Le temps des dynasties
p. 61-85
Texte intégral
“Apothicaire, S. m. celui qui prépare & vend les remèdes ordonnés par le Médecin. Les Apothicaires de Paris ne font avec les marchands Épiciers, qu’un seul & même corps de communauté, le second des six corps des Marchands.
On conçoit aisément qu’une bonne police a dû veiller à ce que cette branche de la Médecine, qui consiste à composer les remèdes, ne fût confiée qu’à des gens de la capacité & de la probité desquels on s’assurât par des examens, des expériences, des chefs-d’œuvre, des visites, & les autres moyens que la prudence humaine peut suggérer” (L’Encyclopédie).
1Le Jardin royal avait connu, depuis la mort de Guy de La Brosse, une période de décadence progressive sous l’administration fort inégale des premiers médecins du roi. Aussi, une fois Vallot disparu, la surintendance de l’établissement fut-elle réunie à celle des bâtiments royaux et assurée par l’énergique Colbert, puis par ses successeurs Louvois et Édouard-Colbert de Villacerf. Durant cette véritable mise sous tutelle, dont le mérite fut d’assainir la gestion du Jardin, Fagon cumula les fonctions de démonstrateur de chimie et de sous-démonstrateur d’“extérieur des plantes”. Le savant, brillant médecin de cour autant que botaniste éclairé, obtint l’intendance du Jardin en 1693 puis, six ans plus tard, la surintendance. Il eut le mérite de faire cesser les querelles avec la Faculté de Paris et d’attacher à l’établissement dont il avait la charge des scientifiques de haute valeur1.
2Parmi ceux-ci figurent en bonne place des membres de deux grandes dynasties d’apothicaires parisiens : les Boulduc et les Geoffroy. Il s’agissait de familles “où les traditions d’ordre intellectuel se transmettaient à travers plusieurs générations, où les fils héritaient non seulement de l’officine des pères, mais de leur renom scientifique et tenaient à honneur de continuer leurs ancêtres dans ce domaine supérieur à celui des intérêts matériels”2.
3Pour autant, les intérêts matériels n’étaient pas négligés chez les Geoffroy ou les Boulduc, comme chez les autres notables parisiens de l’apothicairerie. Des documents d’époque révèlent qu’ils “ne se contentaient pas de délivrer des drogues et de porter des clystères à leurs clients de marque, mais qu’ils allaient les voir à domicile, même en province, tout comme les médecins les plus réputés ; qu’en retour ils en recevaient de magnifiques honoraires et des cadeaux princiers : boucles de diamant, bagues ornées de pierres précieuses, pendules à répétition, etc.”3.
4Ce sont donc de riches bourgeois éclairés, reconnus à la fois dans le monde professionnel et au sein des cercles scientifiques, qui vont faire bénéficier le Jardin royal de leurs compétences.
Simon Boulduc, le sage

FIG. 8 - Blason de Pierre et Gilles-François Boulduc.
5Né en 1652, Simon Boulduc était issu d’une famille d’épiciers parisiens, qui avait glissé vers l’apothicairerie en 1636. Ceci n’est pas surprenant car les deux métiers, longtemps très voisins, restèrent réunis jusqu’en 1777 au sein d’une même corporation — la deuxième des six corporations de marchands —. Il existait des apothicaires-épiciers, dont beaucoup furent titulaires au XVIIème siècle de la double maîtrise4. Pierre Boulduc, le père de Simon, occupa une place importante dans sa communauté. Élu conseiller pour l’apothicairerie, puis garde, il obtint à la cour une charge qui lui permit d’adopter des armes parlantes5 “[…] d’argent au chevron d’azur, chargé de trois étoiles d’or et accosté de trois ducs (oiseaux) de gueules tenant sous leurs pattes une boule de sable”6. Ce blason, matérialisant sous forme de rébus le nom de Boul-duc, est retrouvé sur le portrait peint de Pierre, à la Salle des Actes de la Faculté de pharmacie de Paris7.
6À l’issue d’études classiques, Simon fut reçu maître-apothicaire en 1672, grâce à l’initiation prodiguée par son père8. Précisons que les fils de maîtres avaient la possibilité d’accéder eux-mêmes à la maîtrise, à la suite de leur apprentissage, selon des modalités avantageuses : ils pouvaient être dispensés de l’examen (ou “lecture”) ou du chef-d’œuvre, ou bien encore subir les deux épreuves, mais simplifiées ; par ailleurs, ils payaient des droits d’immatriculation moins élevés que les candidats ordinaires9.
7Simon Boulduc tint à Paris une officine rue des Boucheries-Saint-Germain, dans la maison de ses ancêtres. Il fit d’ailleurs, en 1683, une préparation publique de thériaque avec Mathieu-François Geoffroy et Antoine Josson. Mais, l’apothicaire assuma au cours de sa vie beaucoup d’autres fonctions que celles de simple dispensateur de médicaments. D’abord, il fut — à l’image de son père — conseiller, puis garde, consul et juge de sa corporation. Nous verrons plus tard que celle-ci le nomma, alors qu’il atteignait la fin de son existence, directeur perpétuel du Jardin des apothicaires. Ensuite, à la cour, outre les charges d’apothicaire de la princesse palatine10 et de la reine douairière d’Espagne, Boulduc remplit celle d’“apothicaire-artiste du roi” Louis XIV Cette dernière fonction l’amena à occuper plusieurs domiciles, distincts de sa maison du Faubourg-Saint-Germain déjà mentionnée : il résida ainsi au Palais-Royal jusqu’en 1720, au Cloître Saint-Honoré de 1720 à 1722, rue Saint-Honoré de 1722 à 1729 et dans les divers châteaux où se déplaçait le roi. Enfin, l’apothicaire eut comme client le duc de Saint-Simon, qui le cite dans ses Mémoires11 (cf. infra)12.
8Au Jardin royal, Simon Boulduc suppléa dès 1686 Fagon, qui créa pour lui six ou neuf ans plus tard un poste de démonstrateur de chimie. Les dates données par Dorveaux et Lemoine pour la prise d’effet de cette fonction divergent : 1692 selon le premier auteur, 1695 selon le deuxième13. Dorveaux cite Nicolas de Blégny, lequel mentionnait dans son Livre commode des adresses de Paris, pour 169214 : “Il y a plusieurs apothicaires de cette Communauté qui se piquent d’avoir chez eux un grand assortiment de préparations chimiques et pharmaceutiques, par exemple : messieurs Geoffroy, rue Bourtribourg, et Bolduc [sic], rue des Boucheries-Saint-Germain, qui opère au Jardin royal des plantes”15.
9Et Dorveaux ajoute logiquement : “À cette époque [en 1692], Boulduc avait un laboratoire au Jardin royal des plantes, où il était démonstrateur de chimie”16. “Il est certain en tout cas que, dans l’état des dépenses pour 1687, on trouve, dans les dépenses fixes, la somme accordée à Fagon pour son titre de démonstrateur, et, dans les dépenses non fixes, “1.324 livres 10 sols à Boulduc apothicaire pour son cours de chimie””17.
10De même, en 1691, mille trois cent quatre-vingt livres douze sols seront attribués “[…] à Boulduc, Apothicaire par gratification en considération de son travail au cours de chimie […] qu’il a enseigné au laboratoire du Jardin royal des plantes pendant 1690 et des drogues provenant dudit Cours dont il a délivré une partie pour être distribuée aux charités des paroisses des environs de Paris, et l’autre partie aux religieuses Capucines”18.
11Simon entra en 1694 à l’Académie des sciences, dont il fut nommé chimiste-pensionnaire en 1699 et vétéran en 1723. À cette dernière date, son poste devenu vacant fut occupé par Claude-Joseph Geoffroy dit Geoffroy le cadet, le second fils de Mathieu-François Geoffroy. Il nous faut préciser à ce propos, que c’est surtout Simon qui établit les solides liens d’amitié unissant sa famille à celle des Geoffroy, la seconde dynastie d’apothicaires dont nous allons parler. Il fut ainsi le “conducteur” (c’est-à-dire celui qui présente l’impétrant au jury) d’Étienne-François Geoffroy, dit l’aîné, frère de Claude-Joseph, lors de son examen de maîtrise. Un an après, Mathieu-François Geoffroy rendit le même service au fils de Simon, Gilles-François, tandis que ce dernier “conduisit” ultérieurement à son tour Geoffroy le cadet.
12Simon Boulduc mourut en 1729, dans la capitale. Détail curieux, Fontenelle qui avait promis trente ans auparavant de faire l’éloge de tous les académiciens défunts, oublia de prononcer le sien. Le portrait de l’apothicaire, conservé comme celui de son père et de son fils à la salle des Actes de la Faculté de pharmacie de Paris19, fut décrit par Planchon de la manière suivante : “Simon Boulduc a la figure pleine de vivacité et d’intelligence ; les cheveux, ou plutôt la perruque à la Louis XIV, sont de couleur brun foncé. Le grand col Louis XIII [de Pierre] est remplacé par un rabat en tissu léger, translucide, qui sur la robe noire donne un faux air d’abbé […]”20.

FIG. 9 - Boulduc (Simon) 1652-1729.
13Le savant adressa de nombreux mémoires à l’Académie des sciences, portant sur la chimie, la pharmacie et la médecine. Son domaine de prédilection, qu’il explora durant vingt ans, fut l’étude des propriétés physico-chimiques des médicaments purgatifs. En 1699, Boulduc présenta cette thématique de recherche devant l’Académie en ces termes21 : “Il serait très important de connaître en quoi consiste la vertu des médicaments purgatifs. Les plus habiles d’entre les modernes, quoique beaucoup plus éclairés sur cette matière que les anciens, n’en ont presque donné qu’une histoire naturelle, mais M. Boulduc entreprend d’en faire une recherche physique par l’analyse, par les mixtions et les fermentations qu’il fera de ces médicaments, en suivant par ordre leurs genres et leurs espèces. Comme c’est un travail d’une très longue discussion et qui demande un grand nombre d’expériences, il ne sera fait tout au plus que dans deux ans, et ce pourra être un in-quarto de deux cents pages”22.
14L’apothicaire étudia donc tour à tour la coloquinte, le jalap, la gomme-gutte, l’ellébore noir, la scammonée, la gratiole, l’aloès, la rhubarbe, la bryone, le concombre sauvage, l’agaric blanc, les fleurs et feuilles de pêcher, le méchoacan, le sel d’Epsom… et même l’ipécacuanha, qu’il classait dans les purgatifs. Par ailleurs, Boulduc ayant reconnu que la distillation sèche n’était pas un procédé infaillible pour l’extraction des principes actifs végétaux, il eut l’idée d’employer des solvants. Ce pionnier de la phytochimie fut aussi l’un des précurseurs de la titrimétrie : en 1698, il essaya de doser l’acidité du vinaigre par neutralisation avec du carbonate de potassium, puis pesée du solide formé après évaporation23. Enfin, Simon Boulduc fut chargé par l’Académie de rédiger un rapport sur un charlatan nommé Ozanne, “médecin empirique” à Chaudray. Malheureusement, le document établi par l’apothicaire, n’a pu être retrouvé24.
Gilles-François Boulduc, le bon fils
15Simon Boulduc fut remplacé en 1729 au Jardin royal par son propre fils, prénommé Gilles-François, auquel il avait déjà fait exécuter des démonstrations à sa place. On trouve là le premier exemple d’une pratique qui allait devenir courante dans le corps enseignant de l’établissement : le recrutement familial. Nous envisagerons plus loin le cas des Rouelle, des Brongniart et des Milne-Edwards, mais les familles Jussieu et Becquerel sont également restées célèbres à cet égard25. Notons au passage le rôle important de la pharmacie dans la constitution de telles lignées puisque, ainsi que le rappela Cap, les dynasties savantes des Geoffroy, des Jussieu26 et des Brongniart sortirent toutes trois d’une officine pharmaceutique […]”27.
16Gilles-François Boulduc, qui vit le jour à Paris en 1675, fit d’abord des études classiques. Puis, il s’initia à la pharmacie chez son père, tout en apprenant la physique de Descartes avec un membre de l’Académie des sciences, nommé Régis. Après quoi, le jeune homme se consacra corps et âme à la chimie, sous la tutelle du tandem apothicaire-médecin qui enseignait alors cette discipline au Jardin royal : Simon Boulduc et Antoine de Saint-Yon, le second étant à l’époque le suppléant de Fagon. Selon Dortous de Mairan, secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences qui écrivit l’éloge de Boulduc fils : “Ce père attentif à l’instruction d’un fils qui lui paraissait de plus en plus mériter tous ses soins, retraçait chaque jour à ses yeux dans le particulier, et par mille opérations délicates mais sensibles, ce qu’une théorie abstraite n’avait présenté qu’à l’esprit. Les leçons domestiques aidaient merveilleusement celles du Jardin du roi, et les unes et les autres secondées par le goût vif du jeune artiste, le mirent bientôt en état de se distinguer dans la profession à laquelle on le destinait”28.
17Gilles-François fut immatriculé auprès du corps des apothicaires le 14 janvier 1695 et reçu maître le 14 mars suivant. Son immatriculation se trouva formulée comme suit : “Ce jourd’hui quatorzième janvier 1695, monsieur Mathieu François Geoffroy nous a présenté François Boulduc, fils de monsieur Simon Boulduc, ci-devant garde qui nous a certifié qu’il était de la religion catholique apostolique romaine, pour être immatriculé pour exercer la Pharmacie, ce que nous lui avons accordé en faveur de laquelle immatricule il a donné la somme de huit cents livres […]. Il nous a en même temps supplié de lui donner des Interrogateurs, ce que nous lui avons accordé.
Domini Interrogaturi
MM. Claude Biet | Champagneux | Héron |
Soubiron | Balby | Geoffroy |
Lenoir | Molinier | Régnault”29. |
18Quant au programme de son chef d’œuvre, ce fut : “Pulvis contra pestem de la description de Renou, et Diascordium de Fracastorius”30.
19Boulduc fils eut ensuite une carrière calquée sur celle de son père, auquel il succéda dans presque toutes ses charges. Garde de la communauté des apothicaires entre 1709 et 1711, consul en 1717, il fut nommé échevin en 1726. À la cour, après avoir pris la suite de Simon auprès de la princesse Palatine31, il devint le premier apothicaire de Louis XIV en 1712, puis celui de Louis XV trois ans plus tard et enfin celui de la reine en 1735 — en remplacement d’Isaac Riqueur. Planchon précise que “Boulduc usa toujours de ces relations à la cour dans l’intérêt de sa corporation et que “ses fonctions le retenaient très souvent à Versailles”32. À l’Académie des sciences, où il fut admis en 1699 comme élève de son père, Gilles-François fut nommé adjoint-chimiste en 1716, avant de devenir associé en 172733.
20Saint-Simon, qui fut son client, mentionna plusieurs fois élogieusement l’apothicaire dans ses Mémoires34. D’abord en 1712, à l’occasion de la mort du Dauphin Louis, duc de Bourgogne et père du futur Louis XV : “Le mercredi 17 [février 1712], le mal augmenta considérablement. J’en savais à tout moment des nouvelles par Cheverny, et quand Boulduc pouvait sortir des instants de la chambre, il me venait parler. C’était un excellent apothicaire du Roi35 qui, après son père, avait toujours été et était encore le nôtre, avec un grand attachement, et qui en savait pour le moins autant que les meilleurs médecins, comme nous l’avons expérimenté, et avec cela, beaucoup d’esprit et d’honneur, de discrétion et de sagesse. Il ne nous cachait rien à Mme de Saint-Simon et à moi. Il nous avait fait entendre plus clairement ce qu’il croyait de la Dauphine, il m’avait parlé aussi net dès le second jour sur le Dauphin. Je n’espérais donc plus […]”36.
21Saint-Simon cite une deuxième fois l’apothicaire, précisément à propos du décès de la Dauphine Marie-Adélaïde de Savoie, morte quelques jours seulement avant le Dauphin son époux. La maladie de la Dauphine, subite, singulière, peu connue aux médecins, et très rapide, avait dans sa courte durée noirci les imaginations […]. Fagon et Boudin ne doutèrent pas du poison, et le dirent nettement au Roi, en présence de Mme de Maintenon seule. Boulduc, qui m’assura en être convaincu, et le peu des autres à qui le Roi en voulut parler, et qui avaient assisté à l’ouverture [l’autopsie du cadavre], le confirmèrent par leur morne silence”37.
22Ces deux morts consécutives parurent donc suspectes à divers hauts personnages de l’époque, et le mémorialiste titre lui-même : La Dauphine empoisonnée38. En fait, le Dauphin comme la Dauphine avaient probablement succombé à une fièvre éruptive foudroyante, rougeole ou scarlatine39. La troisième rencontre entre Saint-Simon et Boulduc au chevet d’un illustre mourant, se fit en avril 1714 à l’occasion du décès du duc de Berry, troisième fils du Grand Dauphin. Là encore, la suspicion du poison plane : “Dès ce jour-là” explique Saint-Simon “je sus qu’en croire : Boulduc, apothicaire du Roi, qui était extrêmement attaché à Mme de Saint-Simon et à moi, et dont j’ai eu quelquefois occasion de parler, me glissa à l’oreille qu’il n’en reviendrait pas et qu’avec quelque petit changement c’était au fond la même chose qu’à Monsieur et Madame la Dauphine. Il me le confirma le lendemain, ne varia ni pendant la courte maladie ni depuis, et il me dit le troisième jour que nul des médecins qui voyaient ce prince n’en doutait, et ne s’en étaient pas cachés à lui qui me parlait”40. En effet, le duc de Berry mourut le 4 mai 171441.
23Saint-Simon cite une quatrième fois notre apothicaire dans ses Mémoires42, à propos d’une place d’échevin qu’il ne put lui faire obtenir : “Pour donner plus de poids aux miennes [paroles], je lui dis [au Régent] que ce n’était point par amitié pour Trudaine que je lui parlais, puisqu’il pouvait se souvenir qu’il m’avait accordé son agrément d’une place d’échevin de Paris pour Boulduc, apothicaire du Roi, très distingué dans son métier, et que j’aimais beaucoup de tout temps ; que là-dessus je l’avais demandée à Trudaine qui me l’avait refusée avec la dernière brutalité […]”43. Nous avons vu que Boulduc devint tout de même échevin, six ans plus tard.
24Son portrait, visible à la Salle des Actes de la Faculté de pharmacie de Paris44, nous donne une idée de son physique. Gilles-François “porte une grosse perruque de couleur grise, pas de moustache ni de royale : les traits sont forts, le visage pâle, la physionomie moins éveillée et moins vive que celle de ses prédécesseurs”45, c’est-à-dire son père et son grand-père.

FIG. 10 - Boulduc (Gilles-François) 1675-1742.
25Ajoutons qu’un médaillon à l’effigie de l’apothicaire, orne la façade de la même Faculté46. Boulduc hébergea le médecin chimiste allemand Jean Grosse, lequel géra son officine de la rue des Boucheries pendant trente ans et devint son collègue à l’Académie47. Dortous de Mairan, dans son “Éloge”, a rappelé cette collaboration qui nous éclaire sur les qualités humaines de notre personnage, dont les sentiments “de l’amitié la plus tendre et la plus constante ne lui étaient pas moins connus : il a passé les trente dernières années de sa vie avec M. Grosse savant chimiste allemand, de cette Académie, qu’il avait logé chez lui, et dont le caractère avait fortifié de plus en plus une liaison que la conformité de leurs études avait fait naître”48.
26Le pharmacien jouit d’une robuste santé jusqu’en 1741 : il fut alors sujet à des malaises et contracta un érysipèle — une streptococcie cutanée — à la jambe gauche. Se croyant guéri, il reprit le 15 janvier 1742 son service à Versailles, où il mourut deux jours plus tard. Il avait obtenu auparavant de Louis XV la survivance de sa charge de premier apothicaire du roi pour son fils, Jean-François, alors âgé de quatorze ans49.
27Les travaux de Gilles-François Boulduc relèvent davantage de la pharmacie chimique que de la chimie pure. Le savant s’intéressa notamment aux sels de Glauber (sulfate de sodium), d’Epsom (sulfate de magnésium), à l’Elaterium de Dioscoride (purgatif extrait du concombre sauvage), à la cascarille, un petit arbre des Antilles (Croton Elutheria) dont l’écorce était utilisée comme celle des quinquinas. Il simplifia la préparation du sublimé corrosif et se pencha sur l’analyse des végétaux. Par ailleurs, Boulduc découvrit une nouvelle méthode de préparation du sel polychreste de Seignette (tartrate double de sodium et de potassium), en même temps que son collègue Geoffroy. Dortous de Mairan raconte à ce sujet l’anecdote suivante, qui constitue une excellente approche des problèmes soulevés par les découvertes simultanées : “Pendant que M. Boulduc lisait à 1’Académie son mémoire sur le sel de Seignette et qu’il montrait un cristal qu’il venait de faire de ce sel, M. Geoffroy qui travaillait comme lui sur cette matière, sans qu’ils s’en fussent rien communiqué, entra dans l’assemblée, reconnut le sel polychreste à la première inspection de son cristal et sur le champ il en alla chercher de tout pareil qu’il avait fait aussi. L’Académie ayant vu les pièces justificatives de part et d’autre, et entendu contradictoirement les parties, jugea que la découverte serait donnée sous les deux noms, comme elle l’a été, en effet, dans l’histoire de 1731. Il y a dans toutes les sciences des principes et des règles invariables, qui ne peuvent manquer de conduire au même but ceux qui savent les manier”50.
28De plus, Boulduc fut probablement le premier à donner la composition du gypse. Mais ce sont surtout ses recherches sur la composition des eaux minérales, de Forges, de Passy et de Bourbon l’Archambault, qui le rendirent célèbre51.
Étienne-François Geoffroy, l’érudit
29Saint-Yon qui, ainsi que nous l’avons signalé, suppléa Fagon dans son enseignement au Jardin, dut se retirer en 1707 à cause de sa mauvaise santé. Son successeur dans la première pseudo-chaire de chimie, Étienne-François Geoffroy, dit Geoffroy l’aîné, était né en 1672 à Paris et appartenait à la cinquième génération d’une célèbre lignée d’apothicaires, initiée en 1584 par Baptiste Geoffroy. Le père de notre pharmacien, Mathieu-François-Joseph, qui avait épousé la fille d’un chirurgien célèbre nommée Louise de Vaux, fut l’un des plus grands apothicaires de Paris : garde de sa corporation, échevin, puis consul, il “eut, en 1690, l’insigne honneur d’être appelé à Versailles, par ordre de Louis XIV auprès de Mme la Dauphine, alors atteinte de la maladie qui devait l’emporter quelques mois plus tard, et de lui administrer “de l’extrait de quinquina en petites pilules dorées”52. Fournisseur attitré de l’aristocratie, il compta parmi ses meilleurs clients : le duc de Chaulnes et sa femme, M. de Launac, l’abbesse de Vernon, le ministre de la Guerre Louvois, Mme la chancelière Le Tellier, etc.53.
30Il tint rue Bourg-Tribourg une splendide officine qui, décrite avec éloges par le médecin anglais Martin Lister, accueillait régulièrement un petit cénacle d’illustres savants de l’époque. De plus, Mathieu-François fréquenta assidûment des artistes, comme Sébastien Le Clerc qui dessina ses armoiries — d’azur à la tour donjonnée de trois donjons d’or — ou Nicolas de Largillière qui exécuta un magnifique portrait de l’apothicaire, superbement gravé par Chéreau54.
31Étienne-François Geoffroy était l’aîné d’une fratrie de six enfants : quatre garçons et deux filles. Sa venue au monde fut ainsi notée dans le journal de son père, auquel nous aurons souvent recours par la suite : “le 13 février 1672, un samedi, naquit Étienne-François Geoffroy, mon fils aîné”55.
32L’ambiance éminemment favorable sur le plan intellectuel qui régnait dans la maison paternelle, permit au jeune garçon d’acquérir des connaissances fort étendues dans tous les domaines. Son père organisait pour lui, ainsi que le rapporte Fontenelle, “des conférences réglées, où M. Cassini apportait ses planisphères, le P Sébastien ses machines, M. Joblot ses pierres d’aimant ; où M. du Vernay faisait des dissections et M. Homberg des opérations de chimie, où se rendaient au moins par curiosité plusieurs autres savants fameux, et de jeunes gens qui portaient de beaux noms, qu’enfin ces conférences parurent si bien entendues, et si utiles, qu’elles furent le modèle et l’époque de l’établissement des expériences de physique dans les collèges ; sans doute on croirait qu’il s’agissait de l’éducation d’un fils de ministre, destiné pour le moins aux grandes dignités de l’Église ; cependant tout cela fut fait pour le jeune Geoffroy, que son père ne destinait qu’à lui succéder dans la profession. Mais il savait combien de connaissances demande la Pharmacie embrassée dans toute son étendue56, il l’aimait, et par goût, et parce qu’elle lui réussissait fort, et il croyait ne pouvoir mieux faire que de fournir à son fils les moyens de poursuivre avec plus d’avantage la carrière où lui-même aurait vieilli”57.
33Grâce à cette éducation soignée, Étienne-François devint maître ès arts en 1689, à l’âge de dix-sept ans. Il apprit, par ailleurs, la pharmacie dans l’officine paternelle et donna des cours particuliers de botanique, de chimie et d’anatomie. Pour se délasser, le jeune homme fabriquait lui-même les verres de lunettes destinés à ses observations astronomiques, ou s’initiait à l’italien. En 1692, il se rendit par petites étapes, visitant Lyon ainsi que les villes du midi, à Montpellier chez l’apothicaire Pierre Sanche. Ceci, afin de perfectionner comme compagnon ses connaissances pharmaceutiques. Le fils de Sanche partait, en échange, faire un stage semblable chez Mathieu-François, à Paris. Durant son séjour, Étienne-François fréquenta probablement — sans s’y inscrire de manière officielle — la brillante Faculté de médecine de Montpellier, laquelle dispensait des cours spéciaux à l’attention des élèves apothicaires. En 1693, notre voyageur revint à Paris en prenant son temps, comme à l’aller. Il passa cette fois-ci par l’ouest : Toulouse, Bordeaux, La Rochelle, la Bretagne (où il faillit se trouver bloqué à Saint-Malo, sous les bombardements des Anglais), Caen, pour arriver finalement dans la capitale au mois de janvier 169458.
34On trouve, dans le journal de Mathieu-François, une relation très précise du voyage de son fils aîné : “1692 - le jeudi 21 août, mon fils aîné est parti pour Lyon avec M. et Mme Creton avec lesquels il a vu toute la Provence […]. 1693 - le jeudi 9 octobre 1692, mon fils aîné est entré chez M. Sanche, apothicaire de Montpellier, chez lequel il a demeuré jusqu’au vendredi 7 août 1693 qu’il est parti pour Toulouse, Bordeaux, etc., qui sont dix mois moins deux jours, pendant lequel temps, ou environ, M. Sanche, le fils, est resté chez moi”. Suit l’énumération détaillée des différentes étapes, au nombre d’une vingtaine, du voyage de retour d’Étienne-François. “1694 - le vendredi 8 janvier, M. et Mme Du Bourneuf et mon fils aîné sont arrivés [à Paris]”59.
35Étienne-François Geoffroy fut reçu maître-apothicaire à la fin de l’année 1694, sous la conduite de Simon Boulduc. Le jury lui avait donné, comme sujet de chef-d’œuvre : “L’orviétan de la description d’Hoffmannus et la poudre de laetificans de Renou”. Le programme de ce chef-d’œuvre était orné d’une magnifique gravure, qui a malheureusement disparu : on n’en a conservé qu’une description en vers latins, faite par Rollin60. Geoffroy père a noté dans son journal : “Le mardi 14 septembre, examen de mon fils aîné. Le samedi 2 octobre, exposition de son chef-d’œuvre. Le lundi 4, confection de celui-ci et prestation de serment”61.
36En 1698, bien que n’étant pas encore docteur, Geoffroy partit en Angleterre comme médecin du comte de Tallart, ambassadeur extraordinaire de Louis XIV Il fut présenté aux savants de Londres, se lia d’amitié avec sir Hans Sloane qui le fit entrer à la Royal Society et devint fellow de Gresham College. L’apothicaire revint ensuite à Paris via la Hollande, établissant au passage quelques contacts intéressants. Il fut nommé en 1699 élève chimiste de Homberg à l’Académie des sciences, puis, seulement quelques mois plus tard, associé chimiste en remplacement de Nicolas Lémery passé pensionnaire.
37À l’automne 1700, Geoffroy accompagna en Italie, toujours en qualité de médecin, l’abbé de Louvois. L’ecclésiastique avait été chargé par Louis XIV de rapporter des livres précieux, destinés à la bibliothèque royale. Notre pharmacien mit à profit son voyage afin d’étudier diverses curiosités naturelles, telles la solfatare de Pouzzoles ou les aluns de Civita-Vecchia. Il avait senti croître, au cours de ses années de formation vagabondes, sa passion croissante pour l’art médical. Il décida donc — déjouant en cela les projets paternels — d abandonner la pharmacie dès son retour en France, afin de devenir docteur-régent de la Faculté de médecine. Et c’est son frère cadet, Claude-Joseph62, qui reprit l’officine de la rue Bourg-Tribourg, tandis que lui-même suivait des études universitaires : reçu bachelier, puis licencié, il devint docteur en 1704. Pour les trois thèses qu’il dut soutenir afin d’acquérir ses grades, Étienne-François choisit des sujets originaux, comme “Si le médecin est en même temps un mécanicien chimiste ?” (“An medicus philosophus mechano chymicus ?”). Il devait témoigner par la suite du même goût de la nouveauté dans les thèses qu’il présida et les dames de la bonne société témoignèrent beaucoup d’intérêt à l’égard de celle intitulée : “Si 1’homme a commencé par être ver ?” (“An humanis primordia vermis ?”)63.
38Le journal de Geoffroy père mentionne toujours fidèlement, jusqu’en 1702, les étapes importantes de la carrière du jeune apothicaire : “1698 - le 24 février, départ de mon fils aîné pour l’Angleterre […]. Le 16 [juillet], mon fils aîné a été reçu membre de la Société royale de Londres […]. 1699 - le 4 février, mon fils aîné a été agréé à l’Académie des sciences et y a été reçu élève le 7e […]. 1700 - le samedi 9 octobre, départ de mon fils aîné pour Rome […]. 1701 - le 1er septembre, retour d’Italie de mon fils aîné […]. 1702 - le 8 avril, mon fils aîné a été reçu bachelier en médecine”64.
39Comme il bénéficiait d’une fortune personnelle, Étienne-François Geoffroy ne s’adonna qu’à un exercice assez restreint de la pratique médicale, se consacrant surtout à des travaux scientifiques, ainsi qu’à ses charges d’enseignement. Nous avons vu que Fagon lui confia en 1707 son cours de chimie au Jardin royal. L’apothicaire alterna ensuite dans cette suppléance avec Louis Lémery et Claude Berger (voir fig. 1). À la mort de ce dernier en 1712, Fagon céda finalement sa charge professorale à Geoffroy, qui devint alors “démonstrateur de l’intérieur des plantes et professeur en chimie et pharmacie au Jardin royal”65. Le surintendant lui infligea involontairement un surcroît de travail, en lui demandant d’ajouter aux leçons de chimie des cours de matière médicale. Notre savant professait déjà cette dernière discipline dans la chaire de “médecine, chirurgie, pharmacie et botanique” du Collège royal66, où il avait succédé en 1709 à Tournefort67. Au Jardin, il dut donc dispenser quatre ou cinq heures de cours d’affilée, ce qui ne lassait pas — bien loin de là — ses auditeurs, mais occasionna un surmenage nuisible à sa santé68.
40En 1715, Geoffroy prit la succession de Homberg décédé, comme pensionnaire chimiste à l’Académie des sciences. Il occupa aussi les fonctions de doyen de la Faculté de médecine de Paris entre 1726 et 1729, un double décanat durant lequel il dut notamment faire face à un long procès, opposant les médecins aux chirurgiens de la capitale. Épuisé par ses nombreuses tâches, il s’éteignit tuberculeux à Paris en 1731, un an après avoir démissionné de son poste au Jardin. Son faire-part de décès fut ainsi rédigé : “Vous êtes priés d’assister au Convoi et enterrement de Monsieur Geoffroy, Docteur Régent, Ancien Doyen et Censeur de la Faculté de médecine de Paris, Professeur au Collège royal, Professeur en Chimie au Jardin royal des plantes, de l’Académie royale des sciences et de la Société royale de Londres, décédé en sa maison rue des Singes ; qui se fera ce jour d’hui Dimanche 7e Janvier 1731, à six heures précises du soir, en l’Église de Saint-Paul, sa paroisse, où il sera inhumé. Un De profundis”69.
41La mort empêcha Geoffroy d’achever son cours du Collège royal : il avait déjà envisagé les matières premières minérales et traitait les végétaux selon l’ordre alphabétique, lorsqu’il dut s’arrêter brusquement à la monographie de la mélisse. Il ne put donc jamais aborder le règne animal. Son fils et son petit-fils, docteurs en médecine, furent des naturalistes de valeur, tandis que le fils de son frère Claude-Joseph perpétuait la tradition pharmaceutique de la famille70.
42Plusieurs portraits de Geoffroy furent exécutés, dont l’un, dû au pinceau de Nicolas de Largillière, se trouvait autrefois à la Faculté de médecine de Paris. Il a disparu, mais sa version gravée en 1737 par Louis Surugue est heureusement parvenue jusqu’à nous71. Elle montre le savant coiffé d’une grande perruque bouclée à la Louis XIV, vêtu de la robe professorale garnie d’hermine, et s’appuyant de la main gauche sur un volume dressé, richement relié. L’expression du visage est calme et souriante. Aucun portrait d’Étienne-François ne figure parmi les trois de la famille Geoffroy qui ornent la Salle des Actes de la Faculté de pharmacie de Paris72. Enfin, un médaillon à l’effigie du savant est sculpté sur la façade de ce dernier établissement73.
43Selon Antoine-Laurent de Jussieu, Geoffroy fut “un savant modeste et un maître habile”74, dont Fontenelle décrivit le caractère comme “doux, circonspect, modéré, et peut-être même un peu timide”75. Notre démonstrateur au Jardin royal eut une grande réputation en tant que médecin, bien que sa grande sensibilité ait constitué une gêne dans l’exercice de son art : “Une chose singulière lui fit tort dans les commencements, il s’affectionnait trop pour les malades, et leur état lui donnait un air triste et affligé qui les alarmait ; on en reconnut enfin le principe, et on lui sut gré d’une tendresse si rare, et si chère à ceux qui souffrent”76. On peut légitimement soupçonner Fontenelle, qui rédigea l’éloge du savant, d’avoir profité de son portrait de Geoffroy médecin pour nous donner une description du praticien idéal : “Persuadé qu’un médecin appartient également à tous les malades, il ne faisait aucune différence entre les bonnes pratiques et les mauvaises, entre les brillantes et les obscures. Il ne recherchait rien, et ne rejetait rien. De là il est aisé de conclure que ce qui dominait dans le nombre de ses pratiques, c’était les obscures, ou les mauvaises, et d’autant plus que les premiers engagements lut étaient sacres, et qu’il n’eut pas voulu les rompre, ou s’en acquitter légèrement, pour courir aux occasions les plus flatteuses qui seraient survenues. D’ailleurs souverainement éloigné de tout faste, il n’était point de ceux qui savent aider à leur réputation, et qui ont l’art de suggérer tout bas à la Renommée, ce qu’ils veulent qu’elle répète tout haut avec ses cent bouches. Cependant le vrai avait percé à la longue, et M. Geoffroy était bien connu. Dans les grandes affaires de Médecine, ceux qui s’étaient saisis des premiers postes l’appelaient presque toujours en consultation, il était celui dont tous les autres voulaient emprunter les lumières”77.

FIG. 11 - Geoffroy (Étienne-François) 1672-1731. Gravé par Surugue en 1737 d’après N. de Largillière.
44Le savant fut le principal auteur de la pharmacopée parisienne de 1732, Codex medicamentarius seupharmacopoeia parisiensis78, éditée par la Faculté de médecine sous l’autorité du doyen Baron. Et en 1741, le cours de matière médicale inachevé que Geoffroy professa en latin au Collège royal fut publié par Étienne Chardon de Courcelles, sous la forme de trois volumes in-8°, intitulés Tractatus de materia medica, sive de medicamentorum simplicium historia, virtute, delectu et usu79. Notons qu’une première transcription, partielle et en langue anglaise, des leçons du savant avait été diffusée dès 1736. Des traductions de la “Matière médicale”80 en français, en anglais et en allemand furent commercialisées par la suite, ainsi que des “suppléments” dus à la plume d’autres auteurs. Dans son livre, Geoffroy décrit les végétaux exotiques sous leurs formes d’importation, généralement des organes isolés ou des fragments : racines, feuilles, écorces, branches, fleurs, fruits ou graines. Par contre, la morphologie des espèces locales est envisagée dans sa totalité. Les aspects botaniques sont complétés par des données analytiques qualitatives et quantitatives, obtenues grâce aux distillations et mises en relation avec les propriétés thérapeutiques des plantes81.
45Les travaux chimiques de l’apothicaire-médecin, si l’on excepte les quelques éléments inclus dans son traité de matière médicale, firent l’objet de plus d’une quinzaine de communications à l’Académie des sciences. Geoffroy apporta une contribution au développement des indicateurs colorés, lorsqu’il montra en 1699 que si la liqueur de rose était colorée en rouge par les acides, elle prenait une teinte verte en présence d’alcalis. Puis, il conduisit en 1700 une étude des phénomènes thermiques induits par le mélange de certains sels, qui est considérée comme l’une des premières tentatives d’utilisation du thermomètre en chimie. La même année, il mit au point une technique de détermination de la densité des solutions d’acides, par pesée dans une fiole spéciale. Entre 1702 et 1709, Geoffroy et Homberg utilisèrent une grande lentille ardente pour étudier la fusion des métaux. Ils montrèrent ainsi que le plomb, l’étain, le mercure et l’antimoine laissaient, après combustion, des résidus plus lourds que la substance initiale. Geoffroy confirma en 1704 l’“analyse” du soufre qu’avait faite Homberg, en reformant la substance grâce au chauffage de l’acide sulfurique en présence de matières combustibles. Il décrivit en 1713 les vapeurs blanches dégagées par l’ammoniaque, ainsi que par les acides chlorhydrique ou nitrique. Quatre ans plus tard, il étudia la composition du salpêtre, puis observa en 1719 la solidification de l’huile d’olive ayant absorbé des vapeurs nitreuses. Geoffroy montra par ailleurs, dans deux articles publiés en 1725 et 1727, que le bleu de Prusse pouvait être préparé en utilisant les substances animales les plus diverses, comme le sang, la laine, la corne brûlée ou les sabots.
46Si le savant fut un adversaire déclaré de l’alchimie, dont il dénonça certains super-cheries, il essaya d’expliquer les phénomènes expérimentaux par des théories dont ses collègues discutèrent parfois la valeur. Ainsi, ayant retrouvé en 1705 du fer dans les cendres des végétaux calcinés, il émit l’hypothèse suivante : l’élément, absent des plantes au départ, serait produit par l’action du feu grâce à l’existence d’un “soufre principe” ou “principe huileux”, présent à la fois dans la matière végétale et le métal. Et, bien que son collègue Louis Lémery ait vigoureusement démenti cette conception, Geoffroy n’en démordit pas. Il devait identifier en 1720 son “soufre principe”, un composant commun selon lui à tous les métaux, au fameux phlogistique de Stahl. Par ailleurs, en 1717, il pensa qu’au cours de la fermentation de l’urine, l’acide présent au sein du liquide biologique se transformait en alcali et il étendit cette possibilité de conversion aux acides minéraux82.
47Dans sa théorie générale de la matière, Geoffroy reconnaissait trois “substances simples” : le feu, l’eau et la terre, capables de se combiner pour former deux “principes” détectables par l’analyse : le soufre et le sel. Ce dernier existait sous deux formes interconvertibles, les acides et les alcalis. Tous ces éléments possédaient une structure microscopique de type corpusculaire, à l’origine des “rapports” (c’est-à-dire des “affinités”, cf. infra) gouvernant leurs combinaisons. En effet, ainsi que l’écrivit Geoffroy dans une communication majeure faite à l’Académie royale des sciences en 1718 et intitulée “Table des différents rapports observés en chimie entre différentes substances”83 : “On observe en chimie certains rapports entre différents corps, qui font qu’ils s’unissent aisément les uns aux autres. Ces rapports ont leurs degrés et leurs lois […] parmi plusieurs matières confondues et qui ont quelque disposition à s’unir ensemble, on s’aperçoit qu’une de ces substances s’unit toujours constamment avec une certaine autre préférablement à toutes”84. Par ailleurs, le savant énonçait la loi suivante : “toutes les fois que deux substances qui ont quelque disposition à se joindre l’une avec l’autre, se trouvent unies ensemble, s’il en survient une troisième qui ait plus de rapport avec l’une des deux, elle s’y unit en faisant lâcher prise à l’autre”85.
48Geoffroy, tirant les conséquences de ces principes, présentait dans sa publication une “table des rapports”, qui marqua une étape importante de l’histoire de la chimie. Mais, pourquoi le savant utilisa-t-il le mot étrange de “rapport”, au lieu de celui, apparemment plus clair, d’“affinité” ? Tout simplement parce que, dans le cadre d’une théorie corpusculaire de la matière, une explication de l’“affinité” des substances les unes pour les autres aurait pu être fournie par la théorie de l’attraction universelle de Newton. Or, l’Académie était hostile, à l’époque, à une application en chimie des idées du savant anglais, et la fâcheuse “attraction” — contraire aux principes cartésiens — transparaissait trop clairement à travers le terme d’“affinité”. Geoffroy substitua donc à celui-ci le mot plus neutre de “rapport”, aussi bien dans le titre que dans le texte de sa communication. Malgré cette précaution, les collègues du savant furent au début assez réticents, comme l’écrivit Fontenelle : “Ces affinités firent de la peine à quelques uns, qui craignirent que ce ne fussent des attractions déguisées, d’autant plus dangereuses que d’habiles gens ont déjà su leur donner des formes séduisantes ; mais enfin, on reconnut qu’on pouvait passer par dessus ce scrupule et admettre la Table de M. Geoffroy, qui, bien entendue et amenée à toute la précision nécessaire, pouvait devenir une loi fondamentale des opérations de chimie, et guider avec succès ceux qui travaillent”86. En fait, si l’on considère de près sa théorie corpusculaire, il ne semble pas que l’apothicaire ait pu appartenir à l’école newtonnienne — les craintes de ses collègues apparaissant donc a posteriori comme infondées. Ses descriptions de particules chimiques, poreuses ou garnies de pointes, capables de s’emboîter les unes dans les autres, s’apparentent plutôt aux idées de Descartes, de Gassendi ou de Nicolas Lémery87. Par ailleurs, ainsi qu’il a été récemment précisé : “Contrairement aux newtoniens anglais, Geoffroy ne cherche pas dans la chimie la preuve de l’existence de forces, il se borne à envisager les réactions chimiques d’un point de vue qui déplace la fonction explicative des principes, responsables des qualités, vers les relations […] le “rapport” de Geoffroy n’est pas seulement une attraction newtonnienne déguisée, c’est une attraction redéfinie dans un contexte qui lui préexistait, celui de la chimie des sels”88.
49Dans la fameuse “table”, nantie de seize colonnes, la ligne du haut répertoriait — sous des symboles conventionnels — toute une série de composés, comme l’alumine, le mercure, le plomb, le cuivre, l’argent, le fer, l’acide nitrique, l’eau, ou le soufre minéral. Et de haut en bas de chaque colonne étaient classés, par ordre d’affinités décroissantes, les symboles des substances capables de se combiner avec le produit figurant en tête de la colonne. Notons que le “soufre principe” — bien distinct du soufre minéral — était présent, figuré par un triangle ornementé. La loi du déplacement de Geoffroy était traduite par le fait qu’au sein d’une colonne, un composé donné était capable de déplacer tous ceux situés en-dessous de lui, de leur combinaison avec la substance de tête. Ce système ayant fait l’objet de diverses critiques, en raison des nombreuses approximations qu’il laissait subsister, Geoffroy publia en 1720 des “Éclaircissements”89 en complément à son article initial. Quoi qu’il en soit, malgré son hermétisme relatif et sa complexité d’utilisation, la “Table des rapports” devait être étendue par certains auteurs jusque vers 1780 et fut considérée par la postérité comme une contribution de poids aux progrès de la science chimique90.
50En 1730, Louis Lémery succéda à Geoffroy comme professeur de chimie au Jardin royal. Il s’agissait en quelque sorte d’une compensation logique, puisque les deux hommes ayant été suppléants de Fagon, le second avait été d’abord préféré au premier pour assurer la charge d’enseignement du surintendant. Le père de Louis avait fait, nous l’avons vu, un passage éclair dans l’établissement, avant de devenir le célèbre auteur du Cours de chymie, de la Pharmacopée universelle et du Traité universel des drogues simples91. Mais, s’il fut fils d’apothicaire, Louis Lémery n’embrassa pas la profession paternelle, ayant choisi de devenir médecin. Nous ne présenterons donc pas sa biographie dans le cadre de cet ouvrage, renvoyant le lecteur aux références concernées92. Remarquons simplement qu’après les Boulduc et les Geoffroy, une troisième dynastie savante versée dans la chimie pharmaceutique, celle des Lémery, marquait de sa présence le Jardin royal.
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51L’intérêt que nous avons manifesté, au sein de ce chapitre, à l’égard de certains membres éminents de la Communauté des apothicaires parisiens, nous a amené à évoquer divers détails d’organisation de la corporation concernée. Celle-ci se trouva, au XVIIème siècle, à l’origine de l’implantation et du développement du Jardin des apothicaires, où fut établi le siège de la Communauté avant que ne s’y installe, bien plus tard, le premier Collège de pharmacie. Il nous paraît donc intéressant d’évoquer brièvement le Jardin des apothicaires, par comparaison avec le Jardin royal, ne serait-ce que parce que certains de nos pharmaciens furent impliqués dans les deux institutions.
52La Communauté des apothicaires de Paris avait recueilli l’héritage de Nicolas Houel (cf. supra) grâce à un arrêt du Grand Conseil en date de 1624, lui donnant mission de planter un Jardin des simples93. Le projet vit le jour entre les rues de Lourcine et de l’Arbalète, sur une grande parcelle carrée acquise en 1626, attenante au terrain dit des Vieux-Fossés94. Les premières plantations furent effectuées à partir de 1627 par un jardinier attitré, chargé des multiples tâches que réclamait l’organisation des cultures95. Et un texte réglementaire de 1633, signé de la main même de Louis XIII, indiquait “qu’ayant reçu un terrain en friche, les apothicaires l’ont fait rétablir et planter de manière que maintenant par l’adjonction de plusieurs autres places attenantes qu’ils ont acquises l’on y voit un très beau et grand jardin rempli de toutes sortes de plantes rares et curieuses, servant à ladite profession, dans lequel les étudiants et aspirants à la maîtrise de la pharmacie se vont exercer et instruire”96. En 1638, le Jardin des apothicaires comptait plus de mille espèces, arbustives ou herbacées97. On se doute que de telles plantations nécessitaient un apport hydrique conséquent, dont les apothicaires se préoccupèrent dès le début de leur installation. Ils obtinrent ainsi des autorités parisiennes la concession gratuite d’un certain nombre de lignes d’eau pour arroser leurs terrains. Puis, en 1652, Pierre Boulduc fut chargé de collecter les fonds nécessaires à la réalisation de divers travaux d’irrigation : il s’acquitta de sa tâche avec “un zèle couronné du meilleur succès”98. “En 1722, on sentit la nécessité d’adjoindre aux gardes (de la corporation des apothicaires), dont la besogne s’augmentait peu à peu, trois directeurs pour veiller aux réparations ou embellissements du Jardin, de concert avec les gardes, qui en feront rapport à la Compagnie. Dans la séance du mardi 6 mars, il est convenu que ces directeurs seront pris dans les trois classes d’anciens, de modernes et de jeunes. “Et à cet effet ont été nommés à la pluralité des voix, messieurs Boulduc [il s’agit de Simon], doyen, qui sera perpétuel et qui a bien voulu accepter cette nomination à la prière de la Compagnie ; Pia du nombre des modernes, et Rousselot de celui des jeunes””99.
53Le fils de Simon Boulduc, Gilles-François, fut aussi un bienfaiteur du Jardin des apothicaires. “Il assistait probablement peu aux réunions de la rue de l’Arbalète ; sa signature ne se trouve que rarement au bas des comptes rendus […] il ne se rendait guère au bureau des apothicaires que dans les circonstances importantes”100. Mais, ayant obtenu, lorsqu’il quitta en 1728 sa charge d’échevin, la concession de quatre lignes d’eau de la ville de Paris, il eut l’idée de céder cette propriété à ses confrères101. La donation fut faite par un acte notarié en date du 8 juillet 1734, “eu égard aux diverses proportions de simples sur lesquelles journellement ils [les apothicaires] s’appliquent à faire de nouvelles découvertes et progrès pour le soulagement et la satisfaction du public […] ; ce qui leur cause qu’à peine ont-ils de l’eau pour moitié de leur entreprise”102. Les six lignes d’eau dont jouissait auparavant le Jardin des apothicaires s’étant rapidement révélées insuffisantes, le don de Boulduc fut providentiel.
54Enfin, un enseignement officieux — c’est-à-dire non reconnu par la Faculté — se trouvait dispensé rue de l’Arbalète103, où divers membres de la Corporation donnaient des leçons de chimie104 et de botanique105. Les apothicaires considéraient même, pour la seconde discipline, leur Jardin comme étant pédagogiquement complémentaire de celui du roi : “C’est le seul qui, par son étendue, sa culture et la liberté que les étudiants y trouvent puisse suppléer au défaut du Jardin du roi, où ils ne peuvent entrer que quelques heures, quatre jours de la semaine et seulement pendant un mois et demi que le professeur y donne ses leçons. Ce jardin royal est d’une telle conséquence par les plantes rares qui s’y trouvent aussi rassemblées qu’il ne peut être livré en d’autres temps à l’imprudence des élèves, au lieu que le jardin des suppliants (apothicaires), principalement garni de plantes et herbes médicinales usuelles et bien moins riche en plantes rares et curieuses, leur est livré avec beaucoup plus de facilité et moins de danger”106.
55Dans ce cadre, un Boulduc, probablement Gilles-François107, ainsi que Claude-Joseph Geoffroy, furent chargés, l’un en 1707 et l’autre en 1708, des fonctions de démonstrateur de chimie108. Nous aurons l’occasion de retracer plus loin le devenir des cours du Jardin des apothicaires, revenons à présent au Jardin royal.
56Pendant que nos apothicaires enseignaient la chimie, assumaient leurs charges à la cour et faisaient des recherches dans leurs laboratoires, Fagon encourageait des savants à visiter toutes les parties du monde, afin d’en inventorier les richesses naturelles. Le père Plumier parcourut les Antilles, le père Feuillée le Chili, Lippi organisa une expédition en Afrique — qui fut massacrée au Soudan —, Tournefort partit au Levant, bien d’autres voyageurs encore quittèrent la vieille Europe. Ces pèlerins d’un nouveau genre furent à la fois les ambassadeurs et les pourvoyeurs des collections du Jardin royal. Ainsi Tournefort, l’un des fondateurs de la botanique française, ramena de ses périples un prodigieux herbier, de même que la description du mystérieux commerce des plantes médicinales, établi à l’époque entre l’Orient et l’Occident109.
57Lorsque Fagon s’éteignit en 1718 dans la considération générale, la surintendance du Jardin royal aurait dû revenir au premier médecin Poirier. Mais, celui-ci mourut quelques jours seulement après son brillant prédécesseur. La surintendance fut alors séparée, par déclaration royale, de la charge de cour110 et le poste d’intendant attribué au médecin montpelliérain Pierre Chirac. Cette modification administrative, comme l’a souligné Laissus, marque un tournant important dans l’histoire du Jardin, qui perd alors son caractère purement médical. “Son nom même, “Jardin royal des plantes médicinales”, se change insensiblement en celui de “Jardin royal des plantes” et plus simplement “Jardin du roi””111.
58Les sciences naturelles ou physiques seront désormais étudiées pour elles-mêmes, sans préjuger de leurs liens avec la médecine. Le droguier, ou Cabinet des drogues, va accueillir toutes les productions de la nature, pour se convertir peu à peu en Cabinet d’histoire naturelle112 et les plantes officinales ne seront plus les hôtes exclusifs des plates-bandes ou des herbiers. Enfin, le recrutement des professeurs ne se fera plus uniquement parmi les membres des professions médicales113. Néanmoins, ainsi que nous allons le voir, les apothicaires continueront à jouer un rôle important dans le développement du Jardin.
Notes de bas de page
1 Laissus (Yves), “Le Muséum national d’Histoire naturelle. I : trois siècles d’histoire”, Revue de l’enseignement supérieur, no 2, 1962, pp. 54-56.
2 Planchon (Gustave), “La Dynastie des Geoffroy, apothicaires de Paris”, Journal de pharmacie et de chimie, 6ème série, vol. VIII, 1898, p. 289.
3 Dorveaux (Paul), “Journal de Matthieu-François Geoffroy, maître apothicaire de Paris (1644-1708)”, Bulletin des sciences pharmacologiques, vol. XIII, 1906, p. 506.
4 Les épiciers vendaient tout ce qui pouvait servir à relever les aliments, notamment des plantes aromatiques. En 1514, Louis XII avait précisé : “Qui est épicier n’est pas apothicaire, mais qui est apothicaire est épicier”. Les apothicaires n’étaient donc pas obligés, théoriquement, de soutenir une maîtrise d’épicerie en sus de celle d’apthicairerie, voir Dillemann (Georges), Bonnemain (Henri) et Boucherie (André), La Pharmacie française : ses origines, son histoire, son évolution, Paris : Technique et Documentation Lavoisier, 1992, p. 17.
5 Armes dans lesquelles figurent une pièce ou un meuble rappelant le nom du titulaire.
6 Planchon (Gustave), “Dynasties d’apothicaires parisiens. II : les Boulduc”, Journal de pharmacie et de chimie, 6ème série, vol. IX, 1899, p. 383.
7 La Salle des Actes de la Faculté de pharmacie-Paris V, Paris : Éd. E.C.N., 1996, p. 69.
8 Dorveaux (Paul), “Apothicaires membres de l’Académie royale des sciences. III : Simon Boulduc”, Revue d’histoire de la pharmacie, no 1, 1930, p. 6.
9 Planchon (Gustave), “Dynasties d’apothicaires parisiens. II : les Boulduc”, art. cit, p. 333.
10 Dorveaux (Paul), “Les Boulduc, apothicaires de la princesse Palatine”, Revue d’histoire de la pharmacie, no 16, 1933, pp. 110-111.
11 Saint-Simon (Louis de Rouvray de), “Mémoires (1711-1714)”, [additions], in Journal de Dangeau, Paris : Gallimard, 1985, vol. IV, pp. 411-412 et 443-444 (La Pléiade) ; Saint-Simon (Louis de Rouvray de), Mémoires (1720), Paris : Gallimard, 1987, vol. VII, p. 681 (La Pléiade).
12 Dorveaux (Paul), “Apothicaires membres de l’Académie royale des sciences. III : Simon Boulduc”, art. cit.
13 Contant (Jean-Paul), Contribution à l’histoire de l’enseignement de la pharmacie : l’enseignement de la chimie au Jardin royal des plantes de Paris, Thèse de Doctorat en pharmacie, Strasbourg : Université de Strasbourg, 1952, p. 51.
14 Blègny (Nicolas de), Le Livre commode des adresses de Paris pour 1692, Nelle éd., Paris : Édouard Fournier, 1878, t. 1, pp. 165-166.
15 Cité par Dorveaux (Paul), “Apothicaires membres de l’Académie royale des sciences. III : Simon Boulduc”, art. cit., p. 7.
16 Idem.
17 Contant (Jean-Paul), Contribution à l’histoire de l’enseignement de la pharmacie…, op. cit., p. 52. Les italiques sont d’origine.
18 Idem.
19 La Salle des Actes de la Faculté de pharmacie-Paris V, op. cit., p. 51.
20 Planchon (Gustave), “La Dynastie des Geoffroy, apothicaires de Paris”, art. cit., p. 384.
21 Depuis 1699, tout académicien était tenu de déclarer par écrit, au début de chaque année, le principal travail scientifique qu’il se proposait d’effectuer.
22 Cité par Dorveaux (Paul), “Apothicaires membres de l’Académie royale des sciences. III : Simon Boulduc”, art. cit., p. 10.
23 Partington Games), A History of chemistry, Londres : McMillan, 1962, vol. III, pp. 44-45.
24 Dorveaux (Paul), “Apothicaires membres de l’Académie royale des sciences. III : Simon Boulduc”, art. cit., pp. 7-9.
25 Barthélémy (Guy), Les Jardiniers du roy : petite histoire du Jardin des plantes de Paris, Paris : Le Pélican, 1979, pp. 196-197 ; voir également Duris (Pascal), “L’Enseignement d’Antoine-Laurent de Jussieu au Muséum”, in Blanckaert (Claude), Cohen (Claudine), Corsi (Pietro) et Fischer Jean-Louis), (sous la dir.), Le Muséum au premier siècle de son histoire, Paris : Muséum national d’Histoire naturelle, 1997, p. 58 (Archives).
26 Laurent de Jussieu, fondateur de la dynastie, était apothicaire. Deux de ses fils, Antoine et Bernard, de même que son petit-fils Antoine-Laurent et son arrière petit-fils Adrien Henri Laurent furent professeurs de botanique au Jardin royal ou au Muséum.
27 Cap (Paul-Antoine), La Pharmacie au Moyen-Âge et au XIXème siècle”, Journal de pharmacie et de chimie, 4ème série, vol. XI, 1870, pp. 173-174.
28 Dortous De Mairan (Jean-Jacques), “Éloge de M. Boulduc”, Histoire de l’Académie royale des sciences, 1742, p. 168.
29 Cité par Planchon (Gustave), “Dynasties d’apothicaires parisiens. Il : les Boulduc”, art. cit., p. 386.
30 Idem, p. 472.
31 Dorveaux (Paul), “Les Boulduc, apothicaires de la Princesse Palatine”, art. cit.
32 Planchon (Gustave), “Dynasties d’apothicaires parisiens. Il : les Boulduc”, art. cit., p. 474.
33 Dorveaux (Paul), “Apothicaires membres de l’Académie royale des sciences. IV : Gilles-François Boulduc”, Revue d’histoire de la pharmacie, no 8, 1931, pp. 114-116 ; Planchon (Gustave), “Dynasties d’apothicaires parisiens. II : les Boulduc”, art. cit., p. 473.
34 Saint-Simon (Louis de Rouvray de), “Mémoires (1711-1714)”, art. cit. ; Saint-Simon (Louis de Rouvray de), Mémoires (1720), op. cit.
35 En réalité, ainsi que le souligne Coirault dans une note de l’édition des “Mémoires” qu’il a commentée, “il ne sera apothicaire du Roi que deux ou trois ans plus tard. À quel titre se trouvait-il dans la chambre du Dauphin ?” Saint-Simon (Louis de Rouvray de), “Mémoires (1711-1714)’’, art. cit.
36 Idem, p. 766.
37 Idem, pp. 443-444.
38 Saint-Simon (Louis de Rouvray de), “Mémoires (1711-1714)”, art. cit., p. 443.
39 Dorveaux (Paul), “Apothicaires membres de l’Académie royale des sciences. III : Simon Boulduc”, art. cit., p. 11.
40 Saint-Simon (Louis de Rouvray de), “Mémoires (1711-1714)”, art. cit., p. 766.
41 Dorveaux (Paul), “Apothicaires membres de l’Académie royale des sciences. III : Simon Boulduc”, art. cit., p. 12.
42 Saint-Simon (Louis de Rouvray de), Mémoires (1720), op. cit., p. 681.
43 Idem.
44 La Salle des Actes de la Faculté de pharmacie-Paris V, op. cit., p. 49.
45 Planchon (Gustave), “Dynasties d’apothicaires parisiens. II : les Boulduc”, art. cit., p. 474.
46 Chaigneau (Marcel), Les Médaillons de la Faculté de pharmacie de Paris, Paris : Louis Pariente, 1986, p. 39.
47 Dorveaux (Paul), “Jean Grosse, médecin allemand, et l’invention de l’éther sulfurique”, Bulletin de la Société d’histoire de la pharmacie, no 61, 1929, pp. 182-187.
48 Dortous De Mairan (Jean-Jacques), “Éloge de M. Boulduc”, art. cit., p. 171.
49 Dorveaux (Paul), “Apothicaires membres de l’Académie royale des sciences. IV : Gilles-François Boulduc”, art. cit, p. 116.
50 Dortous De Mairan Jean-Jacques), “Éloge de M. Boulduc”, art. cit., p. 169.
51 Dorveaux (Paul), “Apothicaires membres de l’Académie royale des sciences. IV : Gilles-François Boulduc”, art. cit., pp. 116-117 ; Partington Games), A History of chemistry, op. cit, vol. III, p. 49.
52 Dorveaux (Paul), “Journal de Matthieu-François Geoffroy, maître apothicaire de Paris (1644-1708)”, art. cit., p. 506.
53 Idem.
54 Planchon (Gustave), “La Dynastie des Geoffroy apothicaires de Paris”, art. cit., pp. 292-293.
55 Cité par Dorveaux (Paul), “Journal de Matthieu-François Geoffroy, maître apothicaire de Paris (1644-1708)”, art. cit., p. 508.
56 Noter ici la référence explicite au caractère pluridisciplinaire de la pharmacie, que nous avons déjà souligné en introduction et sur lequel nous reviendrons.
57 Fontenelle (Bernard de Bovier de), “Éloge de Geoffroy”, Histoire de l’Académie royale des sciences, 1731, pp. 93-94.
58 Dorveaux (Paul), “Apothicaires membres de l’Académie royale des sciences. V : Étienne-François Geoffroy”, Revue d’histoire de la pharmacie, no 8, 1931, pp. 118-126.
59 Cité par Dorveaux (Paul), “Journal de Mathieu-François Geoffroy, maître apothicaire de Paris (1644-1708)”, art. cit., pp. 516 et 568-569.
60 Planchon (Gustave), “La Dynastie des Geoffroy, apothicaires de Paris”, art. cit., pp. 339-340.
61 Cité par Dorveaux (Paul), “Journal de Mathieu-François Geoffroy, maître apothicaire de Paris (1644-1708)”, art. cit., pp. 370-571.
62 Dorveaux (Paul), “Apothicaires membres de l’Académie royale des sciences. VII : Claude-Joseph Geoffroy”, Revue d’histoire de la pharmacie, no 13, 1932, pp. 113-122.
63 Fontenelle (Bernard de Bovier de), “Éloge de Geoffroy”, art. cit., p. 96 ; Lardy (G.), L’Enseignement des sciences pharmaceutiques au Collège royal de Paris avant la Révolution, Thèse de Doctorat en pharmacie, Strasbourg : Université de Strasbourg, 1946, p. 48.
64 Cité par Dorveaux (Paul), “Journal de Mathieu-François Geoffroy, maître apothicaire de Paris (1644-1708)”, art. cit„ pp. 574-575.
65 Contant (Jean-Paul), Contribution à l’histoire de l’enseignement de la pharmacie…, οp. cit., p. 56.
66 Lardy (G.), L’Enseignement des sciences pharmaceutiques au Collège royal de Paris avant la Révolution, op. cit., pp. 45-51.
67 Ce médecin et brillant botaniste mourut prématurément, après avoir été heurté par une charrette dans une rue de Paris. Il fut le collègue de Geoffroy au Jardin, où il enseigna la botanique, voir Lardy (G.), L’Enseignement des sciences pharmaceutiques au Collège royal de Paris avant la Révolution, op. cit., pp. 39-44 et Leroy (Jean), “Tournefort, Joseph Pitton de”, in Gillispie (Charles) (sous la dir.), Dictionary of Scientific Biography, New-York : Charles Scribner’s Sons, 1976, vol. XIII, pp. 442-444.
68 Fontenelle (Bernard de Bovier de), “Éloge de Geoffroy”, art. cit., p. 98.
69 Lardy (G.), L’Enseignement des sciences pharmaceutiques au Collège royal de Paris avant la Révolution, op. cit., p. 47.
70 Planchon (Gustave), “La Dynastie des Geoffroy, apothicaires de Paris”, art. cit., pp. 344-345.
71 Dorveaux (Paul), “Apothicaires membres de l’Académie royale des sciences. V : Étienne-François Geoffroy”, art. cit., p. 125.
72 Dillemann (Georges), Les Portraits des Geoffroy à la Salle des Actes de la Faculté de pharmacie de Paris”, Revue d’histoire de la pharmacie, no 201, 1969, pp. 351-352.
73 Chaigneau (Marcel), Les Médaillons de la Faculté de pharmacie de Paris, op. cit., p. 79.
74 Cité par Contant (Jean-Paul), Contribution à l’histoire de l’enseignement de la pharmacie…, op. cit., p. 57.
75 Fontenelle (Bernard de Bovier de), “Éloge de Geoffroy”, art. cit., p. 96.
76 Idem, p. 97.
77 Idem.
78 Codex medicamentarius seupharmacopoeia parisiensis, Paris : Faculté de médecine, 1732.
79 Tractatus de materia medica, sive de medicamentorum simplicium historia, virtute, delectu et usu, Paris : Chardon de Courcelles, 1741, 3 vol.
80 Idem, [trad, de l’édition latine par A. Bergier], Paris : [s.n.], 1743, 7 vol.
81 Smeaton (William A.), “Geoffroy, Étienne-François”, in Gillispie (Charles) (sous la dir.), Dictionary of Scientific Biography, op. cit., 1972, vol. V, pp. 352-353.
82 Partington Games), A History of chemistry, op. cit., vol. III, pp. 49-55 ; Smeaton (William A.), “Geoffroy, Étienne-François”, art. cit.
83 Geoffroy (Étienne-François), “Table des différens rapports observés en chymie entre différentes substances”. Histoire de l’Académie royale des sciences pour 1718, 1719, pp. 202-212.
84 Cité par Lafont (Olivier), ‘D’Aristote à Lavoisier : Geoffroy et les affinités”, Moniteur des pharmacies et des laboratoires, no 39, 1985, p. 1610 et Partington (James), A History of chemistry, op. cit., vol. III, p. 53.
85 Idem.
86 Fontenelle (Bernard de Bovier de), “Éloge de Geoffroy”, art. cit., pp. 99-100.
87 Smeaton (William A.), “Geoffroy, Étienne-François”, art. cit., pp. 353-354.
88 Bensaude-Vincent (Bernadette) et Stengers (Isabelle), Histoire de la chimie, Paris : La Découverte, 1993, pp. 74-75.
89 Geoffroy (Étienne-François), “Éclaircissements sur la table insérée dans les Mémoires de 1718 concernant les rapports observés entre différentes substances”, Histoire de l’Académie royale des sciences pour 1720, 1722, pp. 20-34.
90 Lafont (Olivier), “D’Aristote à Lavoisier : Geoffroy et les affinités”, art. cit.
91 Dorveaux (Paul), “Apothicaires membres de l’Académie royale des sciences. VI : Nicolas Lémery”, Revue d’histoire de la pharmacie, no 9, 1931, pp. 208-219 et Hannaway (Owen), “Lémery, Nicolas”, in Gillispie (Charles) (sous la dir.), Dictionary of Scientific Biography, op. cit., vol. VIII, pp. 172-175.
92 Contant (Jean-Paul), Contribution à l’histoire de l’enseignement de la pharmacie…, op. cit., pp. 57-60 ; Hannaway (Owen), “Lémery, Louis”, in Gillispie (Charles) (sous la dir.), Dictionary of Scientific Biography, op. cit., vol. VIII, pp. 171-172.
93 Planchon (Gustave), “Le Jardin des apothicaires de Paris”, Journal de pharmacie et de chimie, 5ème série, vol. XXVIII, 1893, pp. 346-347.
94 Planchon (Gustave), “Le Jardin des apothicaires de Paris”, Journal de pharmacie et de chimie, 5ème série, vol. XXIX, 1894, pp. 200-201.
95 Planchon (Gustave), “Le Jardin des apothicaires de Paris”, Journal de pharmacie et de chimie, 5ème série, vol. XXX, 1894, p. 235.
96 Cité par Planchon (Gustave), “Le Jardin des apothicaires de Paris”, art. cit., 5ème série, vol. XXIX, p. 208.
97 Planchon (Gustave), “Le Jardin des apothicaires de Paris”, art. cit., 5ème série, vol. XXX, pp. 256-258.
98 Planchon (Gustave), “Dynasties d’apothicaires parisiens. Il : les Boulduc”, art. cit., p. 382.
99 Planchon (Gustave), “Le Jardin des apothicaires de Paris”, art. cit., 5ème série, vol. XXX, p. 260.
100 Planchon (Gustave), “Dynasties d’apothicaires parisiens. II : les Boulduc”, art. cit., p. 474.
101 Idem, pp. 472-473.
102 Cité par Planchon (Gustave), “Le Jardin des apothicaires de Paris”, art. cit., 5ème série, vol. XXIX, pp. 335-336.
103 Certains maîtres-apothicaires, nous y reviendrons, enseignaient aussi dans leur officine.
104 Planchon (Gustave), “L’Enseignement de la chimie au Jardin des apothicaires”, Journal de pharmacie et de chimie, 6ème série, vol. V, 1897, pp. 201-208, 254-262, 306-310 et 357-365.
105 Planchon (Gustave), “Le Jardin des apothicaires de Paris”, Journal de pharmacie et de chimie, 5ème série, vol. XXXI, 1895, pp. 61-69.
106 Idem, p. 63.
107 La liste communiquée par Planchon ne mentionne pas le prénom. Planchon (Gustave), “L’Enseignement de la chimie au Collège des apothicaires” Journal de pharmacie et de chimie, 6ème série, vol. VI, 1897, p. 324.
108 Idem.
109 Laissus (Yves), “Le Muséum national d’Histoire naturelle. I : trois siècles d’histoire”, art. cit., p. 58 ; Laissus (Yves), Le Muséum national d’Histoire naturelle, Paris : Gallimard, 1995, pp. 34-36.
110 La charge de surintendant devait rester sans titulaire jusqu’à sa suppression en 1732.
111 Laissus (Yves), “Le Muséum national d’Histoire naturelle. I : trois siècles d’histoire”, art. cit., p. 58.
112 Cette nouvelle dénomination ne sera officialisée qu’en 1729, voir Bourdier (Franck), “Origines et transformations du cabinet du Jardin royal des plantes”, Sciences et techniques, no 18, 1962, p. 38.
113 Laissus (Yves), “Le Muséum national d’Histoire naturelle. I : trois siècles d’histoire”, art. cit., p. 58.
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