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    Plan détaillé Texte intégral Administrer le chantier de construction d’un bâtiment sacré Financer la construction d’un édifice sacré Coût des bâtiments sacrés Une main d’œuvre spécifique  ? L’espace et le temps des dieux, l’espace et le temps du chantier Bibliographie Notes de bas de page Auteur

    Travailler à l’ombre du temple

    Ce livre est recensé par

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    Table des matières

    Construire dans un espace cultuel en Grèce classique et hellénistique : aspects socio-économiques et pratiques

    Virginie Mathé

    p. 49-64

    Texte intégral Administrer le chantier de construction d’un bâtiment sacré Financer la construction d’un édifice sacré Fonds publics et fonds sacrés Emprunts Souscriptions Actes évergétiques Coût des bâtiments sacrés Une main d’œuvre spécifique  ? Statuts et compétences Quelle influence de la piété  ? L’espace et le temps des dieux, l’espace et le temps du chantier Trouver de la place pour les annexes du chantier et les déblais Respecter le caractère sacré des lieux Temps rituel, rythme de la construction Bibliographie Liste des abréviations Bibliographie Notes de bas de page Auteur

    Texte intégral

    1Si, pour rendre un culte à une divinité grecque, il n’est pas nécessaire de construire un temple, cet édifice est souvent aujourd’hui la trace la plus visible de la culture matérielle du religieux. Il est généralement aussi l’objet le plus manifeste des activités artisanales qui se sont déroulées dans un sanctuaire, puisqu’il résulte du travail manuel d’hommes versés dans la construction et dans le décor des bâtiments. Comme ce travail s’effectuait en majeure partie in situ, le lieu de production que formait alors le lieu de culte et les objets produits qu’étaient les monuments du sanctuaire tendaient à se confondre : tout le temps du chantier, l’espace sacré était assurément un espace artisanal. Il n’en conservait pas moins sa destination initiale, celle d’accueillir un culte, et était régi par des lois écrites et non écrites spécifiques. Dès lors, on peut se demander si le fait de construire dans un sanctuaire impliquait des usages spécifiques. Comment le chantier, qui subissait les contraintes pratiques et économiques inhérentes à la construction, s’inscrivait-il dans le lieu du culte  ? Comment le lieu de culte s’accommodait-il du chantier  ?

    2Plusieurs cas peuvent fournir matière à réflexion, mais j’utiliserai surtout ici la documentation issue de trois sites majeurs : les sanctuaires de Delphes, d’Épidaure et de Délos, qui ont connu des phases de monumentalisation capitales entre le début du ive et le début du iie siècle av. J.‑C. Comme Athènes au ve siècle av. J.‑C. et Didymes aux iiie et iie siècles av. J.‑C., ces trois sanctuaires ont fourni des vestiges imposants et des séries de comptes permettant d’analyser les cadres socio-économiques et les aspects pratiques de plusieurs chantiers1. À Delphes, une centaine d’inscriptions concerne la construction du nouveau temple d’Apollon après qu’une catastrophe naturelle a détruit le précédent vers 370 av. J.‑C.2. Les vingt-sept comptes d’Épidaure ont trait à différents chantiers dans les sanctuaires d’Asklèpios et d’Apollon Maleatas aux ive et iiie siècles av. J.‑C. : ils attestent la construction du temple d’Asklèpios et de ceux d’autres divinités, de la Tholos, du stade, peut-être du théâtre, d’une fontaine, d’un mur de soutènement, d’un portique et de maisons destinées à accueillir ceux qui se rendent dans ces lieux de culte et de guérison3. À Délos, essentiellement entre 314 et 167 av. J.‑C., quelque quatre cents comptes enregistrent les recettes et les dépenses du sanctuaire d’Apollon, et, parmi celles-ci, les sommes allouées aux travaux de construction, de réfection et d’entretien d’édifices à vocation religieuse ou fournissant, par leur mise en location, des revenus au dieu4.

    3En partant de ces données essentiellement épigraphiques et en comparant ces chantiers avec d’autres relatifs à des édifices publics, j’examinerai leurs aspects administratifs et financiers, puis leur coût, avant de m’intéresser aux caractéristiques de la main d’œuvre et aux problèmes très concrets que pose la concomitance de la construction et du culte en un même lieu.

    Administrer le chantier de construction d’un bâtiment sacré

    4Bien qu’il existât des sanctuaires privés ou associatifs, la plupart de sanctuaires grecs étaient administrés par la communauté civique. Ainsi, à Épidaure, le sanctuaire d’Asklèpios, situé à une dizaine de kilomètres de la ville, appartenait à la cité. D’autres lieux de culte dépendaient d’une subdivision civique, comme celui de Némésis dans le dème attique de Rhamnonte. D’autres sanctuaires encore relevaient d’une confédération, tel celui de Zeus Homarios à Aigion en Achaïe, ou d’une association de cités et de peuples, comme à Delphes où le sanctuaire d’Apollon était à la charge de l’amphictionie qui s’occupait aussi du sanctuaire de Dèmèter aux Thermopyles. Certains sanctuaires furent sous la dépendance d’une cité étrangère, comme celui d’Apollon à Délos sous la coupe des Athéniens aux ve et ive siècles av. J.‑C.5 avant qu’il soit administré par les Déliens à partir de 314 av. J.‑C. pendant la période dite pour cela « de l’Indépendance ». Dans tous ces cas, l’administration revenait donc à des autorités publiques.

    5Dans un monde où les affaires des dieux étaient essentiellement gérées par les hommes de la cité, le projet architectural, qu’il concernât un édifice sacré ou un bâtiment public, suivait la même procédure6. La cité prenait le décret de construction, choisissait un projet et s’attachait à réunir les fonds ou prévoyait la manière dont elle pourrait les réunir. Elle désignait une commission architecturale pour assurer l’administration du chantier avec l’architecte7. Les membres de la commission portaient le nom d’épistates ou d’épimélètes de tel édifice ou des travaux sacrés comme à Délos à l’époque de l’Indépendance. Ils recevaient aussi parfois un nom forgé sur celui du bâtiment dont ils étaient chargés : c’était le cas, à Delphes et à Délos, des ναοποιοί, « ceux qui font le temple », et, à Épidaure, des ϑυμελοποιοί ou ϑυμελοποῖαι, « ceux qui font la thymelè », c’est-à-dire la rotonde que nous appelons Tholos à la suite de Pausanias. Les tâches de ces personnes étaient similaires à celles des hommes qui s’occupaient de la construction d’édifices publics. On connaît par exemple à Délos des épimélètes du χῶμα qui s’occupèrent de l’aménagement du port.

    6L’architecte et la commission architecturale établissaient ensuite des cahiers des charges, puis procédaient généralement à l’adjudication des différents lots. Les artisans moins-disant l’emportaient et un contrat était établi avec chacun d’eux. Associé au cahier des charges, le contrat fixait les obligations techniques, juridiques et financières des deux parties8. Les documents conservés montrent que les clauses ne différaient pas selon la destination, religieuse ou profane, de l’édifice.

    Financer la construction d’un édifice sacré

    7Plusieurs modes de financement s’offraient aux autorités publiques qui avaient décidé de construire ou de restaurer un édifice : elles pouvaient puiser dans les fonds publics et les fonds sacrés, recourir à l’emprunt, lancer une souscription ou profiter de dons d’évergètes, voire combiner plusieurs de ces possibilités9. La documentation renseigne imparfaitement sur la part de chacune d’elles. Les chantiers pour lesquels on connaît l’ensemble des modalités de financement sont extrêmement rares et les textes mettent bien moins l’accent sur les pratiques ordinaires que sur les actes qui méritent qu’on en conserve la mémoire.

    Fonds publics et fonds sacrés

    8La distinction entre sacré et public trouvait une expression financière : la fortune des divinités ne se confondait pas avec celle de la cité et les Grecs établissaient une différence entre la caisse sacrée et la caisse publique10. La première servait ordinairement aux frais du culte, telle l’organisation des sacrifices et des fêtes, à la rémunération du personnel et à l’entretien des sanctuaires. C’est à elle qu’on puisait en général pour la construction des bâtiments sacrés. Dans la plupart des cas, la communauté civique ne mettait donc pas à contribution les mêmes fonds selon qu’elle construisait un édifice pour les hommes ou pour une divinité. Ainsi, à Épidaure, les membres des commissions architecturales recevaient les sommes dont ils avaient besoin des autorités du sanctuaire, le prêtre lors du chantier de la Tholos à partir de 360 av. J.‑C. environ, puis pour les chantiers des années 330-320 av. J.‑C. les hiaromnamons auxquels la cité avait confié alors la gestion de la caisse sacrée11. Le corpus épidaurien ne donne pas d’indications sur l’origine précise de cet argent et il faut se tourner vers d’autres sites pour connaître les ressources habituelles des sanctuaires. Les comptes des hiéropes, les administrateurs de la fortune d’Apollon à Délos, montrent que celle-ci était composée d’objets précieux, d’argent monnayé, de terres et de maisons12. Les hiéropes faisaient fructifier ce capital en prêtant l’argent à intérêt et en louant les terres et les maisons. Le dieu percevait aussi les revenus de certaines taxes et procédait de manière irrégulière à la vente de divers produits comme du guano ou des matériaux de construction en surplus.

    9Le corpus délien permet aussi de constater que des travaux concernant des édifices dont la vocation n’était pas religieuse étaient parfois payés sur la caisse sacrée. Vers 210-205 av. J.‑C., les Déliens construisirent aux frais du dieu une vaste salle, appelée « stoa près du sanctuaire de Poséidon » dans les inscriptions13 et « Salle Hypostyle » par les archéologues : celle-ci avait très probablement une fonction commerciale14. En 200 av. J.‑C., les hiéropes payèrent des travaux apparemment importants dans la salle d’assemblée et transmirent aux hiéropes de l’année suivante de nombreux blocs restés en attente15. Ils prirent aussi en charge dans ces années-là des réparations sur cet édifice16. Autour de 170 av. J.‑C., ils enregistrèrent des sommes « pour la construction des portiques de l’agora17 ». La caisse publique et la caisse sacrée étaient certes distinguées, mais elles étaient aussi profondément imbriquées18. Si Apollon était bien le propriétaire de la fortune sacrée, c’était la cité qui l’administrait, en décidant en assemblée ce qu’il convenait de faire et en désignant annuellement de deux à quatre citoyens comme hiéropes. La cité était responsable politiquement et financièrement des biens de la divinité. Le cas délien présente certes des particularités, mais cette porosité entre caisse publique et caisse sacrée devait se retrouver dans d’autres cités. On se gardera donc de tout systématisme : si les cités utilisaient en priorité des fonds publics pour des édifices publics et des fonds sacrés pour des édifices sacrés, le fait que ces sommes soient gérées in fine par la même autorité, l’assemblée des citoyens, autorisait des arrangements.

    10Les ressources ordinaires des sanctuaires ne suffisaient cependant pas toujours à assumer les dépenses liées à la construction. Les administrateurs faisaient alors appel à d’autres types de fonds.

    Emprunts

    11Le recours à l’emprunt pour la construction, et encore plus pour la construction d’édifices sacrés, était très marginal. Sur les 118 documents mentionnant des emprunts publics que Léopold Migeotte a réunis, seuls 14 concernent des travaux et, parmi ceux-là, seuls deux renvoient à des bâtiments dans des sanctuaires19. Autour de 306 av. J.‑C., Malousios de Gargara est honoré par la cité d’Ilion notamment pour avoir prêté sans intérêts de l’argent pour la construction du théâtre, pour les constructions du sanctuaire d’Athéna Ilias et de la panégyrie, pour d’autres constructions dont on ignore tout20. Le second cas est rapporté par l’auteur de l’Économique attribué à Artistote parmi plusieurs expédients utilisés pour réunir de l’argent : en 356 av. J.‑C., après l’incendie du temple d’Artémis à Éphèse, la cité ordonna que les femmes lui prêtassent leurs bijoux21. Probablement furent-ils engagés pour emprunter l’argent nécessaire à la reconstruction du temple.

    Souscriptions

    12Les cités semblent avoir eu plus volontiers recours à la souscription pour compléter le financement de leurs projets architecturaux. En se fondant ici aussi sur les recherches de Léopold Migeotte22, on constate que, pour les 70 souscriptions publiques dont on connaît l’objet, 43 ont trait à des travaux, dont 12 dans des sanctuaires, 9 pour des fortifications, 18 pour divers aménagements publics (portiques, gymnases, bibliothèque, infrastructures hydrauliques, port, salles de réunion de différentes institutions, bosquet de palmiers …). La souscription était donc loin d’être un mécanisme réservé aux chantiers sacrés. On n’observe pas de différences dans la procédure ni dans le discours entre des cas relevant de l’embellissement des espaces publics de la ville et ceux qui concernent les espaces dévolus aux divinités. Cela invite à ne pas voir dans ces participations financières un acte uniquement religieux : les raisons qui poussent au don sont multiples. Au-delà de la piété, on peut invoquer la volonté de manifester simplement son adhésion au projet, ce que laisse penser la fréquente modicité des sommes versées, ou de faire montre d’un certain prestige social ou d’une certaine puissance politique.

    13Il ne semble pas non plus qu’il y ait un profil de donateurs différents pour les édifices religieux et les édifices civils. Peut-être peut-on deviner, d’après cette documentation trop lacunaire et trop peu nombreuse pour dresser des statistiques, une certaine tendance des femmes à répondre à des souscriptions pour des travaux surtout de nature religieuse, mais force est de constater que des hommes y participent aussi et que des femmes financent la construction d’autres types d’édifices.

    Actes évergétiques

    14De très nombreux actes évergétiques étaient effectués en faveur de projets architecturaux. Si les implications de l’évergétisme dans le domaine de la construction au sein des cités grecques des quatre derniers siècles avant notre ère restent en partie à explorer, des études circonscrites à des cas particuliers, à des catégories d’évergètes ou à certains types d’édifices laissent envisager l’intérêt d’une analyse systématique de cette documentation abondante23. Par exemple, les rois hellénistiques ont fait ériger à leurs frais ou ont participé au financement d’au moins 68 bâtiments, dont une dizaine de temples et d’autels et une dizaine de portiques se trouvant pour certains dans ou à proximité des sanctuaires24. C’est le cas à Délos où, vers 250-225 av. J.‑C., Antigone (probablement Gonatas) fit construire un portique au nord du sanctuaire d’Apollon et où, vers 210 av. J.‑C., Philippe V offrit un portique qui longeait la voie y menant. Piété, politique et propagande se mêlaient dans ces gestes où s’exprimaient avec éclat la richesse et la puissance. Toutefois, les rois s’intéressèrent bien plus à l’édification de gymnases qui représentent environ un tiers des cas : faire porter ses efforts sur ce type architectural, c’était manifester son attachement à la culture grecque. Des choix se dessinent donc dans les attitudes évergétiques et on peut supposer qu’il en allait de même pour les actes plus humbles, mais pas moins signifiants pour les individus qui les accomplirent.

    15Les modalités du financement des édifices sacrées étaient donc très similaires à celles du financement des édifices publics : la communauté civique, qui s’occupait des uns et des autres, n’inventa rien de spécifique pour payer les constructions dans les sanctuaires. La seule spécificité était d’avoir recours à la caisse sacrée plutôt qu’à la caisse publique : cela n’a rien de surprenant. Un point paraît plus étonnant, mais reste à vérifier par une étude de plus grande ampleur : les édifices sacrés ne semblent pas avoir attiré plus que d’autres projets architecturaux la participation financière des individus. La piété n’aurait pas été alors le motif d’une générosité particulière. Même pour un temple aussi important pour tous les Grecs que celui d’Apollon à Delphes, les fonds constitués par les offrandes ne forment qu’une petite partie des sommes réunies. Quand on additionne les chiffres connus par les comptes, on atteint un total d’environ 9 800 drachmes éginétiques pour les offrandes, d’environ 37 000 pour les contributions obligatoires des cités membres de l’amphictionie, d’environ 62 000 pour la cité de Delphes et d’environ 485 000 pour les fonds sacrés. Ces données, bien qu’approximatives et incomplètes en raison du caractère lacunaire de la documentation, ne laissent pas de doute sur les ordres de grandeur. Pour ce chantier, les offrandes des particuliers étaient en général de l’ordre de la drachme, la plus faible n’étant que d’une obole25 et les plus élevées de 70 drachmes éginétiques26. Quand l’amphictionie put compter sur un afflux de numéraire, grâce à l’énorme amende à laquelle furent condamnés les Phocidiens pour leurs déprédations dans le sanctuaire pendant la Troisième Guerre Sacrée (356-346 av. J.‑C.), le produit des offrandes se fit encore plus modeste qu’avant. La générosité de celles et ceux qui fréquentaient le sanctuaire n’aurait jamais permis de payer la totalité du temple.

    Coût des bâtiments sacrés

    16L’estimation du coût des édifices antiques se heurte à de nombreuses difficultés27 qui résultent de l’état de la documentation : les sources sont peu nombreuses et souvent lacunaires, elles concernent quelques bâtiments construits dans des contextes variés et pas toujours bien connus, leur but initial ne fut jamais de livrer un bilan comptable du chantier. De plus, comme le monde du bâtiment était composé d’une multitude de petites équipes d’artisans et comme les prix se définissaient plus par la négociation que par l’existence de tarifs, utiliser les données d’un chantier pour les appliquer à d’autres est problématique. Partant non pas des textes, mais de données ethnographiques ou issues de l’archéologie expérimentale, des archéologues ont aussi essayé de déterminer le nombre de jours de travail nécessaires à la construction, puis multiplié ce nombre de jour-homme par un éventuel salaire journalier antique28. Dans la quasi-totalité des cas, on en est donc réduit à formuler des hypothèses qui reposent sur d’autres hypothèses.

    17Les documents de Delphes, d’Épidaure et de Délos sont parmi les plus diserts qu’il soit, mais ils permettent de donner avec un degré de certitude satisfaisant le prix de deux édifices seulement : le temple d’Apollon à Delphes a très probablement coûté autour de 1 680 000 drachmes éginétiques, soit 400 talents, et le temple d’Asklèpios à Épidaure est revenu à 100 000 drachmes éginétiques environ, soit près de 24 talents. L’écart de prix, qui rappelle que les généralités sont impossibles en la matière, procède essentiellement des différences d’échelle entre ces deux édifices construits à quelques années de distance l’un de l’autre. Le temple delphien était un périptère dorique de six par quinze colonnes, large de 23,82 m et long de 60,32 m. Sur les fondations de l’édifice archaïque agrandies, reposait une élévation en calcaire issu de carrières voisines et en pôros de Corinthe. Le chéneau à têtes de lion et les sculptures des frontons étaient en marbre du Pentélique, la charpente en sapin et peut-être en cyprès, la toiture très probablement en terre cuite. Flanquée d’un pronaos et d’un opisthodome, la cella, dont l’aménagement reste énigmatique, comportait une colonnade intérieure à deux niveaux sur les longs côtés. À l’instar du péristyle, elle était ornée d’un plafond en bois à caissons sculptés. Les ébénistes furent aussi mis à contribution pour la porte monumentale qui présentait une marqueterie d’ivoire et de bois précieux et des ornements de bronze. Le temple épidaurien était lui aussi un périptère dorique, mais ses dimensions étaient beaucoup plus modestes : il mesurait 13,20 × 24,45 m. Les six colonnes de chaque façade et les onze autres sur chacun des longs côtés étaient près de deux fois moins hautes que celles du temple delphique. Le sèkos était composé d’un pronaos et d’une cella où une colonnade intérieure se développait sans doute sur le mur du fond et sur les longs côtés pour former un écrin à la statue chryséléphantine d’Asklèpios. Les fondations de ce petit périptère dorique étaient en pierre locale, les élévations en pôros probablement importé de Corinthe et la charpente en sapin. Bien que les commanditaires eussent opté pour un projet de taille réduite, ils avaient tenu à ce que la demeure divine fût ornée d’un entablement rehaussé de couleurs, d’un plafond peint et doré, d’un dallage en calcaire moucheté, d’une porte en ivoire et en bois précieux et de figures en marbre du Pentélique aux frontons et sur les acrotères.

    18Que représentaient ces sommes pour les communautés qui décidèrent d’offrir une parure monumentale au dieu  ? Certains chantiers, jamais achevés car sans doute trop présomptueux, donnent l’impression que les frais de construction étaient écrasants : il en va ainsi pour le Didymeion29. Au contraire, les dépenses engagées pour le temple d’Asklèpios à Épidaure semblent à l’échelle d’un sanctuaire local qui commençait à acquérir une renommée internationale, mais qui ne pouvait guère compter sur d’importantes participations financières extérieures à la cité30. À Délos, dans les périodes où l’activité bâtisseuse fut la plus intense, dans la première moitié du troisième siècle, ce sont souvent entre 12 000 et 18 000 drachmes par année qui furent affectées pour la construction et l’entretien d’une soixantaine d’édifices ou d’ensembles monumentaux31. En général, les recettes annuelles du sanctuaire suffisaient à couvrir ces dépenses, et sur les quelque 150 ans où la cité de Délos administra la fortune d’Apollon, les travaux n’entraînèrent pas de déficit.

    19De plus, la construction des édifices sacrés n’était jamais urgente. Les commanditaires avaient donc la possibilité d’étaler les dépenses sur plusieurs années. Certains chantiers furent rapidement menés. Ainsi les Épidauriens mirent-ils quatre ans et huit mois pour bâtir le temple d’Asklèpios. À Delphes, la construction du temple apollinien dura au moins une quarantaine d’années. Elle ne connut pas toujours le même rythme. Commencée selon toute vraisemblance vers 366 av. J.‑C., elle fut ralentie au début de la troisième guerre sacrée, entre 356 et 351 av. J.‑C., puis s’arrêta complètement jusqu’à la paix en 346 av. J.‑C. Elle reprit alors de manière très soutenue. Le chantier de la Tholos à Épidaure fut lui aussi interrompu : pendant trois années successives32, les ϑυμελοποιοί inscrivent dans leur compte « rien ». Les raisons de cet arrêt furent peut-être politiques et militaires, mais aussi financières. Ce que l’on dépensait mois par mois, semestre par semestre, année par année importait plus que le prix total de l’édifice.

    20Construire un temple entraînait donc des dépenses considérables, mais elles sont à relativiser et il faudrait avoir plus de données pour dresser une comparaison rigoureuse avec les sommes allouées aux édifices publics. En cherchant à déterminer le coût des fortifications, Henri Tréziny a supposé qu’il « était globalement du même ordre que celui des grands programmes religieux »33 et qu’il était dérisoire par rapport aux autres dépenses que la guerre entraînait. La spécificité des chantiers sacrés ne tenait pas principalement au coût, mais à la possibilité offerte aux commanditaires de jouer avec le rythme de la construction si d’autres dépenses plus urgentes se présentaient. Les artisans pouvaient ainsi nourrir l’espoir de travailler dans le sanctuaire pendant longtemps, tout en sachant que tout pouvait être mis en suspens en cas de problème.

    Une main d’œuvre spécifique  ?

    21Le chantier d’un temple constituait un rassemblement de main d’œuvre exceptionnel34. Plus de cent hommes sont par exemple cités dans le compte du temple d’Asklèpios à Épidaure. Ce nombre est un minimum, car le document ne contient que les noms des personnes avec lesquelles les commanditaires traitaient directement : il faut ajouter tous ceux, esclaves, employés, voire sous-traitants, qui œuvraient pour les entrepreneurs. En se fondant sur plusieurs chantiers d’anastylose, Alison Burford estime à 200 le nombre de personnes travaillant au temple d’Asklèpios35. Ces hommes se distinguaient-ils de ceux qui participaient aux grands chantiers publics  ?

    Statuts et compétences

    22Sur les chantiers de Delphes, d’Épidaure et de Délos, on ne trouve pas de catégories de travailleurs spécifiques comme c’est le cas à Didymes où des esclaves du dieu furent mis à contribution et dans les villes grecques de Grande Grèce et de Sicile où l’on affecta aux chantiers des prisonniers de guerre et des paysans indigènes36. La main d’œuvre à Delphes, à Épidaure et à Délos était d’une grande diversité qui reflétait celle de la société grecque37. Les travailleurs avaient des statuts juridiques, politiques et économiques variés. Hommes libres et esclaves se côtoyaient. Certains étaient payés à la tâche, d’autres, moins nombreux, pour une certaine durée. Ils se voyaient confier des travaux d’ampleur plus ou moins grande, qui pouvaient correspondre à la livraison de quelques tuiles ou bien à l’extraction, au transport et à la pose de toutes les pierres des murs du temple. Certains concluaient des contrats avec les commanditaires, d’autres étaient leurs salariés, d’autres enfin traitaient de manière plus informelle avec eux. Les modalités de paiement n’étaient pas toutes identiques. Si les uns venaient de la cité où avait lieu le chantier, d’autres étaient issus des cités voisines, voire de plus loin encore, et s’installaient plus ou moins durablement dans la ville. C’est peut-être là la différence principale entre cette main d’œuvre et celle que l’on trouvait dans d’autres domaines d’activités : elle était volontiers mobile et les commanditaires n’hésitaient pas à faire appel à des étrangers dotés d’un savoir-faire peu répandu ou spécialisés dans un matériau particulier38. Ils les exemptaient de taxes et leur assuraient protection contre la saisie de corps et de biens pendant la durée du chantier et jusqu’à trente jours après la réception des travaux comme à Délos pour le temple d’Asklèpios39 et pour le dallage du temple d’Apollon40. Ils leur payaient parfois des indemnités de déplacement comme à Épidaure pour la construction de la Tholos41.

    23Les techniques mises en œuvre dans la construction publique et dans la construction sacrée ne différaient pas fondamentalement. Ces hommes bâtirent pour l’essentiel une architecture de pierre en grand appareil scellé. Les savoir-faire étaient les mêmes, que l’on construisît un portique dans un lieu de culte ou sur une agora. L’architecture sacrée se distinguait cependant de l’architecture publique par son échelle et son ornementation. Les vestiges et les comptes attestent l’importance accordée au décor par les commanditaires. On sculptait des moulures, on ornait les frises, on installait des figures dans les frontons et sur les acrotères, on développait des ordres intérieurs. Les années XIV et XV du chantier de la Tholos à Épidaure furent ainsi presque entièrement consacrées à la sculpture des moulures du socle du mur et des jambages de la porte42. On dotait les édifices sacrés de portes de très grandes dimensions, que l’on décorait de bois précieux, d’ivoire et d’éléments métalliques. Les Épidauriens versèrent environ 15 000 drachmes pour les portes du temple d’Asklèpios et autant pour le décor sculpté, soit la même somme que pour la péristasis et un peu moins que pour le sèkos. Dans les sanctuaires, on employait donc plus que sur d’autres grands chantiers des artisans capables de travailler des blocs de grandes dimensions et versés dans la sculpture et de l’ébénisterie.

    24On pourrait supposer qu’il existait aussi des différences entre les travailleurs qui œuvraient sur ces grands chantiers et ceux qui s’occupaient d’une architecture plus humble. On connaît beaucoup moins les conditions dans lesquelles l’habitat était réalisé, mais les comptes donnent quelques indications, car les sanctuaires de Delphes, d’Épidaure et de Délos firent construire des ateliers, des maisons et des hôtelleries. Les hommes que l’on retrouve alors étaient généralement les mêmes que ceux qui travaillaient au temple ou à d’autres édifices du sanctuaire. Il ne semble donc pas avoir existé une main d’œuvre entièrement spécifique, mais plutôt des hommes qui exerçaient leurs savoir-faire sur les grands chantiers quels qu’ils fussent, et qui, pour la plupart, ne dédaignaient pas des travaux plus humbles.

    Quelle influence de la piété  ?

    25Le fait de participer à la construction d’un lieu de culte n’entraînait apparemment pas de modification dans l’attitude de ces artisans. Rien ne nous renseigne sur les sentiments qu’ils pouvaient éprouver. Il n’y a pas trace de rites de fondation43, si ce n’est dans un petit édifice certainement dédié à Asklèpios dans le sanctuaire d’Apollon Maleatas à Épidaure : les ossements d’un coq sacrifié ont été découverts dans une petite ciste aménagée avec des dalles au contact de la fondation44. La fosse dans l’angle nord-est du temple d’Artémis à Délos n’est probablement pas une fosse de consécration. Le mobilier égéen exceptionnel trouvé au-dessus du niveau de comblement de la fosse et associé aux fondations du mur est de l’édifice archaïque semble avoir été déposé au moment du chantier, mais il résulte sans doute de découvertes fortuites, chargées alors d’une valeur religieuse et enfouies intentionnellement dans le lieu de culte, plutôt que d’un rite de consécration45. Dans les comptes, il n’est jamais fait mention de cultes spécifiques au chantier. Certes, les naopes de Delphes inscrivaient des dépenses pour des sacrifices46, mais il s’agissait des sacrifices effectués au début de leurs réunions, semblables à ceux qui ouvraient les assemblées. Quant à des actes de dévotion de la part des artisans, les comptes n’en laissent percevoir aucun. À Delphes, un fournisseur de claies de roseaux consentit certes une remise de six drachmes sur les 220 qu’il devait toucher47, mais celle-ci pourrait découler tout aussi bien d’un retard de livraison ou de la mauvaise qualité de certaines claies.

    26Au regard des amendes pour retard ou malfaçon, les artisans qui construisaient pour le dieu ne paraissent pas avoir eu plus de scrupules qu’ailleurs – à moins de supposer avec malignité que la situation était pire sur les chantiers en dehors des lieux de culte. Les contrats fixaient le montant des indemnités de retard. Ainsi, un contrat délien de 360 av. J.‑C. indique une amende de dix drachmes par jour « si [l’entrepreneur] n’agit pas dans le délai imparti par le contrat »48, soit huit mois. Quelque 110 ans plus tard, pour un autre chantier, l’amende est de deux drachmes par jour49. À Épidaure, les comptes des ϑυμελοποιοί font connaître dix-sept amendes pour malfaçon ou retard50. Une inscription publiée récemment51 fait état de divers procès contemporains de ces textes. Elle donne un tableau saisissant de l’attitude de plusieurs artisans et d’un architecte : vol de colle, cire et ivoire destinés sans doute à la porte de la Tholos, conduite frauduleuse lors de l’adjudication d’une tour, problèmes non explicités sur le chantier d’une fontaine et de l’abaton, malfaçon sur le chantier de la klisia, un vaste édifice polyvalent dans le sanctuaire, à nouveau vol d’ivoire. Sur les trois sites, les commissions architecturales et les architectes vérifiaient les travaux avant de clore le contrat. Ils retenaient aussi souvent une partie de la rémunération en attendant ce contrôle. Cette somme, qui était en général une fraction du total, n’était pas versée en cas de problème. L’insistance avec laquelle les commanditaires contrôlaient le travail des artisans prouve qu’ils n’imaginaient pas avoir affaire à des travailleurs que la piété seule aurait pu contraindre à œuvrer dans les règles de l’art.

    27Les artisans à l’œuvre dans les lieux de culte ne paraissent donc pas avoir formé une catégorie spécifique parmi les hommes du bâtiment. Ils intervenaient d’ailleurs très probablement en d’autres lieux, quand les sanctuaires ne fournissaient pas de travail. Construire dans un espace sacré les obligeait cependant à adapter leurs pratiques aux exigences de la religion.

    L’espace et le temps des dieux, l’espace et le temps du chantier

    28Dans des sanctuaires anciens tels ceux de Delphes et de Délos, l’espace était encombré d’édifices et d’offrandes. De plus, le tèmènos, terre coupée de celle des hommes pour être offerte aux dieux, n’était pas un espace comme un autre et sa charge religieuse impliquait certaines règles auxquelles les constructeurs devaient se conformer.

    Trouver de la place pour les annexes du chantier et les déblais

    29Sur un chantier, des ateliers sont nécessaires pour abriter certaines activités comme la sculpture ou l’ébénisterie et pour entreposer en toute sécurité des outils et des matériaux coûteux et fragiles52. Les inscriptions delphiques mentionnent des ateliers faits de matériaux ordinaires, probablement ouverts pour certains et fermés pour d’autres53. Sans doute y avait-il de tels bâtiments dès le début du chantier, mais les dépenses connues sont engagées entre 343 et 340 av. J.‑C.54, puis vers 338 av. J.‑C.55.
    Le -parallèle avec les travaux qui avaient alors lieu au temple donne quelque idée de leur destination : le premier servit peut-être à entreposer les bois de charpente que l’on venait de faire scier ou accueillit les sculpteurs chargés des chéneaux à tête de lion tandis que l’atelier de 338 av. J.‑C. environ était sans doute destiné aux ébénistes qui s’occupèrent de la grande porte. Ces ateliers se situaient à Thyiai, un lieu-dit probablement à l’ouest du sanctuaire56. Il existait aussi des locaux à Kirrha, le port où arrivaient de nombreux matériaux comme les blocs de pôros de Corinthe et le cyprès acheté à Sicyone, ainsi qu’un portique simple près de la mer57. À Épidaure, un atelier fut construit au cours des deux premières années du chantier du temple d’Asklépios58. Sur un socle en tombées de carrière, s’élevaient probablement des murs en brique crue. Il coûta sans doute 2 200 drachmes environ, soit à peine plus de 2 % du coût total du chantier. L’atelier étant clos, on peut supposer qu’il était destiné à recevoir l’ivoire et les bois précieux utilisés pour la porte monumentale ou à accueillir le travail des ébénistes ou des sculpteurs. Cet atelier servit peut-être dans un second temps à la réalisation de la statue de culte59. Le compte ne permet pas de connaître l’emplacement de cet atelier. S’il faut l’identifier à un bâtiment rectangulaire de 16,50 × 7,40 m dont il reste les fondations à une quinzaine de mètres au sud du temple60, il se situerait alors dans le lieu même du culte, ce qui n’est pas le cas, à notre connaissance, à Delphes. La même inscription fait état d’un χρυσοχόϊον61, qui, selon les interprétations, peut être un atelier d’orfèvre ou un vase à libation en or.

    30Il fallait aussi prévoir des espaces à l’air libre pour les blocs en attente. À Delphes, on les entreposait peut-être sur une terrasse à proximité immédiate du sanctuaire. Des matériaux étaient aussi conservés au sein même d’un espace sacré. À Délos, au moins à partir de la fin du iiie siècle av. J.‑C., le Pythion servit de lieu de stockage pour du bois, des claies de roseaux et plusieurs centaines de tuiles62. L’accès au sanctuaire et le cheminement à l’intérieur de celui-ci devenaient donc compliqués quand des travaux y étaient effectués.

    31L’évacuation des déblais constituait aussi un problème important. Les mentions épigraphiques sont rares, car la tâche devait être à la charge des artisans. On voit néanmoins à Delphes les carriers qui fournissaient les orthostates du temple être payés pour l’évacuation des déchets de taille hors du sanctuaire63. Les déchets produits par toutes les activités du chantier étaient jetés à Thyiai et aux Protemenitai que la toponymie invite à situer en avant du sanctuaire64. La réutilisation de plus d’un quart des blocs du temple archaïque ruiné dans les fondations du nouveau temple65 s’explique au moins en partie par des questions pratiques et économiques : elle eut l’avantage de déblayer le sanctuaire tout en faisant baisser le coût de la nouvelle construction.

    32Pour les chantiers qui ne se déroulaient pas dans les sanctuaires aussi, le manque de place et l’empiètement des activités du chantier sur des espaces publics posaient parfois problème. Au iie siècle av. J.‑C., la loi des astynomes de Pergame précise que « si certains, en creusant dans les routes, amoncèlent des déblais ou des pierres, s’ils font du mortier, moulent des briques ou font des canalisations à l’air libre, les amphodarques les empêcheront. S’ils n’obéissent pas, ils en référeront aux astynomes. Ceux-ci infligeront au délinquant une amende de cinq drachmes pour chaque infraction, ils l’obligeront à rétablir l’état initial et à faire des canalisations couvertes. Si même ainsi les particuliers n’obéissent pas, ils mettront l’affaire en adjudication dans les dix jours et feront payer la dépense engagée aux délinquants, avec la moitié en sus66 ». Au cours du même siècle, à Kymè, la bienfaitrice Archippè, qui avait accepté de refaire la charpente de la salle du conseil et d’en remplacer les tuiles à ses frais, obtint la possibilité de « déposer les pierres et les pièces de bois apportées et tout ce qui sera nécessaire sur les terrains publics sans que personne ne l’en empêche67 ». Ces deux cas laissent entrevoir les polémiques suscitées par le débordement des chantiers dans l’espace public : celles-ci renvoient à des aspects pratiques – on ne peut plus circuler normalement – et à des questions plus fondamentales sur la définition de ce qui est commun et sur les usages que chacun peut en faire. Pour les espaces sacrés, les constructeurs devaient aussi composer avec les dieux.

    Respecter le caractère sacré des lieux

    33Un contrat pour le temple de Zeus à Lébadée au iiie siècle av. J.‑C. stipule qu’un entrepreneur qui endommage une pierre avait cinq jours pour l’enlever, « sinon la pierre sera sacrée68 ». L’aspect économique n’était pas négligeable, car la pierre devenait alors la propriété du sanctuaire, mais la clause semble procéder avant tout d’une obligation religieuse : on ne pouvait rendre aux hommes ce qui avait été donné aux dieux, on ne s’en débarrassait pas comme on l’aurait fait d’objets usagés. De même qu’on enfouissait d’anciennes offrandes dans le sanctuaire, on remployait les blocs des édifices ruinés. Par leur présence, visible ou non, dans la nouvelle construction, ils traduisaient la permanence de la présence divine. Les blocs du temple delphien de la fin du vie siècle av. J.‑C., dont certains étaient déjà des remplois du temple précédent, furent utilisés pour le nouvel édifice, mais aussi pour le mur de soutènement au nord du temple, le péribole sud, le trésor de Thèbes et un mur de terrasse à l’est du sanctuaire69. Les listes des dons et des contributions des membres de l’amphictionie furent gravées sur des blocs de l’entablement de l’ancien temple. Parfois, on conservait l’ancien bâtiment en construisant le nouveau temple autour et au-dessus de son précesseur. À Délos, l’Héraion de l’époque géométrique fut profondément enfoui sous le sol de la cella du temple du vie siècle av. J.‑C. L’Artémision du début du iie siècle av. J.‑C. vint, quant à lui, enchâsser le temple archaïque : dans les premiers temps du chantier, la cella de l’ancien édifice resta intacte, sans doute pour protéger une relique particulièrement fragile qu’on ne pouvait déplacer, avant qu’on arasât les murs70. Les pratiques du remploi et de l’englobement d’anciens temples, tout comme le maintien d’un plan archaïsant et les restaurations, traduisent le « souci de fidélité [des bâtisseurs] à l’ordre établi par les dieux71 ».

    34Au-delà de ces choix qui concernaient la conception du nouvel édifice et l’organisation générale du chantier, il fallait adapter celui-ci au quotidien du lieu de culte. Pendant les travaux, le sanctuaire ne se vidait pas des hommes et des femmes qui s’y rendaient habituellement. Il s’agissait donc de faire cohabiter l’espace de la construction et l’espace de la religion. La place pouvait manquer, le bruit et la poussière des travaux se révéler envahissants. Dans le cas d’une reconstruction ou d’une restauration, il fallait déplacer les offrandes et les trésors entreposés dans le temple ou les protéger sur place. La plupart des rites se déroulaient à ciel ouvert, mais certains temples accueillaient des activités religieuses particulières, comme à Delphes où l’on consultait l’oracle : le problème était alors particulièrement sensible. Pendant la quarantaine d’années que dura le chantier, on continua à interroger Apollon. Les comptes attestent la protection et l’aménagement des lieux sacrés. Probablement vers 335 av. J.‑C., on construisit juste à côté du temple un abri pour les consultants de l’oracle72. Cinq ans auparavant sans doute, au moment où l’on posait les orthostates, l’omphalos, pierre sacrée symbolisant le nombril du monde, fut entouré d’un muret de briques crues, comme une palissade, et des barrières furent mises en place pour fermer la cella où se trouvaient d’autres objets vénérables73. L’espace restait sacré, quand bien même il est peu probable que l’oracle fonctionnât à ce moment précis des travaux.

    Temps rituel, rythme de la construction

    35Adapter l’espace du culte à celui du chantier, ou l’inverse, ne suffisait pas  ; il fallait aussi faire cohabiter le temps de la construction et le temps de la religion. Probablement, on évitait que le gros des travaux se déroulât au moment où l’on interrogeait l’oracle. La consultation publique avait d’abord lieu une fois par an, puis, à partir d’une date indéterminée, un jour par mois, sauf peut-être lors des trois mois d’hiver. L’oracle était aussi accessible à n’importe quel moment, excepté les jours néfastes, pour les bénéficiaires de ce privilège accordé par la cité de Delphes74. On interrompait aussi les travaux lors des fêtes religieuses parce que les artisans ne travaillaient pas et parce que le sanctuaire devait être rendu au seul déroulement du culte. Il en allait de même des installations sportives et du théâtre qui accueillaient les concours pendant des fêtes. Par exemple, à Délos, lors des fêtes pour Apollon en février-mars et lors de celles pour Dionysos le mois suivant, le chantier du théâtre était mis en suspens et on nettoyait le monument75.

    36Plus largement, on peut se demander si cette adaptation réciproque du lieu et du temps du chantier d’une part et de l’espace sacré et du déroulement du culte de l’autre n’avait pas fini par devenir permanente ou presque dans la plupart des sanctuaires. Les lieux de culte furent-ils jamais libres de chantiers  ? Les comptes des hiéropes indiquent par exemple qu’en 250 av. J.‑C. à Délos, il y avait des travaux essentiellement au Grand temple d’Apollon, au théâtre et au Nymphaion, mais aussi au portique des Naxiens, à l’Inopos, dans l’ancienne maison d’Aristoboulos, dans la Nèsos, à la Graphè, au sanctuaire de l’Archégète, à l’Héracleion, à l’Asklépieion, à l’autel de Poséidon, au Kératôn, dans des oikoi, au gymnase, à la palestre, au sanctuaire du Cynthe, à l’Héliotropion, à l’Eileithyaion et dans un andrôn près de la mer76 : cette litanie des chantiers suggère l’activité constante des artisans dans les sanctuaires de l’île. Encore faut-il ajouter les travaux qui n’étaient pas payés par la caisse sacrée et que le compte ne mentionne pas : ceux qui étaient financés par des évergètes et ceux des particuliers dans les lieux de culte privés.

    37Dès lors, si le lieu de culte était en perpétuel chantier, on peut dire qu’il était toujours un espace artisanal. Il y avait bien sûr des moments d’intense activité, comme lors de la construction des édifices principaux, et d’autres où il s’agissait simplement de procéder à des réparations ou de travailler à des bâtiments secondaires. Les espaces sacrés ne se distinguaient pas en cela du reste de la ville, lui aussi en perpétuelle mutation.

    38Construire dans un lieu de culte obligeait les ouvriers et les autorités à modifier leurs pratiques : il leur fallait organiser l’espace et le calendrier des travaux en prenant en compte l’encombrement du sanctuaire, les lieux particulièrement sacrés et le déroulement des rites. La modification des manières de faire ne relevait cependant pas uniquement de la contrainte, puisque les commanditaires pouvaient étaler dans le temps les travaux pour les dieux et les dépenses qu’ils occasionnaient, ce que d’autres grands chantiers, tels ceux pour la défense, permettaient beaucoup moins. Mais par plusieurs aspects, construction sacrée et construction publique ne se distinguaient pas. Les cadres administratifs de la conception et de la mise en œuvre du projet architectural ne différaient pas. Si l’on faisait appel dans un cas à la caisse sacrée, dans l’autre à la caisse publique, on recourait à des revenus d’appoint selon les mêmes procédures. Quant aux travailleurs, ils étaient similaires, voire identiques à ceux qui bâtissaient d’autres types de monuments en termes de statuts, d’origines, de savoir-faire et de soin apporté à la construction.

    39Un dernier point mérite l’attention : les comptes de construction de bien peu de chantiers antiques nous sont parvenus, mais ceux qui le sont concernent dans leur immense majorité des édifices sacrés. Le choix d’inscrire sur la pierre cette documentation comptable serait-il l’indice d’une attitude spécifique vis-à-vis de ce type de travaux  ? Ces inscriptions, versions plus ou moins remaniées des comptes tenus sur des planchettes ou des feuilles de papyrus, revêtaient vraisemblablement diverses fonctions77. Elles servaient un discours de justification : il ne s’agissait pas seulement pour les différents rédacteurs de ces comptes d’attester leur probité dans le maniement d’argent et de matériaux appartenant au sanctuaire, mais de se décharger de toute responsabilité à leur sortie de charge. La gravure me paraît être moins de l’ordre du symbolique – il aurait fallu manifester un soin scrupuleux, d’autant plus qu’il s’agissait de la fortune sacrée – que de l’ordre du politique. Cela n’empêche pas de voir aussi dans cette pratique une volonté commémorative, voire votive, plus qu’honorifique. La manière dont certaines inscriptions sont composées sur la pierre suggère que les autorités qui en étaient à l’origine voulaient en faire des monuments, au sens propre, de la construction : l’édifice attestait la réussite de l’entreprise, l’inscription rappelait les efforts humains et financiers nécessaires pour y parvenir.

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    Prignitz 2014 : S. Prignitz, Bauurkunden und Bauprogramm von Epidauros (400-350). Asklepiostempel, Tholos, Kultbild, Brunnenhaus, Munich, 2014.

    Quass 2013 : F. Quass, Die Honoratiorenschicht in den Städten des griechischen Ostens. Untersuchungen zur politischen und sozialen Entwicklung in hellenistischer und römischer Zeit, Stuttgart, 1993.

    Riethmüller 2005 : J. W. Riethmüller, Asklepios. Heiligtümer und Kulte, Heidelberg, 2005.

    Rousset 2015 : D. Rousset, Les fonds sacrés dans les cités grecques, in V. Chankowski, D. Rousset (dir.), À propos des Finances des cités grecques de L. Migeotte, Topoi, 20, 2, 2015, p. 369-393.

    Roux 1961 : G. Roux, L’architecture de l’Argolide aux ive et iiie siècles avant J.‑C., Paris, 1961.

    Saba 2012 : S. Saba, The Astynomoi law from Pergamon : A new commentary, Mayence, 2012.

    Salmon 2002 : J. Salmon, Temples the Measures of Men : Public Building in the Greek Economy, in D. J. Mattingly, J. Salmon (dir.), Economies beyond Agriculture in the Classical World, New York, 2002, p. 195-208.

    Sanidas 2013 : G. M. Sanidas, La production artisanale en Grèce. Une approche spatiale et topographique à partir des exemples de l’Attique et du Péloponnèse du viie au ier siècle avant J.‑C., Paris, 2013.

    Schmidt-Dounas 2000 : B. Schmidt-Dounas, Geschenke erhalten die Freundschaft. Politik und Selbstdarstellung im Spiegel der Monumente, Berlin, 2000.

    Tomlinson 1983 : R. A. Tomlinson, Epidauros, Austin, 1983.

    Tréziny 2001 : H. Tréziny, Le prix des murailles, in J.-P. Brun, P. Jockey (dir.), Techniques et sociétés en Méditerranée. Hommage à Marie-Claire Amouretti, Paris, 2001, p. 367-380.

    Vallois, Poulsen 1914 : R. Vallois, G. Poulsen, Exploration archéologique de Délos II.2. Nouvelles recherches sur la Salle hypostyle, Paris, 1914.

    Van Looy 1988 : H. Van Looy, La construction d’un temple grec : aspects administratifs, économiques et sociaux, in D. Vanhove (dir.), Marbres helléniques. De la carrière au chef-d’œuvre, Bruxelles, 1988, p. 62-75.

    Veyne 1976 : P. Veyne, Le pain et le cirque : sociologie historique d’un pluralisme politique, Paris, 1976.

    Weikart 2002 : S. Weikart, Griechische Bauopferrituale, Berlin, 2002.

    Wescoat 2014 : B. D. Wescoat, The Patronage of Greek and Roman Architecture, in C. Marconi (dir.), The Oxford Handbook of Greek and Roman Art and Architecture, Oxford, 2014 (en ligne).

    Wittenburg 1978 : A. Wittenburg, Griechische Baukommissionen des 5. und 4. Jahrhunderts, Munich, 1978.

    Zuiderhoek 2009 : A. Zuiderhoek, The Politics of Munificence in the Roman Empire, Cambridge, 2009.

    Notes de bas de page

    1 Outre les références données ensuite, on pourra consulter sur les inscriptions architecturales Hellmann 1999  ; Pitt 2016  ; sur l’économie de la construction, Salmon 2002 (sur Athènes, Corinthe et Épidaure)  ; Davies 2002 (sur Delphes)  ; Marginesu 2019a.

    2 Les inscriptions sont réunies dans CID II. Pour l’étude architecturale du temple, voir en dernier lieu Amandry, Hansen 2010.

    3 Pour les inscriptions, voir IG IV2, 1. Quatre inscriptions (IG IV2, 1, 102, 103, 104 + 118 + 743 + 3 nouveaux fragments, 112) ont fait l’objet d’une nouvelle édition par Prignitz 2014. L’auteur prépare la publication des textes restants. Pour l’histoire du sanctuaire et du culte, Tomlinson 1983  ; Riethmüller 2005, part. p. 148-174 et p. 279-324  ; Melfi 2007, part. p. 17-209. Pour une étude architecturale des principaux édifices du sanctuaire, Roux 1961. Pour une étude des comptes de construction, Burford 1969.

    4 Ces textes sont réunis dans IG XI, 2 et ID. Pour une vision renouvelée de la nature des comptes et inventaires gravés sur la pierre et des pratiques comptables des administrateurs du sanctuaire, Chankowski 2013  ; 2019. Les édifices de l’île sont présentés succinctement dans Bruneau, Ducat 2005, qui donnent de manière systématique des références plus précises.

    5 Chankowski 2008.

    6 Boersma 1970, p. 3-10  ; Van Looy 1988.

    7 Wittenburg 1978  ; Marginesu 2010.

    8 Davis 1937 (Délos)  ; Carusi 2006 (Athènes).

    9 Migeotte 1995  ; Meier 2012.

    10 Migeotte 2014, p. 20-25  ; à propos du débat sur la place des fonds sacrés dans les finances publiques, voir en particulier Rousset 2015.

    11 Mathé 2017, p. 140.

    12 Chankowski 2008, p. 279-343  ; Migeotte 2014, p. 596-615  ; Chankowski 2019, p. 103-178.

    13 ID 366-367.

    14 Vallois, Poulsen 1914  ; Moretti, Fincker 2016  ; Mathé 2020.

    15 ID 372, A, l. 139-144, 165-168.

    16 ID 316, l. 101  ; 354, l. 65-66 ; 400, l. 36, 38-40, 45-46 ; 402, l. 2-6 ; 403, l. 26  ; 442, B, l. 218-219.

    17 ID 455, Ab l. 33-36  ; 460, fr. d, l. 9-10  ; 462, B, l. 26.

    18 Chankowski 2019, p. 173-178.

    19 Migeotte 1984, p. 360-361 et, pour les deux cas, p. 262-267 et 286-287.

    20 I.Ilion 1.

    21 [Aristote], Économique, 1349 a.

    22 Migeotte 1992, p. 327-338. L’état de conservation des inscriptions et les choix des rédacteurs rendent les décomptes difficiles.

    23 Sur l’évergétisme, au-delà des ouvrages fondamentaux de Veyne 1976 et de Gauthier 1985, voir, pour les implications architecturales, Quass 1993  ; Zuiderhoek 2009  ; Pont 2010  ; Wescoat 2014.

    24 Schmidt-Dounas 2000.

    25 CID II, 4, III, l. 13-14.

    26 CID II, 4, I, l. 67-69, 78-79.

    27 Marginesu 2019b  ; 2020.

    28 Par ex., Fachard et al. 2020, p. 516-528.

    29 Debord 1982, p. 188-191.

    30 Mathé 2017.

    31 Chankowski 2019, p. 74-76 (tableau 9)  ; voir aussi Feyel 2006, p. 482-483 (tableau 34 et graphique 54, p. 481).

    32 IG IV2, 1, 103, B, l. 146-147.

    33 Tréziny 2001, p. 377.

    34 Contra Feyel 2006, p. 469-473.

    35 Burford 1969, p. 246-251.

    36 Martin 1973.

    37 C’est une des principales conclusions de Feyel 2006.

    38 Hellmann 2000.

    39 ID 500, B, l. 4-7.

    40 ID 502, A, l. 17-19.

    41 IG IV2, 1, 103, A, l. 12-13, B, l. 25, 44-45, 52-45, 60-61, 160-161, 167-168.

    42 IG IV2, 1, 103, B, l. 90-113.

    43 Lambrinoudakis 2002  ; Weikart 2002  ; V. Lambrinoudakis, in Thesaurus Cultus et Rituum Antiquorum, III, Los Angeles, 2005, p. 340-343.

    44 Lambrinoudakis 1987, p. 62-63, pl. 35-36.

    45 Moretti 2012, p. 418-421.

    46 Par ex., CID II, 50, l. 2-7.

    47 CID II, 56, I, A, l. 10-20.

    48 ID 104-4, l. 17-19.

    49 ID 507, l. 29-31.

    50 IG IV2, 1, 103, A, l. 15-16, B, l. 18-19, l. 47-51, l. 73-76, l. 85-89, l. 98-100, l. 111, l. 115-117.

    51 Kritzas, Prignitz 2020.

    52 Pour plusieurs exemples, voir Sanidas 2013, part. p. 46-47 (atelier de la Promachos ( ?) sur l’Acropole d’Athènes), p. 167 (atelier d’Épidaure), p. 181-182 (atelier de Phidias à Olympie).

    53 Amandry, Hansen 2010, p. 456.

    54 CID II, 46, B, II, l. 4-13  ; 47, A, l. 7-21  ; 48, l. 3-7.

    55 CID II, 54, l. 2-6  ; 56, I, A, l. 10-20, 44-55.

    56 Jacquemin 2012 a proposé de placer Thyiai vers le gymnase, à l’est du sanctuaire d’Apollon.

    57 CID II, 54, l. 4-8  ; 113, à partir de la l. 7.

    58 IG IV2, 1, 102, A, l. 27-92, 32-23, 35-40, 43-45, B II, l. 221-222, 245-246, 255-256.

    59 Prignitz 2014, p. 84-85 pour l’atelier et p. 123-157 pour la nouvelle édition du compte de la statue de culte.

    60 Roux 1961, p. 86-89, part. p. 86, fig. 15.

    61 IG IV2, 1, 102, A II, l. 92-93.

    62 ID 312, l. 4  ; 313, i, l. 21  ; 366, l. 48-49  ; 372, l. 163  ; 403, l. 40.

    63 CID II, 31, l. 106  ; 49, D, l. 3-5 et E, l. 2-7  ; 62, III, B, l. 77-79.

    64 CID II, 62, I, A, l. 24-26, 72-76.

    65 Amandry, Hansen 2010, p. 157-169.

    66 Col. II, l. 72-86. Cf. en dernier lieu Saba 2012.

    67 SEG XXXIII, 1040, l. 23-26.

    68 IG VII, 3073, l. 35-37.

    69 Amandry, Hansen 2010, p. 169-174.

    70 Moretti 2012, p. 428-435  ; Moretti, Fraisse, Llinas 2021, p. 213-216.

    71 Hellmann 2013, p. 157.

    72 CID II, 62, I, A, l. 12-15.

    73 CID II, 49, A, I, l. 8-14  ; B, II, l. 7-9.

    74 Amandry 1950, p. 81-85.

    75 IG XI, 203, A, l. 38  ; IG XI, 287, A, l. 46.

    76 IG XI, 287, A, l. 41-85 et 89-122.

    77 Marginesu 2019b, p. 19, avec la bibliographie antérieure.

    Auteur

    Virginie Mathé

    Université Paris Est Créteil - Centre de Recherche en Histoire Européenne Comparée.

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    1 Outre les références données ensuite, on pourra consulter sur les inscriptions architecturales Hellmann 1999  ; Pitt 2016  ; sur l’économie de la construction, Salmon 2002 (sur Athènes, Corinthe et Épidaure)  ; Davies 2002 (sur Delphes)  ; Marginesu 2019a.

    2 Les inscriptions sont réunies dans CID II. Pour l’étude architecturale du temple, voir en dernier lieu Amandry, Hansen 2010.

    3 Pour les inscriptions, voir IG IV2, 1. Quatre inscriptions (IG IV2, 1, 102, 103, 104 + 118 + 743 + 3 nouveaux fragments, 112) ont fait l’objet d’une nouvelle édition par Prignitz 2014. L’auteur prépare la publication des textes restants. Pour l’histoire du sanctuaire et du culte, Tomlinson 1983  ; Riethmüller 2005, part. p. 148-174 et p. 279-324  ; Melfi 2007, part. p. 17-209. Pour une étude architecturale des principaux édifices du sanctuaire, Roux 1961. Pour une étude des comptes de construction, Burford 1969.

    4 Ces textes sont réunis dans IG XI, 2 et ID. Pour une vision renouvelée de la nature des comptes et inventaires gravés sur la pierre et des pratiques comptables des administrateurs du sanctuaire, Chankowski 2013  ; 2019. Les édifices de l’île sont présentés succinctement dans Bruneau, Ducat 2005, qui donnent de manière systématique des références plus précises.

    5 Chankowski 2008.

    6 Boersma 1970, p. 3-10  ; Van Looy 1988.

    7 Wittenburg 1978  ; Marginesu 2010.

    8 Davis 1937 (Délos)  ; Carusi 2006 (Athènes).

    9 Migeotte 1995  ; Meier 2012.

    10 Migeotte 2014, p. 20-25  ; à propos du débat sur la place des fonds sacrés dans les finances publiques, voir en particulier Rousset 2015.

    11 Mathé 2017, p. 140.

    12 Chankowski 2008, p. 279-343  ; Migeotte 2014, p. 596-615  ; Chankowski 2019, p. 103-178.

    13 ID 366-367.

    14 Vallois, Poulsen 1914  ; Moretti, Fincker 2016  ; Mathé 2020.

    15 ID 372, A, l. 139-144, 165-168.

    16 ID 316, l. 101  ; 354, l. 65-66 ; 400, l. 36, 38-40, 45-46 ; 402, l. 2-6 ; 403, l. 26  ; 442, B, l. 218-219.

    17 ID 455, Ab l. 33-36  ; 460, fr. d, l. 9-10  ; 462, B, l. 26.

    18 Chankowski 2019, p. 173-178.

    19 Migeotte 1984, p. 360-361 et, pour les deux cas, p. 262-267 et 286-287.

    20 I.Ilion 1.

    21 [Aristote], Économique, 1349 a.

    22 Migeotte 1992, p. 327-338. L’état de conservation des inscriptions et les choix des rédacteurs rendent les décomptes difficiles.

    23 Sur l’évergétisme, au-delà des ouvrages fondamentaux de Veyne 1976 et de Gauthier 1985, voir, pour les implications architecturales, Quass 1993  ; Zuiderhoek 2009  ; Pont 2010  ; Wescoat 2014.

    24 Schmidt-Dounas 2000.

    25 CID II, 4, III, l. 13-14.

    26 CID II, 4, I, l. 67-69, 78-79.

    27 Marginesu 2019b  ; 2020.

    28 Par ex., Fachard et al. 2020, p. 516-528.

    29 Debord 1982, p. 188-191.

    30 Mathé 2017.

    31 Chankowski 2019, p. 74-76 (tableau 9)  ; voir aussi Feyel 2006, p. 482-483 (tableau 34 et graphique 54, p. 481).

    32 IG IV2, 1, 103, B, l. 146-147.

    33 Tréziny 2001, p. 377.

    34 Contra Feyel 2006, p. 469-473.

    35 Burford 1969, p. 246-251.

    36 Martin 1973.

    37 C’est une des principales conclusions de Feyel 2006.

    38 Hellmann 2000.

    39 ID 500, B, l. 4-7.

    40 ID 502, A, l. 17-19.

    41 IG IV2, 1, 103, A, l. 12-13, B, l. 25, 44-45, 52-45, 60-61, 160-161, 167-168.

    42 IG IV2, 1, 103, B, l. 90-113.

    43 Lambrinoudakis 2002  ; Weikart 2002  ; V. Lambrinoudakis, in Thesaurus Cultus et Rituum Antiquorum, III, Los Angeles, 2005, p. 340-343.

    44 Lambrinoudakis 1987, p. 62-63, pl. 35-36.

    45 Moretti 2012, p. 418-421.

    46 Par ex., CID II, 50, l. 2-7.

    47 CID II, 56, I, A, l. 10-20.

    48 ID 104-4, l. 17-19.

    49 ID 507, l. 29-31.

    50 IG IV2, 1, 103, A, l. 15-16, B, l. 18-19, l. 47-51, l. 73-76, l. 85-89, l. 98-100, l. 111, l. 115-117.

    51 Kritzas, Prignitz 2020.

    52 Pour plusieurs exemples, voir Sanidas 2013, part. p. 46-47 (atelier de la Promachos ( ?) sur l’Acropole d’Athènes), p. 167 (atelier d’Épidaure), p. 181-182 (atelier de Phidias à Olympie).

    53 Amandry, Hansen 2010, p. 456.

    54 CID II, 46, B, II, l. 4-13  ; 47, A, l. 7-21  ; 48, l. 3-7.

    55 CID II, 54, l. 2-6  ; 56, I, A, l. 10-20, 44-55.

    56 Jacquemin 2012 a proposé de placer Thyiai vers le gymnase, à l’est du sanctuaire d’Apollon.

    57 CID II, 54, l. 4-8  ; 113, à partir de la l. 7.

    58 IG IV2, 1, 102, A, l. 27-92, 32-23, 35-40, 43-45, B II, l. 221-222, 245-246, 255-256.

    59 Prignitz 2014, p. 84-85 pour l’atelier et p. 123-157 pour la nouvelle édition du compte de la statue de culte.

    60 Roux 1961, p. 86-89, part. p. 86, fig. 15.

    61 IG IV2, 1, 102, A II, l. 92-93.

    62 ID 312, l. 4  ; 313, i, l. 21  ; 366, l. 48-49  ; 372, l. 163  ; 403, l. 40.

    63 CID II, 31, l. 106  ; 49, D, l. 3-5 et E, l. 2-7  ; 62, III, B, l. 77-79.

    64 CID II, 62, I, A, l. 24-26, 72-76.

    65 Amandry, Hansen 2010, p. 157-169.

    66 Col. II, l. 72-86. Cf. en dernier lieu Saba 2012.

    67 SEG XXXIII, 1040, l. 23-26.

    68 IG VII, 3073, l. 35-37.

    69 Amandry, Hansen 2010, p. 169-174.

    70 Moretti 2012, p. 428-435  ; Moretti, Fraisse, Llinas 2021, p. 213-216.

    71 Hellmann 2013, p. 157.

    72 CID II, 62, I, A, l. 12-15.

    73 CID II, 49, A, I, l. 8-14  ; B, II, l. 7-9.

    74 Amandry 1950, p. 81-85.

    75 IG XI, 203, A, l. 38  ; IG XI, 287, A, l. 46.

    76 IG XI, 287, A, l. 41-85 et 89-122.

    77 Marginesu 2019b, p. 19, avec la bibliographie antérieure.

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    Mathé, V. (2023). Construire dans un espace cultuel en Grèce classique et hellénistique : aspects socio-économiques et pratiques. In O. de Cazanove, A. Esposito, N. Monteix, & A. Pollini (éds.), Travailler à l’ombre du temple (1‑). Publications du Centre Jean Bérard. https://doi.org/10.4000/books.pcjb.8750
    Mathé, Virginie. « Construire dans un espace cultuel en Grèce classique et hellénistique : aspects socio-économiques et pratiques ». In Travailler à l’ombre du temple, édité par Olivier de Cazanove, Arianna Esposito, Nicolas Monteix, et Airton Pollini. Naples: Publications du Centre Jean Bérard, 2023. https://doi.org/10.4000/books.pcjb.8750.
    Mathé, Virginie. « Construire dans un espace cultuel en Grèce classique et hellénistique : aspects socio-économiques et pratiques ». Travailler à l’ombre du temple, édité par Olivier de Cazanove et al., Publications du Centre Jean Bérard, 2023, https://doi.org/10.4000/books.pcjb.8750.

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    Cazanove, O. de, Esposito, A., Monteix, N., & Pollini, A. (éds.). (2023). Travailler à l’ombre du temple (1‑). Publications du Centre Jean Bérard. https://doi.org/10.4000/books.pcjb.8683
    Cazanove, Olivier de, Arianna Esposito, Nicolas Monteix, et Airton Pollini, éd. Travailler à l’ombre du temple. Naples: Publications du Centre Jean Bérard, 2023. https://doi.org/10.4000/books.pcjb.8683.
    Cazanove, Olivier de, et al., éditeurs. Travailler à l’ombre du temple. Publications du Centre Jean Bérard, 2023, https://doi.org/10.4000/books.pcjb.8683.
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