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Akh Purattim 3

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Jean-Claude Margueron
, 
Olivier Rouault
, 
Pascal Butterlin
, 
et al.

Mari et sa région

Mission archéologique française de tell Hariri-Mari : rapport préliminaire à l’issue de la 42e campagne (septembre-octobre 2005)

Pascal Butterlin

Texto completo

INTRODUCTION

1La 42e campagne de la mission archéologique de Mari s’est déroulée du 6 septembre au 18 octobre 2005. Le directeur est arrivé dès le 6, suivi du reste de l’équipe à Damas à partir du 9. Une fois le permis de fouille délivré et les nécessaires formalités accomplies, la mission s’est rendue à tell Hariri.

2Les travaux ont débuté sur le site le 14 septembre dans divers secteurs (fig. 1) : dans le secteur Palais Sud (du 14 septembre au 13 octobre, sous la direction de Malou Schneider), dans le secteur N 1 (à partir du 16 septembre et jusqu’au 13 octobre, sous la direction de Béatrice Muller-Margueron et Sophie Cluzan, assistées de Yasmine Kanhouch et Wael Abu Azizeh), dans le secteur L (du 15 septembre au 2 octobre, sous la direction de Julien Chanteau et Joyce Nassar), sur le tell Medkouk (du 26 septembre au 6 octobre, sous la direction d’Hélène Criaud et Wael Abu Azizeh) et dans la tribune du Grand Palais Royal (du 1er octobre au 14 octobre, sous la direction de Mathilde Crévoisier). Outre ces archéologues étaient présents sur le site Antoine Cavigneaux, épigraphiste, Margaret Jacques, épigraphiste, Jean Palenteijn, dessinateur, Mahmoud Bendakir, restaurateur et Jean Margueron qui supervise maintenant les opérations de restauration sur le site.

3Joyce Nassar était responsable du dégagement des tombes et de la gestion du musée. Hubert Mathot, céramologue, a supervisé le dégagement, le recollage, le dessin et l’étude des céramiques. Nicolas Bresch, Soline Delcros et Lorraine Sartorius, architectes, ont assuré les travaux de topographie et de relevé, Nicolas Bresch s’occupant plus précisément de l’achèvement des grandes coupes est-ouest et nord-sud du tell. Mohayen el Ali, du musée de Deir-ez-Zor, était le représentant de la DGAM. L’ensemble des travaux a bénéficié du soutien et de l’accueil chaleureux de toutes les institutions syriennes, à Damas, Deir-ez-Zor et Abou Kémal ; ils ont eu lieu sans incident et ont bénéficié d’un climat stable et ensoleillé. Les derniers membres ont regagné la France le 18 octobre.

4Le financement de l’ensemble des opérations était assuré par le ministère des Affaires étrangères français, avec des compléments du CNRS et du canton de Genève ainsi que du Fonds fédéral helvétique.

  • 1 Sur ces axes de recherche et leur mise en perspective, voir Butterlin 2007b, 2008b et 2009a.

5Les travaux se sont déroulés selon trois axes de recherche qui ont été présentés ailleurs : axe 1, le centre monumental et son environnement, axe 2, l’étude la ville est et axe 3, l’étude de la couronne du site et de son espace proche1.

AXE DE RECHERCHE 1 : CHANTIERS P 66 ET P SUD 1

Le chantier P 66 (fig. 2 et 3)

  • 2 Sur les problèmes très particuliers posés par la tribune, Parrot 1958a, p. 132-143, fig. 151-152, p (...)

6Il s’agit d’un chantier situé dans le Grand Palais Royal, dans le bloc officiel. La restauration programmée de l’ensemble du bloc officiel s’est accompagnée d’une fouille de sauvetage dans les pièces 66, 66 bis et ter, dégagées par A. Parrot2. Ces pièces ont été redégagées et relevées. L’objectif était là d’étudier l’évolution de cet ensemble complexe situé à l’est de la salle du Trône. A. Parrot avait déjà souligné que les murs séparant ces différentes pièces étaient adventices et qu’il avait existé un ou plusieurs états antérieurs de la « tribune ». En 2004, on a par ailleurs repéré dans le mur ouest du couloir 68 une porte bouchée communiquant avec la salle 66 (fig. 4). Il était donc indispensable de reprendre la fouille avant que la restauration ne gèle l’ensemble du secteur.

Fig. 1 – Secteurs fouillés en 2005

Fig. 2 – États successifs de la tribune

Fig. 3 – Palais, tribune de plâtre état 1

7La fouille a débuté par l’étude des pièces 66 bis et ter renommées respectivement A et C (A : 173 × 132 cm, C : 240 × 231 cm). Le sol en plâtre mentionné par A. Parrot a été retrouvé puis les murs séparant ces pièces de la pièce 66 renommée pièce B ont été surbaissés. La pièce A, dont on pouvait penser qu’elle était initialement aussi grande que la pièce C, a été conçue d’emblée plus petite que celle du sud et cette anomalie n’a pas pour l’instant été expliquée.

8Les recherches se sont ensuite concentrées sur la pièce centrale B, où on a pu définir quatre états successifs. On a retrouvé toutes les installations identifées par A. Parrot puis vidé les sondages qu’il avait effectués au nord et au sud. Le sol en tabuk bitumé (nommé sol 1, 182,64) a été enlevé sur toute la surface de B. Il reposait sur une couche de terre assez épaisse (10 cm) qui a notamment livré un sceau-cylindre (182,51) et une grande perle en fritte ouvragée. Sous la couche de préparation de ce sol 1 ont été retrouvés les vestiges juxtaposés d’une série de podiums (nommés a et b) qu’il n’est possible de reconstituer qu’en partie, au vu de l’arasement opéré au moment de l’installation du sol 1. Ces podiums reposaient sur un massif de briques comprenant 8 assises. On a retrouvé entre les joints des briques un lot important de perles, essentiellement en cornaline, mais aussi en lapis et en fritte. Il s’agit là comme dans le cas du sceau-cylindre d’un véritable dépôt de fondation qui vient confirmer, s’il en était besoin, la sacralité du lieu, que sa majesté laissait déjà supposer. Ce massif de briques reposait sur un sol de terre situé à une altitude voisine du sol de plâtre repéré par A. Parrot au nord de la pièce 66 : rien ne restait de ce sol de plâtre qui constitue le seul vestige de l’état initial de la pièce 66. Par-dessous ce sol, on a retrouvé encore deux assises de briques et enfin des galets marquant comme ailleurs le sous-œuvre du Grand Palais. En revanche, l’enduit du mur est de la pièce était conservé, les briques ayant été plaquées contre lui.

9Il en résulte donc que le premier état de cet ensemble était une pièce au sol plâtré dépourvue de murs de cloison et enduite dans son intégralité. Il est difficile de savoir comment se présentaient les installations au sol et s’il existait un podium dans cet état initial. En revanche, il est dès lors clair que la porte présumée est antérieure. On a enlevé une section de l’enduit du mur et retrouvé l’un des montants de cette porte. Large de 146 cm, elle était excentrée et ne peut avoir été utilisée comme accès à la salle du Trône. Elle a été scellée par l’enduit du mur est de la salle 66 et correspond très probablement à une porte de chantier, utilisée au moment de la construction de l’édifice.

10La séquence en quatre phases principales repérées est donc très révélatrice des mutations qu’a connues l’ensemble du bloc monumental du Grand Palais Royal. Si on ne sait rien des fonctions initiales de la grande pièce A/B/C, il est clair que sa surélévation s’est accompagnée d’une sacralisation de cet espace, magnifié par l’escalier et la présence de deux podiums au moins. La disparition du podium en phase finale est quant à elle un problème considérable car elle implique une mutation tardive de la manière de concevoir la majesté toujours présente des lieux.

Fig. 4 – Palais, sondage tribune, porte bouchée

Le chantier P Sud 1 (fig. 5-8)

11Il s’agit d’une fouille préalable à l’aménagement de l’accès à la zone des palais depuis le sud-ouest par le couloir 51 (carrés VIII X 49 et 48). L’objectif était de comprendre comment a évolué l’environnement de la zone palatine au sud du palais de la Ville II et d’en fixer clairement les limites. Il s’agit là d’un secteur où se trouvait une rue menant à la zone des temples. Ce secteur fut entièrement remanié par l’aménagement de la zone de réserves sud du palais de la Ville III. Trois carrés en tout ont été fouillés : VIII X 49 et 48 et VIII Y 49. On a retrouvé non seulement les vestiges du palais de la Ville III mais on a également étendu la recherche aux abords du temple aux Lions dont le mur ouest et la terrasse occidentale de la terrasse ont été dégagés. Une fois ces édifices fouillés par A. Parrot bien recalés dans notre système topographique, on a entamé une série de sondages : un sondage situé à l’ouest du grand mur d’enceinte du Grand Palais Royal, un sondage entre ce mur et celui du temple aux Lions et une étude des pièces 51 et 52 du palais de la Ville II, dont la fouille n’avait pas été achevée par A. Parrot en 1969.

Les vestiges de la Ville III : Grand Palais Royal et temple aux Lions (fig. 5)

  • 3 Parrot 1958a, p. 315.
  • 4 Margueron 1982, p. 286, fig. 209 ; Parrot 1958a, p. 310 et 338.

12Le mur appelé A est le mur d’enceinte est du Grand Palais Royal de Mari. Il avait déjà été fouillé en 1936 par André Parrot3 et a été remis au jour lors de la campagne 2005. Globalement orienté nord-sud, ce mur présente néanmoins une courbure très nette en direction de l’ouest. Les caractéristiques majeures de ce mur incurvé d’une largeur comprise entre 2,50 et 2,70 m sont d’abord la présence d’un double redan de 3,60 m (nord-sud) sur 4,70 m (est-ouest, largeur totale), dont on a étudié en détail le mode de construction. Le mur principal a été construit puis flanqué sur ses côtés, est et ouest, conservés sur six assises des deux éléments du redan. L’ensemble a ensuite été repris en hauteur par un appareillage continu. L’ensemble du mur était flanqué sur sa face ouest d’une bordure de galets large de 15 à 20 cm et haute de 13 cm. Cette ligne de galets a été maintenue à l’extérieur du mur par des briques de nature différente de celles du mur, de dimensions 24 × 20 cm environ, qui forment comme un coffrage. La présence de ces galets en fondation est un bon indice pour estimer l’altitude des sols du Grand Palais Royal dans ce secteur sud qui s’étendait en contrebas de la zone de l’enceinte sacrée, dont on sait qu’elle se situait plus haut que le reste de l’édifice. Le mur a en tout cas été construit en une seule fois, comme le pense J.-Cl. Margueron4, contrairement à A. Parrot qui identifiait deux phases dans ce mur oriental.

Fig. 5 – Palais Sud 1 : vue générale du mur est du Grand Palais Royal

13Deux autres murs (murs B et C) appartenant au Grand Palais Royal ont également été redégagés et étudiés. Le premier, large de 1,80 m et orienté est-ouest, a été dégagé sur 5 m et il n’en subsiste que trois assises, qui reposent sur de la terre tassée et non, comme on le pensait, sur les vestiges du mur sud du palais de la Ville II. Étonnante aussi est l’absence de radier de galets, galets qui sont en revanche présents sous le mur C.

14Celui-ci, orienté nord-sud, puis nord-est-sud-ouest, est situé dans les carrés VIII X 49 et VIII X 48, et se prolonge en VIII X 47, carré où il n’a cependant pas été dégagé cette année. Ce mur est en pente très nette vers le sud, laquelle concerne en premier lieu le radier qui s’enfonce et le nombre d’assises qui passe de une à deux dans la partie sud du carré. Cette pente vers le sud est générale pour de nombreux aménagements découverts dans ce secteur Palais Sud. Ce mur n’était pas liaisonné au mur B et a été construit plus tard.

Mur et terrasse du temple aux Lions (fig. 6)

  • 5 Parrot 1938, p. 22-24.

15On a dégagé sur une longueur de 15 m environ la face occidentale du mur ouest du temple aux Lions5. Considérablement endommagé par l’érosion, ce mur présente encore des vestiges ténus de son redan, de 5,10 m de longueur. Il subsiste quatorze assises du mur du temple. Au point le plus étroit de la rue, là où se situent les redans du temple aux Lions et du Grand Palais Royal, la rue est large de 2 m.

16Dans le sondage pratiqué pour rechercher le mur P1 à l’est du mur d’enceinte GPR, on peut compter une hauteur de quinze assises agencées en un appareil remarquablement bien conservé, sans doute parce que le mur de la terrasse est resté longtemps enfoui. À la base, des briques de fondation de 44 cm de large sont en débord de 44 cm par rapport au mur de la terrasse. Toutefois, une rigole de terre de 15 cm de large sépare la façade de la terrasse de l’assise supérieure de ces briques, qui ne mesurent à cet endroit que 30 cm de profondeur. Les six assises de briques visibles forment donc plutôt un soutènement que des fondations.

  • 6 Sur ces datations, Parrot 1940, p. 20-23, Dossin 1940, p. 161-164, en dernier lieu Margueron 2004, (...)

17Cruciale a été la mise en relation altimétrique entre ces divers édifices. La base des fondations du mur d’enceinte du Grand Palais Royal est située à une cote supérieure au sommet de la terrasse du temple aux Lions. Il en résulte qu’après l’édification de ce monument par Ishtup-El, l’ensemble de la rue a été partiellement noyé et exhaussé au moment de la construction du Grand Palais Royal, dont on peut supposer qu’elle est intervenue une centaine d’années plus tard, au moins en ce qui concerne le secteur de la Grande Porte au nord6. L’extension sud du Grand Palais Royal pourrait avoir été effectuée assez rapidement car les éléments que nous avons réunis militent en faveur d’une datation haute de l’extension du palais, dans un quartier dont nous avons commencé à entrevoir la nature en menant une série de sondages profonds.

Le palais de la Ville II et son environnement (fig. 6 et 7)

  • 7 Parrot 1969 et 1970. La pièce a été fouillée en 1968 (17e campagne) pour moitié puis en 1969 (Parro (...)

18L’étude de cette partie du palais a compris trois volets complémentaires : un sondage à l’ouest du mur A, un sondage à l’est entre le temple aux Lions et le mur d’enceinte, et des études plus limitées dans le locus 51 du palais P I dont la fouille était restée inachevée7.

19Le premier sondage a permis d’établir clairement où se trouvent les limites sud du palais, qui restaient jusque-là indéfinies. C’est un point crucial pour la suite de la recherche dans le secteur Palais Sud. Le sondage ouvert au départ sur une largeur de 8 m a été restreint à une largeur de 2 m et est profond de plus de 4 m. Là, on a pu étudier non seulement la façade à redans du palais mais aussi l’espace extérieur au palais.

La façade du palais (fig. 8)

20Elle présente un redan qui n’a été dégagé que sur quelques dizaines de centimètres. Plusieurs états successifs du mur sud ont été identifiés sur 4 m de hauteur environ. En façade, le mur du palais est pourvu d’un redan de 1,60 m de long, dont la face orientale est visible dans la coupe de la limite ouest du carré VIII X 48. Un petit décrochement de 15 × 32 cm (en bas, 26 × 20 cm) orne l’angle du redan. Ce décrochement est couvert d’un épais et solide enduit très épais dans les recoins ; cet enduit se retrouve sur toute la façade visible du monument, où il est resté conservé sur la partie basse du mur (soit en dessous de 179,74) et présente par endroits, surtout dans la partie est du carré, une épaisseur de 11 cm. L’enduit a été enlevé sur le décrochement, ce qui met en évidence une succession de quatorze assises de briques, épaisses de 8,5 à 10 cm. L’enduit s’épaissit ensuite de 2,5 cm à 7,5 cm. Sous la partie enduite, en dessous de 179,24, une zone de 30 cm d’épaisseur reste peu claire, puis une fine ligne horizontale blanche apparaît dans l’angle mur/redan : elle surmonte la zone des fondations, qui procède d’assises en assises à un élargissement progressif du mur. À une cote de 178,80, l’ensemble du redan et du mur s’élargit de 40 cm environ. Un sondage plus limité montre qu’il s’agit d’un mur plus ancien à nouveau enduit, que l’on a dégagé cette fois sur 1 m de profondeur.

21Le remplissage en avant de ce mur a pu être étudié en détail et mis en rapport avec l’analyse du mur sud. Sept couches ont été identifiées sur une épaisseur de 5 m environ. Les couches 1 et 2 sont postérieures au mur E et doivent être liées aux travaux de fondation du Grand Palais Royal. Les couches 3 et 4 correspondent clairement aux deux états de l’enduit et à des sols liés à l’usage de l’édifice. La couche 5 correspond aux fondations de l’édifice et la couche 6 au remplissage ayant noyé le mur antérieur, plus large. Ce remplissage est couronné par un épais lit de tessons.

  • 8 Sur ce problème, voir Margueron 2004, p. 196-216.

22Toutes ces constatations doivent être mises en rapport avec ce que l’on sait par ailleurs de l’évolution des palais P 0-P 28 : la base de l’enduit est à 178,97, le sommet de l’état enduit antérieur à 176,60. Rappelons que le sol de P 1, dans l’espace central de l’enceinte sacrée, est à 180,17 et celui de P 2 à 176,87, qu’il est à 178,30 et 176,74 respectivement dans l’espace IV. On a donc une réelle correspondance entre ces diverses données qui nous indiquent que la partie inférieure du sondage nous a permis d’effleurer le mur enduit de P 2, sans parvenir au sol extérieur, situé plus bas ; cependant nous avons atteint une série de surfaces correspondant à l’exhaussement de l’édifice et à au moins deux états de P 1, à moins qu’il ne s’agisse de P 0-P 1. Cela revient à dire que l’on retrouve clairement la stratigraphie du palais sur sa face extérieure. Les modalités de l’exhaussement posent cependant un problème très particulier : tout se passe comme si le redan situé en façade avait été réduit entre les deux états. Deuxième conclusion : nous n’avons pas trouvé le sol d’une rue mais l’alternance de sols en pente et de comblements de briques et terre qui correspondent à l’exhaussement artificiel du niveau. Dans sa partie haute, la fouille n’a pas permis de définir la largeur de la rue, qui est supérieure à 8 m et présente une déclivité continue vers le sud.

Fig. 6 – Palais Sud 1 : sondage est, angle sud-est du palais et terrasse du temple aux Lions

Fig. 7 – Palais Sud 1 : état Grand Palais Royal

Fig. 8 – Palais Sud 1 : redan du palais P 1

23Il en résulte que la partie sud du palais donnait sur un espace de grandes dimensions, sans que l’on puisse encore utiliser le terme d’esplanade. Ce secteur a fait l’objet d’importants travaux de terrassements qui ont exhaussé artificiellement les palais au-dessus de la ville, au moins à l’époque de la Ville II (fig. 10 et 11). La fouille à l’est du mur A a permis de mieux comprendre la transition entre ces divers états des palais de Mari. Là en effet, on a retrouvé arasé et en profondeur le mur du palais P I dont on a repéré l’angle sud-est (fig. 6). Cet angle, qui présente un redan, passe sous la terrasse du temple aux Lions et a été arasé pour l’édifier. Cela implique qu’au moment de la construction du temple aux Lions, la zone palatine ne s’étendait pas si loin au sud et qu’elle s’était restreinte, après la destruction de P I. Il faut supposer que toute la zone était laissée à l’abandon, seule l’enceinte sacrée et son couloir à redans étant alors utilisés. L’emprise des palais sur la ville s’est donc considérablement modifiée, au moins ponctuellement au fil des revers et de la renaissance de la monarchie mariote. Celle-ci s’est accompagnée sous les Shakkanakku d’une refonte complète du secteur, avec l’édification d’abord du temple aux Lions qui coupe la circulation est-ouest de la Ville II, puis du Grand Palais Royal dont le mur d’enceinte incurvé vient s’adapter aux contraintes du nouveau tissu.

Fig. 9 – Palais Sud 1 : état palais P 1

Fig. 10 – Palais Sud 1 : paroi ouest sondage ouest, glacis successifs au sud du palais

Fig. 11 – Palais Sud 1 : séquence des palais Ville II, façade sud

La pièce LI et l’angle sud du palais (fig. 9)

24Ce secteur a posé toute une série de problèmes. La pièce fouillée par A. Parrot et nommée Pièce LI n’a pas été complètement dégagée et ses limites ont été imparfaitement identifiées. Un sondage restreint à la partie sud de la pièce a permis non seulement de retrouver le grand four en fer à cheval découvert par A. Parrot mais aussi de mettre au jour toute une série de tannour. La pièce en question était clairement spécialisée dans la fabrication du pain et la cuisson. L’un de ces tannour se trouve sous le mur considéré comme la limite est de la pièce. Une étude détaillée a montré que ce mur était postérieur et que le mur de la pièce se situait un mètre plus à l’est. Là, dans un secteur difficile, on a rencontré les restes d’un grand massif de briques dont les limites sont difficiles à préciser car il passe sous le mur d’enceinte du Grand Palais Royal. Il n’est donc pas exclu que l’angle sud-est du palais que l’on a retrouvé, rappelons-le, au-delà du mur d’enceinte du Grand Palais Royal, était un énorme massif de briques comme l’était l’angle nord-ouest du Grand Palais Royal par exemple.

25Il est donc devenu possible de restituer de manière plausible non seulement la façade sud du palais mais aussi son angle sud-est, même si des zones d’ombre demeurent.

AXE DE RECHERCHE 2 : CHANTIER L ET N 1 (« VILLE EST »)

26Les recherches sur l’organisation de la trame urbaine de Mari sont le deuxième axe de recherche du programme. On a mené deux opérations cette année. L’une est une fouille de sauvetage, au chantier L, l’autre le début des recherches sur la ville est.

Chantier L (fig. 12 et 13)

  • 9 Sur les problèmes de stratigraphie du chantier L, voir Butterlin 2008b.

27Il ne s’agit pas là de poursuivre une fouille maintenant ancienne9, mais de préserver au moins partiellement certains vestiges du seul secteur du site où la Ville I est visible. Dans la partie ouest, la moins abîmée de la fouille, est apparu le rebord d’un caveau construit scellé de dalles de gypse ; nous avons donc décidé de procéder à sa fouille avant d’ensevelir le tout en vue de sa protection. Il s’est avéré qu’il s’agissait d’un secteur assez complexe, comprenant deux fours et deux tombeaux construits, situés sous l’une des grandes pièces du secteur (fig. 12). La plupart des installations repérées appartiennent à la phase 5 du chantier L. Il s’agit le plus souvent d’installations situées sous le niveau d’un sol dont il ne restait que quelques rares lambeaux.

28Deux fours ont été fouillés. Le premier avait été dégagé en 2004 et on ne revient pas dessus. Le second, un four en fer à cheval partiellement détruit par une inhumation postérieure, subsistait sur une hauteur de 70 cm : la chambre de chauffe et quelques piles étaient bien conservées, ainsi que quelques fragments de la sole. Il s’agit d’un four à céramiques. Au nord du four no 2 se trouvait un caveau construit complexe, caractéristique de l’architecture funéraire de la Ville I à Mari et du Dynastique Archaïque I (fig. 13). Il présentait une série d’empâtements successifs et un bourrage de briques. Par-dessous était inhumé un enfant, âgé entre 11 et 19 mois. La tombe avait été perturbée par un terrier. Elle a livré un riche matériel, comprenant un pendentif en calcaire et un lot de sept perles en lapis, fritte et stéatite, recueillies au niveau de la mandibule (elles devaient faire partie d’un collier autour du cou) ; des coquillages marins, retrouvés autour des vertèbres lombaires basses et qui faisaient partie d’une ceinture probablement ; une épingle incurvée en bronze NE 121 située à gauche du squelette (recouvre les os des bras) et qui devait fermer un habit.

29L’inhumation avait été accompagnée d’un important dépôt funéraire hors de la tombe : celui-ci comprend une série de bols et coupes à boire (seize) et le dépôt en connexion d’ossements d’équidés, qui jouent décidément un rôle conséquent dans l’histoire de la Ville I. Ce type de dépôt est également tout à fait caractéristique des tombes Ville I du chantier L et des techniques utilisées au Dynastique Archaïque, notamment dans la Diyala. Il faut enfin souligner que l’association four-tombeau construit se répète par deux fois maintenant au chantier L : il s’agit à chaque fois d’installations comprenant un four et une tombe d’enfant, si bien que l’on peut se demander s’il ne s’agit pas d’un véritable rituel. La tombe a livré une série de perles et une amulette d’un type connu dans la vallée du Khabur à l’époque de Ninive V.

Fig. 12 – Chantier L : plan de VII W 50

Fig. 13 – Chantier L : vue générale de la fouille

30Une deuxième tombe, un caveau scellé cette fois par des dalles de gypse, est venue s’insérer dans cet ensemble bâti. Il s’agit d’un caveau rectangulaire en brique crue de 120 cm (ouest-est) par 80 cm (nord-sud) et d’une hauteur de 40 cm en moyenne, clos par trois dalles de gypse entre 70 cm et 90 cm de longueur, 40 cm de largeur et 15 cm d’épaisseur. Il contenait les restes d’un enfant dont l’âge est compris entre 8 et 12 mois. Là encore, un matériel assez riche a été recueilli, notamment des perles en fritte, et de minuscules perles en lapis. Sous le crâne, deux fémurs d’un ovicapridé immature étaient placés tête-bêche. Leur emplacement nous laisse penser à un geste funéraire.

31Une fois la fouille achevée, l’ensemble a été scellé en vue d’une restauration.

Chantier N 1 (fig. 14-16)

  • 10 Margueron 2004, fig. 105, p. 137.
  • 11 Margueron 2004, fig. 115, p. 143. Sur ce problème, ibid., p. 142-145.

32Il s’agit du premier chantier ouvert dans la ville est. Son implantation a été motivée par deux facteurs : le relevé géomagnétique réalisé dans le secteur et l’observation de la topographie locale. Le relevé géomagnétique présentait une série longitudinale de signaux qui a permis de proposer la restitution d’une série de rues qui se croisent dans la partie centrale du secteur prospecté10. L’ouverture d’une fouille stratégiquement située sur un croisement de ces axes supposés est destinée à établir clairement à quel type de signal on a affaire. Il s’agit surtout de dater précisément ces installations, dans une partie de la ville où nous ne disposons d’aucune référence stratigraphique pour le moment. Le schéma des arasements successifs de la ville proposé par Jean Margueron11 et observé dans la partie centrale et ouest de la ville devait être corroboré dans cette partie du site. Le chantier choisi a donc combiné ces données à la topographie locale : on a opté pour un ensellement dans la ville basse pris entre deux oueds à une cote d’altitude voisine de 178 m afin de pouvoir fouiller, si le schéma se vérifie, à la fois des vestiges de la Ville III (à l’état de fondations) et de la Ville II. Il était ensuite prévu, si le temps le permettait, d’opérer en un point un sondage pour identifier les vestiges de la Ville I. Disons-le d’emblée, tous ces objectifs ont été atteints. On a en effet dégagé les restes de ce croisement, en dépit d’un nombre considérable de fosses tardives.

33Une rue nord-sud a clairement pu être identifiée sur trois carrés (IX N 25-IX N 23, fig. 14). Elle est délimitée à l’ouest par un long et puissant mur (mis au jour sur près de 25 m de longueur) qui borde une série de pièces. On a pu établir une série de sections de la rue mais il s’est avéré difficile d’identifier tout au long de la fouille le mur oriental de la rue. Des niveaux tardifs et des fosses ont considérablement perturbé le secteur, si bien que l’on a décidé d’élargir la fouille au nord et à l’est (carrés IX N 26, IX O 26 et IX O 25). Dans ces carrés situés au nord, on a atteint le secteur du croisement de rues supposées : l’érosion a été particulièrement massive et on n’a retrouvé les vestiges de la rue est-ouest que dans un sondage profond. Là, des lits réguliers de gravillons suggèrent l’existence d’une chaussée filtrante mais il est indispensable d’élargir le sondage pour localiser les murs associés à cette rue, situés probablement au nord, au-delà de la limite de fouille. Ce n’est que dans le carré O 25 que l’on a repéré un mur est-ouest.

La stratigraphie du secteur occidental (fig. 14-16)

34L’essentiel de l’étude s’est donc concentré sur le secteur ouest où a été définie la stratigraphie suivante.

  • Un niveau I comprend toute une série de fosses remplies de tessons attribuables à la phase Shakkanakku récente/amorrite. Certaines de ces fosses étaient aménagées avec des banquettes sur lesquelles étaient posées des jarres de la Ville III. Il s’agit probablement de fosses creusées à la suite de l’abandon de la Ville III : ce sont de grandes fosses dépotoirs comblées de débris divers et surtout de céramiques paléobabyloniennes.

  • Un niveau II comprend une série de vestiges souvent difficiles à lier les uns aux autres et qui appartiennent pour l’essentiel à la même période : vestiges de puisards, lambeaux de sols et de murs.

  • Le niveau III est lui beaucoup plus substantiel : il faut en effet lui rattacher tout un bloc de pièces parallèles délimitées par un long mur, large de 1 m et suivi sur 25 m de long. Là, ont été définis des sols, très mal conservés, situés immédiatement sous la ligne d’érosion de l’architecture : le niveau IIIa. Les divers murs dégagés dessinent un ensemble dont la trame d’ensemble paraît cohérente mais le détail doit être repris en finesse, pour déterminer les liens entre les divers loci. Le matériel découvert est à rattacher pour l’essentiel à la période Ville II-III ancienne (fig. 17).

Fig. 14 – Chantier N 1 : plan schématique par phases

Fig. 15 – Chantier N 1, plan IX N 24 : état Ville II récent

  • La fouille en profondeur de deux de ces loci, locus 7 et locus 2, a permis d’étudier en détail l’évolution de ce secteur. Le comblement de ces pièces comprend des débris brûlés, des céramiques et des déblais d’architecture (fig. 18).

  • Enfin, un sondage a été pratiqué dans le locus 7 afin d’établir le lien entre la Ville II et la Ville I. À 175,30, un mur large d’un mètre, de direction nord-sud parallèle au grand mur de la Ville II, a été identifié. Il est légèrement décalé vers l’ouest et scellé par une couche d’argile verdâtre. On a donc atteint là, probablement, le niveau d’arasement de la Ville I, sans que l’on observe pour le moment de différence majeure dans le matériel céramique. Il faut dire que le sol n’a pas été mis au jour et que nous nous situons juste au niveau de l’arasement de l’ensemble.

Le niveau III b : la Ville II

35Dans le locus 7, la fouille a été poursuivie jusqu’à la base des fondations et on a pu établir les faits suivants.

  • Le mur 1 a été très profondément fondé (à une cote voisine de 175,30). Il s’agit du mur extérieur du bâtiment qui donnait sur la rue. Les murs intérieurs sont moins profondément fondés (175,80). C’est là un phénomène déjà observé en Ville II au chantier L, tout à fait caractéristique de la Ville II. De fait le matériel céramique découvert dans le comblement est attribuable à la Ville II. L’un des problèmes centraux est de savoir si nous tenons là un niveau d’usage : l’absence d’enduit, des sols sans consistance réelle, l’absence, pour ce que l’on a dégagé, de portes, laissent supposer un niveau de fondations de la Ville II. En revanche, la présence de débris brûlés, l’érosion du grand mur nord-sud avant reprise, et le lessivage apparent dans la rue dans ce secteur militent en faveur d’une rupture conséquente suivie d’une reconstruction quelle que soit la nature du niveau.

Fig. 16 – Chantier N 1 : plan IX N 25 état récent

Fig. 17 – Chantier N 1 : locus 7, sol 1, Ville II état récent

Fig. 18 – Chantier N 1 : locus 7, section état ancien et remblais

  • Toute une série de tombes a été creusée sous les sols de ce niveau de la Ville II et elles offrent pour la première fois à Mari la possibilité d’étudier en détail les modes d’inhumation de la Ville II, jusque-là très peu connus. Ces tombes (4 tombes) sont toutes en pleine terre ; elles révèlent des squelettes posés sur le côté : deux des quatre sont calés contre le bord de la fosse, deux sont retournés sur le ventre, mais tous présentent la même position fléchie des membres inférieurs que ce soit vers la droite ou vers la gauche. Le matériel céramique est le plus courant. Les deux tombes dégagées en IX N 23 présentent un assemblage homogène : coupes évasées à base plate et parois légèrement concaves, vaisselle miniature, petite jarre en céramique grise à col cylindrique et lèvre travaillée en bourrelets, petite jarre globulaire à lèvre travaillée en bourrelets. Tous ces éléments rattachent ces tombes à la Ville II. C’est aussi le cas pour le matériel céramique de la tombe IX N 25 -T-1 : l’une des deux jarres globulaires est décorée d’une manière typique du DA III, et cette tombe comporte aussi un flacon en céramique métallique.

36Il est en tout cas clairement établi que nous avons retrouvé les vestiges de la grande voie nord-sud que nous recherchions. Celle-ci était large d’au moins 6 m, à en juger par la présence d’une rigole longitudinale au niveau IIIa. La rue elle-même est remplie d’un matériau argilo-sableux régulièrement lessivé par l’érosion d’une voie de circulation qui conduisait en pente vers l’extérieur de la ville.

37Les restes du croisement et de la voie est-ouest sont encore trop ténus pour que l’on puisse pour l’instant les analyser en détail : une série d’indices convergents laisse subodorer la présence du croisement mais seule la reprise de ces carrés permettra de reprendre le problème. Ces vestiges de voierie sont associés à une architecture qui remonte pour l’essentiel à la Ville II, ou à des phases anciennes de la Ville III. Il ne subsiste quasiment rien des vestiges de la Ville III récente, ce qui n’est pas étonnant étant donné l’ampleur de l’érosion. Il est en revanche bien assuré que l’ensemble de ce système a connu une forte permanence, certainement de la Ville II à la Ville III, et plus que probablement (un seul sondage seulement pour le moment nous le confirme) entre la Ville I et la Ville II. Ce chantier a donc permis très rapidement d’établir un système de références topographiques, stratigraphiques et chronologiques pour la ville est. C’est une excellente base pour la reprise de l’étude de la céramique à Mari.

AXE DE RECHERCHE 3 : CHANTIERS M 1, 2 ET 3 (TELL MEDKOUK)

38Les sondages sur tell Medkouk constituent la première phase de l’axe de recherche no 3. L’objectif était ici de déterminer la nature de cette énorme masse de terre dépourvue de tessons, située à l’ouest de tell Hariri, à une distance de 800 m de la ceinture extérieure du site (fig. 19). La datation de cet ensemble qui ne présente aucun tesson en surface est incertaine, si bien que des datations très diverses ont été proposées. Trois sondages (M 1-M 2 et M 3) ont été ouverts cette année sur le tell.

Fig. 19 – Tell Medkouk, vue générale

Étude topographique préliminaire

39L’étude de ce site a débuté par une étude topographique préliminaire destinée à élaborer une stratégie d’ensemble sur le site. Il s’avère que Medkouk n’est pas, comme on pourrait le croire à première vue, un tell conique parfait. Il se présente comme une masse légèrement dissymétrique, dans laquelle l’érosion a joué de manière différentielle. Le tell – ce n’est pas étonnant au vu des vents dominants dans la région – a surtout été érodé sur sa face ouest. Il présente là de profonds sillons d’érosion, qui prennent leur source aux trois quarts de la pente. Toutefois, toute la face ouest n’a pas été érodée : sur l’axe est-ouest du site se développe un plan incliné qui n’a pas été creusé aussi violemment, sur une face pourtant constamment exposée aux intempéries. L’ensemble est une masse compacte de 120 m de diamètre qui s’élève aujourd’hui à 20 m au-dessus du niveau de la plaine.

40On a implanté à Medkouk le système de quadrillage de tell Hariri en définissant un nouveau secteur de recherche. L’axe est-ouest de calage du carroyage de Mari passe par Medkouk et le tell a donc été divisé en carrés de dix mètres de côté.

41Une coupe est-ouest du site montre précisément l’ampleur de ce plan incliné, qui est le seul élément de dissymétrie manifeste du tell. De part et d’autre de ce plan incliné se développent de profonds sillons d’érosion.

Sondages M 1 et M 2

42Ces différentes observations ont conduit à l’ouverture de deux sondages : le sondage M 1 est une tranchée large de dix mètres, ouverte sur l’axe est-ouest. On a d’emblée atteint une série très compacte de couches de terres de lessivage qui ont ruisselé sur le tell et sa surface. Par-dessous toutefois on atteint des lits très compacts d’un véritable béton d’argile et de gypse. Ces lits sont subhorizontaux, légèrement bombés au nord et au sud. Ils se développent transversalement par rapport à l’axe de la rampe supposée. Celle-ci paraît donc bien correspondre en profondeur à un dépôt volontaire de ce qui semble être une masse très compacte plaquée sur le reste de l’ensemble. Seul un sondage plus profond avec des moyens plus massifs pourrait permettre de s’en assurer.

43On a ouvert au nord de ce premier sondage, sur l’un des épaulements du tell et en amont d’un des grands sillons d’érosion, un deuxième sondage. On a rencontré immédiatement une situation très différente : non plus des lits subhorizontaux mais des couches inclinées, alternant des masses de terre compacte et de véritables veines bourrées de manière irrégulière de briques, très chargées en gravillons et gypse. Ce sont ces veines inclinées vers le nord-est qui expliquent l’existence de môles de résistance à l’érosion car elles sont beaucoup plus dures que la terre qui les environne : là au contraire se creusent des oueds. On a décapé une partie du nord du tell pour mettre en évidence cette alternance qui caractérise toute la calotte supérieure du tell. Au sommet du tell, la forte densité de tombes récentes a empêché d’étendre la fouille. En conclusion, on a clarifié les deux anomalies topographiques rencontrées à l’ouest : une véritable rampe d’accès et une structure binaire de construction expliquent l’originalité d’un ensemble dont il n’est guère possible de proposer une datation précise, car aucun tesson significatif n’est sorti de ces sondages.

Le sondage M 3

44Ce sondage a été implanté contrairement aux deux autres en bas de pente et sur la face est, là où les données sont conformes à l’apparence du tell sur ses faces est, sud et nord. La seule observation particulière que l’on peut faire est liée au profil irrégulier du tell : une pente très douce, qui constitue une sorte de glacis, suivie d’une pente beaucoup plus forte. Quatre paliers de cinq mètres chacun ont donné des informations très différentes de ce que l’on avait glané à l’ouest. Une terre compacte gravillonneuse a été déversée, selon une pente allant vers l’intérieur du tell, et elle constitue le socle de l’ensemble du massif. On a tenté de repérer la limite de ce type d’installations en remontant le long de la face est du tell, mais les trois paliers successifs ouverts dans ces secteurs ont tous fourni les mêmes informations. Une tombe d’enfant sans matériel a été découverte dans la masse de ces remblais mais elle est probablement récente et postérieure au massif lui-même.

45Il reste à définir la nature de cet édifice et la date de son édification : les indices réunis militent en faveur d’un monument religieux, éventuellement funéraire, mais peut-être aussi une plate-forme, s’il s’avère que nous sommes en présence, à l’ouest, d’une rampe d’accès. On en connaît en tout cas maintenant assez bien le mode de construction.

CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES

46Les recherches archéologiques conduites à tell Hariri ont donc permis de poser les premiers jalons du nouveau programme de recherche. Elles doivent maintenant s’élargir à de nouveaux secteurs. Dans le cas de l’axe 1, il convient de s’orienter plus à l’ouest, et forts des acquis de la dernière campagne, de poursuivre l’étude de l’environnement du palais. L’axe 2 de recherche, le chantier N 1, est tout à fait prometteur et nécessite des compléments d’information. On tient là la possibilité d’étudier tout un quartier de la Ville II, en dépit des fosses qui sont venues perturber le secteur. Enfin, l’étude de Medkouk nécessite des moyens plus conséquents et des méthodes de détection en profondeur d’éventuels vestiges, du type caveau funéraire par exemple. Les restes en surface sont à ce point lessivés que toute installation qui a pu couronner ce site a disparu. Il convient donc d’envisager pour Medkouk une autre formule de recherches.

Notas

1 Sur ces axes de recherche et leur mise en perspective, voir Butterlin 2007b, 2008b et 2009a.

2 Sur les problèmes très particuliers posés par la tribune, Parrot 1958a, p. 132-143, fig. 151-152, pièces 66, 66 bis et ter. Sur l’interprétation de l’évolution de l’ensemble, voir Margueron 1982, p. 228-229, fig. 161 pour la restitution d’une porte axiale d’accès au groupe des pièces 66, et Margueron 2004, p. 372-373 et p. 465, dont l’interprétation a évolué au vu en particulier de la fouille du palais de tell Bi’a. La tribune d’abord considérée comme un rajout est interprétée comme un élément d’origine.

3 Parrot 1958a, p. 315.

4 Margueron 1982, p. 286, fig. 209 ; Parrot 1958a, p. 310 et 338.

5 Parrot 1938, p. 22-24.

6 Sur ces datations, Parrot 1940, p. 20-23, Dossin 1940, p. 161-164, en dernier lieu Margueron 2004, p. 331-332, et sur les questions de chronologie de la période des Shakkanakku, voir notre mise au point, Butterlin 2007.

7 Parrot 1969 et 1970. La pièce a été fouillée en 1968 (17e campagne) pour moitié puis en 1969 (Parrot 1969, fig. 7, p. 236). Rien n’est mentionné à son sujet dans les rapports préliminaires. Le plan de 1969 fait apparaître des fours.

8 Sur ce problème, voir Margueron 2004, p. 196-216.

9 Sur les problèmes de stratigraphie du chantier L, voir Butterlin 2008b.

10 Margueron 2004, fig. 105, p. 137.

11 Margueron 2004, fig. 115, p. 143. Sur ce problème, ibid., p. 142-145.

Índice de ilustraciones

Leyenda Fig. 1 – Secteurs fouillés en 2005
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Leyenda Fig. 2 – États successifs de la tribune
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Leyenda Fig. 3 – Palais, tribune de plâtre état 1
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Leyenda Fig. 4 – Palais, sondage tribune, porte bouchée
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Leyenda Fig. 5 – Palais Sud 1 : vue générale du mur est du Grand Palais Royal
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Leyenda Fig. 6 – Palais Sud 1 : sondage est, angle sud-est du palais et terrasse du temple aux Lions
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Leyenda Fig. 7 – Palais Sud 1 : état Grand Palais Royal
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Leyenda Fig. 8 – Palais Sud 1 : redan du palais P 1
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Leyenda Fig. 9 – Palais Sud 1 : état palais P 1
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Leyenda Fig. 10 – Palais Sud 1 : paroi ouest sondage ouest, glacis successifs au sud du palais
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Leyenda Fig. 11 – Palais Sud 1 : séquence des palais Ville II, façade sud
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Leyenda Fig. 12 – Chantier L : plan de VII W 50
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Leyenda Fig. 13 – Chantier L : vue générale de la fouille
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Leyenda Fig. 14 – Chantier N 1 : plan schématique par phases
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Leyenda Fig. 15 – Chantier N 1, plan IX N 24 : état Ville II récent
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Leyenda Fig. 16 – Chantier N 1 : plan IX N 25 état récent
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Leyenda Fig. 17 – Chantier N 1 : locus 7, sol 1, Ville II état récent
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Leyenda Fig. 18 – Chantier N 1 : locus 7, section état ancien et remblais
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Leyenda Fig. 19 – Tell Medkouk, vue générale
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