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L’architecte et ses modèles

 | 
Jean-Philippe Garric

Corpus de modèles et périmètres disciplinaires

La recherche d’une Renaissance mineure au xixe siècle

Modèles et historiographie

Francesca Mattei
Traduction de Jean-Philippe Garric

Note de l’éditeur

Ce texte constitue le premier résultat de la recherche Vers une épistémologie de l’architecture vernaculaire de la Renaissance, lecture rapprochée et globale de dessins français du xixe siècle, actuellement en cours et menée grâce au soutien de l’Institut national d’histoire de l’art (INHA) à Paris.

Texte intégral

  • 1 Nous nous limitons à signaler quelques contributions récentes : Frédérique Lemerle, Yves Pauwels, (...)
  • 2 Sur les livres français d’architecture, voir Béatrice Bouvier et Jean-Michel Leniaud (dir.), Le l (...)
  • 3 Sur la définition des modèles aristocratiques par Charles Percier et Pierre Fontaine, voir Garric (...)
  • 4 Il s’agit des portraits de Bramante, Baldassare Peruzzi, Antonio da Sangallo le Jeune, Vignole, B (...)

1Au cours du xixe siècle, l’architecture de la Renaissance italienne est utilisée comme modèle sur le plan théorique et dans le cadre de projets1. Les édifices construits aux xve et xvie siècles sont alors relevés, interprétés et adaptés par le biais d’observations directes ou à travers l’étude des livres, qui peu à peu paraissent2. En ce sens, comme on le sait, certaines publications ont fortement contribué à orienter le goût des architectes. Dans la France de l’École des beaux-arts – contexte dans lequel s’inscrit cette enquête –, les livres Palais, maisons et autres édifices modernes dessinés à Rome (1798) et Choix des plus célèbres maisons de plaisance de Rome et de ses environs (1809-1813) de Charles Percier et Pierre Fontaine diffusent une série de modèles « aristocratiques »3, avec l’intention de fournir aux élèves un catalogue d’exemples à étudier et imiter. Dans leurs publications, les deux auteurs privilégient les édifices attribués aux principaux protagonistes de la Renaissance italienne, principalement situés à Rome, critères incarnés par les portraits des six architectes qui trônent, dans les frontispices du livre sur les palais4.

  • 5 Jean Nicolas Louis Durand, Recueil et parallèle des édifices de tout genre anciens et modernes, P (...)
  • 6 Pour une confrontation entre l’approche de Durand et de Percier à travers l’analyse de leurs publ (...)

2Une conception différente prévaut dans les publications de Jean Nicolas Louis Durand, François Léonard Séheult et Charles Pierre Joseph Normand, qui promeuvent une vision plus démocratique, juxtaposant aux architectures raffinées des édifices ordinaires, les œuvres réalisées à Rome et celles construites dans d’autres centres5. L’écart entre cette conception des modèles, évident en confrontant les livres, connotait aussi des méthodes pédagogiques opposées, qui coexistaient dans la France du xixe siècle6.

  • 7 Jean-Philippe Garric, « Percier e i portici dello “stile Bologna” », dans Sabine Frommel, Jean-Ph (...)
  • 8 La lettre conservée à la Fondation Getty est citée dans Annie Jacques, « I viaggi in Italia di De (...)
  • 9 Sur Auguste Grandjean de Montigny et Auguste Famin, voir Antonio Brucculeri, « Représentations et (...)
  • 10 À propos des publications des imitateurs de Percier et Fontaine et sur Martin Pierre Gauthier, vo (...)
  • 11 Ibid., p. 213.

3À la différence des volumes élaborés avec Fontaine, les documents établis par Percier durant son Grand Tour en Italie s’ouvrent à une géographie plus large et à une plus ample variété typologique, offrant la possibilité d’explorer les multiples facettes des intérêts de l’architecte7. Le patrimoine visuel kaléidoscopique de Percier – dont les œuvres imprimées ne restituent que quelques aspects – fut transmis dans son entièreté à ceux qui suivaient ses leçons à l’École des beaux-arts. L’importance de visiter d’autres centres est alors comprise par Hippolyte Lebas (1782-1867) et par François Debret (1777-1850), lequel dans une lettre célèbre adressée à son maître clame sa volonté d’explorer les caractères multiformes de l’architecture italienne8. L’héritage pédagogique de Percier est aussi attesté par certaines publications signées de ses élèves. Dans Architecture toscane (1806-1815), Auguste Granjean de Montigny (1776-1850) et Auguste Famin (1776-1859) décrivent cette dernière comme le résultat d’une évolution historique continue, du Moyen Âge au Quattrocento, proposant une idée de l’art de bâtir proche de celle théorisée quelques années plus tôt par Jean-Baptiste Séroux d’Agincourt9. Martin Pierre Gauthier (1790-1855) se concentre, lui, sur les palais génois du xvie siècle tardif, rassemblés dans Les plus beaux édifices de la ville de Gênes (1818-1832)10, tandis que Jean-Baptiste Cicéron Lesueur (1794-1883) et Félix Callet (1791-1854) projettent une étude dédiée à Turin, Milan et Naples, qui se concrétise par le volume l’Architecture italienne, ou Palais, maisons et autres édifices de l’Italie moderne (1827), limité à quelques planches sur Turin et Milan11.

  • 12 Dans les mêmes années paraît le volume de Leopoldo Cicognara, Antonio Diedo et Giannantonio Selva (...)

4Tout en proposant des alternatives au primat de Rome, les élèves de Percier s’intéressent aux grandes architectures construites dans les principales villes de la péninsule, délaissant les centres mineurs et les édifices de dimensions plus modestes12. Suivant l’exemple de leur maître, ces épigones incluent dans leurs carnets respectifs une plus grande diversité de sujets, variés par leurs caractères et leur chronologie, et dispersés dans la multitude de villes italiennes visitées durant le Grand Tour. Une étude comparée de ces carnets offre un aperçu des principes pédagogiques partagés au sein de l’École des beaux-arts, permettant d’imaginer les discussions et les échanges d’idées entre ceux qui la fréquentaient. Tandis qu’interrogés isolément, ils témoignent des intérêts personnels de ceux qui les ont réalisés.

5À travers l’analyse détaillée des dessins, des techniques de représentation et des sujets, nous chercherons ici à mieux évaluer le rôle que les œuvres périphériques, dans l’historiographie et dans la géographie de la Renaissance italienne, ont tenu dans la réception de cette période au xixe siècle. Nous nous interrogerons sur les critères qui guident le choix de ces sujets et sur la finalité de ces collectes, en considérant les itinéraires de voyage parcourus par les architectes et les outils utilisés pour les concevoir. Autrement dit, nous tâcherons de comprendre jusqu’à quel point le contenu de ces carnets permet de dessiner une recherche autour des modèles « mineurs » de la Renaissance. L’analyse sera conduite sur quelques villes de la plaine du Pô qui, durant les xve et xvie siècles, furent le siège de petites cours (Ferrare, Mantoue, Parme et Piacenza), ou bien qui se situaient dans la périphérie des deux principales puissances dominant l’Italie septentrionale, la république de Venise et le duché de Milan.

Les modèles mineurs dans l’itinéraire du Grand Tour

  • 13 Pour les biographies de ces personnages, voir Émile Bellier de la Chavignerie et Louis Auvray, Di (...)

6Traverser la plaine padane était nécessaire pour rejoindre Rome, objectif désiré où la possibilité d’étudier l’Antiquité se fondait avec celle d’observer l’art des débuts de l’époque moderne. Entre 1804 et 1811, François Debret et Louis Hippolyte Lebas font halte dans de nombreuses cités émiliennes ; au cours des années 1820, Prosper Barbot (1798-1878) s’arrête à Ferrare et Modène, tandis que Jean-Baptiste Cicéron Lesueur passe par Bologne, Ferrare, Vicence et Vérone en 1824 ; Guillaume Abel Blouet (1795-1853) explore Piacenza, Ferrare, Pavie, Mantoue, Milan et Lodi, quand Félix Duban (1797-1870) rejoint Ferrare, Bologne et Rimini13 [FIG. 1].

FIG. 1. Voyageurs dans l’Italie septentrionale. Chaque hexagone correspond à un architecte.

FIG. 1. Voyageurs dans l’Italie septentrionale. Chaque hexagone correspond à un architecte.
  • 14 Dans les carnets étudiés, les édifices de Ferrare construits au xve ou au xvie siècle sont au nom (...)
  • 15 La visite de Percier est documentée par deux feuillets, sur lesquels sont dessinés le cloître du (...)
  • 16 Durant son Grand Tour en Italie, Jean-Baptiste Cicéron Lesueur remplit sept carnets, tandis que B (...)

7Bologne exceptée – qui en raison de son importante extension ne sera pas traitée dans cette enquête –, le plus grand nombre de dessins relatifs à un seul centre concerne Ferrare14. La ville était mentionnée dans les guides de voyage et fait partie des étapes de Percier lors de son passage en 179115. Les artistes s’intéressent tant à la sculpture qu’à l’architecture. Lesueur et Blouet, présents respectivement en octobre 1824 et en septembre 1826, incluent dans leurs carnets les œuvres humanistes commanditées par Lionel d’Este, les interventions promues par Hercule Ier et les petits palais construits au Cinquecento. Tous deux transcrivent scrupuleusement les formes des résidences patriciennes, comme les palais Naselli Crispi, Cicognara, Paradiso ou Polo. Il s’agit là de demeures de commanditaires moins célèbres que les Este, mais qui cependant expriment pleinement une déclinaison locale du prototype romain du « palazzetto »16. Les dessins sont tracés au graphite sur des feuilles de dimensions diverses, généralement de petit format, plus tard reliées en albums. De l’usage presque exclusif des projections orthogonales au détriment de la perspective, l’intérêt qui prévaut pour la composition des plans est évident, même si les observations ponctuelles sur les ornements et les techniques de construction ne manquent pas.

  • 17 ENSBA, no 15469/1, f. 1,83.
  • 18 « Ce palais a été bâti vers le milieu du xvie siècle, par J.-M. Crespi : la pierre et la brique y (...)

8À propos du palais Naselli Crispi, par exemple, Lesueur représente un détail de la corniche de la cour, en annotant l’emploi des matériaux (« Couronnement / La cimaise et les modillons en pierre / Le dessous du larmier en terre-cuite / Construit en briques apparentes17 »). Dans le volume Palais, maisons et vues d’Italie, mesurés et dessinés (1809), Pierre Clochar fournit deux planches dédiées au même édifice (pl. 19 et 21) avec une note similaire, peut-être à l’origine de la curiosité de Lesueur18.

  • 19 ENSBA, no 15469/1, f. 1,84 ; f. 1,78 ; f. 1,75.
  • 20 Ibid., f. 1,81 ; f. 1,83.
  • 21 David R. Coffin, « Some Architectural Drawings of Giovan Battista Aleotti », Journal of the Socie (...)

9De façon plus générale, l’attention pour ces édifices pourrait trouver son explication dans certaines annotations de Lesueur, lequel attribue les palais Naselli, Cicognara et Paradiso19 à l’architecte ferrarais Giovanni Battista Aleotti dit l’Argenta, actif dans les duchés des Este et des Farnèse dans la seconde moitié du Cinquecento et considéré comme un représentant de l’« école de Vignole »20. L’historiographie récente confirme cette impression, reconnaissant l’influence des églises à plan ovale projetées par Vignole, dans le dessin pour celle de San Carlo à Ferrare21.

  • 22 Sur la tradition française de la Règle des cinq ordres d’architecture de Vignole, voir Frédérique (...)
  • 23 Cité dans Désiré Raoul-Rochette, « Percier. Sa vie et ses ouvrages », Revue des deux mondes, 24, (...)
  • 24 ENSBA, nos 3626, 3627, 3628, 3629.
  • 25 Ibid., no 3643 ; nos 3650, 3651, 3652.
  • 26 Ibid., no 3648.
  • 27 Ibid., no 77832/3, f. 93, 94 et 95.
  • 28 Ibid., f. 97.
  • 29 Le volume contient 84 planches au lieu des 150 prévues à l’origine. Sur l’étude de Vignole réalis (...)

10Indépendamment du manque de fiabilité de telles attributions, sur lesquelles il n’y a pas lieu de s’attarder, il faut souligner que la fortune éditoriale de la Règle des cinq ordres d’architecture (1562) avait contribué à diffuser l’œuvre de son auteur parmi les étudiants de l’École des beaux-arts22. Déjà Percier déclarait être « partagé entre Vitruve et Vignole23 » ; et vingt ans environ avant les voyages de Lesueur et Blouet, Lebas et Debret avaient consacré un volume monographique aux projets de l’architecte, tentant d’en reconstruire le catalogue émilien. Les célèbres dessins du palais Bocchi à Bologne par Lebas remontent à cette période24, tandis qu’à Parme et à Piacenza – rénovées par Vignole suite à la fondation du duché des Farnèse (1545) – le même architecte représente les palais Cusani, Tarasconi25 et la maison dite « du jardinier » dans les jardins ducaux (la maison Eucherio Sanvitale), tout en mettant en doute, à raison, sa paternité (« faussement attribué à Vignole26 »). De son côté, Debret exécute une série de dessins analytiques du théâtre Farnèse de Parme27, commandité par Ranuccio Ier Farnèse et projeté par Aleotti, mais attribué à l’époque à Vignole. À Reggio Emilia, il représente la façade du palais Rangoni28, dont plusieurs phases du projet étaient attribuées depuis toujours à Vignole. Les études graphiques de Lebas et Debret témoignent de la recherche historiographique menée dans la perspective de la publication des Œuvres complètes de Jacques Barozzi de Vignole (1815) qui, à l’origine, aurait dû présenter toute l’œuvre de l’architecte, sans se limiter à Rome et au Lazio, comme ce fut le cas finalement29.

  • 30 Blouet, ENSBA, no 10637/2, f. 2,136,137,138 ; Lesueur, ENSBA, no 15469/1, f. 71-72-73.

11À la suite de Lebas et Debret, Lesueur et Blouet poursuivent l’investigation du legs vignolesque en terres émiliennes : en plus des palais ferrarais, l’un et l’autre étudient le théâtre de La Pilotta à Parme, également identifié comme issu de l’« école de Vignole »30. Chez le premier prévaut l’intérêt pour l’ornement architectonique, tandis que le second se limite à la composition et à la charpente en bois [FIG. 2 et 3].

  • 31 Percier représente la résidence des ducs, qu’il met en page avec quelques détails du palais Landi (...)
  • 32 Debret, ENSBA, no 77832/3, f. 86 ; Blouet, ENSBA, no 7739/2, f. 13.
  • 33 BIF, ms 1010, f. 224v, dessin 326.
  • 34 ENSBA, no 77832/3, f. 86. Le carnet de Debret conservé à la bibliothèque de l’ENSBA a été intégra (...)

12L’on s’étonne de l’absence, dans ces carnets, du palais Farnèse à Piacenza, le grand projet inachevé de Vignole déjà dessiné par Percier31 : une lacune d’autant plus surprenante sachant que Debret comme Blouet étaient passés par cette ville, comme le prouvent d’autres feuilles. Tous deux dessinent en effet l’église bénédictine de San Sisto32, peut-être encouragés par la généreuse attribution de Percier, lequel notait « Bramante également St. Sépulcre » à côté du plan de l’édifice33 – un commentaire repris textuellement par Debret34.

FIG. 2. Jean-Baptiste Cicéron Lesueur, « Du Théâtre della Pilotta à Parme », détails du plafond de l’entrée sous les gradins, 17 octobre 1824, mine de plomb sur papier, 12 x 18,8 cm.

FIG. 2. Jean-Baptiste Cicéron Lesueur, « Du Théâtre della Pilotta à Parme », détails du plafond de l’entrée sous les gradins, 17 octobre 1824, mine de plomb sur papier, 12 x 18,8 cm.

Paris, École nationale supérieure des beaux-arts (ENSBA), no 15469/1, F. 1,72.

FIG. 3. Guillaume Abel Blouet, « Parma. Théâtre de Vignole », 1826, mine de plomb sur papier, 19,9 x 25,4 cm.

FIG. 3. Guillaume Abel Blouet, « Parma. Théâtre de Vignole », 1826, mine de plomb sur papier, 19,9 x 25,4 cm.

Paris, École nationale supérieure des beaux-arts (ENSBA), no 10637/2, f. 136.

  • 35 Debret, ENSBA, no 77832/3, f. 73, 74, 75. L’église est aujourd’hui attribuée à Giovanni Battaggio (...)
  • 36 PC 7739-16. Le nom « casa Tracchi » indiqué par Blouet semble être une déformation du nom Trecco, (...)

13Ce dernier exemple introduit la question de l’étude du legs de Bramante, dans la vallée du Pô. Debret consacre trois feuilles – dont la précision graphique s’apparente à celle des modèles préparés pour la gravure – au sanctuaire de l’Incoronata à Lodi, projetée selon lui « par Bramante »35. À Crémone, Blouet relève la cour de la « casa Tracchi » composée sur deux registres ornés de médaillons, selon une tradition présente sur d’autres bâtiments du style de Bramante, de la maison Grifi à Milan au palais Landi à Piacenza, déjà représenté par Percier36.

  • 37 Cité dans Aline Lemonnier-Mercier, « Pierre-Adrien Pâris : Relation succincte d’un voyage de Pari (...)
  • 38 Sur la fortune d’Andrea Palladio en France, voir Garric, Recueils d’Italie, op. cit., p. 32-46.
  • 39 Elisa Boeri, L’utopia dell’antico. Il viaggio in Italia di Jean-Jacques Lequeu, Milan, Franco Ang (...)

14L’hypothèse d’un itinéraire historiographique consacré aux œuvres moins connues des maîtres de la Renaissance est confirmée par d’autres exemples. Vicence, « sanctuaire de l’architecture moderne » selon Pierre Adrien Pâris37, devait une bonne part de sa notoriété aux projets d’Andrea Palladio diffusés par I Quattro Libri dell’Architettura (1570)38. À partir de la fin du xviiie siècle, la ville devient une étape habituelle du Grand Tour. Inscrite dans l’itinéraire de Jacques Germain Soufflot et Charles Nicolas Cochin dans les années 1750, elle apparaît déjà dans le guide de ce dernier, le Voyage d’Italie ou recueil de notes sur les ouvrages de peinture et de sculpture (1758). Les architectes la connaissaient aussi grâce à Il forestiere istruito delle cose più rare di architettura, e di alcune pitture della città di Vicenza (1761) [L’étranger instruit des choses les plus rares d’architecture et de certaines peintures de la ville de Vicence] d’Ottavio Bertotti Scamozzi, dont l’emploi est même conseillé aux visiteurs étrangers par Jean Jacques Lequeu39.

  • 40 ENSBA, no 15469/1, f. 118, 119.
  • 41 BIF, no 703/2.
  • 42 Blouet, ENSBA, no 7739/2, f. 21 ; BIF, no 703/2, s. f.
  • 43 BIF, no 703/2, s. f.
  • 44 Pl. XXVI et p. 82. L’album, conservé à la BIF, collections Jacques Doucet, ms 703, rassemble une (...)

15Bien que l’œuvre de Palladio fût alors étudiée surtout du point de vue de la théorie des ordres, les marques d’intérêt pour ses projets ne manquent pas. Lesueur représente la place de la Seigneurie, sur laquelle donnent les deux édifices qui encadrent la biographie artistique de l’architecte : la Basilique, dessinée dans sa jeunesse (à partir de 1549), et la loggia del Capitaniato, construite dans ses années de maturité (1565 ?-1570/1571)40. À côté des exemples qui incarnaient les principes normatifs dans I Quattro Libri, figurent quelques édifices capables d’exprimer les préceptes palladiens à une échelle réduite. Dans le carnet de Blouet et dans un album de miscellanées41 sont représentées deux petites habitations attribuées à Palladio : la maison « in Contrà Piancoli » (ou palazzetto Dal Toso)42 et la maison Cogollo, considérée à l’époque comme la demeure de Palladio43 – cette dernière est illustrée dans Il forestiero de Bertotti Scamozzi, qui vente sa « magnifique structure »44 [FIG. 4].

FIG. 4. Guillaume Abel Blouet, « Vicence, petite maison près du pont St Michel » (palazzetto Dal Toso), 1826, mine de plomb sur papier, 18,7 x 11,4 cm.

FIG. 4. Guillaume Abel Blouet, « Vicence, petite maison près du pont St Michel » (palazzetto Dal Toso), 1826, mine de plomb sur papier, 18,7 x 11,4 cm.

Paris, École nationale supérieure des beaux-arts (ENSBA), no 7739/2, f. 21.

  • 45 Lesueur, ENSBA, no 15469/1, f. 1, 132.
  • 46 BIF, no 703/2, section Brescia, s. f. Le dessin de la palazzina Lana compris dans l’album no 703 (...)

16La recherche des protagonistes du Cinquecento passe également par Brescia, ville dont l’architecture résonne de l’écho de la Sérénissime. Les architectes du xixe siècle y dessinent la loggia, dont l’attribution varie de Palladio à Jacopo Tatti, dit Sansovino45, ainsi que les façades de la palazzina Lana et du palais Uggeri, données respectivement à Palladio et Vignole46 [FIG. 5].

FIG. 5. Jean-Aimé Montier (ou Moutier) (?), « Maison attribuée à Palladio rue St Agathe à Brescia » (palazzina Lana), plume et mine de plomb sur papier, 21,2 x 33 cm.

FIG. 5. Jean-Aimé Montier (ou Moutier) (?), « Maison attribuée à Palladio rue St Agathe à Brescia » (palazzina Lana), plume et mine de plomb sur papier, 21,2 x 33 cm.

Paris, École nationale supérieure des beaux-arts (ENSBA), no 703/2, s. f.

  • 47 Francesca Cargnoni, « Mantova nel Grand Tour », Bollettino del CIRVI (Centro interuniversitario d (...)
  • 48 BIF, no 1018. Sur les dessins de Percier dédié au palais du Tè, voir Amedeo Belluzzi, « Palazzo T (...)

17Un cas particulier est représenté par Mantoue, ex-capitale d’une petite cour, qui avait conquis une notoriété européenne grâce à la présence d’artistes de la stature d’Andrea Mantegna, Leon Battista Alberti ou Jules Romain. Bien qu’enclavée, la ville était devenue une destination fréquentée depuis le xviiie siècle47. Si l’œuvre d’Alberti y passait presque inaperçue, le palais du Tè, chef-d’œuvre inégalé du disciple de Raphaël, était l’objet de commentaires, de dessins et de relevés de la part des artistes et des antiquaires. Percier en démontre l’importance en exécutant une série d’études sur la composition et le décor du monument, légué à l’un de ses élèves, Auguste Caristie48.

  • 49 Lebas, Debret, Blouet et Lesueur passent pourtant par Mantoue.
  • 50 Amedeo Belluzzi, Palazzo Te a Mantova, vol. 1, Essais, Modène, Panini, 1998, p. 248.
  • 51 Aubin Louis Millin, Voyage dans le Milanais, à Plaisance, Parme, Modène, Mantoue, Crémone, et dan (...)
  • 52 Lesueur, ENSBA, no 15469/1, f. 96 ; Blouet, ENSBA, no 7739/2, f. 18.
  • 53 Blouet, ENSBA, no 7739/2, f. 19 et 20.

18Parmi les auteurs des carnets pris en compte dans cette recherche, aucun cependant ne s’intéresse à l’ancienne résidence des Gonzague49. L’absence du palais du Tè peut s’expliquer par les circonstances : à partir du xixe siècle, l’édifice est constamment soumis à des travaux de restauration et de conservation, qui comprennent parfois des interventions invasives – comme la remise en eau des viviers, réalisée entre 1812 et 1813 – qui en limitaient l’accessibilité50. À cette époque, le palais du Tè sombrait dans un état de dégradation généralisée, si l’on en croit Aubin Louis Millin, scientifique et antiquaire, qui le dénonce amèrement, espérant que l’empereur d’Autriche en relèvera la ruine51. Le passage à Mantoue laisse de maigres traces dans les carnets de Lesueur et Blouet, qui représentent la coupe et le plan de la cathédrale, restaurée par Romain après un incendie advenu en 154552. Blouet la rapproche de l’autre grande église mantouane de la Renaissance, Sant’Andrea d’Alberti, dont il exécute un dessin de la crypte et une vue perspective de la façade53.

L’utilisation des modèles mineurs : représentation, pédagogie et historiographie

  • 54 Lesueur, ENSBA, no 15469/1, f. 105, 106, 107.
  • 55 Ibid., f. 80.
  • 56 Ibid., f. 75.

19Les considérations qui se dégagent de l’enquête comparée et détaillée de ces carnets conduisent à esquisser quelques hypothèses. Du point de vue de la typologie, pour les sujets, les palais l’emportent sur les églises, qui prennent toutefois davantage d’importance en y incluant les œuvres de l’époque médiévale. D’un point de vue technique, les édifices sont principalement représentés par des projections orthogonales, sans que les plans ne tiennent la position dominante qui est la leur dans les études de Percier et Fontaine : il existe en fait une répartition égale entre ceux-ci et les façades, qui s’accompagne d’une utilisation moindre des coupes. L’emploi de la perspective est limité à quelques vues urbaines (la place de la Seigneurie de Vicence ou la rue degli Angeli de Ferrare54) ou encore quelques monuments (l’arc del Cavallo à Ferrare55), qui pouvaient être mis en relief par une vue en trois dimensions. Bien qu’il y ait quelques cas de corrections ou de modifications du sujet, le réalisme prévaut sur l’invention. Lesueur, par exemple, réduit le nombre de travées du palais Paradiso, siège de la bibliothèque de Ferrare56 ; mais il s’agit d’épisodes isolés, lesquels ne permettent pas de reconnaître cette pratique de libre interprétation qui caractérise certains travaux graphiques de Percier.

20Les notations des architectes témoignent d’intérêts qui varient. Blouet et Lesueur se montrent attentifs aux détails. Certains édifices font l’objet d’analyses méticuleuses – comme le théâtre de La Pilotta à Parme –, bien que leurs dessins n’aient pas la qualité de ceux de Lebas et Debret, en partie en raison des dimensions plus réduites du support. D’autres bâtiments sont traités rapidement. La disparité quantitative et l’attention plus ou moins poussée peuvent découler, soit de l’importance reconnue à une œuvre en particulier, soit de facteurs pratiques, comme la possibilité de la visiter. Ainsi pourrait s’expliquer l’absence de détails relatifs aux espaces intérieurs de certains palais, qui tranche avec l’étude soignée des façades, des cours et des escaliers, accessibles facilement.

  • 57 Sur ce projet non réalisé de publication monographique, voir Garric « Percier e i portici dello “ (...)
  • 58 Les thèmes des cours dispensés par Lesueur à partir de 1852 sont conservés aux Archives nationale (...)

21Il est plus difficile, au stade actuel de notre recherche, de comprendre de quelle façon l’observation de ces édifices a pu se répercuter sur des projets, dans la théorie ou la pédagogie. Les sujets examinés ne donnent pas lieu à des productions éditoriales, le nombre réduit de dessins consacrés à chaque ville ne permettant pas de jeter les bases de collections destinées à l’impression. En ce sens, seule Bologne suscite un matériau suffisant (environ 130 dessins) pour préparer un ouvrage monographique, qui aurait pu poursuivre les études thématiques entreprises par les élèves de Percier et Fontaine, mais qui ne vit jamais le jour57. Les modèles tirés de la Renaissance mineure ne refont pas surface parmi les références de projets proposées par Lesueur et Blouet pendant leurs cours à l’École des beaux-arts, tournés plutôt vers les œuvres exemplaires du Cinquecento, comme le tempietto de San Pietro in Montorio à Rome – une question qui mériterait davantage d’approfondissements58.

  • 59 Sur les guides français dédiés aux villes italiennes, voir François Brizay, « La présentation de (...)
  • 60 La définition est tirée de Marco Cuaz, « Guides de voyage et image des nations : l’Italie au xvii (...)

22Parmi les motivations qui guident la main des architectes, il existe bien un intérêt historiographique. ceux-ci paraissent avoir cherché dans la Renaissance mineure le reflet des modèles monumentaux, en s’aidant des outils utilisés pour définir leurs itinéraires. Outre les livres d’architecture évoqués en ouverture, il n’est pas inutile de rappeler qu’entre 1595 et 1713 sont rédigés en France 38 guides d’Italie, dont 22 se rapportent à une seule ville, ou à une aire circonscrite, et parmi ceux-ci sept à Rome59. Un tel bilan, indice de la hiérarchie à laquelle était soumise la lecture de la Renaissance italienne, était sans doute compensé par l’atmosphère culturelle où baignaient les leçons tenues à l’École des beaux-arts. Dans les carnets cohabitent des architectures diverses, par leurs époques, leurs styles, leurs dimensions, à même d’illustrer la continuité avec l’approche de Percier, mais aussi la composante impromptue non négligeable qui caractérise le voyage. Nul doute que l’étude des modèles « périphériques » de la Renaissance se présente comme un chapitre secondaire, par rapport à celui des grands paradigmes. Pourtant, cette série de dessins apparaît numériquement pertinente au sein des carnets, montrant la diversification des thèmes historiographiques liée à cette époque artistique, conforme à la « géographie de la différence » que les Français identifiaient dans la péninsule60 [FIG. 6].

FIG. 6. Comparaison entre le nombre de dessins consacrés à la Renaissance mineure et le nombre global de dessins qui composent les carnets étudiés. Calculs de l’auteure.

FIG. 6. Comparaison entre le nombre de dessins consacrés à la Renaissance mineure et le nombre global de dessins qui composent les carnets étudiés. Calculs de l’auteure.

*

  • 61 Garric, « Comprendre la Renaissance… », art. cité, p. 93.

23Dans les carnets se recomposent les différentes personnalités des voyageurs, sensibilisés aux thèmes par leurs études antiquaires, théoriques et constructives. Ces prémices nourrissent la curiosité pour les œuvres mineures de la Renaissance, même si, à l’heure actuelle, il n’est pas possible de reconnaître une recherche systématique sur les modèles relevant de cette catégorie épistémologique, laquelle, précisément en raison de la variété formelle et chronologique des sujets qui la composent, présente encore des contours peu définis. Ce constat ne diminue cependant pas l’importance historique de ces témoignages graphiques. De ce point de vue, la différence peut-être la plus significative s’observe avec les études de Percier et Fontaine, dans lesquelles l’invention au service du projet prévaut sur la vérité archéologique61. De l’analyse du choix des sujets dessinés dans les carnets du xixe siècle, ressort la volonté de leurs auteurs de documenter les édifices des xve et xvie siècles peu présents dans les livres d’architecture, ce qui démontre une fois de plus la complémentarité entre les matériaux manuscrits et les volumes imprimés. Les élèves de l’École des beaux-arts ont fidèlement fixé l’apparence de certaines œuvres de la vallée du Pô avant que les restaurations et les destructions survenues au xxe siècle ne les transforment radicalement. Ce choix, dont on ne pouvait prévoir le potentiel, s’avère désormais avant-gardiste, nombre des bâtiments évoqués dans ces pages attendant toujours d’être soumis à des interprétations critiques actualisées.

Notes

1 Nous nous limitons à signaler quelques contributions récentes : Frédérique Lemerle, Yves Pauwels, Alice Thomine-Berrada (dir.), Le xixe siècle et l’architecture de la Renaissance, colloque international, Tours et Blois, 30 mai-1er juin 2007, Paris, Picard, 2010 ; Yves Pauwels, « L’héritage de la Renaissance en France aux xviie et xviiie siècles », dans Jean-Philippe Garric, Frédérique Lemerle, Yves Pauwels (dir.), Architecture et théorie. L’héritage de la Renaissance, actes de colloque, Paris, Publications de l’INHA, 2012, n. p. ; Sabine Frommel et Antonio Brucculeri (dir.), Renaissance italienne et architecture au xixe siècle. Interprétations et restitutions, Rome, Campisano, 2015. Pour une lecture transdisciplinaire de l’usage de la Renaissance au xixe siècle, voir Lina Bolzoni et Alina A. Payne (dir.), The Italian Renaissance in the 19th Century: Revision, Revival, and Return, Milan, Officina Libraria, 2018.

2 Sur les livres français d’architecture, voir Béatrice Bouvier et Jean-Michel Leniaud (dir.), Le livre d’architecture xve-xxe siècles, Paris, Publications de l’École nationale des chartes, 2002 ; Jean-Philippe Garric, Recueils d’Italie. Les modèles italiens dans les livres d’architecture français, Sprimont, Mardaga, 2004.

3 Sur la définition des modèles aristocratiques par Charles Percier et Pierre Fontaine, voir Garric, Recueils d’Italie, op. cit., p. 127-164, ainsi que la bibliographie. Pour les éditions contemporaines des livres en question, voir Charles Percier et Pierre Fontaine, Palais de Rome. Palais, maisons et autres édifices modernes dessinés à Rome, présenté par Jean-Philippe Garric, Wavre/Paris, Mardaga/INHA, 2008 ; Villas de Rome. Choix des plus célèbres maisons de plaisance de Rome et de ses environs de Percier et Fontaine, reproduction intégrale de l’édition de 1809, présentée par Jean-Philippe Garric, Wavre, Mardaga, 2006.

4 Il s’agit des portraits de Bramante, Baldassare Peruzzi, Antonio da Sangallo le Jeune, Vignole, Bartolomeo Ammanati et Domenico Fontana. Sur la vision de la Renaissance par Percier et Fontaine, voir Jean-Philippe Garric, « Comprendre la Renaissance dans un processus de projet : le Choix des plus célèbres maisons de plaisance de Rome et de ses environs de Percier et Fontaine », dans Lemerle, Pauwels et Thomine-Berrada, Le xixe siècle et l’architecture de la Renaissance, op. cit., p. 81-93 ; id., « La Renaissance perfectionnée : le Cinquecento dans Palais, maisons et autres édifices modernes dessinés à Rome de Charles Percier et Pierre Fontaine », Ricerche di storia dell’arte, 105, 2011, p. 25-41.

5 Jean Nicolas Louis Durand, Recueil et parallèle des édifices de tout genre anciens et modernes, Paris, J.-G. Gillé, 1799 ; François Léonard Séheult, Recueil d’architecture, dessiné et mesuré en Italie, dans les années 1791, 92 et 93 […], Paris, Bance aîné, 1821 (réédition au xxe siècle dans le contexte de l’École des beaux-arts par l’atelier Patouillard-Demoriane : Les petites maisons d’Italie. Recueil dessiné et mesuré en Italie dans les années MDCC, XCI, XCII, XCIII, Paris, Vincent Fréal, 1936) ; Charles Pierre Joseph Normand, Recueil varié de plans et de façades de maisons de ville et de campagne, de monumens, et établissemens publics et particuliers…, Paris, Gillé, 1815. Sur la démocratisation de la vision de l’architecture, voir Garric, Recueils d’Italie, op. cit., p. 165 et suiv.

6 Pour une confrontation entre l’approche de Durand et de Percier à travers l’analyse de leurs publications et de leurs approches pédagogiques, voir Jean-Philippe Garric, « Durand ou Percier ? Deux approches du projet d’architecture au début du xixe siècle », dans Bibliothèques d’atelier. Édition et enseignement de l’architecture, Paris 1785-1871, Paris, Publications de l’INHA, 2011. On dispose désormais d’un document attestant que Durand ne visita pas l’Italie : voir Giusi Perniola, « La gerarchia dei monumenti da osservare. Indagini su Roma dai diari di Hubert Rohault de Fleury, 1803-1804 », dans Jean-Philippe Garric, Susanna Pasquali et al. (dir.), Roma nell’Europa napoleonica, 1800-1820, Rome, Officina Libraria, à paraître, note 24.

7 Jean-Philippe Garric, « Percier e i portici dello “stile Bologna” », dans Sabine Frommel, Jean-Philippe Garric, Simone Sirocchi (dir.), I disegni di Charles Percier, 1764-1838: Emilia e Romagna nel 1791, Rome, Campisano editore, 2016, p. 47-53. Les dessins de Percier regroupés dans 15 volumes sont conservés à la Bibliothèque de l’Institut de France (BIF).

8 La lettre conservée à la Fondation Getty est citée dans Annie Jacques, « I viaggi in Italia di Debret e Lebas (1804-1811) », dans Cesare De Seta (dir.), Grand Tour. Viaggi narrati e dipinti, Naples, Electa Napoli, 2001, p. 60-73, citation p. 68.

9 Sur Auguste Grandjean de Montigny et Auguste Famin, voir Antonio Brucculeri, « Représentations et transferts de l’architecture de la Renaissance toscane dans l’œuvre des pensionnaires de l’Académie de France au seuil du xixe siècle », dans Sabine Frommel et Eckhard Leuschner (dir.), Gravures d’architecture et d’ornement au début de l’époque moderne. Processus de migration en Europe / Ornamentgraphik der frühen Neuzeit: Migrationsprozesse in Europa, Rome, Campisano, 2014, p. 360-364 ; id., « La Toscana di Grandjean e il viaggio in Italia degli architetti francesi tra fine Settecento e inizio Ottocento », dans Mario Bevilacqua (dir.), Tra Firenze e Rio. Auguste Grandjean de Montigny e la riscoperta dell’architettura del Rinascimento toscano (https://mostre.sba.unifi.it/architecture-toscane/it/100/home-mostra, consulté le 30 septembre 2020).

10 À propos des publications des imitateurs de Percier et Fontaine et sur Martin Pierre Gauthier, voir Garric, Recueils d’Italie, op. cit., p. 146-159.

11 Ibid., p. 213.

12 Dans les mêmes années paraît le volume de Leopoldo Cicognara, Antonio Diedo et Giannantonio Selva, Le fabbriche più cospicue di Venezia misurate, illustrate, ed intagliate dai membri della Veneta reale accademia di belle arti, Venise, Alvisopoli, 1815-1820. Voir Garric, Recueils d’Italie, op. cit., p. 153.

13 Pour les biographies de ces personnages, voir Émile Bellier de la Chavignerie et Louis Auvray, Dictionnaire général des artistes de l’École française depuis l’origine des arts du dessin jusqu’à nos jours, 2 vol., Paris, Renouard, 1882-1885 ; Louis Thérèse David de Penanrun, Edmond Augustine Delaire, François Roux, Les architectes élèves de l’École des Beaux-Arts, 1793-1907, Paris, Librairie de La Construction moderne, 1907 ; Adolphe Lance, Dictionnaire des architectes français, Paris, Morel, 1872 ; Charles Bauchal, Nouveau dictionnaire biographique et critique des architectes français, Paris, Librairie générale de l’architecture et des travaux publics, 1887 ; Charles de Franqueville, Le premier siècle de l’Institut de France, t. 1, Paris, Rothschild, 1895. Sur la biographie et la formation de Guillaume Abel Blouet, voir Fabienne Doulat, « Guillaume Abel Blouet, du village de Passy aux côtes de Morée, exemplarité ou exception du parcours intellectuel et artistique d’un enfant du peuple », Livraisons d’histoire de l’architecture, 5, 2003, p. 67-83. Sur les voyages en Italie de François Debret et Louis Hyppolyte Lebas, voir Jacques, « I viaggi in Italia di Debret e Lebas », art. cité.

14 Dans les carnets étudiés, les édifices de Ferrare construits au xve ou au xvie siècle sont au nombre de seize.

15 La visite de Percier est documentée par deux feuillets, sur lesquels sont dessinés le cloître du couvent de San Benedetto et le portail du palazzo Castello. Sur les dessins de Percier dédiés à Ferrare, voir Carlo Mambriani, fiches 61 et 62, dans Frommel, Garric, Sirocchi (dir.), I disegni di Charles Percier, op. cit., p. 163-165. Pour un examen des édifices ferrarais de la Renaissance représentés au xixe siècle, voir Francesca Mattei, « Quelques dessins inédits du palais des Diamants de Ferrare : lecture et fortune en France de la Renaissance au temps des ducs d’Este », Revue de l’art, 195, 2017, p. 71-77.

16 Durant son Grand Tour en Italie, Jean-Baptiste Cicéron Lesueur remplit sept carnets, tandis que Blouet en produit cinq, tous conservés à Paris, au service des collections de l’École nationale supérieure des beaux-arts (ENSBA), et numérisés. Le carnet de Lesueur qui contient les dessins commentés ici s’intitule Voyage en Italie : De Rome à Paris, no 15469. Leur ordre actuel ne correspond pas à celui d’origine, en partie restituable grâce aux dates notées sur les feuillets. Les dessins de Blouet commentés ici figurent quant à eux dans les carnets : Ensemble de dessins de Rome, réalisés de retour à Paris, no 10637/2 et no 7739/2.

17 ENSBA, no 15469/1, f. 1,83.

18 « Ce palais a été bâti vers le milieu du xvie siècle, par J.-M. Crespi : la pierre et la brique y sont employées avec tant d’art, qu’il paroît être nouvellement construit. » Pierre Clochar, Palais, maisons et vues d’Italie, mesurés et dessinés, Paris, 1809.

19 ENSBA, no 15469/1, f. 1,84 ; f. 1,78 ; f. 1,75.

20 Ibid., f. 1,81 ; f. 1,83.

21 David R. Coffin, « Some Architectural Drawings of Giovan Battista Aleotti », Journal of the Society of Architectural Historians, 21, 1962, p. 116-128. Sur les relations entre Giovanni Battista Aleotti et Vignole, voir aussi Francesca Mattei, « Giambattista Aleotti (1546-1636) e la Regola di Jacopo Barozzi da Vignola della Biblioteca Ariostea di Ferrara (ms. Cl. I, 217) », Annali di architettura, 22, 2010, p. 101-123.

22 Sur la tradition française de la Règle des cinq ordres d’architecture de Vignole, voir Frédérique Lemerle, « Vitruve, Vignole, Palladio au xviie siècle : traductions, abrégés et augmentations », dans Garric, Lemerle, Pauwels (dir.), Architecture et théorie, op. cit. ; Garric, Recueils d’Italie, op. cit., p. 49.

23 Cité dans Désiré Raoul-Rochette, « Percier. Sa vie et ses ouvrages », Revue des deux mondes, 24, 1840, p. 246-268.

24 ENSBA, nos 3626, 3627, 3628, 3629.

25 Ibid., no 3643 ; nos 3650, 3651, 3652.

26 Ibid., no 3648.

27 Ibid., no 77832/3, f. 93, 94 et 95.

28 Ibid., f. 97.

29 Le volume contient 84 planches au lieu des 150 prévues à l’origine. Sur l’étude de Vignole réalisée par Debret et Lebas durant leurs voyages en Italie, voir Giovanna D’Amia, « I disegni di L. H. Lebas, storiografo di Vignola », Il disegno di architettura, 33, 2007, p. 34-38 ; Jacques, « I viaggi in Italia di Debret e Lebas », art. cité.

30 Blouet, ENSBA, no 10637/2, f. 2,136,137,138 ; Lesueur, ENSBA, no 15469/1, f. 71-72-73.

31 Percier représente la résidence des ducs, qu’il met en page avec quelques détails du palais Landi. Voir Carlo Mambriani, fiche 69, dans Frommel, Garric, Sirocchi (dir.), I disegni di Charles Percier, op. cit., p. 171. Dans le même volume, voir également id., « Attrattive dei ducati parmensi per gli architetti francesi del secondo Settecento: il caso di Percier e Fontaine », p. 41-53.

32 Debret, ENSBA, no 77832/3, f. 86 ; Blouet, ENSBA, no 7739/2, f. 13.

33 BIF, ms 1010, f. 224v, dessin 326.

34 ENSBA, no 77832/3, f. 86. Le carnet de Debret conservé à la bibliothèque de l’ENSBA a été intégralement numérisé. L’église est aujourd’hui unanimement attribuée à Alessio Tramello (avant 1470-1528/1529), voir Bruno Adorni, Alessio Tramello, Milan, Electa, 1998, p. 41-49.

35 Debret, ENSBA, no 77832/3, f. 73, 74, 75. L’église est aujourd’hui attribuée à Giovanni Battaggio (avant 1445-?). Voir Luisa Giordano, « Giovanni Battaggio e l’Incoronata: per la storia architettonica dell’Incoronata; documenti e analisi », dans Le stagioni dell’incoronata 1488-1988, Lodi, Tipo-Lito Senzalari, 1988, p. 61-101.

36 PC 7739-16. Le nom « casa Tracchi » indiqué par Blouet semble être une déformation du nom Trecco, la famille de Crémone propriétaire du palais homonyme. La confrontation de la version de Blouet avec l’édifice révèle toutefois des différences significatives concernant l’appareil décoratif en terre cuite, en particulier les thèmes de la frise. Le développement sur deux registres et la proportion de la loggia rappellent plutôt la cour du palais Fodri, toujours à Crémone, même si le sujet représenté ne correspond pas non plus à cette seconde construction, demeurant à ce stade dépourvu d’identification certaine. À propos du dessin de Percier dédié au palais Landi, voir supra la note 31.

37 Cité dans Aline Lemonnier-Mercier, « Pierre-Adrien Pâris : Relation succincte d’un voyage de Paris à Rome par les parties septentrionale et orientale de l’Italie pendant les mois de mai, juin, juillet 1810 », dans Véronique Meyer et Marie-Luce Pujalte-Fraysse (dir.), Voyage d’artistes en Italie du nord (xvie-xixe siècles), Rennes, PUR, 2010, p. 207-219, 259.

38 Sur la fortune d’Andrea Palladio en France, voir Garric, Recueils d’Italie, op. cit., p. 32-46.

39 Elisa Boeri, L’utopia dell’antico. Il viaggio in Italia di Jean-Jacques Lequeu, Milan, Franco Angeli, 2019, p. 87.

40 ENSBA, no 15469/1, f. 118, 119.

41 BIF, no 703/2.

42 Blouet, ENSBA, no 7739/2, f. 21 ; BIF, no 703/2, s. f.

43 BIF, no 703/2, s. f.

44 Pl. XXVI et p. 82. L’album, conservé à la BIF, collections Jacques Doucet, ms 703, rassemble une série de dessins réalisés par différents auteurs sur des feuilles de petites dimensions. La lettre « V » apposée sur la feuille suggère que l’auteur pourrait être Henri Van Cléemputte, parmi les auteurs des dessins reliés dans l’album avec Antoine Marie Chenavard, Jean Aimé Montier (ou Moutier), François Alexandre Duquesnoy.

45 Lesueur, ENSBA, no 15469/1, f. 1, 132.

46 BIF, no 703/2, section Brescia, s. f. Le dessin de la palazzina Lana compris dans l’album no 703 conservé à la BIF est daté de 1816. La lettre « M » apposée sur la feuille suggère que l’auteur pourrait être Jean Aimé Montier (ou Moutier). Pour les hypothèses d’attribution récentes des deux palais, voir Irene Giustina et Elisa Sala, « Palazzi bresciani del secondo Cinquecento. Una nuova schedatura critica », dans Filippo Piazza (dir.), Brescia nel secondo Cinquecento: architettura, arte e società, Brescia, Ateneo di Brescia, Accademia di scienze, lettere ed arti, 2016.

47 Francesca Cargnoni, « Mantova nel Grand Tour », Bollettino del CIRVI (Centro interuniversitario di ricerche sul viaggio in Italia), 28/56, 2007, p. 209-260.

48 BIF, no 1018. Sur les dessins de Percier dédié au palais du Tè, voir Amedeo Belluzzi, « Palazzo Te nei disegni di Charles Percier », dans Sabine Frommel, Jean-Philippe Garric, Élisabeth Kieven (dir.), Charles Percier e Pierre Fontaine, Milan, Silvana, 2014, p. 73-83 ; id., « Schizzi mantovani di Percier », dans Frommel, Garric, Sirocchi (dir.), I disegni di Charles Percier, op. cit., p. 101-108.

49 Lebas, Debret, Blouet et Lesueur passent pourtant par Mantoue.

50 Amedeo Belluzzi, Palazzo Te a Mantova, vol. 1, Essais, Modène, Panini, 1998, p. 248.

51 Aubin Louis Millin, Voyage dans le Milanais, à Plaisance, Parme, Modène, Mantoue, Crémone, et dans plusieurs autres villes de l’ancienne Lombardie, Paris, 1817, p. 274, cité dans Belluzzi, Palazzo…, op. cit., p. 249.

52 Lesueur, ENSBA, no 15469/1, f. 96 ; Blouet, ENSBA, no 7739/2, f. 18.

53 Blouet, ENSBA, no 7739/2, f. 19 et 20.

54 Lesueur, ENSBA, no 15469/1, f. 105, 106, 107.

55 Ibid., f. 80.

56 Ibid., f. 75.

57 Sur ce projet non réalisé de publication monographique, voir Garric « Percier e i portici dello “stile Bologna” », art. cité, p. 53.

58 Les thèmes des cours dispensés par Lesueur à partir de 1852 sont conservés aux Archives nationales, ENSBA, AJ52 128, 129, 130, 134, 143, 144, 145.

59 Sur les guides français dédiés aux villes italiennes, voir François Brizay, « La présentation de l’Italie dans les guides imprimés en français au xviie siècle », dans Gilles Chabaud et Évelyne Cohen (dir.), Les guides imprimés du xvie au xxe siècle. Villes, paysages, voyages, Paris, Belin, 2000, p. 359-376 ; Gilles Bertrand, « Voyage et lectures de l’espace urbain. La mise en scène des villes renaissantes et baroques dans les guides en langue française pour l’Italie au xviiie siècle », Histoire urbaine, 2, 2005, p. 121-153.

60 La définition est tirée de Marco Cuaz, « Guides de voyage et image des nations : l’Italie au xviiie siècle », dans Chabaud et Cohen (dir.), Les guides imprimés du xvie au xxe siècle, op. cit., p. 587-597, p. 591.

61 Garric, « Comprendre la Renaissance… », art. cité, p. 93.

Table des illustrations

Titre FIG. 1. Voyageurs dans l’Italie septentrionale. Chaque hexagone correspond à un architecte.
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Titre FIG. 2. Jean-Baptiste Cicéron Lesueur, « Du Théâtre della Pilotta à Parme », détails du plafond de l’entrée sous les gradins, 17 octobre 1824, mine de plomb sur papier, 12 x 18,8 cm.
Crédits Paris, École nationale supérieure des beaux-arts (ENSBA), no 15469/1, F. 1,72.
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Titre FIG. 3. Guillaume Abel Blouet, « Parma. Théâtre de Vignole », 1826, mine de plomb sur papier, 19,9 x 25,4 cm.
Crédits Paris, École nationale supérieure des beaux-arts (ENSBA), no 10637/2, f. 136.
URL http://books.openedition.org/psorbonne/docannexe/image/108479/img-3.jpg
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Titre FIG. 4. Guillaume Abel Blouet, « Vicence, petite maison près du pont St Michel » (palazzetto Dal Toso), 1826, mine de plomb sur papier, 18,7 x 11,4 cm.
Crédits Paris, École nationale supérieure des beaux-arts (ENSBA), no 7739/2, f. 21.
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Titre FIG. 5. Jean-Aimé Montier (ou Moutier) (?), « Maison attribuée à Palladio rue St Agathe à Brescia » (palazzina Lana), plume et mine de plomb sur papier, 21,2 x 33 cm.
Crédits Paris, École nationale supérieure des beaux-arts (ENSBA), no 703/2, s. f.
URL http://books.openedition.org/psorbonne/docannexe/image/108479/img-5.jpg
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Titre FIG. 6. Comparaison entre le nombre de dessins consacrés à la Renaissance mineure et le nombre global de dessins qui composent les carnets étudiés. Calculs de l’auteure.
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Auteur

Francesca Mattei, architecte et historienne, est professeure agrégée d’histoire de l’architecture à l’Universitá Roma Tre. Ses recherches ont été soutenues par de nombreuses bourses, parmi lesquelles celle de l’Alexander von Humboldt Stiftung, de l’Institut national d’histoire de l’art de Paris, de l’Herzog August Bibliothek Wolfenbüttel. Ses travaux portent principalement sur l’architecture de la Renaissance et sur les dessins d’architecture. Elle est l’auteure de nombreuses publications dont Eterodossia e vitruvianesimo. Palazzo Naselli Crispi a Ferrara (1527-1538) (Campisano, 2013) et Architettura e committenza intorno ai Gonzaga. Modelli, strategie, intermediari (1510-1550) (Campisano, 2019).

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