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Études de chronologie cicéronienne

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Pierre Grimal

Problèmes et méthodes

Texte intégral

1Aucune époque n’est plus abondante que celle de Cicéron en documents de toute sorte. La plupart consistent en textes qui sont des témoignages directs sur les événements qui bouleversent alors la cité romaine. Ces textes, écrits au jour le jour, se réfèrent sans cesse à une actualité perpétuellement mouvante, qu’il ne nous est pas toujours, malheureusement, possible de reconstituer. Et, lorsque l’on examine avec quelque attention les ouvrages des historiens modernes qui se sont occupés de cette période, on constate, non sans quelque surprise, qu’il existe entre eux des divergences considérables, qui portent bien souvent non sur l’interprétation des faits, mais sur leur établissement même.

  • 1 Ceux, par exemple, de M. Gelzer, M. Tullius Cicero (als Politiker), R. E. VII A (1939), col. 827 et (...)

2Certes, il existe des exposés classiques, auxquels il est indispensable de se reporter1, ainsi qu’une infinité de travaux de détail. Quiconque doit traiter, pour quelque fin que ce soit, de l’histoire ou des lettres de ce temps, ne peut manquer d’aborder, pour son propre compte, des problèmes de chronologie. Mais chacun le fait, trop souvent, dans l’incertitude, et l’accumulation même des travaux multiplie les erreurs, perpétue des théories qu’il vaudrait mieux oublier, invite, finalement, à reprendre dans leur ensemble des problèmes dont la minutie peut rebuter, mais qu’il faut bien résoudre avec la plus grande précision possible, sous peine de ne plus savoir bientôt au juste de quoi l’on parle.

  • 2 J. Van Ooteghem, op. cit., p. 355.
  • 3 La date est donnée explicitement par Cicéron, Pro Sestio 75 (VIII Kal. Febr.). Comme nous sommes da (...)

3On lira par exemple chez tel historien, écrivant de nos jours, que l’échauffourée survenue au forum pendant le mois de janvier 57 entre un tribun partisan de Cicéron et les gens de Clodius, se place le 25 de ce mois ; d’autres la dateront du 23. Il arrivera même que, par une étrange confusion, ce même événement se trouvera dédoublé et qu’il ne sera pas question d’une émeute, mais de deux, l’une que l’on datera du 23 et l’autre du surlendemain2. Cet exemple, d’une erreur en somme vénielle, dont l’explication est aisée3 et qui n’entraîne aucune conséquence vraiment grave, doit nous inciter à quelques réflexions.

4D’abord, nous nous rappellerons que les faits connus ou établis, par une méthode quelconque, dans l’histoire de Rome, sont les uns par rapport aux autres dans une dépendance étroite. Il est rare que l’historien n’ait pas à élaborer des combinaisons, souvent fort complexes, dans lesquelles les faits connus servent à en découvrir ou en vérifier d’autres. Ce que les textes fournissent à notre analyse, ce ne sont pas, en général, des dates précises mais un système chronologique relatif : nous savons que tel événement s’est passé avant ou après tel autre, rarement combien de jours avant ou après, plus rarement encore à quelle date exacte ils se sont produits l’un et l’autre. On comprend aisément que toute incertitude, toute inexactitude entraînent des séries entières de bévues. Non seulement toute chronologie absolue est définitivement viciée, mais l’interprétation des textes et des témoignages devient incertaine. Deux récits d’un même fait ne seront pas rapportés à celui-ci ; on mettra en question la bonne foi ou la crédibilité de telle ou telle source, on attachera à telle autre une créance exagérée ; on fera surgir des doublets, on commettra des omissions graves. Bref, peu à peu, le désordre deviendra total. On s’explique aisément comment ont pu naître des hypothèses qu’une analyse plus précise aurait rendues inutiles, comment aussi des problèmes réputés insolubles ont surgi, alors que la difficulté réside seulement dans une inadvertance, que personne ne songe à reconnaître pour telle, et que se transmettent religieusement les épigones des plus grands historiens d’antan.

  • 4 Th. Mommsen, Die Römische Chronologie bis auf Caesar, Berlin 1859.

5Mais il faut sans doute pousser notre critique plus loin encore et nous demander si nous savons toujours clairement ce que nous voulons dire lorsque nous citons une date ou lorsque nous nous référons à une chronologie. Les principes de la chronologie romaine ont été autrefois fixés par Mommsen, dans un livre fondamental, mais que l’on néglige, malheureusement, trop souvent, de consulter, et dont on oublie les principes4.

  • 5 Nous renvoyons, une fois pour toutes, à l’exposé qu’à donné de cette question J. Carcopino, op. cit (...)

6Il est inutile sans doute de rappeler ici que le calendrier julien, établi par César, ne prit effet qu’au mois de mars 465. Pour toute la période antérieure, lorsque nous nous référons à lui, c’est par une extrapolation dont nous n’avons pas ordinairement conscience. Il n’a jamais existé d’année 50, ni d’année 58, ni aucune de celles que nous citons à chaque instant. Sans doute y eut-il, depuis des temps immémoriaux, une année solaire, appuyée sur le mouvement des astres, essentiellement celui du soleil ; mais ce n’était point par rapport à elle que les faits étaient datés par les contemporains. On ne connaissait, en pratique, d’année certaine que l’année civile, consulaire, désignée par le nom des deux consuls qui se trouvaient en charge – à cette époque, entre les Calendes de janvier et le dernier jour de décembre. Mais cette année ne soutenait pas un rapport fixe et simple avec l’année « réelle » – celle qui deviendra l’année civile à partir de 46.

7Rappelons seulement que l’année consulaire (nous appellerons ainsi, par commodité, l’année officielle avant la réforme julienne) comprenait 355 jours, répartis en 12 mois, dont la durée était variable, et n’était pas, alors, celle qu’ils recevront dans le calendrier julien. Janvier comptait 29 jours, février 28, mars 31, avril 29, mai 31, juin 29, quintilis (juillet) 31, sextilis (août) 29, septembre 29, octobre 31, novembre 29, décembre 29. Une telle année était plus courte que l’année astronomique, et les Romains ne l’ignoraient pas. Aussi, tous les deux ans, procédait-on à une intercalation qui était, alternativement, de 22 jours et de 23. Ainsi l’année moyenne qui en résultait avait une durée de 366 jours 1/4 ; on remédiait à cet excès en supprimant l’intercalation au bout d’une période de 24 ans.

  • 6 Le texte fondamental est celui de Censorinus, De die natali, XX, 60 : denique cum intercalarium men (...)
  • 7 Cf. Th. Mommsen, op. cit., p. 43, citant, entre autres, une lettre de Cicéron à Atticus (Ad. Att. V (...)

8Le mois intercalaire était introduit au cours de février, entre le jour des Terminalia et celui du Regifugium 6. Nous verrons qu’il était considéré, au point de vue administratif, comme partie intégrante du mois de février, bien qu’il possédât ses propres calendes, etc., et que l’on ne se contentât pas d’en énumérer les jours par rapport aux Calendes de mars – ce qui eût été une solution concevable, mais aurait présenté l’inconvénient de ne pas rendre comparables les dates du début de février (entre le 1er et le 23e jour, jours des Terminalia), entre une année normale et une année « intercalaire ». En fait les Romains (et Cicéron lui-même) éprouvaient quelque difficulté à s’y reconnaître et il leur arrivait de dater les jours par rapport à la fête des Terminalia qui était (par destination !) le jour fixe par excellence7. Aussi longtemps que les intercalations étaient régulièrement effectuées, l’année réelle et l’année consulaire se trouvaient coïncider, approximativement, au terme d’un cycle de deux ans ; l’avance de l’année consulaire sur l’année solaire, avant le 23 février de l’année intercalaire, était de 22 jours environ, mais jamais davantage. Mais les intercalations, à la fin de la République, furent négligées, en raison des difficultés du moment (pendant la guerre civile entre Pompée et César) ; elles l’avaient été aussi plus tôt, lorsque les pontifes répugnaient à allonger, par un mois intercalaire, le temps légal d’une magistrature exercée par un adversaire politique. Cela entraîna, on le sait, un désordre tel que César jugea nécessaire d’introduire une réforme. Mais les historiens, aujourd’hui, subissent encore les conséquences de ce désordre, et il est impossible de déterminer d’une façon simple et absolument certaine à quel jour de l’année réelle (ou, si l’on préfère, de l’année julienne extrapolée, anticipée) répond telle date que les textes nous font connaître selon l’ancien style. Ce qui présente des inconvénients sérieux.

9Par exemple, lorsque nous datons un fait de « janvier 58 », c’est en réalité un jour de décembre 59 que nous désignons. Ainsi, notre langage est contradictoire : ce que nous appelons l’année 58 n’est pas une entité définie. Nous disons (et nous lisons) que l’année 58 fut celle du consulat de Pison et de Gabinius, et l’année où fut exilé Cicéron. Mais, nous l’avons dit, il n’y eut jamais d’année 58 ; ce que l’on peut, par extrapolation, désigner par ce numéro d’ordre purement algébrique (– 58), ce serait l’année de la série des années solaires qui commença après le 12e solstice d’hiver antérieur à l’année zéro du calendrier julien, c’est-à-dire 46. Or, cette année-là ne coïncide nullement avec l’année consulaire de Pison et Gabinius. Pison et Gabinius entrèrent en charge, réellement, à une date qui correspond au 9 décembre de l’année portant le n° – 59 dans la série solaire.

10L’emploi de l’ère julienne n’en est pas moins, en pratique, fort commode ; mais il convient de ne pas être dupe de cette commodité. Non seulement nous devrons toujours nous souvenir que les mois civils ne correspondent pas aux saisons de l’année solaire, mais nous nous garderons aussi de tout calcul de dates – de jours – par référence à l’année julienne, puisque les mois de l’année civile ne sont pas superposables aux siens. Ainsi, l’expression « 8e jour avant les Calendes de février » n’a pas le même sens après et avant 46 : avant cette date, ce sera le 23e jour de janvier ; après, ce sera le 25e. Nous devrons aussi nous souvenir que, au cours d’une année intercalaire, 50 ou 51 jours séparent les Calendes de février et celles de mars, tandis que, dans les années ordinaires, il y a seulement 28 jours.

  • 8 Sur les tables qui constituent l’Appendice, ci-dessous, p. 143 et suiv.
  • 9 J. Carcopino, loc. cit. Cf., ci-dessous, p. 139.
  • 10 W. Drumann, Geschichte Roms in seinem Uebergange von der republikanischen zur monarchischen Verfass (...)

11En pratique, il est nécessaire de disposer de tables de conversion, pour passer d’un système à l’autre. Plusieurs systèmes ont été élaborés. Il semble difficile de refuser celui qui a été établi par l’astronome Le Verrier, et dont on trouvera les résultats reproduits ici8. Les raisons alléguées en faveur de ce système9 semblent bien décisives. En particulier, nous verrons que l’intercalation admise par Le Verrier en 58 (intercalation que Groebe, à qui l’on doit un autre système10, place en 59, sous le consulat de César), semble bien rendre compte des manœuvres de Clodius.

12Quoi qu’il en soit, il est nécessaire, à qui veut entreprendre des recherches chronologiques un peu précises sur cette période, au cours de laquelle le système de références se présente avec une grande confusion, d’adopter, au moins comme hypothèse, une méthode de conversion des dates, quitte, ensuite, à chercher confirmation de son parti pris dans une confrontation avec les faits qui le permettent. Il faut nous y résigner : tout ce que nous pouvons atteindre n’est qu’une vraisemblance, une probabilité plus ou moins grande, jamais une certitude absolue. Du moins n’est-il pas sans intérêt de rétablir, autant que possible, un ordre cohérent là où, trop souvent, règnent le désordre et l’arbitraire.

  • 11 Par exemple pour l’interprétation des indications de dates données dans Cicéron, Ad Att. IV, 1, 4 ( (...)

13Nous n’avons pas ici l’ambition, qui serait démesurée, de reprendre dans son ensemble la chronologie de toute la période cicéronienne et des dernières années de la République. Nous essaierons seulement de retrouver, avec la précision la plus grande que nous pourrons, la suite des événements qui accompagnèrent immédiatement ou qui suivirent l’exil de Cicéron et qui sont avec cet exil dans un rapport plus ou moins étroit. Pour cela, nous disposons de l’œuvre conservée, les Discours et la Correspondance ; parfois (mais seulement d’une façon incidente) une allusion contenue dans un dialogue apporte une précision supplémentaire ou contribue à résoudre une ambiguïté. Mais, en utilisant les textes, il convient de ne pas considérer comme témoignage « primaire » ce que nous lisons dans les éditions modernes. Assez souvent, les éditeurs, honnêtement persuadés que les indications numériques sont particulièrement fragiles, dans la tradition, accommodent celles-ci à telle ou telle idée préconçue et les modifient pour appuyer un système. Cela est, sans doute, légitime, et nécessaire ; mais il ne l’est pas moins de faire la critique de chaque correction, et d’en bien mesurer les implications, sans quoi on court le risque de se laisser enfermer dans des raisonnements vicieux, chaque fois que l’on demandera à un texte une confirmation qu’il est trop prêt à nous donner, pour la seule raison qu’il a été modifié à cette fin. Il est nécessaire, aussi, de résister aux séductions du « bon sens », et de ne pas sacrifier trop vite les données de la tradition à ce qui paraît une vraisemblance et qui n’est parfois qu’une impression peu justifiée11. De même, nous ne supposerons une inexactitude, volontaire ou involontaire, de notre source elle-même (et non plus seulement une faute dans la tradition manuscrite) que si nous sommes en mesure d’en apporter la preuve décisive. Et cela s’applique aussi bien à Cicéron et ses correspondants qu’aux historiens antiques : Dion Cassius, Appien, Plutarque, les Periochae liviennes, Asconius, et quelques autres (parmi lesquels il faut faire une place aux scholies dites de Bobbio).

  • 12 Par ex. Cicéron, Pro Sestio XXIV, 53, où les termes : illo, inquam, ipso die... mihi reique publica (...)

14Mais le rapprochement des textes entre eux, quelque précieux, indispensable soit-il, n’est pas suffisant : les historiens antiques non seulement ne sont pas, tous, également informés de tout, mais ils ne nous disent pas tout. Il est nécessaire de replacer leurs témoignages explicites dans le cadre plus général des institutions, des habitudes politiques et religieuses, des coutumes, dont ils ne parlent pas toujours, parce que, pour eux, ces choses « allaient de soi », mais qui ont contribué à régler le cours des événements. Ces historiens, pour cette raison, ne s’expriment pas toujours sans négligence ; ils ne recourent pas rigoureusement aux termes exacts, et cela peut entraîner bien des obscurités, contre lesquelles il faudra se garder. On dit indifféremment, dans la langue parlée, « rogare », aussi bien pour promulgare que pour ferre, lorsqu’un texte de loi est présenté à une assemblée populaire, concilium plebis ou comices centuriates12. Pourtant, il existe une grande différence entre ces deux moments, que sépare un laps de temps au moins égal à un « trinum nundinum ». Et cette notion de « trinum nundinum » se révèle si importante pour l’établissement de toute chronologie de la vie politique que nous devons, avant d’aborder l’étude des deux années, 58 et 57, qui virent la condamnation de Cicéron, son exil et son rappel, nous attacher à en préciser, autant que cela est possible, la nature et le sens.

Le « trinum nundinum »

  • 13 C.I.L. 12, 581 : haice utei in couentionid exdeicatis ne minus trinum / noundinum...

15La notion de trinum nundinum apparaît, pour la première fois, sur un texte épigraphique, dans le sénatus-consulte des Bacchanales13 : le sénat enjoint aux autorités locales, destinataires de la copie, de faire afficher le texte « au moins pendant trois nundines ». Ce délai est destiné à permettre à tous les « ruraux », qui ne viennent dans le chef-lieu de la ciuitas qu’à l’occasion d’un marché, de prendre connaissance des textes officiels. On sait par ailleurs que les nundinae, ou marchés, étaient ainsi appelées parce qu’elles avaient lieu tous les neuf jours – chaque fois le 9e jour, marquant le terme d’une véritable « semaine » de huit jours, ou, si l’on veut, la commençant.

  • 14 Le problème est posé par Th. Mommsen, Röm. Chronol., p. 243, n. 36. V. id., Staatsrecht III, 1, Lei (...)

16Tout le problème consiste à savoir si l’expression trinum nundinum désigne l’espace qui sépare trois marchés consécutifs, c’est-à-dire deux intervalles pleins, soit 8 + (8 + 1) = 17 jours, ou bien trois « semaines » nundinales entières, c’est-à-dire 8 × 3 = 24 jours14. A la vérité, les faits, dont on pourrait espérer qu’ils trancheraient aisément le débat, ne sont pas du tout clairs et, à la réflexion, on en voit la raison. Pour que le débat fût tranché, il faudrait, à défaut d’un témoignage explicite (que nous ne possédons pas), que l’on nous dît qu’une rogatio portée 17 jours avant le vote ait été considérée comme conforme à la règle ; or, nous n’avons pas non plus ce témoignage indirect. Lorsque nous constatons, avec certitude – nous en verrons des exemples – que 24 jours se sont écoulés entre la promulgatio et le vote, rien ne prouve que le délai minimum légal n’a pas été allongé. Pourtant, il n’est pas sans intérêt de montrer, chaque fois qu’on le peut, qu’un intervalle de 24 jours a effectivement séparé les deux phases de la rogatio. A la longue, et si ce chiffre apparaît en d’assez nombreux cas, on pourra conclure avec une très grande probabilité que c’est là le véritable « trinum nundinum ».

  • 15 In Pis. IV, 8 : tu, cum in Kalendas Ianuarias Compitaliorum dies incidisset... Asconius, ad loc. (p (...)

17Précisément, les premiers jours du consulat de Pison et de Gabinius (que nous appellerons, pour plus de commodité, l’année 58 av. J.-C.) présentent un exemple d’un tel délai entre le dépôt des textes et leur vote par le concilium plebis. Il s’agit des quatre premières lois de P. Clodius, dont nous savons, sans aucune ambiguïté, qu’elles ont été votées le 4e jour de janvier. Cicéron, en effet, rappelle, dans le Contre Pison, les événements qui ont marqué les premiers jours de l’année consulaire. Ce fut d’abord la célébration illégale des Compitalia 15. Puis, triduo post, trois jours après, les monstrueuses propositions du tribun furent soumises au peuple et votées.

  • 16 XXV, 79.
  • 17 V. Appendice, p. 143.

18Sans doute, une question préliminaire doit être posée : quel est le sens exact des mots « triduo post » ? Désignent-ils le 3e ou le 4e jour de janvier ? La réponse nous est fournie, sans aucun doute possible, par un autre texte du même Cicéron, dans le Pro Quinctio 16: l’orateur compte, entre le 5e jour avant les Calendes du mois intercalaire et la veille de ces mêmes Calendes « biduo post... aut... non toto triduo » ; si l’on ne compte pas le jour initial (le 5e avant les Calendes), il s’écoule un biduum jusqu’à la veille des Calendes ; ce biduum est fourni par le 4e et le 3e jour ; si l’on compte le jour initial, on obtient un triduum. On voit que le triduum exclut le jour final. Un triduum après le 5 des Calendes cela signifie la veille de celles-ci, c’est-à-dire 4 jours plus tard, ou plutôt le 4e jour à partir de la date initiale. Dans ces conditions, les lois de Clodius ont été votées non le 3 janvier, comme on le dit parfois, mais le 4. Et cette solution est confirmée par le fait que ce jour (comme d’ailleurs le précédent) est un jour comitial 17.

  • 18 Mommsen, Staatsrecht, cit. a commis quelque confusion en rapportant ces faits.

19Il s’ensuit que les rogationes de Clodius ont pu être déposées le 10 décembre précédent, le jour même où le nouveau collège des tribuns était entré en charge. Un délai de 24 jours exactement s’est en effet écoulé entre le 10 décembre et le 4 janvier (le mois de décembre comptait alors, nous l’avons rappelé, 29 jours). Et cela nous garantit, en même temps, que le délai légal expirait au soir du 23e jour ou, si l’on préfère, au matin du 24e18.

  • 19 De lege agr. II, v, 13 ; ineunt tandem magistratus tribuni plebis... Legem hominis contionemque exs (...)
  • 20 In Cornel, p. 57 K.S. : celeritatem actionis significat quia Manilius... post pauculos statim dies (...)
  • 21 Notamment pour le vote de la loi de rappel, du 4 août 57 (ci-dessous, p. 131). Mais on n’oubliera p (...)

20On ne s’étonnera pas que P. Clodius ait choisi le jour même de son entrée en charge pour promulguer ses rogationes. Cette tactique semble avoir été habituelle. Cicéron, dans le second discours sur la loi agraire, trouve surprenant qu’elle n’ait pas été celle de P. Rullus, au mois de décembre 6419. De même, il est bien probable que Manilius, lorsqu’il fit déposer son plébiscite, au mois de décembre 67, n’était pas en exercice depuis bien longtemps. Sans doute, l’expression dont se sert Asconius20 est-elle vague. Il est possible que, en faisant voter ce plébiscite dès le 29 décembre, Manilius n’ait pas laissé 17 jours s’écouler entre la promulgatio et le vote, mais le parallèle avec la tactique de Clodius suggère bien que ce vote fut invalidé parce que le délai de 24 jours n’avait pas été observé. En d’autres termes, l’interprétation « courte » du trinum nundinum n’est pas, mathématiquement, exclue ; mais elle est fort peu vraisemblable. Et nous espérons montrer, en l’absence d’arguments absolument irréfutables, que l’hypothèse d’un trinum nundinum de 24 jours explique mieux telle ou telle date, tel ou tel fait, et permet d’établir une chronologie plus satisfaisante21. Il n’en reste pas moins paradoxal et, peut-être, en apparence, d’une méthode quelque peu inquiétante de déduire de la chronologie reconstruite la vérification d’une hypothèse dont on eût attendu qu’elle fût assurée par elle-même, indépendamment de ses applications.

Les servitudes du calendrier

21D’une façon générale, et indépendamment des délais légaux, les activités politiques étaient soumises à des règles liées à la nature des jours : n’importe quel acte ne pouvait pas être indifféremment accompli à n’importe quelle date. Malheureusement, les règles de cette sorte ne nous sont pas toujours parfaitement connues. Elles ont varié avec les époques et même, parfois, celles que l’on parvient à préciser comportent des exceptions, des manquements qui nous déconcertent.

  • 22 V. les textes réunis par G. Wissowa, s. v. Comitiales dies, R. E. IV, p. 716, surtout Varro, De l. (...)

22On sait que les comices ne pouvaient être réunis qu’à certains jours (jours comitiaux, dies comitiales) ; mais il fallait que ces jours-là ne fussent pas jour de fête mobile ni jour de marché (nundinae) 22.

  • 23 Cf. O’Brien Moore, s. v. senatus, R.E., Suppl. VI, col. 702 et suiv. Pour une séance tenue après la (...)
  • 24 V., ci-dessous, p. 55 et n. 5.

23Le sénat, en revanche, ne devait pas, en principe, tenir séance les jours où il était légal de convoquer les comices ; mais il pouvait le faire tous les autres jours, même les jours néfastes. Même les jours comitiaux, il était possible de réunir les sénateurs, soit lorsque les comices ne pouvaient se tenir (jours de fêtes mobiles, nundinae), soit après leur clôture23. Quant aux contiones, aux réunions tenues par un magistrat de sa propre autorité, elles n’étaient soumises, légalement, à aucune obligation de date24.

  • 25 Cf. K. Latte, Römische Religions Geschichte, Munich 1960, Der römische Festkalender.

24L’application de ces principes est, en pratique, assez délicate. Il est toujours possible qu’une exception ait été faite, pour une raison aujourd’hui impossible à connaître. En outre, le caractère des jours nous est indiqué essentiellement par des calendriers lapidaires qui reflètent l’état des choses sous l’Empire25 ; l’état antérieur est moins bien connu ; il est souvent hypothétique, ce qui ajoute un élément d’incertitude qui peut, dans certains cas, fausser l’analyse. Enfin, le mois intercalaire ne figure généralement pas sur les calendriers que nous connaissons, ou les lacunes qu’ils présentent dissimulent le caractère des jours qui le composent.

25Mais il n’y a pas, pour l’établissement d’une chronologie aussi sûre que possible des temps cicéroniens, que des circonstances défavorables. Une autre règle juridique, valable, par une heureuse fortune, pour la période qui suivit le consulat de César, nous sera d’un grand secours, celle de l’alternance consulaire.

  • 26 Th. Mommsen, Le droit public romain, trad. fr. P. F. Girard, Paris 1892, I, p. 44 et suiv.
  • 27 Suetone, Caesar 20 : antiquum etiam rettulit morem ut quo mense fasces non haberet, accensus ante e (...)

26On sait que, traditionnellement, lorsque les deux consuls de l’année se trouvaient ensemble à Rome, un seul était chargé chaque mois des « affaires courantes », et se faisait précéder des licteurs avec leurs faisceaux. Le mois suivant, son collègue lui succédait dans ces prérogatives. Le principe de cette alternance mensuelle, en vigueur aux origines de la République, s’était, semble-t-il, progressivement affaibli26. Mais César, en 59, lui avait rendu son antique vigueur27. Par conséquent, si, en 58 et les années suivantes, nous parvenons à savoir lequel des deux consuls « avait les faisceaux » en telle ou telle occasion, il sera possible d’en conclure que l’événement en question s’est passé au cours d’un mois pair ou impair. Critère particulièrement précieux en ces années où les consuls n’obéissaient pas toujours aux mêmes mots d’ordre politique, servaient plus particulièrement l’un César, l’autre Pompée et même, parfois, sur les points qui intéressaient directement Cicéron, adoptaient des attitudes opposées. Ce sera notamment le cas en 58, lorsque, après le départ de Cicéron, Gabinius entrera en lutte contre Clodius, tandis que Pison, fidèle aux consignes césariennes, s’efforcera visiblement de maintenir la stabilité de l’alliance entre César et Pompée.

  • 28 Ci-dessous, Appendice, p. 147.
  • 29 In Pis. V, 11, et surtout Cum sen. VII, 17 ; tu... quem kalendis Ianuariis tertio loco sententiam r (...)
  • 30 Ci-dessous, p. 111.
  • 31 In Pis. XI, 26 ; De domo XXIV, 62.
  • 32 Macrobe, Sat. I, 13, 15 (ci-dessus, p. 9, n. 1).

27Pour l’année 58, le principe de l’alternance consulaire pose toutefois un problème particulièrement délicat. Nous avons dit que, selon les tables de Le Verrier, cette année-là comporta un mois intercalaire28. Comment fonctionna, dans ces conditions, l’alternance consulaire ? A notre connaissance, aucune solution n’a jamais été proposée. Mais peut-être, précisément, l’étude chronologique des événements de 58 apportera-t-elle une contribution. Nous savons que Pison avait les faisceaux au mois de janvier, puisque c’est lui qui, nous dit Cicéron, aurait dû empêcher la célébration des Compitalia et aussi, nous l’apprenons par le même discours, qu’il présida, aux Calendes de ce mois, la première séance du sénat29. D’autre part, nous savons, par Asconius, que Gabinius, son collègue, avait les faisceaux au mois d’août30. Il nous apparaîtra aussi que Pison était chargé du maintien de l’ordre à l’intérieur de la Ville au mois de mars, lors des troubles qui suivirent immédiatement le départ de Cicéron (incendie et pillage de sa maison31). Tout cela semble bien indiquer que l’alternance suivit, comme de coutume, celle des mois : mois impairs, Pison avait les faisceaux, tandis que, pendant les mois pairs, ils appartenaient à Gabinius. Le mois intercalaire, dans ces conditions, paraît bien avoir été purement et simplement intégré à février. Ce qui s’explique, puisque ce mois, nous l’avons dit, s’insère entre deux fêtes de février. Macrobe a raison d’observer que ce curieux système d’intercalation s’explique par une religio : au regard des dieux, mars devait immuablement succéder à février ; le mois intercalaire n’était pas un mois véritable, il n’était qu’une addition de 22 ou 23 jours qui allongeait interminablement le second mois de l’année civile32.

28Telles sont les principales ressources dont nous disposons pour tenter de reconstruire la chronologie de ces années où se prépare le déchirement de la guerre civile.

Les premières lois de Clodius

  • 33 Ci-dessus, p. 11.
  • 34 Ci-dessus, p. 24, n. 2.

29L’année consulaire que nous appelons l’année 58 av. J.-C.33 commença, comme de coutume, aux Calendes de janvier, par une séance solennelle du sénat34. L. Calpurnius Piso Caesoninus, le consul « césarien » (et beau-père de César) était président, ce qui implique, nous l’avons dit, qu’il avait les faisceaux. Cicéron était présent à la séance, et Pison lui demanda son avis « tertio loco ». Nous ne savons au juste quels furent les deux sénateurs qui formulèrent leur sententia avant lui. L’un était certainement Pompée ; quant au second, l’hésitation est possible ; généralement on admet qu’il s’agit de Crassus, consul, comme Pompée, en 70, mais d’autres noms pourraient être avancés. Il ne saurait s’agir de César, consul de fraîche date, mais cela n’implique pas que César n’assistait pas à la séance.

  • 35 Sur ce nom, que nous maintenons, malgré les remarques présentées par M. Shackleton Bailey in Class. (...)
  • 36 In Pis. IV, 8. Asconius, cit. (ci-dessus, p. 18, n. 1).

30Le même jour étaient célébrés les Jeux Compitalices, bien qu’ils fussent en principe interdits. P. Clodius, qui en était au 20e jour de son tribunat, avait chargé son affranchi et secrétaire, son « âme damnée » Sex. Clodius35, de les organiser36.

  • 37 Suétone, Caesar 23, 1 : functus consulatu, Gaio Memmio Lucioque Domitio praetoribus de superioris a (...)

31On suppose parfois que c’est au cours de l’une des séances de janvier que fut soulevée par les préteurs L. Domitius Ahenobarbus et G. Memmius la question des « acta Caesaris »37. Mais ce que nous dit Suétone de l’incident empêche de le dater du mois de janvier. En effet, Suétone nous apprend que César, lorsque la question de la ratification de ses acta fut agitée au sénat par les deux préteurs, demanda au sénat de décider. Mais les sénateurs refusèrent et, après une vive discussion (une altercatio) qui dura trois jours, César partit pour sa province. Nous verrons que ce départ ne saurait se placer qu’au mois de mars. Il est arbitraire de supposer que deux mois (sans compter le mois intercalaire) s’écoulèrent entre la relatio des préteurs et la solution désespérée (ou plutôt l’absence de solution) à laquelle se résigna César. Pris dans son sens évident, le témoignage de Suétone implique que relatio et altercatio se succédèrent sans aucun intervalle.

  • 38 XVIII, 40 : illi autem (sc. triumuiri) aliquo tum timore perterriti, quod acta illa atque omnis res (...)

32Un passage du Pro Sestio nous apporte une confirmation indirecte38. Nous y lisons, en effet, que si les triumvirs et, en particulier, César, ne s’opposèrent pas à Clodius et à sa violente campagne contre Cicéron, c’est qu’ils étaient sensibles à la menace que faisait peser sur leur tête la relatio des deux préteurs ennemis. L’expression même dont se sert l’orateur

  • 39 Ci-dessous, p. 31 et suiv.

33aliquo tum terrore perterriti... situe toute l’affaire au mois de mars, au moment ou Clodius venait de déposer la première loi qui devait amener la perte de Cicéron, la lex de capite ciuium Romanorum 39. Même si l’on pense (et sans doute à bon droit) que la raison alléguée par Cicéron n’est pas la bonne, que César ne redoutait point Clodius, mais qu’il était de connivence avec lui pour expulser le « tyran d’Arpinum », il n’en reste pas moins que l’affaire des acta ne saurait s’être déroulée en janvier, en un temps où Clodius et Cicéron semblaient avoir conclu une sorte de trêve.

  • 40 Ci-dessus, p. 19 et suiv.
  • 41 Asconius, Ad Pison. 9, p. 7 K.S.

34Le 4 janvier, jour comitial, nous l’avons dit, vinrent en discussion devant le concilium plebis les propositions promulguées par Clodius le 10 décembre précédent40. Elles concernaient, on le sait, une réforme de la loi Aelia et Fufia sur les auspices, un nouveau règlement concernant les collegia, une modification de la censure, et aussi une loi frumentaire41.

  • 42 XV, 33 : isdemque consulibus sedentibus atque inspectantibus lata lex est « ne auspicia ualerent, n (...)
  • 43 Ad sen. V, 11-12 : quo (sc. consule) inspectante ac sedente, legem tribunus plebis tulit ne auspici (...)
  • 44 C’est ce qui résulte de l’ordre suivi par Cicéron, Ad sen. V, 12-13 ; VII 16-17 ; Pro Sestio XI, 25 (...)
  • 45 XXVI, 56 : mitto eam legem quae omnia iura religionum, auspiciorum, potestatum, omnis leges quae su (...)

35Un passage du Pro Sestio 42semble suggérer, à première vue, que l’abrogation, ou du moins l’aménagement de la lex Aelia et Fufia fut plus tardive, puisqu’elle est citée après la contio tenue au Cirque Flaminien – or cette contio ne saurait être antérieure au dépôt de la première rogatio clodienne, qui date de février ou du mois intercalaire, puisqu’elle est venue devant le concilium en mars. Mais, à la réflexion, cette première impression se dissipe. Un autre témoignage, fourni par Cicéron lui-même43, nous apprend que la lex Aelia et Fufia fut abrogée avant les manifestations de sympathie auxquelles se livrèrent les chevaliers en faveur de leur ami. Or, ces manifestations, qui furent réprimées brutalement par Gabinius, n’ont pu, pour cette raison, se produire qu’entre la fin du mois de janvier et le début du mois de mars et, d’autre part, nous savons que ces manifestations précédèrent la contio du Cirque Flaminien et ne les suivirent pas44. Il n’est pas possible non plus de penser que la loi de Clodius concernant les obnuntiationes ait consisté en deux motions distinctes, dont l’une eût été votée au début de janvier, l’autre quelques mois plus tard. En effet, le Pro Sestio précise que cette réforme se fit una rogatione 45. Les indications chronologiques que nous avons cru pouvoir tirer du discours contre Pison demeurent donc entièrement valables. Il est certain que les quatre premières lois clodiennes furent votées par le concilium plebis le 4 janvier de l’année consulaire.

Notes

1 Ceux, par exemple, de M. Gelzer, M. Tullius Cicero (als Politiker), R. E. VII A (1939), col. 827 et suiv. ; E. Ciaceri, Cicerone e i suoi tempi, 2 vol. Milan 1926-1930 ; E. Meyer, Caesars Monarchie und das Principat des Pompeius, Stuttgart 1918 ; J. Carcopino, César, 4e édition, Paris 1954 ; J. Van Ooteghem, Pompée le Grand, bâtisseur d’Empire, Bruxelles 1954. Pour la période qui nous intéresse ici plus directement, le mémoire de G. De Benedetti, L’esilio di Cicerone e la sua importanza storico-politica, Historia III (1929), p. 331-363 ; 539-568 ; 761-789.

2 J. Van Ooteghem, op. cit., p. 355.

3 La date est donnée explicitement par Cicéron, Pro Sestio 75 (VIII Kal. Febr.). Comme nous sommes dans le calendrier pré-julien, qui ne connaissait qu’un mois de janvier de 29 jours, il ne peut s’agir que du 23 ; l’erreur de certains modernes a consisté à anticiper, par inadvertance, l’application du calendrier julien, qui attribue 31 jours au mois de janvier. V. W. Sontheimer, s. v. Monat, R. E. XVI (1933), col. 44-74.

4 Th. Mommsen, Die Römische Chronologie bis auf Caesar, Berlin 1859.

5 Nous renvoyons, une fois pour toutes, à l’exposé qu’à donné de cette question J. Carcopino, op. cit., p. 736 et suiv.

6 Le texte fondamental est celui de Censorinus, De die natali, XX, 60 : denique cum intercalarium mensem uiginti duum uel uiginti trium dierum alternis annis addi placuisset, ut ciuilis annus ad naturalem exaequaretur, in mense potissimum Februario inter Terminalia et Regifugium intercalatum est... Cf. Macrobe, Sat. I, 13, 15 : nam illi (sc. Graeci) confecto ultimo mense, Romani non confecto Februario sed post uicesimum et tertium diem eius intercalabant, Terminalibus scilicet iam peractis. Deinde reliquos Februarii mensis dies, qui erant quinque post intercalationem, subiungebant, credo uetere religionis suae more, ut Februarium omni modo Martius consequeretur.

7 Cf. Th. Mommsen, op. cit., p. 43, citant, entre autres, une lettre de Cicéron à Atticus (Ad. Att. VI, 1, 1) où nous lisons : accepi tuas litteras a. d. quintum Terminalia.

8 Sur les tables qui constituent l’Appendice, ci-dessous, p. 143 et suiv.

9 J. Carcopino, loc. cit. Cf., ci-dessous, p. 139.

10 W. Drumann, Geschichte Roms in seinem Uebergange von der republikanischen zur monarchischen Verfassung, 2e éd. revue par P. Groeb, Berlin 1899 et suiv., vol. III, p. 729-825. C’est au système de Groebe que se réfère l’édition L. A. Constans de la Correspondance de Cicéron.

11 Par exemple pour l’interprétation des indications de dates données dans Cicéron, Ad Att. IV, 1, 4 (ci-dessous, p. 133).

12 Par ex. Cicéron, Pro Sestio XXIV, 53, où les termes : illo, inquam, ipso die... mihi reique publicae pernicies, Gabinio et Pisoni prouincia rogata est s’appliquent au vote définitif de deux lois ; de même Ad Att. III, 5, où ante diem rogationis s’applique au vote. II est évidemment naturel que la même expression s’applique au dépôt du texte (promulgatio) et à son adoption par l’assemblée compétente, puisque ce n’était qu’un seul et même acte juridique, en deux moments que séparait le trinum nundinum légal.

13 C.I.L. 12, 581 : haice utei in couentionid exdeicatis ne minus trinum / noundinum...

14 Le problème est posé par Th. Mommsen, Röm. Chronol., p. 243, n. 36. V. id., Staatsrecht III, 1, Leipzig 1887, p. 376.

15 In Pis. IV, 8 : tu, cum in Kalendas Ianuarias Compitaliorum dies incidisset... Asconius, ad loc. (p. 7 K.S.) remarque fort bien que, à cette date des Calendes, la loi autorisant la célébration des Jeux compitalices par les collèges n’était pas encore votée, donc que l’action de P. Clodius était illégale, et anticipait sur le vote de la loi. Le tribun L. Ninnius Quadratus tenta, vainement, d’opposer son veto à cette célébration (Asconius, ibid.).

16 XXV, 79.

17 V. Appendice, p. 143.

18 Mommsen, Staatsrecht, cit. a commis quelque confusion en rapportant ces faits.

19 De lege agr. II, v, 13 ; ineunt tandem magistratus tribuni plebis... Legem hominis contionemque exspectabam ; lex initio nulla proponitur, contionem in primis (sic codd. : in pridie Madvig) aduocari iubet...

20 In Cornel, p. 57 K.S. : celeritatem actionis significat quia Manilius... post pauculos statim dies quam inierat tribunatum legem eandem Compitalibus pertulit (les Compitalia eurent lieu, cette année-là, le 29 déc.). La promulgatio du texte n’avait pas eu lieu le 10 décembre, mais « peu après ». Cf. J. Carcopino, op. cit. p. 607, n. 110. V. aussi la note suivante

21 Notamment pour le vote de la loi de rappel, du 4 août 57 (ci-dessous, p. 131). Mais on n’oubliera pas que le trinum nundinum n’est qu’un minimum à respecter. Même si l’on parvient à démontrer qu’un délai de 24 jours, exactement, s’est écoulé entre la promulgatio et le vote (comme dans le cas des quatre rogationes de Clodius) il reste toujours possible d’objecter que ces 24 jours sont un dépassement du délai minimum de 17 jours. Seule la répétition des exemples permet d’écarter cette interprétation, que nous croyons erronée.

22 V. les textes réunis par G. Wissowa, s. v. Comitiales dies, R. E. IV, p. 716, surtout Varro, De l. l. AI, 29 : comitiales dicti quod tum ut coiret populus constitutum est ad suffragium ferendum, nisi si quae feriae conceptae essent, propter quas non liceret, ut Compitalia et Latinae. Macrobe, Sat. I, 16, 14 : comitiales sunt quibus cum populo agi licet ; et fastis quidem lege agi potest, cum populo non potest, comitialibus ultrumque potest. Sur l’interdiction des comices aux Nundines, cf. Pline, N. H. XVIII, 13. Cf. W. Kroll, s. v. nundinae, R. E. XVII, col. 1467-1472.

23 Cf. O’Brien Moore, s. v. senatus, R.E., Suppl. VI, col. 702 et suiv. Pour une séance tenue après la clôture des comices, cf. Cicéron, Ad Att. I, 14, 5 V. aussi Ad fam. VIII, 8, 5.

24 V., ci-dessous, p. 55 et n. 5.

25 Cf. K. Latte, Römische Religions Geschichte, Munich 1960, Der römische Festkalender.

26 Th. Mommsen, Le droit public romain, trad. fr. P. F. Girard, Paris 1892, I, p. 44 et suiv.

27 Suetone, Caesar 20 : antiquum etiam rettulit morem ut quo mense fasces non haberet, accensus ante eum iret, lictores pone sequerentur.

28 Ci-dessous, Appendice, p. 147.

29 In Pis. V, 11, et surtout Cum sen. VII, 17 ; tu... quem kalendis Ianuariis tertio loco sententiam rogaras...

30 Ci-dessous, p. 111.

31 In Pis. XI, 26 ; De domo XXIV, 62.

32 Macrobe, Sat. I, 13, 15 (ci-dessus, p. 9, n. 1).

33 Ci-dessus, p. 11.

34 Ci-dessus, p. 24, n. 2.

35 Sur ce nom, que nous maintenons, malgré les remarques présentées par M. Shackleton Bailey in Class. Quar. N.S. X (1960), p. 41-43, cf. notre édition du Contre Pison, Paris 1966, p. 158.

36 In Pis. IV, 8. Asconius, cit. (ci-dessus, p. 18, n. 1).

37 Suétone, Caesar 23, 1 : functus consulatu, Gaio Memmio Lucioque Domitio praetoribus de superioris anni actis referentibus, cognitionem senatui detulit ; nec illo suscipiente triduoque per inritas altercationes absumpto, in prouinciam abiit et statim quaestor eius in praeiudicium aliquot criminibus arreptus est. P. Stein, Die Senatssitzungen der Ciceronischen Zeit (68-43), Münster 1930, p. 28 admet que l’affaire se déroula au mois de janvier. Il convient de ne pas serrer de trop près les termes de Suetone, Nero 2,3 : C. Caesar abeuntem consulatu... Au mois de mars encore César « sortait de son consulat ».

38 XVIII, 40 : illi autem (sc. triumuiri) aliquo tum timore perterriti, quod acta illa atque omnis res anni superioris labefactari a praetoribus...

39 Ci-dessous, p. 31 et suiv.

40 Ci-dessus, p. 19 et suiv.

41 Asconius, Ad Pison. 9, p. 7 K.S.

42 XV, 33 : isdemque consulibus sedentibus atque inspectantibus lata lex est « ne auspicia ualerent, ne quis obnuntiaret... ». Aussitôt après, le même discours mentionne les « enrôlements » du tribunal Aurélien (ci-dessous, p. 97) qui eurent lieu en janvier, vraisemblablement. L’ordre chronologique est donc rétabli, une fois le développement précédent terminé.

43 Ad sen. V, 11-12 : quo (sc. consule) inspectante ac sedente, legem tribunus plebis tulit ne auspiciis obtemperaretur... idemque postea, cum innumerabilis multitudo bonorum de Capitolio supplex ad eum sordidata uenisset... Il s’agit de Gabinius qui siégeait aux côtés de Pison pendant les jours où Clodius faisait campagne pour ses rogationes.

44 C’est ce qui résulte de l’ordre suivi par Cicéron, Ad sen. V, 12-13 ; VII 16-17 ; Pro Sestio XI, 25 ; Cassius Dio, XXXVIII, 16.

45 XXVI, 56 : mitto eam legem quae omnia iura religionum, auspiciorum, potestatum, omnis leges quae sunt de iure et de tempore legum rogandarum, una rogatione deleuit.

© Les Belles Lettres, 1967

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