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Nouvelles valeurs dans l’Angleterre d’aujourd’hui

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Monica Charlot

Avant-propos

Texte intégral

  • 1 Voir Jean Stoetzel, Les Valeurs du temps présent : une conquête européenne, Paris, PUF, 1983, (col (...)

1Le mot « valeur » est un terme imprécis dont les usages sont multiples. Qu’est-ce qu’une valeur ? En France, c’est Jean Stoetzel qui, à la fin des années 1970, mena de grandes enquêtes internationales sur les valeurs et fournit une problématique1. Selon lui, les valeurs constituent des références qui structurent à la fois les représentations de l’individu et ses attitudes.

2Dans le sens durkheimien de « fait social », les valeurs reflètent les données de chaque individu et contraignent le comportement social. Pour les philosophes, le traitement des valeurs dépend de l’éthique, de la philosophie politique et de l’esthétique. C’est dire qu’il n’existe pas une définition qui convienne à tous et que dans ce recueil d’articles chacun privilégiera son acception personnelle du mot valeur.

3Depuis l'époque victorienne les valeurs que les Britanniques privilégient se présentent le plus souvent par paires. Ainsi au XIXe siècle, les avancées technologiques se doublent-elles d'un retour à l'esprit médiéval et au mouvement gothique en art et en architecture. A l'extrême sensibilité aux joies de la vie rurale s'allient l'expansion rapide des villes industrielles et le dépeuplement des campagnes. Alors que la salle de lecture du British Museum regorge de penseurs aux idées radicales et qu'une femme va régner sur le pays soixante-quatre ans durant, les femmes n'ont toujours pas le droit de vote.

4Les Victoriens ont beaucoup apporté à la Grande-Bretagne : le téléphone, le courant électrique, la musique enregistrée, la photographie, les trains, le métro, les bateaux à propulsion à hélices, Noël et ses traditions, les bibliothèques municipales, la gratuité de l'enseignement, le rugby, le football comme sport national, les vacances et beaucoup d'autres choses encore.

5Mais que reste-t-il aujourd'hui des valeurs victoriennes si souvent citées par les Britanniques ? Le plaisir de la vie bucolique, c'est certain. L'amour des parcs publics et de la nature tient toujours une grande place dans le cœur anglais, qu'il s'agisse d'un milieu urbain, comme le montre Sylvie Nail, ou d'un milieu rural, comme le dit David Fée.

6Deux autres thèmes ont cependant vu le jour : celui de l'égalité des sexes — et non plus simplement de l'émancipation des femmes comme c'était le cas au XIXe siècle — et celui d'une définition nécessaire de ce qu'est la santé publique. Ces deux thèmes se sont particulièrement développés depuis les années quarante et la fin de la guerre et n'ont cessé de préoccuper les pouvoirs publics.

7Irène Hill et Simonetta Manfredi montrent l'amélioration de la condition des femmes et un désir grandissant de promouvoir l'égalité entre hommes et femmes par le biais institutionnel et législatif. Pionnière dans le domaine de la lutte contre la discrimination sexuelle en Europe, la Grande-Bretagne a finalement été obligée d'aller plus loin grâce à l'impulsion donnée par les directives européennes. Muriel Cassel-Piccot montre par ailleurs la façon dont paradoxalement l'image de la femme reste très stéréotypée par les messages publicitaires bien que les visages de la féminité se diversifient.

8Le droit à la santé publique reste l'une des nouvelles valeurs les plus fortement affirmées au XXe siècle. Les Britanniques sont de plus en plus soucieux en ce qui concerne leur santé et considèrent que l'un des plus grands acquis de l'après-guerre reste un système de santé performant et gratuit qui protège tous les citoyens également. Anémone Kober-Smith examine ainsi le système de santé tel qu'il se présente aujourd'hui et Bénédicte Robert étudie l'une des campagnes les plus difficiles auxquelles le gouvernement ait eu à faire face ces dernières années : le sida.

9Certaines valeurs demeurent, se transforment ou naissent. C'est ce que nous continuerons d'explorer dans un deuxième volume avec le fait d'admirer la britannicité ou l'adaptation du politique aux nouvelles valeurs nées de nouvelles technologies comme la procréation assistée ou la manipulation des embryons. Tout comme au XIXe siècle, les différentes contributions à cet ouvrage montrent clairement que les valeurs ne sont jamais simples et tranchées et que souvent s'opposent les valeurs de progrès et de tradition. Les normes changent et s'adaptent selon les époques et les convictions de chacun, mais les valeurs finalement s'avèrent nécessaires au bien-être de la société. C'est ce qui fait l'intérêt et la complexité de cette étude.

Notes

1 Voir Jean Stoetzel, Les Valeurs du temps présent : une conquête européenne, Paris, PUF, 1983, (coll. Sociologies), 320 p.

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