1Les bibliothèques, publiques et universitaires, ont longtemps fonctionné à partir du présupposé que leurs usagers connaissaient le fonctionnement de la bibliothèque, l’utilisation des catalogues et la recherche d’information, sans qu’une formation réelle soit nécessaire. De simples réponses aux questions ponctuelles posées par les lecteurs paraissaient suffisantes. Mais, avec l’utilisation généralisée de l’informatique et du multimédia dans les bibliothèques, avec l’apparition de nouveaux moyens de diffusion de l’information, le public s’est trouvé confronté à une complexité accrue des accès à l’information. Le catalogue papier est devenu Opac1 , voire opaque pour certains usagers, désemparés devant un écran qui les renvoie indifféremment au catalogue local, à une base de données bibliographiques, ou même au monde entier à travers Internet2. En même temps, du fait de l’ouverture vers de nouveaux publics et du renouveau opérés par les bibliothèques tant publiques qu’universitaires, ces usagers ne se limitent plus aux « héritiers » qui avaient l’habitude de fréquenter ces lieux de connaissance. Les nouveaux usagers, bien plus nombreux, ne connaissent pas toujours les démarches liées à la recherche d’information.

2Pour répondre à ces évolutions, les bibliothèques ont cherché à donner à ces nouveaux usagers les moyens d’intégrer de manière explicite ce qui jusqu’alors l’était, pour certains, de manière implicite. Elles ont donc mis en place des formations, plus ou moins formalisées, dans l’espoir inavoué de rendre les usagers autonomes et de pouvoir ainsi se soulager d’un travail de renseignement souvent répétitif. Cependant, ces formations ne peuvent répondre à toutes les demandes, en raison du nombre de personnes qu’il faudrait former et de la diversité des besoins. L’autoformation apparaît alors comme la solution idéale.

3Dans le cadre des bibliothèques, l’autoformation se définit par un apprentissage qui s’effectue librement, au moment où l’apprenant en a besoin, grâce à des outils mis à sa disposition par la bibliothèque. L’autoformation s’effectue alors sans la présence d’un formateur, en dehors de tout parcours pédagogique structuré. Cependant, comme pour toute démarche de formation, les outils d’autoformation sont à mettre en rapport avec des objectifs précis, qu’il faut préalablement déterminer. Un document ou un outil d’autoformation doit être conçu dans une visée très précise : apprendre à l’usager à utiliser le catalogue, à reconnaître une référence, à évaluer l’information trouvée sur Internet…

4Il s’agit donc d’aider l’utilisateur à acquérir de l’autonomie, de lui donner les moyens de trouver lui-même les réponses aux questions auxquelles il se trouve confronté. La difficulté est de parvenir à lui transmettre les informations qui permettent la compréhension de certains concepts (en quoi une base de données bibliographiques est-elle différente d’un catalogue ?) de manière claire et suffisante, sans l’encombrer avec des explications trop complexes, car il ne s’agit pas d’en faire un professionnel des bibliothèques.

1. Autoformation en bibliothèque

5Les bibliothèques peuvent mettre facilement en place des outils d’autoformation, compris dans un sens large. Rappelons d’abord le rôle essentiel de la signalétique, qui, simple et appropriée, suffit parfois à résoudre ce qui est souvent l’objet de formation. L’accent doit être mis sur les moyens qu’aura l’usager de se repérer dans la bibliothèque : plan de la bibliothèque avec délimitation des grands espaces, signalétique à plusieurs niveaux, indiquant aussi l’emplacement des outils informatiques et, surtout, précisant leur utilisation. Il s’agit d’aider l’usager à reconnaître la fonction des postes informatiques par lesquels il accède à des bases de données très variées.

6Les documents d’aide et d’information traditionnels, même s’ils ne permettent pas une véritable assimilation des connaissances, relèvent cependant bien de la démarche d’autoformation. Les bibliothèques ont ainsi développé de manière quasi systématique des guides du lecteur et autres documents d’information à destination de l’usager, avec l’objectif sous-jacent que les utilisateurs pourraient ainsi s’autoformer. Ces outils concernent la bibliothèque elle-même et ses particularités (plan, classification, règlements), les outils bibliothéconomiques qu’elle propose (catalogue, base de données bibliographiques) et leur usage, ainsi que les outils génériques tel Internet. Même s’il s’agit plus d’information que de formation, ces documents jouent néanmoins un rôle important. Cependant, ils ne rentrent pas dans une progression pédagogique délimitée, car ils correspondent plutôt à des besoins ponctuels.

7Avec les outils qu’utilise l’usager doivent se trouver des guides d’utilisation clairs et simples, conçus de manière attractive et efficace, situés à proximité de ces outils et des autres documentations disponibles à la bibliothèque. Pour les outils informatiques, l’aide en ligne est essentielle, même si elle n’est pas systématiquement consultée. Les bases de données commerciales proposent généralement une aide de ce type liée au logiciel d’interrogation, ce qui n’empêche pas la bibliothèque de proposer son propre guide, en ligne et sur support papier, prenant en compte les besoins des usagers et les particularités locales. Des aides en ligne spécifiques pour les outils bibliothéconomiques propres à la bibliothèque (catalogue en ligne, Web) peuvent être réalisées en personnalisant les pages prévues à cet effet sur le catalogue ou le site Web. Des logiciels comme Powerpoint permettent enfin de concevoir des didacticiels simples autour d’un outil.

8La diversité des usagers des bibliothèques induit une diversité des modes d’apprentissage. Aussi est-il important d’utiliser, pour les outils proposés, les différents supports auxquels peuvent être sensibles les usagers : les documents d’information et d’autoformation autour d’un même thème sont à la fois rédigés sur support traditionnel (photocopies, guides, dépliants) et présentés sous forme multimédia (logiciels, pages Web, didacticiels) avec images, animations, sons. N’oublions pas que l’art de la pédagogie réside dans la répétition.

2. Autoformation a l’information

9Avec l’apparition d’Internet, le rôle du bibliothécaire est en train d’évoluer. Le professionnel de l’information n’est plus simplement un gestionnaire et un communicateur d’information, il lui incombe aussi la charge d’aider les usagers dans un monde d’information devenu virtuel. L’usager doit être guidé dans la bibliothèque, univers structuré et rassurant, mais aussi dans le monde virtuel proposé à travers Internet, désormais accessible de partout.

10Le bibliothécaire se trouve donc dans l’obligation de former à l’utilisation de l’information accessible dans sa bibliothèque, mais aussi de donner des clés pour repérer les sources importantes hors de celle-ci. Les outils d’information qu’il réalise sur le Web concernent donc les usagers de la bibliothèque, mais, de par la nature même d’Internet, ils sont aussi disponibles aux non-usagers et deviennent des documents d’autoformation, utilisés en dehors de toute présence de formateurs, sans s’inscrire dans une formation formalisée. Ces documents seront donc axés sur les spécificités de la bibliothèque, locales ou liées à la spécialité du fonds.

11De nombreuses bibliothèques ont déjà créé des outils de ce genre. Puisque les supports consultables sur le Web se prêtent à l’autoformation, Internet rend alors accessibles à tous, aussi bien usagers que bibliothécaires amenés à mettre en place des formations, ces documents et fédère ainsi les efforts réalisés de part et d’autre. Des outils comme FORMIST (cf. encadré page 129) ou des répertoires de ressources autour de ce thème sont conçus dans cette optique de mise à disposition et de partage d’outils et d’information qui peuvent rendre service.

12Cependant, toutes ces ressources actuellement disponibles ne constituent pour le moment que des bibliothèques de documents utilisés comme supports d’autoformation, mais qui ne tiennent pas compte du parcours de l’utilisateur. Il s’agit donc d’une autoformation assez limitée. Des outils d’autoformation réellement élaborés se mettent en place peu à peu. Il s’agit de permettre à l’utilisateur, non seulement d’acquérir des connaissances, mais aussi de vérifier que ces informations se transforment bien en savoir, en connaissances acquises, à travers des processus d’évaluation des apprentissages et un suivi du parcours de l’étudiant, donnant à l’usager la possibilité d’évoluer dans un contexte personnalisé. De tels outils sont actuellement à l’étude dans des bibliothèques de l’enseignement supérieur, par exemple pour des projets mis en place par le ministère autour de FORMIST. Comme PRAXISTE, réalisé par les bibliothèques de l’Insa de Lyon et de l’Université de Technologie de Compiègne, en association avec l’Ecole des Mines de Paris.

13Ainsi, le professionnel de l’information joue pleinement son rôle de médiateur de l’information, en mettant en place des outils adaptés à l’autoformation des usagers, à travers les supports traditionnels et les nouvelles technologies de l’information et la communication (NTIC), outils liés aux spécificités de sa bibliothèque mais aussi adaptés au besoin de son public vis-à-vis d’Internet et aux nouveaux usages engendrés par celui-ci. Certes, la mission première du professionnel de l’information n’est pas la formation, mais il est nécessaire qu’il se tourne vers la création d’outils d’autoformation, qu’il s’agisse de documents dits d’information ou de documents d’autoformation réelle plus élaborés. Il possède en effet une compétence essentielle dans le monde mouvant et déstructuré qu’est actuellement l’Internet : celle de savoir repérer et évaluer les informations et de les organiser de manière adaptée au besoin d’un utilisateur.