Les khettaras, des vestiges bien vivants

1On les croyait taries. Mais au lendemain de la sécheresse qui a sévi au Maroc jusque dans les années 2000, le retour de l’eau s’est accompagné de la remise en service, dans les oasis pré-sahariennes, de grandes galeries drainantes creusées au fil des siècles par les hommes. Ainsi dès 2005, une équipe de recherche étudie la réhabilitation, dans le Tafilalet, d’un dédale de galeries souterraines qui s’étendent chacune sur 5 à 10 kilomètres, à une profondeur de 2 à 18 mètres. Leur fonction ? Drainer l’eau de la nappe phréatique pour l’acheminer jusqu’aux oasis.

Entrée de galerie souterraine, oasis de Skoura, Maroc.

2Si de telles structures existent et fonctionnent encore en Iran ou en Algérie, on les pensait complètement abandonnées au Maroc. À tort, car en cinq endroits au moins (Figuig, Boudnib,Tafilalet, Todgha, Skoura), les chercheurs observent des galeries en cours de réhabilitation par les populations rurales et décrivent le fonctionnement de ces structures appelées localement khettaras.

Khettara dans la vallée du Tafilalet, Maroc.

3Il apparaît ainsi que les habitants des oasis se réinvestissent désormais dans la maintenance des khettaras et dans l’agriculture, en particulier les jeunes qui reviennent en milieu rural à cause du chômage auquel ils se trouvent confrontés en ville. Un pari risqué face à l’incertitude climatique, mais assumé pour relancer l’action collective et se réapproprier les règles d’accès à l’eau en vue d’une possible pénurie dans les années à venir.

4Ce travail se traduit par la publication d’articles scientifiques mais aussi par la réalisation de deux maquettes présentant le fonctionnement de ces ouvrages hydrauliques. L’une est exposée au Mucem de Marseille, l’autre à Marrakech, au musée Mohammed VI pour la civilisation de l’eau au Maroc. De quoi améliorer l’image de ces techniques ancestrales qui, à l’inverse des approches modernes, permettent d’exploiter l’eau des nappes phréatiques sans jamais effectuer de surpompage.