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Un pasteur républicain au XIXe siècle : Lettres de Jules Steeg à Maurice Schwalb 1851-1898

[1897]

Texte intégral

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  • 1 En-tête imprimée de l’Ecole Normale supérieure d institutrices.

Fontenay-aux-Roses, le 20 Janvier 18971

  • 2 Je n’ai pas identifié cette allusion. Pierre Goy, dans une lettre à Steeg, la cite comme étant une (...)
  • 3 Jean Du Vergier de Hauranne, abbé de Saint-Cyran (1581-1643), prit la direction de l’abbaye de Por (...)
  • 4 Le Conseil supérieur de l’Instruction publique dont le ministre lui avait demandé de rester membre (...)
  • 5 Steeg avait d’abord écrit « il est venu à Fontenay »
  • 6 La célèbre « conférence » que Pécaut faisait chaque semaine aux élèves, véritable sermon laïque en (...)

1[...] Je t’écris de mon cabinet de Fontenay, où je suis toujours, comme le sage, étonné de de me voir2. Je ne m’habitue pas à cette situation, je ne vois pas que j’y sois utile comme il faudrait l’être. Sans doute le temps ici aussi est un grand maitre et un puissant agent. Je sens bien que je prends un peu possession, j’entrevois une action possible, désirable, mais je crains bien de n’en avoir pas la faculté. C’est un héritage redoutable que celui d’un “Saint Cyran”3 ! – En ce moment Pécaut est mon hôte à Paris depuis une dizaine de jours ; il est venu pour les séances du Conseil supérieur4. Vendredi, il est revenu pour la première fois à Fontenay5, prendre ma place dans ma chaire pour le petit sermon hebdomadaire6. Ce fut une journée de vive émotion ; mais maintenant il pourra repenser à Fontenay plus tranquillement. Il y reviendra peut-être encore Vendredi avant son départ pour Orthez. Je suis fortifié par sa visite. C’est une âme et un esprit d’élite, une “personnalité”, une force, et je vois qu’il séduit et subjugue les plus distingués esprits avec lesquels il est en relation dans son court voyage à Paris. [...]

2Ma femme est partie aujourd’hui pour Bourges où le bébé de Lucie est malade – non peut-être d’une façon inquiétante – mais le jeune ménage a bien besoin des secours d’une mère.

  • 7 Pierre Kergomard et René Steeg naquirent en effet tous deux en août 1897.
  • 8 Comme le savait Charles dès son mariage, sa femme n’était pas ce qu’il eût souhaité. Plus tard ils (...)

3Je ne crois pas que Jeanne aille vous voir cet été ; il semble que les espérances se confirment ; il en est de même à Dieppe7, où je désirerais très vivement qu’il vînt des enfants8.

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  • 9 En-tête de l’Ecole Normale supérieure d’institutrices.

Fontenay-aux-Roses, le 13 Février 18979

4[...] Jean (de Jeanne) se présente lundi et mardi à l’épreuve écrite de l’examen pour 1 inspection primaire. J’espère qu’il réussira. Libre ensuite de préoccupations, il pourra se livrer avec sa femme à des études personnelles et désintéressées. J’aimerais pourtant qu’il se mit à ramasser les matériaux d’une thèse pour le doctorat ès lettres. Les parchemins chez nous ne sont jamais inutiles.

  • 10 La politique de Pécaut à Fontenay avait été de faire appel pour les cours aux meilleurs maîtres de (...)
  • 11 Le discours de réception de Pasteur par Gaston Paris ; voir lettre du 29 janvier 1897 (à Pécaut).

5J’ai pris accoutumance et goût à mes nouvelles fonctions. Je vais à Fontenay à peu près tous les jours, et j’y prends ma part de plus en plus grande d’action et d’influence. J’assiste aux leçons, aux interrogations, aux conférences soit de lettres soit de sciences, et j’y prends souvent grand plaisir ; j’en tire plus d’une fois instruction pour moi-même10. Je reçois les élèves dans mon cabinet, leur donne des encouragements et des conseils. Le Jeudi, j’ai une longue conférence pédagogique avec mes élèves de 3e année. Le Mardi, je traduis tour à tour de l’anglais et de l’allemand avec celles de 2e année, pour leur enseigner quelques secrets du style français ; le Vendredi je réunis toute l’école, y compris les répétitrices, et je fais une conférence sur un des sujets qui m’ont frappé dans la semaine ou que je crois opportun de traiter : les massacres d’Arménie, une réception à l’Académie française11, des méditations sur l’art, sur la poésie, sur la vie intérieure, sur l’exercice pratique de la charité etc etc. Tu vois que la tâche est vaste et ne manque pas d’intérêt. [...]

  • 12 Si ce travail a abouti à un livre publié, je n’en ai pas trouvé trace. Le seul livre de Louis Stee (...)

6Je suis heureux des bonnes nouvelles, en somme, que tu me donnes de tes enfants, sauf ce pauvre Henri pour lequel, hélas, il faut savoir se contenter de peu. O oui ! il y a de bien noirs et impénétrables mystères dans la vie des hommes. Et au fond, tout n’est-il pas mystère ? Que savons-nous, que comprenons-nous ? Me voilà arrivé au terme assez habituel, tout au moins aux confins de la vie, et je ne suis pas plus avancé qu’aux premiers jours de ma raison naissante. Il me semble plutôt que les ténèbres se sont épaissies, c’est à dire que ce que je prenais jadis pour des lueurs s’est évanoui devant une expérience plus attentive. Que faire, sinon se résigner ? Je ne sais qui avait pris cette devise, qui me parait la sagesse même ; Fac et spera. C’est la devise du laboureur. Nous ne pouvons guère en avoir d’autre. Et encore, le premier terme est souvent bien embarrassant ! [...] Bonnes nouvelles de Louis. Il chasse avec intrépidité, et s’est mis aussi à l’étude ; je ne serais pas étonné qu’il se décidât à quelque travail personnel sur l’histoire contemporaine12. Je l’y pousse de mon mieux.

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Périgueux, le 25 Mars 1897

  • 13 Où la directrice lui faisait une guerre sournoise mais acharnée.
  • 14 En Allemagne, à peu près ce qu’on a appelé un peu plus tard en France l’enseignement secondaire mo (...)
  • 15 On a fait grief à cette œuvre scolaire d’avoir formé les cadres moyens dont « la bourgeoisie » ava (...)

7[...] J’ai voulu cette année diviser ma tournée d’inspection en deux parts, avant et après Pâques, afin d’être moins longtemps absent de Fontenay13. J’ai commencé par la Dordogne, grand département, qui a outre ses deux écoles normales, six écoles supérieures, dont une de filles. Il me faut compter un jour pour chaque établissement. Comme ils sont tous assez loin les uns des autres, je rentre tous les soirs à l’Hôtel à Périgueux, et repars chaque matin par une voie ferrée vers 5h 1/2. Cela me fait une vie assez mouvementée, mais en réalité, bien intéressante. Il y a sans doute dans nos écoles bien des lacunes et des faiblesses, mais l’effort général est bon, on trouve bon nombre de braves gens dévoués à leur tâche, et il y a d’excellents résultats. Les écoles normales, où se préparent les maitres, sont ce qui m’intéresse le plus, parce que là est le nœud vital. Mais les écoles supérieures sont d’une bien grande importance. Dans les grandes villes, ce sont presque des collèges réals14 comme vous dites – dans les chefs lieux de canton, elles ont surtout pour objet de former une petite élite, un état major du peuple, de donner une culture générale de sciences, de lettres, d’histoire, pour former des contremaitres, des employés, des petits marchands ou propriétaires prenant la suite des affaires paternelles, avec un esprit ouvert et droit15. Les maitres ne sont pas tous à la hauteur de ce but, ne comprennent pas toujours la portée de l’institution, mais a travers tout, du bien se fait. [...]

  • 16 Auguste Sabatier, Esquisse d'une philosophie de la religion (1897).
  • 17 Esaïe, 40, 3 ; 57, 14 et 62, 10 et Matthieu, 3, 3 ; Marc 1,3 ; Luc, 3,4.

8Le livre de Sabatier16 [...] manque de rigueur et de conclusions fermes ; mais c’est ce caractère un peu nuageux qui fait une partie de son succès. Le monde demi-orthodoxe en fait ses délices. C’est un “frayeur de sentiers”17

9J’ai passé deux jours à Bourges chez Lucie, auprès de son délicieux bébé. [...]

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  • 18 En-tête de l’Ecole Normale supérieure d'institutrices ; « Fontenay-aux-Roses » a été barré et remp (...)

Paris, le 20 Avril 189718

  • 19 Il était soigné par Louis Fournier (qui avait épousé une sœur d’Ewaldine Steeg), très grand médeci (...)
  • 20 Mme Kergomard.
  • 21 Ce sera Yves (Tino) Steeg (1897-1976) qui épousera Eliane Monod (1903-1962) (laquelle avait d’un p (...)
  • 22 La guerre gréco-turque, à propos de la Crète ; elle se terminera par un traité le 4 décembre.
  • 23 Ces montagnes du nord de la Grèce étaient dans l’antiquité la première le séjour des grands dieux, (...)

10[...] Je ne t’ai pas écrit ces jours ci parce que je n’étais pas très bien, et que je ne voulais pas t’assombrir de mon humeur noire. J’ai de temps à autres des crises de dyspnée qui, violentes et courtes autrefois, sont devenues fréquentes, longues et relativement tolérables, mais n’en sont pas moins déprimantes19. Aujourd’hui, sans raison connue me voici de nouveau bien, et en état normal. Nous avons à la maison les deux ménages Kergomard, avec le bébé ; Théodore et les siens viennent sans cesse, puisqu’on est en vacances ; les amis et parents arrivent, la belle-mère20 ne quitte guère ses fils, de sorte que le bas de la maison est envahi par un flot qui nous apporte amitié et joie ; la table est redevenue ce qu’elle était régulièrement autrefois, un couvert de douze à quinze places. Cela va diminuer à la fin de la semaine : Joseph et Lucie vont partir un peu avant les autres pour faire leur déménagement. Joseph est envoyé avec avancement de Bourges à Tours. Il faut aller se choisir un logement et opérer le transfert des meubles Tours est sur la grande ligne, c’est une grande et belle ville, un lycée important, et assez près de Blois où est 1 autre ménage. Jeanne [...] était très occupée comme maitresse (intérimaire) à l’Ecole normale de Blois. Elle y renonce a partir de Pâques, parce que cela devenait un assujettissement et une fatigue contraires à son état. Nous avons la joie d’attendre trois naissances pour cet été, te 1 ai-je dit ? chez Jeanne, chez Charles et chez Louis21. Bonnes nouvelles de Louis ; il ne croyait pas à la guerre22 ; il a pour les deux parties belligérantes une très médiocre sympathie, et dit que pour qui connait les uns et les autres, il est difficile de ne pas les mépriser. Ce sont de pauvres échantillons de la race humaine. Il n’en est pas moins douloureux de penser que, dans ce moment même, fusils et canons broient de la chair humaine entre l’Olympe et le Pinde23 et que notre espèce est restée aussi sauvage qu’aux temps des flèches de silex. Les plus monstrueux sont certainement ces nobles seigneurs qui dans leurs palais de Berlin ou de Londres poussent à la guerre, encouragent ceux-là les Turcs, ceux-ci les Grecs à s’entredéchirer, pour satisfaire à des combinaisons d’échiquier diplomatique. Pourvu encore que l’incendie ne gagne pas plus loin et ne nous entraine pas dans ses flammes ! – Il est difficile, dans de tragiques circonstances, de s’abstraire et de philosopher tranquillement. Je tâche pourtant de le faire, le soir, le matin, quand je suis retiré dans la chambre, et de reprendre les vieilles habitudes de recueillement, nécessaires au même degré et pour des raisons différentes, à l’adolescence et à la vieillesse.

11J’ai passé environ un mois en tournée d’inspection. Je t’ai écrit de Périgueux. [...] Je suis allé ensuite à Montauban, à Toulouse, à St Gaudens dans les Pyrénées. Mon séjour à Montauban m’a attristé ; la Faculté de théologie est un séminaire de sotte et étroite orthodoxie, d’intolérance, de psittacisme, une fabrique de curés. Le seul qui résiste un peu, c’est Bruston, le doyen, professeur d’hébreu ; esprit libéral et honnête, mais si timide, si terne, si sec qu’il n’exerce aucune action ; il se noie dans les infiniment petits. J’ai entendu un sermon du président (libéral) du consistoire, c’était vide, sans substance, sans vie, sans flamme. Il me semble de plus en plus que tout est là, non dans les doctrines, mais dans les cœurs. Qui aime est dans le vrai. Tout le reste est bien indifférent.

12J’ai passé le Dimanche de Pâques dans mon cabinet le matin, et l’après midi au salon avec ma famille ; je n’ai pas eu le courage d’aller entendre les vieilles rhapsodies – vaine rhétorique. [...]

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Toulouse, le 26 Mai 1897

13[...] J’ai parcouru le Quercy, le Rouergue, c’est à dire les départements du Lot, de l’Aveyron, du Tarn. [...] J’ai vu de nombreuses écoles, importantes, et qui vont bien, beaucoup de braves gens, professeurs, inspecteurs d’Académie et inspecteurs primaires. Tout ce monde là est attaché à son devoir, travaille, se donne de la peine, est intéressant. Il y a sans doute bien des misères, mais je ne trouve pas le monde ennuyeux. Il y a de la variété, de la vie. Chacun s’efforce, et le spectacle, en somme, vaut d’être vu. C’est la lutte incessante de l’animalité et de l’esprit. Ceux qui se découragent ne regardent qu’un coin ; il faut voir l’ensemble. Il est vrai que le spectacle change selon nos dispositions. [...] Ce n’est pas le monde qui vieillit, c’est nous. [...] Je vais retourner ces jours ci à Orthez, évidemment dans d’autres dispositions physiques et morales qu’au temps où j’y allais comme fiancé, et la brume poétique de cette lointaine époque se sera dissipée ; je vais voir choses et gens d’un autre œil. D’ailleurs que de vides et de changements amenés par le temps !

14Ma femme et Berthe sont à Flainville, à préparer le logis pour l’invasion de la famille croissante. [...]

15Les départements que je viens de visiter sont très catholiques ; le clergé y a une très grande influence ; leurs écoles regorgent d’enfants ; la superstition y règne en maitresse. Et malgré cela, ils nomment un certain nombre de députés radicaux ou même socialistes, tels que le fameux Jaurès. C’est un singulier mélange d’idées extravagantes et de fanatisme religieux. Tout cela provient sans doute de même source, de la même éducation superficielle. Au milieu de ces populations se trouvent çà et là des groupes raisonnables ; les idées modernes se glissent peu à peu ; l’école apportera son contingent de connaissances pratiques, d’habitudes rationnelles d’esprit. C’est une œuvre lente, une lente désagrégation d’influences séculaires. Nous nous trompions bien quand nous pensions enlever d’assaut ces vieilles forteresses : même en pays protestant il y a mille éléments de réaction. A Castres, à Mazamet, où j’étais ces jours ci, il y a des Eglises protestantes, petites minorités. Elles sont divisées, déchirées non par des divisions dogmatiques (la doctrine, la pensée sont leur moindre souci) mais par des rivalités personnelles, de classe, de tempérament, de vanité. Si j’ai quelquefois regret d’avoir quitté le ministère, je suis bien consolé par la mesquinerie de ces luttes sans intérêt. – Et néanmoins, il y a dans ces milieux un esprit plus actif, plus ouvert, plus entreprenant, plus approprié à la vie moderne et aux conditions du progrès. La liberté, l’éducation libérale, quoique à un degré infinitésimal, y produit des effets. [...]

  • 24 « de toute chose ».

16Je pense voir Pécaut la semaine prochaine à Orthez ; ce me sera un rafraichissement après ces courses souvent fatigantes et ces inspections multipliées. Je rencontre peu d’hommes avec qui je puisse causer à cœur ouvert de omni re24. Il y a toujours des portes qui restent fermées, des questions qui n’ont point d'écho, des sentiments qui restent étrangers.

17[...] Ne néglige pas de prendre de l’exercice. Nous n’avons pas le droit de négliger notre santé. [...] Je compte partir demain pour le départ de l’Ariège. [...] Ma tournée sera finie, et je rentrerai en m’y arrêtant quelques jours par Orthez, Bordeaux, Tours et Blois. Je serai à Paris vers le 10 Juin pour reprendre la direction de Fontenay.

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Paris, le 3 Juillet 1897

18 [...] [A propos de l’œuvre de Schwalb à Brême] Si nous croyons à la raison divine, ordonnatrice du monde, rien ne se perd, pas plus dans le monde des idées que dans celui de la matière ou du mouvement. C’est là, pour le moment, ma foi et ma force. Je sais bien que c’est peu concret, peu propre à la création de doctrines bien précises ; mais je ne trouve rien de mieux – et cela me suffit pour m’encourager à agir, à bien faire, à faire effort pour répandre autour de moi quelques bonnes pensées et à recommander quelques bons efforts.

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Paris, le 5 Août 1897

  • 25 C’est ce que Pécaut reconnaît tout à fait dans ses lettres à Steeg et à Buisson à cette époque. Et (...)
  • 26 On peut suivre cette affaire, et les procédés inadmissibles de cette directrice, dans la correspon (...)

19[...] [A Fontenay] la fin de notre année scolaire n’a pas été bonne nous avons eu quelques échecs [aux examens] Les raisons en sont assez cachées, mais je les vois, et je crois qu’on peut remédier dans l’avenir. Je suis malheureusement mal secondé ou plutôt desservi par la directrice, qui était déjà hostile à M. Pécaut. C’est lui qui a manqué de psychologie en la faisant nommer, et de courage en ne demandant pas son éloignement25. Je vais essayer de l’obtenir ; mais c’est une entreprise difficile. Mlle Saffroy est un gros bonnet, membre du Conseil supérieur de l’Instruction publique, très appuyée par des hommes politiques. Nous étions très bien ensemble, mais depuis que je succède à Pécaut, elle ne peut me souffrir. Elle avait conçu l’ambitieux projet de rester seule à la tête de l’établissement. Ma tâche est rendue très lourde par sa secrète hostilité, et je ne crois pas pouvoir continuer dans les mêmes conditions C’est le gros embarras et la tristesse de ma vie actuelle26. [...] Ma femme est à Flainville depuis quelques jours avec les ménages Théodore et Kergomard. J’irai les rejoindre vers le 14 ou 15 Août. Tout du reste va bien chez eux pour le moment. – J’ai aussi reçu de bonnes nouvelles de Louis, qui m’envoie force photographies de la nature et de la vie bulgare [...]

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  • 27 Carte postale adressée à : Dr Moritz Schwalb / Bergstrasse / Heidelberg / Allemagne

Paris, le 12 Août 189727

  • 28 (1897-1981) né à Flainville le 12 août. Il épousera Odette de Leiris (1902-1985) et sera ingénieur (...)

20[...] Je reçois à l’instant une dépêche du Bourg Dun m’annonçant l’heureuse naissance du fils de Jeanne : Pierre Kergomard28. Samedi, c’était Charles qui m’annonçait la naissance de son fils. Voilà deux hommes de plus dans la famille – et dans le monde. Dieu leur donne d’être bons, forts et heureux. [...] Je pars après demain voir mes deux petits fils.

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  • 29 Carte postale adressée à : Herm Dr M. Schwalb / 24 Bergstrasse / Heidelberg / (Allemagne)

Flainville, le 27 Août 189729

  • 30 Yves, dit Tino Steeg (1897-1976) naquit à Philippopoli le 26 août. Il épousera Eliane Monod (1903- (...)

21[...] Je reçois une dépêche de Louis, de Philippopoli, qui m’annonce l’heureuse naissance d’un fils, son second30. Nous n’attendions pas sitôt. Notre joie est complète : trois fils nous sont nés en quinze jours ! Mon petit bataillon carré est symétrique maintenant : quatre garçons et quatre filles. C’est le sujet d’une grande allégresse dans notre petite colonie, et je ne veux pas tarder à t’en faire part. [...]

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Flainville- Bourg Dun, Seine Inférieure

Le 9 Sept. 1897

  • 31 Probablement Gaston Deschamps, 1861-1931, littérateur et critique, né en 1861, ancien élève de l’E (...)
  • 32 L'Education publique et la vie nationale, Paris, Hachette, 1897. C’est un recueil d’articles et de (...)

22[...] Tu me parles de l’article de Deschamps31, je l’avais lu ; c’est léger et sot, et j’ai été surpris et affligé de ce vain bavardage de la part d’un universitaire, gendre de M. Perrot, le Directeur de l’Ecole normale de la rue d’Ulm. Il n’a pas réfléchi, ne s’est pas enquis, il a pris au vol quelques lignes d’un article de Buisson qu’il a trouvées citées quelque part, quelques lignes d’un volume de Pécaut qu’il n’a pas lu, lignes qu’il a trouvées ailleurs, et il a fait une longue tartine destinées à constituer l’article hebdomadaire qu’il doit au Temps. C’est de l’écrivasserie. Il n’a lu rien de ce qu’il cite, n’a pas d’idée d’ensemble, enfourche un dada au hasard. Il est honteux de traiter de la sorte d’aussi graves sujets. Je te fais envoyer le livre de Pécaut32, je pense qu’il t’intéressera plus que ces vaines banalités.

23Je jouirais beaucoup plus de Flainville si nous avions un moins mauvais temps. Nous avons eu des séries d’averses qui rendaient les chemins impraticables et obligeaient de garder les enfants à la maison. Aujourd’hui par contre la journée est radieuse et l’on se reprend à la joie de la campagne. [...]

  • 33 Il n’y en a qu’un, qu’on appelle la cavée, et que va vers la route de Dieppe.
  • 34 Fils de Louis Meyer.

24J’ai rencontré l’autre jour dans un chemin creux de Flainville33 Jean Meyer34, avec un de ses garçons ; il est en villégiature à quelques kilomètres d’ici. C’est lui qui m’a reconnu ; nous avons échangé quelques mots de banalité, et puis j’ai continué ma route, tout remué par la multitude des souvenirs que sa vue a éveillés en moi, et dont il ne soupçonnait rien. C’était toute mon enfance et mon adolescence que j’ai revues dans ce chemin creux, ces Dimanches des Billettes, ces diners frugaux de la rue Cuvier au milieu de ces enfants au tablier blanc, et cette personnalité du père, du pasteur, et toute cette fantasmagorie de rêves, d’espérances !... Comment faudrait il revivre sa vie si on la recommençait ? – Pas bien différente, car au fond, il importe assez peu sous quelle forme de détail la vie se déroule ; elle arrive toujours assez vite au bout et laisse subsister les mêmes problèmes. Et puis nous sommes jetés sur une pente, chacun suit la sienne ; on recommencerait qu’on roulerait sans doute vers la même direction.

  • 35 En août 1897 le président Félix Faure rendit en Russie au tsar Nicolas II la visite que celui-ci a (...)

25Tu me reprocheras peut-être de ne pas te parler des événements qui ont mis ces temps les cervelles en ébullition, le voyage en Russie, le retour triomphal à Paris, l’entrevue de Hambourg35. Il se peut, comme tout le monde le dit, que ces choses là soient réjouissantes comme symptômes et assurances d’une paix générale et durable. Je ne sais pourquoi je ne me sens pas si absolument rassure ; ces assurances de paix sentent la poudre, et ces embrassades de chefs d’Etat font un bruit de cliquetis d’épées. Je m’afflige que la paix et les destinées de l’Europe soient aux mains de quelques volontés isolées du reste des hommes, et il me parait que l’aristocratie n’a jamais été plus florissante que dans ce siècle de démocratie. Nos successeurs verront sans doute l’équilibre se rétablir, mais à quel prix, et par quels cataclysmes faudrait il que 1 Europe passe avant que la simple raison et la simple justice règlent les rapports des hommes et des peuples entre eux ?

  • 36 Celle de Charles aussi.
  • 37 Evidemment au sens littéral : la jeune mère se levait (et reprenait « la vie commune ») pour la pr (...)

26[...] S’il fait beau, tu dois jardiner un peu. J’ai essayé, mais je suis tout de suite fatigué ; je n’ai du reste jamais été capable de travaux manuels et d’exercices un peu rudes. On ne m’y avait pas habitué dans l’enfance, et je ne m'y suis pas senti porté dans la suite. Mes fils et mes gendres sont également assez peu enclins à ces travaux de jardin ; la bicyclette absorbe tous leurs loisirs. Quant à Louis, c’est un Nemrod ; sa distraction à Philippopoli est la chasse36. Mes vacances sont bien incomplètes de ne pas l’avoir. Il faut attendre l’année prochaine, car il ne peut faire voyager si loin sa Smala tous les ans. Il m’écrit assez souvent, heureusement. Jeanne est tout à fait rétablie et a repris la vie commune ; elle nourrit avec succès son beau bébé qui progresse à vue d’œil. Dimanche nous avons célébré le repas des relevailles37 ; la femme de Charles était venue, et les deux garçonnets, semblable [sic] à deux jumeaux, étaient posés dans leurs petits berceaux sur la table du salon ; c’était tout à fait charmant. Il y manquait le nouveau Bulgare. [...]

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  • 38 Cette indication est d’une autre écriture, que je crois être celle de Maurice Schwalb ; la lettre (...)

Flainville, 27 Sept. 189738

27[...] Je remue justement tout le passé ces jours ci ; j’ai retrouvé dans des cartons des liasses de lettres datant de 1852, 1853, 1855, 56 et années suivantes. J’ai été ému jusqu’aux larmes en retrouvant des lettres de M. Meyer, empreintes d’une si vive affection. Il me semble que je n’avais jamais senti aussi bien ce que je lui dois ; à cette distance, avec la maturité que donne la vieillesse, la vue s’éclaircit. Je vois mieux la tendresse, la délicatesse, la profondeur de son amitié si réellement paternelle.

28J’ai retrouvé aussi, dans d’autres cartons, les notes innombrables que j’ai prises dans tout le cours de ma vie, pour des travaux qui sont rarement arrivés à l’impression ; notes de théologie, traductions, histoire etc. La plus grande partie m’a servi à des discours et conférences. Je ne me rappelais plus avoir si souvent parlé, et de tant de choses. J’ai fait œuvre d’orateur, non d’écrivain. Au fond, c’est la même vanité. A part quelques uns, l’écho de la voix se perd un petit peu plus tôt que l’action de la plume. Tout cela se vaut. Quelques années de plus, les volumes vont au pilon ou se déchirent au vent de l’oubli – tout comme les discours. J’ai fait à peu près au jour le jour ce qui m’incombait ; que pouvais je faire de plus et à quoi bon rien regretter ? [...]

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Paris, le 16 Octobre 1897

  • 39 C’était toujours Alfred Rambaud ; il prononça à l’enterrement de Steeg un discours de bonne qualit (...)
  • 40 Par l’arrêté du 7 octobre 1897 Mme Dejean de la Batie, inspectrice de l’enseignement primaire du d (...)
  • 41 Sept mois plus tard, Steeg mourut et il fut décidé de ne pas maintenir son poste d’inspecteur géné (...)
  • 42 Luc, 11, 17 (forme traditionnelle mais inexacte de la citation).

29[...] J’ai été très absorbé par Fontenay tous ces temps – mais j’ai fini par obtenir satisfaction et je me mets maintenant à cette œuvre avec joie. J’ai obtenu qu’on me délivrât de la directrice qui ne convenait décidément pas à ses fonctions. Son choix avait été une erreur de Pécaut, qui l’a du reste trop expiée par la vie pénible qu’elle lui a faite dans les deux dernières année. Pour ma part, je n’ai pas voulu la supporter plus longtemps. On n’osait pas y toucher ; sa haute situation, sa qualité de membre du Conseil supérieur, ses relations politiques et dans le journalisme semblaient la rendre inattaquable. J’ai déclaré que je partirais ou qu’elle partirait. Le ministre n’a pas hésité, je dois lui rendre cette justice39. Elle a été déchargée de ses fonctions par un arrêté du 7 de ce mois40, et elle est remplacée par une femme fort distinguée. Madame Dejean de la Bâtie, à la fois secondaire et primaire, agrégée, ancienne directrice d’Ecole normale. Son mari est un des meilleurs professeurs de Louis le Grand ; elle a trois petits enfants. Ce sera une famille, un foyer ; elle me sera une collaboratrice comme je la souhaitais, enfermée dans ses attributions41 où elle rendra de grands services. Je suis content de cette issue ; je crois que j’ai sauvé Fontenay d’un déclin irrémédiable et rapide – Car “une maison divisée contre elle même ne saurait subsister”42

30J’ai eu à organiser les cours, à modifier bien des choses par suite de l’établissement d’une troisième année d’études, par suite aussi de décès dans notre personnel. D’ici une ou deux semaines tout sera, j’espère, en bon ordre, et je n’aurai plus qu’à entretenir le zèle de tous. – J’ai été tous ces temps ci deux fois par jour à Fontenay, ce qui ne me laisse plus aucun loisir ; le soir, je suis fatigué et ne suis plus bon qu’à lire les journaux.

  • 43 Où Schwalb était en première année de théologie quand Steeg était encore en philosophie à Paris.
  • 44 Théodore et Berthe – le dernier des garçons et la dernière des filles – étaient spécialement liés, (...)

31Dimanche- [...] Je suis sorti pour aller à l’Ecole normale de la rue d’Ulm, voir un éminent professeur de chimie, dont je voulais obtenir le concours pour Fontenay. En traversant le Luxembourg, je me sentais porté par des ailes ; je me rappelais un entretien dans ces allées lorsque tu revins pour la première fois de Bâle43. C’était plaisir de voir les enfants jouer, les gens endimanchés, les femmes allant à leurs Eglises. Théodore et Berthe ont été faire une longue promenade à bicyclette44. Une journée comme celle là rachète bien des pluies et des brouillards.

  • 45 Pesque tout le linge, et presque tous les vêtements de femmes et d’enfants étaient, sauf chez les (...)

32Demain ma femme part pour une quinzaine. Elle se propose d’aller passer une semaine chez Jeanne, une autre chez Lucie, pour leur donner un bon coup de main aux travaux de couture avant la saison d’hiver45 – Pour moi, je serai pris totalement par l’Ecole pendant ce temps là ; puis il y aura relâche.

  • 46 Léon XIII et sa politique d’acceptation – très relative – des institutions républicaines de la Fra (...)

33C’est Mardi que nos Chambres se réunissent ; le “boucan” va recommencer. Mais je me figure que les révolutionnaires ont perdu beaucoup de terrain ; je ne suis pas sûr que les cléricaux n’en aient pas gagné. L’extrême habileté du Pape46, ou de ceux qui le conseillent, a donné un coup de barre qui ramène un peu de vent en poupe au vaisseau de l’Eglise ; voilà peut être une période de quelques années où elle reprendra faveur grâce surtout aux sottes déclarations radicales. Et puis c’est le mouvement oscillatoire de la pensée ou plutôt de l’instinct des foules, que d’obscurs moteurs jettent tour à tour dans les partis opposés. En Allemagne, autant qu’il m’est possible d’entrevoir, on dirait qu’il se prépare un réveil du parti libéral ; mais quel rocher il aura à soulever ! […]

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Paris, le 7 Décembre 1897

  • 47 Pécaut s’inquiétait et se scandalisait de ce retard à exercer ses fonctions.
  • 48 Steeg était allé voir Schwalb, depuis la retraite de ce dernier, chez lui à Heidelberg. Il n’y a q (...)
  • 49 De professeur de pédagogie à la Sorbonne.

34[…] Pour moi, j’ai passé une assez mauvaise semaine, ayant été pris d’une assez forte grippe qui m’a extrêmement fatigué. Le mieux s’est produit, et maintenant je n’ai plus qu’un reste de toux, inévitable avec les premiers froids. [...] [A Fontenay] La nouvelle directrice va venir s’établir cette semaine. Jusqu’à présent elle faisait de courtes apparitions, attendant que ses appartements fussent mis en état47. Quand elle sera installée, je serai un peu plus libre. Je me réjouis chaque jour davantage de m’être débarrassé de l’autre. Du reste, je ne serais pas demeuré si elle n’était partie. Je crois que l’entente sera facile et agréable avec celle ci. [Schwalb pense venir à Paris au printemps, et Steeg s’en réjouit] Car voilà déjà longtemps de ma visite à Heidelberg48 ! [...] mes inspections. On m’a confié cette année les départements de l’Académie de Lille [...] Si l’hiver n’est pas trop rude, je tâcherai d’en faire une partie avant le printemps pour abréger ensuite mes absences. Il se peut que M. Pécaut vienne me voir cet hiver, à l’occasion des séances du Conseil supérieur, si sa santé toujours chancelante, le lui permet. Cela lui ferait pourtant du bien, car la vie inactive d’Orthez lui est certainement mauvaise, après sa longue et vibrante activité d’ici. Je vois très peu Buisson ; il a repris ses cours49 cette semaine. Sujet : “l’éducation doit elle avoir un fondement religieux ou philosophique.” C’est l’idée, sinon les termes. [...]

Notes

1 En-tête imprimée de l’Ecole Normale supérieure d institutrices.

2 Je n’ai pas identifié cette allusion. Pierre Goy, dans une lettre à Steeg, la cite comme étant une remarque faite par un doge de Venise.

3 Jean Du Vergier de Hauranne, abbé de Saint-Cyran (1581-1643), prit la direction de l’abbaye de Port-Royal des Champs de 1633 à 1643. Dans un article du Journal de Genève du 27 septembre 1896, intitulé « La retraite de MM. Buisson et Pécaut » et qui fut repris par Le Temps, Auguste Sabatier avait écrit en parlant de Fontenay « cette création scolaire, qui par la tenue, l’originalité, le sérieux profond et la puissance de la propagande exclusivement morale, rappelle les œuvres analogues d’autrefois de Saint-Cyr et de Port-Royal, et qui dans l’avenir ne leur paraîtra pas inférieure ». Il n’était pas le seul à appeler Fontenay « un Port-Royal laïque ».

4 Le Conseil supérieur de l’Instruction publique dont le ministre lui avait demandé de rester membre. Il en démissionna quelques semaines avant sa mort afin de pouvoir signer en conscience le demande de révision du procès de Dreyfus.

5 Steeg avait d’abord écrit « il est venu à Fontenay »

6 La célèbre « conférence » que Pécaut faisait chaque semaine aux élèves, véritable sermon laïque en effet.

7 Pierre Kergomard et René Steeg naquirent en effet tous deux en août 1897.

8 Comme le savait Charles dès son mariage, sa femme n’était pas ce qu’il eût souhaité. Plus tard ils se séparèrent à moitié, Lia vivant à Paris avec les trois enfants, Charles travaillant à Dieppe et passant trois jours par semaine à Paris.

9 En-tête de l’Ecole Normale supérieure d’institutrices.

10 La politique de Pécaut à Fontenay avait été de faire appel pour les cours aux meilleurs maîtres de l’Université, tels que Michel Bréal pour la grammaire, Vidal-Lablache pour la géographie, Emile Boutroux pour la psychologie, Albert Sorel pour l’histoire, Adrien Proust (le père de Marcel Proust) pour l’hygiène, Henri Marion puis Ferdinand Buisson pour la pédagogie, Bourgault-Ducoudray pour le chant, etc.

11 Le discours de réception de Pasteur par Gaston Paris ; voir lettre du 29 janvier 1897 (à Pécaut).

12 Si ce travail a abouti à un livre publié, je n’en ai pas trouvé trace. Le seul livre de Louis Steeg que je connaisse est, en collaboration avec W. Padec, De la Législation foncière ottomane, 1904 (351 pages).

13 Où la directrice lui faisait une guerre sournoise mais acharnée.

14 En Allemagne, à peu près ce qu’on a appelé un peu plus tard en France l’enseignement secondaire moderne, c’est-à-dire sans latin et plus pratique sans être exclusivement professionnel.,

15 On a fait grief à cette œuvre scolaire d’avoir formé les cadres moyens dont « la bourgeoisie » avait besoin. En tant que reproche, Steeg en eût été surpris ; quand au fait, on voit que c’est bien aussi (mais non seulement) ce qu’il cherchait ; et était-ce donc honteux ? le peuple français en avait besoin, et aussi d'un « esprit ouvert et droit ».

16 Auguste Sabatier, Esquisse d'une philosophie de la religion (1897).

17 Esaïe, 40, 3 ; 57, 14 et 62, 10 et Matthieu, 3, 3 ; Marc 1,3 ; Luc, 3,4.

18 En-tête de l’Ecole Normale supérieure d'institutrices ; « Fontenay-aux-Roses » a été barré et remplacé par « Paris »..,

19 Il était soigné par Louis Fournier (qui avait épousé une sœur d’Ewaldine Steeg), très grand médecin, mais comme les autres peu armé à cette époque contre l’asthme.

20 Mme Kergomard.

21 Ce sera Yves (Tino) Steeg (1897-1976) qui épousera Eliane Monod (1903-1962) (laquelle avait d’un premier lit deux filles dont l’une, Jeannine, épousera [à Flainville] Marcel Peyre, petit-fils de Jeanne Kergomard).

22 La guerre gréco-turque, à propos de la Crète ; elle se terminera par un traité le 4 décembre.

23 Ces montagnes du nord de la Grèce étaient dans l’antiquité la première le séjour des grands dieux, la seconde consacrée à Apollon et aux Muses. La Turquie possédant encore cette région, elles étaient dans la région de la frontière entre la Turquie d’Europe et la Grèce.

24 « de toute chose ».

25 C’est ce que Pécaut reconnaît tout à fait dans ses lettres à Steeg et à Buisson à cette époque. Et quand l’affaire se dénouera (voir lettre du 16 octobre 1987) il écrira à Buisson : « Eh bien voici l’affaire de Fontenay réglée ! le Ministre a prononcé en Ministre, et Steeg a montré une netteté dont je n’aurais pas été capable, ni peut-être vous ». Il avait d’ailleurs écrit de son côté au directeur de l’enseignement primaire, Ch. Bayet, pour l’éclairer sur la situation et appuyer par avance tout ce que Steeg demanderait.

26 On peut suivre cette affaire, et les procédés inadmissibles de cette directrice, dans la correspondance presque quotidienne échangée entre Steeg et Pécaut (qui était dans sa retraite du Béarn) et que je possède. Pécaut était extrêmement inquiet, craignant fort que ce ne fût la mort de Fontenay, et on voit par la lettre du 16 octobre que Steeg le craignait aussi.

27 Carte postale adressée à : Dr Moritz Schwalb / Bergstrasse / Heidelberg / Allemagne

28 (1897-1981) né à Flainville le 12 août. Il épousera Odette de Leiris (1902-1985) et sera ingénieur principal des chemins de fer algériens.

29 Carte postale adressée à : Herm Dr M. Schwalb / 24 Bergstrasse / Heidelberg / (Allemagne)

30 Yves, dit Tino Steeg (1897-1976) naquit à Philippopoli le 26 août. Il épousera Eliane Monod (1903-1962).

31 Probablement Gaston Deschamps, 1861-1931, littérateur et critique, né en 1861, ancien élève de l’Ecole Normale, ancien professeur de rhétorique, alors rédacteur au Journal des Débats. Il sera journaliste au Temps et député. Je ne sais de quel article il s’agit.

32 L'Education publique et la vie nationale, Paris, Hachette, 1897. C’est un recueil d’articles et de conférences de Pécaut.

33 Il n’y en a qu’un, qu’on appelle la cavée, et que va vers la route de Dieppe.

34 Fils de Louis Meyer.

35 En août 1897 le président Félix Faure rendit en Russie au tsar Nicolas II la visite que celui-ci avait faite à Paris l’année précédente et c’est là que l’alliance franco-russe fut proclamée, ce qui enthousiasma l’opinion française. Je ne sais ce qu’est l'entrevue de Hambourg.

36 Celle de Charles aussi.

37 Evidemment au sens littéral : la jeune mère se levait (et reprenait « la vie commune ») pour la première fois.

38 Cette indication est d’une autre écriture, que je crois être celle de Maurice Schwalb ; la lettre ne comporte qu’un feuillet simple, et dont la première face porte le foliotage « 5 » ; enfin le début de ce feuillet fait visiblement allusion à un long passage où Steeg parle des affaires personnelles de Schwalb. Il paraît donc certain que le premier feuillet de cette lettre, les quatre premières pages, n’a pas été renvoyé à la famille Steeg avec le reste, sans doute parce qu’il était trop personnel.

39 C’était toujours Alfred Rambaud ; il prononça à l’enterrement de Steeg un discours de bonne qualité (publié dans Manuel général de l'Instruction primaire, No du 14 mai 1898).

40 Par l’arrêté du 7 octobre 1897 Mme Dejean de la Batie, inspectrice de l’enseignement primaire du département de la Seine était nommé directrice de Fontenay en remplacement de Mlle Saffroy. B faut rendre cette justice à cette dernière que depuis (elle fut aussitôt nommée directrice d’une Ecole normale d’institutrices) elle ne fit plus parler d’elle.

41 Sept mois plus tard, Steeg mourut et il fut décidé de ne pas maintenir son poste d’inspecteur général chargé de la direction des études à Fontenay, et de laisser toute la responsabilité, y compris la direction des études, à la directrice.

42 Luc, 11, 17 (forme traditionnelle mais inexacte de la citation).

43 Où Schwalb était en première année de théologie quand Steeg était encore en philosophie à Paris.

44 Théodore et Berthe – le dernier des garçons et la dernière des filles – étaient spécialement liés, et Théodore fit à sa petite sœur le somptueux cadeau d’une bicyclette – et on pouvait alors faire de la bicyclette dans Paris.

45 Pesque tout le linge, et presque tous les vêtements de femmes et d’enfants étaient, sauf chez les très riches et les très pauvres, faits à la maison.

46 Léon XIII et sa politique d’acceptation – très relative – des institutions républicaines de la France et de relative ouverture sociale et politique.

47 Pécaut s’inquiétait et se scandalisait de ce retard à exercer ses fonctions.

48 Steeg était allé voir Schwalb, depuis la retraite de ce dernier, chez lui à Heidelberg. Il n’y a qu’une autre trace de cette visite, à la fin de la lettre du 10 mars 1898. D’assez nombreuses lettres se sont certainement perdues.

49 De professeur de pédagogie à la Sorbonne.

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