Les politiques de mixité sociale en France : de l’injonction politique nationale aux contradictions locales
p. 117-133
Texte intégral
1Depuis les années 1990, le thème de la mixité apparaît de manière récurrente dans l’énoncé des objectifs des politiques urbaines menées en France. Ayant émergé dans un contexte de montée des formes de pauvreté urbaine, la notion de mixité sociale est fortement liée à celle d’exclusion sociale et urbaine. Face au développement des processus de précarisation, le succès de la rhétorique de la mixité s’appuie sur l’idéal d’une société « équilibrée », mélangeant harmonieusement classes sociales, groupes ethniques et générations pour conjurer la cristallisation de poches de pauvreté. En effet, celles-ci seraient en elles-mêmes problématiques parce qu’à la base d’une culture de la pauvreté et du développement de l’insécurité.
2Certes, cette préoccupation n’est pas nouvelle et elle n’est pas non plus spécifique au contexte français même si elle n’a pas toujours été posée en ces termes : la question de la diversité sociale et urbaine est présente, plus ou moins explicitement, dans les débats qui accompagnent la mise en œuvre des premières interventions publiques dans le champ du logement en Europe et aux États-Unis (Bacqué, 2003a). Dès la fin du XIXe siècle, en France, cette question est évoquée lors de la discussion des premières lois sur le logement, en particulier de la loi Siegfried (Magri, 1995). Dans ces débats apparaît déjà la question des destinataires du logement social et celle de la localisation de ces logements, groupée ou dispersée. Au début des années 1960, la discussion engagée aux États-Unis par Herbert Gans, critiquant les effets d’une hypothétique hétérogénéité sociale à partir de son travail sur la ville nouvelle de Levittown1 (Gans, 1961), montre bien des similitudes avec la célèbre démonstration conduite une décennie plus tard par Jean-Claude Chamboredon et Madeleine Lemaire (1970), mettant à mal l’équivalence entre proximité spatiale et proximité sociale. D’autres recherches confirment et actualisent ces conclusions dans les années 1980 (Pinçon, 1982). Dans cette période, la notion de « diversité » est pourtant largement utilisée dans la gestion des politiques d’attribution des logements sociaux.
3À cette époque, une série de travaux interrogent la question de la ségrégation (Pinçon-Charlot et al., 1986 ; Brun, Rhein, 1994 ; Grafmeyer, 1994 ; Gaudin et al., 1995 ; Haumont, 1996) et mettent en avant le rôle de l’agrégation dans les processus de division socio-spatiale (Pinçon, Pinçon-Charlot, 1989). De ces différentes recherches, il ressort que la ségrégation, si elle est engendrée par des processus de relégation, est aussi le résultat de stratégies résidentielles conduisant certains groupes sociaux, et en particulier les plus favorisés, à se regrouper. Dans ces conditions, les politiques de mixité sociale ont toutes les chances de se heurter aux souhaits résidentiels des ménages. Par ailleurs, dans la lignée des travaux de l’École de Chicago, certains auteurs ont montré que l’homogénéité résidentielle de certains quartiers peut dans certains cas favoriser les processus d’intégration de leurs habitants (Genestier, 1990 ; Simon, 1995). À l’inverse, les politiques fondées sur la dispersion des ménages pauvres peuvent amener ces derniers à devoir renoncer à certaines ressources fondées sur la proximité, qui leur sont pourtant particulièrement précieuses (Briggs, 2005, 2007 ; Fol, 2005 ; Bacqué et Fol, 2007).
4Malgré ces débats nourris et anciens, la mixité sociale reste aujourd’hui l’un des piliers des politiques urbaines françaises et de nombreuses politiques de logement menées dans des contextes sociaux et politiques très différents se réclament du même objectif. Le présent article vise à en analyser de manière critique les attendus, tant dans la littérature académique que dans les politiques publiques. Il tente également de montrer que dans le cas français, si la mixité sociale fait l’objet d’une injonction politique au niveau national, sa mise en œuvre n’en soulève pas moins des contradictions presque insurmontables à l’échelle locale.
Les fondements des politiques de mixité sociale
5La notion de mixité sociale, telle qu’elle a été développée à partir des années 1990 en France est très liée aux notions de ségrégation, d’une part, et d’exclusion, d’autre part, auxquelles elle est censée apporter une réponse à la fois théorique et opérationnelle. Reposant sur les notions d’égalité et de justice sociale, l’idéal de mixité s’oppose à des situations de ségrégation considérées comme contraires à l’idéal républicain (Bacqué, 2003b). Sa mise en œuvre doit également permettre de lutter contre les processus d’exclusion en offrant aux individus et aux ménages en difficulté la possibilité de cohabiter avec des individus et des ménages appartenant à des groupes mieux « intégrés » à la société et susceptibles de favoriser leur propre processus d’intégration.
6L’appel à la mixité repose ainsi sur un double postulat, selon lequel, d’une part, les situations de ségrégation seraient en voie d’accentuation, et, d’autre part, la concentration de la pauvreté serait en soi un problème, ayant des effets particulièrement nocifs pour les populations qui en sont victimes. Le premier terme de ce postulat est illustré par le développement récent de travaux tendant à démontrer que la ségrégation est un phénomène qui s’aggrave et que ses manifestations traversent la société urbaine tout entière par une généralisation des processus de sécession urbaine (Donzelot, 2004) ou de séparatisme socio-spatial (Maurin, 2004). Pour Jacques Donzelot, les mécanismes antérieurs d’unification de la société auraient inversé leurs effets et produit une « ville à trois vitesses » comprenant trois types d’espaces distincts : ceux de la relégation des cités d’habitat social, ceux de la périurbanisation des classes moyennes redoutant la proximité avec les « exclus » des cités mais se sentant « oubliées » par l’élite des « gagnants », principale actrice des processus de gentrification des centres anciens. Relégation, périurbanisation et gentrification procéderaient ainsi d’une tripartition de la ville. À la ville industrielle, fondée sur le conflit au travail et la promotion sociale individuelle, se serait ainsi substituée une ville de la mondialisation, organisée autour de deux pôles, haut et bas, non reliés et entre lesquels s’intercale une « population de classes moyennes qui constitue la principale part de la société et contribue à la relégation autant qu’elle se sent rejetée par le processus de gentrification » (Donzelot, 2004). De son côté, Éric Maurin (2004) décrit une société compartimentée, au sein de laquelle le séparatisme social s’impose comme l’un des « principes structurants de la coexistence sociale ». Les mécanismes de la ségrégation traversent ainsi toute la société et non seulement ses franges, l’ensemble des catégories sociales mettant en œuvre des stratégies d’évitement. La ségrégation apparaît dès lors comme « une tension diffuse, fractale, donnant son visage à l’ensemble du pays, mais dont le principe est tout entier contenu dans l’organisation sociale du moindre quartier de la moindre commune de banlieue » (Maurin, 2004). Ce processus a cependant pour effet de renforcer la marginalisation des groupes sociaux les plus pauvres dans certaines communes à forte concentration de logements sociaux. En réalité, la réponse à la question de l’accentuation des processus de ségrégation n’est pas aussi tranchée. Les travaux de Préteceille (2003, 2006) montrent une polarisation de l’espace francilien qui ne se traduit pas par une accentuation de la ségrégation dans les espaces populaires mais par une concentration accrue des cadres dans les banlieues résidentielles où ils étaient déjà fortement implantés.
7Le second terme du postulat sur lequel repose la rhétorique de la mixité trouve son fondement dans la thèse des effets de quartier. Cette thèse, développée initialement aux États-Unis, tend aujourd’hui à se diffuser en Europe et part de l’idée selon laquelle la concentration de la pauvreté dans des territoires ségrégés est problématique en ce qu’elle engendre un processus d’isolement spatial et social qui renforce les difficultés d’accès à l’emploi et les formes de dépendance sociale des ménages qui en sont victimes. Ce processus d’isolement est lui-même lié à une inscription faible dans des réseaux sociaux « efficaces » en termes d’insertion sociale et économique et à l’éloignement des zones d’emplois. La concentration des ménages pauvres dans des quartiers isolés spatialement et socialement du reste de la société urbaine aurait donc pour effet de redoubler les conséquences de la pauvreté en termes d’accès à l’emploi, de résultats scolaires ou de comportements dits déviants.
8La thèse des effets de quartier a été influencée par les théories de la « contagion », développées notamment par Crane (1991) qui en a emprunté le modèle mathématique à l’épidémiologie. Les problèmes sociaux seraient contagieux et se répandraient par l’influence des groupes de pairs. Comme pour les maladies, il existerait des niveaux critiques d’incidence des problèmes sociaux au sein de la population, au-delà desquels les problèmes se répandent de manière exponentielle : l’épidémie se déclare. Certains types de population seraient plus sensibles à la contagion : les enfants de familles monoparentales, les hommes pauvres vivant en milieu urbain, les adolescentes noires pauvres… Cette thèse fait l’objet, en Amérique du Nord, d’un débat très nourri. Des travaux nombreux se sont penchés sur l’influence du quartier, analysée selon différents registres : comportement des individus aux différentes périodes de la vie, et en particulier effets sur les conduites délinquantes ; état de santé ; niveau de « développement » des enfants et réussite scolaire ; accès à l’emploi et insertion professionnelle des jeunes et des adultes. Différentes synthèses (Ellen et Turner, 1997 ; Brooks-Gun et al., 1993 ; Marpsat, 1999) en dégagent des résultats mitigés sans conclusion claire. Si l’environnement social du quartier semble jouer un rôle dans les processus de socialisation, la « réussite » et l’insertion sociale des individus, il reste très difficile de distinguer, parmi ces effets, ce qui relève du quartier à proprement parler et ce qui ressort des caractéristiques sociales des individus et des familles.
9Un autre volet de recherche plus récent, émane des évaluations des opérations de déségrégation (Goering et Feins, 2003 ; Goetz, 2003). Mais ces évaluations ne confirment ni n’infirment l’hypothèse des effets de quartier. Si le déménagement dans des quartiers aisés a permis à certains ménages d’engager des parcours de mobilité sociale, ceux-ci sont jalonnés d’obstacles qui renvoient aux caractéristiques sociales de ces ménages. Pour d’autres, le déménagement s’est traduit par un isolement social accentué et de nouvelles difficultés. Dès lors, si les effets de contexte jouent bien dans le destin des ménages, on ne saurait pour autant les appréhender de façon simpliste et homogène. Interviennent ici les trajectoires sociales et familiales mais aussi différentes dimensions sociales, spatiales et institutionnelles de l’organisation urbaine des quartiers dont ne rend pas compte la catégorie de quartier « pauvre » ou quartier « aisé » (Bacqué et Fol, 2005b, 2007).
10Les résultats des travaux cherchant à vérifier la thèse des effets de quartier sont donc mitigés. En France, ils n’en alimentent pas moins des préconisations fortement favorables aux politiques de déségrégation et de mixité sociale. Ainsi, Maurin (2004) met en avant les effets positifs du déménagement des familles pauvres dans des quartiers plus favorisés, notamment en termes d’amélioration de la santé des enfants et de leur comportement. De même, Goux et Maurin (2004) s’inspirent explicitement des questions et des méthodes des travaux américains pour démontrer une forte corrélation entre les résultats scolaires et le milieu (défini par le niveau social du voisinage ou le mois de naissance des enfants du voisinage2). Ces analyses, qui rencontrent un important écho politique (Fitoussi et al., 2004) et médiatique, tendent à produire un discours réducteur sur la nature des processus de ségrégation et leurs effets, qui n’est pas sans incidence sur la construction des politiques publiques. La mixité serait un moyen de « tirer les plus pauvres vers le haut » en les mettant en contact avec des ménages issus de groupes sociaux plus favorisés, susceptibles non seulement de leur servir de « modèles » mais aussi de leur faire bénéficier de réseaux sociaux « efficaces » en termes d’insertion professionnelle et sociale (Granovetter, 1973 ; Wilson, 1987, 1996). Cette hypothèse renvoie aux débats sur le capital social. Robert Putnam (2000) définit le capital social comme un ensemble de liens, de normes et de confiance facilitant la coordination et la coopération au sein d’un groupe ou d’une société. Les « communautés » efficaces sont celles qui possèdent un capital social important alors que le manque de ressources de certaines « communautés » serait dû à un faible capital social. Si la thèse générale de R. Putnam est que la société américaine dans son ensemble connaît un déclin du capital social, la faiblesse du capital social est vue comme une caractéristique majeure des quartiers « pauvres » et des individus qui y vivent : l’isolement spatial et social priverait ces individus de contacts avec des personnes appartenant à d’autres groupes sociaux. Et si les réseaux sociaux internes au quartier existent, le capital social qu’ils représentent n’aurait guère d’utilité pour les habitants des quartiers pauvres car il ne leur permet pas d’ouverture vers d’autres univers sociaux, seule clé d’accès aux emplois ou à la réussite sociale.
11Réponse aux processus de ségrégation et à leurs supposés effets négatifs sur les possibilités d’intégration des ménages pauvres, les politiques de mixité sociale se sont développées en France à partir du début des années 1990. Ces politiques articulent deux dimensions, territoriale et individuelle. D’un côté, elles sont présentées comme un moyen de combattre la ségrégation spatiale et la cristallisation de la pauvreté dans l’espace urbain ; de l’autre, elles permettraient aux ménages qui en bénéficient, d’échapper à la culture de la pauvreté et de bénéficier des atouts d’un « bon » voisinage.
La mise en place des politiques de mixité sociale en France : une injonction nationale
12À partir des années 1980, en France, la mixité est affichée comme un objectif politique et fait l’objet de plusieurs lois. Si les premières mesures législatives semblent avoir peu d’effets, elles contribuent cependant à faire de la mixité sociale et de la solidarité urbaine un enjeu public et politique au niveau national. Ainsi, la loi visant à la mise en œuvre du droit au logement, dite loi Besson (du 31 mai 1990), lie l’accueil des ménages défavorisés à la mixité et à la solidarité. Le dispositif de gestion des attributions qu’elle définit, le Protocole d’occupation du patrimoine social (POPS) vise à ouvrir les portes du logement social aux populations en situation de précarité mais en respectant les « équilibres sociaux ». En réalité, dans nombre de cas, les POPS se réduisent à la définition arbitraire d’un équilibre, souvent basé sur une moyenne des caractéristiques de peuplement dans le patrimoine social et au rétrécissement des critères d’attribution dans les groupes sociaux les plus paupérisés (Bacqué et Berrat, 1995).
13La loi d’orientation pour la ville, baptisée loi anti-ghetto (du 13 juillet 1991) affirme le « droit à la ville pour tous ». Dans l’esprit de la loi, la lutte contre la ségrégation s’oppose à la constitution de secteurs résidentiels homogènes et impose la diversité dans l’habitat, le postulat sous-jacent étant que celle-ci est la condition de la cohésion sociale. La loi prévoit que les communes de plus de 200 000 habitants comptant moins de 20 % de logements sociaux s’engagent à construire ces logements ou s’acquittent d’une taxe. Cette loi, très médiatisée, n’a pas soulevé d’oppositions frontales au moment de son vote et les différents amendements proposés par la droite concernaient essentiellement la contribution financière des communes concernées. Les élus locaux, et plus particulièrement les élus communistes, redoutaient quant à eux une atteinte à l’autonomie communale et s’inquiétaient que l’État, au nom de la diversité sociale, puisse refuser le financement de logements sociaux dans des communes possédant déjà un parc social important. Portée par les élus socialistes, la LOV est rapidement en partie vidée de son contenu lors du changement de majorité. En 1998, la loi contre les exclusions énonce : « la mixité c’est d’abord un équilibre humain qui est la condition de l’appropriation de la cité par tous les habitants, sans identification à telle ou telle zone stigmatisée dans laquelle ils auraient le sentiment d’être assignés à résidence ». Son volet logement engage une réforme des attributions des logements sociaux et redéfinit les missions du logement social « destiné à des ménages modestes ou défavorisés (…) mais dans le respect de la mixité sociale » (loi no 98-657 du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions). Quant à la loi Chevènement portant sur l’intercommunalité (du 12 juillet 1999), elle est présentée par le ministre comme une « loi contre l’apartheid social ». En décembre 2000, la loi sur la solidarité et le renouvellement urbain (SRU), qui a soulevé une tempête de protestations chez les députés de droite et reste aujourd’hui contestée par une partie d’entre eux, confirme les principes de la LOV de 1991 en imposant aux collectivités territoriales un taux minimum de 20 % de logements sociaux. L’article 55 de la loi SRU impose aux communes de plus de 1 500 habitants en Île-de-France et de plus de 3 500 habitants dans les autres régions, comprises dans des agglomérations de plus de 50 000 habitants comptant au moins une commune de plus de 15 000 habitants, et dans lesquelles le nombre total de logements locatifs sociaux représente moins de 20 % des résidences principales, d’être soumise à un inventaire annuel des logements sociaux existant sur leur territoire. En cas de non-réalisation de l’objectif de 20 % de logements sociaux, un prélèvement sur les ressources fiscales est effectué, calculé à partir de la différence entre le seuil de 20 % de résidences principales et le nombre de logements sociaux existant dans la commune. Le produit des taxes locales (foncier bâti, foncier non bâti, taxe d’habitation et taxe professionnelle) est alors diminué du montant de ce prélèvement. Celui-ci ne dispense d’ailleurs pas les communes de produire les logements manquants, à un rythme de 15 % par an. Le conseil municipal doit donc définir un objectif de réalisation de logements locatifs sociaux qui ne peut être inférieur au nombre de logements nécessaires pour atteindre 20 % du total des résidences principales. Toutefois, lorsque la commune appartient à une structure intercommunale, celle-ci fixe par un Programme local de l’habitat (PLH) l’objectif de réalisation de logements locatifs sociaux pour chaque commune, le nombre total de ces logements ne pouvant être inférieur à 20 % sur le territoire de la communauté. Enfin, la loi d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, dite loi Borloo, adoptée le 1er août 2003, marque bien la continuité puisque son objectif est de « restructurer, dans un objectif de mixité sociale et de développement durable » les quartiers classés en zone urbaine sensible (loi no 2003-710 du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine). L’État engage ainsi un vaste programme de démolition des grands ensembles dans l’objectif de faire disparaître les noyaux de pauvreté à travers les opérations dites de renouvellement urbain. Celles-ci reposent sur des restructurations lourdes qui visent à éliminer les segments du parc considérés comme les « plus problématiques » et à recomposer l’offre de logement, si possible en faisant appel à des investisseurs privés. L’argumentaire est social : il faut revenir à une mixité sociale intégratrice. Il est aussi urbain : il faut réintégrer ces quartiers dans la ville, revenir à la « normalité urbaine », représentée par l’image de la ville du xix3 avec son parcellaire, sa diversité de fonctions et la distinction qu’elle opérait entre espace public, collectif et privé. Ce discours a beaucoup de points communs avec celui qui légitime les opérations dites HOPE VI aux États-Unis4 ; de part et d’autre, il accompagne l’éviction d’une partie des ménages paupérisés4 et un rétrécissement de l’offre sociale5.
14Les politiques d’attribution du logement social sont elles aussi marquées très tôt par la problématique de mixité sociale. Les travaux d’Olivier Masclet (2003) sur Gennevilliers montrent par exemple le tri dont font l’objet les ménages immigrés, souvent algériens, dès les années 1960, au nom des difficultés de l’« assimilation ». Au nom d’un argument culturaliste, la concentration des ménages pauvres et surtout immigrés est posée comme problème, ce qui implique à la fois la mise en place de limites à leur accueil à l’échelle locale et la revendication d’une « dispersion » de ces ménages à l’échelle régionale. La fluctuation des critères d’attribution des logements sociaux, plus ou moins resserrée selon les périodes, renvoie à la même question. À qui faut-il attribuer ces logements ? Faut-il affirmer leur fonction sociale ou au contraire rechercher une mixité ? Ce débat devient plus prégnant quand, au cours des années 1980, les segments les plus dévalorisés du patrimoine social sont marqués par la précarisation de l’occupation sociale. Surtout, les politiques de regroupement familial contribuent à ouvrir celui-ci aux populations immigrées et à « ethniciser » cette question du peuplement.
15Les réponses politiques se développent dans deux directions (Bacqué et Fol, 2005a). La première, considérant que la question principale est celle de l’accès au logement, consiste à tenter de répondre à la demande des ménages les plus précarisés par deux propositions. Des « produits-logement » spécifiques correspondant à de nouveaux types de financements, les PLA très sociaux et les PLA d’insertion, font leur apparition au début des années 1990. Ils viennent ainsi contredire les objectifs de la réforme de 1977 d’unifier le logement social6 et sont caractérisés par une diversité de programmes, de financements et donc de prix de loyers7. Pour produire et gérer ces logements, la puissance publique fait appel à des associations spécialisées. Parallèlement, il est demandé aux organismes HLM d’accueillir plus largement les ménages en situation de précarité et une série de dispositifs visant à clarifier le fonctionnement des modes d’attribution et à redonner consistance aux contingents préfectoraux sont mis en place. La deuxième réponse politique, diagnostiquant une « ghettoïsation » du parc social, consiste au contraire à éviter sa paupérisation, à y faire revenir des couches moyennes ou tout au moins à limiter la concentration des ménages défavorisés. Pour cela, elle mise sur plusieurs modes d’intervention. L’amélioration de la qualité du parc pour le rendre plus attractif repose sur des actions de réhabilitation mais joue de façon plus large sur la qualité de service et sur la transformation urbaine. La diversification de l’offre conduit à des restructurations lourdes, parfois à des opérations de démolition-reconstruction. La gestion du peuplement limite l’accès des ménages défavorisés ou étrangers. Dans la même logique, le dernier-né des financements publics, le PLUS, prêt locatif à usage social, créé en 1999, prévoit qu’au moins 30 % des logements soient occupés par des ménages dont les ressources n’excèdent pas 60 % des plafonds HLM, et qu’au maximum 10 % puissent être loués à des locataires dont les ressources représentent 120 % des plafonds HLM. Ces derniers sont par ailleurs réévalués et augmentés de façon à ouvrir le parc à un spectre plus large de ménages8.
16Dans le cadre de la loi sur la rénovation urbaine, la création de la Foncière Logement, financée par la contribution logement des entreprises, s’inscrit elle aussi dans la continuité des politiques de mixité sociale à travers la mise en place d’un nouveau type de logements : il s’agit de logements sociaux mais à caractère provisoire puisqu’au bout de quinze ans, ils retourneront dans un système de loyers libre. Il est difficile de mesurer aujourd’hui les effets de ce dispositif mais il a quoi qu’il en soit pour effet de faire entrer le secteur privé de manière importante dans la production du logement social en lui donnant la maîtrise complète des opérations, de la conception aux attributions. Par ailleurs, la construction de logements intermédiaires se développe dans les opérations de rénovation urbaine, dans l’objectif d’attirer des ménages des couches moyennes dans les quartiers de la politique de la ville.
17Caractérisées par la continuité, les politiques de mixité sociale n’en soulèvent pas moins d’importantes contradictions. Les collectivités locales comme les gestionnaires de logements sociaux sont en effet pris dans la contradiction d’une double injonction : accueillir les ménages les plus défavorisés et maintenir ou trouver une diversité sociale dans le peuplement.
Les contradictions de l’application de la mixité sociale à l’échelle locale
18Pour illustrer les contradictions dans la mise en œuvre des politiques de mixité sociale à l’échelon local, nous avons choisi de présenter deux cas de figure différents : celui des anciennes communes de la banlieue rouge, auquel nous avons consacré des travaux antérieurs (Bacqué et Fol, 1997 ; Bacqué, Fol, Lévy, 1998 ; Bacqué et Fol, 2000 ; Bacqué et Fol, 2004) et celui de l’agglomération d’Avignon, analysé par Camille Panon9 (2006).
19Dans les communes de la banlieue rouge, la montée de la précarisation dès la fin des 1970 amène les élus locaux à chercher des réponses à la paupérisation qui touche leur population et à la crainte du développement de ce que l’on désigne alors comme l’exclusion sociale. Dès cette période, et avant que ne soit ouvert un débat national sur cette question, la notion de mixité ou de diversité est mobilisée dans les politiques et les discours locaux comme valeur et comme moyen pour lutter contre l’inscription spatiale de la pauvreté dans certains territoires. Ces politiques locales intègrent alors des objectifs relativement nouveaux : elles tentent tout à la fois d’ouvrir leurs portes à de nouveaux groupes sociaux, pour aller vite, les couches moyennes – ou de les retenir lorsqu’ils sont présents localement – et de lutter contre la marginalisation d’une autre partie de la population. Schématiquement, il s’agit de faire mieux vivre les pauvres en attirant les plus « riches » et on comprend que la tension entre ces deux objectifs soit grande. La mixité telle qu’elle est sollicitée ici est donc le résultat d’une double problématique, fondée autant sur la crainte de la fragmentation sociale que sur la nécessité d’une revalorisation de l’image sociale des villes. Cette attitude est relativement nouvelle pour des municipalités qui ont longtemps considéré les seuls groupes populaires comme leur base sociale et électorale « naturelle ». Cette évolution politique, qui correspond par ailleurs à un discours du Parti communiste définissant de façon large une « classe ouvrière moderne » qui intégrerait les ingénieurs cadres et techniciens, se traduit déjà dans quelques opérations d’urbanisme.
20Au tout début des années 1980, la rénovation du centre-ville de Saint-Denis illustre bien cette recherche de diversification sociale. Dans cette opération à fort caractère identitaire, l’objectif est, selon le maire adjoint à l’urbanisme de l’époque, de « loger de l’illettré à l’universitaire ». La diversification se fait de façon très contrôlée, à travers la construction d’un parc social maîtrisé par les structures municipales, société d’économie mixte et office public HLM. Les nouveaux immeubles, bien situés, affichent la modernité et l’innovation architecturale et cherchent à proposer une nouvelle image du logement social basée en particulier sur la diversité architecturale, la création d’un espace public de centralité et la mixité fonctionnelle. Sur les 1 500 logements construits dans le centre, seuls 190 sont en accession à la propriété. Les politiques de peuplement sont, elles aussi, très contrôlées, ne respectant pas, pour certains programmes, le contingent préfectoral et tentant de s’ouvrir à la population qui travaille mais n’habite pas dans la ville, voire à une population extérieure. De même à Montreuil, la municipalité intervient par petites opérations dans le tissu ancien du bas Montreuil, prolongement banlieusard de Paris, et met sur le marché une offre sociale nouvelle pour un public sélectionné. Il s’agit d’opérations de logements sociaux de taille relativement petite et bien situées, mais aussi d’opérations d’accession à la propriété. Il en est de même à Gennevilliers où sont réalisées plusieurs opérations de taille moyenne dans le quartier des Grésillons ou du village.
21Ces politiques de mixité n’ont pas été sans effet en ce qu’elles ont produit, au moins momentanément, des quartiers dont le peuplement se distingue sensiblement de celui du reste de la ville. À Saint-Denis, les couches intermédiaires, même si elles montrent une rotation importante, sont plus présentes dans le centre-ville que dans le reste de la commune (Bacqué et Fol, 1997). Il s’agit toutefois de couches moyennes bien spécifiques, salariés du secteur public ou travaillant dans les domaines de l’éducation, de la culture et du social, possédant un capital culturel important mais un faible capital économique. Les ménages précarisés, s’ils ne sont pas absents du nouveau centre-ville, y sont moins nombreux que dans la ville tout entière. Quant aux ménages étrangers, on les trouve dans la même proportion que dans le reste de la ville mais leur profil social les en distingue10.
22La « mixité sociale » du nouveau centre résulte du double jeu des trajectoires résidentielles des ménages résidant dans la ville et de l’ouverture à des ménages venant d’ailleurs. Nos travaux ont cependant montré la fragilité dans le temps de cette diversification sociale11 et surtout ses limites dans les pratiques urbaines et sociales, et notamment scolaires.
23Si l’enjeu de diversification sociale est central dans ces communes, celui de la paupérisation reste essentiel. C’est pourquoi, à des degrés divers, les trois villes maintiennent un effort important dans le domaine du logement social. À Montreuil, il s’agit de rééquilibrer la localisation des logements sociaux afin d’éviter la coupure entre le bas et le haut Montreuil et d’intervenir sur le « parc social fragile ». À Gennevilliers, qui s’inscrit dans une logique de renouvellement urbain et de démolition de logements sociaux, c’est une requalification majeure du parc qui est visée, sachant que la municipalité, comme nous l’avons indiqué plus haut, s’est fixée comme objectif majeur de ne pas dépasser le seuil actuel de 65 % de logements sociaux. À Saint-Denis, où le « droit au logement pour tous » est le premier axe du programme d’action du PLH communautaire, le logement social reste une priorité. Dans ces communes, les politiques locales de l’habitat sont véritablement prises en tenaille entre la nécessité de loger une population démunie concentrée soit dans l’habitat ancien non réhabilité, soit dans les quartiers d’habitat social « périphériques » les moins accessibles et les moins valorisés, et le souhait de diversifier la population en attirant des couches moyennes.
24L’exemple de l’agglomération d’Avignon montre un cas de figure très différent mais néanmoins révélateur de contradictions tout aussi aiguës (Panon, 2006). Dans cette agglomération représentative de la situation des aires urbaines de province, les politiques locales de mixité sociale sont aujourd’hui fondées sur deux types d’objectifs et de dispositifs opérationnels complémentaires. Le premier objectif se joue à l’échelle de l’agglomération et concerne l’équilibre de la répartition des logements sociaux. Il est mis en œuvre à travers le Programme local de l’habitat (PLH) par une structure intercommunale, la communauté d’agglomération. Le second objectif se joue à l’échelle infra-communale et concerne les quartiers en difficultés : il consiste à disperser les ménages pauvres et à attirer des ménages plus aisés dans ces quartiers. Il est mis en œuvre par la commune à travers les projets de rénovation urbaine.
25Pour mettre en œuvre le premier objectif, le PLH prévoit de mieux répartir les populations en difficultés et donc de construire du logement social dans les communes de la périphérie. En effet, comme dans de nombreuses agglomérations provinciales, le logement social est concentré dans la ville-centre de l’agglomération ou dans sa banlieue proche. Le PLH consiste alors à programmer les opérations futures de logement social dans les communes périurbaines, qui sont pour la plupart habitées par des populations aisées. Cet objectif relativement simple dans son énoncé, pose différents problèmes au stade de la mise en œuvre. En premier lieu, les communes périurbaines ne veulent en général pas accueillir de logements sociaux. Elles mettent en avant des arguments identitaires, comme la peur de « perdre leur âme » ou le rejet de la densité urbaine associée à l’image du logement social, ou encore la crainte des répercussions des nouvelles constructions sur les finances locales (liées à l’obligation de construire les équipements nécessaires à l’accueil d’une nouvelle population). Moins explicites sont les arguments de refus des « HLM » et des représentations sociales qui leur sont associées12. De plus, même lorsque les réticences des communes sont levées13, les disponibilités foncières n’existent pas nécessairement et il faut les constituer en grignotant sur l’espace rural, courant ainsi le risque de favoriser les processus d’étalement urbain. Ce faisant, on isole les programmes de logements sociaux des équipements publics centraux et des infrastructures de transport en commun. Dans ces conditions, il est peu probable que ces logements soient destinés aux ménages les plus démunis du centre de l’agglomération, qui sont beaucoup plus que les autres dépendants des équipements et des transports publics. Pourtant, la réalisation de l’objectif de mixité sociale à travers le PLH est utilisée de manière paradoxale par la ville-centre pour justifier la diminution de son parc de logement social (Panon, 2006).
26Le deuxième volet des politiques locales de mixité sociale est mis en œuvre à l’échelle des quartiers, dans le cadre des projets de rénovation urbaine. Il s’agit à la fois de diminuer la concentration des ménages les plus démunis dans ces quartiers et d’y faire venir des ménages des couches moyennes. Dans cette perspective, les projets de rénovation urbaine sont fondés sur la démolition d’une partie des logements sociaux, la dispersion des familles pauvres qui les habitaient et leur remplacement par des ménages des couches moyennes accueillis dans de nouveaux programmes de logements. Ainsi, à Avignon, le Programme de rénovation urbaine du quartier Monclar prévoit la démolition de 162 logements sociaux, et la reconstruction de 120 logements sur le site (62 logements par l’office HLM et 58 par la Foncière Logement en loyers libres). Il est également prévu de reconstruire 112 logements hors site mais ces logements ne font pas pour l’instant l’objet d’une programmation précise ni quant à la localisation, ni quant à l’échéance de leur construction. Dans ces conditions, on peut évidemment s’interroger sur le devenir des familles vivant dans les logements démolis et qui ne peuvent trouver de solutions de relogement sur place. D’après les premières études (Panon, 2006), une partie d’entre eux « disparaissent » en se relogeant par leurs propres moyens, tandis qu’une autre partie est relogée dans les ensembles de logements sociaux situés juste en dessous de Monclar dans la hiérarchie des quartiers « à problème », quartiers qui sont d’ores et déjà désignés comme faisant l’objet des prochains projets de rénovation urbaine. Ainsi, la poursuite de l’objectif de mixité (qui ne préjuge d’ailleurs en rien de sa réalisation) repose sur la nécessité de « repousser » le problème, c’est-à-dire les ménages pauvres, un peu plus loin, sans se soucier des effets déstructurants sur ces familles de relogements qui se succéderont nécessairement (Lelévrier, 2007). De fait, que ce soit à l’échelle de l’agglomération ou à celle de la ville-centre, la mise en œuvre des politiques de mixité sociale pose probablement autant de problèmes qu’elle n’en résout.
27La question de la mixité sociale n’est pas une spécificité française. Cette préoccupation guide et légitime les politiques de l’habitat menées dans des contextes urbains et nationaux fort différents au point d’être présentée comme un des critères de la durabilité dans les textes produits par les institutions internationales ; elle semble ainsi s’être imposée comme une catégorie de l’action publique. Cette thématique renvoie pourtant, depuis le tournant du précédent siècle, à des débats politiques et scientifiques récurrents car elle repose sur une vision normée de la ville et de la société et interroge avant tout la place des classes populaires dans l’espace urbain et dans la société. Ses diverses interprétations ouvrent sur des dispositifs et des mesures politiques qui engagent des directions différentes.
28La particularité française consiste en l’inscription de cet objectif dans la loi au point d’en faire une véritable injonction politique. Mais, dans le même temps, la mise en œuvre de cet objectif est renvoyée à l’échelle locale, laissant les communes et les bailleurs sociaux se débattre avec des contradictions difficiles à gérer.
Bibliographie
Des DOI sont automatiquement ajoutés aux références bibliographiques par Bilbo, l’outil d’annotation bibliographique d’OpenEdition. Ces références bibliographiques peuvent être téléchargées dans les formats APA, Chicago et MLA.
Format
- APA
- Chicago
- MLA
Bibliographie
Bacqué, M.-H., 2003a, Les nouvelles figures des quartiers populaires, politiques et représentations. Une approche comparative France États-Unis, mémoire en vue de l’habilitation à diriger des recherches, Université Paris XII.
—, 2003b, « Mixité sociale », contribution au Dictionnaire critique de l’habitat et du logement, sous le regard des sciences sociales, Paris, Armand Colin.
Bacqué, M.-H. et Fol, S., 1997, Le devenir des banlieues rouges, Paris, L’Harmattan.
—, 2000, « La mixité sociale en banlieue : Saint-Denis », in Haegel, F., Rey, H. et Sintomer, Y. (dir.), La xénophobie en banlieue, effets et expression, Paris, L’Harmattan, coll. « Logiques politiques ».
—, 2004, « La mixité sociale dans les communes de la banlieue rouge », intervention au séminaire du PUCA, 13 décembre 2004, à paraître dans les actes du séminaire.
—, 2005a, « La mixité comme injonction politique », in Urbanisme, no 340, p. 61-63.
—, 2005b, « Ségrégation et politiques de mixité sociale aux États-Unis », in Informations sociales, no 125, p. 82-93.
—, 2007, « Effets de quartier : enjeux scientifiques et politiques de l’importation d’une controverse », in Authier, J.-Y., Bacqué, M.-H. et Guérin-Pace, F. (dir.), Le quartier. Enjeux scientifiques, actions politiques et pratiques sociales, Paris, La Découverte.
Bacqué, M.-H., Fol, S. et Lévy, J.-P., 1998, « Mixité sociale en banlieue ouvrière : enjeux et représentations », in Lévy, J.-P. et Haumont, N. (dir.), La ville éclatée : quartiers et peuplement, Paris, L’Harmattan.
Bacqué, M.-H. et Berrat, B., 1995, « Quelle place pour les communes dans les plans départementaux ? », in Ballain, R. et Benguigui, F. (dir.), Loger les personnes défavorisées, une politique publique sous le regard des chercheurs, Paris, La Documentation française.
10.1086/230268 :Brooks-Gunn, J. et al., 1993, “Do neighborhoods influence child and adolescent development?”, in American Journal of Sociology, vol. 99, no 2, p. 353-395.
Briggs, X. de Souza, 2005, “Social capital and segregation in the United States”, in Varady, D.P. (ed.), Desegregating the City: Ghettos, Enclaves, and Inequality, New York, State University of New York, p. 79-107.
—, 2007, « Mixité sociale et “géographie des opportunités” : pistes pour de nouvelles politiques et questions irrésolues », in Authier, J.-Y., Bacqué, M.-H., Guérin-Pace, F., Le quartier. Enjeux scientifiques, actions politiques et pratiques sociales, Paris, La Découverte, p. 194-205.
Brun, J. et Rhein, C., 1994, La ségrégation dans la ville, Paris, L’Harmattan.
Chamboredon, J.-C., Lemaire, M., 1970, « Proximité spatiale et distance sociale », in Revue française de sociologie, vol. XI, p. 3-33.
10.1086/229654 :Crane, J., 1991, “The Epidemic theory of ghettos and neighborhood effects on dropping out and teenage childbearing”, in American Journal of Sociology, vol. 96, no 5, p. 1226-1259.
Donzelot, J., 2004, « La ville à trois vitesses : relégation, périurbanisation, gentrification », in Esprit, no 303.
10.1080/10511482.1997.9521280 :Ellen, I.G., Turner, M.A., 1997, “Does neighborhood matter? Assessing recent evidence”, in Housing Policy Debate, vol. 8, no 4, p. 833-866.
Fitoussi, J.-P., Laurent, E., Maurice, J., 2004, Ségrégation urbaine et intégration sociale, Rapport du Conseil d’analyse économique, Paris, La Documentation française.
Fol, S., 2005, Mobilité des pauvres et rapport au territoire, HDR, Université Paris I.
10.1080/01944366108978452 :Gans, H., 1961, “The balanced community: Homogeneity or heterogeneity in residential areas?”, in Journal of the American Institute of Planners, vol. XXVII, no 3, p. 176-184.
Gaudin, J.-P., Genestier, Ph., Riou, F., 1995, La ségrégation : aux sources d’une catégorie de raisonnement, Paris, Plan construction et architecture, coll. « Recherche 69 ».
10.3406/vilpa.1990.1090 :Genestier, P., 1990, « Éloge du ghetto, stéréotypes et termes repoussoirs de la pensée urbanistique », in Villes en parallèle, « Peuplements en banlieues », no 15-16, p. 313-329.
Goering, J. et Feins J.D. (eds), 2003, Choosing a Better Life? Evaluating the Moving to Opportunity Social Experiment, Washington D.C., Urban Institute Press.
10.1177/0885412203251339 :Goetz, E., 2003, “Housing dispersal programs”, in Journal of Planning Literature, vol. 18, no 1, p. 3-16.
Goux, D., Maurin, E., 2004, “Neighborhood effects on performances at school”, Working Paper, Centre de recherches en économie et statistique (CREST), Malakoff, Insee.
10.4000/books.pul.28812 :Grafmeyer, Y., 1994, « Regards sociologiques sur la ségrégation », in Brun J., Rhein C., La ségrégation dans la ville, Paris, L’Harmattan, p. 85-117.
10.1086/225469 :Granovetter, M., 1973, “The strength of weak ties”, American Journal of Sociology, no 78, p. 1361-1380.
Haumont, N. (éd.), 1996, La ville : agrégation et ségrégation sociales, Paris, L’Harmattan.
Lelévrier, C., 2000, Regroupements d’immigrés : des catégorisations aux processus de mobilité et d’accès au logement, sous la dir. de Y. Grafmeyer, thèse de doctorat en urbanisme, IUP, Université Paris XII.
—, 2007 « Rénovation urbaine en Île-de-France : mobilité et réseaux », intervention dans le cadre de la journée « Rénovation urbaine » de l’atelier « Action publique locale et dynamiques sociales », Paris, 1er février 2007.
Magri, S., 1995, Les laboratoires de la réforme de l’habitation populaire en France, Paris, Plan construction et architecture, coll. « Recherche 72 ».
10.2307/1534903 :Marpsat, M., 1999, « La modélisation des effets de quartier aux États-Unis, une revue des travaux récents », in Population, vol. 54, no 2, p. 303-330.
Masclet, O., 2003, La gauche et les cités, Paris, La Dispute.
Maurin, E., 2004, Le ghetto français. Enquête sur le séparatisme social, Paris, Seuil.
Panon, C., 2006, Ségrégation et politiques d’habitat dans l’agglomération d’Avignon, mémoire de deuxième année de magistère d’Aménagement, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.
Pinçon, M., 1982, Cohabiter, groupes sociaux et modes de vie dans une cité HLM, Paris, Plan construction.
Pinçon-Charlot, M., Pinçon, M., 1989, Dans les Beaux Quartiers, Paris, Seuil.
Pinçon-Charlot, M., Préteceille, E., Rendu, P., 1986, Ségrégation urbaine. Classes sociales et équipements collectifs en région parisienne, Paris, Anthropos.
Préteceille, E., 2003, La division sociale de l’espace francilien. Typologie socioprofessionnelle 1999 et transformations de l’espace résidentiel 1990-1999, Paris, Observatoire sociologique du changement.
—, 2006, « La ségrégation sociale a-t-elle augmenté ? », in Sociétés contemporaines, no 62, p. 69-93.
10.1145/358916 :Putnam, R., 2000, Bowling Alone. The Collapse and Revival of American Community, New York, Simon and Schuster.
10.3406/aru.1995.1895 :Simon, P., 1995, « La politique de la ville contre la ségrégation, ou l’idéal d’une ville sans divisions », in Les Annales de la recherche urbaine, no 68-69, p. 26-33.
10.4324/9780429501531 :Wilson, W.J., 1987, The Truly Disadvantaged: The Inner City, the Underclass, and Public Policy, Chicago, University of Chicago Press.
—, 1996, When Work Disappears, New York, Knopf.
Notes de bas de page
1 Aux États-Unis, dans les années 1950, la question de la mixité sociale et fonctionnelle est au cœur de nombre de critiques urbaines émanant d’intellectuels qui, comme Jane Jacobs, opposent la vitalité des quartiers hétérogènes et non ordonnés des villes à l’ennui des banlieues. Cette approche ne fait pas l’unanimité et Herbert Gans en critique les attendus et met en doute les effets d’une hypothétique hétérogénéité sociale à partir de ses travaux sur Levittown.
2 Sachant que le mois de naissance est un déterminant important de la probabilité de redoubler, Goux et Maurin comparent la probabilité de retard scolaire des enfants en fonction des mois de naissance de leurs voisins du même âge. En tentant de savoir si un enfant échoue d’autant plus que ses voisins du même âge sont nés en fin d’année, les auteurs cherchent à mesurer un effet de voisinage.
3 En France, le relogement est obligatoire mais pas nécessairement sur place.
4 Le programme HOPE VI, lancé en 1993, finance la démolition de logements sociaux, leur reconstruction partielle, la mise en place de services sociaux répondant aux orientations suivantes : (1) la déconcentration des résidants aux très bas revenus ; (2) la réduction du nombre de logements sociaux ; (3) la promotion de communities socialement mixtes et (4) la mise en œuvre de politiques d’attribution dans le parc social favorisant les individus insérés professionnellement. C’est un véritable démantèlement du patrimoine social qui est ici envisagé, objectif aisément atteignable dans les secteurs valorisés mais qui se heurte à de fortes contraintes économiques dans les secteurs en déclin.
5 Christine Lelévrier (2000) montre ainsi que la taille des familles est un des critères de rééquilibrage. Les démolitions ciblent souvent les immeubles comportant de grands logements. Ce critère touche en premier lieu les familles étrangères, maghrébines et africaines.
6 La réforme de 1977, qui figure parmi les réponses politiques au constat de ségrégation dans les grands ensembles (mis en avant notamment dans la circulaire Guichard de 1973), unifie les modes de financement et les loyers plafonds des opérations de logement social. Des locataires aux ressources différentes peuvent se côtoyer dans les mêmes programmes, l’aide personnalisée au logement prenant en charge tout ou partie du loyer des locataires à faibles ressources.
7 La création de ces nouvelles filières représente la traduction des conceptions de la pauvreté urbaine selon lesquelles la pauvreté ne renvoie pas seulement à la précarité économique mais pose aussi des problèmes de désinsertion sociale. Le logement est envisagé comme un moyen pour favoriser l’insertion. Insuffisant à lui seul, il doit s’accompagner d’un dispositif de suivi social.
8 Selon les plafonds en vigueur, 65 % des ménages peuvent prétendre à un logement social.
9 Camille Panon a consacré à cette étude son mémoire de seconde année de magistère d’Aménagement à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.
10 Ce sont fréquemment des ménages appartenant aux professions intellectuelles supérieures (journalistes, écrivains, cinéastes…) ou aux professions intermédiaires.
11 Dans le parc social de Saint-Denis, les îlots du centre-ville sont aujourd’hui ceux qui connaissent les taux de rotation les plus forts et des refus d’attribution importants. On peut penser qu’ils suivent la même ligne d’évolution que les quartiers d’habitat social construits au centre des villes nouvelles.
12 Encore que dans l’agglomération d’Avignon, le poids politique du Front national rende assez explicite l’association entre logement social et population indésirable.
13 À Avignon, l’adoption du PLH a fait l’objet d’une âpre négociation mais qui a tout de même abouti à une certaine dose de répartition des logements sociaux en direction des communes périurbaines.
Auteurs
Centre de recherche sur l’habitat (UMR LOUEST), Université d’Évry
CRIA (UMR Géographie-Cités), Université Paris I
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
La Beauté et ses monstres
Dans l’Europe baroque (16e-18e siècles)
Gisèle Venet, Tony Gheeraert et Line Cottegnies (dir.)
2003
Le Lierre et la chauve-souris
Réveils gothiques. Émergence du roman noir anglais (1764-1824)
Élizabeth Durot-Boucé
2004
Médecins et médecine dans l’œuvre romanesque de Tobias Smollett et de Laurence Sterne
1748-1771
Jacqueline Estenne
1995