1La métaphore de la « boîte à outils » facilite notre propos. Il s’agit en effet ici de la construction, au sens artisan maçon du terme, d’une formation. Ce type de construction se fait à partir d’une intention pédagogique, d’un plan, et met en jeu des moyens et des buts. La construction d’une maison suppose un plan, des matériaux, des artisans, un maître d’œuvre, un maître d’ouvrage, un style de vie et d’habitat. La mise en place d’une formation à l’usage de la documentation obéit aux mêmes règles. Seule différence : les matériaux, parfois, ne sont pas tout à fait identifiés ou désignés par les mêmes mots.

1. Introduction

1.1. L’enjeu de la formation à la recherche documentaire et à l’usage de l’information

2L’enjeu de la formation à la recherche documentaire et à l’usage de l’information des étudiants est de les aider à réussir leurs études. Il s’agit de leur permettre de s’insérer suffisamment dans le cadre de l’institution universitaire pour utiliser au mieux de leurs intérêts personnels et disciplinaires les ressources et les services qui existent1.

3En raison de la complexité croissante des possibilités d’information (et des moyens d’y accéder), l’usager doit s’impliquer pour acquérir l’information dont il a besoin. Une véritable culture de l’information lui est nécessaire, dont l’acquisition peut se décliner en opérations d’apprentissage plus ou moins complexes. En effet, l’étudiant aura à connaître :

• les sources documentaires et leur organisation,

• les langages à utiliser pour interroger ces sources (vocabulaire, thésaurus…),

• les outils d’information nombreux et hétérogènes présents sur les campus (cédéroms bibliographiques, catalogues informatisés, Internet).

4Pour enseigner aux étudiants l’usage de l’information, il est nécessaire de construire un savoir cohérent sur l’information bibliographique ; les formateurs des campus doivent pour cela réfléchir aux concepts dont ces divers outils sont l’aboutissement.

5Nous nous sommes fixés pour tâche, à l’Urfist (Unité régionale de formation à l’information scientifique et de technique) de Toulouse, d’accompagner et d’aider cette réflexion et avons adopté une méthode de travail particulière en invitant les formateurs à partager leurs connaissances pour construire une approche commune de la formation à l’information bibliographique. Ce partage, basé sur les principes de conversion de connaissances, vise à la construction d’un savoir à enseigner : il repose sur un travail théorique et conceptuel concernant l’information associée à une approche pédagogique.

6Nous avons choisi d’axer notre activité de formatrices à la recherche documentaire sur la gestion des connaissances (knowledge management), qui consiste à gérer de façon explicite des connaissances au départ implicites, et qui tient compte des différents paramètres environnementaux des personnes. Ce modèle nous a semblé adapté au réseau de formateurs pour deux raisons :

• leurs connaissances sur l’information bibliographique, bien que riches, restent souvent implicites, utilisées dans un environnement professionnel ;

• ces connaissances, utilisées pour construire les formations, se développent et s’appliquent dans un certain environnement politique, social, culturel…

1.2. Qui sont les formateurs concernés ?

7Les stagiaires (professionnels de l’information et enseignants/chercheurs) qui ont suivi des stages à l’Urfist possèdent un potentiel pédagogique intéressant en matière d’information bibliographique, qu’ils sont amenés à utiliser soit par goût, soit par obligation. En effet, la recherche documentaire fait désormais partie de la méthodologie du travail universitaire inscrite dans la réforme des Deug (application dès la rentrée 1998/99), tandis que les personnels des bibliothèques sont incités à faire de la formation pour les étudiants. Les stagiaires, formateurs potentiels ou effectifs, sont pour l’essentiel des bibliothécaires, conservateurs, documentalistes, ingénieurs d’études et de recherche. Mais certains enseignants disciplinaires sont très intéressés par ce domaine, tout en hésitant à s’y investir. Les professeurs certifiés de documentation, qui ont fait leur entrée à l’Université, sont déjà opérationnels dans les SCD. Ce sont ces personnes qui, en majorité, sont demandeuses de la formation de formateurs que nous proposons depuis 5 ans.

1.3. Un plan de formation de formateurs

8Nous avons réfléchi à la manière de construire un plan de formation par niveau, évoluant avec les cursus, et à la mise en œuvre de ce plan de formation du point de vue pédagogique et institutionnel. Ce plan a été mis en pratique avec le premier groupe de formateurs, dont la formation s’est achevée en 1998. Après quelques séances de didactique de l’information bibliographique (1995-1996), nous avons constaté les faits suivants :

• cet enseignement (formation à l’information bibliographique) n’a pas de fondement théorique, d’où la difficulté initiale d’expliquer clairement les objectifs de toute formation méthodologique (sauf à se cantonner à des niveaux de généralité ou à des transmissions d’expériences très individuelles) ;

• la didactique de la formation de formateurs n’est pas la même que celle de la formation à une discipline et reste à créer.

9C’est pourquoi le programme de formation de formateurs que nous avons mis en place tient compte :

• des contenus,

• des applications de la didactique, notamment à travers la détection des obstacles à la formation et l’observation des situations didactiques,

• des principes de l’ingénierie didactique : création d’une séquence pédagogique où l’enseignement est prévu dans les détails, avec l’aide d’outils pour la construction de formations,

• de l’évaluation des enseignements donnés aux étudiants.

10Notre méthode de travail mêle apports théoriques et applications actives. Nous avons basé ces activités sur deux principes : la prise en compte de tous les aspects qui concernent la formation et le travail en groupe. Nous avons construit ces séquences de formation en prenant soin d’identifier le contenu de l’enseignement en relation avec l’application de la formation aux travaux des étudiants, sans oublier les aspects pratiques qui concernent l’organisation et la mise en œuvre de cet enseignement sur les campus.

1.4. Un modèle de formation : la conversion des connaissances

11La conversion des connaissances se trouve au centre de notre dispositif de formation et nous permet d’appréhender différents niveaux de représentation du monde : socialisation, extériorisation, combinaison, intériorisation. Ces quatre visions correspondent à des traitements particuliers de l’information et interagissent dans la formation à la recherche documentaire.

12La socialisation, qui concerne la connaissance tacite, correspond aux échanges d’expériences au sein des groupes de travail de formation de formateurs : le niveau de recherche d’information est peu ou mal formulé. L’étape suivante, l’extériorisation, est l’expression de l’information en voie de structuration, de la conceptualisation d’un domaine. La construction d’un savoir structuré autour de la recherche d’information se fait par combinaison de connaissances explicites qui vont être ordonnées, classifiées, pour trouver une place logique dans un système de classification et dans un savoir hiérarchique. Enfin, l’intériorisation (retour à un niveau de connaissances tacites) s’incarne dans une production particulière, dans un travail précis à réaliser.

13Ces différents niveaux de représentation du monde mettent en scène le formateur, l’étudiant, le savoir à transmettre, les supports de mémorisation et d’accès à l’information. Le triangle didactique traditionnel qui relie l’élève, l’enseignant, le savoir à transmettre est ainsi transformé en carré didactique.

14Comment répondre, dans ces conditions, à des questions comme « que vais-je enseigner », « comment vais-je l’enseigner » ?

1.4.1 Que vais-je enseigner ?

15L’objet de la formation est l’information bibliographique dont on peut donner la définition suivante : c’est une information issue de la production scientifique, qui a subi un traitement (information structurée, normalisée) et qui a été mise en mémoire. La notion de mémoire et d’organisation de mémoire est, dans le cas présent, très importante.

16L’information mémorisée prend son sens dans un contexte précis qui renvoie au traitement qu’elle a subi, ainsi qu’aux deux systèmes qui lui sont nécessaires pour s’actualiser : émetteur/ récepteur, auteur/usager. L’information est définie par son objet, mais aussi par ses modes de représentation dans les mémoires.

17L’organisation de l’information, l’usage de l’information, avec les nouvelles technologies de stockage et de traitement de l’information, font appel à des approches et à des connaissances diverses (sémantique, technique, computationnelle, cognitive), que doivent posséder ou acquérir les formateurs. Ces aspects constituent les ingrédients de la formation.

1.4.2 Comment vais-je enseigner ?

18La réponse à cette question n’est pas d’emblée évidente ; en effet, la difficulté de la formation est due, dans la plupart des cas (pour les professionnels de l’information), à la difficulté d’exprimer des pratiques professionnelles à un niveau conceptuel. Il ne faut pas perdre de vue que la formation est destinée à un utilisateur final et non à un futur professionnel. Pour le bibliothécaire/documentaliste, le discours sera différent du discours professionnel. Pour l’enseignant, il sera différent du savoir disciplinaire.

19Tout le travail effectué en formation de formateurs a reposé sur la mise en évidence de différents niveaux de conversion de connaissance pour les formateurs :

• transformation des expériences individuelles en expériences partageables et exprimables ;

• transformation de ces expériences en concepts, à partir d’un travail commun et des idées ; le but est de créer un vocabulaire commun, d’aboutir à la reconnaissance mutuelle de compétences différentes (afin de les intégrer dans son propre savoir) ;

• construction progressive d’un système de savoir (ayant donc une signification pour tous).

20Ces trois étapes permettant de répondre à la question « que va-t-on enseigner » constituent le préliminaire pour la transposition didactique « comment enseigner ».

21Les étapes suivantes participent de la dynamique de l’enseignement :

• utilisation de ce savoir pour construire de nouvelles informations et connaissances (documents, cours, séquences de cours) ;

• mise à jour de ces productions (concernant la recherche d’information et les stratégies de recherche) au regard de l’évolution des systèmes d’information (réseaux, outils…).

2. Les matériaux utilisables par les formateurs

2.1. Les outils documentaires : caractéristiques

22La formation doit être conçue dans son ensemble comme une invitation à la conversion des connaissances. Les outils documentaires des campus, à l’exception des ressources accessibles via l’Internet, présentent des formes très explicites. Plus ces outils sont destinés à un large public, plus ils reposent sur des langages formels et des modèles hiérarchiques. L’individu doit faire un effort pour comprendre ces modèles qu’il connaît mal au début. C’est le cas pour l’étudiant de première année, dont la culture informationnelle est pratiquement inexistante. Pour celui-ci, la recherche d’information doit correspondre à un désir d’apprentissage et d’appropriation de connaissance par rapport à son cursus (ou à des intérêts plus personnels).

23Le rôle des formateurs est de répondre à ces besoins en suscitant l’envie d’utiliser les mémoires d’information et en expliquant leur fonctionnement et leur usage. Quant à l’institution, son rôle est d’assurer une cohérence sociale aux connaissances en offrant les moyens d’accéder aux informations. En retour, les usagers enrichissent les connaissances partagées par tous, dans un processus dynamique.

2.2. Spécification des niveaux de connaissance de l’étudiant et des niveaux de formation

24Former à l’usage de l’information bibliographique consiste à accompagner le mouvement de transformation des connaissances à partir de l’acquisition d’informations nouvelles qu’elle engage. Le passage dynamique à différents niveaux de connaissances est nécessaire pour que l’usager communique correctement avec les outils d’information dont il doit apprendre à se servir et en retirer l’information pertinente. Ensuite, il doit l’incarner dans un produit (expression d’une connaissance) : fiche de lecture, rapport, dossier, thèse, etc. On distinguera plusieurs niveaux de formation qui évoluent avec les capacités que l’étudiant a acquises et qu’il doit compléter.

2.2.1. Acquérir un modèle culturel : niveau 1 de formation

25Il existe différents outils d’information sur un campus : Opac (On line public access catalog) ou catalogues informatisés en ligne des bibliothèques, cédéroms, banques de données ou Internet. Du point de vue de leur conception, tous ces outils correspondent à des architectures de traitement de l’information : chacun possède des caractéristiques particulières. Les approches théoriques et informatiques qui président à leur organisation correspondent à des modèles particuliers et rigoureux.

26• Contenus de formation

27Chacun de ces supports présente néanmoins des différences tant du point de vue des connaissances contenues que de leur structuration ou de leur mise à jour. À l’exception de l’Opac, ce sont tous des bibliographies secondaires. Il est important que l’usager comprenne cette différence. Outre les aspects liés à l’informatique et à l’acquisition de procédures strictes à mettre en œuvre pour rechercher de l’information (très explicites), il est nécessaire de présenter le contexte du campus, la production scientifique et les sources d’information utiles selon le niveau et le domaine d’étude pour que l’étudiant acquière une vision généraliste de son environnement universitaire.

28Cette approche permet de présenter les outils et les principes du traitement de l’information de façon relativement simple, ainsi que quelques règles générales d’utilisation. L’étudiant doit comprendre la finalité, l’utilité de cet apprentissage, et devenir progressivement capable d’évaluer la qualité de l’information obtenue au cours de la recherche en l’intégrant dans une tâche à réaliser.

29• Pédagogie de la recherche d’information

30Afin d’analyser les tâches de l’apprenant dans une perspective pédagogique, nous proposons de présenter le contexte de l’information et d’adopter la métaphore de l’action planifiée pour parler de recherche d’information2. Cette approche permet de simplifier la réalisation de la recherche d’information en la divisant en tâches et sous-tâches qui doivent être réalisées dans un certain ordre (planification) pour atteindre un certain but (moyens-buts). Ainsi, l’usager peut comprendre le fonctionnement du système, l’intérêt de son usage et acquérir les modèles opératoires de base.

31• Le modèle culturel minimal

32Le tableau ci-contre met en regard les aides offertes par les outils de niveau 1, les niveaux cognitifs de l’étudiant, les tâches et sous-tâches qu’il doit accomplir pour mener sa recherche. La démarche de l’étudiant comporte deux étapes nécessaires : une approche générale de la recherche, puis l’apprentissage des outils d’information.

33Ce tableau fournit également un support pédagogique qui permet de :

• montrer les aspects de traitement de l’information,

• apprendre les procédures d’interrogation,

• apprendre quelques types d’usage de recherche d’information (scénarios simples) pour établir des critères de pertinence.

34Ce parcours met en œuvre de la connaissance explicite à un niveau conceptuel et formel ; il est fondé sur l’interaction explicite entre l’homme et le système d’information via la machine.

35Le formateur doit mettre en relation la structuration formalisée des connaissances proposée par l’outil avec les connaissances encore peu formalisées de l’apprenant. Au cours de ce processus dynamique d’apprentissage, l’apprenant doit impérativement utiliser les résultats de sa recherche dans une activité d’appropriation de connaissances : rédaction de fiches de lecture, rapport, dossier, bibliographie d’une étude thématique, bibliographie annotée, etc. Le premier enjeu de cette approche est de fournir à l’étudiant des clés (culture) d’ouverture et de compréhension, à partir desquelles il pourra construire des connaissances plus fines, à un niveau plus personnel et intériorisé.

Les outils de niveau 1

36Ce modèle permet la formation de comportements informationnels issus des savoirs acquis. À partir du modèle du tableau, au niveau 1, on peut envisager de décliner différents exemples de recherches bibliographiques (basés sur des outils généralistes), tout en mettant l’accent sur les caractéristiques fonctionnelles de l’outil, les tâches et sous-tâches que l’étudiant doit accomplir pour une recherche d’information simple et la manière dont il utilisera l’information obtenue.

2.2.2 Maîtriser un champ disciplinaire : niveau 2 de formation

37Au niveau 2 de la formation, l’étudiant doit approfondir le comportement planifié de recherche bibliographique en effectuant des recherches spécifiques associées à la réalisation d’une tâche particulière dans une discipline donnée. Le formateur doit l’amener à percevoir les niveaux d’utilisation, les types d’information, les types d’outils et de sources concernant un champ particulier. Le passage de recherches généralistes à des recherches plus spécialisées implique un changement de niveau de connaissances, davantage de précision au niveau de la manipulation des concepts et des procédures d’interrogation et de recherche.

38Le tableau ci-contre constitue un modèle sur lequel on pourra greffer les fonctionnalités spécifiques des outils de niveau 2.

39Les différents scénarios de recherche doivent être abordés, car la recherche à accomplir s’inscrit dans un cadre plus précis et plus ciblé. Il s’agit de mettre l’information au service de la connaissance de la discipline. Parmi les types de recherches les plus courants, on peut citer : état des lieux, recherche thématique, recherche auteur, réponse à une question précise, recherche d’un renseignement concernant une référence incomplète, vérification de références ou recherche de contrôle ou de mise à jour. La recherche sur un sujet ou un domaine donné est réalisée pour :

• avoir une vue d’ensemble,

• avoir une première approche d’un sujet de recherche,

• suivre et analyser l’évolution thématique, identifier des relations inter-thèmes non explicites,

• identifier et regrouper les acteurs, les institutions, leurs vecteurs de communication (thèses, rapports, monographies, périodiques) par thèmes,

• évaluer le positionnement thématique d’un acteur, d’une institution, d’un pays, d’un vecteur de communication (périodique, congrès),

• orienter des recherches,

• explorer et analyser l’information relative à un sujet de préoccupation (un corpus bibliographique).

• repérer l’émergence de nouveaux thèmes de recherche,

• identifier des technologies émergentes,

• évaluer les résultats d’une équipe de recherche,
  - établir un partenariat…

Les outils de niveau 2

40Il est important que l’étudiant puisse :

• aborder la question du poids des mots au cours de la recherche et de la « granularité » de l’information (la granularité de l’information se définit comme la richesse de détails de l’information ; par exemple, dans une banque de données bibliographique, la granularité est faible, par contre elle est élevée dans le texte intégral) ;

• mettre en œuvre un raisonnement dynamique et critique ;

• prendre en compte l’évaluation d’une recherche, établir des critères de pertinence ;

• incarner la recherche dans une action finalisée ;

• connaître les acteurs du domaine, la production scientifique, les publications, le vocabulaire d’autorité.

41En enseignant à l’étudiant à utiliser en même temps différents niveaux de connaissances (recherche d’information, analyse de l’information, production de connaissances), on le forme à penser de façon coopérative, car on le confronte à plusieurs modes de travail, à plusieurs outils, à différents contextes dans lesquels il doit apprendre à se déplacer parmi des éléments disparates. Il apprend à parcourir l’information pour repérer les auteurs, les descripteurs, les thématiques et à déterminer des critères de réussite et de pertinence d’une recherche en tant que processus finalisé.

2.2.3 La formation à l’information émergente : niveau 3 de formation

42La représentation sémantique d’une discipline et de son contexte se fait par le biais de la pratique et de la maîtrise des langages fondamentaux (thésaurus, index, lexiques, langages de spécialité). La formation à l’information émergente s’appuie sur la connaissance sémantique d’un domaine et sur la pratique des techniques d’analyse des résultats de recherche d’information. Cette analyse a pour but de faciliter l’interprétation de l’information. C’est la partie la plus sophistiquée de la recherche d’information. On peut l’utiliser à partir de sources bien maîtrisées et connues afin d’établir des cartographies, c’est-à-dire représenter les résultats des recherches en cartographiant les éléments évidents et en faisant apparaître des éléments informatifs nouveaux. On couple certains éléments d’informations avec d’autres.

43- La reconnaissance des liens sémantiques contenus dans les ensembles d’information renvoie à l’inscription de nos connaissances, à la mémoire, à nos pratiques, à ce qui constitue notre expérience. Dans ce contexte, la connaissance qui émerge naît de la relation qui existe entre l’individu et l’objet de sa connaissance.

44- Les techniques mathématiques et statistiques sont utilisées pour « faire parler » l’information en les appliquant à de larges corpus de données. Les logiciels associés révèlent des liens parfois inattendus et permettent de visualiser des trajectoires d’actions et d’individus, voire de simuler diverses situations.

45- Les analyses infométriques permettent de visualiser les informations sous forme de clusters, d’agrégats. Elles permettent les liens externes, les liens internes, les réseaux, les trajectoires des acteurs, les relations dynamiques entre eux. Seule notre expérience nous permet de reconnaître l’information virtuelle, contingente (contenue dans l’information, non visible à l’œil nu). Les techniques infométriques permettent de :

46- trouver des modes de mise en œuvre des critères de réussite et d’évaluation d’une recherche (aspects quantitatifs, qualitatifs),

47- représenter d’une manière cartographique et dynamique un espace de savoir et ses constituants (acteurs, acteurs-réseaux, fronts de recherche).

48- comprendre comment se constituent les savoirs et leurs mémoires,

49- mettre en évidence des vocabulaires d’autorité,

50- avoir une représentation d’un champ disciplinaire ou d’une technologie,

51- se projeter dans le futur.

2.2.4 La formation à Internet : un modèle culturel et sa propagation

52La formation à Internet amène à penser à la coopération et au travail en réseau. La réussite d’une situation coopérative dépend des capacités perceptives et cognitives de chaque acteur qui la compose. La formation à la recherche d’information sur Internet implique que l’apprenant possède la capacité de comprendre les actions des autres sur le réseau. La compréhension de la recherche dont les résultats sont souvent imprévisibles dépend de sa culture informationnelle, car ici la notion de culture de l’information est plus que jamais importante pour pouvoir se déplacer dans le réseau des réseaux. Elle permet d’indexer a posteriori les ressources découvertes au cours de la recherche. L’apprenant va tout interpréter, et reconnaître l’information obtenue, à partir de ce qu’il sait à propos des normes de traitement de l’information, des logiciels multiples qu’il connaît déjà. C’est ainsi qu’il peut établir des connexions entre des éléments disparates et peut faire un véritable apprentissage social en interagissant avec autrui.

2.2.5 Conclusion

53Lorsque les savoirs se construisent en passant du lexical au conceptuel, on assiste à un changement du questionnement des étudiants. Cette évolution du questionnement correspond à la propagation et à l’enrichissement du modèle culturel que nous avons défini au niveau 1. À mesure que le questionnement devient plus précis, plus informé, plus maîtrisé, la compréhension du champ disciplinaire concerné se modifie et s’affine (niveau 2). Ensuite, au niveau 3, on utilise d’autres techniques pour faire émerger de nouvelles connaissances.

54Cette réflexion, qui porte simultanément sur les compétences (à acquérir) et le niveau cognitif de l’étudiant (en rapport avec l’apprentissage des différents outils d’information et d’exploitation de l’information), permet la construction d’une formation par niveaux qui tiendra compte principalement de deux paramètres : les compétences à acquérir et la progression dans la connaissance.

3. Réalisation de la formation : didactique et outils

55Nous nous sommes demandé comment appliquer à la recherche d’information documentaire les concepts de la didactique. Nous avons vu que toute pratique d’enseignement implique une réflexion sur les savoirs à transmettre et sur la meilleure façon de le faire, et qu’elle fait appel à tout moment aux différents aspects de la conversion des connaissances.

56La didactique, qui étudie les conditions de la transmission du savoir et les conditions de l’acquisition des connaissances par l’apprenant, est précisément une tentative pour répondre aux questions « quel savoir transmettre », « comment transmettre ce savoir », « pour quels buts et quels objectifs ».

3.1. Transposition didactique et conversion des connaissances

57Toute discipline enseignée résulte d’un traitement didactique soumis à des contraintes précises, qu’on appelle transposition didactique : il s’agit des « mécanismes permettant le passage d’un objet de savoir à un objet d’enseignement ».

58Les rapports entre l’objet de savoir et l’objet d’enseignement ne sont pas évidents. Dans les situations classiques de l’enseignement disciplinaire, ce travail de transposition n’est pas fait par l’enseignant, car l’objet d’enseignement a été défini. L’enseignant participe à cette transposition dans le cadre plus étroit du passage du savoir à enseigner au « savoir effectivement enseigné ».

59Avec l’information documentaire, la situation de l’enseignant est plus complexe, car le savoir manque de formalisation, indépendamment de la formation de base (professionnelle ou disciplinaire). Cependant, les professionnels possèdent déjà un savoir implicite et la première étape pour eux est de rendre ces connaissances explicites, et donc partageables. En énonçant ce que je sais, je rends mes connaissances professionnelles explicites pour en faire des contenus d’enseignement.

60La deuxième étape de la transposition concernant l’information bibliographique (comment enseigner) consiste à s’exercer à faire des cours (en mettant en situation les formateurs). Elle permet aussi de réajuster les contenus, d’en créer de nouveaux et, ainsi, partager de nouvelles connaissances.

61• Premier type d’exercices : expliciter ses connaissances en utilisant le modèle de planification des tâches.

62À partir d’un outil documentaire connu de tous, comme un cédérom de signalement de documents, on liste les connaissances que l’on a de cet outil, les connaissances que l’on voudra enseigner, et ensuite la manière de les enseigner, en tenant compte du niveau cognitif de connaissances visé chez l’apprenant. Cet exercice, apparemment simple (l’outil choisi est bien connu), montre en fait la difficulté de sortir du domaine et du vocabulaire de la pratique professionnelle (ce qui est normal). On essaie de surmonter une partie de cette difficulté en utilisant comme modèle L’outil est « décortiqué », analysé. Le fait de lister les caractéristiques de l’outil permet au formateur de vérifier ses connaissances ; la liste des tâches à accomplir par l’étudiant correspond aux connaissances à enseigner ; le critère du niveau cognitif de l’étudiant constitue une base essentielle pour la pédagogie.

63On peut en voir ci-après l’illustration avec le cédérom Docthèses :

64• Deuxième type d’exercices : conceptualiser à partir de l’expérience d’un outil

65Cet exercice de théorisation est une étape nécessaire de l’élaboration d’un cours. Il a pour but de conceptualiser les expériences de chacun pour les intégrer dans une réflexion, un savoir plus général. Continuons l’illustration avec Docthèses :

66Le premier type d’exercice est centré sur l’outil, les connaissances du formateur et les connaissances à acquérir par l’étudiant. Le second exercice, tout en s’appuyant sur l’outil, vise à dégager des connaissances plus générales sur la recherche documentaire.

67La multiplication de ces exercices permet de transformer les habitudes, de construire un enseignement basé sur des concepts et un vocabulaire commun.

3.2. Le contrat didactique, les objectifs, le projet

68Le contrat didactique est fortement lié à la relation quadrangulaire de la didactique d’une discipline (étudiant/enseignant/savoir/outils), puisqu’il tente de décrire les interactions qui existent entre un enseignant et ses élèves, pour autant qu’elles concernent l’acquisition des connaissances. Il faut considérer les comportements de l’enseignant attendus par les élèves, les comportements des élèves attendus par l’enseignant, les rapports des uns et des autres au savoir visé, les supports technologiques.

69L’enseignant doit réunir les conditions qui permettent d’assurer l’apprentissage, se fixer des objectifs et se donner les moyens de mettre en œuvre.

70Pour l’étudiant, les règles du contrat doivent être claires et explicites. Les ruptures du contrat peuvent s’avérer des moments positifs de l’apprentissage. Une rupture est difficile à surmonter dans une formation courte. Plus la formation est condensée, plus il faudra être clair sur les objectifs et les résultats attendus, et l’expliquer à l’apprenant.

71Le contrat didactique montre que l’objectif visé par le formateur et le projet de l’apprenant doivent être cohérents pour donner du sens aux activités.

3.3. Les obstacles (et quelques solutions)

72La préparation d’une séance de formation consiste à repérer les obstacles qui accompagnent les progrès de la pensée. En didactique, on estime que les obstacles sont des sources de connaissances, car il faut faire des efforts pour reformuler la difficulté afin de la surmonter.

73On distingue deux catégories d’obstacles :

741) Les obstacles qui interdisent l’accès au savoir et rendent l’apprentissage difficile :

• pour atteindre le niveau d’apprentissage de base (niveau
  1), un étudiant devra connaître le vocabulaire de la documentation ; l’utilisation d’un vocabulaire professionnel insuffisamment explicité peut constituer un obstacle que l’apprenant n’a pas les moyens de surmonter ;

• si l’étudiant n’a pas franchi les deux premiers niveaux culturels, une formation de niveau 2 nécessitera un réajustement pour une bonne compréhension ;

• ces obstacles peuvent aussi concerner l’ergonomie des lieux d’information : le changement du système d’accès (interface nouvelle pour l’étudiant) au réseau de cédérom peut empêcher tout apprentissage…

752) Les obstacles qui interviennent tout au long de la formation sont divers et inévitables. On s’efforcera, pendant la formation de formateurs, de lister ceux qui concernent la pédagogie pour que chacun trouve sa solution (avec l’aide des autres). Tant qu’un obstacle n’est pas clairement désigné, l’enseignant met plutôt sur pied des stratégies d’évitement.

3.3.1. Des obstacles propres au formateur

76• Des obstacles d’ordre psychologique : une représentation négative du domaine à enseigner peut expliquer certaines difficultés à motiver les étudiants, à susciter leur intérêt (ce dont se plaignent souvent les formateurs professionnels).

77• Des obstacles pédagogiques :

• manque de pratique de formation ;

• intentions pédagogiques non explicites : le formateur doit distinguer la formation, qui vise à rendre l’étudiant autonome, du rôle d’aide apporté à un autre moment par le bibliothécaire ;

• technologies non maîtrisées.

78La formation des formateurs permet de surmonter ces obstacles par une mise à niveau sur les outils d’information, les nouvelles technologies, la recherche d’informations sur Internet…, ainsi qu’un travail sur les intentions pédagogiques des formateurs.

3.3.2 Des impératifs concernant les contenus, la forme et le déroulement d’une formation

79On peut citer :

• Le vocabulaire de l’information professionnelle et spécialisée.

• La maîtrise du rapport entre l’écrit et l’oral : il est souvent nécessaire d’élaborer une documentation complémentaire, car il est exclu de tout pouvoir dire en formation.

• L’apprentissage de la construction d’un cours, pour lequel il faut déterminer le niveau de spécialisation des informations présentées et établir des priorités. Les démonstrations et présentations d’outils seront toujours accompagnées d’une introduction générale pour permettre à l’étudiant de comprendre ce que représente la recherche documentaire par rapport à sa discipline. Certains sont tentés (notamment pour Internet) de faire une présentation ne comportant que des démonstrations, ce qui risque de nuire à la compréhension de l’apprenant en raison de l’absence de hiérarchisation des informations apportées.

• La présentation du cours doit être claire et lisible (il faut introduire des titres, établir un plan évident).

• Le déroulement du cours devra prévoir des pauses, gérer le rapport oral/écrit/pratique et maîtriser le temps imparti à la formation.

3.3.3 Des obstacles en rapport direct avec l’apprenant

80• L’absence de besoin initial d’information (qui contribue à son manque d’intérêt pour la formation). Il faut susciter ce besoin en choisissant des exemples de recherche adaptés, en s’appuyant sur les outils les plus conviviaux (pour le niveau 1), en montrant l’usage.

81• On constate une hétérogénéité dans les disciplines de base de l’étudiant et dans sa culture informationnelle. L’utilisation d’exemples, pris dans chacune des disciplines, et de scénarios de recherche spécifiques sera utile à la compréhension et à la motivation de l’étudiant, et donnera une touche personnalisée à la formation.

82• La difficulté d’une pédagogie différenciée : il n’est pas aisé de construire des formations tenant compte des divers styles cognitifs. On peut cependant prévoir des schémas et des synthèses pour les visuels, qui ont besoin d’une approche globale dans l’apprentissage, et ménager à l’intention des auditifs une approche plus analytique et plus inductive.

83• Une évaluation difficile à mettre en œuvre : le manque de feed back et de suivi des étudiants est un handicap pour l’évaluation de la formation (inhérent à des formations ponctuelles).

84En conclusion de l’approche didactique pour l’enseignement de l’information documentaire, nous pouvons retenir :

• l’importance des contenus de formation, définis par les formateurs, à l’aide des outils que nous leur proposons ci-dessous : boussole et grille (paragraphe 3.4) ;

• la nécessité de la mise en situation (présentation des formations) pour un partage des expériences, un enrichissement mutuel, un dépassement des obstacles pédagogiques.

85Les pistes de réflexion didactique dégagées pour la formation nous orientent vers une méthode de travail basée sur l’explicitation et la conversion des connaissances ; celle-ci est nécessaire à l’émergence des pratiques, au sein du groupe de travail constitué par des formateurs acteurs de leur formation.

3.4. Ingénierie de la formation : des outils permettant une réflexion et une mise en situation des formateurs

86La mise en place d’une formation à l’information bibliographique passe par quatre étapes obligatoires :

1. la négociation des aspects politiques et organisationnels des formations et de leurs infrastructures sur le campus,

2. la prise en compte des besoins des étudiants et des pratiques des formateurs impliquant l’émergence d’un nouveau savoir et d’un nouvel enseignement,

3. l’autonomisation des étudiants par rapport à leurs recherches d’informations grâce à l’apprentissage des outils et des ressources bibliographiques.

4. l’utilisation des informations pour la production scientifique et la recherche universitaire.

87En s’appuyant sur ces quatre étapes, qui doivent être envisagées simultanément par les formateurs, nous avons imaginé des outils d’ingénierie de formation pour construire un cours. Ces outils constituent une sorte d’aide-mémoire concernant les aspects politique, disciplinaire, théorique (le savoir sur lequel repose l’enseignement) et opérationnel (l’apprentissage des sources et des outils). Ils ont pour but de permettre aux formateurs d’avoir une représentation plus claire et plus globale de la matière à enseigner, d’organiser et hiérarchiser cette représentation.

3.4.1. La « boussole »

88La boussole (voir page 159) est conçue pour fournir une vision globale et processuelle de la problématique ; il s’agit d’un schéma comportant les têtes de chapitre du savoir à enseigner et de sa mise en œuvre par les formateurs. Elle découpe la formation en quatre axes :

• L’aspect théorique, qu’il appartient aux formateurs de développer et d’expliciter à leur usage personnel.

• L’apprentissage des sources et des outils : les procédures, les modes opératoires, qui sont à un niveau de connaissances explicite. Cet apprentissage repose sur différents supports et sur différents niveaux de connaissance.

• L’aspect disciplinaire, à divers niveaux de spécialité : connaissance fine de la discipline par les langages, le vocabulaire d’autorité.

• L’aspect organisationnel : institution, programme, financement, équipement etc.

3.4.2. La grille d’analyse

89La grille redéploie les mêmes concepts de façon plus linéaire. Il s’agit d’un schéma opérationnel pour construire une formation à l’information documentaire : elle a servi lors de nos séances de travail pour la mise en œuvre de plans de formation. Elle a aussi servi de grille d’analyse et d’évaluation lors de la présentation des exercices pédagogiques. Elle reprend la plupart des aspects de la boussole dans un but pratique. Le formateur élabore son cours en tenant compte des diverses paramètres : théoriques, pédagogiques (du point de vue du support présenté et du contenu opérationnel), disciplinaires et organisationnelles (politiques). La prise en compte simultanée de tous ces éléments représente un véritable pilotage stratégique du dispositif de formation.

90Cette grille pourra être exploitée et déclinée dans différentes situations de formation par rapport aux différents programmes, qui varient selon :

• les niveaux de formation (1^er, 2^e et 3^e cycles),

• les outils auxquels on veut former : bibliographies imprimées, cédéroms, Internet…

91• Aspects organisationnels

92Ils supposent l’existence d’un véritable projet de formation qui sous-tend l’ensemble du dispositif. Rappelons qu’il s’agit de faire émerger une nouvelle discipline transversale à l’université et de mettre en place un programme de formation pour acquérir par paliers successifs et complémentaires la culture de l’information. Former les étudiants à l’utilisation des ressources bibliographiques est aussi un enjeu politique.

93À l’évidence, l’organisation et la mise en place de ce type d’enseignement doivent se faire avec l’agrément des institutions concernées : problèmes de visibilité, d’organisation, de lieux de consultation, d’intentions conflictuelles. Sont aussi concernés certains aspects structurels de l’université tels que le nombre et la place des mémoires disponibles, les réseaux et les capacités de transmission, les accès (lieu et nombre), l’organisation environnementale des stations de travail et le fléchage clair des ressources présentes pour différentier les différents outils disponibles.

94La mise en place d’un tel dispositif nécessite la gestion fine des responsabilités, des personnels, mais aussi (et peut-être surtout) des niveaux et des contenus de la formation. Il faudra gérer les niveaux d’usage de l’information, qui sont très liés à l’évolution des cursus, et organiser l’approfondissement des connaissances en fonction du degré de spécialisation. La concertation avec les responsables des filières est nécessaire pour intégrer les formations dans les différents cursus.

95• Formalisation du champ de la recherche d’information documentaire : réflexion conceptuelle sur l’information, la didactique, l’ingénierie

96Le formateur positionne son approche du sujet. À partir de sa propre pratique du domaine de l’information, il effectue des choix d’enseignement clairs en se référant aux aspects théoriques sous-jacents qui lui permettront de mettre en forme son enseignement à un niveau assez général, de façon à lui éviter un double écueil : un discours trop difficile, car trop abstrait, ou un discours trop professionnel, car trop relié à son expérience personnelle.

97• Apprentissage de l’utilisation des outils.

98• Exploitation de l’information dans un champ disciplinaire : produire une connaissance

99Pour qu’il puisse se relier à un maximum de personnes et de ressources, avoir la possibilité d’interagir avec ses pairs, l’étudiant doit acquérir un modèle culturel minimum pour la recherche et l’usage de l’information. Ce modèle doit lui permettre de constituer son capital personnel d’informations, son réseau de traductions, et de le propager à différents niveaux d’usage et d’information au fur et à mesure qu’il affine sa stratégie.

3.4.3. Mise en situation des formateurs : présentation de séances de formation

100La mise en situation d’un formateur, c’est le devenir de sa formation : ainsi, il participe à la dynamique du projet, il est amené à prendre de l’initiative et à devenir autonome, il acquiert la capacité à conduire une démarche de formation et à piloter son apprentissage.

101• Recommandations

102Il convient de créer des situations didactiques (modélisation de l’environnement de la formation) par la mise en place de séquences pédagogiques. Chacune d’elles correspond à un objectif donné, à un niveau, et concerne un (ou des) outil(s) d’information…

103À partir de choix pédagogiques explicites (niveau et cycle, durée, usages et scénarios) et à l’aide de la grille, le formateur élabore des séquences de formation : types de cours (magistraux et/ou TP), choix de méthodes pédagogiques, déroulement ou durée d’une séance de formation, supports de cours à utiliser (transparents, enseignement à distance…).

104• Exercices effectués à l’Urfist

105Chacun des formateurs, après avoir construit un cours, le présente devant les autres formateurs qui s’attribuent des rôles différents - étudiants ou observateurs - pour améliorer les performances didactiques de tous. Les cours sont discutés avec le groupe de formateurs, corrigés, évalués, et constituent ainsi des maquettes réutilisables pour la formation.

106Cette mise en situation est une étape essentielle du cycle de formation, car les formateurs peuvent mettre en pratique le travail théorique effectué précédemment et concrétiser ce travail devant un public (bienveillant mais averti), vérifier avec les autres formateurs que le message passe bien, échanger avec eux sur les problèmes rencontrés. L’analyse de séances de formation à partir des pratiques verbalisées, la mise en évidence des difficultés (à partir de catalogues de situations réelles ou fictives) permet ainsi :

• d’établir des programmes de formation en tenant compte des spécialités disciplinaires et des niveaux,

• d’étudier la recherche d’information (en tant que résolution de problème) et le raisonnement à l’œuvre en fonction des styles cognitifs des utilisateurs, de leurs modes d’apprentissage, des types d’information recherchés, des ressources culturelles dont ils disposent,

• de déterminer des objectifs de recherche d’informations,

• de pratiquer une réflexion sur les méthodes de recherche utilisées pour déterminer et atteindre les objectifs de recherche d’information,

• de déterminer les critères de réussite d’une recherche dans une discipline,

• d’analyser les compétences nécessaires à un formateur pour mettre en place des formations allant dans ce sens,

• de réfléchir aux connaissances à acquérir pour atteindre ces compétences de façon individualisée.

3.4.4. Formation, information et ergonomie des lieux

107Les exposés, les discussions, montrent par ailleurs qu’il est nécessaire de distinguer la formation de l’environnement de la formation.

108• L’information destinée aux usagers demande à être étudiée et améliorée, elle peut concerner l’ergonomie des logiciels et des écrans.

109• L’amélioration du cadre de travail et le fléchage des lieux allègent le travail des personnes en relation avec le public et facilitent la prise de contact des étudiants avec les lieux d’information, de même qu’une bonne information sur les outils disponibles et leurs modes d’accès.

110Information et ergonomie des lieux apportent un cadre favorable à la mise en place des formations, éliminent un certain nombre d’obstacles non didactiques. C’est pourquoi, dans notre nouvelle formation de formateurs, nous avons prévu un stage de sensibilisation sur l’ergonomie des lieux et l’organisation des espaces d’information.

4. Conclusion

4.1. La dynamique du groupe vers le travail coopératif

111Un des bénéfices de la formation de formateurs est de créer des échanges, des liens entre les membres du groupe. Cette envie de poursuivre des actions en commun repose sur des besoins psychologiques, sociaux et intellectuels. Elle mérite d’être considérée avec attention pour mieux concrétiser la dynamique du groupe. Le groupe de formateurs a besoin de penser à la gestion et la valorisation de ses compétences. Pour rendre plus visibles ces savoirs et ces savoir-faire, nous avons eu l’idée de créer une base de compétences permettant à la communauté des formateurs de mieux se connaître, de suivre l’évolution de ses connaissances et de gérer ainsi son capital cognitif pour l’organisation des formations.

112Nous avons réfléchi à la manière d’animer un réseau de personnes ayant les mêmes intérêts (la formation des usagers), en appliquant les principes du travail coopératif, basés sur l’auto-organisation du groupe. Nous avons choisi une méthode d’organisation émergente qui se structurera à partir des échanges au sein de la communauté des formateurs (possesseurs de savoirs), et des demandes des usagers. Le dispositif sera complémentaire de FORMIST (voir plus haut le chapitre d’Elisabeth Noël).

4.2. Les outils pour concrétiser la représentation des compétences et le travail en réseau

113Pour représenter la connaissance de ce collectif, nous allons concrètement réaliser un référentiel pédagogique qui recensera :

• les formateurs potentiels et leur cursus,

• les ressources pédagogiques utilisées et produites par les formateurs : cours, références bibliographiques, publications, sources d’informations utilisées…

114Ce référentiel, pour être exploitable et permettre une gestion collective des compétences, devra utiliser des outils de collecte, de mise en forme, de cartographie et de consultation. Outre le logiciel Lotus Notes Domino choisi pour sa compatibilité avec Formist, nous allons utiliser le produit See-K (Solution d’exploration et d’exploitation de la connaissance) de la société Trivium, qui possède les caractéristiques essentielles pour représenter ces compétences. Cette représentation est un système de cartographie dynamique, qui prend la forme d’un arbre.

115L’objectif de l’utilisation de See-K est la reconnaissance par les pairs :

• il donne une meilleure image de chaque membre du groupe et de ses compétences,

• il permet à des personnes expertes dans leurs pratiques et leurs domaines de sortir de leur isolement,

• il fournit une meilleure représentation de l’environnement des formations existantes, des niveaux de formation.

116Tout cela permet d’élargir le groupe de formateurs, de décloisonner, de faire émerger un pool multi-compétences, d’encourager la coopération…

117Ce travail vise les contenus par l’amélioration, l’ajustement, la valorisation des formations et la mise en évidence de la formation transversale qui concerne la recherche documentaire et bibliographique, à travers des supports hétérogènes (électroniques et imprimés)

118Accroître le capital pédagogique, partager des compétences, réfléchir à des parcours individuels de formation, définir des compléments de formation, identifier les personnes-ressources, améliorer la méthodologie de formation, aider à l’organisation des formations, à l’autonomie de décision, construire une organisation collective (par le tissage de liens), c’est une idée très stimulante. C’est le chantier que nous avons ouvert avec la rentrée universitaire 1999…

Bibliographie

119Authier Michel, Lévy Pierre, Les arbres de connaissance, La Découverte, 1993.

120Bouldoires B., Les principaux concepts de la didactique. Cours Urfist, 1996. http:www-sv.cict.fr/urfist.

121Bowker G, Legh-Star S, Turner W, Casser L, Social science technical systems and coopérative work, LEA, 1997.

122Céreq, document, n° 136, 1998, « Arbres de connaissance. Controverses, expériences ».

123Cissé Alassane, Conception orientée processus de systèmes coopératifs : applications à l’ingénierie et à l’intelligence économique, thèse (NR) novembre 1997, UT1, Toulouse.

124Coulon Alain, Penser, classer, catégoriser : l’efficacité de l’enseignement de la méthodologie documentaire dans les premiers cycles universitaires, Université Paris 8,1999.

125Davis R., Buchanan B.G., Meta-Level Knowledge : Overview and application, IJCAI, ACM SIGIR, n° 5, Cambridge, 1984.

126Lévy Pierre, L’intelligence collective, La Découverte, 1997.

127Lettre de l’Urfist, n° 13, 1997 : « Formation de formateurs : d’une pratique professionnelle à une pratique de formation ».

128Lettre de l’Urfist, n° 15/16, 1998 : « Formation de formateurs : éléments théoriques sur la connaissance ». (Suite du cycle de formation mis en place pour les formateurs de Toulouse et Albi.)

129Lettre de l’Urfist, n° 17, 1998 : « Recherche en sciences de l’information : vers une théorie de l’auto-organisation dans les systèmes multi-agents basée sur la coopération ; Les systèmes coopératifs dans l’aide à la décision ; Présentation de FORMIST ». (Suite du cycle de formation mis en place pour les formateurs de Toulouse et Albi.)

130Lettre de l’Urfist, n° 19, 1998 : « Recherche en sciences de l’information : un campus électronique, Acadia University ».

131Lettre de l’Urfist, n° 21,1999 : « Formation de formateurs : la base de compétences (les logiciels Gingo et UMAP) ».

132Solaris, n° 5 : sous la direction de J. Link-Pezet, « Coopération et auto-organisation : éléments de réflexion pour une nouvelle approche du travail intellectuel ».

133Takeushi H, Nonaka, Knowledge-Creating Organization, Oxford Press, 1995.

134Ruano-Borbalan J.-C., Eduquer et former, Ed. Sciences Humaines, 1998.