Parier sur le temps
|Introduction
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Extrait du texte
« Je vois que nous, les vivants, nous ne sommes que phantasme et vaine ombre »
(Sophocle, Ajax, 125s.)1
1. Problématique : temps, éthique et poétique
Les Grecs se sont représenté l’être humain comme un être insignifiant, semblable à une feuille (Homère, Il., VI, 146s., XXI, 464s.), « le rêve d’une ombre » (Pindare, Pyth. VIII, 95), mais aussi comme la plus grande des merveilles (Sophocle, Ant. 332ss.). Le constat de l’éphémère est récurrent dans l’histoire des civilisations. Le plus vieux récit de l’humanité, l’épopée de Gilgamesh (IIIe millénaire), retrace la quête d’immortalité de ce roi et son échec, exprimant ainsi l’inéluctabilité de la précarité humaine. Pourquoi sommes-nous des êtres éphémères ? La réponse judéo-chrétienne est le péché originel. Trompée par le serpent qui lui assure qu’elle ne mourra pas, Eve mange le fruit défendu et devient alors mortelle. La connaissance du bien et du mal a pour conséquence la chute dans le temps, qui apparaît comme une malédiction divine....
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