Des oiseaux et des touristes comme objets d’étude

1Les touristes sont de plus en plus nombreux à vouloir fouler le sol des terres sauvages pour en observer ici une espèce rare, là un écosystème préservé. Un loisir qui se monnaie et peut constituer une manne financière tant pour les opérateurs touristiques que pour les autorités des pays et espaces naturels concernés. On estime par exemple que l’observation du manchot antipode en Nouvelle-Zélande génère 100 millions de dollars par an, soit environ 60 000 $ par couple reproducteur. Ce secteur touristique est ainsi un levier de développement économique majeur, en particulier pour les petits états insulaires de la zone inter-tropicale qui accueillent une biodiversité aussi riche que menacée.

2Ce paradoxe entre protection et valorisation économique de la biodiversité appelle à considérer la question de l’impact écologique des activités touristiques, notamment en zones isolées. Ainsi, chez les très spectaculaires – et donc très prisées – colonies d’oiseaux marins, des intrusions intempestives engendrent du stress, des modifications comportementales, des abandons de nids, voire de la mortalité.

3En Nouvelle-Calédonie, la question fait l’objet d’un projet de recherche pluridisciplinaire visant à comprendre autant le comportement des animaux dérangés que celui des parties prenantes (usagers et gestionnaires de l’environnement). Pour appréhender les enjeux du tourisme, des ethnoécologues cherchent à identifier les valeurs que les touristes, plaisanciers, pêcheurs et opérateurs touristiques attachent à ces espèces et comment ils évaluent leur propre impact.

4En parallèle, des biologistes écologues mesurent et quantifient les impacts de la présence de visiteurs sur les populations d’oiseaux marins nichant sur des îles proches ou éloignées des zones habitées. Ils estiment ainsi pour différentes espèces des distances d’interaction respectueuses et évaluent leurs capacités d’habituation à l’humain. Ils décrivent également le comportement des touristes (déplacements, types de perturbations, temps et nombre de visites, etc).

••• Les chercheurs étudient comment les activités touristiques impactent la faune sauvage et cherchent à évaluer s’il est possible de concilier la protection de la biodiversité et sa valorisation économique, notamment dans des territoires où la biodiversité est une ressource majeure •••

5Objectif ? Compiler les données pour proposer un outil de gestion concret et efficace aux gestionnaires locaux de l’environnement, afin que ces derniers puissent avoir une idée précise des possibilités d’approches ou des situations à risque en fonction des saisons, des espèces et des fréquences de visite. De quoi évaluer et tester la durabilité des projets écotouristiques qui, sur le papier, s’engagent à ne pas menacer l’intégrité économique, sociale, culturelle ou environnementale à long terme des régions d’accueil.