Les terrains d’aventure dans les années 1970-1980, retour sur une expérience
Témoignage : entretien avec Serge Gerbaud
Note de l’éditeur
Dans le cadre de l’atelier « Animer les quartiers et les villages : une longue histoire », qui s’est tenu aux Archives nationales le 7 novembre 2019, Gilles Raveneau, anthropologue, a évoqué les aires de jeu libres, friches laissées à la libre imagination des enfants des villes, appelés terrains d’aventure. À la suite de cet atelier, un projet de recherche portant spécifiquement sur les terrains d’aventure a vu le jour1. Le présent article a été écrit après-coup, en introduisant des extraits d’un entretien réalisé avec Serge Gerbaud, ancien animateur socio-culturel et responsable d’un des tout premiers terrains en 1972, à Bouffémont, dans le Val-d’Oise. Croisant analyses universitaires et récit empreint de recul, il permet d’appréhender une expérience qui renaît aujourd’hui sous de nouvelles formes.
Texte intégral
1À partir des années 1930, l’avènement des loisirs et la diversification des lieux qui leur sont consacrés, le développement des mouvements de jeunesse et des pratiques de plein air comme celui des projets d’éducation populaire se traduisent par l’apparition de nouvelles institutions et de nouveaux équipements : écoles de plein air, camps de vacances, colonies, auberges de jeunesse, clubs et foyers de jeunes, maisons pour tous, etc.2. Ces équipements socio-culturels et ceux qui les ont animés ont été portés par une forme d’utopie et de lutte visant la mixité sociale et l’appropriation collective de l’espace par ses usagers dans les années 1950 et 19603, au moment où les villes se transformaient et s’étendaient en périphéries et en banlieues – ce qu’Henri Lefebvre a synthétisé dans un ouvrage et une formule qui ont fait long feu : « le droit à la ville4 ». L’auteur y évoque la disparition des quartiers populaires de Paris au profit d’une ville dominée par le fonctionnalisme, le bureaucratisme et animée par la recherche du profit et de la rentabilité5. C’est dans ce contexte qu’apparaissent et se développent en France les terrains d’aventure, équipement urbain consacré aux enfants.
2Le concept du terrain d’aventure est né au Danemark en 1943 pendant la Seconde Guerre mondiale avec la reconstruction des villes et le manque d’équipement pour la jeunesse dans les quartiers les plus éprouvés par la guerre. Occupant les terrains vagues des villes européennes bombardées, les junk playgrounds représentaient pour la société d’après-guerre un moyen de prendre en charge la jeunesse déboussolée, dans un climat où les limites entre résistance et délinquance étaient brouillées6. À Emdrup (dans la banlieue de Copenhague), un urbaniste paysagiste, Sørensen, observe que les enfants trouvent sur les chantiers un terrain de jeu idéal.
3Il réalise l’intérêt d’un « terrain vague dans lequel les enfants peuvent créer, construire, rêver et imaginer une réalité ». Il crée alors un espace de jeu clos et réservé à l’usage des enfants sur un terrain vague dans lequel les enfants peuvent jouer, bricoler et construire librement à partir de matériaux simples. C’est la naissance du premier terrain d’aventure. Il s’agit souvent d’un terrain désaffecté, avec un relief mouvementé et boisé si possible, réservé à l’usage des enfants qui peuvent y construire des cabanes et qui se livrent ainsi à toutes sortes d’activités qu’ils imaginent. Des animateurs y sont présents pendant les horaires d’ouverture et en assurent le fonctionnement et la sécurité. C’est un équipement réduit à sa plus simple expression. Il est peu onéreux, nécessite de faibles frais de première installation et de maintenance, ainsi qu’un personnel réduit pour s’en occuper. Ces qualités et le franc succès qu’ils rencontrèrent auprès des enfants permirent de multiplier les expériences7.
4À la fin de la Seconde Guerre mondiale, l’idée est importée en Grande-Bretagne. Les terrains d’aventure y connaissent un essor remarquable dans les années 19508. Dans le courant des années 1960, des terrains sont créés en Suisse puis en Allemagne, en Belgique. Les appellations varient : « terrains bric-à-brac » (skrammellegeplads) au Danemark, « plaine Robinson » ou « jardin Robinson » en Suisse, « espace de jeu d’aventure » (abenteuerspielplatz) ou « espace de construction » (bauspielplatz) en Allemagne et « terrain de jeu d’aventure » (adventure playground) en Grande-Bretagne. Ils apparaissent en France dans les années 1970 sous le nom de « terrain d’aventure » ou « terrain pour l’aventure9 ». Le premier est ouvert à Paris en 1971 et celui où Serge Gerbaud fait ses premières armes à Bouffémont (Val-d’Oise) en 1972. Nous l’avons rencontré chez lui pour un entretien sur son expérience des terrains d’aventure et son engagement dans l’éducation populaire.
Figure 1. Schéma du jardin d’aventure de Bouffémont (Val-d’Oise)

Extrait de Plaines et terrains d’aventure, brochure du Comité enfance du centre socio-culturel de Saint-Nicolas (Laval), 1974, p. 5.
Arch. nat., 19790813/3 [© Arch. nat./Clothilde Roullier].
Figure 2. Description du jardin d’aventure de Bouffémont (Val-d’Oise)

Extrait de « Les espaces de jeux de l’enfant », Jeunesse au plein air, no 85, avril 1975, p. 15.
Arch. nat., 19860457/21 [© Arch. nat./Clothilde Roullier].
Gilles Raveneau – Qu’est-ce vous a conduit, dans votre parcours, au terrain d’aventure ? Comment avez-vous croisé cette expérience ?
Serge Gerbaud – Ce qui m’a aidé dans mon itinéraire, pour mettre tout ça en place, remonte à mes sept ou huit ans quand mes parents m’ont envoyé en colonie de vacances. Là, on m’a demandé d’être le responsable d’une petite équipe. […] J’ai continué, après, dans un « patro » [patronage] où je faisais de la gymnastique. Je devais avoir 14 ou 15 ans. Les éducateurs, les animateurs qui étaient là – qui étaient en fait une famille que j’ai connue longtemps, une famille de 10 enfants dont on disait que j’étais le onzième – m’ont mis le pied à l’étrier en me demandant d’encadrer, d’accompagner certains de nos camarades. Quand on faisait des voyages – parce qu’on allait faire des compétitions un peu partout –, ils m’avaient demandé d’illustrer l’itinéraire, ce qui m’a amené à préparer des choses et à prendre la parole en public. […] Après, j’ai pris quelques autres responsabilités : moniteur de colonie de vacances, encadrant de camps d’adolescents, directeur de colonie de vacances dans le Jura. Ensuite, j’ai continué de faire des choses comme directeur de foyer de jeunes travailleurs.
Et puis, c’est en rejoignant les centres sociaux, en 1972 à peu près, que le délégué de l’époque, Jean Busson10, m’a dit : « Tiens, il y a une association qui cherche du monde. » J’étais un peu entre deux, en train de rechercher un point de chute, et il m’a dit : « Va donc voir les gens de l’APES », l’Association pour les équipements sociaux, qui intervenait dans les nouveaux ensembles immobiliers – c’est comme ça que cela s’appelait. Le directeur, Marcel Bou, et la présidente, Laure Eteneau11, recherchaient quelqu’un pour « encadrer » le jardin d’aventure de Bouffémont qui avait été mis en route à peu près un an avant.
Gilles Raveneau – La revendication du « droit à la ville », déjà ébauchée dès le milieu des années 1960 par l’intermédiaire des GAM [groupes d’action municipale], qui visaient l’implication de la population dans les affaires de la cité, contribue à modifier le regard porté par les milieux politiques sur les problèmes urbains. Le choc de 1968, auquel s’ajoute l’accumulation des critiques à l’égard des grands ensembles, va accélérer cette prise de conscience12. La croissance urbaine, l’augmentation de la délinquance juvénile, l’inadaptation des enfants au mode de vie urbain et le manque d’équipements pour la jeunesse dans les années 1970 en France réunissent tous les éléments d’une crise. C’est dans ce contexte qu’apparaissent et se développent en France les terrains d’aventure. Quelle est la situation en mai 1973 lorsque vous arrivez à Bouffémont pour vous engager sur le terrain d’aventure ?
Serge Gerbaud – Bouffémont est dans le Val-d’Oise, sur une ligne de chemin de fer qui part de la gare du Nord et qui va jusqu’à Montsoult. Bouffémont était un tout petit village un peu marqué par le château du baron Empain13, le long de la forêt de Montmorency. Il y avait un territoire sur lequel l’association APES et, surtout, l’organisme dans lequel était cette association – qui s’appelait l’OCIL, l’Office central interprofessionnel de logement, créé en 1953, pour ce que nous appelions à l’époque « le 1 % patronal » et qui est devenu « le 1 % logement » –, construisaient plus de 100 000 logements en Île-de-France, dans la région lyonnaise et dans la région bordelaise.
À côté de la construction des immeubles ou des pavillons, il y avait l’APES qui prenait en charge d’autres sujets. L’APES est née en 1961, bien avant donc. Mais il y avait ce que l’on a appelé des « réalisations », c’est-à-dire des agents de développement, des gens qui développaient de la vie sociale et associative à partir d’équipements. Quand les immeubles étaient construits, il y avait une législation qui faisait naître ce qu’on appelait des « mètres carrés sociaux », devenus après les « locaux collectifs résidentiels », dont certains ont été plus ou moins regroupés pour donner naissance à des centres sociaux ou des maisons de jeunes, selon les cas de figure.
Il y avait donc cette volonté, de la part de cet organisme – qui est d’origine patronale, très clairement, même si, après, il est devenu paritaire avec les syndicats de salariés –, une volonté d’accompagner les nouveaux habitants dans les nouveaux ensembles d’une façon un peu plus collective, d’où la conception de lieux pour qu’ils se rassemblent, des espaces de jeux, des aménagements divers et variés. L’APES s’était dotée d’un chargé des espaces de jeux. Je n’y étais pas encore, c’était Jean-Louis Laure. Il était conseiller en espace de jeux à l’OCIL. Quand il y avait une programmation de construction d’immeubles ou autre chose, il faisait partie de l’équipe de la programmation et il suggérait que l’on aménage ceci ou cela d’une façon ou d’une autre. […] Au moment de la construction des immeubles à Bouffémont, dans un quartier qui s’appelait Les Hauts Champs, juste à côté de la gare, il y avait un terrain disponible. L’OCIL14 a construit dessus des pavillons et des immeubles HLM, une école, une maison pour tous, un centre social et a aménagé, ou a fait aménager, un jardin d’aventure. À l’époque, c’était dans l’air du temps. Pour cela, Jean-Louis Laure a fait appel à un couple d’architectes paysagistes : Michèle et Jean-Claude Saint-Maurice. À ce moment-là, Jean-Louis était déjà au Codej, car il a participé à la création du fameux Codej, le Comité de développement des espaces pour le jeu, avec Valia Tanon, sa présidente, et d’autres organismes de construction : la Caisse des dépôts, le Foyer du Fonctionnaire, La Sablière [les HLM de la SNCF].
Gilles Raveneau – Le Comité de développement de l’espace pour le jeu a été créé en 1971. Qui en faisait partie à l’époque et quel était son objectif ?
Serge Gerbaud – Il y avait des bailleurs, des psychologues, des sociologues, des architectes et puis les mouvements d’éducation populaire : les Francas, les Ceméa, et tous ces gens-là15. Ça réunissait tout ce monde pour gamberger sur les terrains d’aventure, et ensuite, sur l’aménagement des cours d’école, sur les fermes pour enfants, etc. […] Le Codej avait la volonté de favoriser, valoriser ce type d’équipements au service des gamins d’un quartier donné. En même temps, j’ai un peu suivi le Codej dans la mise en place aussi de terrains d’aventure à Paris, dans le XIIIe, et puis j’ai facilité le terrain d’aventure du XXe après, l’ADATACR16, avec Michel Lespagnol, parce qu’il y avait un terrain disponible. Rue Vitruve, rue des Orteaux, juste à côté. Maintenant, je ne sais pas ce qu’est devenu ce terrain, mais il y avait un terrain vague, au pied des immeubles. La rue des Bois, aussi : là, c’était l’association Place des Fêtes Avenir qui avait mis ça en place. Mais tous ces gens-là étaient en lien très étroit avec le Codej, puisque c’était quand même cette association qui était porteuse du « principe ».
Gilles Raveneau – Vous voulez dire que le Codej était la tête pensante et la cheville ouvrière du dispositif des terrains d’aventure ?
Serge Gerbaud – Tout à fait. Le Codej avait fait un voyage d’études à Londres en 1972. En 1974, nous avons refait un voyage d’études à Copenhague, dans le quartier de Tivoli où s’était développé de longue date ce type d’équipement. J’y étais. J’ai participé à ces choses-là aussi. Soyons clairs, quand j’ai été embauché à l’APES, je ne savais pas ce qu’était un terrain d’aventure. En mai 1973, j’ai découvert le sujet. Je n’étais pas complètement en dehors d’une pédagogie ouverte ou d’un certain nombre de choses que l’UFCV, avec les moniteurs de colonie de vacances, m’avait un peu inculquées. Néanmoins, la terminologie « terrain d’aventure » m’était totalement étrangère. J’ai mis les pieds dans le sujet à Bouffémont avec ce fameux jardin d’aventure.
Gilles Raveneau – Pourquoi « jardin » précisément ? Pourquoi l’avoir appelé « jardin d’aventure » à l’époque ?
Serge Gerbaud – À mon avis, Bouffémont n’est pas un ensemble très dense sur le plan urbain, ce n’est pas un quartier central d’une ville nouvelle, il n’y a pas de grands immeubles. Deuxième élément, le terrain est assez grand. Cela faisait l’équivalent d’un terrain de foot, à peu près. À côté du jardin d’aventure, ils ont fait une piste d’éducation routière et, après, il y a eu un terrain de foot. Tout cela dans le même ensemble. Et il y avait l’école qui était tout proche aussi, puisqu’on travaillait en bonne intelligence avec les enseignants, surtout quand les gamins quittaient l’école le soir. Donc, ce jardin d’aventure, en fait, c’était une friche que les architectes et l’association avaient mise en place… Il y avait une butte, une grosse butte de terre à cause des travaux. Cette butte a été rassemblée et est devenue un volcan dans la tête des gamins. Et l’association avait mis en place, là-dessus, un wagon de chemin de fer, un wagon de marchandises.
Gilles Raveneau – Était-ce le bureau d’accueil et le local de rangement, l’équivalent des containers d’aujourd’hui, dans lequel on peut entreposer des outils, du matériel de bricolage et que l’on peut fermer ?
Serge Gerbaud – Absolument. On y rangeait les outils. C’était le « local ». […] Le jardin d’aventure fonctionnait déjà depuis un an avec une équipe d’animation. De mémoire, il y avait une responsable, on va en parler, c’était Dominique d’Allaines, et il y avait deux ou trois animateurs et animatrices. Voilà, c’est tout. C’était ouvert. L’équipe d’animation était présente à certaines heures, en général, en fin de journée, les mercredis ou jeudis – je ne sais plus si c’était déjà passé – et au moment des vacances scolaires, présente sur le terrain, accueillant ceux qui voulaient venir et ensuite demandant tranquillement ce qu’ils avaient envie de faire ou de ne pas faire, montrant ce qu’il y avait comme disponibilité d’outillage.
Qu’est-ce qu’on faisait ? Du feu, des cabanes, des plantations éventuellement, dans certains cas – et là, c’était le cas –, des clapiers pour accueillir des lapins. Bref, les gamins faisaient ce qu’ils avaient envie de faire.
Et puis, plusieurs fois, souvent, les parents accompagnaient leurs gamins pour voir un peu ce qui se passait. J’ai vu des parents blêmes ; ils se demandaient : « Mais, attends, c’est quoi ? Vous laissez nos gamins jouer avec des clous et avec des marteaux ? Vous les laissez faire du feu, vous les laissez comme ça ? Vous ne les surveillez pas ? » « Eh bien non, on ne surveille pas. On est avec eux, on fait en sorte qu’il n’y ait pas de risque majeur. Néanmoins, on accompagne les idées qu’ils peuvent avoir, pour les mettre en place. »
[…] Il y a eu aussi des courses de vélo. À un moment donné, comme c’était à la campagne, il y avait des petites routes autour, il y en a qui sont venus avec leur vélo. Ils se regroupaient et puis ils partaient avec le vélo. Cela a servi aussi, sur le fameux « volcan », à faire du gymkhana ou des « trucs » comme ça.
[…] Il a fallu que les animateurs, qui étaient là, passent parfois plus de temps à essayer de convaincre les parents qu’à observer ce que faisaient les gamins ou à leur donner un coup de main. Les adultes étaient presque plus rétifs à cette pédagogie que les gamins qui étaient heureux de cela. En plus, le jardin en question avait, tout en bas – c’était un peu pentu –, un petit ruisseau, sur le bas du terrain, un petit filet d’eau de rien du tout, à partir duquel tu peux faire des tonnes de choses : des barrages, des moulins, tout ce que tu veux. Il y avait matière à inventer, s’exprimer, exploiter et expérimenter. J’ai découvert cela au fur et à mesure. En même temps, j’ai lu ce qui se passait. Je faisais allusion tout à l’heure à Dominique d’Allaines qui a écrit un bouquin après, sur cette expérience17. Elle avait bien épousé, à ce qu’il me semblait, la démarche. Je pousse un peu le bouchon, mais est-ce que c’était un tout petit peu de relents de soixante-huitard attardé ? Parce qu’on était en 1973.
Gilles Raveneau – En effet, c’est une époque de contestation et de renouveau qui porte un mouvement fondé sur des valeurs centrées autour de la liberté, de l’autonomie et de la créativité de l’enfant. Les conceptions de l’enfant, la pédagogie scolaire et périscolaire s’en trouvent profondément modifiées dans un sens antiautoritaire. L’enfant et l’élève deviennent alors des sujets qui peuvent intervenir dans la pédagogie dont ils sont l’objet. La vocation utopique de cette expérience se réalise dans la constitution des terrains d’aventure comme lieu de vie enfantin idéal, propice à une adaptation de l’éducation des enfants, à un apprentissage de l’autonomie et de l’autodiscipline. Dominique d’Allaines-Margot a un parti pris politique en faveur de l’enfant dans son ouvrage et souligne les décalages entre le cadrage administratif et les pratiques qu’il autorise, non ?
Serge Gerbaud – Elle était un tout petit peu critique. Elle avait dit qu’elle s’en irait. C’est pour cela qu’on m’a embauché. Il y avait aussi une certaine tension entre elle et le directeur de l’association, Marcel Bou, ancien instituteur, permanent national des Associations populaires familiales, qui avait été embauché, après, à l’APES, comme directeur de cette association et qui était plutôt ouvert à la démarche. Mais, avec Dominique, ils s’étaient accrochés plus ou moins, plusieurs fois. Ce qui fait qu’elle avait décidé de s’en aller. Quand elle a été partie, après, elle a écrit un bouquin18 où elle était un peu sévère. Son départ et mon arrivée traduisaient une reprise en main.
Gilles Raveneau – Par qui ?
Serge Gerbaud – Par les adultes, par l’organisation, par l’association. Elle pensait que les gens de l’association n’avaient pas bien compris le côté libre, ouvert et non interventionniste de la place des animateurs au sein même du terrain d’aventure.
Gilles Raveneau – Donc, lorsque vous arrivez, elle est encore là ?
Serge Gerbaud – Oui, elle est encore là, tout à fait. Elle est encore là pour trois mois, puisqu’elle n’a pas fait la période d’été. J’ai été embauché en mai, on a été en mai/juin ensemble et puis elle est partie. J’ai pris le relais à ce moment-là.
Gilles Raveneau – C’est donc vous, à ce moment-là, qui avez pris la responsabilité du terrain ?
Serge Gerbaud – Oui, tout à fait, j’ai été embauché pour cela.
Gilles Raveneau – Pouvez-vous me raconter cette période ? Vous arrivez en mai, vous n’avez jamais entendu parler des terrains d’aventure, bien que vous soyez quand même déjà ouvert à différents types de pédagogie, assez libres. Que se passe-t-il ? Comment apprenez-vous ? Est-ce que vous vous souvenez de vos premières impressions, de vos premiers choix, de vos premiers mouvements ? Vous arrivez là, ce terrain est déjà ouvert. Il vit, il y a des enfants, on y fait du feu, il y a de l’eau, des planches, des clous et des marteaux…
Serge Gerbaud – J’ai regardé. J’ai regardé. J’avais lu un peu de choses – pas énormément, mais quand même – sur cette démarche. Il y avait déjà ce que le Codej avait un peu produit et cela m’a aidé. J’ai eu des échanges avec Jean-Louis Laure puisqu’il travaillait dans l’association. Et puis, j’ai rencontré Valia Tanon très rapidement. […]. Ce qui m’a aidé à regarder, c’est que Dominique était encore responsable au moment précis où je suis arrivé. Pendant deux ou trois mois, j’étais en observateur.
Et puis, la mayonnaise a pris, doucement, tranquillement. J’avais plutôt une assez bonne relation avec les gamins. Les autres animateurs et animatrices qui étaient déjà là ont continué. D’ailleurs, Didier Blanloeil, qui y était animateur, va continuer après moi, puisqu’on va me demander de faire autre chose. C’est lui qui accompagnera ensuite le terrain d’aventure.
Ma première démarche a donc été de regarder, d’observer, de comprendre et de constater que les gamins avaient une énergie et une imagination fabuleuses, et qu’il n’était pas nécessaire de leur faire des suggestions, de les organiser, de leur proposer. […]
Gilles Raveneau – Si j’ai bien compris, bien qu’étant un animateur déjà diplômé et avec une solide expérience, votre formation au terrain d’aventure est une formation « sur le tas ». Parce qu’il y a quand même une différence avec votre expérience précédente de l’animation, avec celle des colonies de vacances à 300 enfants où il s’agit d’un autre fonctionnement. Lorsque vous arrivez sur le terrain d’aventure, c’est différent. Une grande liberté est laissée aux enfants. Comment parvenez-vous à articuler les deux choses à ce moment-là ? Il y a quand même un changement. Une forme d’acculturation s’opère, non ? Pouvez-vous revenir sur cela et le raconter ?
Serge Gerbaud – Pour autant que je puisse m’en souvenir ou le reformuler bien sûr. À ce moment-là, il était nécessaire et je souhaitais vraiment reprendre un travail « pédagogique » ; c’était ma démarche. Je souhaitais accompagner, encadrer. Je sortais des foyers de jeunes travailleurs, des choses comme ça, donc je souhaitais avoir ce type de « présence ». Mais, en même temps, oui, le concept m’était totalement inconnu. Je me suis donc fait un petit peu hara-kiri quelque part pour ne pas intervenir, pour être le plus distancié possible. Parce que de prime abord, l’envie de suggérer, de donner une idée, de prétendre qu’il valait mieux faire comme ci que comme ça, c’était assez spontané. Mais j’avais compris aussi que ce n’était pas du tout la démarche dans laquelle je m’inscrivais. J’avais donc à me « retenir » d’une façon assez forte, tout en me permettant aussi de voir que, finalement, c’était très positif, c’était très souhaitable. Et cela me donnait une relation avec les gens autour de moi – notamment avec les enfants, gars et filles –, complètement différente de celle que j’avais pu avoir avant, en encadrant comme on disait. D’ailleurs, pour nous, sur le terrain d’aventure, il n’y avait pas de directeur/directrice ni d’animateur : il y avait des adultes responsables, pas autre chose. Il y avait un peu cette démarche-là. Voilà.
[…] Le deuxième maire, Michel Coffineau19, avait un de ses gamins qui venait sur le terrain. Lui, il a fallu lui expliquer en long et en large quelle était la démarche – bien qu’il soit élu PS – parce qu’on était à deux pas du Congrès d’Épinay. […] Ce qui fait qu’il fallait vraiment, vraiment expliquer aux adultes, presque en leur disant : « Mais attends, toi, quand tu étais gamin, qu’est-ce que tu aurais aimé vraiment faire ? » Un sur deux disait : « J’aurais voulu faire ce que j’avais envie de faire. » Je disais : « Eh bien, voilà, regarde ce qui se passe. » Mais ils auraient voulu qu’il y ait plus d’encadrement, y compris des productions. C’est pour ça que je note ce côté « productions ». Ils ne supportaient pas que les gamins ne fassent « rien » de palpable à part des choses comme ça. Pour des adultes, ça ne sert à rien ça, ça n’avait aucune valeur à leurs yeux, alors que pour le gamin, c’était une vraie production. Mais les adultes ne comprenaient pas qu’il y ait ce type de démarche. Même les enseignants. Je me souviens, sans m’être « accroché le dentier », avec le directeur de l’école, il fallait vraiment lui dire : « Mais attends, ce n’est pas le même travail. Toi, tu fais un travail, tu fais passer des connaissances. Nous, on est là plutôt pour que les gamins s’expriment eux-mêmes, parce qu’ils ont beaucoup de choses en tête et ils doivent pouvoir l’exprimer sous la forme qui leur convient. » On était quand même sur des planètes différentes.
Gilles Raveneau – Cette planète se réalise dans la constitution des terrains d’aventure comme lieu de vie enfantin idéal, propice à une adaptation de l’éducation des enfants, à un apprentissage de l’autonomie et de l’autodiscipline. Les enfants deviennent des sujets qui peuvent intervenir dans la pédagogie dont ils sont l’objet. Il s’agit ici d’une conception de la vie libre, active et audacieuse, une valorisation de l’autonomie et du droit d’agir, d’expérimenter et de se risquer qui nous renvoie avec quelque nostalgie à une conception de l’enfance, de la vie sociale et de l’éducation qui ont bien changé en quelques décennies... Ce type d’espace semble difficile à imaginer aujourd’hui, quand le discours dominant insiste sur la protection de l’enfant de tout danger, interdisant par exemple les bacs à sable dans les cours d’école. Comment, progressivement, vous appropriez-vous cette démarche du terrain d’aventure, cette philosophie ?
Serge Gerbaud – Ce qui m’a certainement aidé : une licence des sciences de l’éducation. Je dirais un panel suffisamment ouvert de démarches pédagogiques et puis aussi un intérêt pour Montessori, les choses comme ça, qui me laissaient entendre qu’il n’y avait pas qu’un encadrement strict et organisé, mais qu’il pouvait y avoir d’autres approches pédagogiques. […]
Et puis le deuxième lien que je serais tenté de faire aussi, c’est celui de mes implications dans toute une série d’autres associations. Mais c’était un petit peu à la fois dans le cadre de mon travail, mais aussi par sensibilité ou par intérêt, y compris au niveau des centres sociaux, au sens large, mais aussi au niveau d’associations s’occupant d’enfants handicapés. Parce que là aussi, voilà un univers qui est souvent mal connu, mal compris, où il y a des richesses considérables de gamins, même d’ados ou d’adultes, qui s’expriment avec des sourires monumentaux. Une fois qu’ils ont fait quelque chose et que tu le reconnais, que tu le regardes et que tu l’apprécies, c’est du bonheur pas possible ! Donc, tout cela, me semble-t-il, m’a un tout petit peu aidé dans cette structuration. C’est pour ça que tout à l’heure, je parlais de structuration. Il me semble que l’individu que nous sommes ne cesse jamais de se structurer.
Gilles Raveneau – Milieu transformable, éléments et matériaux à disposition et liberté d’action sont les trois conditions essentielles à la source des activités et à la réussite d’un terrain d’aventure. Quel en a été l’équilibre à Bouffémont ?
Serge Gerbaud – Pour ce qui était du matériel de base, on essayait de récupérer sur les chantiers : des palettes, des « trucs » à la scierie, après, il y avait pour faire le feu. Un moment, il y a eu de la peinture aussi qui s’est faite sur un mur de béton qui était là sur le bord, donc là, il y avait une petite enveloppe financière. Mais l’essentiel était de la récupération. […] Il n’y avait besoin de rien d’autre pour les cabanes. Pour les lapins, ils allaient dans les jardins, ils demandaient des carottes ou des « conneries » comme ça. Et puis, pour les graines pour les poules, on allait au BHV ou des choses de cette nature. Et les gamins eux-mêmes apportaient parfois des « trucs », des « machins ». Je me souviens qu’il y en a eu un, un jour, qui a amené une poussette pour bébé. Alors, la poussette a servi, je ne te dis pas ! Eh oui, parce qu’on peut monter à un ou deux sur une poussette et le troisième qui pousse. Bref, vous imaginez le bonheur qu’il y avait à grimper, à monter, à descendre. Enfin, des toboggans, en veux-tu en voilà. Des choses de cette nature. Mais ça, ça ne dure pas non plus. Donc, de temps en temps, il y avait une benne, et on faisait un peu d’ordre. On nettoyait un petit peu.
Gilles Raveneau – Alors, c’était les adultes qui nettoyaient ou bien c’était fait avec les enfants ?
Serge Gerbaud – Toujours avec les enfants. C’étaient les adultes qui disaient : « Bon, là, on va mettre un peu d’ordre ensemble. On regarde ce qu’il faut avec les uns ou les autres : qu’est-ce qu’on garde, qu’est-ce qu’on ne garde pas ? On enlève ce que l’on ne garde pas. » Et puis, ça permettait, parfois, de faire repartir une nouvelle activité ou un nouvel usage de ce qu’il y avait. Je prends un exemple : un jour, on avait récupéré une carcasse de bagnole. On a mis la carcasse de bagnole. La voiture, elle a servi de cabane, de ceci et de cela. Puis, à un moment donné, on s’est dit : « Bon, c’est bien. Mais les gamins jouaient de moins en moins dedans. » Mais, dans la bagnole il y avait des banquettes. C’était une Méhari, une Citroën, une grosse voiture carrée, avec, devant et derrière une banquette. La bagnole n’avait plus de roues, je ne sais plus s’il y avait encore un moteur. Bref, l’idée a été : « On dégage la carcasse, mais on garde les deux sièges. » Et les gamins les avaient mis dans un coin et ça devenait un lieu de tranquillité. […] Dès l’instant où on voyait un chantier, parce qu’il y a eu le chantier des immeubles à côté, parce qu’après il y a eu d’autres immeubles qui se sont construits – il y a eu une résidence pour personnes âgées, il y a eu un certain nombre de choses –, à chaque fois qu’il y avait un chantier, on allait récupérer des « trucs » divers et variés. Et puis, on est allés au BHV aussi pour acheter des clous, des marteaux, des scies, des égoïnes ou des trucs comme ça.
Gilles Raveneau – Donc, j’imagine qu’il y avait de temps en temps des cabanes qui étaient construites et finalement détruites ?
Serge Gerbaud – Eh oui. Parce qu’il y avait des cabanes qui étaient plus belles les unes que les autres. Il y en avait qui étaient sur pilotis, ce qui fait qu’il y en avait qui habitaient en bas et puis d’autres qui habitaient au-dessus ou en dessous. Donc, ça se « chicorait » de temps en temps. Il y en a une, un jour, qui a été construite en haut, quasi en haut du « volcan ». Tout le monde a pensé que c’était celui qui voulait devenir le chef. Alors, les autres sont venus, et en l’absence des uns ou des autres, ils ont mis la cabane par terre, etc. Une partie du bois a servi à être sculptée, une autre à être brûlée. […] En général, on se donnait comme principe de laisser le conflit, je dirais, non pas s’envenimer, mais vivre et mourir de sa belle mort. Quand c’était possible. Jusqu’à ce qu’il n’y ait pas mort d’homme. [Rires] Parce que, quand même, on avait un peu cette inquiétude-là : on ne voulait pas que les gamins se battent. Moi, je n’ai pas souvenir de les avoir vus agressifs, se battre les uns contre les autres, non. Il y avait des invectives, il y avait de la démolition. C’était presque par produit interposé, c’est-à-dire : « Je détruis plutôt ce que tu as fait que de te détruire toi-même. » Il y avait un peu de ça. Et à ce moment-là, il y avait souvent un échange, quand même, avec le gamin, où les gamins, selon le cas de figure, pour leur demander ce qu’ils pensaient de ce qui s’était passé. Et comment on aurait pu l’éviter. Voilà, c’est tout.
Gilles Raveneau – Sur le terrain, à l’époque, aviez-vous élaboré des règles de fonctionnement du terrain ? Aviez-vous affiché les règles de base collectives, des choses de ce type ? Et si oui, comment l’aviez-vous fait ?
Serge Gerbaud – Ah oui, oui. On a écrit collectivement – je ne sais plus comment on l’avait appelé d’ailleurs –, une sorte de mode d’emploi du terrain. Notamment autour des outils : « J’emprunte, je rapporte. » Je ne sais plus ce qu’on avait, mais, enfin, il n’y avait pas d’interdits au sens fort, il y avait simplement des rappels qu’on avait élaborés ensemble.
Gilles Raveneau – Avec les enfants ?
Serge Gerbaud – Avec les gamins, oui. Même si, au final, au moment de la rédaction, les adultes y ont mis un peu leur patte. […] Elles étaient affichées. Au moment de la baraque, il y avait un panneau, avec les horaires de notre présence – ce n’était pas les horaires d’ouverture, c’était les horaires de notre présence –, et puis, il y avait le mode d’emploi et deux ou trois téléphones si vraiment il y avait besoin. On nous l’avait demandé, à ce moment-là. Jeunesse et Sport était venu « agréer » le terrain, parce qu’on avait fait comme un centre de loisirs sans hébergement – à l’époque, ça ne s’appelait pas comme ça. On avait une subvention de la ville, et puis il y avait un agrément Jeunesse et Sport pour qu’on puisse accueillir les gamins. C’était ouvert, c’était libre. Et on avait l’un des représentants de Jeunesse et Sport du département qui était venu, avec qui on était resté longtemps en lien et qui était, lui, très partant dans la démarche.
Gilles Raveneau – Si les terrains d’aventure semblent être en France des espaces éducatifs appartenant au passé, notre programme de recherche TAPLA [« Des Terrains d’aventure du passé/pour l’avenir »] fait au contraire l’hypothèse qu’ils sont une ressource du passé propre à être expérimentée à nouveau et dont les filiations se laissent voir à travers différents dispositifs actuels20. Et en effet, comme vous le savez, nous assistons depuis deux ou trois ans, parallèlement à la constitution de nos recherches, à un intérêt renouvelé pour ces espaces d’apprentissage et d’expérimentation par le jeu de la part des Ceméa en particulier. Cette année 2020, vous savez qu’à Angers il y a eu une expérience pendant tout l’été, juillet, août et septembre. Quelle hypothèse faites-vous de l’avenir des terrains d’aventure aujourd’hui ?
Serge Gerbaud – J’ai l’impression que c’est une production éphémère. Elle repose bien sûr sur des volontés, des engagements volontaires, d’abord d’un groupe de gens – habitants ou périphérique d’habitants – parce qu’il faut quand même qu’il y ait une articulation avec les gens du cru, c’est indispensable. Deuxièmement, il faut qu’il y ait une dimension pédagogique, des gens qui s’engagent à accompagner, à encadrer, à être présents. Ça veut dire aussi qu’il faut qu’il y ait un troisième élément : des flux financiers, sous des formes diverses et variées qui permettent au terrain d’exister, d’être alimenté, d’être enrichi, d’être équipé, à des personnels d’être présents et donc d’être rémunérés. Et puis qu’il y ait de l’information, de la publicité, de façon à ce que ce ne soit pas quelque chose à part. Si ça pouvait irriguer la tête des uns et des autres, à commencer, notamment – parce que ce n’est pas le même métier tout à fait –, par les enseignants, d’où le rôle vis-à-vis des « pédagos » ou dans les écoles de formation, peu importe, mais qu’il y ait, en permanence, une instillation de ce type de démarche qui, aujourd’hui, existe peu. Mais j’ai l’impression qu’elle réapparaît, disparait, réapparaît, disparaît… Je n’ai pas vu, et je ne sais pas si ça existe, des choses qui soient pérennes sur les vingt dernières années. Je ne suis pas sûr. S’il y en a, je veux bien voir et essayer de comprendre pourquoi. Mais, je dirais même, dans nos articulations avec les Ceméa, avec les Francas, avec l’UFCV, etc., au niveau national, tous ces « meneurs de jeu » sont prêts à faciliter l’émergence d’une réalisation ou d’une autre, mais ne l’intègrent pas, me semble-t-il, comme étant un continuum verrouillé dans leurs propres projets.
Gilles Raveneau – Donc pour vous, le terrain d’aventure…
Serge Gerbaud – C’est une aventure. [Rires]
Notes de bas de page
1 Projet Terrains d’aventure du passé/pour l’avenir [TAPLA], soutenu par le Labex Les passés dans le présent, pour les années 2020-2022. https://tapla.hypotheses.org/
2 Gérard Cholvy, Histoire des organisations et mouvements chrétiens de jeunesse en France (xixe-xxe siècles), Paris, Cerf, 1999. Alain Corbin (dir.), L’avènement des loisirs 1850-1960, Paris, Aubier, 1995. Joffre Dumazedier, Sociologie empirique du loisir. Critique et contre-critique de la civilisation du loisir, Paris, Seuil, 1974. Joffre Dumazedier, Révolution culturelle du temps libre 1968-1988, Paris, Méridiens Klincksieck, 1988. Michel Ragon, Histoire de l’architecture et de l’urbanisme modernes, 3 vol. (t. 1 : Idéologies et pionniers, 1800-1910 ; t. 2 : Naissance de la cité moderne, 1900-1940 ; t. 3 : De Brasilia au post-modernisme, 1940-1991), coll. « Point Essais », Seuil, 1991. Gilles Raveneau et Olivier Sirost, Anthropologie des abris de loisirs¸ Nanterre, Presses universitaires de Paris Ouest, 2011.
3 Jean-Pierre Garnier et Denis Goldschmidt, La comédie urbaine ou la cité sans classe, Paris, Maspero, 1978. Grégory Busquet, « L’idéologie et l’espace dans les années 1960-1970 », dans Imaginaire, territoires et sociétés. Contribution à un déploiement transdisciplinaire de la géographie sociale, éd. par Laurent Viala et Stéphane Villepontoux, Montpellier, CNRS-Université Paul Valéry, 2007, p. 311-324.
4 Henri Lefebvre, Le Droit à la ville, suivi de Espace et politique, Paris, Anthropos, [1968] 1972.
5 Laurence Costes, « Le Droit à la ville de Henri Lefebvre : quel héritage politique et scientifique ? », Espaces et sociétés, 1, nos 140-141, 2010, p. 177-191.
6 Roy Kozlovsky, Adventure Playgrounds and Postwar Reconstruction. In Modern Childhoods: History, Space, and the Material Culture of Children; An International Reader, New Brunswick, Rutgers University Press, 2008.
7 Gilles Raveneau, « Les terrains d’aventure en France dans les années 1970 ou la contestation en acte de la notion d’équipement socio-culturel », dans Des lieux pour l’éducation populaire, éd. par Laurent Besse et Clarisse Catherine, Tours, Presses universitaires François-Rabelais, 2020. Et Gilles Raveneau, « Les terrains d'aventure en France dans les années 1970-1980, une aventure sans lendemain ? » Des lieux pour l’éducation populaire : conceptions, architecture et usage des équipements depuis les années 1930, Paris, Archives nationales, École nationale supérieure d’architecture Paris-Malaquais, PAJEP, 3-5 décembre 2014 <halshs-03377115>.
8 Arvid Bengtsson, Adventure Playgrounds, London, Crosby Lockwood, 1972.
9 Bernard Vergnes, Pierre Kling et Marie-Christine Guérant, Du terrain ! pour l’aventure…, Paris, François Maspéro, 1975.
10 Ancien délégué général de la Fédération des centres sociaux et socioculturels de France [FCSF] crée en 1921.
11 Fondatrice et déléguée générale de l’Association pour les équipements sociaux [APES].
12 L. Costes, art. cit., p. 184. – M. Ragon, Histoire de l’architecture…, op. cit.
13 Le baron Édouard-Jean Empain, à l’époque riche héritier et président-directeur général du groupe Empain-Schneider. L’affaire Empain a défrayé la chronique au début de l’année 1978, à la suite de son enlèvement à Paris.
14 L’Office central interprofessionnel de logement [OCIL] était aussi aménageur. C’est à ce titre qu’il programmait, finançait et réalisait les équipements de la ZAC qui comprenaient un aménagement paysager, une piste d’éducation routière, un terrain de sport et le jardin d’aventure. Notons que cette appellation était sans doute plus neutre et plus politiquement correcte que celle de terrain d’aventure, un peu comme on parlerait d’un jardin public, car le maire de l’époque et sa majorité étaient très réticents au projet de terrain d’aventure.
15 Il s’agit d’associations et fédérations d’éducation populaire françaises : la Fédération nationale laïque de structures et d’activités éducatives, sociales et culturelles [Francas], Union française des centres de vacances [UFCV], Centres d’entraînement aux méthodes d’éducation active [Ceméa].
16 Association pour le développement et l’animation des terrains d’aventure du quartier Charonne-Réunion (75020).
17 Dominique d’Allaines-Margot, Terrain d’aventure et enfants de cités nouvelles : aperçu d’une expérience, Paris, ESF, 1975.
18 D. d’Allaines-Margot, Terrain d’aventure…, op. cit.
19 Député-maire de Bouffémont à l’époque.
20 G. Raveneau, art. cit. Gilles Raveneau, « Des Terrains d’aventure du passé pour l’avenir », SUD. Volumes critiques, no 4, https://revue.marseille.archi.fr/numero/numquatre/
Auteurs
Professeur d’anthropologie, Université Lumière Lyon 2
UMR 5600 du CNRS, Environnement Ville Société (EVS)
Ancien animateur socio-culturel et responsable d’un terrain d’aventure
Retraité, actif et syndiqué (!)
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