frère, Jean Ier, qui commande cette enquête30. En ce qui concerne les péages, celui de Mézières apparaît dès 1244, levé pour le comté de Rethel. Les tonlieux de Deville et de Revin/Fumay sont cités pour la première fois dans ce document. Le comte de Luxembourg fait percevoir celui de Vireux-Wallerand en 1309. Le péage de Givet est levé à partir de 1248 pour les comtes de Chiny puis pour les seigneurs d’Agimont. Enfin, le « winage » d’Hastière/Waulsort apparaît en 1218, perçu, selon toute vraisemblance, par l’avoué vassal de l’église liégeoise. Les marquis de Namur prétendent en lever les droits en 1265 et semblent s’être emparés de ce poste en 131931. Bref, au début du xive siècle, le comte/marquis de Namur ne dispose d’aucun droit bien établi sur les péages mentionnés dans cette enquête. Il convient donc d’examiner sur quelles bases repose la prétention du comte de Namur de « droiturier le cour de Meuze », prérogative mentionnée par les témoignages recueillis en 1328.
10La solution à ce problème se trouve dans notre document. En effet, les souvenirs des personnes interrogées alors nous ramènent une quarantaine d’années plus tôt, soit vers 1290. Or, en 1289, Guy de Dampierre fait dresser un dénombrement des biens et des recettes de sa principauté récemment acquise. Les agents du comté s’efforcent de rechercher tous les droits dont peut se prévaloir leur prince, de récolter des revenus qui n’étaient plus perçus, d’élargir même la puissance de leur seigneur32. Ainsi, le comte prétend exercer une « haute protection », une « souveraineté » sur les habitants de la petite seigneurie de Waulsort-Hastière, au détriment de l’évêque de Liège. Un marquis d’Empire peut se prévaloir d’une telle prérogative. Rappelons que cette souveraineté consiste dans le maintien de la paix et dans l’exercice de la justice, bref, un conductus sur les fleuves et rivières navigables33. Guy de Dampierre puis son fils Jean Ier, qui lui succède en 1305, cherchent donc à élargir leur autorité. En particulier, par la revendication du conductus tout au long de la Meuse, depuis Revin jusqu’à Namur, les marquis obligent les seigneurs et disposent d’un moyen efficace d’appropriation des tonlieux. Ils profitent du désordre et des abus dans la perception de ces petits péages, presque tous de création récente, pour imposer leur autorité suprême. C’est à eux que l’on doit s’adresser pour obtenir justice quand « ons formainent les marchans à winaiges » (« on malmène les marchands aux winages »)34.
11Il apparaît toutefois évident que cette initiative comtale, cette autorité qui cherche à imposer et à contrôler une mesure unique à quelques péages de la vallée perçus sur le transport du vin, ce pouvoir souverain qui doit, selon plusieurs témoins, s’assurer qu’on prélève les droits de manière correcte grâce à un étalon connu de tous, là où auparavant la taxe était trop élevée et perçue à l’aide de mesures peu sûres, tout ceci rencontre, sans conteste, les intérêts des marchands. Un texte namurois plus récent précise, en outre, que le paiement du « winage » à un poste appartenant au marquis de Namur entraîne l’exemption aux autres péages du comté35. Ce privilège constitue aussi une intéressante source de revenus en raison de l’intensité des échanges économiques sur le cours d’eau, notamment le commerce du vin, d’une importance considérable. Dès le xiiie siècle, en effet, le fleuve constitue la voie habituelle pour l’importation des crus de France vers les villes de la vallée, et Mézières, lieu d’embarquement des vins au débouché de plusieurs itinéraires terrestres, devient une véritable « étape » pour ces échanges, qui se poursuivent jusqu’au grand marché de Dordrecht, dans le delta36. Il semble bien que Jean Ier dispose là d’un moyen efficace pour obliger de petits seigneurs, imposer son autorité, s’approprier ces tonlieux, en comptant sur l’appui des marchands, sensibles à la précision des mesures mais aussi à leur uniformisation et à leur immutabilité37. Même si les droits namurois sur la rivière ne s’avèrent pas fondés, même si les dépositions sont orientées (on peut parler de « propagande ») et les témoins choisis (on ne compte aucun Liégeois), cette opération est couronnée de succès car les comtes de Namur atteignent leurs objectifs, à savoir le contrôle de ces péages et l’accroissement de leur pouvoir sur cette portion du cours d’eau38. Cette enquête de 1328 produit en effet des conséquences à long terme, puisque certaines prétentions namuroises sont encore mentionnées dans un document dessiné en 1502, puis dans une enquête menée en 1519 à propos des droits de Charles Quint et de l’évêque Érard de La Marck sur le fleuve39.
12On relèvera enfin le poids que représente encore de nos jours la Meuse en tant que frontière. Au nord de Visé et en amont de Maastricht, la rivière sépare la Belgique des Pays-Bas depuis 1839. La construction de plusieurs écluses à partir de 1960 a nécessité la rectification du fleuve. Mais la ligne de démarcation entre les deux pays suivait toujours l’ancien lit, créant deux enclaves. Il faudra attendre 2014, soit un demi-siècle, pour que les deux gouvernements s’accordent sur un échange de territoires40. Cela témoigne de l’écho de ces « frontières naturelles », mobiles de conquêtes et d’expansion des grandes nations aux temps modernes et encore à l’époque contemporaine.
Conclusion
13Il faut attendre les xiiie et xive siècles, lorsque les frontières commencent à se dessiner puis à se fixer, pour que la Meuse commence à constituer une référence réelle et commode, rendue visible par des marqueurs spatiaux, telles des bornes placées dans le cours d’eau entre la France et l’Empire, ou naturels, comme un saule ou un peuplier sur ses berges. Mais il paraît impossible de considérer que la rivière exerce une fonction systématique en tant que délimitation entre différents pouvoirs. Des enquêtes n’en surgissent pas moins, pour tenter de définir dans l’espace les partages de souveraineté, les juridictions. Ces documents s’avèrent très précis car fondés sur les réalités géographiques et les techniques : la frontière suit le chenal de navigation. On peut aussi souligner les moyens déployés par les princes pour l’emporter sur leur adversaire dans le contrôle du fleuve, grâce à une présence fiscale et judiciaire plus ou moins affirmée ou en suscitant l’intérêt des marchands, bref pour augmenter leur espace de pouvoir. On voit enfin se construire dans la durée la mémoire de ces délimitations, notamment par une représentation cartographique du début du xvie siècle. Enfin, peut-être peut-on considérer que, de nos jours, le fait qu’il ait été très difficile de modifier la démarcation formée par la Meuse constitue encore à notre époque l’écho de ces « frontières naturelles ».
Notes de bas de page
1 Il est intéressant de noter que le mot « frontière » apparaît en français, avec son sens actuel, au xiiie siècle. Lucien Febvre, « Frontière : le mot et la notion », dans Id., Pour une histoire à part entière, Paris, Sevpen (Bibliothèque générale de l’EPHE, VIe section), 1962, p. 24.
2 Voir supra, n. 1 et l’introduction de cet ouvrage, ainsi que les définitions proposées par les géographes : Jean-Luc Piermay, Bernard Reitel, Jean-Pierre Renard, Patricia Zander, « Conclusions », Villes et Frontières, Paris, Anthropos, 2002, p. 242 ; Jean-Pierre Renard, « La frontière : limite géopolitique majeure mais aussi aire de transition », dans Laurent Carroué et al., Limites et discontinuités en géographie, Paris, Sedes, 2002, p. 40-66, ici p. 40, 42-44, 61 ; Id., « Conclusion », dans Jean-Christophe Romer (dir.), Face aux Barbares. Marches et confins d’empires, de la Grande muraille de Chine au Rideau de fer, Paris, Tallandier, 2004, p. 171-199 ; Patrick Picouet, Jean-Pierre Renard, Les frontières mondiales. Origines et dynamiques, Nantes, Éd. du Temps, 2007, p. 42-68 ; voir aussi les travaux publiés par le laboratoire « Discontinuités » de l’université d’Artois.
3 Cette première partie s’appuie sur Marc Suttor, « Le rôle d’un fleuve comme limite ou frontière au Moyen Âge. La Meuse, de Sedan à Maastricht », Le Moyen Âge, 116, 2010, p. 335-366.
4 Ibid., p. 358-359 et 363-364 ; Léopold Genicot, « Ligne et zone : la frontière des principautés médiévales », Bulletin de la classe des lettres et des sciences morales de l’Académie royale de Belgique, 5/56, 1970, p. 29-42, ici p. 31-33 et 41-42 ; Michel Bur, « Recherches sur la frontière dans la région mosane aux xiie et xiiie siècles », dans Actes du 103e Congrès national des Sociétés savantes. Nancy-Metz, 1978. Philologie et histoire, 1, Paris, CTHS, 1980, p. 143-160, ici p. 157. Au sujet de tels documents, voir infra n. 21-24 et 26. Cette chronologie paraît identique dans d’autres régions (Bernard Demotz, « La géographie administrative médiévale : l’exemple du comté de Savoie. Début xiiie-début xve siècle », Le Moyen Âge, 80, 1974, p. 261-300, ici p. 270-273, 282-283 et 293-294).
5 Voir infra n. 15 et 22.
6 Genicot, « Ligne et zone », art. cité, p. 30-33, 35, 37 et 39-42 ; Joseph Balon, « L’organisation judiciaire des marches féodales », Annales de la Société archéologique de Namur, 46, 1951, p. 5-72 ; Bur, « Recherches sur la frontière », art. cité, p. 157.
7 Jean-François Lemarignier, La France médiévale. Institutions et société, Paris, Armand Colin, 1970, p. 249-263 ; Heinrich Mitteis, Lehnrecht und Staatsgewalt. Untersuchungen zur mittelalterlichen Verfassungsgeschichte, 2e éd., Weimar, H. Böhlaus Nachfolger, 1958, p. 449-463.
8 À Liège, cette évolution se manifeste clairement sous l’épiscopat d’Hugues de Pierrepont (1200/1202-1229), qui ne songe plus à préserver les intérêts de l’Empire, mais les siens (Jean Lejeune, La principauté de Liège, 3e éd., Liège, Eugène Wahle, 1980, p. 64 ; Jean-Louis Kupper, Liège et l’Église impériale. xie-xiie siècle, Paris, Les Belles Lettres, 1981, p. 182-183 et 210 ; Alain Marchandisse, La fonction épiscopale à Liège aux xiiie et xive siècles. Étude de politologie historique, Genève, Droz, 1998, p. 110-111, 212-214 et 452-456). Le comté de Namur échoit en 1216 à une branche cadette de la famille royale française, la maison de Courtenay, avant d’être vendu en 1263 au comte de Flandre (voir infra n. 30). Le comté de Rethel passe entre les mains de la branche cadette de Bourgogne en 1404 ; c’est toujours un fief du roi de France, comte de Champagne (Marc Suttor, « Seigneurs et seigneuries dans la vallée de la Meuse moyenne du xe au xvie siècle », dans Seigneurs et seigneuries au Moyen Âge. Actes du 117e Congrès national des Sociétés savantes. Clermont-Ferrand, 1992. Philologie et histoire, Paris, CTHS, 1993, p. 215).
9 Le domaine, où ces princes détiennent seuls l’autorité publique ; les fiefs, où ils n’interviennent qu’exceptionnellement ; les avoueries, où ils ont reçu ou conquis certaines prérogatives seigneuriales ; des terres, où ils partagent le pouvoir avec la noblesse locale ou un dynaste voisin ; les alleux, sur lesquels ils essaient de faire valoir leur haute protection ou « souveraineté » (voir infra n. 33). Genicot, « Ligne et zone », art. cité, p. 31-37 ; Kupper, Liège et l’Église impériale, op. cit., p. 523 ; Michel Parisse, « Désintégration et regroupements territoriaux dans les principautés lotharingiennes du xie au xiiie siècle », dans Alfred Heit (dir.), Zwischen Gallia und Germania, Frankreich und Deutschland. Konstanz und Wandel raumbestimmender Kräfte. Vorträge auf dem 36. Deutschen Historikertag. Trier, 1986, Trèves, Trierer Historische Forschungen, 1987, p. 162 et 164.
10 Voir infra n. 33 ainsi que Marc Suttor, Vie et dynamique d’un fleuve. La Meuse de Sedan à Maastricht (des origines à 1600), Bruxelles, De Boeck Université, 2006, p. 249-252 et n. 120. Au début du xive siècle, dans le royaume, Philippe IV le Bel fonde sa « souveraineté » sur la Seine d’une manière comparable, en y ajoutant la notion de « commun profit » et d’« utilité publique » (Virginie Serna, « Le fleuve de papier. Visites de rivière et cartographie du fleuve (xiiie-xviiie siècle) », Médiévales, 36, 1999, p. 31-41, ici p. 32-33 ; Ead., « Administrer, visiter et expertiser la rivière : l’exemple de la boucle de Marne (xve- xviiie siècle) », dans L’eau et la ville. Actes du 121e Congrès national des Sociétés savantes. Nice, 1996. Géographie physique et humaine, Paris, CTHS, 1999, p. 92-94).
11 Genicot, « Ligne et zone », art. cité, p. 37.
12 On notera avec intérêt l’existence en 1420 d’un projet d’union entre le comté de Namur et la principauté de Liège, qui, s’il s’était concrétisé, aurait bouleversé le « paysage politique » mosan. Car les ambitions de Philippe le Bon et de Charles le Téméraire se heurtent à l’existence même de la principauté épiscopale. Une lutte mortelle et inégale s’engage entre le pays de Liège et les ducs de Bourgogne. Enfin, au niveau local, subsistent encore quelques terres au statut contesté ou qui relèvent de plusieurs souverains et de petits seigneurs. Les différends ne reposent plus sur des considérations féodales, mais reçoivent une solution par voie diplomatique, basée sur des fondements juridiques liés à la souveraineté. Suttor, Vie et dynamique d’un fleuve, op. cit., p. 255, n. 129, 255, n. 130 et 259, n. 144.
13 Manfred Van Rey, « Les divisions politiques et ecclésiastiques de l’ancien diocèse de Liège au Haut Moyen Âge », Le Moyen Âge, 87, 1981, p. 205-206. Pouillé de 1497, Jean Paquay (éd.), Le plus ancien pouillé du diocèse de Liège (1497), Tongres, Collée, 1908. Création de nouveaux évêchés en 1559, voir Jean Lejeune, « Le siècle de Louis XIV au pays de Liège (1580-1723). Introduction historique », dans Le siècle de Louis XIV au pays de Liège (1580-1723). Liège, 1975, cat. expo., Liège, Musée de l’art wallon, 1975, p. xx-xxii ; Michel Dierickx, L’érection des nouveaux diocèses aux Pays-Bas. 1559-1570, Bruxelles, La Renaissance du livre, 1967.
14 Walter Mohr, Geschichte des Herzogtums Lothringen, 2, Niederlothringen bis zu seinem Aufgehen im Herzogtum Brabant (11.-13. Jahrhundert), Trèves/Sarrebruck, Verlag der akademischen Buchhandlung Interbook/Die Mitte, 1976, p. 157-167.
15 Reinhard Schneider, « Mittelalterliche Verträge auf Brücken und Flüssen (und zur Problematik von Grenzgewässern) », Archiv für Diplomatik. Schriftgeschichte Siegel-und Wappenkunde, 23, 1977, p. 21.
16 Au sujet du mémorandum de 1297, ibid., p. 20-21 ; Michel Parisse, « La frontière de la Meuse au xe siècle », dans Michel Sot (dir.), Haut Moyen Âge. Culture, éducation et société. Études offertes à Pierre Riché, La Garenne-Colombes, Publidix, 1990, p. 427-437, ici p. 427 et 437 ; Alain Girardot, Le droit de la terre. Le Verdunois à la fin du Moyen Âge, 1, Nancy, Presses universitaires de Nancy, 1992, p. 13-14 ; Bur, « Recherches sur la frontière », art. cité, p. 154-156. À propos du péage de Mézières, ibid., p. 155-156 et n. 32. On consultera l’acte du 29 décembre 1405 dans Gustave Saige, Henri Lacaille (éd.), Trésor des chartes du comté de Rethel, 2, Monaco, Imprimerie de Monaco, 1904, no 827, p. 515. Voir encore Parisse, « Désintégration et regroupements territoriaux », art. cité, p. 179. Il est dommage que Léonard Dauphant, Le royaume des quatre rivières. L’espace politique français (1380-1515), Seyssel, Champ Vallon, 2012, qui étudie la période portant de la fin du xive au début du xvie siècle, ne s’interroge qu’à un seul moment sur ce critère, pourtant essentiel.
17 Carte extraite de Kupper, Liège et l’Église impériale, op. cit., p. 257, revue et corrigée par Suttor, Vie et dynamique d’un fleuve, op. cit., p. 649.
18 La comtesse Marie d’Artois rachète en 1344 la prévôté de Poilvache, à savoir les terres namuroises de la rive droite du fleuve cédées au comté de Luxembourg en 1199. Le marquisat de Namur absorbe de nombreuses seigneuries périphériques ou enclavées. Les évêques de Liège acquièrent, sur la rive gauche de la Meuse, le comté de Moha, en amont de Huy, au début du xiiie siècle, et le comté de Looz, en aval de Maastricht, en 1361. Les ducs de Brabant s’installent à Maastricht dès 1204 et prennent le contrôle, toujours le long du fleuve, du château d’Argenteau. Voir Suttor, Vie et dynamique d’un fleuve, op. cit., p. 25-255 ; Id., « L’affermissement du pouvoir des évêques de Liège dans la vallée de la Meuse moyenne », dans Le temps des Saliens en Lotharingie (10241125). Actes du colloque du Centre d’études historiques, Malmedy, 1991, Malmedy, Malmedy art et histoire, 1993, p. 101-124, ici p. 109.
19 Ibid., p. 255 ; Suttor, « Le rôle d’un fleuve », art. cité, p. 362.
20 Carte extraite de Suttor, Vie et dynamique d’un fleuve, op. cit., p. 651, revue et corrigée par Id.
21 Pour les « records » des 1er juillet et 20 juin 1245, voir Gerard Willem Augustinus Panhuysen (éd.), Studieën over Maastricht in de dertiende eeuw, Maastricht, Boosten & Stols, 1933, annexes V-VII, p. 139-141, 141-143 et 143-146 ; on consultera la sentence arbitrale de février 1284 dans Stanislas Bormans, Émile Schoolmeesters (éd.), Cartulaire de l’Église Saint-Lambert de Liège de Liège, 2, Bruxelles, F. Hayez, Kiessling et Imbreghts, 1895, no 750-751, p. 368-374 et 375-376. Voir Alain Marchandisse, « “Tout apparoillié a son bon plasir”. Contribution à l’histoire des relations diplomatiques entre l’évêque de Liège Hugues de Chalon et le roi d’Angleterre Édouard Ier à la fin du xiiie siècle », Bulletin de la Commission royale d’histoire, 160, 1994, p. 37-66, ici p. 50.
22 Jules Borgnet (éd.), Cartulaire de la commune de Bouvignes, 1, Namur, Wesmael-Legros, 1862, no 8, p. 20. En 1359, on place des bornes pour délimiter la franchise de Dinant (Balon, « L’organisation judiciaire », art. cité, p. 35), mais on ignore si de tels « jalons » sont placés dans le cours du fleuve.
23 Dieudonné D. Brouwers (éd.), L’administration et les finances du comté de Namur du xiiie au xve siècle, t. 2, Chartes et règlements, 2, Namur, Wesmael-Charlier, 1914, p. 280-285 ; ces « records » de coutumes datent de la dernière décade du xiiie siècle (ibid., p. 280). Ces documents mettent vraisemblablement fin à un long conflit (Suttor, « Le rôle d’un fleuve », art. cité, p. 361, n. 68).
24 ibid., p. 361-362. Liées au maintien de l’ordre public, les prérogatives en matière de justice paraissent essentielles, qui procurent à la fois pouvoir et revenus. Marchandisse, La fonction épiscopale à Liège, op. cit., p. 421-427 et 246-247.
25 Maastricht connaît une souveraineté partagée entre Brabant et Liège jusqu’à la fin de l’Ancien Régime. Voir Joachim Deeters, Servatiusstift und Stadt Maastricht. Untersuchungen zu Entstehung und Verfassung, Bonn, Röhrscheid (Rheinisches Archiv, 73), 1970 et Suttor, « L’affermissement du pouvoir », art. cité, p. 103-106 et 109.
26 Enquête menée pendant le carême de 1328 (n. st.) à Mézières, Warcq, Revin/Fumay, Haybes, Vireux, Givet, Aubrives, Hastière/Waulsort et Bouvignes. Les officiers du comte mentionnent les qualités de 21 témoins ; ce sont surtout des agents locaux (échevins, jurés, tonloyers), des bateliers et des marchands ou encore des artisans (dinandiers, charpentiers). Quelques courts extraits de l’enquête ont fait l’objet d’une publication (Brouwers [éd.], L’administration et les finances du comté de Namur, op. cit., no 489, p. 177-178) et de brefs commentaires, très incomplets (notamment Jacques Stiennon, « Les tonlieux de transit et le droit de pêche sur la Meuse namuroise au Moyen Âge à la lumière de deux documents cartographiques de 1502 », dans Jean-Marie Duvosquel, Alain Dierkens [dir.], Villes et campagnes au Moyen Âge. Mélanges Georges Despy, Liège, Perron, 1991, p. 653-675, ici p. 656-657), mais ce manuscrit, malgré son intérêt, n’a jamais été édité ni étudié de façon approfondie. Voir Marc Suttor, « Métrologie et pouvoirs souverains dans la vallée de la Meuse à la fin du Moyen Âge », dans Jean-Claude Hocquet (dir.), La diversité locale des poids et mesures dans l’ancienne France. Actes du IIe Congrès international du Comité français de métrologie historique, Caen, Lys (Cahiers de métrologie, 14-15), 1996, p. 241-254.
27 Le rotulus mesure près de 2 mètres de long sur plus ou moins 0,23 mètre de large. Il se trouve aujourd’hui aux Archives de l’État à Namur, Chartrier des comtes de Namur, no 486. Ce chartrier fut conservé de façon presque continue au château de Namur jusqu’au milieu du xviiie siècle. Suttor, Vie et dynamique d’un fleuve, op. cit., p. 252 et n. 120.
28 Jean Bovesse et Françoise Ladrier, À travers l’histoire du Namurois. Catalogue analytique et explicatif de l’exposition permanente de documents. viiie-xxe siècle, Bruxelles, ministère de l’Éducation nationale et de la Culture française et ministère de l’Éducation nationale et de la Culture néerlandaise, 1971, p. 186.
29 Andenelle se situe en aval d’Andenne, entre Namur et Huy.
30 Suttor, Vie et dynamique d’un fleuve, op. cit., p. 243-255 ; Id., « Le rôle d’un fleuve », art. cité, p. 355-362.
31 Id., « Métrologie et pouvoirs souverains », art. cité, p. 246.
32 Dans la seconde moitié du xiiie siècle et au début du xive siècle, on observe, dans la région mosane, l’apparition de nombreux polyptyques, censiers, répertoires de fiefs et dénombrements (voir supra n. 4). Il faut prendre garde au caractère conservateur et répétitif de tels documents et on doit se montrer attentif aux mobiles qui motivent leur établissement. En outre, les chiffres qu’ils consignent ne doivent être considérés que comme des ordres de grandeur. Voir Robert Fossier, « Censiers et terriers », dans Informatique et histoire médiévale. Communications et débats de la table ronde CNRS, Rome, École française de Rome, 1977, p. 169-174 et Id., Polyptyques et censiers, Turnhout, Brepols, 1978, p. 36-39, 42-48 et 51-67.
33 Voir le polyptyque du comté de Namur, Brouwers (éd.), L’administration et les finances du comté de Namur du xiiie au xve siècle, t. 1, Cens et rentes du comté de Namur au xiiie siècle, 22, Namur, Wesmael-Charlier, 1911, p. 326. Le comte appuie ses prétentions sur sa fonction de haut avoué et sur son droit de conduit, en qualité de marquis et prince d’Empire depuis la fin du xiie siècle. Voir Jean-Louis Kupper, Raoul de Zähringen évêque de Liège, 1167-1191. Contribution à l’histoire de la politique impériale sur la Meuse moyenne, Bruxelles, Académie royale de Belgique, 1974, p. 104-111. En ce qui concerne le maintien de la paix et l’exercice de la justice, voir Suttor, Vie et dynamique d’un fleuve, op. cit., p. 247-248 et 252 ainsi que Id., « Le rôle d’un fleuve », art. cité, p. 357.
34 Id., « Métrologie et pouvoirs souverains », art. cité, p. 248-249.
35 Cette exemption est accordée sous certaines conditions. Tarif du « winage » du pont de Meuse à Namur, 1393-1419, voir Jules Borgnet, Promenades dans Namur, Namur, 1851-1859, p. 158, n. 1.
36 Suttor, Vie et dynamique d’un fleuve, op. cit., p. 306-309, 312-313, 527-529 et 533.
37 Id., « Métrologie et pouvoirs souverains », art. cité, p. 249. À propos de ces mesures, ibid., p. 249-253.
38 Id., « Le rôle d’un fleuve », art. cité, p. 357-358.
39 Id., « Métrologie et pouvoirs souverains », art. cité, p. 251-252. Sur le document de 1502, voir Jacques Stiennon, « Les tonlieux de transit », art. cité, p. 660-661. À propos des représentations cartographiques de cette époque, rappelons l’exposition « Quand les artistes dessinaient les cartes. Vues et figures de l’espace français, Moyen Âge et Renaissance », organisée en 2019-2020 aux Archives nationales. En ce qui concerne l’enquête de 1519, voir Archives de l’État à Namur, Fonds Brouwers, 11. D’autres enquêtes sont encore menées sans doute entre 1521 et 1538 (Archives générales du Royaume, Chambre des comptes, 1004, fol. 38) et en 1654 (Cécile Douxchamps-Lefèvre, « La souveraineté sur la Meuse moyenne au cours des Temps modernes », Annales de la Société archéologique de Namur, 56, 1972, p. 231-247, ici p. 240). L’accroissement de l’espace de pouvoir des Namurois dans cette section de la rivière aux xive-xve siècles est étudié par Suttor, Vie et dynamique d’un fleuve, op. cit., p. 249-252 ainsi que par Id., « Métrologie et pouvoirs souverains », art. cité, p. 244 et 247-252.
40 Christine Keulen et al., « La biodiversité une étude de cas. Le site de Lanaye en Meuse belgo-néerlandaise », Cahiers d’éthologie fondamentale et appliquée, animale et humaine, 14, 1994, p. 20-21 et 36-38 ; voir aussi Suttor, Vie et dynamique d’un fleuve, op. cit., annexe 2, p. 620.
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