Changer les eaux usées en engrais et embellir les villes
p. 30-31
Résumé
De la qualité des eaux anthropiques dépend le maintien de la biodiversité dans les milieux naturels. Et vice-versa, puisque les écosystèmes ont aussi la capacité de purifier l’eau au travers d’une myriade de micro- et de macroorganismes.
Texte intégral

Évacuation des eaux usées à ciel ouvert, ville de Rufisque, Sénégal.
© ird / S. Dos Santos.
1En 2014, la Banque mondiale annonce dans un rapport que, à elles seules, les stations d’épuration ne suffiront pas pour traiter les eaux usées d’une population mondiale en pleine expansion : elles coûtent trop cher et sont trop vite sous-dimensionnées. Pour l’organisation, il est urgent de développer d’autres approches pour traiter l’eau des villes, particulièrement dans les pays du Sud.
2Cet appel est entendu par des écohydrologues de l’IRD, qui se mettent en tête d’adapter à de fortes densités démographiques des systèmes de filtration autonomes déployés depuis les années 1970 en France dans de petites communes rurales. Ces dispositifs, appelés « filtres plantés verticaux », sont constitués de larges bassins étanches remplis de graviers et plantés de végétaux. Leur efficacité est suffisante pour minéraliser la matière organique constitutive des eaux usées domestiques et permettre ensuite le rejet des eaux usées dans le milieu naturel. Mais ils ont le défaut d’occuper de l’espace : 1,2 à 2 m2 par habitant, ce qui n’est pas adapté aux milieux urbains à fortes densités de population.
3Or, en milieu tropical, les processus naturels de minéralisation sont plus actifs, du simple fait de la forte température de l’air. À ces latitudes, la surface nécessaire du dispositif par habitant se réduit à 0,8 m2. En optimisant la façon dont les plantes, les invertébrés et le microbiome contribuent à minéraliser la matière organique, les chercheurs ont pour objectif de réduire de moitié la surface nécessaire par habitant. Un début prometteur, car tout porte à croire qu’en automatisant le système de recharge des eaux usées dans les bassins, cette surface pourrait tomber à 0,2 m2 par habitant.
••• Des chercheurs réinventent une solution de filtration autonome vieille de cinquante ans pour réutiliser les eaux usées domestiques et réduire la consommation en eau •••

Exemple de filtre planté vertical pour l’épuration des eaux usées domestiques avec rejet direct à la rivière, France.
© ird / D. Orange
4De plus, la maîtrise du débit des eaux usées envoyées sur le filtre rend possible la production d’une eau enrichie en nitrates, et donc utilisable comme engrais pour des espaces verts et du maraîchage urbain. Une aubaine en particulier pour les villes africaines, où ces effluents pourraient être utilisés pour créer des parcs et ainsi rafraîchir et épurer l’air, en replaçant les sols et la biodiversité au cœur du développement durable de la cité. C’est avec cet objectif que les chercheurs ont mis en place des dispositifs pilotes dans les universités d’Hanoï (Vietnam) et de Saint-Louis (Sénégal). Au Sénégal, les filtres plantés sont connectés et suivis à distance via des capteurs, afin de progresser encore dans l’amélioration de ces « vieux systèmes d’avenir ».
Partenaires
Université Gaston Berger (UGB), Saint-Louis, Sénégal
Université des Sciences et Techniques de Hanoï (USTH), Hanoï, Vietnam
Université Toulouse 3, Toulouse, France
Université La Rochelle, La Rochelle, France
Université de Barcelone, FSUB, Barcelone, Espagne
EPURTEK, TPE, Toulouse, France

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