Chapitre 4. Une production urbaine entre privatisation et marginalisation
p. 125-151
Texte intégral
1La production immobilière contemporaine à Phnom Penh ne s’inscrit pas, du moins en apparence, dans une planification urbaine effective, même si de grands progrès ont été réalisés dans la gestion du développement urbain depuis les années 1990. Les profondes transformations des territoires illustrent en ce sens la prévalence de l’accumulation de capitaux immobiliers sur la construction d’espaces urbains inclusifs : tout porte à croire que l’activité immobilière met largement à mal la nécessaire mise en place d’une planification urbaine et d’un urbanisme réglementaire qui profiteraient à l’ensemble des citadins.
2Phnom Penh représente cependant un cas exceptionnel. L’urbicide perpétré par les Khmers rouges, ainsi que l’assassinat des anciens fonctionnaires d’État et des élites se sont traduits par une perte des savoirs et connaissances urbanistiques. La lente mais indispensable reconstitution des outils de la planification à Phnom Penh rompt avec la rapidité de la spéculation foncière et avec les stratégies de métropolisation adoptées par les autorités cambodgiennes. Par ailleurs, la planification urbaine est largement tributaire de l’importante libéralisation de l’environnement économique à partir des années 1990 et de la diffusion de conceptions néolibérales du rôle de l’État dans la gestion des affaires économiques et institutionnelles du pays et de sa capitale. Il apparaît en ce sens nécessaire de mettre en perspective les dynamiques de gestion des processus d’urbanisation avec celles de la planification économique et institutionnelle au Cambodge depuis le début des années 1990. Dans cette optique, la marginalisation d’une partie importante de la population urbaine semble être une conséquence, parfois indirecte, des idéologies économiques qui structurent le processus de métropolisation à Phnom Penh.
Une planification mise à mal par les intérêts privés
Une planification urbaine en reconstruction
3Parallèlement à la réorganisation du commerce de biens fonciers et, plus généralement, de la production, de l’acquisition et de l’échange de biens immobiliers, les accords de Paris de 1991 (voir le chapitre 1) signent le retour de la coopération en matière d’aménagement et d’urbanisme. Au-delà de l’impérative nécessité d’encadrer la croissance urbaine de la capitale, qui progresse de manière exponentielle depuis la fin des années 1980, Phnom Penh devient dès le début des années 1990 le centre de synergie du développement industriel et commercial du pays. Depuis les années 1990, le processus de métropolisation procède cependant d’une situation de « dépendance » de l’économie cambodgienne vis-à-vis des investissements étrangers (principalement régionaux) et de l’aide au développement. En proposant la notion de « métropolisation dépendante », Charles Goldblum démontre bien comment l’aménagement urbain, qui doit garantir et favoriser le processus de métropolisation, est paradoxalement remis en cause par les fondements mêmes de ce dernier :
Ce qui relève des conditions instauratrices du fonctionnement urbain (mise en place des institutions en charge de la politique urbaine ou d’un aspect sectoriel de celle-ci, élaboration d’une réglementation urbaine ou de documents d’urbanisme, formalisation du marché foncier et immobilier urbain avec établissement d’un cadastre…) interfère avec les conditions de mise aux normes métropolitaines. […] Face aux effets combinés des investissements directs étrangers et des grandes manœuvres supranationales d’une mondialisation régionalisée, orchestrant – dans un climat fortement spéculatif – la mise en place des infrastructures d’une « métropolisation dépendante », ce qui est ici en question, ce ne sont pas seulement les aléas relatifs aux processus d’internationalisation de l’économie et de la production urbaine, mais bien la capacité du Cambodge, dans sa phase de reconstruction actuelle, de tenir ensemble la construction d’un État de droit moderne et la production spatialement et institutionnellement maîtrisée d’une capitale sud-est asiatique1.
4Si la notion de dépendance permet effectivement de rendre compte, à petite échelle, de la faible marge de manœuvre dont disposent les autorités locales pour réellement prendre en main le processus de métropolisation, elle peine à expliquer l’articulation difficile entre les dynamiques de la planification urbaine et le faible contrôle exercé par les autorités locales sur les marchés fonciers et la production immobilière à Phnom Penh. Plus spécifiquement, la notion de domination, qui constitue le cœur des théories de la dépendance au sein des études du développement2, ne dit en rien pourquoi les ambitions de développement économique de l’État cambodgien ne se traduisent pas par une planification plus efficace et mieux contrôlée du développement urbain de la capitale, alors même que les compétences et savoir-faire locaux en matière d’aménagement et d’urbanisme se sont largement consolidés depuis les années 1980.
5Par-delà la notion de dépendance, nous émettrons ici l’hypothèse que les modalités de la métropolisation de Phnom Penh sont tributaires des réformes politico-économiques engagées depuis les accords de Paris en 1991, mais aussi de stratégies économiques, politiques, professionnelles et institutionnelles complexes, structurées par des rapports de force entre les acteurs de la planification urbaine, qu’ils soient canbodgiens ou étrangers, institutionnels ou privés. Nous pensons finalement que le secteur immobilier et la question foncière représentent les enjeux centraux sur lesquels achoppent une partie importante des initiatives de planification urbaine à Phnom Penh.
6L’Organisation des nations unies (ONU) mandate dès 1991 la France pour exécuter des missions exploratoires afin d’estimer les priorités de la reconstruction de la capitale. L’Atelier parisien d’urbanisme (Apur), l’Institut d’aménagement et d’urbanisme de la région Île-de-France (IAURIF) et la mairie de Paris sont les principaux acteurs français en matière de coopération urbaine de 1991 à 2009. La collaboration entre la mairie de Paris et la municipalité de Phnom Penh permet la création en 1996 du Bureau des affaires urbaines (BAU), installé à la municipalité. Le BAU fait office de cabinet de conseil pour l’aménagement de la ville ; il peut être sollicité pour divers projets et passer des appels d’offres. La publication de nombreux ouvrages témoigne des divers programmes de coopération décentralisée qui se sont succédé entre 1994 et 20093. Les travaux de l’Apur à Phnom Penh abordent de nombreuses thématiques, comme le patrimoine urbain, la rénovation du réseau d’assainissement, les transports, l’urbanisme réglementaire, l’habitat ou encore les espaces verts.
7Un fonds de solidarité prioritaire lancé par le ministère français des Affaires étrangères finance entre 2002 et 2005 l’élaboration du schéma directeur de Phnom Penh, dont l’IAURIF a la charge. Le projet aboutit à la publication du Livre blanc du développement et de l’aménagement de Phnom Penh4. Un second fonds de solidarité prioritaire permet, entre 2008 et 2010, la réactualisation de ces travaux et la publication du schéma directeur de la ville de Phnom Penh, qui synthétise toutes les recommandations en matière d’aménagement émises au sein du livre blanc5. À ce jour, le schéma directeur de Phnom Penh n’a toujours pas été ratifié par le conseil des ministres et par le Premier ministre Hun Sen ; l’Apur et l’IAURIF n’ont plus de projet de coopération avec la municipalité de Phnom Penh.
8Le schéma directeur ne sert donc pas encore officiellement de document-cadre à la planification urbaine de Phnom Penh. Ce fait traduit le processus complexe de reconstruction des approches urbanistiques et planificatrices de la capitale cambodgienne, mais aussi l’importance des enjeux fonciers, et plus largement immobiliers, dans la mise en place d’une planification territoriale durable. La volonté de planifier la future croissance de la capitale cambodgienne apparaît cependant assez tôt après le départ de l’administration vietnamienne. Dès 1993, une commission spéciale chargée d’élaborer une politique et des schémas de développement territorial au Cambodge, et notamment au sein des espaces périphériques de Phnom Penh, est en effet mise en place6. Aujourd’hui, cette volonté de planification territoriale apparaît bien peu portée par les autorités en charge de la gestion de la capitale cambodgienne. Cependant, entre un laisser-faire généralisé et une planification arrêtée, la situation actuelle apparaît plus nuancée. En effet, les autorités municipales ont annoncé en avril 2015 que le schéma directeur allait être réactualisé et étendu à l’horizon 20357. Le Matuc devrait reprendre en main le projet, ce qui témoigne d’un transfert des prérogatives de la municipalité vers le gouvernement central. Si la planification urbaine n’est pas encore formalisée dans la loi, elle l’est donc, d’une certaine manière, dans les faits.
9En tant que document d’ensemble qui oriente le développement urbain, le schéma directeur n’existe pas sans les outils administratifs et juridiques qui permettent l’application de ses prérogatives sur les territoires urbains, l’articulation des différentes échelles administratives et la collaboration des différents acteurs (administratifs, techniques et privés). Toute politique publique d’aménagement urbain a besoin d’une législation adaptée sans laquelle elle se réduit à des déclarations de principes et à des orientations générales8. Dans une ville où le cadre réglementaire du développement urbain reste flou et où les compétences en matière de planification urbaine font encore défaut, le transfert d’un modèle de planification urbaine comme le schéma directeur nécessite le développement d’un appareil juridique conséquent et d’une politique territoriale adaptée à sa mise en place.
10Le projet de schéma directeur produit par la France en 2007 s’accompagne ainsi d’une série de trente études sectorielles réalisées par des experts français et l’IAURIF. Ces travaux proposent une restructuration complète de la gestion des espaces urbains par la municipalité. Leur portée est donc très vaste : il ne s’agit pas seulement de produire un document qui donne les grandes orientations du développement urbain de la capitale cambodgienne, mais aussi de fournir, en s’appuyant sur les outils techniques de l’aménagement et de l’urbanisme tels qu’ils sont déployés en France, un nouveau cadre financier, institutionnel, économique et social pour l’établissement d’une planification stratégique globale à l’échelle de la municipalité. D’un côté, le travail fourni par la coopération française exprime une certaine utopie urbaine inhérente à la production de tels documents9 autant qu’il correspond aux besoins de planifier la future croissance de Phnom Penh. D’un autre côté, son élaboration en collaboration avec les différents services techniques de la municipalité de Phnom Penh et divers responsables politiques a permis une diffusion des savoirs et des savoir-faire en matière d’aménagement. La non-entrée en vigueur du schéma directeur n’a ainsi pas empêché la mise en œuvre de certaines de ses recommandations10 ; ce constat renvoie à la difficile applicabilité d’un document aussi généraliste qu’un schéma directeur11.
11Pour Antoine Givaudan et Pierre Merlin, un schéma directeur définit les grandes orientations de l’urbanisation à moyen et à long terme. Il procède plus de l’intention que de la planification en tant que telle12 et vient donc en complément de documents techniques et juridiques, qui définissent l’urbanisme réglementaire et opérationnel13. La production de schémas directeurs dans les pays en développement a souvent posé d’importants problèmes, soulignés depuis longtemps. Comme le note Claude Chaline, alors qu’il réalisait une évaluation comparative des schémas directeurs d’Ankara, du Caire, de Rabat et de Tunis :
Très vite […] l’opportunité comme l’efficacité de ces schémas directeurs, appliqués aux pays en développement, ont été mises en question, devant l’importance des écarts, entre les objectifs proposés et les réalités constatées, en particulier à travers la création de vastes zones d’habitat non réglementé14.
12Claude Chaline indique de manière générale la faible effectivité de ce type de document, dont les recommandations sont peu suivies. Pour les quatre villes étudiées, il relève plus précisément le passage d’une intervention en matière d’urbanisme guidée par le processus « objectifs → savoir → plan → action » à des interventions plus limitées, qui suivent une approche différente : « demandes sectorielles → intervenants → systèmes décisionnels15 ». Finalement, Claude Chaline constate l’échec des planifications globales et l’émergence d’une approche sectorielle « à défaut » de l’aménagement des espaces urbains. Cette remarque, tout aussi valable pour nombre de villes occidentales, illustre les problèmes rencontrés lors du transfert de modèles d’aménagement des villes et du territoire – dont les schémas directeurs font partie – au sein de pays en développement, mais aussi le glissement de la planification rationaliste à la planification stratégique, qui se veut moins globalisante, plus efficace, centrée sur la coopération intersectorielle et interinstitutionnelle et largement ouverte à la négociation entre acteurs publics et privés16. Au Cambodge, ce glissement doit cependant être considéré dans le cadre plus large des réformes de la planification économique et institutionnelle depuis le début des années 1990, qui vont partiellement influencer l’encadrement de la croissance urbaine et du processus métropolitain.
Un cadre planificateur néolibéral
13Les réformes institutionnelles et politiques du début des années 1990 au Cambodge sont rapidement suivies par la mise en place d’une stratégie de planification du développement économique du pays, principalement portée par le Fonds monétaire international dès 1992, la Banque mondiale dès 199317 et la Banque asiatique de développement à la fin de la décennie. De manière générale, la planification économique et institutionnelle vise une plus grande rationalisation des affaires économiques et sociales d’un État en vue d’améliorer leurs performances18. La planification cherche à comprendre et à représenter une situation économique et institutionnelle actuelle pour finalement proposer de grandes orientations futures de développement. La planification, qui s’appuie sur l’identification des variables clés infléchissant le développement économique, ne peut donc être pensée indépendamment de ses instruments19, car elle est à la fois le résultat et la condition de stratégies de pouvoir qui découlent des desseins politiques et idéologiques des acteurs œuvrant à la planification (institutions, experts, chercheurs, entreprises, société civile, etc.)20. Mais plus spécifiquement, la planification économique et institutionnelle produit des règles et instruments qui permettent aux instigateurs de ces cadres de croissance et de développement de produire de nouvelles règles coercitives, sur lesquelles ils s’appuient pour accomplir leurs stratégies21. Dans ce contexte, la planification n’agit pas seulement de manière prospective : elle établit de nouveaux rapports de force entre les acteurs économiques.
14Au Cambodge, la planification du développement est préalablement passée, comme nous l’avons évoqué dans le premier chapitre, par une libéralisation de l’environnement économique et par la mise en place de structures intergouvernementales chargées de faciliter les investissements étrangers22. Les différents documents-cadres de la planification institutionnelle et économique au Cambodge font directement référence à la notion de « planification stratégique23 ». Cette dernière vise une meilleure efficacité de la planification par l’élaboration de priorités de développement, qui s’établissent par la recherche d’un consensus entre tous les acteurs du développement économique.
15En 1998, le gouvernement du Cambodge met en place une « stratégie triangulaire de développement », dont les trois axes principaux concernent le maintien de la paix et de la stabilité politique, l’intégration du pays à l’économie régionale et internationale et le développement socio-économique. En 2004, le Premier ministre du Cambodge lance la première phase de la « stratégie rectangulaire pour la croissance, l’emploi, l’équité et l’efficacité24 ». Cette dernière s’inscrit dans la continuité de la stratégie triangulaire, mais opère un recentrement sur la « bonne gouvernance », dorénavant le pilier de toutes les réformes structurelles et sectorielles entreprises par le gouvernement, ainsi que de l’ensemble des acteurs économiques et du développement. La place centrale qu’occupe la « bonne gouvernance » dans les nouvelles stratégies de planification économique s’inscrit pleinement dans l’évolution des politiques de développement prônées par les grandes agences multilatérales, au premier rang desquelles la Banque mondiale25, dont les activités sont importantes au Cambodge. La « stratégie rectangulaire » doit par ailleurs mieux répondre aux Objectifs du millénaire26, dont le Cambodge fût un des signataires en 2000. La troisième phase de la stratégie rectangulaire a été lancée en septembre 201327, et c’est à partir de celle-ci qu’a été élaborée la planification stratégique du développement économique et social national actuelle28. La comparaison des différents projets produits par le gouvernement du Cambodge permet de constater que le cadre général de la planification économique et institutionnelle a peu à peu glissé, depuis les années 1990, de la nécessité de stabiliser et sécuriser le pays vers la lutte contre la corruption et l’accentuation de la décentralisation institutionnelle, ce qui explique principalement la place centrale accordée à la notion de gouvernance29.
16Les trois projets successifs de la stratégie rectangulaire insistent largement sur la nécessaire intégration du Cambodge dans l’économie régionale et mondiale et sur l’établissement de partenariats avec les acteurs privés (ces deux axes représentant deux des quatre sommets du rectangle principal)30. En tant que premier pôle économique du pays, Phnom Penh est largement évoquée au sein de ces différents projets de planification. Ces derniers insistent principalement sur la nécessité de mieux intégrer la capitale aux corridors de développement régionaux dans le cadre de la sous-région du Grand Mékong31, sur le caractère stratégique du développement des infrastructures et réseaux de la capitale (tout en soulignant la réussite des projets engagés sur ces thèmes), sur enfin le maintien de l’industrialisation et le développement des petites et moyennes entreprises.
17Au cours des deux premières phases de la stratégie rectangulaire (2004- 2012), la planification de la croissance urbaine de la capitale n’est pas mentionnée, alors que la nécessité d’une politique foncière favorisant l’accès à la propriété et l’amélioration des outils cadastraux à l’échelle nationale est évoquée. La troisième phase de la stratégie rectangulaire se distingue cependant des précédentes. La nécessité d’une planification du développement des réseaux et infrastructures à l’échelle nationale occupe une place beaucoup plus importante, en même temps que ces projets doivent dorénavant s’inscrire systématiquement dans le cadre plus général de la « gestion des ressources foncières et de la planification urbaine32 ». Par ailleurs, afin de répondre aux objectifs de l’axe principal 4 (politique démographique et égalité des sexes), qui regroupe les aspects « sociaux » de la croissance et du développement économique (ce que les agences multilatérales nomment aujourd’hui le « capital humain »), le gouvernement doit être attentif à une meilleure articulation des villes-satellites et des pôles de la croissance économique avec la capitale (comme les parcs industriels), afin de favoriser leur accessibilité, la création d’emploi et de corridors économiques. La mention des villes-satellites souligne l’enjeu que ces projets urbains représentent pour l’économie métropolitaine. En même temps, leur apparition dans la partie « développement social » de la stratégie rectangulaire peut sembler tout à fait paradoxale, puisque ces projets sont destinés à une population locale et étrangère aisée. On peut dès lors s’interroger sur la population concernée par les objectifs de promotion du « capital humain » évoqués par les stratégies rectangulaires : n’est-ce pas finalement les groupes intermédiaires et aisés de la capitale qui doivent avant tout faire l’objet d’une meilleure « capitalisation » ?
18En définitive, au sein des grands cadres de la planification institutionnelle et économique (voire sociale) tels qu’ils se mettent en place depuis la deuxième moitié des années 1990, la constitution d’une politique urbaine, si modeste soit-elle, doit principalement servir au développement des infrastructures, à l’intégration du Cambodge dans son environnement économique régional et à la création de pôles et de corridors économiques. La question foncière est surtout évoquée dans le cadre de la production agricole, même si l’accaparement des terres, la possession illégale de terrain et la nécessité de redistribuer des ressources foncières aux plus pauvres occupent une place de plus en plus importante depuis la première phase du projet lancée en 2004. L’immobilier en tant que secteur économique stratégique n’entre pas dans les analyses, notamment car il ne s’apparente pas à un secteur productif. L’ensemble de ces projets de planification s’inscrivent donc dans une certaine vision stratégique du développement, où le « social » doit être au service de l’économique, où le niveau de pauvreté devient un indice de performance33 plutôt qu’un indicateur des disparités socio-économiques et où le développement économique est garanti par la construction d’infrastructures, la mise en place de partenariats publics-privés, l’intégration régionale et l’émergence d’une classe moyenne et d’entrepreneurs plutôt que par l’atténuation des processus menant à l’inégale répartition des ressources socio-économiques.
19Nous retrouvons ici les canons des politiques néolibérales en matière de planification du développement économique34 et métropolitain35, auxquels s’ajoutent les préceptes de la planification stratégique36, à savoir la place accordée aux résultats plutôt qu’aux processus37, le rôle central des acteurs privés, le rôle de « stratège » et d’« expert » des acteurs internationaux du développement et le passage du plan de développement rationaliste aux stratégies de développement.
20Cette approche du développement formulée par le gouvernement du Cambodge et les institutions internationales, et la place qu’y occupe la ville, se retrouvent tout à fait dans les projets, discours et rapports des grandes agences multilatérales, comme la Banque asiatique de développement (BAD)38. Les projets de cette dernière au Cambodge portent principalement sur la réforme des institutions et l’efficacité financière de celles-ci, sur la décentralisation, la lutte anticorruption et l’augmentation des « capacités de développement ». L’État doit être un « facilitateur39 » plutôt qu’un planificateur ou un protecteur. Les réformes entreprises visent donc une plus grande efficacité gestionnaire et managériale pour que les institutions locales aient la capacité d’appuyer et d’aider le secteur privé. Nous ne nous étonnerons pas que quatre des cinq thématiques de développement prioritaires de la Banque asiatique de développement au Cambodge soient le développement du secteur privé, la gouvernance, l’appui à la connaissance40 et le développement de partenariats. En conséquence, les projets de la Banque pour Phnom Penh se limitent à son intégration dans la sous-région du Grand Mékong41 et au développement des infrastructures, pour l’adduction en eaux potables, l’assainissement, l’énergie et le développement du réseau viaire. Parallèlement, l’aide au développement vise à renforcer, par la formation et la gestion des ressources humaines, la capacité des autorités locales à mettre en place et à gérer ces projets42.
21Ces priorités illustrent la manière dont le cadre général de la planification économique et institutionnelle au Cambodge évoquée plus haut est devenu un instrument de « ventilation sectorielle » de l’aide internationale vers certains secteurs considérés comme stratégiques. Les financements accordés par ces agences et les projets mis en place par les agences bilatérales (parfois avec l’aide financière des précédentes), tout comme les modalités de la coopération technique entre institutions et agences internationales43, s’inscrivent tout à fait dans cette hiérarchisation des priorités de la planification stratégique du développement économique, qui légitime, du moins en partie, un « aveuglement volontaire » vis-à-vis de la problématique immobilière de la part des acteurs impliqués dans la gestion du développement urbain à Phnom Penh.
La planification urbaine face aux intérêts particuliers
22Le schéma directeur de Phnom Penh procède explicitement de la planification stratégique du développement métropolitain, en même temps que la démarche s’inscrit clairement dans le cadre plus général de la stratégie rectangulaire du gouvernement cambodgien44. En conséquence, les partenariats public-privé, la gouvernance ou encore la décentralisation sont autant de sujets abordés par le schéma directeur, mais cette fois dans le contexte de la planification urbaine. L’approche pragmatique et stratégique du développement urbain favorise notamment une priorisation sectorielle des interventions techniques. Si, comme nous l’avons vu, la planification urbaine de portée réglementaire pose donc problème à Phnom Penh, la planification urbaine de portée opérationnelle est souvent effective. Un certain nombre de prescriptions figurant dans le projet de schéma directeur ont été prises en compte et quelques projets réalisés45. Le transfert de compétences techniques tout comme la réalisation de certains projets d’infrastructures sont en effet avérés :
Les différentes coopérations étrangères à la municipalité, principalement la France et le Japon, ont permis aux fonctionnaires de se former à l’urbanisme et à l’aménagement urbain. […] Les projets dans le drainage, l’assainissement, le transport et les espaces verts marchent bien. Les coopérations ont permis une meilleure synergie entre les différents services de la municipalité, ce qui était plus difficile avant. Par effet d’entraînement, cela avance plus vite au niveau politique, car les gens sont plus au courant de ce qui peut être fait. […] Cela est plus difficile avec les investissements privés, car les prises de décision sont plus morcelées. Certains projets profitent à tout le monde, d’autres profitent à quelques-uns. Il faut satisfaire tout le monde46 !
23Nous retrouvons ici certains constats dressés par Claude Chaline. La mise en place de projets de type « planification à grande échelle » pose plus de problèmes que les projets techniques de construction d’infrastructures, de type sectoriel. L’amélioration du système de drainage, ainsi qu’une meilleure gestion des espaces verts et de la voirie sont justement le résultat d’une diffusion des prérogatives contenues dans les documents produits par les différentes coopérations en matière d’urbanisme et d’aménagement. Afin de faire accepter un document aussi général que le schéma directeur, qui contraindrait les autorités locales à s’engager de manière durable sur l’aménagement urbain de la capitale, il est nécessaire de redéfinir la gouvernance territoriale, ce qui permettrait des prises de décision à l’échelle locale, dans le respect d’un document-cadre qui assurerait une cohérence globale de la gestion urbaine. Le schéma directeur ne relève ainsi pas seulement de l’expertise technique : il pose la question de la souveraineté des institutions locales, de l’ingérence d’acteurs étrangers dans la gestion des affaires territoriales cambodgiennes, de l’effectivité des politiques de décentralisation et de la constitution d’un État de droit.
24D’un côté, la réussite partielle de la planification urbaine démontre que l’approche stratégique a porté ses fruits et que le document correspond bien aux priorités de développement économique telles qu’établies par le gouvernement cambodgien. D’un autre côté, l’échec partiel de la mise en place des directives du schéma directeur et des plans d’aménagement locaux traduit l’inadéquation de tels outils avec le cadre plus général de la planification économique et institutionnelle au Cambodge, qui prône l’initiative individuelle et le retrait de l’État. D’après ce que nous avons pu constater lors de notre travail d’observation participante à la municipalité de Phnom Penh47, les projets de planification, à l’échelle du quartier ou à celle de la ville, se heurtent très souvent aux intérêts des acteurs individuels, qu’ils soient privés, publics ou les deux à la fois. À l’échelle locale, réserver des terrains pour la construction d’infrastructures ou contraindre des propriétaires à modifier leur emprise foncière ou leur projet pour le respect de plans d’aménagement s’avère complexe, voire parfois impossible. On évite donc de s’adresser à tel ou tel propriétaire, car on le sait puissant ou bien placé dans la hiérarchie institutionnelle ou politique – les deux allant souvent de pair. Certains propriétaires font par ailleurs péricliter les projets en mobilisant leurs relations politiques ou claniques. Pour la municipalité, le statu quo et la mise en place de projets consensuels sont souvent préférables au conflit, dont l’issue reste toujours incertaine. Ces rapports de force poussent les acteurs du développement urbain à se positionner en stratèges politiques et à éluder les enjeux considérés comme trop sensibles ou risqués, comme la question immobilière. Le fait que la municipalité reste, dans bien des domaines, largement subordonnée aux décisions des institutions centrales renforce finalement ce processus.
25Les stratégies de planification économique, institutionnelle et urbaine déployées par les grandes agences de coopération et le gouvernement cambodgien présentent alors des effets paradoxaux. La faiblesse de l’urbanisme réglementé permet aux autorités locales et aux investisseurs privés de ne pas être contraints par le déploiement de nouveaux outils de planification urbaine comme le zonage, l’encadrement des transactions foncières et immobilières, ou encore une politique d’accès au logement. En ce sens, si la gouvernance doit devenir un instrument de gestion et d’aplanissement des rapports de force, elle apparaît largement inadaptée aux enjeux de la spéculation et de la production immobilières (nous reviendrons en détail sur ce point au cours du chapitre 6).
26Par ailleurs, la multiplicité des temporalités et systèmes d’actions institutionnels générée par la coprésence, dans le champ du développement économique et urbain, d’une multitude d’acteurs du développement favorise une certaine fragmentation institutionnelle en même temps que les interventions sectorielles des projets de développement sont tributaires de l’organisation en « silo » de l’administration cambodgienne, où chaque institution, voire chaque service, dispose d’une certaine autonomie d’action. Cette situation est largement accentuée par les intérêts propres aux agences et organisations de développement et à la position des experts et acteurs du développement. Un expert de nationalité étrangère en place au Cambodge et travaillant dans le domaine de la planification urbaine expliquait ainsi qu’il n’avait jamais rien voulu savoir des « faits de corruption » et des « petits arrangements entre amis48 ». Cet « aveuglement volontaire » participe de dynamiques multiples. Tout d’abord, les experts internationaux ont peu de prise sur ces relations de pouvoir internes aux institutions cambodgiennes. Ensuite, ils doivent mettre en place un projet pour lequel ils sont rémunérés et ont reçu un budget de financement de la part d’une agence de développement. Il est logique que ces acteurs se concentrent plus sur les objectifs à accomplir, à partir desquels ils seront d’ailleurs évalués, que sur des « dysfonctionnements » institutionnels qui ne concernent pas leur projet en tant que tel. Automatiquement, ces experts internationaux recherchent le consensus politique et institutionnel nécessaire à la mise en place de leur projet, ce qui représente par ailleurs un des fondements de la planification urbaine en général49.
27Mais, à un autre niveau d’analyse, et dans le contexte du développement urbain, l’approche pragmatique de la planification procède partiellement d’un détachement des planificateurs (institutionnels, politiques, experts et techniciens) des enjeux sociaux et sociétaux, et donc des enjeux de pouvoir et de domination, que soulève l’acte même de planifier la ville50. Les difficultés de la mise en place d’un urbanisme réglementaire et la préférence pour les aspects techniques du développement urbain témoignent finalement de la faible prise en compte, par les coopérations internationales, des jeux de pouvoir à l’intérieur du champ institutionnel et entre acteurs publics et privés.
28Cette situation explique pourquoi les institutions cambodgiennes sont souvent dépossédées de leur pouvoir décisionnel dans les projets de développement et de coopération, ce qui entretient une situation de dépendance technique à l’aide au développement51. Dans le contexte métropolitain, la planification stratégique achoppe donc généralement face à l’importance des réseaux de pouvoir partiellement invisibilisés, qui jouent avec les cadres et instruments de la planification stratégique pour asseoir leurs stratégies, qu’elles soient institutionnelles, politiques ou économiques52. À Phnom Penh, cette situation mène par exemple à l’incapacité de freiner le morcellement foncier, de contrôler les flux immobiliers et d’endiguer une spéculation foncière qui empêche une gestion efficace et pérenne de l’aménagement du territoire.
29Dès lors, les réussites enregistrées par les politiques de planification stratégique du développement économique ne signifient pas nécessairement une atténuation des mécanismes qui conduisent à la marginalisation sociospatiale et à la pauvreté urbaine ; au contraire, elles peuvent conduire à une intensification de la fragmentation urbaine, du repli résidentiel et de la spéculation foncière53. Même lorsque les institutions cambodgiennes évoquent directement la problématique foncière, celle-ci est avant tout considérée comme un risque de conflit social plutôt que comme une entrave à une répartition plus équitable des ressources immobilières54, ce qui est vrai autant dans les zones urbaines que rurales. Cet état de fait n’empêche pas les certains acteurs du développement urbain de relever les progrès en matière de gestion urbaine et de planification. Si certains projets sont de véritables réussites, l’absence d’une planification urbaine effective, la capacité des institutions et des investisseurs privés à jouer avec les cadres légaux existants et les instruments de la gestion urbaine, tout comme l’inébranlable volonté de moderniser la capitale cambodgienne et de promouvoir le processus de métropolisation, engendrent un développement urbain particulièrement inégalitaire, voire dangereux et violent.
Marge et marginalisation comme miroirs de la métropolisation à « marche forcée »
Incertitudes du processus de production et fractures sociospatiales
30Dans un contexte d’internationalisation des modes de production des espaces urbains, le schéma directeur de Phnom Penh, même non approuvé, a permis à un certain nombre d’acteurs de disposer d’un document de référence pour analyser les transformations récentes de la capitale cambodgienne. Des membres de la société civile, notamment des organisations non gouvernementales et des organes de presse, se sont souvent appuyés sur ce document pour juger du développement contemporain de la ville. Mais le document a aussi permis aux institutions d’afficher une planification plus réfléchie, qui sécurise un peu plus les investissements des compagnies privées opérant dans l’aménagement urbain et l’immobilier.
31Lorsque les investisseurs internationaux des grands projets se présentent sur le marché cambodgien au cours de la première moitié des années 2000, ils ont la volonté d’inscrire leur projet dans le développement général de Phnom Penh afin d’assurer une plus grande pérennisation de leur investissement55. Pour les acteurs privés, l’intérêt est multiple. En effet, ils peuvent faire valoir auprès des potentiels clients leur collaboration avec les autorités locales. Afficher cette coopération en matière d’urbanisme rassure les futurs acheteurs, et permet de présenter, lors d’événements internationaux, un projet articulé à la ville existante.
32Par ailleurs, la collaboration entre les promoteurs privés et la municipalité de Phnom Penh s’explique par des raisons techniques. La connexion aux réseaux d’électricité, de drainage, d’assainissement et d’eau potable est un préalable indispensable au fonctionnement de ces espaces de vie, tout comme l’accessibilité aux sites. Les navettes domicile-travail demandent une bonne connexion des villes-satellites à un réseau viaire fonctionnel. Par exemple, au cœur du bassin versant nord, les projets de Ciputra et World City sont particulièrement exposés aux inondations (fig. 9, p. 69). Développer les systèmes de captage, de stockage et de drainage des eaux de pluie et de débordement des fleuves est un préalable indispensable à leur construction. Malgré la réhabilitation en cours du système hydraulique du nord de la ville, cette zone souffre encore d’un mauvais entretien du réseau de canaux, construits principalement sous le Sangkum Reastr Niyum. Les deux grands promoteurs privés et la municipalité s’entendent dès les années 2000 pour développer le système de drainage dans ce secteur et pour y connecter les projets. L’aménagement et le creusement des canaux progressent cependant lentement. À partir du milieu des années 2000, l’urbanisation accrue de la zone nord et le morcellement croissant des parcelles par la vente des terrains à de multiples propriétaires privés rend de plus en plus difficiles la percée et l’aménagement de nouvelles voies d’eau. La municipalité est souvent dans l’incapacité de réserver des terrains pour le système de drainage, car elle ne peut s’opposer aux intérêts privés de riches propriétaires fonciers56 présents dans la zone et souvent liés aux hautes sphères politiques. La collaboration entre les autorités cambodgiennes et ces investisseurs privés a souvent tourné court, au point que les plans techniques de réalisation des grands projets immobiliers de la zone nord ont dû évoluer plusieurs fois, même si une partie du projet de drainage a été réalisée avec le creusement récent d’un canal.
33L’articulation entre les intérêts des acteurs privés et ceux des acteurs publics est souvent complexe. Les autorisations concernant la construction des grands projets urbains sont souvent négociées au sommet de l’État central. La municipalité de Phnom Penh dispose ainsi de peu de marge de manœuvre dans les processus de négociations, et doit bien souvent gérer en aval les problèmes techniques que pose ce type d’urbanisation, particulièrement lorsque les espaces sont déjà densifiés, en cours d’urbanisation, ou lorsque des promoteurs ont acquis des réserves foncières à des fins spéculatives. En conséquence, les grands investisseurs ont du mal à intégrer de manière pérenne leurs grands projets urbains au sein des territoires. Cette situation peut générer de véritables fractures sociospatiales, qui illustrent les problèmes d’articulations des nouveaux espaces urbains produits avec la ville existante.
34À ce titre, la construction de Diamond Island témoigne des problèmes que pose ce type d’urbanisation. Le 22 novembre 2010, un mouvement de foule cause la mort de plus de 350 personnes sur un pont suspendu reliant Diamond Island à la ville lors de la fête des eaux, une importante fête annuelle qui réunit chaque année plusieurs millions de personnes dans la capitale57. Ce drame a démontré le manque de coordination entre les autorités locales et les promoteurs privés, tout en illustrant la rupture entre l’urbanisme de projet et la ville telle qu’elle est réellement pratiquée par la population58. Le résultat de l’enquête aboutira à la conclusion suivante : ni les autorités municipales ni le promoteur privé ne sont en cause. Implicitement, la responsabilité est donc rejetée sur les festivants, qui n’ont pas su pratiquer ce nouvel espace urbain, ne possédant pas les codes et habitudes propres à ce type d’infrastructure59. Plus largement, cet événement représente un moment paroxysmique de la fracture sociospatiale engendrée par la construction de grands projets urbains, renforcée par le manque de planification urbaine qui permettrait une meilleure articulation entre ces nouvelles zones urbaines et la ville existante. Cette véritable « marche forcée » vers la métropolisation et la modernisation de la capitale représente donc un coût – voire un sacrifice – social important. Le projet du boeung Kak démontre à ce titre que la contestation sociale n’a pas sa place dans ces processus.
35Le boeung Kak s’apparente à un lac intra-urbain, situé en plein cœur de la ville, à l’ouest de l’ancien quartier colonial. Les abords du site sont occupés depuis les années 1980 par un grand nombre de familles installées spontanément lors du processus de repopulation. En 2007, la vente du site à un promoteur cambodgien se fait savoir. Entre 3000 et 4000 familles (entre 20000 et 25000 personnes) y habitent alors. À partir du moment où la vente est rendue publique, un grand nombre d’associations internationales, qui travaillent sur la question des évictions foncières et des « communautés pauvres60 » de la capitale, cherchent à connaître l’identité du promoteur et la teneur des négociations entre la municipalité et l’investisseur privé. Les institutions locales, qui assurent que personne ne sera expulsé, finissent par avouer en 2008 que l’ensemble des familles devra partir. Le promoteur s’avère être l’entreprise Shukaku Inc., dont le propriétaire est le sénateur sino-khmer Lao Meng Khin61. Après de multiples tractations entre les représentants des familles, des organisations internationales, la municipalité et l’investisseur privé, les dernières familles ayant refusé les conditions de dédommagement du promoteur seront finalement expulsées de force de leurs terrains en 2011. En réaction, la Banque mondiale suspend tous ses prêts au Cambodge, en attendant qu’une issue favorable soit trouvée pour les personnes n’ayant plus de terre après leur éviction du site62.
36Le projet du boeung Kak est l’aboutissement d’un imbroglio politico-économique qui implique des membres haut placés de l’État – et notamment l’élite sino-khmère, comme Sok An63 –, de grandes entreprises cambodgiennes et d’importantes compagnies provinciales chinoises64. Au regard des différentes joint-venture, des flux financiers et des partenariats entre des entreprises cambodgiennes, l’État et les entreprises chinoises, nous pouvons penser que la participation financière des entreprises provinciales chinoises dans le projet du boeung Kak constitue une contrepartie à l’obtention de diverses concessions économiques (notamment forestières et minières) dans le reste du pays. Par ailleurs, le déroulement du processus d’éviction, le contrôle des flux informationnels, la faiblesse des compensations et l’absence de concertation sur la transformation de cet espace lacustre en un grand projet immobilier à destination des groupes socio-économiques intermédiaires et aisés de la capitale illustrent particulièrement bien les enjeux de cet « aménagement forcé », qui se fait par le haut de la hiérarchie institutionnelle et au profit d’une partie restreinte de la population urbaine.
37Cette « métropolisation par le haut » révèle la fracture qui s’opère entre la ville-projet et la réalité concrète des modes d’occupation de l’espace à Phnom Penh. En effet, la spéculation foncière, la multiplication des projets immobiliers, la transformation des espaces de vie périphériques et la marginalisation65 d’une partie de la population représentent la part d’ombre du processus de métropolisation. En périphérie des espaces centraux, qui constituent le cœur de la ville-spectacle, se concentre une population de plus en plus précaire, constituée d’ouvriers de la confection, de populations rurales, mais aussi de familles ayant été expulsées ou chassées de la ville-centre.
Une marginalisation des populations précaires
38Pour certains observateurs internationaux, Phnom Penh s’apparente à une « ville duale66 », expression popularisée au cours des années 1980 pour évoquer une bipolarisation accrue des écarts socio-économiques au sein d’un espace urbain67. S’il est évident que la ville-spectacle des grands projets urbains contraste fortement avec la ville précaire des franges périphériques, ou avec le maintien de poches de pauvreté en plein cœur de la ville68, cette dualité du processus de développement procède de dynamiques multiples.
39L’effet croisé du processus de repopulation de la ville à partir de 1979 et de la réorganisation rapide des modes de production des espaces urbains au début des années 1990 a généré de fortes tensions liées à l’occupation de terrains dans le centre-ville. D’un côté, l’annulation, en 1989, des droits de propriété antérieurs à 1979 devait empêcher les conflits de propriété à la suite de la réoccupation plus ou moins spontanée de la majeure partie du parc résidentiel. D’un autre côté, la réhabilitation du droit de propriété privé en 1989 et les réformes foncières entreprises à partir du début des années 1990 devaient assurer une régularisation de l’acquisition, de l’utilisation et de l’échange des ressources immobilières. Cependant, la faiblesse de l’enregistrement foncier, le manque de volonté politique, l’ampleur des occupations spontanées de terrains privés et publics69 et le maintien d’un fort rapport coutumier à la propriété foncière entretiennent un décalage important entre les droits fonciers et les usages – tant fonciers qu’immobiliers70.
40Les principaux sites accueillant des ménages pauvres installés spontanément sur des terrains publics ou privés sont apparus vers la fin des années 1980, une fois le parc résidentiel occupé complètement71. Ces populations sont avant tout rurales, mais comptent aussi d’anciens résidents, des réfugiés à la fois externes (rapatriés des camps de réfugiés situés aux frontières72) et internes (les combats faisant encore rage à cette époque dans certaines zones rurales). Une partie importante de ces familles a été contrainte de s’installer sur des espaces vacants tels que les terrains publics et privés, les berges des fleuves et des lacs, les bords de route ou encore les bordures des voies ferrées. Céline Pierdet parle à ce titre de « marges aquatiques » en plein cœur de la ville73.
41Depuis les années 1990, les marchés immobiliers de Phnom Penh se maintiennent ainsi entre le formel et l’informel74, situation qui apparaît d’autant plus déstabilisatrice que la refondation des dynamiques de possession et de propriété au Cambodge s’inscrit dans l’intégration aussi soudaine que violente du Cambodge à l’économie de marché et au libéralisme, qui ont largement exacerbé les conflits fonciers depuis le début des années 200075. Dans ces conditions, le processus de métropolisation, qui s’opère comme nous l’avons évoqué « par le haut », engendre une forte pression foncière sur les populations les plus précaires, principalement celles qui n’ont pu accéder à la propriété formelle et qui se sont installées sur des terrains publics sur le domaine privé de l’État. En 2008, les quartiers informels de la capitale abritent encore 300000 personnes environ76, soit près d’un quart de la population totale de la ville à cette époque. Ces populations pauvres (fig. 29, p. 147) se répartissent dans l’ensemble de la métropole plutôt qu’elles ne sont concentrées dans quelques espaces particuliers. Les politiques de développement voulant encadrer et infléchir l’attitude des autorités locales envers les secteurs de logements informels semblent rester, pour la plupart, lettres mortes77, notamment car les promoteurs immobiliers et l’État s’estiment souvent « dans leur droit » lorsqu’il s’agit de démontrer que les populations sont installées illégalement.
42En même temps que le secteur immobilier prend de l’ampleur à la fois dans le centre-ville et dans les espaces péricentraux au cours des années 1990, et depuis que la propriété immobilière est mieux encadrée par la loi foncière de 2001 (chapitre 1), une partie des populations pauvres, sans titre de propriété et installées spontanément sur des terrains publics ou privés est évincée en périphérie de la capitale (tableau 3). Ces familles sont principalement chassées suite à la vente des terrains sur lesquels elles étaient installés, à la mise en œuvre de projets immobiliers, mais aussi pour la construction ou la réfection d’infrastructures, comme les voies ferrées, les routes ou les ponts.
Tableau 3. Un déplacement de la pauvreté du centre vers les périphéries de Phnom Penh

Source : M. Fukuzawa, The Phnom Penh Survey. A Study on Urban Poor Settlements in Phnom Penh, Phnom Penh, Sahmakum Teang Tnaut, 2014, p. 8-10.
43À Phnom Penh, on estime qu’entre 13300078 et 150000 habitants79 ont été délogés depuis le début des années 1990. Ce phénomène n’est pas circonscrit à la capitale. Amnesty International estime le nombre de personnes qui vivent sous la menace d’une expulsion à 150000 au Cambodge et à 70000 à PhnomPenh80. Au cours des années1990, la réorganisation des marchés immobiliers s’accompagne ainsi d’opérations d’éviction souvent violentes81. L’augmentation du nombre des protestations émanant de diverses organisations locales et internationales amène le gouvernement à mettre en place, à partir de la fin des années 1990, une politique de logement en faveur des plus démunis. Plusieurs expériences sont menées en ce sens, comme la relocalisation « volontaire » et indemnisée d’habitants en périphérie, ou la mise en place d’une opération de land sharing82 par exemple. Ces opérations ciblées s’accompagnent, au cours de la première moitié des années 2000, d’un assouplissement de la légalisation en matière d’accession à la propriété83, mais les processus de relogement sont, encore aujourd’hui, caractérisés par la violence, un certain désintérêt de la part des pouvoirs publics84 et l’échec de bons nombres des projets, notamment attribué à la faible prise en compte par les autorités locales des mécanismes de marginalisation sociale et d’appauvrissement économique de ces populations85.

Figure 29. Carte montrant la dualité du développement urbain à Phnom Penh.
Source du fond de carte : BAU. Sources des données : M. Fukuzawa, The Phnom Penh Survey…, op. cit. ; Sahmakum Teang Tnaut, Resettling Phnom Penh, op. cit. ; relevés de terrain.
44Cinquante-quatre sites de relogement ont ainsi été identifiés à Phnom Penh en 201286 (certains se situant en dehors des limites municipales, à plus de 40 kilomètres de la ville). Les multiples rapports d’organisations internationales montrent que le processus de relogement dans les franges urbaines de Phnom Penh génère, de manière générale, une plus grande marginalisation des populations déplacées. Le faible accès à l’eau potable et à l’électricité, la précarité des habitations, le non-enregistrement foncier des propriétés, le manque d’infrastructures éducatives et d’activités économiques représentent bien souvent les principaux obstacles à l’installation pérenne des populations dans les sites de relogement.
45Les évictions foncières dans les villes sud-est asiatiques, si elles ne sont pas un phénomène nouveau87, ont fait l’objet de recherches récentes, qui s’intéressent tant aux effets des investissements immobiliers qu’au rôle des réformes foncières, des stratégies urbanistiques, des contextes légaux et des systèmes économiques locaux dans le déplacement forcé et contraint de populations pauvres88.
46À Phnom Penh, Julie Blot fait bien la différence entre le déguerpissement, qui s’apparente à l’expulsion pure et simple de populations de leur terrain, et la relocalisation, qui implique un programme de transfert de populations de l’espace duquel ils sont expulsés à un espace sur lequel ils sont réinstallés89. Mais même dans cette distinction, chaque cas s’avère unique. Le processus ne sera pas le même si la terre appartient au domaine privé de l’État, au domaine public ou à un propriétaire privé. Les enjeux diffèrent en fonction de la localisation du terrain nettoyé, ou en fonction de la situation de l’espace de relocalisation. Ou encore, dans une économie globalisée, les rapports de force dépendent dorénavant de contextes politiques internationalisés, qui impliquent des acteurs transnationaux comme les organisations multilatérales et les organisations non gouvernementales, dont les actions sont relayées par les nouvelles technologies de l’information à l’échelle mondiale90.
47Le transfert des populations pauvres du centre vers les périphéries s’associe par ailleurs à l’installation, au cours des années 1990, d’une population ouvrière importante à la suite de l’implantation d’industries de confection textile, qui renforce le processus de paupérisation des périphéries urbaines. Ces installations en périphérie préfigurent un processus de périurbanisation par la constitution de véritables bourgs périphériques91 dans le cas des relogements et par la densification accrue des espaces périphériques et péricentraux avec l’installation d’ouvriers de la confection92.
48Cette réorganisation des territoires urbains procède ainsi d’une transformation globale de la ville-capitale. Les évictions foncières s’inscrivent notamment dans le processus de modernisation de Phnom Penh, qui s’accélère après le milieu des années 1990. Le maintien de poches de pauvreté dans la ville dense entache le processus d’embellissement de la ville, qui doit revêtir tous les atours d’une métropole sud-est asiatique moderne. D’un point de vue politico-économique, la métropolisation tient par ailleurs d’une mise en ordre des territoires par l’intermédiaire de différentes forces de coercition à la fois institutionnelles (la police, l’armée, la gendarmerie) et privées (gardes et milices), contrôlées et utilisées tant par l’État central que par les institutions territoriales et les investisseurs privés. Les promoteurs et investisseurs immobiliers privés forment, avec des membres du gouvernement et des autorités territoriales, des coalitions d’intérêt pour nettoyer les espaces stratégiques du centre-ville des populations les plus précaires93. La politique d’« embellissement » de la ville et le processus d’urbanisation des capitaux immobiliers se font ainsi écho et sont au fondement de ce que nous pouvons appeler ici un « ordre métropolitain », qui accorde le primat à la modernisation de la capitale par le centre, au prix de la marginalisation des populations les plus pauvres par les périphéries. Le centre-ville, en nettoyant ses marges, se spécialise dans ses fonctions de prestige grâce aux grands projets immobiliers et à la rénovation de parcs publics, d’espaces et de lieux touristiques comme les quais94, tandis que les périphéries se spécialisent à la fois dans l’accueil des populations précaires et dans la construction de projets résidentiels souvent exclusifs à destination des citadins aux revenus moyens et élevés. En retour, le centre-ville est récemment devenu un espace de revendication et de contestation pour les populations les plus marginalisées, ce qui annonce de nouveaux rapports de forces dans la capitale95.
49L’encadrement des dynamiques d’urbanisation, que ce soit à travers la planification urbaine ou l’urbanisme réglementaire, apparaît ainsi moins incomplet que sélectif. L’accent mis sur les infrastructures, sur l’intégration économique et sur la planification stratégique s’inscrit dans la lignée des grandes politiques économiques et institutionnelles portées par les agences de coopération internationales et bilatérales, particulièrement depuis les années 2000. L’échec partiel de la planification urbaine est ainsi largement tributaire des choix en matière de développement économique au Cambodge, qui s’appuient sur la reformulation du rôle de l’État et des acteurs privés dans le processus de métropolisation.
50Si les années 1980 sont marquées par le processus de repopulation et de réappropriation du parc immobilier, les années 1990-2000 témoignent d’une redistribution des groupes socio-économiques sur le territoire métropolitain. La marginalisation des populations les plus précaires est largement accentuée par un faible contrôle des transactions immobilières, mais aussi par une normalisation croissante de l’activité immobilière qui profite surtout aux populations les plus aisées.
51Les grands projets immobiliers, les projets de moyenne envergure des promoteurs locaux et les initiatives individuelles participent ainsi d’une transformation de Phnom Penh dans son ensemble. Entre étalement urbain et densification des interstices, le front d’urbanisation progresse en même temps que les espaces périphériques se densifient et se morcellent.
52Ces initiatives immobilières s’appuient sur des référents urbanistiques à la fois locaux et régionaux, tout en étant le fruit du transfert et de la réappropriation d’influences allochtones. La spéculation foncière et la multiplication des projets immobiliers poussent une partie importante de la population en dehors de la ville dense et de certains espaces péricentraux, là où les enjeux fonciers et de réaménagement sont les plus importants. La concentration de populations évincées de la ville-centre et de populations ouvrières en périphérie accélère ainsi la densification des espaces périphériques et l’apparition de nouveaux espaces urbanisés (fig. 30).
53Les périphéries urbaines deviennent également des lieux privilégiés pour une redéfinition du rapport entre les habitants et leurs territoires urbains. Entre reterritorialisation et ancrage, ces espaces autorisent un redéploiement des pratiques citadines, dans un contexte où une partie importante des choix résidentiels ont été contraints par les modalités du processus de repopulation de la capitale à partir de 1979.

Figure 30. Carte montrant le bâti de Phnom Penh en 2014 en dehors des grands projets immobiliers.
Source : municipalité de Phnom Penh ; Google Map ; relevés de terrains.
Notes de bas de page
1 C. Goldblum, « Phnom Penh ou la métropolisation dépendante : entre processus d’urbanisation et stratégie d’aménagement », dans M. Franck, C. Goldblum, C. Taillard (dir.), Territoires de l’urbain en Asie du Sud-Est. Métropolisations en mode mineur, Paris, CNRS Éditions, 2012, p. 69-70.
2 F. Lebaron, « L’impérialisme de l’économie. Éléments pour une recherche comparative », Actes de la recherche en sciences sociales, 121-122, 1998, p. 104-108 ; G. Rist, Le développement : histoire d’une croyance occidentale, 4e éd., Paris, Presses de Sciences Po, 2013 [1996].
3 Apur, Phnom Penh : développement urbain et patrimoine, Paris, Apur, 1997 ; Id., Phnom Penh à l’aube du xxie siècle : contributions à la définition de quelques projets pour l’amélioration des conditions de la vie urbaine, Paris, Apur, 2003 ; Id., Phnom Penh centre, Paris, Apur, 2006 ; Id., Phnom Penh. Croissance urbaine et transformation, Paris, Apur, 2009.
4 Municipalité de Phnom Penh, Ambassade de France au Cambodge, Livre blanc du développement et de l’aménagement de Phnom Penh. Diagnostic économique, social et environnemental, tendances, prospective et orientations, avant-projet de schéma directeur d’urbanisme de Phnom Penh 2020, Phnom Penh, BAU, 2007.
5 Id., Schéma directeur d’urbanisme de Phnom Penh horizon 2020, Phnom Penh, BAU, 2010.
6 L’arrêté no 34 de 1993 stipule la « création d’un comité national pour la planification territoriale et l’urbanisation des espaces entourant Phnom Penh, des villes et des provinces du Royaume du Cambodge ». Vann Molyvann dirigeait cette commission.
7 « Phnom Penh Master Plan extended to 2035 », The Phnom Penh Post, 9 avril 2015.
8 Y. Jégouzo, « Droit de la ville et droit dans la ville », Revue française des affaires sociales, 3/3, 2001, p. 55-70.
9 F. Choay, L’urbanisme, utopie et réalité : une anthologie, Paris, Seuil, 1965 ; Id., La règle et le modèle, Paris, Seuil, 1980 ; Id., « Le règne de l’urbain et la mort de la ville » dans Id., Pour une anthropologie de l’espace, Paris, Seuil, 2006, p. 165-198.
10 E. Huybrechts, F. Mauret, « Phnom Penh (Cambodge). Le renouveau de la planification urbaine », Urbanisme, 379, 2011, p. 32-36.
11 G. Novirana, « L’architecture du territoire : de la mesure au dessein », Annales de la recherche urbaine, 82, 1999, p. 46.
12 A. Givaudan, P. Merlin, « Schéma directeur », dans P. Merlin, F. Choay (dir.), Dictionnaire de l’urbanisme et de l’aménagement, 3e éd., Paris, PUF, 2010 [1988], p. 708.
13 L’urbanisme réglementaire fixe le cadre légal et institutionnel de l’utilisation du sol pour les différents acteurs qui agissent sur le territoire. Pour Pierre Merlin et Yves Prats, l’urbanisme opérationnel peut être quant à lui défini comme un « ensemble d’actions, conduites ou contrôlées par les pouvoirs publics, qui peuvent avoir pour objet la fourniture de terrains équipés (aménagement), la construction de bâtiments ou le traitement de bâtiments existants (rénovation, restauration, réhabilitation) » (P. Merlin, Y. Prats, « Urbanisme opérationnel », dans P. Merlin, F. Choay (dir.), Dictionnaire de l’urbanisme…, op. cit., p. 804).
14 C. Chaline, Urbanisme et développement : évaluation de quatre schémas directeurs métropolitains, Ankara, Le Caire, Rabat, Tunis, Paris, SEDES, 1989, p. 9.
15 C. Chaline, Urbanisme et développement…, op. cit., p. 9.
16 J.-G. Padioleau, R. Demeestere, « Les démarches stratégiques de planification des villes », Annales de la recherche urbaine, 51, 1989, p. 28-39 ; P. Healey et al. (éd.), Making Strategic Spatial Plans : Innovation in Europe, Londres, UCL Press, 1997 ; L. Albrechts, « Strategic (Spatial) Planning Reexamined », Environment and Planning B : Planning and Design, 31, 2004, p. 743-758.
17 Notamment à travers le Emergency Rehabilitation Project.
18 A. Faludi, « The Rationale of Planning Theory », dans A. Faludi (éd.), AReader in Planning Theory, Oxford, Pergamon Press, 1973, p. 35-53.
19 P. Lascoumes, P. Le Galès, « Introduction : l’action publique saisie par ses instruments », dans Id. (dir.), Gouverner par les instruments, Paris, Presses de Sciences Po, 2005, p. 11-44.
20 H. David, The Urbanization of Capital, op. cit., chap. 7, « On Planning the Ideology of Planning ».
21 D.-C. North, The Political Economy of Institution and Decision Series, New York, Cambridge University Press, 1990.
22 Au premier rang desquels le Conseil de développement du Cambodge, organe intersectoriel devant notamment servir de « guichet » pour les acteurs internationaux voulant investir au Cambodge.
23 Gouvernement royal du Cambodge, National Strategic Development Plan for Growth, Employment, Equity And Efficiency to Reach Cambodia Millennium Development Goals. Update 2009-2013, Phnom Penh, GRC, 2010, 199 p.
24 Gouvernement royal du Cambodge, The Rectangular Strategy for Growth, Employment, Equity and Efficiency in Cambodia, Phnom Penh, GRC, 2004, 25 p.
25 A. Osmont, La Banque mondiale et les villes : du développement à l’ajustement, Paris, Karthala, 1995, 309 p.
26 Voir le site du ministère de la Planification du Cambodge : http://www.mop.gov.kh/.
27 Gouvernement royal du Cambodge, The Rectangular Strategy for Growth, Employment, Equity and Efficiency in Cambodia. Phase III, Phnom Penh, GRC, 2013.
28 Id., National Strategic Development Plan 2014-2018, Phnom Penh, GRC, 2014.
29 Nous insisterons sur la notion de gouvernance dans le contexte urbain au cours du chapitre 6.
30 Gouvernement royal du Cambodge, The Rectangular Strategy for Growth…, op. cit. ; Id., The Rectangular Strategy for Growth, Employment, Equity and Efficiency in Cambodia. Phase II, Phnom Penh, GRC, 2008 ; Id., The Rectangular Strategy for Growth, Employment, Equity and Efficiency in Cambodia. Phase III, op. cit.
31 La sous-région du Grand Mékong correspond à une organisation régionale réunissant l’ensemble des pays où coule le Mékong (Chine [province du Yunnan], Birmanie, Thaïlande, Laos, Cambodge et Vietnam). Initié par la Banque asiatique de développement en 1992, ce projet doit permettre une plus grande coopération entre États pour le partage et la gestion des ressources naturelles et économiques du Mékong. Phnom Penh est partie intégrante du sous-corridor économique sud, qui relie Bangkok, Phnom Penh, Ho Chi Minh Ville et Vung Tau. Pour une approche critique du processus d’industrialisation au Cambodge en lien avec l’intégration régionale du pays, voir F. Bafoil, « État prébendier et politiques industrielles au Cambodge », Critique internationale, 4/65, 2014, p. 105-125.
32 Gouvernement royal du Cambodge, The Rectangular Strategy for Growth, Employment, Equity and Efficiency in Cambodia. Phase III, op. cit., p. 23.
33 Le dernier projet de la stratégie rectangulaire de 2013 note à ce titre que le Cambodge est à la quatrième position mondiale en termes de « performance de réduction de la pauvreté » (ibid., p. 3).
34 B. Garth, Y. Dezalay, « Le “Washington consensus”. Contribution à une sociologie de l’hégémonie du néolibéralisme », Actes de la recherche en sciences sociales, 121, 1998, p. 3-22 ; M. Gunder, « Planning as the Ideology of (Neoliberal) Space », Planning Theory, 9, 2010, p. 298-314.
35 B. Jobert (éd.), Le tournant néo-liberal en Europe : idées et recettes dans les pratiques gouvernementales, Paris, L’Harmattan, 1994 ; N. Douay, La planification urbaine à l’épreuve de la métropolisation : enjeux, acteurs et stratégies à Marseille et à Montréal, thèse de doctorat en aménagement dirigée par A. Motte et M.-O. Trépanier, université Paul-Cézanne/université de Montréal, 2008.
36 N. Douay, La planification urbaine à l’épreuve de la métropolisation…, op. cit.
37 Par exemple, une initiative du Groupe Banque mondiale, intitulée Doing Business, propose un tableau récapitulatif des procédures pour obtenir un permis de construire au Cambodge pour les ouvrages supérieurs à 3000 m2 de surface. Ce document stipule très clairement, à certaines étapes de la demande, la possibilité de payer des « contributions informelles » pour faire avancer plus rapidement les demandes (voir : http://www.doingbusiness.org/data/exploreeconomies/cambodia/dealing-with-construction-permits/).
38 Si les modes de financement, les moyens d’intervention et les approches économiques des grandes agences multilatérales sont loin d’être semblables, elles participent d’une même approche libérale et néolibérale du développement économique au sein des pays en développement (M. T. Berger, M. Beeson, « Lineages of Liberalism and Miracles of Modernisation : The World Bank, the East Asian Trajectory and the International Development Debate », Third World Quarterly, 19, 1998, p. 487-504 ; J. E. Stiglitz, La grande désillusion, Paris, Librairie générale française, 2003).
39 Voir http://www.adb.org. Nous retrouvons un des concepts clés du new public managment.
40 Traduit de knowledge solutions, l’expression « appui à la connaissance » est devenue courante au sein des grandes organisations régionales, des agences de développement bilatérales et multilatérales, mais aussi des organisations non gouvernementales. Elle intègre pour la Banque asiatique de développement le développement stratégique, les techniques managériales, les mécanismes de collaboration, ainsi que l’appropriation, le partage et le stockage de savoirs et d’expériences.
41 Phnom Penh Plan for Development Management faborise l’intégration du Cambodge aux divers objectifs de développement de la sous-région du Grand Mékong.
42 Voir la série de rapports produits par la BAD, notamment l’ensemble des Country Operations Business Plan écrits depuis 2008, ainsi que : Banque asiatique de développement, Country Operational Strategy Study for the Kingdom of Cambodia. Developing the Capacity for Reconstruction and Development, Phnom Penh, BAD, 1995.
43 J. Sato et al., « “Emerging Donors” from a Recipient Perspective : An Institutional Analysis of Foreign Aid in Cambodia », World Development, 39, 2011, p. 2091-2104.
44 Municipalité de Phnom Penh, Ambassade de France au Cambodge, Livre blanc du développement et de l’aménagement de Phnom Penh…, op. cit.
45 E. Huybrechts, F. Mauret, « Phnom Penh (Cambodge). Le renouveau de la planification urbaine », art. cité.
46 Entretien réalisé le 8 décembre 2010 avec un fonctionnaire de la municipalité de Phnom Penh.
47 G. Fauveaud, Produire la ville en Asie du Sud-Est. Les stratégies sociospatiales des acteurs immobiliers à Phnom Penh, Cambodge, thèse de doctorat en géographie dirigée par T. Sanjuan, université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 2013, « Introduction générale », p. 9-48.
48 Entretien du 3 mai 2012 avec un expert international à Phnom Penh.
49 C. Gallez, M. Hanja-Niriana, « À quoi sert la planification urbaine ? », Flux, 69, 2007, p. 49-62.
50 J. Forester, Planning in the Face of Power, Berkeley, University of California Press, 1989.
51 M. Godfrey et al., « Technical Assistance and Capacity Development in an Aid-dependent Economy : The Experience of Cambodia », World Development, 30/3, 2002, p. 355-373.
52 R. Ballard et al., « Planification stratégique et formes émergentes de démocratie à Ethekwini, Durban », Revue Tiers Monde, 196, 2008, p. 837-850 ; F. Iovalucchi, O. De Sardan, « Planification, gestion et politique dans l’aide au développement : le cadre logique, outil et miroir des développeurs », Revue Tiers Monde, 198, 2009, p. 383-406.
53 P. Cary, S. Fol, « Introduction », Géographie, économie, société, 14, 2012, p. 113-126.
54 Gouvernement royal du Cambodge, « The Cambodian Government’s Achievements and Future Direction in Sustainable Development. National Report for Rio + 20 », United Nations Conference on Sustainable Development, Phnom Penh, GRC, 2012. Dans ce rapport, les enjeux fonciers sont mentionnés en ces termes : « On estime que le nombre de conflits liés au foncier a crû au cours des dernières années, tout comme le nombre de personnes sans terres (qui serait passé, de 1997 à 2007, de 13 % de la population à 20-25 %). Cette évolution peut représenter une potentielle source de conflit social [The number of conflicts related to land is estimated to have risen in recent years as has the number of landless people (from an estimated 13 percent in 1997 to 20-25 percent in 2007). This can represent a potential source of social conflict] ») (ibid., p. 116-117). Comme au sein de la stratégie rectangulaire, la croissance et le développement doivent être garantis par un environnement politique et institutionnel stable. Depuis 2008, la notion d’« ordre social » fait partie des grands enjeux de la stratégie rectangulaire. On peut dès lors s’interroger, à la suite de Simon Springer (S. D. Springer, Cambodia’s Neoliberal Order : Violence, Authoritarianism, and the Contestation of Public Space, Londres/New York, Routledge, 2010), sur la portée de ce glissement sémantique : l’« ordre social » est-il un indicateur de démocratisation, ou au contraire un objectif à atteindre et à conserver pour assurer un développement plus efficace et rapide, quitte à renier certains fondements de la démocratie ?
55 Entretiens informels à la municipalité de Phnom Penh entre 2008 et 2009.
56 Guillaume Stetten et Ingrid Picard notent en 2005, à propos de la partie nord de la ville, que « les conditions topographiques et hydrologiques conduisent à une inondation quasi totale de la zone pendant la saison des pluies. Les rares zones exondées sont toutes urbanisées, et s’accroissent progressivement par remblaiements et aménagements. […] Aujourd’hui, ces liaisons hydrauliques majeures sont mises à mal par des remblaiements excessifs qui compromettent gravement les capacités nécessaires à l’écoulement des événements pluvieux importants. Le risque de débordement devient très important compte tenu de la vulnérabilité du site » (G. Stetten, I. Picard, « Plan d’action sur le réseau de drainage et d’assainissement », dans Étude préalable à l’élaboration du schéma directeur d’urbanisme de Phnom Penh à l’horizon 2020, Phnom Penh, Agence Desaix, 2005, p. 11-12).
57 Pour une explication de l’importance et de la portée culturelle de la fête des eaux à Phnom Penh, voir A. Leclère, « La fête des eaux à Phnom Penh », Bulletin de l’École française d’Extrême-Orient, 4, 1904, p. 120-130.
58 G. Fauveaud, « Retour sur le drame de l’Île des Diamants : l’investissement immobilier des grands projets urbains à Phnom Penh », EchoGéo, 2011, mis en ligne le 3 mai 2011, DOI : 10.4000/echogeo.12367.
59 Les nombreux articles de presse répétaient à ce titre l’origine avant tout provinciale des victimes. Selon un nombre important de médias, le mouvement de foule aurait été déclenché après que le pont a bougé. Ce type de remarque illustre une certaine stigmatisation des populations d’origine rurale à Phnom Penh, qui n’auraient pas l’habitude des ponts suspendus.
60 L’expression « communauté pauvre » renvoie à celle généralement utilisée par les ONG et les organisations internationales pour désigner un ensemble de familles en situation de précarité socio-économique vivant sur un même site ; elle ne signifie en rien l’organisation en communauté des ménages.
61 Lao Meng Khin est un personnage central du PPC. Membres du premier cercle de Hun Sen, Lao Meng Khin et sa femme Cheung Sopheap assurent une grande partie du financement du PPC (R. Bertrand, Cambodge : le carnaval démocratique, rapport du Fond d’analyse des sociétés politiques [Fasopo], Paris, 2004). Cheung Sopheap dirige le groupe cambodgien Pheapimex dont les activités concernent principalement l’exploitation des sols et des sous-sols, l’énergie et, de manière croissante, l’immobilier. Cette compagnie possède au Cambodge une nébuleuse de sociétés qui travaillent avec un nombre important de partenaires étrangers, principalement chinois. Par exemple, la compagnie chinoise Wuzhishan LSGroup s’est associée par joint-venture à Pheapimex pour l’exploitation de trois concessions dans les provinces de Mondolkiri et de Pursat (Global Witness, Cambodia’s Family Trees, Phnom Penh, Global Witness, 2007). Certains journalistes avancent que la société Pheapimex et ses différentes joint-venture possèdent environ 7,4 % des terres du Cambodge (« A Shadow Over Boeung Kak Lake (1) », Chinadialogue, 16 novembre 2011).
62 Banque mondiale, Management Report and Recommendation in Response to the Inspection Panel Investigation Report, Cambodge, 2011.
63 Sok An, vice-Premier ministre du Cambodge, est un des hommes politiques les plus influents du Cambodge ; il appartient au PPC.
64 G. Fauveaud, Produire la ville en Asie du Sud-Est…, op. cit.
65 Considérée ici comme une « situation de mise à l’écart issue d’une représentation officielle et majoritaire, intégrée par les acteurs urbains dominants » (A. Sierra, J. Tadié, « Introduction », Autrepart, 45, 2008, p. 3).
66 M. Tudehope, ATale of Two Cities. AReview of the Development Paradigm in Phnom Penh, Phnom Penh, Sahmakum Teang Tnaut, 2012.
67 P. Marcuse, « “Dual City” : A Muddy Metaphor for a Quartered City », International Journal of Urban and Regional Research, 13/4, 1989, p. 697-708.
68 Le terme khmer tchorng iet, qui signifie littéralement « exigu », « étroit » ou « serré », est généralement associé aux termes « logement » ou « maison » pour désigner les espaces d’habitation précaire.
69 Les terrains publics sont communément désignés par le terme dey roadh, qui signifie littéralement « terre de l’État ».
70 A. Carrier, Les « lois de la possession » à Phnom Penh : conversion des droits d’usage résidentiel issus du contexte socialiste de réappropriation urbaine (1979-1989) en droits de propriété, thèse de doctorat en urbanisme dirigée par C. Goldblum, Institut français d’urbanisme, 2007.
71 P. Fallavier, Participation as an End Versus a Means : Understanding a Recurring Dilemma in Urban Upgrading, thèse de doctorat dirigée par B. Rajagopal, Massachusetts Institute of Technology, 2007, p. 71-72.
72 C. Thibault, L’archipel des camps. L’exemple cambodgien, Paris, PUF, 2008.
73 C. Pierdet, « Marges aquatiques et politiques urbaines au centre de Phnom Penh (Cambodge) », Autrepart, 45, 2008, p. 123-136.
74 V. Clerc, « Du formel à l’informel dans la fabrique de la ville. Politiques foncières et marchés immobiliers à Phnom Penh », Espaces et sociétés, 3, 2011, p. 63-79.
75 S. D. Springer, « Illegal Evictions ? Overwriting Possession and Orality with Law’s Violence in Cambodia », Journal of Agrarian Change, 13/4, 2013, p. 520-546.
76 V. Clerc, V. Rachmuhl, Les marchés fonciers et immobiliers des quartiers informels à Phnom Penh, Paris, Gret, 2008.
77 Fait marquant, la municipalité a fusionné il y a quelques années le bureau en charge des communautés pauvres avec le bureau en charge des investissements.
78 Cohre, Land and Housing Working Group, Land and Housing Rights in Cambodia. Parallel Report, Phnom Penh, Cohre, 2009 ; Licadho, Land Grabbing & Poverty in Cambodia : The Myth of Development, Phnom Penh, 2009.
79 Sahmakum Teang Tnaut, Displaced Families : Phnom Penh 1990-2011, Phnom Penh, Sahmakum Teang Tnaut, 2011.
80 Amnesty International, Rights Razed : Forced Evictions in Cambodia, Phnom Penh, Amnesty International, 2008.
81 Des évictions foncières sont relevées dès le début des années 1990 et dénoncées alors par l’ONU.
82 Le land sharing s’apparente à un projet de « relogement sur place ». Lorsque l’État décide de vendre à un opérateur privé un terrain lui appartenant, et si ce dernier est occupé spontanément par des habitants, le projet de land sharing impose à l’acquéreur de réserver une partie de la parcelle au relogement des habitants illégalement installés sur la parcelle. Le land sharing est un exemple de partenariat public-privé, car une partie du coût du relogement est prise en charge par l’acteur privé (viabilisation du terrain, construction des habitations et des infrastructures). Si le land sharing à Phnom Penh a été présenté comme une réelle innovation en matière de politique du logement, les résultats ont été bien souvent décevants (P. E. Rabé, « Land Sharing in Phnom Penh : An Innovative but Insufficient Instrument of Secure Tenure for the Poor », communication à la conférence internationale « Expert Group Meeting on Secure Land Tenure : New Legal Frameworks and Tools », Bangkok, United Nations-Economic and Social Commission for Asia and the Pacific, 8-9 décembre 2005 ; S. Ouellet, L’intégration des habitants des quartiers informels dans la ville légale : l’expérience du land sharing à Phnom Penh (Cambodge), mémoire de maîtrise en droit international dirigé par H. Piquet, université du Québec à Montréal, 2009).
83 V. Clerc, V. Rachmuhl, Les marchés fonciers et immobiliers…, op. cit.
84 J. Blot, « Politique de lutte contre la pauvreté ou nettoyage urbain ? Les opérations de relogement dans la périphérie phnom penhoise », Péninsule, 61, 2010, p. 221-247.
85 C. McGinn, “Every Day is Difficult for my Body and my Heart.” Forced Evictions in Phnom Penh, Cambodia : Women’s Narratives of Risk and Resilience, thèse de doctorat en arts et sciences dirigée par J. D. Burnette, Columbia University, 2013.
86 Sahmakum Teang Tnaut, Resettling Phnom Penh : 54 – And Counting ?, Phnom Penh, Sahmakum Teang Tnaut, 2012.
87 C. Jackson, « Urban Squatters in Southeast Asia », Geography, 59, 1974, p. 24-30.
88 E. Berner, « Poverty Alleviation and the Eviction of the Poorest : Towards Urban Land Reform in the Philippines », International Journal of Urban and Regional Research, 24/3, 2000, p. 554-566 ; J. Blot, A. Spire, « Déguerpissements et conflits autour des légitimités citadines dans les villes du Sud », L’Espace politique, 22, 2014, DOI : 10.4000/espacepolitique.2893 ; M. Gibert, « Déplacements forcés et renouvellement urbain à Ho Chí Minh Ville », L’Espace politique, 22, 2014, DOI : 10.4000/espacepolitique.2905 ; G. Shatkin, « Planning Privatopolis… », art. cité ; Id., « Contesting the Indian City : Global Visions and the Politics of the Local », International Journal of Urban and Regional Research, 38/1, 2014, p. 113.
89 J. Blot, Les déguerpissements à Phnom Penh (Cambodge). Déplacements forcés et relocalisations contraintes des citadins pauvres, thèse de doctorat en géographie dirigée par O. Sevin, université Paris-Sorbonne, 2013.
90 En juillet 2014, un avocat en droit international a déposé une plainte pour crime contre l’humanité auprès de la Cour pénale internationale de La Haye impliquant un certain nombre de hauts dirigeants et chefs d’entreprise cambodgiens pour leur implication dans différentes activités illégales et pour divers assassinats. L’accaparement de ressources foncières et les évicions en résultant y occupent une place impor tante. L’avocat représente de nombreuses organisations non gouvernementales et de la société civile à l fois cambodgiennes et internationales.
91 J. Blot, Les déguerpissements à Phnom Penh…, op. cit.
92 G. Fauveaud, « Croissance urbaine et dynamiques socio-spatiales… », art. cité.
93 G. Fauveaud, « Phnom Penh ou l’ordre métropolitain. Polices, pouvoirs et territoires », EchoGéo, 28 2014, DOI : 10.4000/echogeo.13807.
94 Un quai ou une voie bordant une berge se dit couramment phleuw moat tonlé.
95 G. Fauveaud, « Phnom Penh ou l’ordre métropolitain… », art. cité.
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