Encyclopédie des historiographies : Afriques, Amériques, Asies
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Akbarnama
Akbarnama
Résumé
L’Akbarnama ou « Le Livre d’Akbar » est la principale chronique officielle datant du règne du troisième empereur moghol, Jalal al‑Din Muhammad Akbar. Il fournit un récit long, très flatteur, mais aussi extrêmement instructif des événements qui se sont produits lorsqu’il était au pouvoir, le dépeignant comme le souverain idéal, tout‑puissant et divinement éclairé qui a régné avec bienveillance sur ses sujets.
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Mots clés :
Asie du Sud, Inde, XVIe siècle, Akbarnama, Abul Fazl, Empereur Akbar, historiographie mogholeKeywords :
South Asia, India, 16th century, Akbarnama, Abul Fazl, Emperor Akbar, mughal historiographyTexte intégral
1L’Akbarnama ou « Le Livre d’Akbar » est la principale chronique officielle du règne du troisième empereur de la dynastie moghole, Jalal al‑Din Muhammad Akbar, qui régna sur une grande partie de l’Inde du nord entre 1556 et 1605 (voir la notice “Court Chronicles in Mughal India” dans cette encyclopédie). Rédigé par son idéologue, proche collaborateur et homme de confiance, l’historien Abul Fazl, l’ouvrage est divisé en trois parties. La première commence par un récit des circonstances de la naissance d’Akbar et offre une description détaillée de son horoscope, avant de faire remonter son arbre généalogique à Adam, en passant par des prophètes bibliques et des membres de l’illustre clan timouride (descendants du conquérant Tamerlan), lui octroyant ainsi une légitimité dynastique irréprochable. Elle relate ensuite la carrière tumultueuse de son père et prédécesseur Humayun (r.1530‑40, 1555‑56), avant d’entamer un récit chronologique des principaux événements de la carrière politique d’Akbar, depuis son accession au trône jusqu’à sa dix‑septième année au pouvoir (1572). La deuxième partie poursuit la narration jusqu’à la quarante‑sixième année du règne (1602).
2Davantage connu sous le nom d’Ain‑i Akbari (« Les Institutions d’Akbar »), le troisième volume de l’Akbarnama constitue un ouvrage à part. Il est divisé en cinq sections qui fournissent un vaste éventail d’informations sur l’histoire, la géographie, la composition ethnique et le fonctionnement administratif de l’Empire moghol, un livre d’un genre jusqu’alors inconnu dans l’historiographie indo‑musulmane. La première section décrit l’establishment impérial, organisé autour de la personne de l’empereur. Ses chapitres abordent des thèmes divers et variés tels que la trésorerie, les insignes de la royauté, les produits agricoles des provinces, l’arsenal militaire et les normes de comportement qui devaient être respectées à la Cour. La deuxième évoque les services rendus par différentes catégories d’officiers et les activités organisées pour la distraction du souverain, telle la chasse. La troisième section contient, entre autres, une description des douze provinces (suba) de l’Empire, alors que la quatrième aborde des sujets comme les croyances religieuses et les pratiques rituelles hindoues, les éminents personnages d’origine étrangère qui se sont rendus en Inde au cours des siècles et les saints musulmans qui ont, depuis l’avènement de l’Islam dans le pays, exercé leur influence bienfaisante sur ses habitants. Enfin, dans la cinquième section, l’auteur présente une longue liste de propos moraux et philosophiques attribués à Akbar, avant de clore son discours par un bref récit autobiographique suivi d’une explication de la démarche qu’il employa pour la rédaction de son livre.
3Commandée en 1590, la rédaction de l’ouvrage se poursuivit jusqu’à la mort de son auteur en 1602 et un addenda posthume fut ensuite ajouté pour le mettre à jour jusqu’à la fin du règne. L’illustration du manuscrit fut confiée aux meilleurs artistes de l’atelier impérial. Une impressionnante collection de ces miniatures minutieusement préparées se trouve aujourd’hui au musée Victoria et Albert de Londres. Pour la collecte d’informations, Abul Fazl se servit d’une grande variété de sources, y compris les documents se trouvant dans le bureau des archives impériales, les traditions orales et les copies des rapports détaillés qui étaient périodiquement envoyés à la Cour par des waqia nawis (« rédacteurs de nouvelles ») pour tenir l’empereur informé des événements survenant dans les différentes régions de l’empire. Il interrogea les anciens personnels, autrefois au service de la famille impériale, parfois jusqu’à vingt individus, pour se renseigner sur un seul événement, rapportant leurs témoignages d’abord sous forme de brouillons, puis les restituant dans un style élégant. Pourtant, Abul Fazl l’admet, des « contradictions et des imperfections » demeuraient. Chaque fois qu’il avait des doutes sur l’authenticité d’un fait, il s’en remettait à la discrétion de l’empereur, qui, « en vertu de sa mémoire parfaite, se rappelait chaque événement en détail, depuis l’âge d’un an » pour résoudre son dilemme.
- 1 Richards, 1993.
4L'Akbarnama dépeint Akbar conformément au précepte soufi de l’être parfait (insan‑i kamil), un individu divinement inspiré, dont la proximité avec Dieu lui a accordé une connaissance ésotérique et une autorité temporelle dépassant celles des autres humains1. Il constitue le pôle autour duquel se tisse le destin de l’empire. Imbattable sur les champs de bataille et initiateur de la quasi‑totalité des projets et des réformes qui ont vu le jour pendant son règne, il réussit dans toutes ses entreprises et la moindre tentative de s’opposer à lui se solde inéluctablement par un échec.
5Même si la nature très partisane de ce travail a été largement critiquée depuis sa création, l’Akbarnama constitue une réalisation stupéfiante dans le domaine de la composition historiographique, établissant un repère que des générations entières d’historiens indiens ont cherché à imiter.
Bibliographie
Ouvrages
Allami Shaikh Abul Fazl, 1867‑1877, A'in‑i Akbari, texte édité par H. Blochmann, 2 vol., Asiatic Society of Bengal, Calcutta ; traduit en anglais par H Blochmann, 2001, (vol. i, révisé et édité par D. C Philliot, 1927) et H. S. Jarret (vols. ii et iii, révisé par J. Sarkar), réimpression Low Price Publications, Delhi.
Allami Shaikh Abul Fazl, 1873‑1886, Akbar Nama, texte édité par Agha Ahmad 'Ali et 'Abdul Rahim, 3 vol., Asiatic Society of Bengal, Calcutta ; traduit en anglais par Beveridge Henry, 1998 (1902‑1939), 3 vol., Low Price Publications, réimpression Delhi.
Mukhia Harbans, 1976, Historians and Historiography during the Reign of Akbar, Vikas Publishing House, New Delhi. [9789350025208]
Richards John, 1993, The Mughal Empire, Cambridge, Cambridge University Press, New York, 340 p. [9780521566032]
Articles et contributions à des ouvrages
Eaton Richard, 2009‑2010, Akbar‑Nāma, Encyclopaedia Iranica, http://www.iranicaonline.org/articles/akbar-nama.
Hardy Peter, 1985, Abul Fazl's Portrait of the Perfect Padshah; a Political Philosophy for Mughal India or a Personal Puff for a Pal?, in Troll Christian W., Islam in India: Studies and Commentaries, vol. 2, Vikas, New Delhi, p. 114‑137.
Notes
1 Richards, 1993.
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