« Doing our own thing » : la légende Postcard de Glasgow et l’attitude de la jeune Écosse
p. 355-374
Texte intégral
1Sans atteindre la dimension culte de Liverpool ou de Manchester, ni prétendre à celle de Memphis, de Nashville, de la Nouvelle Orléans ou de Détroit en Amérique du Nord, Glasgow affirme son statut musical depuis une vingtaine d’années. En 2004, le magazine Time évoquant les jours glorieux du Motown de Détroit, du Merseybeat de Liverpool et de la scène grunge de Seattle dans les années 1990 (Porter, 2004), la qualifie de « capitale européenne secrète du rock » (« Europe’s secret capital of rock music »). En 2013, un sondage national financé par le département marketing de la municipalité (Glasgow City Marketing Bureau) lui accorde le titre de « ville phare des découvertes musicales » (« best city for new music »), distinction reprise par la presse et confortée par une motion présentée au Parlement écossais la même année1. Le texte souligne le nombre impressionnant de concerts offert par la ville (pas moins de 130 par semaine) ; il rappelle également le titre de « Ville Créative de la Musique » décerné2 par l’UNESCO en 2008. Portée par ce climat et une passion personnelle, une petite agence locale y a lancé des visites pédestres centrées sur la musique. L’organisatrice de ces promenades, Fiona Shepherd, explique que l’équipe « a obtenu le soutien d’instances comme le Glasgow City Marketing Bureau qui souhaite développer l’idée. Tout en prenant garde, ajoute-t-elle, à ne pas saboter ce qui en fait tout l’intérêt, à savoir qu’il s’agit depuis le début d’un phénomène grassroots » (Shepherd, 2015).
2Le texte soumis au Parlement écossais mentionne un groupe apparaissant à l’articulation de cette mouvance : Franz Ferdinand. Issu de la scène musicale et artistique indépendante du Glasgow des années 1990, ce groupe rencontre un succès international en 2004. Son chanteur Alex Kapranos est l’un des ambassadeurs de la ville auprès de l’UNESCO et celle-ci doit au groupe une grande partie de l’intérêt porté à sa scène musicale passée et présente. C’est particulièrement vrai de l’héritage laissé par le label mythique du début des années 1990 qui m’intéresse ici : Postcard Records.
3Franz Ferdinand évoquent ainsi à leurs débuts l’influence d’Orange Juice, groupe phare de Postcard. Domino Records, qui sort le premier album de Franz Ferdinand en 2004, saisit l’occasion et propose dans les années qui suivent des compilations exhaustives de deux groupes de Postcard, Josef K et Orange Juice. Emmené par Edwyn Collins, ce dernier naît à Glasgow autour de 1976. D’abord appelé Nu-Sonics, le groupe vient en effet offrir un son nouveau, unique en son genre, fait de guitares métalliques, aux rythmes et paroles enjoués, « annonçant le retour à un romantisme assumé » (Reynolds, 2005 : chap. 18) et « mêlant le vague à l’âme d’un Noel Coward à l’assurance d’un Lou Reed » (King, 2012 : 69). Alan Horne, qui gravitait autour de la formation à ses débuts, fonde Postcard Records of Scotland en janvier 1980, dans son appartement en colocation du West End de Glasgow. Dès son tout premier single (45T), le label affiche son ironie et son ambition tant par sa devise « The Sound of Young Scotland », clin d’œil au « Sound of Young America » de la Motown, que par son identité graphique se jouant des clichés écossais, deux pochettes de 45T faisant ainsi figurer des personnages en kilt. Outre Orange Juice, le label signe trois groupes (Josef K, Aztec Camera, et les Australiens de The Go-Betweens pour un seul 45T) ; son catalogue ne comporte que dix 45T et un LP (33T), tous sortis entre 1980 et 1981. Orange Juice signe alors chez une major (Polydor), Aztec Camera chez Rough Trade (puis chez WEA) ; Joseph K, quant à eux, se séparent prématurément. À leur sortie, les disques de Postcard sont immédiatement salués par la presse musicale et le public : « Falling and Laughing » d’Orange Juice est élu 45T de la semaine par la revue Melody Maker tandis que les autres titres entrent tous au Top 20 du UK Indie Chart (classement indé britannique), six trouvant même leur place dans le top 10. Les trois groupes écossais qui font l’âme de Postcard apparaissent également dans la compilation culte C81 de NME/Rough Trade3, « chant du cygne du post-punk » (Reynold, 2005 : chap. 19). Au début des années 1990, Alan Horne relance brièvement le label, pour disparaître de nouveau de la scène musicale.
4La brièveté de son existence et de son catalogue, ainsi que l’excentricité des personnalités qui le portent (le maniérisme, la misanthropie et les provocations affichés par Alan Horne à l’égard des médias notamment4) ont fait de Postcard un candidat idéal au fétichisme et à la mythification. Sa longue postérité est unanimement attestée : pour le musicien et écrivain Bob Stanley, « la rugosité et la force DIY de Postcard ont offert une véritable matrice musicale à la nouvelle scène indé underground » (Stanley, 2013 : 581). Pour certains, le phénomène Postcard aurait déclenché une révolution sonique d’ampleur culturelle, « créant une nouvelle façon de penser la guitare qui vint changer la bande-son du quotidien britannique » (King, 2012 : 87-88). Lorsqu’elles évoquent le patrimoine musical de Glasgow, quasiment toutes les personnes impliquées (journalistes, artistes, fans) renvoient à Postcard Records en termes hyperboliques. Une telle emphase narrative ne peut assurément que participer d’un processus de mythification.
5Dès lors, la question à se poser serait de savoir dans quelle mesure « l’ère » Postcard (d’une durée inférieure à deux ans) marque un tournant pour l’identité musicale de la ville, pour son dynamisme et son attractivité. Si l’on en juge par le slogan du label (fût-il ironique) et, surtout aujourd’hui, par les nombreux témoignages locaux et (inter) nationaux, Postcard semble tenu pour le précurseur d’une identité musicale typiquement écossaise. Essentiellement nourri d’entretiens personnels avec des acteurs locaux, cet article se propose d’examiner le rôle de Postcard Records dans la création d’un modèle indé (davantage en termes d’attitude, de posture et d’éthique que de structure économique) et d’un son local. Bien évidemment, il ne peut exister à proprement parler de « son » d’une ville, encore moins d’un pays. Comme l’a montré Sara Cohen pour Liverpool, « la notion même d’un son local particulier implique un fétichisme du lieu » (Cohen, 2007 : 68) ; on pourrait en dire autant de la perception d’une scène locale. Aucun son ni scène ne peuvent être délimités ou circonscrits mais les deux tendront à être mythifiés si des traits distinctifs paraissent avoir influencé d’autres sons et scènes, à l’échelle locale ou internationale. L’un de mes objectifs ici est ainsi de montrer comment la mythologie Postcard a pu se développer à la fois chronologiquement et rétrospectivement.
Postcard Records, années 1980 : aux origines du mythe
6Deuxième ville de l’Empire britannique au xixe siècle, qui devait notamment sa prospérité aux chantiers navals, Glasgow voit sa fortune tourner court à partir des années 1960, avec le déclin de l’industrie lourde. Musicalement, à la suite d’une après-guerre dominée par les groupes de reprises formatés pour les dancings (voir Anderson, 2013), le Glasgow des années 1970manifeste un goût prononcé pour le blues-rock et quelques scènes très influentes : rock progressif, folk-pop, mais aussi Northern Soul, « des bus entiers d’adorateurs du son de Détroit quittant Glasgow chaque weekend pour des nuits blanches à Shotts, voire plus loin encore vers les villes et bourgs du nord de l’Angleterre » (Lowndes, 2014 : 50). L’arrivée du punk écorche quant à elle les oreilles sensibles des autorités locales. Incident fondateur : « l’annulation d’un concert des Sex Pistols programmé le 15 décembre 1976 à l’Apollo de Glasgow, le maire de la ville Peter McCann ayant été le témoin des pitreries grossières du groupe au Bill Grundy Show » (Lowndes, 2014 : 58). Comme tous ceux qui rappellent cette anecdote, Elspeth et Tommy Cherry, spectacteurs assidus de l’underground local au tournant des années 1990, expliquent que « le punk était cen-su-ré ! Ouais, les édiles l’avaient banni. Les patriarches de la ville avaient conféré et décidé que nous n’aurions pas droit à ces sornettes perverses. Ils l’ont donc banni. » (T. Cherry, 20165) S’il n’est pas sûr que cela ait eu une véritable incidence sur la production locale de musique punk, il n’en reste pas moins que les groupes punks de Glasgow sont notoirement rares, le plus connu étant Johnny and the Self-Abusers, préfiguration des futures stars Simple Minds. Le tableau du Glasgow des années 1970 qui se dresse le plus souvent est celui d’une ambiance déprimante de vide et de répression, de créativité bridée, décourageant toute aventure exploratrice, l’avant-garde musicale ne constituant qu’une cible parmi d’autres :
« Ils fermaient des salles, prétextant la rénovation des sièges, toutes les raisons étaient bonnes ; ils auraient voulu supprimer les concerts qu’ils n’auraient pas fait autrement. Mais ils ne s’attaquaient pas qu’au punk ; le Citizens Theatre était aussi visé quand il tentait de programmer des pièces radicales – lui aussi ressentait toute la force du courroux de la municipalité. Ce n’était pas une bonne période pour la culture, la fin des années 1970 à Glasgow. » (T. Cherry, 2016)
7C’est ainsi que Postcard Records, lancé au début des années1980, vient introduire le post-punk dans une ville qui avait ostensiblement banni le punk.
8Comme la plupart des mouvements à la postérité longue, Postcard apparaît en réaction à des tendances passées ou récentes (blues-rock, punk ou post-punk). « Évidemment, Glasgow avait connu d’autres groupes et scènes avant eux, mais c’étaient des dinosaures à côté de ces gamins. Au temps du Alex Harvey Band, c’était grosses têtes d’affiche, grosses salles, grosses villes. » (T. Cherry, 2016) Postcard apporte ainsi quelque chose d’accessible et de frais à la scène musicale, quelque chose qui ne s’était encore jamais vu, ni entendu. Cette nouveauté rafraîchissante tient en partie au défi lancé à la « culture machiste » de la classe ouvrière de Glasgow, manifestée musicalement par son goût pour le blues-rock et socialement par le hooliganisme sectaire de l’époque. Selon Simon Goddard, auteur de Simply Thrilled : The Preposterous Story of Postcard Records :
« Orange Juice n’aurait pas pu naître dans une ville plus tolérante, une ville un peu plus en avance culturellement que ne l’était Glasgow en 1979. Pour la bonne raison qu’il n’y aurait rien eu à quoi s’opposer. Là, il y avait cette culture machiste de pilier de bar, et c’est ça qui les a poussés à se coiffer de toque de trappeur et à jouer la provocation. Être un chanteur parlant d’insécurité sexuelle masculine, le tout en se montrant plutôt efféminé, oser faire ça à Glasgow en 1979, c’était sacrément gonflé, et c’est pour ça qu’ils se sont fait tabasser ! » (Goddard, 2015)
9De fait, comme le rappelle Duglas Stewart (BMX Bandits) :
« Quand Edwyn Collins mettait sa chemise à fleurs, il y avait toujours un gars avec un t-shirt des Whitesnake ou des Doors pour gueuler “Beuarrrkkk ! Je vais me le faire ce fleuriste-là, c’est pas un rockeur !” On ne pouvait pas dire que la ville était de notre côté. On avait plutôt l’impression d’être en lutte avec la norme. » (Stewart, 2014)
10Ce sentiment perdure tout au long des années 1980 si l’on en croit Craig Tannock, acteur clé dans l’essor des studios et salles de concert grassroots de Glasgow :
« On pourrait croire que les groupes comme Orange Juice et The Pastels ou les labels comme Postcard régnaient sur Glasgow. C’était pas ça du tout. En réalité, ils venaient de nulle part, ils n’avaient rien à voir avec Glasgow. Les studios, les magasins de musique, les disquaires aussi, tout ça était supermachiste, comment dire... hyperviril, mais pas dans le bon sens du terme. De la merde, en gros. Bien sûr, il y avait des groupes qui échappaient à ça, mais dans l’ensemble, c’était sinistre, chiant, imbibé de la culture gros bras de la côte occidentale de l’Écosse. » (Tannock, 2016)
11Postcard, cependant, ne constitue pas qu’un pied de nez aux normes de l’époque. C’est aussi une réponse aux évolutions musicales récentes : il s’offre en successeur mélodique du punk, mais constitue une réaction tant à ce que ce dernier était devenu qu’au post-punk lui-même. Postcard a été érigé en symbole du post-punk écossais, figurant en place de choix dans Rip It Up and Start Again, le livre fondateur de Simon Reynolds nommé d’après un titre d’Orange Juice. Mais l’auteur souligne très vite que le label a marqué une rupture au sein du post-punk, le sauvant de son austérité :
« Les mélodies, les chansons d’amour et le fun étaient redevenus cool presque uniquement grâce aux efforts accomplis par le label. […] Postcard et Orange Juice avaient conjointement remis le concept de “pop” sur l’échiquier musical, […] [r]enonçant à la démythification du post-punk6. » (Reynolds, 2005 : chap. 18)
12On pourrait avancer que Postcard a ainsi remythifié le post-punk en associant la préciosité de la pop, discernable également sur les scènes disco et néoromantique de l’époque, à un ethos issu du punk. Comme le relève un fan, les groupes de Postcard « ont repris le principe DIY du punk tout en écrivant de vraies chansons pop bien romantiques » (Lawrence, 2015). Le journaliste français Christophe Basterra insiste également sur la bizarrerie qu’a dû constituer un label mêlant intentionnellement les sonorités du Velvet Underground et de Chic (ajoutons-y également les Byrds), face au puritanisme du post-punk d’alors dont la mélancolie s’assombrit plus encore lorsque meurt Ian Curtis en mai 1980 (Basterra, 2015). À l’opposé, la recette de Postcard repose sur une attitude délibérément mièvre et maniérée, agrémentée d’une bonne dose de joie de vivre :
« Tommy : Ils débordaient d’humour et d’inventivité. C’était très contagieux. On voyait tout de suite qu’ils avaient tout simplement eu la bonne idée, c’était vraiment ça leur richesse, bien plus que l’argent […].
Elspeth : Je me vois encore acheter les 45T d’Orange Juice coloriés à la main ; ça m’épatait... je m’imaginais à table en train de colorier moi-même la pochette. J’étais là à me dire que j’aurais pu le faire aussi ! » (E. & T. Cherry, 2016)
13À n’en pas douter, cette joie de vivre a contribué à l’attachement affectif pour le label manifesté par plusieurs générations de fans.
Du son local à la pop mainstream
14Postcard a su attirer la presse et l’industrie musicales à Glasgow dans les années 1980. Comme le souligne Simon Goddard, « le truc, c’est qu’au lieu de descendre à Londres faire leur numéro pour la presse, ils ont réussi à faire monter Sounds et New Musical Express (NME) à Glasgow. » (Goddard, 2015) De fait, en septembre 1980, Dave McCullough, journaliste de Sounds, « est venu traquer la rumeur à Glasgow » (Goddard, 2014 : 136), suivi un mois plus tard par Paul Morley du NME. C’est ainsi que :
« Postcard est parvenu en l’espace d’un an à faire d’une simple hype la musique de 1981. Les directeurs artistiques londoniens, qui avaient jusqu’ici souffert de myopie chronique, comprirent enfin ce qui se passait et ont débarqué en masse à Glasgow et à Édimbourg. » (Reynolds, 2005 : chap. 18)
15Par la suite, qu’ils aient ou non signé un contrat avec une major, plusieurs groupes de la nébuleuse Postcard font le grand saut des classements indés à ceux du mainstream : Orange Juice avec « Rip It Up » en 1983, The Bluebells avec « I’m Falling » et « Young at Heart » en 1984, Strawberry Switchblade avec « Since Yesterday » en 1985. Pour la plupart cette renommée demeure fugace, mais une poignée, tels Aztec Camera ou Altered Images, connaît un succès plus durable.
16Au milieu des années 1980, Glasgow est une mine d’or pour les maisons de disques nationales en quête de nouveaux groupes. En est surtout ressortie une ribambelle de groupes pop et rock grand public dont certains sont devenus d’immenses stars internationales. Mais le changement n’a pas été qu’une question de public et d’argent : son et image ont été forcément modifiés par cette mutation. À la différence du son « rudimentaire » (Shepherd, 2015) de Postcard qui avait suscité l’intérêt de la profession pour Glasgow, les nouveaux groupes (Del Amitri, Deacon Blue, Hipsway, Hue and Cry, Wet Wet Wet, Love and Money, Texas) offrent « ce vernis rock de stade qui avait si bien servi Simple Minds, les enfants les plus doués de Glasgow » (Galloway, 2015 : 136). Ils sonnent « plus léché », plus « formaté radio », ou « télé », se rappelle Ken McCluskey des Bluebells :
« Après le succès des groupes Postcard, c’est devenu plus papier glacé, très “américain”. On était en plein thatchérisme, MTV venait d’arriver, les vidéos ont pris plus d’importance, il fallait que ça brille pour la télé. On en a rajouté dans le maquillage, la couleur, les costards chics. » (McCluskey, 2014)
17Le succès de plusieurs groupes locaux et l’appétit des majors pour la nouveauté modifient également l’ethos musical :
« Du milieu à la fin des années 1980, c’est le marché grand public qui motivait les groupes ; à Glasgow pendant des années, on aurait dit qu’il n’y avait plus besoin de se produire en concert : il suffisait de se donner une image, réserver une salle de répète, faire venir un directeur artistique, puis, hop, empocher le contrat ! Sans déc ! Le pire, c’est que les mecs créaient des groupes pour faire carrière. Ça a été atroce comme période, on entendait beaucoup de daube. » (Tannock, 2016)
18À la même époque, la pop et le rock du Glasgow grassroots ne semblent pas se revendiquer de la brève révolution Postcard, explique Stephen McRobbie (The Pastels) :
« Postcard a eu une influence extraordinaire ; les gens adoraient le label. Mais ça a duré moins de deux ans, sans véritablement s’enraciner. […] Orange Juice est parti à Londres et après la disparition du label, il ne s’est plus passé grand-chose à Glasgow. Puis est arrivée une nouvelle génération de groupes plus jeunes, comme le nôtre, Jesus and Mary Chain et Primal Scream qui ont lancé une nouvelle scène. Entre les deux, il y a eu un vide. » (McRobbie, 2014)
19Vide qui semble avoir été comblé rétrospectivement, avec l’aide notamment de groupes plus récents comme Franz Ferdinand et Belle & Sebastian reconnaissant l’importance qu’avait eue Postcard pour leur musique et leur vision des choses : chronologie reconstruite ou continuité fantasmée créant pour la presse et les fans un fil narratif idéal dans l’histoire de la pop indé.
20Ceci pourrait expliquer le besoin qu’on ressent chez certains acteurs, comme Stephen Pastel, de minimiser quelque peu l’influence directe de Postcard sur la scène indé. Groupe formé aux alentours de 1981, The Pastels a quant à lui très fortement et durablement contribué au développement d’une communauté très dynamique de musiciens à Glasgow. Cette scène indépendante à la marge, qui connaît son essor à la fin des années 1980, évolue alors autour de lieux emblématiques tels que le Hellfire Club, le Tower Studios de Craig Tannock et bien sûr, Splash One, la boîte club ouverte par Bobby Gillespie de Primal Scream en 1986. « Et puis, reprend Craig Tannock, y’a eu un moment à la fin des années 1980 où les majors ont laissé tomber Glasgow, poum. » (Tannock, 2016) Son collaborateur de longue date, John Williamson, explique :
« À cette époque, tellement de maisons de disques se sont retrouvées collées pour de gros montants par des groupes écossais sans succès qu’autant que je me souvienne, elles n’ont pas dû en signer beaucoup entre 1990 et 1994. Il a fallu se débrouiller et c’est là qu’on a vu apparaître de nouveaux labels. » (Lowndes, 2014 : 2297)
21Le désintérêt soudain des majors pour Glasgow rouvre ainsi le champ à la créativité, faisant émerger plusieurs groupes fortement associés depuis à la ville : Teenage Fanclub, Belle & Sebastian, Mogwai, Arab Strap, The Delgados avec leur label Chemikal Underground et, bien sûr, Franz Ferdinand, pour n’en citer que quelques-uns. Les années 1990 voient également l’essor de la scène dance grâce à laquelle Glasgow connaîtra une renommée internationale autour du mythique Sub Club et de ses nuits Optimo animées par les DJ Keith McIvor et Jonnie Wilkes. On l’a dit, l’héritage de Postcard a été revendiqué par plusieurs de ces groupes des années 1990, par fierté locale notamment.
Anti-Londres ou pro-Glasgow : la création d’un « son »
22Il est à souligner que de nombreux musiciens indépendants des années 1990 et une grande majorité de ceux apparus dans les années 1990 prennent la décision de rester à Glasgow et d’en faire leur base. Cela permet de conforter les plus jeunes ; en la matière l’influence des Pastels est déterminante. Là où Postcard avait donné à la ville une touche de glamour et sa place sur la carte musicale, ces groupes ancrés à Glasgow viennent davantage entretenir sa vitalité :
« Postcard a été un phénomène très bref. Ils ont eu une influence immense, sans réel effet structurel, plutôt un flash de glamour, mais sans importance en termes d’infrastructures. Optimo a été important ; Belle & Sebastian, Mogwai, Teenage Fanclub... Tous ces groupes indépendants. En restant sur place, ces musiciens ont influencé les gens des beaux-arts qui à leur tour sont restés. » (McRobbie, 2014)
23De même, quand il évoque la scène florissante du milieu des années 1990, Craig Tannock insiste sur le fait que les musiciens ne ressentaient plus le besoin d’obtenir un aval de Londres : « Il y avait cette excitation, cette envie d’envoyer chier Londres, qu’on pouvait faire ce qu’on voulait chez nous. » (Tannock, 2016) On peut déceler ici une légère faille dans le mythe Postcard, sachant que l’enjeu de rester à Glasgow ne figurait pas explicitement dans le manifeste d’Alan Horne dont le lieu de résidence et la gestion du groupe à domicile tenaient davantage de la contrainte financière que du choix éthique. Cependant l’ironie du slogan et de l’identité visuelle du label (pensons encore à ces pochettes de disque exhibant plusieurs personnages en kilts) manifeste assez un certain sentiment anti-londonien.
« Ils savaient que leur origine écossaise, à l’époque surtout, les ferait passer pour des barbares des confins de l’Empire, alors pour couper l’herbe sous le pied des moqueurs... c’est là qu’ils ont eu l’idée de la pochette des kilts. Faut dire aussi qu’à Londres il y avait ces groupes néoromantiques, les Spandau Ballet, etc. qui portaient kilts et tartans... c’était aussi une manière de se payer leur tête, du genre : eh là, touche pas à ma culture. » (Goddard, 2015)
24Bien que très peu de groupes parmi les succès récents aient manifesté un sentiment anti-londonien explicite, on décèle une fierté locale bien réelle chez plusieurs, dont Mogwai et Belle & Sebastian8.
25Cela dit, s’affranchir de Londres n’était pas une façon de se revendiquer 100 % écossais. Au contraire : si « le son de la jeune Écosse » a jamais eu une inspiration géographique précise, quelle que soit la décennie, elle est à chercher de l’autre côté de l’Atlantique. On l’a dit, la musique mainstream du milieu à la fin des années 1980 affichait d’évidentes influences américaines. Pour autant, la scène indépendante ne portait pas son « écossitude » en bannière. Loin de là, comme en témoigne Sarah Lowndes :
« Plusieurs de ces groupes avaient en commun une dette envers la soul américaine, le son de Tamla Motown, plus précisément. Les Pastels et BMX Bandits, notamment, étaient connus pour leurs chansons mélodiques à la structure classique, leur recours aux harmonies vocales et tambourins frémissants. » (Lowndes, 2014 : 75-76)
26Elle cite également les « mélodies façon quand la Californie rencontre Glasgow » de Teenage Fanclub (Lowndes, 2014 : 162). Quant à Postcard, on sait que le Velvet Underground, à son époque Factory surtout, constituait une référence centrale pour Alan Horne. « Il était obsédé par Andy Warhol », souligne Tommy Cherry. Il apparaît en effet sur plusieurs photos de l’époque Postcard en véritable sosie de Warhol. « Il faut dire qu’à Glasgow, tout le monde voulait être Lou Reed ! » (T. Cherry, 2016) Le Velvet Underground est ainsi resté LA référence des jeunes musiciens de Glasgow, « une sorte de dieu de la musique » (T. Cherry, 2016) dont on peut encore discerner les accents chez les groupes les plus récents.
27Le son du Détroit des années1960 a également eu une influence majeure sur la culture club et dance de la ville. Plusieurs auteurs ont relevé que « Détroit et Glasgow avaient en commun bien plus que ne le laissaient présager les apparences : deux villes post-industrielles qui allaient chacune devenir un centre majeur de production de musique indépendante » (Lowndes, 2014 : 50-51). Selon David Godin qui nomme ce mouvement en 1970, « depuis les ghettos noirs américains la Northern Soul est venue parler aux ghettos écossais, du moins aux clubs pour la jeunesse des quartiers populaires de Falkirk où j’ai grandi » (Lowndes, 2014 : 519). Le lien avec Détroit ne se limite pas aux scènes indé rock et pop : la techno et la dance ont également repris et retravaillé des rythmes américains. Au tournant des années 1990, parallèlement à l’influence majeure du label Factory Records de Manchester sur le développement de la house naissante à Glasgow, c’est « le son de Détroit » qui semble avoir marqué durablement la culture club locale :
« À l’époque, un nouveau rythme dance venu de Détroit explosait sur la scène club écossaise grâce à Pure qui a démarré en août 1990 au Venue à Édimbourg. Les DJ Twitch (qui montera ensuite Optimo) et Brainstorm envoyaient un mix éclectique de house et de techno. […] Comme la Northern Soul, cette nouvelle musique américaine exprimait une sensibilité qui faisait écho à l’énergie créative frustrée en Écosse. » (Lowndes, 2014 : 136-137)
28Le goût de Glasgow pour les rythmes américains n’est pas qu’une tradition ancienne affectant plusieurs genres, il témoigne également d’un flux à double sens :
« […] d’une boucle musicale entre la côte occidentale de l’Écosse et les États-Unis, ancienne et actuelle : beaucoup d’Américains sont vraiment fans de Glasgow pour sa scène musicale, parce que c’est une ville musicale, et Glasgow a tendance à s’intéresser davantage à l’Amérique qu’au Royaume-Uni, du moins c’est le cas au niveau grassroots. » (Shepherd, 2015)
29Commentant la sortie du premier 45T de son groupe sur le label américain Matador en 1999, Keith McIvor, DJ du duo d’Optimo, explique : « Beaucoup de groupes écossais ont signé chez Matador aux États-Unis. Le label a sorti Mogwai, Belle & Sebastian et Arab Strap. Ça leur plaît de travailler avec les groupes écossais. Ils aiment l’esprit et l’attitude qu’on trouve ici [...]. » (Lowndes, 2014 : 299) Interrogé trois ans plus tard par le Guardian sur le succès de ses soirées, Keith McIvor définit cet esprit et cette attitude sans prendre de gants :
« Je ne crois pas à un son Glasgow, mais à une attitude, certainement.
– Qui est ?
– Ça ! fait-il, le majeur dressé. » (Petridis, 2002)
30Le geste pourrait passer pour de la pure provocation, mais il est aussi révélateur de ce qui a caractérisé la production musicale à Glasgow ces quarante dernières années. Simon Goddard voit en Alan Horne et les groupes de Postcard « des rebelles insolents, en marge, habités par le véritable esprit punk qui était moins une question de musique que d’attitude, cette posture DIY que le punk incarne en fin de compte » (Goddard, 2015). Chez les groupes suivants cherchant à s’affranchir de Londres, le DIY punk vient se doubler d’une volonté de « faire les choses à notre manière » (« doing our own thing »), version policée du doigt de Keith McIvor. C’est le cas des Pastels : alors qu’une « musique funk léchée » était en train de s’imposer, explique Fiona Shepherd :
« […] lorsque les Pastels ont commencé, ils n’avaient pas d’équivalent à Glasgow. Ils ne savaient pas jouer, n’étaient pas compétents et n’avaient aucun désir de l’être. “On ne mange pas de ce pain-là, on fait à notre manière”, disaient-ils. Or c’est justement ça qui a plu et autour de ça qu’ils ont créé une communauté. » (Shepherd, 2015)
31Pour Emma Pollock (The Delgados), copropriétaire du label Chemikal Underground, l’important dans la genèse des groupes de Glasgow est le fait que cette indépendance d’esprit se transmette d’une génération à l’autre, entretenue par le succès des anciens (processus qu’on retrouve bien sûr dans toute grande ville ayant engendré des groupes marquants).
« C’est de pouvoir dire : “On a écrit des chansons et voilà, on part en tournée dans tout le Royaume-Uni !” Tout ça en ayant à peine joué devant une centaine de personnes dans sa propre ville. C’est comme ça que beaucoup de groupes démarrent ici : “Eh ouais, c’est parti ! On part en tournée, on loue un camion !” Et c’est ça, cette attitude, ce “allez, on se lance”, pas besoin de manager, pas besoin de maison de disques, pas besoin de demander la permission de qui que ce soit. Parce que la preuve que ça marche, on l’a sous les yeux : tous ces groupes qui ont fait pareil, qui se sont juste lancés et qui ont réussi. Et c’est cette activité qui crée la confiance, la confiance en soi, et l’intérêt. » (Pollock, 2015)
32In fine, « faire les choses à sa manière » revient aussi à l’idée de se débrouiller tout seul, où s’entend l’ethos indépendantiste qui s’est perpétué au long des années 1990 et caractérise depuis de nombreux musiciens, à commencer par Chemikal Underground. Ethos qui se traduit naturellement en termes politiques dans la mesure où la grande majorité des groupes écossais, glaswégiens en particulier, sont de fervents défenseurs de l’indépendance de l’Écosse. Quand un collectif d’artistes (visuels) créait National Collective, mouvement politique en faveur de l’indépendance, chez les musiciens son avocat le plus ardent et déterminé a été (et est toujours) Stuart Braithwaite de Mogwai. Il est apparu régulièrement sur les chaînes nationales et dans la presse pendant la campagne sur le référendum, espérant – comme d’autres – qu’un « oui » permettrait au pays de se débarrasser du programme de dissuasion nucléaire britannique Trident dont les sous-marins stationnent à 40 km de Glasgow. Quant à la musique, il a expliqué en mars 2014 que si la scène écossaise était « déjà très vigoureuse, variée et farouchement indépendante, l’indépendance permettrait au pays et à sa culture de se promouvoir à l’international beaucoup plus efficacement » (Gibson, 2014). On retrouve là ce flux à double sens mentionné plus haut : tentant de se dégager de Londres, les artistes indépendants sont allés chercher collaboration et inspiration musicales et politiques à l’extérieur.
Conclusion
33À étudier l’évolution de la musique dans le sillage de Postcard Records jusqu’aux années 1990, on pourrait presque considérer le phénomène Postcard comme un mythe, pure reconstruction rétrospective de quelque chose qui n’a peut-être jamais existé. Un fan exprime ce sentiment, expliquant que « le lien identitaire entre Postcard et la ville se lit plutôt dans le rétroviseur, compte tenu de ce qui s’est passé par la suite ». « Si Postcard a en effet mis Glasgow sur la carte, ajoute-t-il, sa réputation a sans doute largement dépassé l’importance qu’il a jamais eue. » (Ally, 2015) Si l’histoire de Postcard a été en partie réécrite et idéalisée, les idéaux partagés par les générations suivantes de fans et musiciens ont bel et bien trouvé une existence très concrète dans les nombreux projets que le label a pu inspirer.
34Il n’en reste pas moins qu’une partie de ce qui lui a été prêté mérite d’être un peu nuancé. Comme on l’a vu, Postcard a été qualifié de « matrice de l’indé », influençant des labels comme Creation, 4AD ou Sarah Records. Son choix de ne sortir que des singles (45T) aurait conforté cette image, le format de référence du 7 inch devenant une marque artistique, un signe de reconnaissance pour les labels suivants, chez Sarah en particulier. L’influence d’Orange Juice a été déterminante pour de nombreux groupes de ce label (Blueboy, par exemple, a directement emprunté son nom au deuxième 45T d’Orange Juice). De nombreux fans de Postcard se sont également passionnés pour label de Bristol et ont été fascinés par cette ville comme par Glasgow. Pour Sarah, l’ethos indépendantiste était déterminant, alors que Postcard cherchait autant, si ce n’est plus, à être pop (ulaire), qu’à privilégier la voie indé qui pouvait y mener. Ce qu’Alan Horne voyait dans son label à domicile était un tremplin vers les classements. « La musique devrait toujours viser le marché le plus large possible, aurait-il déclaré en 1980. Les classements existent, il faut y être. » (Morley, 1980 : 24) Comme le dit Simon Goddard : « Ils visaient Top of the Pops ! Ils voulaient être numéro un ! » (Goddard, 2015) Ambitieux, Alan Horne n’avait cependant rien d’un homme d’affaires, ce qui, ajouté à ses provocations, est venu abréger l’aventure, soldée par un échec financier. Cet échec et l’existence « météorique10 » de Postcard ont naturellement contribué à l’édification du mythe, les éditions limitées et la rareté des premiers pressages faisant le bonheur des collectionneurs.
35Il n’est donc pas anodin que Simply Thrilled : The Preposterous Story of Postcard Records de Simon Goddard, la seule biographie consacrée à Postcard à ce jour, se présente comme un conte de fées. « Preposterous (extravagante) parce que c’est ainsi que les gens impliqués s’en souviennent. Story (histoire) parce que ces souvenirs ont façonné une reconstruction dramaturgique », lit-on dans la préface (Goddard, 2014 : vii). Simon Goddard assume complètement la mythification que ce genre de récit induit, une forme extrême qu’on trouve rarement dans la littérature de la pop, mais qui se justifie ici pleinement compte tenu du caractère excentrique du personnage à l’origine de son sujet et de l’attachement emphatique de ses disciples.
36Mais si, comme on l’a dit, Postcard semble avoir très peu affecté les infrastructures musicales, le label a contribué au changement de l’image négative11 de la ville, effectivement perçue aujourd’hui comme une capitale culturelle de choix grâce à la persévérance de ses successeurs. On peut mentionner ici le rôle clé joué, côté scène indépendante, par le club Splash One, animé par des membres de Primal Scream au milieu des années 1980, de même que les studios du Hellfire Club ou les soirées Demo Disco innovantes de Craig Tannock, son propre studio Tower, ainsi que les cafés-salles de concert végan qu’il a ouverts à partir du début des années 1990 (The 13th Note, Stereo, Mono) ; tandis que du côté grand public, Simple Minds contribuait à la réouverture du célèbre Barrowland Ballroom, à ce jour salle préférée des artistes locaux comme étrangers.
37Depuis les années 1990, les institutions locales accordent de plus en plus d’importance à la vitalité culturelle de Glasgow dans leurs stratégies marketing12, mais son attractivité musicale ne semble perçue comme un actif exploitable que depuis peu. La décision du Glasgow City Marketing Bureau d’inclure la musique dans ses stratégies promotionnelles est en effet très récente. Même si ces efforts portent probablement plus sur les maxi-concerts grand public organisés dans les salles telles le SSE Hydro, la rétromania pourrait également venir toucher le secteur indé, à en juger par le nombre de publications portant sur le passé musical de Glasgow et de l’Écosse, celui des années 1980 en particulier. Citons par exemple A Scene in Between : Tripping Through the Fashions of UK Indie Music 1980-1988 (2013) de Sam Knee qui comprend des photos célèbres des groupes de Glasgow comme The Pastels ou Primal Scream ; ou encore The Outsiders, documentaire du magazine Dazed consacré essentiellement au club Splash One13. Certaines parutions s’intéressent surtout à l’épopée Postcard, comme le livre de Simon Goddard, bien sûr, publié en 2014, année qui a vu également la sortie de Songs from Glasgow des Bluebells, compilation de maquettes de cet autre groupe de la période Postcard qu’Alan Horne a failli signer, et d’un film sur la convalescence d’Edwyn Collins, chanteur vedette d’Orange Juice victime en 2005 d’une double hémorragie cérébrale qui l’a laissé quasiment aphasique. En 2015 paraissent Big Gold Dream : Scottish Post-Punk, DIY and Infiltrating the Mainstream, premier documentaire d’un triptyque intitulé The Sound of Young Scotland, ainsi que l’ouvrage Dear Green Sounds – Glasgow’s Music Through Time and Buildings, publication commandée par le département Glasgow UNESCO City of Music et qui comprend un article signé du journaliste écossais Vic Galloway sur le 185 West Princes Street, siège de Postcard.
38Si le secteur du tourisme de Glasgow devait inclure le patrimoine indé de la ville et sa vitalité dans ses hauts-lieux, la mythologie qui entoure Postcard (livres, films ou disques), fournirait à tous égards un récit idéalisé parfait du Glasgow du début des années 1980. Accessoirement, le 185 West Princes Street est depuis longtemps un lieu de pèlerinage des fans14. Quant à savoir si la pose d’une plaque commémorative serait pour Alan Horne une réussite aussi éclatante qu’une place de numéro un dans les charts, le doute reste permis.
Bibliographie
Bibliographie
Ally (2015), questionnaire en ligne, février.
Anderson Bob (2013), « Clan Balls, Luvvers and Incredible Strings : Popular Music in 1960s Glasgow », in Bell Eleanor et Gunn Linda (eds.), The Scottish Sixties : Reading, Rebellion, Revolution ?, Amsterdam & New York, Rodopi, p. 193-207.
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Stewart Duglas (2014), entretien, 5 août, Glasgow.
Tannock Craig (2016), entretien, 30 janvier, Glasgow.
Notes de bas de page
1 « Glasgow Confirmed as the Home of New Music », motion S4M-08386 in Business Bulletin n° 171/2013, vendredi 22 novembre 2013, en ligne : http://www.parliament. scot/BusinessBulletins/bb-13-171w.pdf [consulté le 14 juillet 2016].
2 Ce sont les villes qui se portent candidates. Voir http://en.unesco.org/creative-cities/ [consulté le 16 juillet 2016].
3 C81, NME/Rough Trade, 1981, uniquement sur K7.
4 Plusieurs anecdotes témoignent des excentricités d’Alan Horne. Sa rencontre avec John Peel, « une agression » disait celui-ci en février 1980, en est un bel exemple. Voici le récit qu’en fait Simon Reynolds : « Horne n’ignorait pas non plus à quel point les sorties indépendantes gagnaient à être soutenues par John Peel, surtout lorsqu’elles ne venaient pas de Londres. Mais Peel avait lui-même été hippie par le passé, et son émission sur Radio One représentait tout ce que Horne méprisait dans le nouveau ghetto post-punk. Il fit donc irruption dans les bureaux de la BBC pour dire ses quatre vérités à l’animateur, et cracher sur la musique qu’il passait (qui était selon lui “chiante à mourir”). Il lui dit “Postcard, c’est l’avenir, et vous avez intérêt à comprendre ça, sinon vous aurez vraiment l’air con”. Cette stratégie d’intimidation se retourna contre lui : “Le soir même, Peel a dit à l’antenne qu’il avait eu affaire à un jeune garçon fort agressif venu tout droit de Glasgow !” rapporte Edwyn Collins. Peel ajouta qu’il allait néanmoins passer “Falling and Laughing”, mais ne le diffusa qu’une seule et unique fois. » (Reynolds, 2005 : chap. 18)
5 Tommy était également membre de The Bachelor Pad, un groupe local de la deuxième moitié des années 1980.
6 Segment de phrase absent de la traduction française de Rip It Up and Start Again, Allia, 2007 d’où sont tirées les autres citations en français attribuées à Simon Reynolds. NdT.
7 John Williamson interviewé par Alastair Mabbot, « Right Here, Right Now », Caledonia, mars 2002, cité par Sarah Lowndes.
8 Belle & Sebastian ont manifesté leur attachement à Glasgow dans les paroles de leurs chansons ou les interviews, mais également par leurs produits dérivés (en 2008, le groupe sort un calendrier intitulé « A Toast to Glasgow ») et leur identité sur Internet (une ancienne version de leur site reprenait le graphisme du plan de l’iconique métro de la ville).
9 Dave Godin interviewé par David Belcher, The Glasgow Herald, 7 avril 2001, cité par Sarah Lowndes.
10 Christophe Basterra use volontiers du terme « météorique » pour évoquer Postcard.
11 Un changement nécessaire dont les autorités locales du début des années 1980 avaient parfaitement conscience, comme en témoigne l’immense succès populaire de la campagne publicitaire de 1983 pour relancer Glasgow sous le slogan « Glasgow’s Miles Better ».
12 Le titre de Ville européenne de la culture en 1990 a marqué le début de la renaissance de Glasgow. Si le slogan de 2004 « Scotland with Style » se voulait un hommage à l’héritage de Charles Rennie Mackintosh, l’accent a été surtout mis la décennie suivante sur la promotion du shopping. L’héritage de Mackintosh est désormais un atout primordial de la ville, tandis qu’au niveau grassroots le dynamisme de la School of Arts a joué un rôle déterminant dans les cercles artistiques au Royaume-Uni comme à l’étranger.
13 Ce documentaire fait partie d’une série intitulée « Music Nation » consacrée aux scènes musicales cultes, produite et diffusée par Channel 4. Voir http://www.dazeddigital.com/artsandculture/article/22716/1/watch-our-full-length-documentary-the-outsiders [consulté le 15 janvier 2017].
14 Remarque de fan : il se trouve que cet article a été rédigé pour l’essentiel à quelques centaines de mètres du siège de Postcard.
Auteurs
Est PRAG au département de Sciences Sociales de l’université Paris-Descartes, et spécialiste de la littérature britannique. Ses recherches actuelles portent également sur la musique populaire écossaise et les socialités numériques.
Laurence.estanove@gmail.com
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Stéréo
Sociologie comparée des musiques populaires, France - Grande-Bretagne
Hugh Dauncey et Philippe Le Guern (dir.)
2008
La production de la culture
Le cas des musiques amplifiées en France : genèse, structurations, industries, alternatives
Gérôme Guibert
2006
Stand Down Margaret
L'engagement de la musique populaire britannique contre les gouvernements Thatcher
Yasmine Carlet
2004