Chapitre 17. Mobilisation des savoirs techniques par le professeur documentaliste : l’ÉMI comme transmission d’un savoir expérientiel en milieu numérique
Texte intégral
1Pour rendre compte de la situation complexe de l’éducation aux médias et à l’information (ÉMI) appréhendée comme une pratique en milieu technique, et mettre en évidence les tensions qui traversent l’expérience du professeur documentaliste dans l’exercice de ses fonctions, nous avons fait le choix d’adopter une démarche inspirée de la sociologie clinique [Gaulejac, 2014]. À partir du récit de vie recueilli auprès d’une enseignante documentaliste au cours de plusieurs entretiens enregistrés réalisés en 2017 qui ont fait l’objet d’une retranscription, nous proposons d’interroger la visibilité des transactions culturelles qui interviennent entre d’une part une culture de l’information (qui est l’objet de la transmission didactique), et d’autre part une culture et des savoirs techniques (indispensables pour la mise en œuvre des activités d’ÉMI auprès des publics scolaires). L’hypothèse que nous formulons prend sa source dans les travaux sur la reconnaissance professionnelle et l’invisibilité des activités techniques [Andonova et Vacher, 2009]. Notre propos sera articulé selon trois axes. Le premier prend pour point de départ la situation de travail du professeur documentaliste et souligne les contraintes et les contradictions qui émanent du milieu technique dans lequel sont organisées et mises en œuvre les activités d’ÉMI. Le second questionne les conditions de l’acquisition des savoirs techniques mobilisés par le professeur documentaliste pour réaliser les séances pédagogiques. Enfin le troisième interroge les transactions culturelles qui prennent place dans l’expérience didactique, et les transferts de savoirs entre culture de l’information et pratique des technologies numériques.
2En resituant le rôle de la technique dans la mise en place de l’ÉMI et dans des pratiques pédagogiques, nous nous donnons pour objectif de souligner l’invisibilité et le manque de reconnaissance de la prise en charge des activités liées au bon fonctionnement et à la maintenance d’un équipement informatique. À travers l’analyse du récit de vie d’un professeur documentaliste relatant une expérience professionnelle d’une dizaine d’années dans un établissement d’enseignement de niveau secondaire de l’Essonne, nous avons le projet de questionner les contradictions qui peuvent impacter la mise en œuvre des activités d’ÉMI. Son double rôle de médiateur dans un champ de la connaissance et du savoir en expansion, mais aussi de médiateur technique dans l’environnement numérique comme lieu d’échanges symboliques, culturels et économiques entre les médias et leurs usagers sera mis en évidence. Les activités d’ÉMI replacées dans un contexte technique, qui influe sur les transactions didactiques [Sensevy et al., 2006, 206] et oriente la pratique du professeur documentaliste vers la transmission de savoirs expérientiels, sont traversées par des tensions liées aux modalités de la prise en charge des activités numériques dans les environnements professionnels que sont les établissements d’enseignement secondaire.
L’expérience pédagogique du professeur documentaliste : l’ÉMI en milieu technologique
État des lieux : culture informatique et prise en charge de l’équipement technique des établissements du secondaire
3En premier lieu, l’organisation et la mise en œuvre d’activités d’ÉMI sont conditionnées par l’équipement informatique de l’établissement. Selon le référentiel de compétences professionnelles de 20131, les professeurs documentalistes sont « enseignants et maîtres d’œuvre de l’acquisition par tous les élèves d’une culture de l’information et des médias ». À ce titre, ils sont désignés comme des professionnels compétents au sein des établissements du secondaire pour développer l’ÉMI. En tant qu’experts de cette éducation et en tant que gestionnaires du centre de documentation et d’information (CDI) où les élèves ont accès aux médias sous leurs formes traditionnelles et numériques, ils sont amenés à mettre en place des activités d’ÉMI qui sont réalisées dans un milieu technique. Selon les académies et les établissements, la qualité et la quantité de l’équipement informatique varient. Il est cofinancé par l’État et les collectivités territoriales, les collèges relevant des conseils départementaux et les lycées des conseils régionaux. Depuis le début des années 2000, les différents plans numériques du ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, en partenariat avec les collectivités locales, ont permis le développement de l’équipement et de l’accès aux ressources pédagogiques numériques dans les établissements. En France, entre 2005 et 2014, le nombre d’ordinateurs à usage pédagogique est passé de 12,7 à 22 ordinateurs pour 100 élèves de collège2. En 2015, le plan numérique annoncé le 7 mai prévoit le déploiement progressif d’équipements numériques mobiles individuels à partir de la rentrée3. L’État propose à chaque conseil départemental volontaire un partenariat pour équiper les élèves et les enseignants des établissements de leur territoire. L’investissement est porté sur l’équipement individuel mobile, particulièrement les tablettes, afin d’instaurer une continuité des usages, dans la classe et à la maison. L’acquisition du matériel permet ensuite la mise en place d’activités en ÉMI qui sollicitent des pratiques logicielles, comme le traitement de texte, l’utilisation d’un navigateur web, l’interrogation d’un moteur de recherche, le traitement de l’image et du son.
4Dans les établissements, les fonctions de maintenance technique, d’information et de conseil pour les ressources et les usages pédagogiques du numérique relèvent d’un ou plusieurs enseignants volontaires qui acceptent de prendre du temps pour s’investir dans l’accompagnement des usages du numérique, en devenant, selon les cas, référent numérique, personne-ressource technologies de l’information et de la communication pour l’enseignement (TICE), webmestre, administrateur espace numérique de travail (ENT), ou encore « ambassadeur » du numérique. Leurs statuts reposent sur la rédaction d’une lettre de mission dont le contenu, défini en concertation avec le chef d’établissement et voté au conseil d’administration, prend en compte la situation de l’enseignant volontaire et le contexte de l’établissement. La nature des missions confiées, leurs conditions d’exercice, ainsi que l’indemnité éventuellement allouée y sont précisées. Les personnes-ressources peuvent bénéficier d’une décharge de service d’une ou plusieurs heures et se voir attribuer une indemnité pour mission particulière (IMP), c’est-à-dire une rétribution financière à l’année. Selon les établissements, les situations sont très diverses et plus ou moins fonctionnelles. Les modalités de l’incorporation de la charge de travail liée à la gestion d’un réseau informatique ont une influence sur la perception et le bien-être du professionnel. Dans la pratique, les aspects pédagogique et technique ne sont pas dissociés, et ce manque de différenciation apparaît comme une source de tension pour les professeurs concernés. En effet, en tenant compte des contraintes d’organisation horaire, le temps consacré aux activités techniques peut être perçu comme une perte, il peut aussi soulever un questionnement en termes d’efficacité.
5Les missions du professeur documentaliste dans un établissement du secondaire s’articulent autour de quatre axes4 : la gestion, l’accueil, la formation et l’ouverture culturelle. Comme le remarque Julie Jacoutot [2016, 2] dans une lecture historique du cadre légal de la profession, « l’ancrage du métier s’est d’abord fait au travers du lieu ». Par sa politique d’acquisition et son travail de gestion, le professeur documentaliste organise, enrichit et met à disposition un fonds documentaire qui répond aux besoins et aux intérêts des élèves et du personnel. Il met en place un système d’information documentaire qui en favorise l’accès et la diffusion. La mission pédagogique consiste ensuite à former les élèves à la maîtrise de l’information. Et c’est dans ce cadre que se situent les actions en ÉMI. Le professeur documentaliste intervient en tant que spécialiste de l’information-documentation. Il détient, par sa formation et sa pratique professionnelle, une expertise qui lui permet de guider et de former les élèves. Cohabite avec la culture de l’information documentaire du professeur documentaliste, la « culture de l’information » très amplement convoquée comme objectif principal d’un programme d’ÉMI [Le Deuff, 2008], qui elle-même n’est pas synonyme d’une culture de l’informatique et des technologies de réseaux pourtant indissociable des pratiques professionnelles des médias en milieu numérique.
Maintenance et suivi du renouvellement technologique : l’externalité des ressources qui maîtrisent l’environnement informatique
6Dans les établissements d’enseignement secondaire, l’équipement en ordinateurs provient d’une dotation des collectivités territoriales. Les enseignants ne sont pas consultés sur le choix de l’équipement. Le matériel est livré « clés en main » aux équipes pédagogiques. Les opérations de maintenance et de mise à jour sont déléguées à un prestataire externe choisi par le conseil départemental suite à un appel d’offres. Il intervient en cas de panne, et il est sollicité pour mettre en œuvre un plan de mise à jour. Néanmoins, au quotidien, le bon état de marche des ordinateurs et du réseau est essentiellement assuré par la ou les personnes-ressources de l’établissement. Comme le souligne Mehdi Khaneboubi [2009, 3], « on ne peut pas expliquer un usage mitigé des TICE pour faire la classe par des difficultés d’accès au matériel ou un manque de ressources […] l’usage de l’informatique pour faire la classe est conditionné par l’habileté technique des enseignants avec l’ordinateur » [ibid., 7].
7Si l’équipement des établissements en matériel informatique tend à suivre les évolutions technologiques, il est par là même plus souvent soumis à une logique de renouvellement voire d’accumulation qu’à une volonté de mise à jour et d’optimisation. Depuis la rentrée 2012 par exemple, dans son plan numérique qui compte également la Numériclé5 et l’ENT 916, le conseil départemental de l’Essonne a lancé Numéritab 91, une opération de dotation de tablettes tactiles pour les collégiens. Pour obtenir une dotation, les équipes pédagogiques intéressées répondent à un appel à projets. Dans la situation que nous étudions, une petite équipe s’était constituée dans l’établissement autour du partage des pratiques et compétences informatiques. Et un dossier dans lequel étaient décrits les objectifs pédagogiques, éducatifs et disciplinaires, ainsi que la plus-value apportée par l’utilisation des tablettes avait été constitué sous l’impulsion initiale d’un professeur d’EPS. C’est une discipline qui utilise beaucoup les tablettes car les enseignants développent leurs propres applications. L’un des projets retenus consistait, par exemple, à réaliser avec des élèves de 6e un « herbier numérique ». Ce projet permettait une collaboration entre les professeurs de SVT, d’EPS et le professeur documentaliste. Dans le cas de ces dotations, un socle minimum est requis sur les plans technique et organisationnel, et l’implication dans ces projets doit se traduire par un engagement des acteurs à se former. Lorsque la dotation est accordée, les tablettes sont livrées aux établissements dans une ou deux valises roulantes qui contiennent également un ordinateur portable et un système de communication wifi (routeur et bornes wifi) [Réseau Canopé, 2013]. L’équipe pédagogique porteuse du projet réceptionne le matériel et bénéficie généralement d’une matinée de « prise en main ». Elle peut ensuite bénéficier d’un plan de formation adapté à ses besoins, de manière individuelle ou collective.
8Néanmoins, des obstacles au niveau de l’organisation et de la gestion administrative, des refus pour nécessité de service peuvent faire que certains besoins de formation restent en suspens, alors que le matériel est présent dans l’établissement. La mise en place d’un plan de formation efficace doit pouvoir favoriser un contact serein de l’enseignant avec le nouvel environnement technologique, au risque d’un non-usage [Rinaudo, 2012]. Dans une approche optimale, l’apprentissage de l’informatique et des logiciels associe concepts et gestes, théorie et pratique. Cette mise en œuvre est importante afin de se sentir capable de transmettre dans des situations pédagogiques diversifiées et régulières. Si ce temps indispensable d’appropriation individuelle n’est pas accompagné, l’utilisation du nouvel environnement technologique dans le cadre de la classe peut devenir source d’inquiétude et de déstabilisation pour certains enseignants, d’autant plus s’ils font face à une situation de maîtrise asymétrique de la technologie par rapport aux élèves qui en font un usage régulier [Plantard et Le Mentec, 2013]. Leurs propres difficultés à maîtriser l’outil informatique peuvent les amener à ne pas l’intégrer à leurs pratiques pédagogiques7. Mais dans de nombreuses situations, le recours à l’autoformation ou à la formation entre pairs est inévitable (et profitable) afin de pourvoir à ces besoins. Les transactions de savoirs en matière technique peuvent ainsi s’effectuer des enseignants vers les élèves, des élèves vers les enseignants et aussi entre élèves, dans une logique de coopération et de collaboration réciproques.
Les ressources techniques de l’établissement : culture numérique de l’équipe pédagogique et prise en charge collective de l’ÉMI
9La culture technique de l’équipe pédagogique d’un établissement [Deforge, 1993] est déterminante dans la gestion quotidienne du parc informatique, et des activités qui se développent en environnement numérique. Elle relève d’une gestion collective et volontaire de l’équipe pédagogique. Les actions d’ÉMI se situent également dans ce cadre de gestion collective, qui articule la dimension technique de la mise en place et la dimension pédagogique des actions engagées. L’ÉMI traverse les disciplines, les programmes disciplinaires et le socle commun de connaissances, de compétences et de culture8 y font référence. Le cadre réglementaire étant assez large, la responsabilité engagée pour l’ÉMI est alors d’ordre collectif. Il appartient à chaque établissement de définir en interne une politique de mise en œuvre de l’ÉMI en fonction des ressources et des personnels prêts à s’y impliquer. L’ensemble de l’équipe pédagogique négocie la prise en charge de l’acquisition des compétences critiques et pratiques des élèves en matière d’ÉMI. Il n’y a pourtant pas de volume horaire alloué de manière spécifique à l’acquisition de ces compétences. Comme le souligne le rapport sur les « Politiques d’éducation aux médias et à l’information en France » :
La responsabilité de ce type d’enseignement tend à rester diffuse, sur la base du volontariat souvent, avec une absence d’obligation de résultat, qui ne permet pas d’en démontrer l’efficacité et la pertinence. La validation des projets joue encore trop comme une variable d’ajustement des services d’enseignement, ce qui n’est pas favorable à la mise en place d’initiatives interdisciplinaires avec des activités négociées entre technologie, documentation et éducation aux médias. [Frau-Meigs et al., 2014, 12]
10Au sein des établissements, l’ÉMI entre en concurrence avec d’autres thématiques : les propositions faites aux équipes pédagogiques sont nombreuses et évoluent à un rythme rapide. Le thème de l’ÉMI n’est pas plus prioritaire qu’un autre, et in fine la mise en place des activités repose sur la mobilisation collective de l’équipe pédagogique. La difficulté est de trouver une place dans des structures pédagogiques très chargées, et surtout de pérenniser ces activités9. Néanmoins apparaît plus que jamais la nécessité d’un professionnel capable de faire du lien. Comme aucune classe ne lui est attribuée en particulier, le professeur documentaliste réalise la promotion de ses formations, et porte le discours de l’ÉMI auprès de l’équipe pédagogique de son établissement. Par exemple, lors de la mise en place du « parcours citoyen » à la rentrée 2015, un volet ÉMI a été ajouté pour conduire tous les établissements scolaires à développer un « média »10. Pour les professeurs documentalistes, cette mission a été en outre l’occasion d’entreprendre un cycle de formation autour des webradios, afin de proposer ensuite cette activité aux élèves, en s’appuyant sur une collaboration avec les enseignants. Le bénéfice pédagogique de ces opérations est cependant très difficilement « mesurable », car il ne s’inscrit pas nécessairement dans une continuité et n’est pas dirigé vers un accroissement de l’expérience collective de l’équipe enseignante en matière d’ÉMI. L’évaluation des compétences de l’élève, quant à elle, dépend d’une grille mise au point collectivement, par l’ensemble de l’équipe pédagogique. Elle repose sur le socle commun et sur des outils [FADBEN, 1997, 2014] élaborés notamment dans le cadre de l’association professionnelle des documentalistes, l’APDEN (ex-FADBEN), afin d’aider les enseignants à construire des situations pédagogiques favorables à l’acquisition de compétences informationnelles clairement identifiées.
L’expérience pédagogique et les savoirs techniques mobilisés par le professeur documentaliste
Compétences et savoirs techniques du professeur documentaliste : des savoirs situés
11La situation de travail généralement décrite par le professeur documentaliste au travers d’une approche réflexive témoigne des savoirs mobilisés dans l’action [Perrenoud, 1998]. Pour John Dewey [2014, 261], « la distinction une fois établie entre la théorie et la pratique possède une signification en tant que distinction entre deux sortes d’actions : l’une aveugle, l’autre intelligente. L’intelligence est la qualité de certains actes, ceux qui sont dirigés ; et l’action dirigée est un accomplissement et non pas un don originel ». Or pour que le professeur documentaliste puisse orienter ses enseignements de façon efficace, il est essentiel que sa culture technique soit adaptée au milieu qui l’entoure. Avec Dewey [1983, 183], nous pensons que « les difficultés d’une situation suggèrent certaines façons d’en sortir ». Pour les professeurs qui acceptent d’être les référents numériques du collège, des formations techniques particulières sont d’ailleurs proposées. Elles permettent, par exemple, de connaître l’environnement serveur et, sur le plan opérationnel, de savoir configurer les sessions utilisateurs de tout le réseau pédagogique, déployer des applications et résoudre divers problèmes récurrents. Les formations proposées sont hybrides, elles se déroulent en présentiel dans un médiapôle de l’académie, et elles s’appuient aussi sur des parcours de formation en ligne proposés sur la plateforme M@gistère [2016]. Aux compétences initiales acquises par le professeur documentaliste et par les professeurs disciplinaires, lors de leur parcours antérieur, peuvent donc s’ajouter des formations complémentaires dans le cadre de la formation continue.
12Le rapport Translit et COST de 2014 a pointé l’ambiguïté de la situation du professeur documentaliste en ces termes :
Un des freins constatés est également le manque de formation globale des maîtres, qui ne bénéficient pas de diplomation et parfois pas de certification. La création de cursus cohérents d’éducation aux médias, au sein des formations universitaires et des ÉSPÉ est nécessaire pour parvenir à la formation de personnes-ressources de bon niveau. Il faut également noter une incohérence concernant le rôle du professeur documentaliste : le ministère de l’Éducation reconnaît l’importance qu’il peut avoir auprès des élèves en termes d’éducation aux médias, de par sa position transversale et sa capacité à monter des projets interdisciplinaires, et pourtant il ne l’y forme pas réellement. [Frau-Meigs et al., 2014, 13]
13L’acquisition de compétences techniques dans une dimension pratique est essentielle à la mise en place d’ateliers ÉMI dans les établissements secondaires. La maîtrise de l’environnement technologique nécessite une actualisation continuelle des équipements, mais aussi des connaissances spécifiques chez les enseignants. Le renouvellement constant des technologies est un fait à prendre en compte. La dissémination de la culture informatique dans l’espace social des établissements du secondaire passe par l’intégration de ce paramètre.
14Le paradigme informatique déploie ainsi le concept de « validité éphémère ». Dès l’origine, les travaux théoriques d’Alan Turing [1983, 66] ont mis en évidence cette caractéristique comme condition d’un « apprentissage des machines ». Par extension, le concept de « validité éphémère » caractérise aussi les terminaux informatiques eux-mêmes. Les ordinateurs réalisent des opérations qui ont une valeur éphémère et qui sont utiles au bon déroulement du processus en cours. Sur le plan matériel, l’augmentation de la puissance de calcul et l’optimisation des applications qui emploient le nouveau potentiel soumet l’écosystème informatique à une contrainte de mise à jour perpétuelle. Chez Gilbert Simondon [2014, 300], il est question de « prévision de la maintenance », expression issue du vocabulaire anglo-saxon. Dans l’article « La mentalité technique », l’auteur explique : « l’objet technique est prévu comme devant être contrôlé, réparé, entretenu, par examen, modification, ou au besoin changement complet de l’un ou plusieurs des sous-ensembles qui le composent ». La nécessité de la maintenance est associée à la modularité de l’objet technique ainsi qu’à son évolutivité. Aujourd’hui, cette caractéristique est souvent associée au fonctionnement du marché économique qui a émergé avec la diffusion sociale de l’informatique, et aux stratégies d’obsolescence programmée.
15Pourtant, face à cette propriété du numérique envisagé comme « milieu », il est nécessaire d’associer à l’acquisition des équipements une politique de formation qui permette de suivre les évolutions technologiques (logicielles et matérielles). L’entretien des équipements plus anciens peut être considéré comme un sujet digne d’attention et d’éducation.
16La formation des professeurs documentalistes dans le cadre de la mise en place d’activités d’ÉMI représente par ailleurs un enjeu pour la transmission de savoirs techniques situés dans des programmes qui concernent l’acquisition d’une culture critique sur les productions médiatiques. Les savoirs techniques viennent éclairer les conditions de production médiatique. Et l’expérience didactique de l’ÉMI cherche à recréer, à partir des pratiques logicielles et par l’imitation des actions de l’enseignant, un environnement de production professionnel. Par exemple, dans la conception d’un projet de webradio au collège, les enseignants dans de nombreuses académies ont la possibilité de suivre une formation aux outils d’enregistrement et de mixage sonore, et cette formation orientée vers un projet précis leur offrira la possibilité d’accompagner ensuite les élèves dans la création et l’animation d’émissions radiophoniques11. La mise en pratique d’un savoir technique est préliminaire à la mise en œuvre d’une séquence didactique où les élèves sont guidés pour bâtir une réflexion critique sur les productions médiatiques.
De l’autoformation à la mutualisation des ressources en ligne
17En tant que professionnels de l’information documentaire et des méthodes pédagogiques, les professeurs documentalistes essaient d’adopter une posture active en matière d’autoformation. Pour faire face à des besoins liés au contexte précis d’un projet pédagogique, certains mettent en place une stratégie d’acquisition de connaissances pratiques et théoriques. Ils mobilisent leurs connaissances et la culture de l’information qu’ils maîtrisent afin de trouver des ressources répondant à leurs besoins. Ils peuvent s’appuyer sur leur expertise pour contextualiser l’information et pour situer un document dans un réseau documentaire, dans des circulations et pour en évaluer la valeur d’usage. L’autoformation à distance via des supports électroniques est souvent privilégiée. Il existe de nombreux sites et bases collaboratifs, institutionnels ou personnels alimentés par des pairs, qui constituent des espaces d’échange, de partage et de mutualisation de scénarios pédagogiques et de tutoriels.
18En parallèle, sur le plan collectif, la question de la formation des personnels de l’éducation a été relayée par le discours politique qui accompagne le déploiement progressif du plan numérique. Parmi l’ensemble des mesures de la rentrée 2015 présentées le 25 août, le ministère de l’Éducation nationale a annoncé un volet de formation conséquent12. Le rapport Translit et COST de 2014 exprimait bien, quant à lui, la nette distinction à opérer entre le domaine de l’informatique et celui des technologies de réseaux face aux enjeux de formation :
Depuis 2006, les colloques JOCAIR (Journées Communication et Apprentissages Instrumentés en Réseaux) ont pour objet d’enrichir les savoirs sur les enjeux de l’informatique en réseaux. Ils visent les échanges scientifiques pluridisciplinaires entre les sciences de l’information et de la communication, les sciences de l’éducation et l’informatique en se centrant sur les problèmes posés en éducation et en formation sur ces domaines. Ils sont coordonnés aux colloques EPAL (Échanger Pour Apprendre en Ligne) et s’interrogent sur les innovations dans le domaine des logiciels sans intervention d’acteurs humains. [Frau-Meigs et al., 2014, 23]
19La dimension pratique de l’acquisition d’une culture technique pour les professionnels de l’éducation est précisée de manière franche. L’informatique et les technologies de réseaux recouvrent des domaines en constante évolution, et les savoirs qu’ils articulent prennent leur sens dans l’action. Saisir la dimension pratique de la culture technique est essentiel pour mener à bien une acquisition de connaissances et de compétences opérationnelles dans un contexte de transmission pédagogique. Pour les professeurs documentalistes qui organisent des activités en ÉMI, les besoins en formation sont identifiés dans le cadre de projets pédagogiques spécifiques et ils font l’objet d’une prise en charge collective et collaborative autour de la tenue de réunions de bassins. Ces moments d’échange représentent sept demi-journées et réunissent autour de l’IA-IPR EVS (inspecteur académique-inspecteur pédagogique régional établissement vie scolaire) du bassin les professeurs documentalistes d’établissements d’une zone géographique déterminée. Inscrites au Plan académique de formation, ces demi-journées sont, suivant les académies, obligatoires ou non. Les thèmes de travail suivent des orientations nationales et académiques et sont donc imposés par les IA-IPR. Néanmoins, une certaine liberté est laissée aux animateurs de bassin, un ou deux professeurs documentalistes volontaires, pour la mise en œuvre et l’organisation matérielle. Ces demi-journées sont propices aux échanges et à la circulation d’une culture professionnelle. Elles favorisent la mise en commun des ressources, et le travail sous forme d’ateliers qui permet de mutualiser et de tester par la pratique des compétences opérationnelles. Elles sont également l’occasion d’identifier des personnes-ressources et de programmer l’invitation d’intervenants susceptibles de fournir des formations sur des points techniques spécifiques13. Les professeurs documentalistes organisent ainsi, de manière collective, la mise en circulation d’un savoir technique expérientiel acquis dans la pratique. Les technologies de réseaux sont employées pour mutualiser les ressources et diffuser les pratiques au sein de la profession.
La composante technique de l’ÉMI : les transactions culturelles, entre culture de l’information et pratiques numériques
Éducation aux médias et effet de halo numérique
20Pour dépasser une situation de départ qui est celle d’une connaissance technique parcellaire, il est nécessaire d’envisager les activités d’ÉMI dans leur dimension pratique [Cordier, 2011a]. En adoptant le point de vue des producteurs de l’information, les élèves intériorisent les contraintes et sont amenés à percevoir les choix opérés par les professionnels dans l’exercice de leurs fonctions. La nature des savoirs techniques est alors envisagée sous l’angle de l’« effet de halo », décrit par Simondon comme :
un certain type de dépendance de l’utilisateur par rapport au producteur qui fait du producteur l’éducateur, le professeur, l’homme qui donne des conseils, des règles d’usage avec des prescriptions plus ou moins mystérieuses, justifiées en quelques mots, à l’usage du profane qu’est l’utilisateur : ce dernier entre ainsi dans une relation asymétrique où il est le néophyte, tandis que le producteur est l’initié qui accepte de dévoiler une partie de son savoir – une partie seulement – car l’utilisateur restera profane, mais un profane sachant certaines règles et même certains mots : il acquiert un savoir parcellaire, peu cohérent, mais qui n’est pas sans quelque parenté avec le vrai savoir supposé, archétype de la construction achevée. [Simondon, 2014, 281]
21Les enjeux liés à l’apprentissage et à l’acquisition d’une culture technique passent par la déconstruction de la complexité qui entoure la pratique et par une mise à distance d’activités qui mobilisent des savoirs qui ne sont pas distribués de manière homogène. Dans le cas de l’ÉMI, le technicien bénéficie d’un statut privilégié puisqu’il est le détenteur du savoir qui a permis la mise en production dans un contexte professionnel [Flichy, 1989].
22Pour Simondon, l’effet de halo caractérise les schèmes de la pensée technique :
dans cette situation de néophyte, l’utilisateur forme des prénotions enveloppant tout ce qu’il doit apprendre et constituant une catégorie pratique, non sélective intérieurement, mais distinguant ce domaine de tous les autres et le valorisant. [Simondon, 2014, 281]
Et il poursuit :
l’objet technique laisse rayonner autour de lui une lumière qui dépasse sa réalité propre et se répand sur l’entourage ; […] il n’est pas tout entier contenu dans ses limites objectives, matérielles ou utilitaires, ou encore économiques. [ibid., 283]
23Pour dépasser l’effet de halo qui entoure les équipements technologiques, il est nécessaire qu’une opération de médiation de l’environnement technique soit menée de manière efficace, par des professionnels compétents et formés pour appréhender l’environnement numérique avec la sérénité et la maîtrise requises pour la transmission d’un savoir. Cela se traduit concrètement par la mise en place d’un accompagnement technique mais surtout pédagogique des utilisateurs comme peuvent l’être par exemple les séances d’ÉMI.
24Il est aussi question de ce rayonnement de la technicité du numérique dans un texte qui expose la mise en contact du « numérique » avec le domaine des médias et extrait du rapport Translit et COST de 2014, dans lequel on peut lire :
Depuis quelques années s’opère un rapprochement entre médias et numérique, à mesure que l’internet arrive à maturation en tant que média. Il se concrétise un partenariat entre Semaine de la Presse et des Médias dans l’École et la Fête de l’internet. Il apparaît dans les discussions du Conseil National du Numérique (CNN) placé au ministère de l’Innovation et de l’Économie numérique, qui a adopté la notion de littératie à partir des cultures de l’information de MIL. En collaboration avec le ministère de l’Éducation nationale, celui-ci a constitué un Groupe Éducation au Numérique (GEN) […]. [Frau-Meigs et al., 2014, 27]
25Cet extrait illustre le fait que l’ensemble des acteurs qui se mobilisent autour du numérique et de l’ÉMI évoluent dans la zone de technicité décrite par Simondon. Culture de l’information et culture des technologies numériques se mêlent dans cette zone de technicité qui habille le domaine de l’ÉMI. Et la figure du professeur documentaliste se révèle celle d’un médiateur qui accompagne une expérience d’apprentissage en milieu technique. Si la maîtrise de la culture informationnelle et la capacité d’organiser des apprentissages documentaires représentent des atouts essentiels pour mener à bien leur mission, l’ÉMI en environnement numérique encourage les professeurs documentalistes à acquérir une culture technique critique grâce à laquelle ils pourront ensuite guider leurs élèves vers des pratiques médiatiques distanciées et éclairées.
L’ethos du professeur documentaliste en situation de médiateur technique
26La mise en récit d’une expérience professionnelle d’une dizaine d’années du professeur documentaliste qui a participé à cette enquête est l’occasion de relever le manque de reconnaissance des professeurs documentalistes dans les discours et les actions politiques menées dans le cadre du mouvement plus large d’affirmation de l’ÉMI. Le fait que les professeurs documentalistes ne soient pas mentionnés dans le texte de la convention sur l’ÉMI établie en décembre 2015 par le ministère de l’Éducation nationale, le ministère de la Culture et de la Communication, et Canopé, a suscité un mouvement d’exaspération et de contestation de la part de la profession [Association des professeurs documentalistes de l’académie de Nantes, 2016]. Une étude récente de la présence des professeurs documentalistes sur le réseau de microblogging Twitter a permis de mettre en évidence la complexité de l’ethos de cette communauté professionnelle [Thiaud, 2016]. Les résultats ont distingué 4 ethos, parmi lesquels celui « d’expert numérique » et celui de « médiateur culturel ». Le récit de vie recueilli dans le cadre de cette enquête corrobore ces résultats puisqu’il souligne comment le numérique modifie les pratiques pédagogiques.
27Les travaux de Yanita Andonova et Béatrice Vacher [2009] ont montré que l’invisibilité des tâches qui sont liées à l’usage des technologies numériques peut avoir des conséquences diamétralement opposées en matière de reconnaissance individuelle. Dans certaines circonstances, l’usage du numérique peut être perçu comme « facteur valorisant l’image de l’opérateur » et, dans d’autres situations, certaines tâches quotidiennes « dévoreuses de temps ne sont visibles […] que pour les protagonistes eux-mêmes qui les considèrent comme indignes » [Andonova et Vacher, 2009, 14]. Dans le premier cas, « l’invisibilité renvoie à l’appropriation achevée […] dans les lieux de travail par des individus – utilisateurs valorisés et reconnus. L’usage des TIC s’inscrit dans la norme culturelle, est reconnu par la hiérarchie et se trouve légitimé par l’institution » [ibid., 15]. L’acquisition d’une culture technique numérique partagée dans les établissements de l’enseignement secondaire apparaît donc comme un facteur capable d’accroître la reconnaissance de la fonction de médiateur technique et pédagogique qu’occupe le professeur documentaliste.
Vers une approche technique des littératies : l’éducation aux médias comme savoir expérientiel
28Le questionnement de la situation complexe que constitue la mise en place des activités d’éducation aux médias comme pratiques didactiques en milieu technique a permis d’identifier certains obstacles majeurs. Éric Delamotte, Vincent Liquète et Divina Frau-Meigs [2014, 149-150] soulignent que
parmi les compétences absentes, [ont été repérées] les difficultés actuelles des jeunes à apprécier le potentiel informationnel de l’environnement technique utilisé. L’observation montre que, chez les adolescents interrogés, ceux-ci supposent plus le potentiel qu’ils ne le testent réellement, et découvrent souvent très tardivement des offres et des fonctionnalités pourtant à leur disposition.
29Or l’acquisition d’une culture critique des médias et de l’information doit pouvoir prendre appui sur les pratiques numériques et développer les savoirs expérientiels des élèves. Les propos recueillis lors de l’enquête soulignent la forte pénétration des usages du smartphone chez des élèves qui ont déjà pour la plupart une expérience de production d’information. En introduction de leur ouvrage à propos de la culture participative, Henry Jenkins, Ravi Purushotma, Margaret Weigel, Katie Clinton et Alice J. Robison estiment à partir d’une étude datant de 2005 que 57 % des adolescents américains qui utilisaient internet pouvaient être considérés comme créateurs de contenus [Jenkins et al., 2009, 3]. L’approche qui consiste à soutenir l’élan créatif des adolescents en situation d’apprentissage peut être étayée par l’acquisition d’une culture technique solide. L’expérience pédagogique des professeurs documentalistes montre cependant que le réseau internet demeure une entité très abstraite pour les élèves du secondaire14.
30L’appréhension de la dimension technique par la pratique encourage la prise de conscience de la nature matérielle des réseaux informatiques et du potentiel opérationnel qu’ils représentent [Dodier, 1993b]. Le professeur documentaliste peut s’appuyer sur les pratiques élémentaires des élèves comme point de départ pour articuler la séquence pédagogique et l’acquisition de savoirs critiques en se rapprochant de l’expérience technique de l’élève. Il s’agit de « suivre les contraintes pragmatiques qu’ils rencontrent en agissant » [ibid., 68]. Lorsque des sessions de débats sont organisées, les pratiques liées aux réseaux sociaux dans le contexte scolaire sont évoquées, et les échanges favorisent une meilleure compréhension à partir de l’expérience des adolescents. La dimension pratique nous paraît ainsi décisive dans la perspective du développement d’une culture numérique et informatique dans les établissements du secondaire [Plantard et Le Mentec, 2013]. La créativité permise par la pratique de l’informatique renforce l’impact de l’ÉMI dans l’enceinte des établissements. La production de contenus dans le cadre de l’ÉMI peut devenir un champ de connaissance et d’expérimentation, un lieu d’apprentissage de l’exercice critique et un lieu d’expression ludique et créative, qui reste néanmoins soumis aux contraintes imposées par le design et le fonctionnement des outils. L’expérience technique peut être considérée comme une condition de l’engagement des publics de l’ÉMI qui tiendrait compte de la pluralité des régimes qui coexistent dans la pratique [Dodier, 1993a, 76]. Comme ont pu le montrer Jacques Chevrier et Benoît Charbonneau [2000] dans leur étude d’un contexte d’autoformation au traitement de texte, une ÉMI en contexte technique appréhendée comme l’acquisition d’un savoir expérientiel reposerait sur la capacité des élèves à donner un sens à une situation vécue. Le récit recueilli souligne l’aisance des élèves en classe de 6e à s’exprimer et se questionner sur les pratiques techniques et médiatiques lors d’une activité d’ÉMI qui les place par exemple en situation de « chasse au canular collaborative »15. La séquence pédagogique démarre par le visionnage d’une vidéo qui circule sur YouTube, puis les élèves sont invités à se documenter pour ensuite débattre de la réalité des faits qui sont montrés. La mutualisation des informations trouvées se fait à l’aide d’un outil d’écriture collaborative où chaque élève est invité à interagir. L’outil leur permet de compléter leurs propres recherches, inévitablement limitées par les contraintes horaires, de s’inciter mutuellement à approfondir certains points et ainsi de réaliser un document de collecte apportant des éléments pour ensuite débattre. L’outil est généralement un facteur motivant. Simple et facile à mettre en œuvre, il peut quand même être source de difficultés pour les élèves mais également pour l’enseignant. Si tous les groupes n’arrivent pas à accéder simultanément au document, si le chat ne fonctionne pas, si certains effacent involontairement des phrases rédigées par d’autres, il revient parfois à l’enseignant de résoudre en premier lieu des problèmes techniques, au détriment de l’observation du travail en lui-même. Ce type d’activité qui allie en un temps assez court la recherche, la sélection et la restitution d’informations à l’aide d’un outil collaboratif mobilise des compétences techniques et intellectuelles. Il doit pouvoir être réalisé dans un environnement matériel bienveillant et familier, configuré de manière à faciliter l’expérience vécue par les élèves.
31Au terme de ce parcours exploratoire, l’approche qui a consisté à resituer l’expérience professionnelle du professeur documentaliste dans un contexte technique où une grande partie des activités préparatoires sont invisibles nous conduit à saisir les tensions qui traversent les pratiques professionnelles qui touchent l’ÉMI comme participant de logiques politiques et institutionnelles d’une part, et d’estime et de reconnaissance individuelles de l’autre. Une étude de plus grande ampleur qui viserait à interroger le sens que donnent les professeurs documentalistes aux pratiques pédagogiques et techniques développées dans le cadre de la mise en place des activités d’ÉMI pourrait être menée. Elle permettrait d’améliorer la visibilité, l’accompagnement et la reconnaissance des opérations de préparation de l’équipement technique. D’une manière globale, la valorisation des enjeux liés à l’ÉMI auprès des professionnels de l’Éducation nationale pourrait bénéficier d’une visibilité accrue des pratiques numériques dans les établissements et de leur potentialité pédagogique. Le milieu technologique peut être considéré comme le lieu de l’expression privilégiée de savoirs d’expérience. Le professeur documentaliste, en mettant en réseau des compétences acquises dans la pratique, adopte une posture réflexive et situe l’exercice de sa profession à une distance favorable pour cultiver l’intelligence critique des élèves vis-à-vis des usages des TIC.
Notes de bas de page
1 Arrêté du 1er juillet 2013 portant sur le référentiel des compétences professionnelles des métiers du professorat et de l’éducation. [En ligne] < http://legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000027721614&categorieLien=id >.
2 Ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, 2015c.
3 Id., 2016.
4 Circulaire no 86-123 du 13 mars 1986. Missions des personnels exerçant dans les centres de documentation et d’information.
5 Clé USB de 8 Go contenant une compilation de logiciels libres avec tutoriels et ressources pédagogiques distribuée à tous les élèves de 6e.
6 Espace numérique de travail : [en ligne] < moncollege.essonne.fr >.
7 Retranscription, entretien du 21 septembre 2016.
8 Décret no 2015-372 du 31 mars 2015 relatif au socle commun de connaissances, de compétences et de culture ; Journal officiel, 2 avril 2015 ; Bulletin officiel de l’Éducation nationale, 23 avril 2015, no 17.
9 Les « classes médias » proposées par le CLÉMI représentent des initiatives nouvelles pour pérenniser l’éducation aux médias en l’inscrivant dans les structures pédagogiques des établissements demandeurs.
10 L’ÉMI comme composante du parcours citoyen mis en place à l’école à la rentrée 2015. [En ligne] < http://cache.media.eduscol.education.fr/file/DP_rentree/35/1/2015_rentreescolaire_fiche_34_456351.pdf >.
11 Réseau Canopé, 2016, exemple : émissions de webradio du lycée Geoffroy-Saint-Hilaire d’Étampes. [En ligne] < http://sainthilairelaradio.weebly.com/ >.
12 Ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, 2015a.
13 Les docs du Dock d’Étampes, 2016, en particulier, comptes rendus de réunions. [En ligne] < http://blog.ac-versailles.fr/documentalistesetampes/ >.
14 Les pratiques d’évaluation des connaissances des élèves relatives à l’utilisation d’internet ainsi que les résultats obtenus d’année en année ont été abordés lors des entretiens. L’évocation de ces expériences a été complétée par la lecture critique d’un questionnaire d’évaluation des connaissances élaboré par le professeur documentaliste et les objectifs pédagogiques associés à sa conception.
15 Activité ÉMI, exemple d’une fiche d’activité d’une heure : « 28. Une chasse au canular collaborative (2013) », ID Base, 7 octobre 2016. [En ligne] < http://idbase.esmeree.fr/notice/676qh2ym/28-une-chasse-au-canular-collaborative >.
Auteur
Chercheuse associée, Centre d’analyse et de recherche sur les médias, université Paris II ; membre du réseau Usages des patrimoines numérisés, université Sorbonne Paris Cité
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