Steppes d’Arabies
| , ,Synthèses et perspectives pour la recherche
Développement et environnement
Texte intégral
1Dans cet ouvrage, la plupart des auteurs traitent de la steppe qui se trouve en bordure interne du Croissant Fertile, en contact avec le désert d’Arabie. D’autres, cependant, étudient des secteurs situés au cœur de la Péninsule Arabique, où les conditions de milieu sont sensiblement différentes et pour lesquels le terme de steppe ne convient guère.
2Par sa latitude et son régime des températures, la Péninsule Arabique est, en effet, un domaine tropical, même si les hivers, en altitude surtout, peuvent être froids. La Péninsule est avant tout un désert, avec des précipitations très faibles, généralement inférieures à 100 mm, sauf dans certaines régions montagneuses : bordure occidentale, élevée, du Asir et du Yémen, où les précipitations dépassent 200 mm, voire 500 mm, d’une part ; montagnes de Oman d’autre part (Fig. 1). Les précipitations se produisent en hiver, liées à la circulation atmosphérique tempérée, mais dans les montagnes de la moitié sud elles tombent aussi en été (juin-juillet), en raison de la remontée vers le nord du front de convergence intertropical ; il s’agit alors de pluies de mousson. L’aridité est sensiblement plus forte que sur la marge interne du Croissant Fertile, car les températures estivales sont très élevées et les précipitations sont concentrées sur un très petit nombre de jours, avec une grande irrégularité interannuelle. Par voie de conséquence, la végétation est fort différente : on est en effet dans le domaine saharo-soudanien, favorable à l’arbre et non aux graminées, et le paysage n’est pas celui d’une steppe mais celui d’une formation arborée très ouverte où dominent acacias et épineux, localisés surtout dans les fonds d’oueds. Cette zone de “marge désertique” interne à la Péninsule Arabique forme une bande assez étroite, étirée entre le bourrelet montagneux (Hijâz, Asir, Yémen, Hadra-maout et Oman) et les vastes dépressions dunaires centrales du Nafud et du Rub al-Khali, et se présente sous l’aspect de piémonts sablo-caillouteux parcourus par un dense réseau d’oueds dont les épandages spasmodiques se perdent rapidement dans les sables (Fig. 2). Ces piémonts internes servent de terrain de parcours aux nomades mais, sauf exceptions, les cultures se concentrent dans les oasis et sont toujours irriguées.
3Située sur la marge septentrionale du désert arabique, la bordure interne du Croissant Fertile est un milieu très différent. Elle dessine un grand arc semi-aride et aride qui s’étend à travers les territoires de la Jordanie, de la Syrie et de l’Iraq. Intermédiaire entre le désert, voué au nomadisme pastoral, et les régions consacrées, depuis la révolution néolithique, à l’exploitation agricole sédentaire, cette région est assez difficile à définir et à délimiter. Elle se présente sous forme de vastes étendues de plaines et de plateaux accidentés de massifs calcaires (montagnes de la Palmyrène, Djebels Bichri, Abd el-Aziz et Sinjar) ou volcaniques (montagne druze), parcourus par un réseau d’oueds et s’abaissant doucement vers le sud en Iraq et en Syrie septentrionale, plus rapidement vers l’est en Syrie du sud et en Jordanie ; ces wudyan parcourent des vallées larges mais fortement incisées.
4La végétation climacique (adaptée au climat et aux sols) est la steppe herbacée, riche en graminées, passant progressivement dans les zones mieux arrosées à une steppe arborée à chênes et pistachiers. Mais l’exploitation très précoce de la steppe par l’homme a entraîné depuis longtemps la dégradation de la végétation et la destruction presque totale des arbres.
5Après avoir connu un climat rude, à la fois sec et froid, lors de la dernière poussée glaciaire de l’hémisphère nord, la région a retrouvé peu à peu depuis environ 12’000 ans, des conditions climatiques comparables à celles que nous connaissons aujourd’hui. Dans un contexte chaud, le Croissant Fertile est le lieu où s’accomplit alors la révolution néolithique, qui voit l’homme se sédentariser puis domestiquer progressivement les plantes et les animaux et se consacrer aux cultures sèches (blé, orge, légumineuses) et à l’élevage des ovins et des caprins. A partir du 4e millénaire avant notre ère, cette même région donne naissance à la révolution urbaine, jouant ainsi un rôle considérable dans l’histoire de l’humanité.
6Dans cette zone de transition, l’occupation et l’exploitation ont beaucoup évolué au cours des millénaires, en fonction des fluctuations climatiques et des vicissitudes politiques et économiques.
Les incertitudes climatiques
7La marge septentrionale steppique du désert arabique connaît un climat de régime méditerranéen à double saison, soumis à une influence continentale croissante lorsqu’on s’éloigne de la mer pour s’enfoncer vers l’est ou vers le sud. La saison des pluies s’étend sur une période de sept mois, d’octobre à avril, avec un maximum en décembre-janvier-février, tandis que la sécheresse estivale est très accentuée et d’autant plus longue que l’on va vers le sud. Le régime des pluies se caractérise par une forte variabilité aussi bien de la quantité annuelle des précipitations que de leur distribution au cours de l’année. Il est assez difficile de donner une définition simple de cette zone de transition située entre des régions à vocation agricole et le désert. Les données climatiques dont nous disposons sont, en effet, très insuffisantes, faute de durée assez longue d’observation ou de densité suffisante de stations pluviométriques mais faute, aussi, d’une bonne exploitation des données disponibles (Fig. 3).
8La zone considérée est difficile à délimiter avec précision, compte tenu des grandes irrégularités aussi bien temporelles que spatiales. Elle ne peut être appréhendée que par comparaison d’une série de données soulignant notamment l’irrégularité interannuelle et donc l’incertitude pluviométrique. Schématiquement, la zone est comprise entre les courbes de 25 et de 40 jours de pluie par an et entre les deux isohyètes de 100 mm et de 250 mm de précipitations annuelles moyennes, c’est-à-dire que l’on se trouve en deçà des cultures pluviales céréalières normales, dans une zone où les récoltes, en cas de semailles, sont extrêmement aléatoires. En fait, dans le domaine ainsi défini, la pluviométrie varie fortement d’une année à l’autre, allant de quantités très faibles, caractéristiques du désert (moins de 100 mm) à des chiffres relativement élevés (de l’ordre de 300 mm et parfois plus) rendant alors rentables les cultures pluviales céréalières, d’où les espoirs et les déceptions qu’elle peut faire naître tour à tour au fil des années. On pourrait dire aussi que la limite nord de la steppe correspond approximativement à l’isohyète de 150 mm en année sèche et à l’isohyète de 350 mm en année humide (voir Fig. 4a et 4b).
9On estime ainsi, en Syrie, que, sur une période de dix ans, la fréquence des années pendant lesquelles les pluies sont insuffisantes pour permettre une récolte va de trois ans dans la zone des 300 mm de pluviométrie moyenne à neuf ans dans les zones où les précipitations moyennes annuelles sont inférieures à 150 mm. Cette incertitude pluviométrique peut être cernée par le calcul de la variabilité interannuelle moyenne, c’est-à-dire par l’écart moyen à la normale : cette variabilité est de l’ordre de 45 à 50 % dans la zone considérée et elle est d’autant plus forte que les précipitations moyennes sont plus faibles.
10Pour une bonne connaissance de la steppe, il faut non seulement prendre en compte le nombre de jours de pluie et l’irrégularité interannuelle ou intermensuelle (les mois les plus irréguliers sont ceux du début et de la fin de la saison humide, or ce sont les plus importants pour le cycle végétatif, levée des céréales ou épiaison), mais aussi la répartition saisonnière (le pic pluviométrique, qui est en janvier-février à l’ouest, se décale vers mars-avril dans l’est de la steppe syrienne et en Iraq), l’évapo-transpiration (liée notamment au vent et aux températures qui augmentent très vite vers le sud, en Jordanie, et accentuent donc le déficit). Il faut également noter le rôle du relief : l’altitude augmente les précipitations et les massifs montagneux alimentent les nappes de sous-écoulement des oueds, mais les reliefs sont aussi un obstacle aux vents humides et leur piémont oriental est souvent fort sec.
11Encore faudrait-il insister sur les grandes différences régionales. Beaucoup d’averses sont liées à des orages dont la distribution est très aléatoire, si bien que les totaux peuvent être très différents d’une station à l’autre : l’année 1975, par exemple, a été un peu mieux arrosée que la moyenne à Hama et plus nettement à Palmyre, alors qu’elle a été très déficitaire à Soueida ; l’année 1987 a été égale à la moyenne à Hama, sensiblement supérieure à la moyenne à Soueida, mais très déficitaire à Palmyre ; enfin, si l’hiver 1991-92 a été très humide dans l’ouest de la Syrie, il a été anormalement sec dans la steppe.
12La marge aride est donc un domaine placé sous le signe de l’incertitude pluviométrique, avec toutes les conséquences que cela peut entraîner sur la végétation et l’environnement. Ainsi définie, cette zone en forme de croissant est localement très étroite : à la latitude de Damas, par exemple, où le double obstacle montagneux du Liban et de l’Anti-Liban attire le désert jusqu’au pied de la chaîne du Qalamoun, ou encore dans le sud de la Jordanie. Elle peut être ailleurs relativement large : jusqu’à près de 200 km de part et d’autre de l’Euphrate syrien à la longitude de Raqqa ou encore à la latitude du Djebel Druze où la transition vers le désert est plus lente et plus progressive et où, d’une année à l’autre, on assiste à de grands déplacements des isohyètes.
13Si la pluviométrie est le principal facteur qui détermine les potentialités agronomiques et le haut niveau de risque climatique caractérisant la région, elle n’en est pas le seul. Les potentialités agronomiques sont aussi étroitement liées aux températures et à la qualité des sols. En hiver, l’évapo-transpiration est faible car les températures sont relativement basses et, au-dessus de 200 mm de précipitations par an, les besoins en eau sont généralement satisfaits. Dès le printemps en revanche, les températures s’élèvent rapidement et il y a très vite déficit hydrique. Comme les températures elles-mêmes connaissent de fortes variations interannuelles, la durée du cycle de développement de l’orge peut varier de trois à quatre semaines en fonction des températures de saison froide. Les risques de stress hydrique sont d’autant plus importants que la température s’élève plus rapidement au printemps. Pour achever leur cycle de développement, les plantes sont alors étroitement dépendantes de l’eau accumulée pendant l’hiver.
14L’eau effectivement disponible en fin de cycle dépend à la fois de la pluviométrie et de la capacité des sols à stocker ces excédents. Les conditions pédologiques sont dans leur ensemble peu favorables. Les sols sont généralement peu profonds et se prêtent donc mal à la pratique du dry farming, fondée sur l’accumulation d’eau d’une saison à l’autre. Lorsque la profondeur est inférieure à 60 cm, seule une partie des précipitations en excès peut être utilisée par les plantes pour achever leur cycle de développement. Par ailleurs, les sols, généralement calcaires ou gypseux, sont pauvres en éléments nutritifs, en particulier en phosphore, en azote et en matière organique. De plus, du fait de leur faible stabilité structurale, ils sont fragiles et, dans les zones les moins arrosées, facilement dégradés.
Les risques de désertification
15Plusieurs auteurs soulignent la dégradation alarmante de l’environnement et des ressources aussi bien dans les zones cultivées que dans les aires de pâturage. Ces observations ne laissent guère de place au doute quant à la réalité et à la gravité du problème. Dans certains cas, on est à la limite de l’irréversibilité du phénomène et le terme de désertification s’impose alors. Les spécialistes analysent parfaitement les mécanismes qui ont conduit à la situation actuelle.
16Dans le milieu très fragile qu’est la steppe, l’élevage transhumant traditionnel respectait assez bien le potentiel végétal, avec un double passage annuel du bétail au printemps et à l’automne : les troupeaux quittaient la steppe aux saisons de latence de la végétation, l’été pour aller pâturer les chaumes des régions cultivées, l’hiver pour s’enfoncer dans le désert. En revanche, depuis la fin du xixe siècle et avec un rythme qui s’est progressivement accéléré, la pression sur la steppe s’est alourdie pour devenir insupportable. Les raisons en sont nombreuses et diverses :
- La motorisation a joué un rôle déterminant en réduisant les distances et en permettant de transporter rapidement et n’importe où eau, aliments et bétail ; elle a donné les moyens d’une rapide extension du domaine cultivé et permis aux troupeaux d’utiliser des zones auparavant difficilement exploitables et d’y demeurer même en période de grande sécheresse.
- L’accroissement de la population, l’explosion urbaine et l’élévation générale du niveau de vie ont entraîné une demande croissante de viande et notamment de viande ovine.
- Les politiques agricoles ont, directement ou indirectement, favorisé l’intensification incontrôlée de l’exploitation des ressources. Les crises politiques et économiques, qui ont marqué l’histoire récente de la région, ont souvent eu une incidence sur les régions sèches qui ont servi de zones d’expansion. En Jordanie, la vague d’émigration déclenchée par l’occupation de la Cisjordanie a été immédiatement suivie par une avancée des cultures dans les régions sèches. En Syrie, entre 1988 et 1992, l’extension considérable de la production d’orge au détriment des steppes est étroitement liée à la crise économique qui affecte le pays depuis 1985. Au fil des exemples présentés, on constate que les régions sèches jouent souvent, en période de crise, un rôle de tampon ou de volant de sécurité, malheureusement au détriment des perspectives à plus long terme. Toujours en Syrie, les cultures d’orge se sont répandues dans la steppe, réduisant progressivement les terrains de parcours. L’orge se trouve maintenant en dessous de l’isohyète de 100 mm, dans la zone dite 5 (et même au-delà) ; celle-ci dépasse très largement la limite théorique des cultures pluviales et représente 15 % des surfaces cultivées en orge. Ainsi, la steppe tient aujourd’hui une place considérable dans la production d’orge et dans l’élevage ovin, alors même que les troupeaux ne tirent de ses pâturages qu’une faible part de leur alimentation, dont l’essentiel provient des concentrés et de la paille.
- Cette évolution a été accélérée par une véritable fuite en avant des autorités qui se sont efforcées de sédentariser les nomades et qui ont décidé de mesures telles que la suppression de la propriété tribale ou de la jachère et autorisé la pratique des cultures dans des zones de plus en plus sèches.
17Les conséquences d’une telle évolution sur l’environnement sont particulièrement graves : troupeaux trop nombreux séjournant trop longtemps au même endroit, sans respecter les phases de repos de la végétation ; piétinement du bétail entraînant l’apparition de véritables auréoles désertiques autour des zones de stationnement ; passages répétés de véhicules ; effets des labours, pratiqués souvent perpendiculairement à la pente, détruisant la végétation spontanée et laissant un sol nu, offert à l’érosion hydrique et éolienne.
18Les nombreux travaux de prospection réalisés par les archéologues et les géographes nous révèlent que, au cours des siècles et des millénaires, des phases d’avancées et de reculs de la colonisation agricole ont alterné dans cette région. Lors des périodes d’occupation dense et intensive, non seulement les villages se multipliaient et voyaient leur population augmenter, mais cette dernière s’aventurait aussi plus ou moins loin au sein de la marge aride qui était alors occupée et colonisée. On connaît également des phases de recul et de déclin pendant lesquelles les zones des sédentaires étaient alors plus ou moins abandonnées aux nomades et à leurs troupeaux. Des phases d’occupation dense apparaissent ainsi aux époques de Halaf et d’Obeid (6e et 5e millénaires), puis au Chalcolithique et au Bronze (4e et 3e millénaires), et enfin aux alentours du début de notre ère, avec un maximum à l’époque romaine. D’autres périodes manifestent par contre un net déclin, par exemple au Bronze récent (milieu du 2e millénaire avant notre ère) ou à partir du xviie siècle, sans que l’on sache très bien dans quelle mesure ces changements doivent être attribués aux modifications du milieu naturel ou au contraire aux données historiques, politiques et économiques.
19L’histoire tend, certes, à relativiser les problèmes que nous observons aujourd’hui : ceux-ci s’inscrivent en effet dans un cycle qui a débuté avec le développement de l’agriculture dans la région. Pourtant, jamais depuis le début de l’exploitation agro-pastorale la pression n’a été aussi forte et le déséquilibre aussi important. Si dans le passé la faible densité de peuplement permettait d’abandonner temporairement les régions dégradées, tel n’est plus le cas aujourd’hui, car le taux de croissance démographique des pays du Proche-Orient est l’un des plus élevés du monde et la pression sur la terre est considérable.
20Les signes de la dégradation des ressources sont de plus en plus nets, bien que les conséquences économiques et sociales soient sans commune mesure avec celles affectant d’autres régions du monde, particulièrement le Sahel où ces phénomènes ont été bien étudiés. Si au Proche-Orient les sécheresses entraînent périodiquement une baisse brutale de la production, elles n’ont cependant pas les conséquences dramatiques que nous leur connaissons au Sahel par exemple. Ici, l’aridification est moins poussée, les cycles de sécheresse sont beaucoup plus courts et, surtout, les répercussions économiques et sociales sont atténuées parce que les Etats sont plus riches, leur économie étant plus diversifiée et les populations affectées disposant de ressources plus variées.
21La désertification ne peut pourtant pas être niée : le couvert végétal s’est considérablement réduit, les espèces intéressantes disparaissent au profit de celles que dédaigne le bétail, tandis que la fertilité des sols a baissé fortement par suite de la suppression de la jachère ; la diminution de la teneur en éléments nutritifs, en acide phosphorique et en azote tend à accroître la durée du cycle végétatif et donc à multiplier les risques d’échaudage.
22Des exemples spectaculaires d’érosion ont été signalés : creusement de ravines, masses de terre emportées par le ruissellement, érosion éolienne surtout, avec formation de dunes mobiles coupant parfois routes et voies ferrées. On ne dispose malheureusement que de peu de données chiffrées ou cartographiées : on estime cependant que l’érosion éolienne pourrait représenter de 10 à 50 tonnes par hectare et par an. Le sable migre par saltation sur des distances courtes pour être rapidement arrêté par des obstacles (relief surtout). La poussière soulevée par le vent, transportée en suspension à des altitudes parfois élevées et exportée loin de la région, représente des volumes considérables de matières fines enlevés définitivement aux sols de la région. Le ruissellement est le risque majeur dans les zones les plus arrosées et les plus accidentées, tandis que la déflation l’emporte dans les zones plus sèches aux sols plus sableux et moins structurés.
23L’érosion ne peut que s’accélérer, au fur et à mesure que la couverture végétale va se dégrader et s’espacer. Il faut penser à moyen et long terme. Dans l’histoire ancienne de la région, les périodes de forte occupation ont toujours été suivies d’importantes phases d’érosion ; ensuite, la régénération a été fort longue et semble être restée souvent incomplète. Ces exemples peuvent nous servir de leçon, à condition toutefois de ne pas oublier que jamais le déséquilibre imposé au milieu par l’homme n’a été aussi important qu’aujourd’hui.
Vers un développement rationnel
24Grâce aux deux centres de recherche internationaux (ACSAD et ICARDA) qui ont leur base dans la région, des moyens importants sont consacrés à la recherche et à l’adaptation d’améliorations techniques. Les différents programmes donnent des résultats expérimentaux prometteurs. Toutefois, force est de constater que ces résultats ne font pas l’objet de programmes de diffusion. La mise en œuvre des solutions proposées se heurte à de nombreux obstacles politiques, économiques et sociaux. Les politiques agricoles ne tiennent apparemment pas compte des résultats et propositions de la recherche, ce qui amène à s’interroger sur les relations qui existent ou devraient exister entre la recherche et les décideurs politiques.
25Les propositions de la recherche ne sont d’ailleurs pas sans soulever plusieurs questions. D’une part, certaines des améliorations proposées risquent d’être détournées de leur objet et de contribuer finalement au maintien de systèmes destructeurs : c’est le cas, par exemple, de l’application d’engrais. Ces derniers sont proposés pour les zones semi-arides dans un ensemble de mesures comprenant en particulier l’introduction de légumineuses fourragères. Utilisés seuls, les engrais permettent, en palliant les carences chimiques des sols, de maintenir plus longtemps la culture dans les zones sensibles et peuvent contribuer ainsi à la poursuite du processus de dégradation physique des sols. D’autre part, la prise en compte des problèmes de dégradation est relativement récente et les recherches agronomiques se sont principalement, sinon exclusivement, concentrées sur la mise au point de solutions techniques. Les phénomènes de fond tels que les processus de dégradations physiques et chimiques des sols cultivés sont encore mal connus. Dès lors, il est difficile d’apprécier si les améliorations proposées permettent effectivement de stabiliser la production dans le long terme.
26Une collaboration est indispensable entre décideurs politiques, praticiens et chercheurs, tant des sciences de la vie et de la nature que des sciences humaines et sociales, pour la mise au point d’une série de cartes thématiques et synthétiques. Ce travail pourrait être effectué sur des zones tests choisies à la fois en Syrie et en Jordanie, dans des secteurs où travaillent géographes et anthropologues et que connaissent archéologues et historiens, de manière à ce qu’un dialogue et une collaboration effective soient mis en œuvre, première étape indispensable pour l’élaboration et la réalisation des plans de développement intégré que beaucoup ont appelé de leurs vœux.
Table des illustrations
![]() | |
---|---|
Légende | Fig. 1 : Les précipitations dans la Péninsule Arabique |
URL | http://books.openedition.org/iheid/docannexe/image/3080/img-1.jpg |
Fichier | image/jpeg, 390k |
![]() | |
Légende | Fig. 2 : Le relief et les régions naturelles de la Péninsule Arabique |
URL | http://books.openedition.org/iheid/docannexe/image/3080/img-2.jpg |
Fichier | image/jpeg, 160k |
![]() | |
Légende | Fig. 3 : Les précipitations moyennes annuelles en Syrie et Jordanie |
URL | http://books.openedition.org/iheid/docannexe/image/3080/img-3.jpg |
Fichier | image/jpeg, 215k |
![]() | |
Légende | Fig. 4a : Les précipitations en années sèches en Syrie et Jordanie |
URL | http://books.openedition.org/iheid/docannexe/image/3080/img-4.jpg |
Fichier | image/jpeg, 167k |
![]() | |
Légende | Fig. 4b : Les précipitations en années humides en Syrie et Jordanie |
URL | http://books.openedition.org/iheid/docannexe/image/3080/img-5.jpg |
Fichier | image/jpeg, 218k |
Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.