Chapitre 6
Boulet et l’essai dessiné
p. 115-134
Note de l’éditeur
Henri Garric est professeur de littérature comparée à l’université de Bourgogne. Dans le cadre de ses recherches sur la littérature et les arts, il a publié un essai consacré aux expressions silencieuses : Parole muette, récit burlesque (2015). Il a en particulier consacré à la bande dessinée plusieurs articles et deux ouvrages collectifs, L’engendrement des images en bande dessinée (2013) et La destruction des images en bande dessinée (2021). Il relie ses réflexions sur la littérature et l’image à une interrogation anthropologique qu’il a notamment développée à propos de la ville dans Portraits de villes. Marches et cartes : la représentation urbaine dans les discours contemporains (2007). Au sein du laboratoire CPTC (Centre pluridisciplinaire textes et cultures), il dirige l’axe LmM (Littérature, arts mineurs, Arts Majeurs), attaché aux rapports entre la littérature et les arts.
Texte intégral
1Dérivant étymologiquement de l’italien disegnare (« former les contours de… » et au figuré « former le plan, le projet de… »), le dessin présente une certaine proximité avec l’attitude qui consiste à se projeter dans l’avenir. Il ne rejoint pas le dessein seulement par homophonie : il s’agit bien, avec un dessin, de tracer les contours d’une forme qui sera par la suite remplie par la couleur. Il est ainsi tentant de le rapprocher de l’essai qui présente le même sème de projection dans l’avenir – par un coup d’essai, l’agent fait la première tentative d’une action qu’il espère ensuite accomplir parfaitement. Et pourtant, on peine à trouver une tradition ancienne de ce qu’on pourrait appeler l’« essai dessiné ». Sans doute parce que l’essai de dessin porte déjà un nom bien repéré : il est une esquisse, projet de projet s’il l’on veut, puisqu’il s’agit de tracer la première forme d’un dessin, d’envisager le dessein.
2Ce n’est qu’à partir du moment où le dessin est associé au texte, dans le jeu dialectique de l’iconotexte, qu’on va voir émerger ce qu’on pourrait à plus juste titre appeler un « essai de bande dessinée ». Dans les différentes formes que prend l’essai médiatique dont il est question dans ce volume, il faut en effet identifier un important mouvement qui touche le champ de la bande dessinée contemporaine. Depuis une dizaine d’années se sont multipliées les collections de vulgarisation dans les grandes maisons d’édition : la plus connue est certainement la « Petite Bédéthèque des savoirs », lancée en 2016 par Le Lombard, et qui compte déjà vingt-neuf titres, mais on peut relever aussi les collections « Octopus », publiée chez Delcourt depuis 2017 (quatre titres), ou « Sociorama », publiée chez Gallimard depuis 2017 également (quatorze titres). Surtout, la vulgarisation scientifique occupe une place conséquente dans La Revue dessinée, certainement la revue de bande dessinée la plus importante à avoir vu le jour depuis le début du siècle1. Ce développement de la bande dessinée de non-fiction est allé de pair avec un travail critique notable. La revue en ligne Neuvième Art 2.0 a publié en 2002 un dossier sur la bande dessinée de reportage, repris, augmenté et réintitulé « Les bandes dessinées de non-fiction » en 20162 ; le colloque « Territoires de la non-fiction » organisé à Paris en 2017 et 2018 a accueilli deux interventions sur la bande dessinée de non-fiction3 ; enfin, un colloque a été organisé sur le reportage en bande dessinée et le dessin de presse en 2019 à l’université de Bourgogne4. Pour autant, dans ces travaux, la notion d’essai est très peu convoquée. Sans doute cela est-il dû à la place de la subjectivité dans les bandes dessinées de non-fiction les plus en vue. Si, comme le souligne Björn-Olav Dozo, les auteurs de bandes dessinées documentaires contemporaines pratiquent un « subjectivisme affiché »5, ils n’articulent pas ou peu les éléments d’écriture autobiographique et les éléments de savoir. Prenons l’exemple de Bouzard, un auteur qui a participé à la « Petite Bédéthèque des savoirs » en dessinant le volume Le Rugby6, avec Olivier Bras au scénario. Le volume présente bien la « subjectivité affichée » dont parle Björn-Olav Dozo : surtout intéressé par le football, auquel il a consacré deux albums, Bouzard se représente comme un inculte novice un peu effrayé par la complexité d’un sport qu’il découvre, et la mise en scène de sa naïveté sert à l’exposé didactique sur les règles et le monde du rugby. Pour autant, le récit ne raconte pratiquement aucun élément de la vie et de la personnalité de Guillaume Bouzard – alors que ce dernier pratique par ailleurs l’autobiographie, avec les trois volumes d’Autobiography of me too7.
3C’est cette absence d’articulation entre le moi et le monde qui fait qu’on a une certaine réticence à parler d’« essai » à propos, par exemple, du Féminisme, volume phare de « La Petite Bédéthèque » : la scénariste (Anne-Charlotte Husson) comme le dessinateur (Mathieu Sapin) y sont représentés physiquement ; l’une et l’autre donnent leur avis, dialoguent. Mais aucun contenu de vie n’est présenté. Or l’essai se comprend comme un genre situé à l’articulation du moi et du monde. Je rappelle à ce propos la synthèse que fait Irène Langlet dans l’introduction de son ouvrage :
L’anti-méthode de l’essai est le résultat de cette présence pleine dans le texte, et invite à repenser la connaissance comme absolument dépendante de l’esprit particulier qui la produit. Dans l’interaction entre le sujet et l’objet, l’essai devra donc être défini, moins comme un discours sur le monde, que comme un discours de soi en train de parler du monde. Cette boucle est fondamentale : le sujet de l’énonciation prend conscience de lui-même dans l’écriture de son énoncé, l’énoncé sur le monde est coulé dans la prise de conscience essayiste. Entre discours savant et autobiographie, l’essai prend la figure d’un “autoportrait” […] dans lequel un écrivain forme son identité par le biais des sujets extérieurs qu’il aborde […].8
4L’intérêt de l’œuvre de Boulet (Gilles Roussel) est qu’elle présente au contraire un mixte intime entre savoir de soi et savoir du monde. De ce point de vue, elle est sans doute celle qui peut le plus justement, dans le champ de la bande dessinée contemporaine, être qualifiée d’« essai ». Cette qualification ne concerne certes pas toute son œuvre. Boulet commence par publier dans la revue Tchô ! deux séries pour enfants, Raghnarok, une série de fantasy humoristique racontant l’histoire d’un petit dragon9, et La Rubrique scientifique, une série de vulgarisation scientifique fantaisiste qui prépare en partie l’essayisme à venir, mais qui laisse peu de place à l’autoportrait et à la subjectivité. Repéré par Lewis Trondheim, il dessine alors, en 2006 et 2007, deux volumes de la série Donjon, scénarisée par Lewis Trondheim et Joann Sfar10. Cette collaboration vaut reconnaissance : la série Donjon, dans le début des années 2000, accueille une grande partie des dessinateurs qui atteignent la célébrité dans le champ de la bande dessinée française (Menu, Blutch, Killoffer, Stanislas, Christophe Blain, Manu Larcenet). Elle l’ancre par ailleurs dans le genre de la fantasy humoristique. Cependant, c’est par la pratique d’un blog BD débuté en 2004 qu’il va devenir célèbre. Dans ce blog, Boulet publie des billets de façon très régulière de 2004 à aujourd’hui. Le contenu est repris, presque intégralement, sous forme d’albums, les Notes. Onze volumes ont été publiés chez Delcourt entre 2008 et 2021, donc pratiquement au rythme d’un volume chaque année11.
5Ce blog, qui va faire la renommée de l’auteur, apparaît tout d’abord comme une activité annexe, en marge de la création. De l’aveu de l’auteur, il s’agissait plutôt d’échanger des dessins et des plaisanteries avec des collègues dessinateurs et dessinatrices, dans une période où les blogs étaient une pratique confidentielle qui alliait connivence amicale et pratique autobiographique :
Quand j’ai commencé à faire le blog, c’était une pratique qui concernait très peu de dessinateurs, à peine une vingtaine. C’était pour nous le moyen le plus simple de montrer ses dessins entre dessinateurs – mais on ne le considérait pas comme un média public, cela restait un réseau amical. Dans ces premiers temps, le blog avait en effet une dimension autobiographique.12
6C’est cette pratique autobiographique que je prendrai comme point de départ de ma démonstration : les Notes peuvent apparaître par bien des aspects comme une forme de journal intime centré sur la superficialité quotidienne du moi. Et pourtant, on va voir progressivement le propos se réorienter vers le monde comme si, au fur et à mesure que le « blog » devenait de plus en plus public, il fallait donner une consistance plus objective au contenu. Ainsi la modestie initiale de la pratique, révélée par ses titres (« Notes », essentiellement, mais aussi régulièrement, « Brèves »), mais également sa marginalité trouvent leur sens d’« essai » quand elles se tournent vers le monde, sans se dénaturer pour autant.
Une expérimentation de soi
7Je partirai d’un exemple tiré des premières années du blog. Sous le titre de « Petit cirque d’hiver », Boulet se représente dans un récit sans paroles, devant son ordinateur, gêné par une constante morve au nez – il cherche plusieurs solutions et finit par tartiner son nez de baume du tigre. Dans les cases suivantes, ayant oublié ce qu’il vient de faire, il se gratte les fesses et ressent une telle douleur qu’il se plonge dans sa baignoire. La chute du gag se trouve dans la dernière case où, assis dans la baignoire, il éternue un grand coup ; un commentaire en récitatif conclut : « Je suis légèrement enrhumé. »13 Il s’agit ici d’un gag basé sur des problèmes quotidiens (rhume et scatologie). On est à l’évidence, dans ces courts récits, à mille lieues d’une attitude tournée vers le monde et les savoirs : le récit est fondé sur des principes comiques d’inattention et de surprise et reste à la surface d’une vie quotidienne anecdotique. On peut s’en assurer en relevant les thématiques récurrentes de ces premières années : comment le dessinateur se nourrit au quotidien, les soirées dans les bars à Paris, les petits incidents de la vie quotidienne (glissades, chutes, etc.), la difficulté des démarches administratives, etc.
8Le blog rassemble ainsi des « notes », écrites au jour le jour, sans continuité. L’absence d’ordre s’évalue facilement à partir des enchaînements incertains des notes. Du 7 mars 2006 au 4 avril 2006, Boulet raconte successivement un appel de téléphone portable qui le tire du bain, comment le facteur qui apporte un Colissimo le surprend en train d’écouter Les brunes comptent pas pour des prunes, diverses péripéties autour de son siège de bureau, des séances de dédicace à Angoulême, ses problèmes avec la hot-line du blog, sa découverte du kazou lors d’une soirée.
9Se constitue ainsi, sous une forme proche du journal intime, un autoportrait éclaté, désordonné, sans véritable continuité, livrant des éléments hétérogènes de tous points de vue. Cette hétérogénéité concerne aussi la forme des « Notes » : si la plupart sont de courts récits sous forme d’anecdotes humoristiques, on trouve aussi des dessins synthétiques sur un sujet, des récits de voyage (au Cameroun, au Québec, au Tchad, à la Réunion, etc.), des dessins de fan art, où Boulet dessine sous forme d’hommage un personnage de fiction, souvent un personnage de bande dessinée – sur ce point aussi, d’ailleurs, l’hétérogénéité domine : on passe des personnages de Docteur Slump14 ou de One Piece à ceux de Marzi15, bande dessinée autobiographique racontant l’histoire d’une enfant dans la Pologne de Jaruzelski, de Lou, au Marvin Rouge de Donjon ou encore à Calvin et Hobbes. Cette hétérogénéité se retrouve dans la forme du dessin : dans les premières années du blog, Boulet pratique généralement un dessin à l’encre noire agrémentée d’une touche de roux pour les cheveux, mais on trouve déjà des aquarelles, des couleurs numériques, des dessins d’observation plus élaborés16, notamment dans les récits de voyage – diversité qui s’accentue au cours du temps, j’y reviendrai. Enfin, Boulet « invite » régulièrement un auteur ami ou une autrice amie à dessiner à sa place dans son blog. Au milieu des dessins de Boulet, on trouve ainsi un dessin de Libon au crayon, des dessins de Julien Neel au feutre volontairement maladroits et coloriés avec une pseudo-quadrichromie à points, de Lisa Mandel, avec son trait discontinu caractéristique, de Frantico (hétéronyme de Lewis Trondheim), etc.
10Cependant, très vite, cette écriture de soi par morceaux n’en reste pas à la surface d’une existence effleurée. Elle conduit à une expérimentation sur la diversité du moi prenant appui sur un fait directement induit par la pratique dessinée de l’autoportrait. Déjà dans les pages que nous avons parcourues, Boulet se représente selon trois techniques différentes : un dessin caricatural qui dessine au trait un contour carré du visage coupé par une bouche, un dessin caricatural au trait plus épais, un peu charbonneux et enfin un dessin animalier, dans lequel il se représente sous la forme d’un panda. Ces variations graphiques sont une pratique courante dans la bande dessinée autobiographique. Catherine Mao la signale à propos du Livret de Phamille où Jean-Christophe Menu navigue en permanence entre représentation caricaturale, expressive ou réaliste17. Les changements d’humeur du personnage entraînent nettement ces variations stylistiques chez Boulet. On les trouve non seulement d’une note à l’autre comme on vient de le voir, mais à l’intérieur même d’une note où l’on passe, d’une case à l’autre, d’une représentation caricaturale à une représentation réaliste (il s’agit du portrait assez exact de Gilles Roussel), à une représentation caricaturale « Playmobil », et enfin à une représentation expressive qui exagère la déformation de la bouche, des yeux et le mouvement des larmes. L’écriture de soi s’apparente ainsi à un autoportrait éclaté sans véritable continuité.
Le modèle scientifique
11À l’intérieur de ce fatras, on voit apparaître à partir de 2008 plusieurs notes marquant un intérêt scientifique – avec une note sur la vie dans les fonds marins, une note sur les microscopes électroniques, etc. Ces notes interviennent de façon tout à fait inattendue. Pour preuve, on peut noter l’enchaînement des sujets : le 27 septembre 2008, Boulet publie une note à propos de l’accélérateur de particules LHC du CERN et des discussions autour des trous noirs qu’il aurait pu créer18. Or la note précédente, « Violence gastronomique », était consacrée aux goûts culinaires de Boulet, qui se met en scène en chanteur de rock chantant « J’aime le Kébab et le Jambon beurre / Tu sais où tu peux te le foutre ton boulghour ? », et la suivante raconte la relation d’amitié entre un petit garçon et une petite fille sur la ligne de bus 96. L’hétérogénéité thématique, générique et formelle est évidente. Dans le déroulement des « Notes », les éléments de savoir interviennent de façon tout aussi inattendue que le contenu autobiographique.
12Ces « Notes » liées au savoir prennent une place toujours plus importante jusqu’à aujourd’hui. Pour donner une évaluation approximative de cette évolution, on pourra noter que, dans un premier temps, Boulet renvoie de façon assez large à des éléments de savoir (instruments scientifiques, quelques éléments de vocabulaire), mais sans citer précisément les scientifiques évoqués. Ainsi, dans le 5e volume des Notes (correspondant à l’année 2008) :
Voici l’esprit humain. Une oasis au milieu de l’énorme bordel brumeux des instincts et des réflexes. Entendez par là que sur l’équivalent de l’épaisseur de la peau d’une pomme, il reste quelques neurones qui ne sont dédiés ni à la bouffe ni à la reproduction. Suffisamment de calme pour permettre la formation de l’incroyable dentelle mémétique qu’est la conscience.19
13Le concept de « mème » ici utilisé est emprunté au livre de Richard Dawkins Le Gène égoïste20 (1976), mais Boulet ne cite pas le scientifique et développe peu sa théorie. En revanche, quelques années plus tard, le 31 juillet 2011, il dessine Richard Dawkins, cite directement Le Gène égoïste et résume de façon complète une expérience rapportée par Dawkins : « Je suis tombé sur un truc marrant dans le dernier bouquin de Richard ici présent : une expérience russe sur les renards à Novossibirsk. »21 Cette citation directe des sources du savoir devient un procédé courant à partir de 2011, c’est-à-dire à partir du volume 9 des Notes. Le blog se retrouve ainsi dans les années 2010 écartelé entre des anecdotes toujours très autobiographiques et superficielles (par exemple quand Boulet, ayant planté des graines inconnues dans sa jardinière, caresse les plantes et constate : « Il semblerait que je sois l’heureux papa d’un joli bac d’orties. »22), et des notes mettant en scène la vulgarisation scientifique (par exemple la contemplation des dernières photos de Jupiter sur le site Web de la NASA23).
14Cependant, il est important sur ce point de distinguer précisément blog et livre. En publiant les bandes dessinées du blog, Boulet rompt en grande partie avec le désordre hétérogène qui le constitue et s’efforce de construire un livre. Cela suppose d’éliminer les éléments trop circonstanciels (les annonces de parution et de dédicaces, par exemple) et les éléments trop étrangers à la cohérence stylistique globale (en particulier les interventions des amis dessinateurs et amies dessinatrices). Surtout, cela suppose de créer une configuration globale qui donne une unité à l’ouvrage. C’était déjà le cas dans les premiers volumes de Notes. Dans le volume 2, Le petit théâtre de la rue, les notes sont publiées en suivant à peu près l’ordre chronologique de leur publication sur Internet, mais Boulet déroule un récit continu de la participation au festival « Creuse ta bulle » d’Aubusson. Il s’agit d’un récit inédit, créé directement pour le livre ; ce récit s’insère du début à la fin du volume, les différentes étapes étant intercalées entre les notes. Ce récit construit ainsi une continuité narrative qui contrecarre l’éparpillement des notes – on pourrait utiliser à ce propos les termes de l’herméneutique ricœurdienne : Boulet bâtit une configuration qui lutte contre la tendance épisodique du récit24.
15Or, à partir du volume 3, Songe est mensonge, Boulet remplace ce récit configurant par un discours savant. Je prendrai comme exemple le volume 6, Debout mes globules ! : il s’ouvre avec un développement sur les multiples hasards cosmiques qui ont conduit à l’existence de Boulet. Plus loin, une note énumère les différents paradigmes de compréhension du corps (le corps comme unité, comme vaisseau spatial, comme ville, comme écosystème). Cette note est complétée plus loin par un développement sur la conscience et sa place dans le corps, puis par une réflexion sur le corps et ses défauts. Cette réflexion est contrebalancée par une rêverie sur la façon dont les prothèses technologiques pourraient s’intégrer au processus d’évolution corporelle. Enfin, le volume se conclut avec l’idée que « CHAQUE PERSONNE EST UN PETIT UNIVERS »25.
16On pourrait aisément considérer que Boulet reconfigure ce qui s’apparente à un journal intime en lui donnant une forme plus organisée. De ce point de vue, on pourrait presque considérer que le blog se rattache au genre du journal intime alors que les livres, résultat d’un long travail de remaniement et de publication, se rattachent plus clairement au genre de l’essai26. Ainsi, les éléments de savoir mis en scène dans les « notes » de vulgarisation n’interviennent pas exactement dans un flux continu et désordonné où tous les contenus sont au même niveau : ils se rattachent à un discours qui sert d’arrière-plan général des différentes anecdotes et des différents raisonnements. Il ne s’agit pas à proprement parler d’une « théorie », mais, plus modestement, d’un ensemble de lieux communs hérités d’essais et de traités relus. On pourrait citer des savoirs d’astronomie et de chimie, mais l’essentiel tourne autour d’éléments empruntés aux théories darwiniennes. L’ouvrage cité plus haut de Richard Dawkins est le support théorique le plus courant de ces lieux communs. Ces topoï ne donnent presque jamais lieu à exposés systématiques. À peine peut-on relever quelques bribes comme la prosopopée de Mère Nature :
Le truc, c’est que la vie, c’est des gènes qui se répandent, le plus loin et le plus efficacement possible… L’individu ne compte pas. Alors on essaie tout, hein ! Sous l’eau, des poissons ; sur le sol, des bêtes à papattes… Là, les humains, sur le long terme, on espère que ça va payer, pour ce qui est d’atteindre d’autres planètes… On a même des bestioles qui bouffent et chient du soufre ! Mais bon, faut pas oublier l’essentiel : vous êtes des véhicules !27
17De plus, ce type d’exposé est très rare dans l’ensemble du blog et des livres. Cependant, ce qui compte avant tout, c’est que ces lieux communs servent de modèles explicatifs aux contenus exposés dans le blog. Et de ce point de vue, ils créent un effet de continuité dans l’interprétation des anecdotes et des savoirs. Ils jouent le rôle d’interprétants à la fois pour le moi et pour le monde.
18C’est sans doute en cela que la pratique de Boulet s’apparente le plus nettement à l’essai, je l’ai dit. Le format des couvertures, choisi dès le départ avec Lewis Trondheim, le directeur de la collection Shampooing chez Delcourt, et immuable depuis lors, le dit explicitement. Boulet est représenté de dos, devant un mur ou une immense toile, sur laquelle il dessine, selon les ouvrages, une esquisse de tyrannosaure, un paysage de plage, une pieuvre nageant dans une eau onirique, un village soufflé par une explosion atomique, un fœtus tatoué d’un panda sur l’épaule, un planisphère, ou encore les animaux kawaii du « royaume magique ». Il duplique ainsi le topos romantique de l’homme face à la nature, représenté dans la toile de Friedrich, Le Voyageur contemplant une mer de nuage28, et présente son œuvre comme une exposition du moi (mais sous une forme discrète puisque le moi est vu de dos) et du monde sous tous ses aspects.
Pensée et imaginaire
19Cette articulation du moi et du monde se joue donc autour de modèles interprétatifs tirés du corpus de vulgarisation scientifique. Prenons l’exemple de l’évolution. Celle-ci suppose l’apparition de nouveaux phénotypes qui font apparaître de nouvelles espèces selon le principe de la bifurcation. Le concept est utilisé pour exposer à la fois l’évolution du monde et l’évolution du moi. Boulet avait initialement développé, dans une note du 18 mai 2010, une réflexion sur les bifurcations possibles dans son existence, selon le principe du « Et si… et si… ». Lors de la publication, il développe plus longuement cette réflexion, l’insérant dans un développement qui court sur l’ensemble de l’ouvrage, suivant le principe de reconfiguration envisagé plus haut. Surtout, il ajoute une analogie entre histoire du moi et histoire générale :
Je ne crois pas au déterminisme, encore moins à Dieu ou au destin… J’avais un but, je l’aurais sans doute atteint autrement. Mais dans ce jeu d’interactions, je ne peux m’empêcher de noter ce qui aurait été très différent : les gens que j’aime, ceux que j’ai présentés… Déjà, voir notre petit chemin, celui qui mène à lire ça à cette seconde précise, ça donne un sacré vertige… Eh bien, il semblerait que ce soit la même chose à l’échelle de la vie tout entière.29
20La suite de la « Note » développe les différentes conditions hasardeuses qui ont permis à la vie d’apparaître et de se développer sur la Terre. Cette thématique est reprise plusieurs années plus tard (avec d’ailleurs une référence explicite à cette note du 18 mai 2010) en ouverture du volume 7 : « En fait, vous vous souvenez du tome précédent ? Le jeu du “Et si ?” »30, mais elle est appliquée à la multiplicité des univers, à partir de la théorie des multivers : « Il existerait donc une infinité d’univers, certains extrêmement proches du nôtre… Et d’autres s’en éloignant autant qu’on peut l’imaginer. »31 Du point de vue du monde, la logique du multivers conduit à une confrontation de plusieurs univers dont les cohérences internes sont incompatibles : le « steampunk », univers uchronique topique, est confronté à un univers alternatif pensé depuis le steampunk (ce que serait vraiment l’univers si l’on suivait la logique du steampunk), puis à un autre univers alternatif, le « camping punk ».
21Le développement théorique s’arrête ici au seuil de l’argumentation systématique. La dimension anti-méthodique ne correspond plus ici seulement à un désordre dans l’exposé des éléments, mais à une préférence pour l’exposé illustratif (ou mieux : illustré). Concernant les multivers, la dimension visuelle touche particulièrement les contrastes entre cases. L’exposé initial sur « l’infinité des univers » du volume 7 cité plus haut est illustré par des cases qui mettent en contraste des scènes très proches (une scène de rue avec une vitrine présentant des marchandises, opposée à la même scène où la vitrine est simplement brisée), puis une case complètement différente (« s’en éloignant autant qu’on peut l’imaginer ») représentant des sortes d’insectes géants et de méduses dans un univers sous-marin. L’idée est de jouer sur la variation visuelle et on peut penser que Boulet recherche avant tout le plaisir de la variation visuelle. On peut le voir dans la façon dont il réactualise un lieu commun de l’autoreprésentation en bande dessinée32 : le personnage de Boulet est soumis lui aussi aux variations que les multivers impliquent. Il s’agit à chaque fois d’ouvrir les possibles à partir des bifurcations narratives impliquées par les choix. Ainsi, à propos de l’apprentissage du dessin, Boulet confronte l’apprentissage de la peinture à l’huile et le modèle de l’artiste bohème, auquel il s’est ouvert dans son adolescence, à la pratique du fanzine et au modèle du dessinateur de bande dessinée auquel il est parvenu dans sa jeunesse. Cette bifurcation est ensuite évaluée par un dialogue entre Boulet enfant, Boulet adolescent (le « peintre en devenir ») et Boulet adulte (celui qui est devenu dessinateur).
Figure 1

Les trois moi (dans Notes. 6. Debout mes globules !, p. 68).
22Tout l’intérêt de l’histoire est de faire coexister trois images de soi en contraste à la fois physique et vestimentaire (la chemise de l’artiste bohème en devenir s’oppose au tee-shirt panda de l’adulte).
23On retrouve le même basculement du théorique vers l’image à propos de la théorie de l’évolution. Quand il s’agit de donner une explication claire du rôle des gènes dans le développement de la vie, Boulet fait appel à une allégorie de Mère Nature, probablement empruntée à un album jeunesse, Le Jamais-content33. Mère Nature est représentée sous la forme d’une petite femme dont les cheveux sont couverts de fleurs, mais qui fume un gros cigare (c’est la patronne !).
Figure 2

Mère Nature (dans Notes. 6. Debout mes globules !, p. 29).
24Elle explique elle-même le fonctionnement des gènes par une allégorie :
Toi qui est un gros sans-vie toujours derrière l’ordinateur. Quand un processeur marche, on en fait quelques millions, et quand on trouve mieux, pouf ! Tout est viré pour faire place aux nouveaux ! […] En gros, je suis comme un vieil ordi obsolète qui n’a plus qu’à attendre d’être offert à une M.J.C. de banlieue ?34
25Le but est de mettre en valeur une image, comme Boulet le commentait lui-même dans l’entretien final de L’Engendrement des images :
Bien entendu, ce n’est pas seulement ironique. Il y a aussi le plaisir de cet imaginaire, le plaisir du dessin et enfin la facilité d’enfermer un concept complet dans une seule image. Si tu veux parler du rapport de l’homme à la nature, tu peux parler d’usines, de taux de carbone et tu vas perdre tout le monde. Tu peux faire passer exactement la même idée en utilisant un personnage qui a des seins à l’air ! Le personnage de mère Nature, tout le monde comprend immédiatement ce que c’est. C’est un code utilisé pour faire passer une idée. Je suis tellement attaché aux métaphores, aux allégories, que je les utilise aussi beaucoup en parlant.35
26Ce qui intéresse Boulet dans la mise en allégorie de ces éléments théoriques, c’est moins le propos lui-même que l’image qu’ils peuvent produire. On en voit une preuve dans l’utilisation même de l’iconotexte. L’association du texte et de l’image est généralement très simple. Boulet développe un discours continu, donné dans un récitatif, et qui pourrait se lire sans les images. Les images interviennent ainsi comme contrepoint au texte, ou même comme commentaire ironique. Après avoir évoqué le paradoxe de Fermi selon lequel la galaxie, ayant un nombre illimité d’étoiles, « devrait grouiller de vie dans tous les sens »36, ce qui fait qu’on ne peut pas comprendre qu’on n’ait pas rencontré d’autres formes de vie (« D’où cette question… Où est tout le monde ? »), Boulet évoque l’hypothèse des « premiers arrivés » : « Il y a […] l’hypothèse du premier arrivé à la fête. L’univers a un long temps d’échauffement, la vie commence à peine, on est dans les tout premiers (il en faut bien). » Les deux cases qui accompagnent ce texte lui donnent une représentation anthropomorphe amusante, en représentant l’humanité sous la forme de Boulet qui arrive le premier à une soirée avec une bouteille (« Helloooooo… Euh, c’était pas à huit heures ») et l’Univers, pas encore prêt, qui vient ouvrir avec une serviette autour de la taille parce qu’il sort de sous la douche (« Chuis prêt dans une minute, entre »). L’hypothèse scientifique (« la vie commence à peine, on est dans les tout premiers ») est traduite par un dialogue stéréotypé entre Boulet et l’Univers : « – Tu sais quand les autres vont arriver ? – Boh ! Ils devraient plus trop tarder… Trois ou quatre milliards d’années, maximum ») : le texte s’efface ainsi au profit de l’image, qui devient la finalité du discours37.
Essai et critique
27Boulet développe une critique régulière des poncifs de la pensée et des poncifs de l’imaginaire. Il rejoint ainsi l’exigence critique essentielle de l’essai. Cette critique, d’un point de vue intellectuel, prend la forme d’une attitude sceptique et rationaliste face aux religions et aux superstitions. L’exposé de croyances est radicalement soumis à la critique de la logique. Cependant, plus intéressantes et plus systématiques sont les critiques des pratiques imaginaires. Boulet soumet à une même critique logique les mangas, Harry Potter, les séries américaines, Indiana Jones, etc. Là encore, l’intérêt de cette critique est qu’elle permet de formuler, par-delà les clichés de mise en scène, des propositions qui mettent en évidence l’invraisemblance en créant un décalage comique. La critique rationaliste des savoirs et des productions imaginaires n’est donc pas là pour désenchanter le monde, mais au contraire pour essayer de proposer en alternative une rêverie cohérente sur le monde.
28J’en donne ici un exemple présenté sous la forme d’une discussion entre trois dessinateurs :
Boulet : J’aime la théorie qui veut que les zombies mangent des cerveaux pour se repaître d’endorphine. / Alain Barte : Mais dans ce cas, ils pourraient manger des animaux ! À cinq ou six ils pourraient attaquer une vache et lui bouffer la cervelle. […] Boulet : Non non non tu ne connais rien aux vaches ! […] À la première morsure, elle va réagir, ruer, cabrer… Les zombies c’est lent, ça perd des bouts, alors face à une ruade d’une vache de huit cents kilos, c’est réduit en bouillie. / Alain Barte : Je proteste ! À la première morsure, elle est zombifiée et ne se défend plus ! / Boulet : Ha parce qu’on considère que la zombification est transmissible aux vaches ?38
29L’exclamation de Boulet conduit à une case qui présente l’affiche imaginaire d’un film intitulé Night of the living cows, représentant des vaches qui marchent, la gueule ouverte, le corps et le visage à moitié décomposés. La « Note » s’achève sur une rêverie imaginaire de Boulet qui soupire : « Ha… tout ce qu’il resterait à imaginer » et rêve d’un film Raptors vs Living Cows où les deux monstres s’affrontent. Il s’agit de construire une extension logique à un univers imaginaire et d’exposer sa forme visible cohérente. C’est là la forme la plus marquante que prend le rapport au savoir chez Boulet : une note part d’un élément de savoir (scientifique ou imaginaire) et en développe de façon fantaisiste les conséquences.
De l’essai dessiné aux essais du dessin
30On peut considérer que Boulet revendique, à travers le paradigme biologique de la théorie de l’évolution, un pluralisme fondamental, qui a rapport avec l’esprit essayiste. Pluralisme du monde pensé à partir de l’évolution ; pluralisme du moi, toujours saisi dans le mouvement de sa construction et ses possibles non accomplis ; pluralisme du dessin, enfin, qui ne doit pas se figer dans des codes traditionnels, mais doit se renouveler sans cesse pour rester vivant. Significativement, c’est dans ce contexte, et seulement dans ce contexte, que Boulet utilise l’expression « essai ». Elle apparaît dans les commentaires cachés qui accompagnent les notes sur le blog et que le lecteur ou la lectrice peut faire apparaître en passant sa souris sur le dessin :
En ce moment, j’essaie de me remettre un peu aux encres de couleur. Du coup je me suis lancé dans un thème pour le plaisir. Détruire des robots célèbres. Je ne sais pas trop pourquoi, mais c’est un thème récurrent chez moi.39
J’essaie de partir sur un monde où vraiment toutes les créatures seraient très différentes, des animaux jusqu’aux plantes. Tout en gardant une sorte de familiarité qui permette de les identifier grosso modo au premier coup d’œil. (genre : lui ça doit plutôt être un herbivore, lui un carnivore).40
31Dans ces deux cas, il s’agit d’expérimentations portant sur la technique de dessin et qui ne s’engagent pas dans une direction déterminée (et notamment pas dans un débouché d’édition évident). En l’occurrence, les dessins du « défi Twitter »41, censés se diriger vers le grand projet d’un long récit libre, n’ont depuis 2012 pas donné lieu à un prolongement complet. C’est là l’intérêt premier du format « blog ». En 2011, Boulet décida de renouveler le blog, en changeant l’habillage, et projetait de ne plus le publier (ce qui n’a pas été le cas). L’idée était de pouvoir écarter le débouché éditorial obligatoire et de réorienter le blog vers l’expérimentation :
Dans le contenu du blog, concrètement ce qui va changer : je voudrais que ça redevienne un vide-poche, moins un « billet d’humeur ». Du coup, il y aura sans doute encore des notes un peu construites comme avant… Mais aussi des “dessins comme ça”, des travaux en cours, pourquoi pas des histoires plus longues à suivre. Bref j’espère que sans pression éditoriale, cet endroit va redevenir un laboratoire.42
32On a noté plus haut que les livres ajoutaient des éléments au blog et en réorganisaient les fragments. Inversement, le blog multiplie les essais graphiques qui ne sont pas repris (ou seulement imparfaitement) dans les livres. C’est le cas notamment des longs développements utilisant la technique du scrolling (déroulement vertical de la page Internet). Significativement, cette technique est très liée à l’émerveillement devant l’image scientifique du monde. Ainsi, à propos de la chanson Le Grand Pan de Georges Brassens, Boulet s’adresse au chanteur pour contester son idée que le rationalisme aurait désenchanté le monde : « Voyez-vous, Monsieur Georges, cette chanson m’a toujours un peu agacé… J’y ai toujours lu un reproche à la science : celui d’avoir tué la poésie… »43
Conclusion
33Suivant la logique imaginaire de l’essai dessiné, Boulet argumente pour mettre en valeur la « beauté à couper le souffle » de l’univers observé par un télescope : « Jamais mythologie n’avait inventé un Univers si grand. Et ce cosmos est infiniment plus beau, plus profond et plus excitant que n’importe quelle divinité »44, mais surtout il l’exemplifie à l’aide d’animations flash faisant apparaître des orages cosmiques au milieu du noir de l’écran ou des mouvements de nuages simulant la surface gazeuse de Jupiter, ou au moyen de photographies spatiales insérées dans le dessin. La découverte progressive par scrolling (déroulement vertical de la page) place le lecteur dans la position du spectateur écrasé par le spectacle sublime de l’univers.
34On rassemble ainsi l’essayisme de Boulet : « Brassens dans le cosmos » présente en effet la valorisation du savoir scientifique, compris non comme un désenchantement mais au contraire comme la possibilité de produire un nouvel imaginaire ; il associe ce savoir et cet imaginaire à une mise en scène continue de l’auteur non seulement comme moi autobiographique mais aussi à une expérimentation graphique qui va chercher dans toutes les ressources de la bande dessinée « numérique ». On trouve ici tout ce qui fait de l’œuvre de Boulet un « essai de bande dessinée ». Essai parce qu’il articule subjectivisme, savoir, anti-méthode ; essai surtout parce qu’il est une expérimentation constante sur soi, sur le monde et surtout sur le dessin45.
Bibliographie
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Boulet, Notes. 1. Born to be a larve, Paris, Delcourt, collection « Shampooing », 2008.
Boulet, Notes. 2. Le petit théâtre de rue, Paris, Delcourt, collection « Shampooing », 2008.
Boulet, Notes. 3. La viande c’est la force, Paris, Delcourt, collection « Shampooing », 2008.
Boulet, Notes. 4. Songe est mensonge, Paris, Delcourt, collection « Shampooing », 2008.
Boulet, Notes. 5. Quelques minutes avant la fin du monde, Paris, Delcourt, collection « Shampooing », 2011.
Boulet, Notes. 6. Debout mes globules !, Paris, Delcourt, collection « Shampooing », 2011.
Boulet, Notes. 7. Formica Punk, Paris, Delcourt, collection « Shampooing », 2012.
Boulet, Notes. 8. Les 24 heures, Paris, Delcourt, collection « Shampooing », 2013.
Boulet, Notes. 9. Peu d’or mais moult gueule, Paris, Delcourt, collection « Shampooing », 2014.
Boulet, Notes. 10. Le Pixel quantique, Paris, Delcourt, collection « Shampooing », 2016.
Boulet, Notes. 11. Un royaume magique, Paris, Delcourt, collection « Shampooing », 2018.
Boulet, Strips, Paris, Delcourt, collection « Shampooing », 2011.
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Notes de bas de page
1 Sur La Revue dessinée, je me permets de renvoyer à mon article, Henri Garric, « Bande dessinée documentaire et humour. Le cas de La Revue dessinée », dans Benoît Mitaine et Judite Rodrigues (dir.), Scoops en stock. Journalisme dessiné, BD-reportage et dessin de presse, Genève, Georg, coll. « L’équinoxe », 2021.
2 Thierry Groensteen (dir.), « Les bandes dessinées de non-fiction », dans Neuvième Art 2.0 – la revue en ligne de la Cité internationale de la bande dessinée et de l’image, 2016 : http://neuviemeart.citebd.org/spip.php?rubrique159 (consulté en août 2022).
3 Voir Alexandre Gefen (dir.), Territoires de la non-fiction. Cartographie d’un genre émergent, Leiden et Boston, Brill/Rodopi, coll. « Chiasma », vol. 46, 2020.
4 Benoît Mitaine et Judite Rodrigues (dir.), op. cit.
5 Björn-Olav Dozo, « Note sur la bande dessinée de reportage », Textyles, no 36-37, 2010, en ligne : http://journals.openedition.org/textyles/1428 (consulté en août 2022) (DOI : 10.4000/textyles.1428).
6 Bouzard et Olivier Bras, Le Rugby, Bruxelles, Le Lombard, coll. « La Petite Bédéthèque des savoirs », 2017.
7 Bouzard, The Autobiography of me too, Bordeaux, Les Requins Marteaux, 2004-2008.
8 Irène Langlet, L’Abeille et la Balance. Penser l’essai, Paris, Classiques Garnier, 2015, p. 24-25.
9 Boulet, Raghnarok, Paris, Delcourt, coll. « Tchô ! », 2001-2009.
10 Boulet, Joann Sfar et Lewis Trondheim, Donjon zénith. 5. Un mariage à part, Paris, Delcourt, 2006 ; id., Donjon zénith. 6. Retour en fanfare, Paris, Delcourt, 2007 ; Boulet a repris du service dans cette collaboration récemment : Boulet, Joann Sfar et Lewis Trondheim, Donjon zénith. 7. Hors des remparts, Paris, Delcourt, 2019 ; id., Donjon zénith. 8. En sa mémoire, Paris, Delcourt, 2020.
11 Boulet, Notes. 1. Born to be a larve, Paris, Delcourt, coll. « Shampooing », 2008 ; Notes. 2. Le petit théâtre de rue, Paris, Delcourt, coll. « Shampooing », 2009 ; Notes. 3. La viande c’est la force, Paris, Delcourt, coll. « Shampooing », 2009 ; Notes. 4. Songe est mensonge, Paris, Delcourt, coll. « Shampooing », 2010 ; Notes. 5. Quelques minutes avant la fin du monde, Paris, Delcourt, coll. « Shampooing », 2011 ; Notes. 6. Debout mes globules !, Paris, Delcourt, coll. « Shampooing », 2011 ; Notes. 7. Formicapunk, Paris, Delcourt, coll. « Shampooing », 2012 ; Notes. 8. Les 24 heures, Paris, Delcourt, coll. « Shampooing », 2013 ; Notes. 9. Peu d’or mais moult gueule, Paris, Delcourt, coll. « Shampooing », 2014 ; Notes. 10. Le Pixel quantique, Paris, Delcourt, coll. « Shampooing », 2016 ; Notes. 11. Un royaume magique, Paris, Delcourt, coll. « Shampooing », 2018. À ces volumes il convient d’ajouter un volume hors-série, Boulet, Strips, Paris, Delcourt, coll. « Shampooing », 2011.
12 Elsa Caboche et Henri Garric, « Engendrement des images, imagination, dessin : un entretien avec Boulet », dans Henri Garric (dir.), L’Engendrement des images en bande dessinée, Tours, Presses universitaires François-Rabelais, coll. « Iconotextes », 2013, p. 221.
13 Boulet, « Petit cirque d’hiver », 24 novembre 2006, dans Bouletcorp.com : http://www.bouletcorp.com/2006/11/24/ (consulté en août 2022).
14 Docteur Slump est un manga d’Akira Toriyama publié entre 1980 et 1984 et traduit en France chez Glénat : Akira Toriyama, Docteur Slump, Paris, Glénat, 1995-1998.
15 Marzena Sowa et Sylvain Savoia, Marzi, Marcinelle, Dupuis, 2005-2016.
16 Voir en ligne sur Bouletcorp.com le dessin du « jardin » à N’Djaména, Boulet, 1er juillet 2006, http://www.bouletcorp.com/2006/07/01/tchad-02/ ou la vue depuis l’avion à l’arrivée à Yaoundé, Boulet, 19 mai 2006, http://www.bouletcorp.com/2006/05/19/cameroun-mon-amour-02/ (consultés en août 2022).
17 « En s’affublant de traits changeants, [Menu] opte pour une diversité stylistique au sein de l’album qui donne lieu à un certain flottement identitaire. » Catherine Mao, « L’artiste de bande dessinée et son miroir : l’autoportrait détourné », Comicalités, 2013, « Représenter l’auteur de bandes dessinées », en ligne : http://journals.openedition.org/comicalites/1702 (consulté en août 2022) (DOI : https://doi.org/10.4000/comicalites.1702).
18 Boulet, « Le Gros Slurp », 27 septembre 2008, dans Bouletcorp.com : http://www.bouletcorp.com/2008/09/27/le-gros-slurp/ (consulté en août 2022).
19 Boulet, Notes. 5. Quelques minutes avant la fin du monde, op. cit., p. 5.
20 Richard Dawkins, The Selfish Gene, Oxford, Oxford University Press, 1976 ; Le Gène égoïste, trad. de l’anglais par Laura Ovion, Paris, Odile Jacob, 2003.
21 Boulet, « Pléiotropie », 31 juillet 2011, dans Bouletcorp.com : http://www.bouletcorp.com/2011/07/31/dernier-coup-de-bourre/ (consulté en août 2022).
22 Boulet, « Brève botanique », 24 août 2017, dans Bouletcorp.com : http://www.bouletcorp.com/2017/08/24/breve-botanique-02/ (consulté en août 2022).
23 Boulet, « La Tempête », 2 juin 2017, dans Bouletcorp.com : http://www.bouletcorp.com/2017/06/02/la-tempete/ (consulté en août 2022).
24 Sur ces notions de configuration et d’épisodique, voir Paul Ricœur, Temps et récit. 1. L’intrigue et le récit historique [1983], Paris, Seuil, 1991, p. 127 : « la mise en intrigue est l’opération qui tire d’une simple succession une configuration ».
25 Boulet, Notes. 6. Debout mes globules !, op. cit., p. 205.
26 Irène Langlet signale combien les théories critiques distinguent le journal intime et l’essai en mettant l’accent sur ce travail de remaniement : « L’essai est un genre littéraire, et “littéraire” ici insiste sur la publication du texte écrit, fondamentale dans la définition d’une pratique artistique. [Le développement de Bruno Berger] approfondit la notion de “journal intime publié” : il y voit […] le résultat d’un long travail de remaniement, donc une transformation qui modifie la nature intime du texte » (Irène Langlet, Les Théories de l’essai littéraire dans la seconde moitié du xxe siècle. Domaines francophone, germanophone et anglophone. Synthèse et enjeux, thèse de doctorat, Rennes, université de Rennes 2 Haute-Bretagne, 1995, p. 22).
27 Ibid., p. 29.
28 Caspar David Friedrich, Der Wanderer über dem Nebelmeer, 1817, huile sur toile, 98,4 × 74,8 cm, Kunsthalle de Hambourg.
29 Boulet, Notes. 6. Debout mes globules !, op. cit., p. 110.
30 Boulet, Notes. 7. Formicapunk, op. cit., p. 5.
31 Ibid., p. 4.
32 Sur ce lieu commun, voir Thierry Groensteen qui souligne la « forme archétypique de la confrontation des Je [dans] la confrontation entre deux personnages représentant la même personne à des âges différents ». Thierry Groensteen, « Autoreprésentation », dans id. (dir.), Dictionnaire esthétique et thématique de la bande dessinée, en ligne sur le site de Neuvième Art 2.0 – la revue en ligne de la Cité internationale de la bande dessinée et de l’image, article mis en ligne en avril 2013 : http://neuviemeart.citebd.org/spip.php?article567 (consulté en août 2022).
33 Vassilissa et Romain Simon, Le Jamais-content, Paris, Flammarion, coll. « Les Albums du Père Castor », 1978.
34 Boulet, Notes. 6. Debout mes globules !, op. cit., p. 29.
35 Elsa Caboche et Henri Garric, article cité, p. 219.
36 Boulet, Notes. 10. Le Pixel quantique, op. cit., p. 52.
37 On retrouve un procédé que j’avais déjà isolé à propos de la bande dessinée comique documentaire, qui défait systématiquement l’avancée continue du discours par une série d’images discontinues ironiques : Henri Garric, « Bande dessinée documentaire et humour. Le cas de La Revue dessinée », article cité, p. 160-161.
38 Boulet, Notes. 5. Quelques minutes avant la fin du monde, op. cit., p. 120.
39 Boulet, « Robots cassés », 25 janvier 2013, dans Bouletcorp.com : http://www.bouletcorp.com/2013/01/25/robots-casses/ (consulté en août 2022).
40 Boulet, 23 janvier 2012, dans Bouletcorp.com : http://www.bouletcorp.com/2012/01/23/ (consulté en août 2022).
41 « C’est un petit jeu pour m’occuper quand je prends le train : je demande aux gens de donner des thèmes, j’en choisis un et je fais le dessin pendant le trajet. » (Boulet, 14 mai 2012, dans Bouletcorps.com : http://www.bouletcorp.com/2012/05/14/le-train-twitter/ (consulté en août 2022).
42 Boulet, 12 septembre 2011, dans Bouletcorp.com : http://www.bouletcorp.com/2011/09/12/ (consulté en août 2022).
43 Boulet, « Brassens dans le cosmos », 25 août 2015, dans Bouletcorp.com : http://www.bouletcorp.com/2015/08/25/brassens-dans-le-cosmos/ (consulté en août 2022).
44 Ibid.
45 Cette dimension expérimentale illustre parfaitement le propos de Max Bense qui identifie l’essayiste comme « un auteur qui expérimente, qui tourne et retourne un problème en tous sens, qui questionne, ausculte, examine, réfléchit », et qui, pour cette raison, livre « une forme d’écriture expérimentale ». Max Bense, « L’essai et sa prose », Trafic, no 20, 1996, p. 136-137.
Auteur
Université de Bourgogne
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