L. Quels outils pour valoriser les périodiques
p. 131-137
Texte intégral
1Avant d’aborder l’étude des différents outils de valorisation des périodiques, il est peut-être utile de se demander pourquoi mettre en valeur des documents qui bénéficient déjà du succès du public, succès qu’on suppose parfois lié au refus de livres trop épais.
2Il ne s’agit pas de prouver que le livre est supérieur au périodique ou inversement en fonction de ses convictions, mais bien de démontrer aux lecteurs que leurs usages ne sont pas identiques car leurs raisons d’exister diffèrent. Valoriser les périodiques revient à montrer comment bien s’en servir.
3Parmi les 4954 notices (cf. supplément Statistiques de la Bibliographie générale française) publiées par la BNF en 1996, toutes ne correspondent pas à des documents de valeurs égales mais tous ces documents présentent un fort caractère d’actualité. Quels que soient les sujets traités, ils offrent une possibilité de mise à jour des connaissances, de veille scientifique (25 % des nouveaux titres dans le domaine des sciences appliquées et pures) et de veille économique dont la mise en œuvre est proposée par de nombreuses sociétés (revue de presse sur profil, lettres confidentielles) à prix fort. Les entreprises ont intégré le coût élevé de cette information dans leur budget persuadées qu’elle est un élément important de maîtrise de la concurrence et des marchés.
4Dans les bibliothèques publiques, la valorisation des périodiques participe fortement à l’augmentation de la qualité de la recherche documentaire. La rapidité d’accès à l’information est un élément important de la qualité : on ne peut donc se passer des technologies nouvelles et les outils de valorisation des périodiques devront être envisagés de façon aussi automatisée que possible.
1. Les dossiers de presse
5Très gourmands en moyens humains et en temps, leur constitution a souvent pour origine des demandes de lecteurs qui sont eux-mêmes chargés de produire un dossier de presse demandes auxquelles les bibliothécaires généreusement (trop généreusement ?) répondent sans connaître les implications de cette activité.
1.1. Les moyens nécessaires
6Pour alimenter un cinquantaine de dossiers de presse en dépouillant régulièrement huit titres de périodiques, en interrogeant quotidiennement les sites de la presse générale sur Internet, on peut compter vingt heures de travail photocopie et intercalation comprises, temps à partager entre au moins deux personnes. Pour la numérisation, l’indexation remplace l’intercalation des articles dans les dossiers ; il suffit donc de rajouter le temps de scannérisation et celui de la saisie des données (titres du périodiques, date, mots - clef).
7N’oublions pas qu’il ne suffit pas de disposer d’un matériel performant pour la réalisation des dossiers de presse, encore faut-il proposer au public un nombre suffisant de postes de consultation.
8Pour des informations plus détaillées se reporter au N° 5 de la collection La boîte à outils.
1.2. La constitution de dossiers de presse : un bon ou un mauvais choix pour une bibliothèque publique ?
91.2.1. Un bon choix si on prend en compte le degré de satisfaction des lecteurs cités plus haut qui trouvent un produit « tout prêt » qu’ils se contenteront de photocopier avec une absence de sens critique remarquable. En quinze ans, aucun lecteur n’a contesté la sélection des titres de périodiques du département Société de la B.M. de Lyon ; personne ne s’est étonné de l’association sous le même dossier des « phénomènes religieux et irrationnels » ou n’a relevé l’incohérence qui consiste à traiter l’homosexualité dans le dossier « modes de vie » et la prostitution dans le dossier « sexualité ».
10Les dossiers de presse en bibliothèque publique semblent s’adresser à des lecteurs exigeants sur la forme (demande de documents primaires) mais peu sur les contenus, à la recherche d’information peu onéreuse, pressés peut-être parce que jeunes ?
111.2.2. Un mauvais choix si l’on considère que le « tout prêt » peut céder la place au « vite prêt » élaboré par l’usager lui-même et forcément plus adapté sinon à sa demande du moins à ses besoins. Ceci implique une activité pédagogique par la mise en place d’information et de formation des lecteurs à l’utilisation des index, des sommaires, des dépouillements de périodiques, d’Internet. « A un homme qui a faim, doit-on donner un poisson ou lui apprendre à pêcher ? »
2. La numérisation de sommaires
2.1. La revue de sommaires
12Avant l’apparition de la numérisation, les bibliothèques proposaient des revues de sommaires qui consistaient en la reproduction par photocopie des sommaires rassemblés soit par titre de périodiques soit par thème (revue des sommaires en économie ou revue des hebdomadaires d’information générale en anglais...). Cela nécessitait un feuilletage mais ces produits n’étaient pas dépourvus d’intérêt puisqu’ils évitaient :
la multiplication des abonnements en portant à la connaissance des usagers d’un réseau local de bibliothèques le contenu de revues dont le prix ou la spécificité ne justifiaient qu’un seul exemplaire
la consultation par le lecteur d’une collection entière déjà archivée et donc en accès indirect.
13Cette forme d’exploitation des périodiques offre l’avantage par rapport aux dossiers de presse de ne poser aucun problème juridique, les sommaires n’étant pas soumis au droit d’auteur.
2.2. La numérisation archivage (dite en mode image)
14Elle s’apparente à la revue de sommaires sur support papier (puisque les mots du texte ne sont pas des critères de recherche) mais en assure la conservation et la diffusion rapide par voie électronique.
2.3. La numérisation « à valeur ajoutée »
15Au feuilletage et à la lecture de chacun des titres d’articles se substitue la possibilité d’une recherche par mots de l’auteur ou du titre. A la fonction de numérisation doit s’ajouter celle de la reconnaissance de caractères (OCR en anglais). Afin de rendre accessibles ces informations sur Internet, outre l’utilisation d’un moteur de recherche, il est souhaitable d’utiliser un langage hypertextuel (HTML - hypertext mark up language- étant au regard de l’expérience menée à la BM de Lyon, mieux adapté que le format PDF -portable document format- développé par Adobe-Acrobat. A ce logiciel qui n’offre qu’une photo-conservation des polices de caractères avec une possibilité de correction limitée d’erreurs assez nombreuses, nous avons préféré Omnipage). Ces conclusions liées à un projet en cours de réalisation ne doivent pas être considérées comme définitives.
2.4. Le choix des titres de périodiques concernés
16Il peut reposer sur plusieurs logiques :
partant du principe que les titres de périodiques mis à disposition directe du public dans les salles sont les plus pertinents pour répondre à la demande du lectorat, on peut numériser les sommaires de ces documents seulement ;
on peut souhaiter, au contraire, rappeler au lecteur par le biais des sommaires que la bibliothèque possède aussi des abonnements qu’elle ne peut présenter en salle faute de place mais qui méritent toute leur attention ;
on peut aussi lier son choix à la périodicité des publications, au caractère spécifique ou général, à l’absence de tables annuelles etc.
17Il n’y a pas de meilleure solution, chaque établissement devant faire pour son public le meilleur choix, qui dépendra aussi des moyens dont il dispose.
2.5. Les moyens nécessaires
18en temps pour une page :
2 mn pour la scannérisation
5 mn pour la reconnaissance de caractères
3 mn pour la mise en page HTML
19La numérisation des sommaires d’un mensuel nécessite donc 2 heures de travail par an.
20en matériel : deux solutions sont possibles : le choix d’un matériel haut de gamme que tous les services devront se partager sans que cela allonge les délais de mise à disposition de l’information ou choix d’un matériel plus standard dans chacun des services ce qui offre l’avantage d’une organisation plus souple. Dans ce dernier cas, envisager un investissement de 5000 F pour le numériseur avec OCR intégré et l’éditeur HTML (coûts 1997).
21Si on ne souhaite pas se lancer dans une opération de numérisation, il existe la possibilité de confier ce travail à l’extérieur de la bibliothèque. Depuis fin 1997, l’Office Central de Documentation (distributeur de cédéroms) propose moyennant un forfait annuel de 8000 F, la numérisation des sommaires de 40 titres de périodiques que les bibliothèques lui font parvenir par photocopies et qu’elle peuvent ensuite, dans un délai de 48 heures consulter sur le serveur Web d’OCD. Pour l’instant, peu de bibliothèques ont souscrit mais ces services et leurs prestataires sont certainement appelés à se développer.
3. La numérisation d’index
22Tout ce qui a été dit dans le paragraphe précédent reste valable. On ne peut que déplorer le faible intérêt de certains éditeurs pour la diffusion de tables au moins annuelles. Avant chaque souscription d’abonnement, l’idéal serait de prendre contact avec les responsables de la publication pour leur expliquer que la présence d’index valorise leur titre car elle facilite la recherche documentaire. Pour certains des rédacteurs, cette information constitue une véritable découverte.
4. Le dépouillement de périodiques
23C’est une opération qui consiste à signaler tous les articles d’un périodique ou seulement ceux que l’on juge dignes d’intérêt. On précise l’auteur et le titre de l’article, le titre du périodique (lorsqu’il n’est pas univoque l’issn) et le N° et la date du fascicule dépouillé.
24La notice de dépouillement doit contenir une indexation matière ; on y associe parfois un résumé dont le contenu est interrogeable ou non en fonction des caractéristiques du logiciel de dépouillement. Les notices peuvent être versées dans le catalogue général de la bibliothèque ce qui présente l’avantage de pouvoir les consulter à distance en particulier par Minitel pour les petites bibliothèques ou faire l’objet d’un produit distinct (cédérom par ex.). Dans tous les cas, il est souhaitable que le lecteur puisse avoir accès directement aux informations concernant la cote ou la localisation du périodique afin de ne pas lui imposer une deuxième recherche dans le catalogue.
5. La valorisation des périodiques : par une activité interne ou par l’acquisition de produits et services ?
25Dans la mesure du possible, on ne peut qu’encourager les bibliothèques à ne pas reproduire un travail effectué par ailleurs et il vaut mieux consacrer son énergie à créer des outils complémentaires à ceux qui existent déjà. Attention à l’argument « trop cher donc on fait nous-mêmes » : les bibliothécaires n’ont pas suffisamment l’habitude de calculer les coûts de production des produits et services qu’ils offrent et la « fabrication maison » peut se faire au détriment du service de renseignement et de formation au lecteur. Cependant, le fait d’entreprendre des expériences permet une meilleure appropriation de l’outil informatique en général, une prise de conscience des difficultés de réalisation et de ce fait une meilleure évaluation de ce qui est proposé sur le marché.
Auteur
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Anne-Marie Boyer
Bibliothèque Municipale de Lyon
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