Chapitre VIII. La théorie du fascisme
p. 105-119
Texte intégral
1. La version marxiste orthodoxe
1Il n’est pas de notre propos de reprendre l’analyse de la théorie marxiste de l’histoire. Système clos, basé sur un déterminisme historique monocausal, la philosophie marxiste de l’histoire a fait l’objet de suffisamment d’analyses. Toute société jusqu’à présent a été déterminée par la lutte des classes. Dans toutes les sociétés, l’Etat est l’instrument à l’aide duquel la classe dominante maintient l’exploitation de la classe dominée.
2La politique est toujours plus ou moins directement déterminée par l’infrastructure et les rapports de production. La guerre de type impérialiste (pour Lénine) correspond au stade suprême d’une crise du capitalisme monopolistique d’Etat : la diminution des profits ayant amené à une concentration toujours plus accentuée du capitalisme financier et industriel et à une mainmise renforcée sur l’Etat (ce qui serait irrationnel pour le capitaliste), la crise a été encore plus forte. La guerre d’agression pour trouver de nouveaux débouchés et exploiter la main-d’œuvre, s’inscrit dans une logique nécessaire de sauvegarde du système.
3L’apparition du mouvement fasciste en Italie a nécessité l’élaboration de nouveaux concepts à l’intérieur de cette théorie de l’histoire.1
4Le caractère autoritaire et totalitaire de ce mouvement a été expliqué comme la marque de la violence de la crise du capitalisme. Le capitalisme monopolistique d’Etat est aux abois après sa guerre impérialiste ruineuse (1914 - 1918) et les révoltes prolétariennes en Europe (1918 - 1922) écrasées dans le sang souvent avec l’aide des mouvements sociaux-démocrates. Le fascisme va être défini comme étant l’instrument de domination temporaire du capitalisme monopolistique d’Etat qui tente de lutter contre le cours inéluctable de l’Histoire. Par là, le fascisme montre le vrai visage d’un capitalisme qui dissimule le plus souvent son mode de domination sous les traits d’un « Etat libéral ».
5On remarquera que le changement de politique de la Russie soviétique vis-à-vis des Etats occidentaux et des partis sociaux-démocrates va permettre de détendre un peu la définition axiomatique du fascisme comme instrument du capitalisme d’Etat. Paradoxalement donc, la plus grande prise en compte par Staline de la menace nationale-socialiste va amener le « Comintern » à définir le fascisme de façon moins rigide. Dimitrov va imposer au nom de cette organisation en 1935 la définition suivante : « le fascisme est la dictature terroriste ouverte des éléments les plus chauvinistes, les plus réactionnaires et les plus impérialistes du capitalisme financier ».2
6Cette modification de la définition a permis aux chercheurs communistes de mieux focaliser leurs études sur l’Italie et l’Allemagne et surtout de pouvoir expliquer les différences entre les Etats capitalistes, le fascisme n’étant plus que la dictature des éléments les plus réactionnaires. De plus, cette définition de Dimitrov a permis de démontrer pourquoi les régimes sont encore plus belliqueux que les Etats capitalistes traditionnels.
7Le modèle explicatif étant donné, les historiens communistes ont eu moins à chercher et à trouver de nouvelles grilles d’interprétation qu’à lire dans les faits la confirmation de la théorie. La présentation de l’ouvrage de Charles Bettelheim paru après la guerre, nous permettra de montrer une application assez orthodoxe de la théorie. Par la suite, Pierre Angel et Martin Kitchen essayeront de tenir compte du système national-socialiste et de la personnalité de Hitler. On observera que leur analyse des origines de la guerre reste conforme au modèle et qu’ils n’arrivent pas à expliquer l’extrémisme de la personnalité de Hitler et de ses objectifs.
8Les variations à l’intérieur du modèle explicatif orthodoxe proviennent principalement de l’origine nationale de l’historien. Les pays communistes qui possèdent un contentieux séculaire avec l’Allemagne (Pologne, Russie soviétique) ont tendance également à mettre l’accent sur la continuité de l’impérialisme allemand à l’Est de l’Europe. Par contre, l’historiographie de la République démocratique allemande récuse ce genre d’interprétation :
« On pouvait trouver des thèses semblables sur la continuité entre un Etat d’ordre, l’esprit prussien et le fascisme aussi bien au sein de l’historiographie soviétique et polonaise que chez des publicistes. En RDA on a cependant très vite rejeté de telles présentations comme n’étant que des conceptions malheureuses. »3
9Les historiens proches du parti communiste français ne sont pas non plus en reste par rapport à l’antigermanisme. Gilbert Badia assure que si « la France a des problèmes, l’Allemagne est un problème ».4 L’historien souligne « cette insatisfaction qui semble pousser tout un peuple, l’incitant à remettre en question ou à laisser remettre en question par ceux qui le dirigent, tous les dix ou vingt ans, les résultats obtenus, qui le précipite dans des conflits d’où il sort ruiné et exsangue (,..) ».5 Pierre Angel considère les Allemands comme étant un peuple ayant été « rendu très vulnérable par un dressage séculaire ».6
Charles Bettelheim
10En Europe occidentale, la version orthodoxe marxiste est surtout représentée en France, un des rares pays où quelques professeurs d’université sont membres ou proches d’un parti communiste aligné sur les thèses édictées par Moscou. L’ouvrage de Charles Bettelheim, L’économie allemande sous le nazisme. Un aspect de la décadence du capitalisme7, paru en 1945, a été réédité jusqu’en 1971 et été traduit en plusieurs langues. Ce livre illustre notre propos. Son analyse est précise et part des prémices suivantes : la crise de 29 a réduit le marché intérieur, amené à la faillite les petites et moyennes industries et a renforcé ainsi les grands monopoles. Pour remédier à cette crise, le régime national-socialiste a su, momentanément, remettre d’aplomb l’économie allemande grâce à une politique de réarmement. Ce sont surtout les « injections de crédit » publiques qui ont permis cette politique économique. Par conséquent, la dette extérieure allemande s’est fortement aggravée. Pour rétablir la balance des paiements, il a fallu exporter plus de biens.8 Cela nécessitait de réintégrer un marché mondial, alors fermé à l’Allemagne. Cette réinsertion a pris la forme d’une guerre, car les dirigeants allemands ont été persuadés que les autre Etats refuseraient sa place à l’Allemagne. La guerre était inévitable et s’est dirigée vers les régions les plus susceptibles d’offrir des débouchés à l’économie allemande. En 1945, Charles Bettelheim conclut très logiquement que sans transformation économique et sociale en Allemagne et sans modification de la structure des échanges internationaux, de nouvelles guerres surgiront en Europe : « l’expérience allemande d’entre les deux guerres risque de préfigurer en quelque manière l’expérience européenne à venir ».9
11On remarquera que dans cette interprétation, la personnalité du dirigeant de l’Allemagne n’a quasiment pas d’importance, et pourrait être ainsi interchangeable. Il est d’ailleurs symptomatique que le nom même de Hitler ne soit qu’incidemment mentionné.
Pierre Angel
12Pierre Angel analyse de plus près le rôle joué par Hitler. Pour l’universitaire de Tours, « il est évident que le nom de Hitler n’est pas seulement celui d’une forte personnalité qui a marqué de son empreinte son pays et son époque, il symbolise aussi et résume toutes les forces qui, à un moment donné, lui ont délégué le pouvoir suprême en le chargeant d’une triple mission : « préserver l’Allemagne d’une révolution sociale, restaurer l’économie ébranlée par la grande crise et reprendre avec plus de vigueur, de dynamisme et de méthode, la politique expansionniste du Second Reich ».10
13Certes Pierre Angel n’a jamais nié que Hitler a marqué son époque, qu’il a agi avec conscience pour atteindre ses buts. Mais d’un autre côté, il est sûr que Hitler apparaît surtout sous le jour d’un fonctionnaire zélé d’intérêts, de classes sociales qui le poussent à déclarer la guerre pour pouvoir acquérir de nouveaux marchés. En ce sens, Hitler reste toujours un « agent » du grand capital, même si l’historien communiste s’astreint à éviter d’employer ce terme dénigré.
Martin Kitchen
14Martin Kitchen s’efforce plus précisément d’expliquer la profonde identité entre le fascisme allemand et le fascisme italien tout en tentant d’aborder la question de la politique étrangère. Il trouve la solution avant tout dans son affirmation de base que les « régimes fascistes poursuivent des objectifs de politique étrangère agressifs et expansionnistes ».11 Son raisonnement est le suivant :
« La conquête de nouveaux pays détourne les tensions et les frustrations d’une société de leur source objective, elle apporte un dessein et un objectif national et elle est peut-être utilisée pour compenser les masses de leurs privations et de leurs souffrances passées (...) Le degré d’intensité de n’importe lequel des points susmentionnés est déterminé par le niveau de développement du capitalisme et des problèmes inhérents, que le régime fasciste est appelé à surmonter. Le fascisme allemand a été bien plus brutal, plus agressif et plus totalitaire que le fascisme italien, parce que l’Allemagne était à la fois une société plus développée et plus antagoniste. »12
15Pour l’universitaire canadien, c’est avant tout le degré de développement du capitalisme qui détermine le cours de la politique étrangère suivie par un Etat fasciste. Ainsi, les différences d’intensité et d’objectifs dans les politiques étrangères italiennes et allemandes ne sont pas fonction des deux dictateurs, Mussolini et Hitler, mais d’un processus historique suivi par les bourgeoisies nationales.
16En conclusion, les historiens communistes restent fidèles au schéma d’analyse proposé par Dimitrov au VIIe congrès du Comintern en 1935. Cela est particulièrement perceptible dans l’ouvrage de Charles Bettelheim. La personnalité du dictateur fasciste n’a pas fondamentalement d’importance. Il n’est qu’un agent d’un processus historique lié à la crise du capitalisme.
17Pierre Angel et Martin Kitchen tiennent davantage compte des particularités allemandes et de la personnalité de Hitler mais tout en respectant la théorie marxiste de l’histoire. Le matérialisme historique ne leur permet pas d’expliquer la violence et la direction du « programme » hitlérien.
18On remarquera aussi que les chercheurs communistes n’arrivent pas à intégrer le fait que Hitler avait déterminé son « programme » bien avant tout contact avec les milieux financiers et économiques. Aucun document n’est venu attester d’autre part qu’il ait modifié d’une quelconque manière sa conception de la politique étrangère à la suite de ses rencontres avec les représentants de la haute bourgeoisie allemande. On constatera que les historiens communistes n’arrivent le plus souvent pas à analyser le caractère racial de la politique étrangère du « troisième Reich ».13
2. La version marxiste non orthodoxe
Le cadre général
19Si toutes les sociétés fascistes entrent dans le même schéma, on glisse vers le relativisme intégral. Face à ce relativisme de la démarche communiste orthodoxe, des historiens marxistes ont essayé de présenter une analyse moins rigide qui tienne compte des insuffisances du cadre d’analyse traditionnel par rapport à au moins trois questions :
pourquoi le fascisme allemand a-t-il été si extrême ?
pourquoi le fascisme n’a-t-il pas pris dans des Etats où la crise a été très prononcée comme les Etats-Unis ?
pourquoi le fascisme ne s’est-il pas avant tout manifesté dans des pays où la bourgeoisie financière était plus puissante et surtout la plus englobante politiquement et économiquement ?
20C’est à ces problématiques que des chercheurs marxistes non orthodoxes vont essayer de donner des réponses.
21La diffusion de leurs idées va être favorisée en Allemagne fédérale, en Grande-Bretagne en France et aux Etats-Unis par le climat politique de la deuxième moitié des années 60. D’abord le « mouvement soixante-huitard » s’attaque à une écriture de l’histoire traditionnelle libérale. Il redécouvre Gramsci, l’Ecole de Francfort, Ernst Bloch, August Thalheimer etc. En France, il remet en cause le dogmatisme du Parti communiste. Ensuite, la vie politique se décrispe en Allemagne fédérale (atténuation de la guerre froide et participation du SPD aux gouvernements fédéral et régionaux), aux Etats-Unis (administrations démocrates) et en Grande-Bretagne (le parti travailliste exerce souvent le pouvoir). Par conséquent, des historiens marxistes peuvent plus facilement exercer des fonctions universitaires.
Hans-Ulrich Wehler et l’école de Bielefeld
22Hans-Ulrich Wehler et l’école de Bielefeld ont tenté de répondre aux problématiques mentionnées ci-dessus. Ils sont remontés aux sources structuro-sociales du cheminement historique spécifique à l’Allemagne (« Sonderweg »).14 Le point de départ de la théorie de l’historien de Bielefeld est l’affirmation que l’Allemagne aurait été caractérisée par une sorte de défaillance dans son processus de modernisation politique. Principalement, l’histoire allemande se serait distinguée par l’incapacité de la bourgeoisie de tenir les rênes de l’Etat. Le fascisme allemand est qualifié de forme extrême du social-impérialisme. Le national-socialisme serait ainsi un régime qui cherche à canaliser les forces d’émancipation sociale à l’intérieur de l’Etat au moyen d’une expansion au-delà des frontières. La politique étrangère pratiquée sous Hitler aurait servi avant tout à conserver la structure sociale.
23L’approche par la « Struktursozialgeschichte » n’offre pas d’analyses précises sur la politique étrangère du « Troisième Reich ».15 Elle suggère seulement une profonde continuation historique dans les motivations et la fonction de la politique étrangère allemande, mais cette perspective n’aboutit qu’à la seule notion d’impérialisme social : guerre de conquête comme exutoire à des tensions internes.
24La thèse de l’impérialisme social de Hans-Ulrich Wehler n’invalide pas la théorie marxiste ; elle se situe dans le même système de pensée. Elle ne se différencie que par une autre conception du temps. Hans-Ulrich Wehler discerne un temps relativement long, « le Sonderweg », mais toujours à l’intérieur d’un processus historique dont il connaît la direction et les mécanismes. Son concept de « crise » n’est pas conjoncturel. Il s’agit bien d’un retard de la bourgeoisie allemande à exercer sa fonction politique qu’un niveau de développement économique devait impliquer. Plus l’écart se manifeste entre le « ce qui se passe réellement » et le « ce qui aurait dû se passer logiquement », plus la « crise » est violente, entraînant guerre et destruction.
25Pourtant, la théorie de l’impérialisme social se différencie d’une analyse structurale trop rigide. Les balises de l’historiographie marxiste sont bien présentes, mais le cadre est souple. La notion de relativement longue durée qui s’en dégage, ressemble plutôt à une réalité que le temps use et véhicule avec cahotements. Les passages à un temps court (la guerre) sont des changements de rythmes, comme des modifications de l’allure. La souplesse de cette théorie lui donne sa valeur heuristique.16
Reinhard Kühnl
26Reinhard Kühnl a tenté d’appliquer plus systématiquement au « Troisième Reich » les éléments du « Sonderweg » qui ont été dégagés par Hans-Ulrich Wehler. L’historien de Marburg montre que le caractère extrême du national-socialisme a été marqué non seulement par la survivance « anachronique » d’une domination politique autoritaire et militariste, mais a été aussi conditionné par les effets de la crise économique et de l’absence de débouchés coloniaux. Ce serait donc la conjonction du « Sonderweg » allemand et des conditions économiques spécifiques de l’Allemagne des années 30 qui auraient induit le dynamisme belliciste de l’Allemagne nationale-socialiste.17
27Ces conclusions, Reinhard Kühnl les a d’autant plus facilement tirées que de toute façon il considère que par « essence » le fascisme allemand est dévolu à la guerre et qu’une de ses fonctions principales est de mettre en œuvre les guerres impérialistes :
« (...) La principale fonction du fascisme demeura d’écraser le mouvement ouvrier à l’intérieur et de diriger vers l’extérieur la guerre impérialiste. »18
28Finalement, cette synthèse de l’analyse marxiste du fascisme avec la théorie du « Sonderweg » amène assez logiquement le chercheur de Marburg à préciser que les objectifs de l’impérialisme allemand pendant les deux conflits mondiaux étaient semblables :
« Mais c’est aussi montré par une analyse des buts de guerre de l’impérialisme allemand qui ont été largement identiques lors des deux guerres mondiales. »19
29Ainsi la spécificité du « programme » de politique étrangère de Hitler se trouve effacée. Le dictateur allemand est assimilé à tous les chefs qui ont conduit à la guerre afin de conserver l’ordre menacé.
Timothy Mason : « la crise de 1938 - 1939 »
30Timothy Mason a systématiquement étudié les éléments de conjoncture économique qui ont conduit le « Sonderweg » allemand à la guerre. Son explication, il la trouve dans la « crise économique de 1938 - 1939 » qui aurait poussé le Führer à une politique expansionniste afin de chercher à éviter les conflits à l’intérieur de la société allemande.20 En 1981, Timothy Mason réaffirme :
« Je ne vois pour le moment aucun besoin de modifier ma propre vue à savoir que le « timing », les tactiques et la confusion stratégique de la guerre d’expansion de Hitler ont été influencés de manière décisive par le besoin politico-économique de piller, un besoin qui a été intensifié par les guerres nécessaires pour le satisfaire. »21
31C’est donc « la crise économique de 1938 - 1939 » qui a rendu la guerre nécessaire. L’épuisement de toutes les ressources économiques du « Troisième Reich » imposait le déclenchement d’une guerre. Quel qu’ait été le dirigeant nominal de l’Allemagne, cette décision était inévitable. Ainsi, même si Timothy Mason rejette la définition axiomatique de Dimitroff dans laquelle celui-ci affirme que la guerre provoquée par le fascisme allemand apparaît comme la conséquence de « la dictature terroriste ouverte des éléments les plus réactionnaires, les plus chauvins et les plus impérialistes du capitalisme financier »,22 il n’en reste pas moins que les contradictions de classes et que la crise générale du système capitaliste ont sous-tendu les facteurs qui ont poussé le fascisme allemand à la guerre. L’historien britannique conçoit une certaine autonomisation du pouvoir politique par rapport à l’infrastructure ; c’est la théorie du Bonapartisme que certains chercheurs marxistes croient pouvoir tirer de l’ouvrage Le dix-huit Brumaire de Napoléon Bonaparte23 mais en dernier ressort, en ce qui concerne la guerre, c’est la « crise économique » qui a été déterminante.
32Timothy Mason reconnaît que Hitler voulait la guerre, mais il affirme que celle qu’il a faite n’a eu en définitive que peu de rapport avec celle qu’il voulait :
« Ce n’est pas bien entendu pour prétendre que Hitler ait été « forcé d’aller à la guerre » dans le sens qu’il ne la voulait pas, mais plutôt que les guerres que le Troisième Reich a livrées n’avaient que peu de relation avec les guerres qu’il semble avoir voulu faire. »24
33Timothy Mason insiste sur l’irrationalité fondamentale du national-socialisme, il souligne les contradictions qui poussent au génocide des Juifs. D’une manière générale, il tient compte d’une certaine autonomie de la superstructure, du politique et de l’idéologie vis-à-vis des rapports de classe. Mais d’autre part, dès que Timothy Mason se permet quelques entorses avec un marxisme déterministe monocausal, il revient en arrière et réaffirme la primauté de la théorie matérialiste dialectique. Par exemple, l’historien analyse la primauté du politique dans l’Allemagne nationale-socialiste mais une fois qu’il a constaté ce point, il retourne à une démonstration par la crise du capitalisme :
« Cependant la nature radicale de la « primauté du politique » sous le national-socialisme était enracinée dans la désintégration historique spécifique de la société allemande bourgeoise (1929-1933), du capitalisme allemand (1936-1938) et dans la politique internationale des années 1930. »25
34De même, Timothy Mason considère que l’idéologie du national-socialisme est fondamentalement irrationnelle, mais il explique cela par le déclin de la bourgeoisie :
« L’irrationalité fondamentale du système national-socialiste a eu en partie son origine et a trouvé son expression concrète dans l’irrationalité spécifique de cette idéologie. Cette idéologie était le produit d’une classe sociale déclinante et est entrée de façon croissante en conflit avec les réalités sociales créées par la domination nationale-socialiste elle-même (...) »26
35Timothy Mason étudie et analyse avec profondeur le social-darwinisme et son importance dans la politique nationale-socialiste. Néanmoins, quand il vient à en expliquer la nature véritable, il ne la trouve principalement que dans la compétition belliciste entre les Etats capitalistes. Pour l’historien britannique, le social-darwinisme doit être analysé par les instruments du matérialisme historique,27 ce n’est pas qu’un faisceau d’idées qui étaient répandues au tournant du siècle, c’était aussi cela, mais c’est surtout l’émanation de la lutte radicale entre les nations capitalistes.28
36Quant au génocide des Juifs, que Timothy Mason invite à condamner et qu’il qualifie par des termes empruntés à la morale traditionnelle,29 il l’explique par la compétition entre les différents organes de l’Etat national-socialiste et du Parti qui a provoqué une radicalisation anarchique. Mais ce type de conséquences (le génocide) reste toujours la marque du capitalisme :
« Le génocide a été ce qu’il y avait de plus distinctement, la part la plus terrible d’une politique de lutte. Et ceci était la politique de toute une époque capitaliste. »30
37On retrouve la théorie de la crise économique de « 1938 - 1939 » dans une des principales encyclopédies parues ces dix dernières années. Pour Hans-Erich Volkmann, le « Führer » aurait été poussé à la guerre par l’irrationalité de l’économie allemande.31
38Dans les considérations finales de cette encyclopédie, rédigée conjointement par Manfred Messerschmidt, Hans-Erich Volkmann, Wilhelm Deist et Wolfram Wette, tous spécialistes d’histoire militaire au xxe siècle, l’existence d’une crise économique en 1938 - 1939 est réaffirmée et une corrélation entre cette crise et la guerre est suggérée :
« Cette politique belliciste a aussi servi de moyen de secours face à ce que Hitler craignait, aux conséquences socio-politiques dues à la surcharge permanente de l’économie. Les signes d’une agitation socio-politique se sont accumulés durant les années 1938 et 1939 chez les ouvriers et il y a eu une insatisfaction économique générale au sein de la paysannerie (...) même si pour 1939 dans ce domaine on ne peut pas parler d’une accentuation menaçante des relations, on ne peut pas totalement exclure la possibilité d’une motivation de politique intérieure qui aurait conduit à la guerre. »32
39En fait, cette longue phrase révèle quelques hésitations. D’une part, on y décrit un processus de crise économique et d’insatisfaction sociale, mais, d’autre part, on semble hésiter à conclure à un lien avec le déclenchement de la guerre, tout en laissant supposer que ce n’est pas exclu.
40Ce manque de sûreté dans le jugement est également perceptible dans un important essai d’historiographie paru en 1983 en Grande-Bretagne. Pour John Hiden et John Farquharson, il y aurait eu une crise économique vers 1938 - 1939 en Allemagne et on peut tirer une certaine corrélation entre celle-ci et le déclenchement de la guerre :
« Nous avons le sentiment qu’il y a eu une crise en Allemagne vers 1938-1939 (...) Qu’on puisse voir la guerre et le Nouvel Ordre comme le résultat d’une « fuite en avant » pour échapper à la crise de l’administration de l’économie, cela a un sens. »33
Conclusion
41Les thèses avancées par la plupart des historiens marxistes non dogmatiques sont nourries par une volonté de réconcilier l’analyse matérialiste dialectique de l’histoire avec la nécessité de prendre en compte les éléments spécifiques liés aux particularités « sui generis » de l’Allemagne. Le résultat principal de cet essai de synthèse est la découverte d’un retard de la bourgeoisie, qui n’aurait pas joué son rôle historique, et la mise en avant d’une « crise économique » qui aurait entraîné le « Führer » à déclencher la guerre.
42On objectera cependant que Hitler n’a jamais cru aux contraintes économiques. D’autre part, le « timing » du déclenchement de la guerre a surtout été lié à l’évolution des relations diplomatiques. La guerre aurait pu éclater en 1938 à cause de l’annexion du territoire des Sudètes, avant même que « la crise de 1938 - 1939 » ne manifeste ses effets.
43On peut également se demander si dans un régime non parlementaire une éventuelle crise économique accompagnée d’un mécontentement social a une influence sur les dirigeants politiques. Pour un régime autoritaire, il est toujours possible de faire face à une fronde populaire par une accentuation de la répression ou par la mise en place d’une politique d’austérité. De toute façon, Hitler était toujours populaire en 1938 - 1939, principalement parce que la population percevait des succès de politique étrangère et du fait des très bons résultats économiques : résorption quasi totale du chômage et doublement de la production économique. Dès lors, une fuite en avant vers la guerre n’était de loin pas indispensable. Quoi qu’il en soit, même si l’Allemagne avait manqué de devises, les Anglo-saxons les lui auraient fournies.
44De toute façon, le point le plus important est que l’existence d’une crise économique et financière n’a tout simplement jamais été démontrée de manière convaincante ; à moins d’appeler n’importe quelle situation une crise, comme le fait remarquer à juste titre Raymond Aron :
« On trouve toujours ce que l’on cherche : vérifier sa découverte est une autre affaire (...) On discute encore sur la crise de l’économie allemande en 1938 ou 1939 (...) Hitler n’a jamais cru aux contraintes économiques (...) Ces discussions sont nourries par l’obstination des marxistes. Ils veulent à tout prix découvrir, alors même que Hitler s’est assuré le pouvoir total, des causes économiques à l’origine des décisions capitales. Est-il besoin d’ajouter que Marx ne faisait rien de pareil quand il traitait des guerres de son temps ».34
45Finalement on notera encore deux caractéristiques de cette approche marxiste qui posent problème. Premièrement, on ne voit pas comment le « Sonderweg » allemand peut être applicable à l’Italie, qui reste une des puissances responsables historiquement de la seconde guerre mondiale, « le conflit impérialiste des Etats fascistes ». Deuxièmement, ces approches marxistes non dogmatiques restent ambiguës quant à la place de la superstructure. Ces interprétations postulent toutes une certaine autonomie du politique et de l’idéologie par rapport à l’infrastructure. La primauté de la continuelle dialectique dynamique entre les rapports de production et la superstructure est ainsi sans cesse réaffirmée. En fin de compte, le plus difficile est de déterminer si la politique étrangère mise en œuvre par Hitler est le résultat de ses propres conceptions, ou s’il n’a fait qu’agir pour d’autres intérêts ou pour protéger un édifice lézardé.
3. La version non-marxiste de l’interprétation du nazisme comme une forme de fascisme
Le cadre général
46Cette version non-marxiste inclut une grande quantité de travaux. Il est difficile de discerner les points communs tant les domaines de recherche et surtout les conclusions divergent. Ainsi, beaucoup d’ouvrages sont consacrés aux conditions historiques qui ont préparé le terrain du fascisme (modernisation, crise des valeurs, impact de la première guerre mondiale, crise économique...). D’autres études se rapportent aux composantes sociales des mouvements fascistes (classes moyennes, anciens soldats déclassés, marginaux...). Un des thèmes favoris de comparaison concerne les techniques d’organisation des partis fascistes (militarisation, terreur, propagande, meetings...). Plus récemment, l’attention des chercheurs s’est particulièrement tournée vers les structures de l’Etat construit par les régimes fascistes (primauté du politique, économie semi-dirigée, autoritarisme, tendances polycratiques...).
47Les controverses les plus aiguës ont certainement porté sur les buts et l’idéologie du fascisme ; d’une part parce qu’il n’est pas facile de différencier ces deux notions et de déterminer ce qui appartient spécifiquement à l’un ou à l’autre domaine. D’autre part, parce que le fascisme apparaît caractérisé par des ambivalences déconcertantes : modernisme et antimodernisme, capitalisme et anticapitalisme, socialisme et antisocialisme, etc. Finalement, il est difficile de discerner s’il y a un consensus parmi les historiens sur ce qui constituerait les buts principaux du fascisme (anticommunisme, conservatisme, racisme, révolution, nihilisme, profit capitaliste...) et sa dynamique profonde (volonté du dictateur, modernisation, polycratisme, absence d’intégration de la société...).
48« Devant ce foisonnement d’écoles et d’interprétations, leurs recoupements, répétitions et contradictions »35, Marlis Steinert propose « une grille ou un schéma analytique évolutif d’un « syndrome fasciste », « un type-idéal » dans le sens wébérien qui serait un outil heuristique et didactique.36
49Notre contribution à ces débats difficiles, se limitera à constater que le problème de la politique étrangère n’a quasiment pas fait l’objet d’études de la part des historiens se réclamant du cadre d’analyse libérale du fascisme. Un des seuls auteurs qui se soit astreint à traiter ce sujet, parmi la masse d’ouvrages que nous avons étudiés, est Ernst Nolte.
Ernst Nolte
50Cet historien allemand interprète le fascisme comme une révolte contre la transcendance. Le fascisme n’accepterait ni l’idée d’un salut théologique dans un monde futur ni la croyance matérialiste d’une délivrance sur terre. Il mettrait en cause aussi bien le marxisme que la société bourgeoise, cherchant à s’imposer comme une troisième voie de l’histoire de l’Europe de l’entre-deux-guerres.
51Ernst Nolte n’est pas a priori un penseur déterministe. Il s’efforce constamment de rechercher l’interdépendance entre les motivations idéologiques de Hitler et les éléments propres au mouvement fasciste européen. Le but de la politique étrangère de Hitler, Ernst Nolte n’éprouve aucune difficulté à le définir : la conquête d’un « Lebensraum » en Russie judéo-bolchevique. Formulée ainsi, l’interprétation de l’historien berlinois ne serait pas très éloignée de celle des « programmologues ». Car, pour Ernst Nolte, selon la nature des mouvements fascistes, c’est l’idéologie de leurs chefs qui s’impose comme l’élément moteur.
52Pourtant, une lecture attentive donne l’impression que Ernst Nolte explique le déclenchement de la guerre comme étant indépendant de la personnalité et du « programme » de Hitler. Plus étonnant, Ernst Nolte assure que la guerre avait été rendue inévitable du fait de la prise de pouvoir par les mouvements fascistes. Le dictateur allemand aurait en fait retardé le conflit :
« La question bien posée n’est pas : « à la suite de quels événements la guerre finit-elle par éclater ? » mais : « sur la base de quel état de choses ou sur la base de quelles qualités personnelles Hitler a-t-il pu différer l’éclatement réel de la guerre ? ». Cette guerre n’était-elle pas déjà déclarée implicitement par l’existence de son mouvement ? (...) »37
53Pour l’historien berlinois, la prise du pouvoir par le fascisme allemand signifiait déjà une déclaration de guerre contre le monde entier :
« La révolution nationale-socialiste ne pouvait atteindre son sens objectif à travers rien d’autre qu’une déclaration de guerre contre Versailles et en même temps contre le système libéral, oui contre le monde entier ».38
54En effet, pour Ernst Nolte, l’essence du fascisme est une idéologie dynamique qui cherche à imposer à l’humanité une troisième voie, non pas entre le libéralisme et le communisme, mais bien à leur place. La déclaration de guerre aux puissances occidentales était donc dans la nature du fascisme international. Pourtant Ernst Nolte n’a jamais manqué de rappeler que Hitler admirait les Anglais (leur « Arroganz » et leur « Impertinenz »)39 qu’il voulait garantir l’empire britannique (« das englische Weltreich zu garantieren »)40 et associer cette puissance à sa lutte contre le bolchévisme international.41 Est-ce là une déclaration de guerre ? L’attaque contre l’Union soviétique constitue une réponse au communisme, car pour Ernst Nolte, « il n’y a pas de fascisme sans la provocation du bolchévisme ».42 Pourtant, l’Opération Barbarossa est-elle la conséquence de l’idéologie fasciste internationale ? L’essence du fascisme européen se serait réalisée par cette entreprise militaire :
« L’attaque contre l’Union soviétique fut une entreprise commune des mouvements ou régimes fascistes ou profascistes de toute l’Europe. Par cette attaque, les fascistes atteignirent le plus haut degré de leur déploiement de force et de leur « idéalisme ». »43
55Il semble donc que Hitler ait planifié l’attaque contre la patrie du communisme non pas pour réaliser son « programme », mais bien comme un représentant appliqué, trop appliqué peut-être, de l’idéologie fasciste européenne. Cela amène l’historien berlinois à ne plus concevoir la recherche d’un « Lebensraum » comme étant l’apothéose des intentions sociales-dar-winistes racistes de Hitler.44 Au contraire, l’extension vers un espace vital à l’Est semble principalement correspondre à la lutte contre la patrie du communisme international. Cela conduit parfois Ernst Nolte à quelques imprécisions. Par exemple, il écrit à propos de toutes les « droites nationalistes » (« nationalistische Rechte ») :
« Hitler ne voulait rien d’autre qu’elles : l’élimination du « marxisme » et la restauration de la grandeur passée. »45
56Toutes les « droites nationalistes » s’étaient-elles fixé ce même objectif par rapport au marxisme et surtout, que signifie restaurer la grandeur passée de toutes les « droites nationalistes » ? Ernst Nolte précise que Hitler exigeait ce que demandaient les droites européennes mais d’une autre manière : « Il ne voulait pas interdire le marxisme, mais l’anéantir ».46 Mais cette « nuance » n’est-elle qu’une différence de degré, non de nature ? L’Allemagne fédérale, la Suisse et les Etats-Unis ont parfois interdit le communisme ; peut-on mettre cette décision politique sur le même plan que l’assassinat systématique des cadres communistes en Union soviétique ?
57Toujours dans ce même paragraphe, Ernst Nolte affirme que Hitler souhaitait rétablir l’empire mondial du Moyen-Age en détournant sa direction d’expansion du Sud vers l’Est :
« Hitler ne voulait rien d’autre qu’elles (les droites nationales R.S.) (...) il ne voulait pas restaurer le Reich bismarckien, mais le Reich mondial du Moyen-Age en renversant la direction d’expansion du Sud vers l’Est. »47
58Cette phrase donne l’impression que les « droites nationales » avaient pour dessein de restaurer un empire mondial. Faudrait-il le comprendre ainsi ? Le problème est surtout de savoir si Hitler désirait rétablir l’empire mondial du Moyen-Age. Faudrait-il comprendre cette expression comme étant l’exposition d’un mythe ? Mais, dans ce cas, en quoi les « droites nationales » sont-elles concernées par cette réminiscence typiquement allemande ?
Conclusion
59Ernst Nolte a tendance à déformer sa connaissance des intentions de la politique étrangère de Hitler afin d’essayer de faire correspondre la politique suivie par le « Troisième Reich » aux traits fondamentaux (« Grundtypen ») du fascisme européen. Le résultat est ambigu si ce n’est parfois contradictoire. L’historien berlinois a au moins le mérite d’avoir abordé ces questions, mais il n’a pas eu de disciples en Allemagne fédérale.
60Le plus étonnant est que la quasi-totalité des très nombreuses études non marxistes consacrées au fascisme européen sont étrangement silencieuses sur l’importance de la politique étrangère par rapport à l’essence du mouvement fasciste.
61L’anglais Francis Carsten est encore un des seuls historiens de ce cadre d’analyse du fascisme qui ait abordé la politique étrangère. Son observation des programmes idéologiques de la plupart des mouvements fascistes l’amène à conclure qu’ils exigeaient l’agrandissement de leur Etat. En fonction de quels critères ? Pour Francis Carsten, la réponse est claire, en raison d’une volonté « völkisch » de faire correspondre les nouvelles frontières à la nation véritable. Pour les Italiens, cela implique le rattachement de Trieste et du Tyrol ; pour la Hongrie, cela signifie l’extension du territoire en direction de l’ancien royaume. Quant à l’Allemagne, sa conception de la politique étrangère est confondue avec la notion de « Grossdeutschland » : une Allemagne qui intégrerait tous les individus de langue allemande (Autriche, Dantzig, territoire des Sudètes, Suisse, etc.).48
62Cependant, répétons-le, à part les travaux d’Ernst Nolte, nous n’avons quasiment pas trouvé d’études, dans l’interprétation libérale de la théorie du fascisme, qui se soient efforcées de tenir compte de la politique étrangère de ces mouvements.49 Cela est d’autant plus surprenant que l’intérêt toujours actuel pour la notion de fascisme est lié en partie à l’assimilation de la deuxième guerre mondiale au bellicisme de cette idéologie.
Notes de bas de page
1 Pierre Ayçoberry. La question nazie. Op. cit., p. 75-83.
2 En Allemagne de l’Est, cette définition constitue toujours le dogme officiel : « C’est pourquoi la détermination du caractère de classe impérialiste du fascisme par l’Internationale communiste (...) et avant tout l’analyse totale de son essence par le VIIe congrès ne présente pas seulement un beau travail historique de l’Internationale communiste, mais aussi la clé d’une étude contemporaine du fascisme. » Elfriede Lewerenz « Wesensbestimmung des Faschismus durch die K.I. » in Dietrich Eichholtz, Kurt Gossweiler (éd.). Faschismus Forschung. Ost Berlin, 1980. p. 47. En Union soviétique, on continue à analyser la deuxième guerre mondiale comme étant une manifestation de l’impérialisme au sens où Lénine avait défini ce terme : « La première phase de la crise générale du capitalisme a trouvé sa fin dans l’éclatement de la deuxième guerre mondiale. Cette guerre avait été engendrée - comme la première - par le système capitaliste et était le résultat des contradictions économiques et politiques inhérentes aux fondements du capitalisme monopolistique. Elle a commencé comme une guerre impérialiste. » A.D. Nikonow. « Die politische Vorkriegskrise 1939 » in Gottfried Niedhart (éd.). Kriegsbeginn 1939. Op. cit., p. 519.
3 Wolfgang Wippermann. « « Triumph des Willens » oder Kapitalistische Manipulation »? in Karl-Dietrich Bracher. Manfred Funke, Hans-Adolf Jacobsen (éd.). Nationalsozialistische Diktatur. Op. cit., p. 746.
4 Gilbert Badia. Histoire de l’Allemagne contemporaine. Paris, 1962, vol. i, p. 7.
5 Ibid., p. 7.
6 Pierre Angel. Hitler et les Allemands. Paris, 1982, p. 12.
7 Charles Bettelheim. L’économie allemande sous le nazisme. Un aspect de la décadence du capitalisme. Paris. 1971 ; 189 p.
8 Ibid, p. 117.
9 Ibid., p. 161. Charles Bettelheim n’a pas modifié cette phrase dans l’édition de 1971. Gilbert Badia affirme encore en 1962 que l’impérialisme allemand est toujours prêt à se lancer dans une aventure planétaire, mais que la réalisation de ces objectifs dépendra de la collaboration des Américains : « s’il est vrai qu’il représente un danger réel pour ces puissances, s’il risque même de jouer le rôle de détonateur ou de provocateur dans un conflit, l’impérialisme allemand ne peut songer à se lancer dans une aventure planétaire sans l’appui d’un autre impérialisme, celui des Etats-Unis », (p. 366). « Pour l’instant cependant, reste vraie l’idée que « l’existence d’une Allemagne démocratique conjure le danger d’une guerre en Europe », (p. 367). Gilbert Badia. Op. cit., vol. ii, pp. 366-367.
10 Pierre Angel. « Les responsabilités hitlériennes dans le déclenchement de la deuxième guerre mondiale » in Revue d’histoire de la deuxième guerre mondiale, n° 60, oct. 1965. p. 1.
11 Martin Kitchen. Fascism, London. 1976. p. 87. Exceptionnellement, nous mentionnons un historien qui n’appartient pas à notre corpus, mais qui nous a semblé représentatif d’une manière très répandue d’aborder le national-socialisme au sein de la gauche occidentale.
12 Ibid., p. 87.
13 Gilbert Badia explique l’extermination par une contradiction au régime et par la nécessité de se débarrasser d’adversaires politiques. « L’extermination dans les camps d’une main-d’œuvre potentielle s’explique aussi par une contradiction inhérente au système. Ces milliers de prisonniers constituaient certes, une main-d’œuvre possible, mais ils étaient aussi des adversaires politiques souvent irréductibles que le régime, à ce titre s’efforçait d’anéantir ». « Le Troisième Reich » in Encyclopaedia Universalis, vol. 16. Paris. 1978. p. 330. A d’autres occasions. Gilbert Badia tient compte du caractère raciste de l’Allemagne nationale-socialiste mais sans l’expliquer par rapport à la théorie marxiste.
14 Pierre Ayçoberry montre que celle théorie du « Sonderweg » est déjà en germe dans beaucoup d’écrits marxistes non dogmatiques des années 30. On consultera son étude des ouvrages de Helmut Plessner, Die verspàtete Nation et de Ernst Bloch « Ungleichzeitigkeit und Pflicht zu ihrer Dialektik » in Erbschafl dieser Zeit. Pierre Ayçoberry. La question nazie. Op. cit., pp. 88-97 et 118-120. Egalement très intéressant. Wolfgang Wippermann. Faschismustheorien. Zum Stand der gegenwärtigen Diskussion. Darmstadt, 1980 : pp. 11-55.
15 Hans-Ulrich Wehler fait quelques allusions à Hitler dans Bismarck und der Imperialismus. Köln, 1969, p. 501.
16 La théorie du « Sonderweg » ressemble en bien des points à la théorie de la modernisation. Chaque nation devrait passer par une espèce de couloir idéal où à l’innovation technique et industrielle, devrait correspondre un lent cheminement de libéralisation politique et de démocratisation. On retrouve la même croyance à un déterminisme progressiste de l’histoire.
17 Reinhardt Kühnl. Formen bürgerlicher Herrschaft. Liberalisants. Faschismus. Hamburg. 1976. pp. 87 et suivantes.
18 Reinhardt Kühnl. « Probleme einer Theorie über den internationalen Faschismus » in Politische Vierteljahres Schrift. 2. 1975. p. 110.
19 Ibid., p. 110.
20 Timothy Mason. Sozialpolitik im Dritten Reich. Opladen, 1977, pp. 286 et suivantes.
21 Timothy Mason. « Intention and Explanation » Op cit., p. 39.
22 Timothy Mason. « The Primacy of Politics- Politics and Economics in National-Socialist Germany » in Henry Turner (éd.). Nazism and the Third Reich. New York. 1972. p. 175.
23 Voir l’analyse de Jost Dülffer. « Bonapartism. Fascism and National Socialism » in Journal of Contemporary History, 11. 1976, pp. 109-128.
24 Timothy Mason. « Intention and Explanation ». Op. cit., p. 39.
25 Timothy Mason. « The Primacy of Politics ». Op. cit., p. 196.
26 Ibid., p. 196.
27 Timothy Mason. « Intention and Explanation ». Op. cit., p. 40.
28 Ibid., p. 40.
29 Supra, note 86. p. 103. Timothy Mason se donne le droit de condamner moralement, mais dénie à d’autres historiens ce type d’écriture de l’histoire.
30 Timothy Mason. « Intention and Explanation ». Op. cit., p. 40.
31 Hans-Erich Volkmann. « Die NS-Wirtschaft in Vorbereitungdes Krieges » in Wilhelm Deist. Manfred Messerschmidt, Hans-Erich Volkmann et Wolfram Wette (éd.). Das deutsche Reich und der Zweite Weltkrieg. Stuttgart. 1979, vol. i, p. 368. Egalement. Hans-Erich Volkmann. « Politik. Wirtschaft und Aufrùstung unter dem Nationalsozialismus » In Manfred Funke (éd.). Hitler. Deutschland und die Mächte. Op. cit., p. 290.
32 Ibid., Das deutsche Reich und der Zweite Weltkrieg, p. 712.
33 John Hiden. John Farquharson. Explaining Hitler’s Germany. Historians and the Third Reich. London, 1983. p. 149.
34 Raymond Aron. « Existe-l-il un mystème nazi ? ». Op. cit., p. 345.
35 Marlis Steinert. « Fascisme et national-socialisme : cas singuliers, cas spécifiques, phénomène générique ? » in L’historien et les relations internationales. Op. cit., p. 173.
36 Ibid., p. 173.
37 Ernst Nolte. Die Krise des liberalen Systems und die faschistischen Bewegungen. München. 1968. p. 139.
38 Ibid., p. 138.
39 Ernst Nolte, Der Faschismus in seiner Epoche. München. 1963, p. 501.
40 ibid.
41 ibid.
42 Ernst Nolte. Die Krise des Liberalen Systems. Op. cit., p. 15.
43 Ernst Nolte. Ibid., p. 212. Autre ambiguïté, Ernst Nolte affirme quand même que Hitler a planifié et décidé seul d’attaquer la Russie Soviétique : « L’attaque contre l’Union soviétique ne fut donc pas conçue comme une entreprise commune conseillée ou même planifiée par Adolf Hitler avec les chefs des autres mouvements fascistes, mais c’est lui seul qui a pris les décisions définitives (...) », ibid., p. 212.
44 Ernst Nolte. Der Faschismus in seiner Epoche. Op. cit., pp. 433-436.
45 Ernst Nolte. Die Krise des liberalen Systems. Op. cit., p. 315.
46 Ibid.
47 Ibid.
48 Francis Carsten. Der Aufstieg des Faschismus in Europa, Frankfurt, 1968, pp. 36, 235 et 236.
49 Nous faisons allusion entre autres à ces ouvrages et articles : Gilbert Allardyce. « What Fascism is not: Thoughts on the Deflation of a Concept » in American Historical Review. Avril 1979, pp. 367-398. Helga Grebing. Aktuelle Theorien über Faschismus und Konservatismus. Eine Kritik. Stuttgart. 1973; 117 p. James Ciregor. The Ideology of Fascism. New York. 1969, 493 p. Walter Laqueur (éd.) Fascism, a Reader s Guide. Op. cil. Stein Larsen, Bernt Hagtvet, Jan Peter Myklebust (éd.). Who were the Fascists? Bergen 1980; 816 p. Pierre Milza, Marianne Benteli. Le fascisme au xxe siècle. Paris, 1973 ; 413 p. Pierre Milza. Les Fascismes. Paris. 1983 ; 297 p. Pierre Milza. « Fascisme et relations internationales » in Relations internationales. 21, printemps 1980 ; pp. 23-42. Dans cet article, Pierre Milza aborde la problématique de la spécificité de la politique étrangère fasciste. Il se prononce contre l’idée que l’alliance des fascismes était dans la nature des choses, qu’elle était inéluctable (p. 40). Il penche plutôt du côté de l’opinion de Klaus Hildebrand qu’il n’y a pas eu spécifiquement de politique étrangère d’essence fasciste (p. 42). Stanley Payne. Fascism. Comparison and Definition. Madison, 1980; viii-234 p. Joseph Stuart Woolf. European Fascism. London; 1968. 387 p. Wolfgang Wippermann. Europäischer Faschismus im Vergleich, 1922 - 1982. Frankfurt, 1983; 240 p.

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