Introduction. Histoire et conjoncture
p. 9-43
Texte intégral
I. — QU’EST-CE QUE LA CONJONCTURE ?
1Après une série d’études appelées, non sans prétention, structures1, où l’on s’est efforcé de soumettre à l’analyse chacun des éléments connus de l’espace atlantique espagnol et hispano-américain, il restait à tenter, pour être fidèle à notre promesse, un travail de synthèse : nous proposons de lui donner nom « conjoncture ».
2Mais qu’est-ce que la conjoncture ? Ou, du moins, puisque les économistes du xxe siècle savent, d’ordinaire, ce qu’ils placent sous cette étiquette, que peut-on entendre par conjoncture, dans l’Atlantique espagnol et hispano-américain de 1504 à 1650 ? Il importe qu’au seuil de ce second livre, nous nous expliquions une fois encore, sur ce point, pour nous, capital, puisque ce que nous entendons par conjoncture — au stade actuel de nos recherches — risque de surprendre l’économiste, mais aussi l’historien2
3Après les structures — entendez un effort pour dégager, dans la masse des phénomènes, le permanent, ou ce qu’il a été possible de placer sous le signe d’une certaine durée — la conjoncture serait-elle le domaine de l’accidentel ? De ce qui, finalement, résiste à la durée, pour se confondre avec l’instant ? Serait-elle, par rapport aux structures, une sorte d’événementiel économique, mais pas seulement économique, d’événementiel humain ? Dans une certaine mesure, peut-être... Bien peu, pourtant.
4Il s’agit, en fait, de substituer à un découpage logique, donc artificiel, à un découpage géographique plus concret, et pointant, encore arbitraire, le découpage réel du temps que l’étude dynamique de la réalité impose. Il s’agit, surtout, de mettre en parallèle, au sein du cadre chronologique, les différentes séries de phénomènes que la réalité ne sépare pas et que, seules, séparent les exigences de l’exposé, de faire surgir entre les séries traduites en chiffres les relations que les précédentes méthodes d’exposition ne pouvaient révéler.
5La conjoncture, telle que nous proposons de l’entendre, serait, donc, une méthode qui permettrait de révéler le plus de corrélations possibles entre les séries apparemment les plus éloignées. Mais cette méthode n’entend pas saisir seulement ce qui se prête au chiffre, à la série, elle vise à y incorporer le maximum d’humain que les documents expriment. Elle s’efforce, en tissant le plus de fils possibles, sur la trame des fluctuations du trafic, de donner un relief et un sens à ce qui risquait, hors de son contexte, de n’être plus qu’accidentel. La conjoncture est, ici, en l’occurrence, une méthode par laquelle on tend à tout intégrer de la réalité humaine connue dans l’unité de temps, à tout mener de front et à reconstituer, ainsi, le climat économique le plus largement entendu de l’Atlantique espagnol, résolu non plus spatialement, mais temporellement. Loin d’être le domaine de l’événementiel et par conséquent de l’accidentel, par opposition au continu et au logique du structurel, la conjoncture tenterait, au contraire, si la chose est possible, de reculer le domaine de l’accidentel et d’introduire des liens logiques dans des secteurs abandonnés, jusqu’alors, à l’aberrant.
6Telle est, si l’on veut, la conjoncture. Au demeurant, une étrange aventure, puisqu’il s’agit d’essayer, pour les temps modernes, de 1504 à 1650, une méthode qui, jusqu’ici, n’avait pas été mise à l’épreuve pour une période aussi ancienne, et pour un espace aussi vaste. Nous disposions, pour la tenter, du grand mouvement transversal de l’Atlantique, que nous connaissons par une série d’approximations : mesures du volume, serrées plus étroitement à la fin du siècle qu’au commencement ; mouvement en valeur, qui malheureusement ne constitue pas une série aussi longue, aussi continue et aussi sûre ; mouvement d’un certain nombre de marchandises. On s’en est expliqué longuement ailleurs.
7Ces données, malgré leurs lacunes, sont beaucoup plus riches et significatives que celles réunies, jusqu’ici, pour aucun trafic de la première moitié des temps modernes. Elles peuvent constituer le meilleur substitut de la connaissance de la production, impossible pour les xvie et xviie siècles : elles viendront, ainsi, dans l’analyse qu’on veut tenter, prendre la place occupée, de nos jours, dans les analyses de conjoncture, par le ou par les indices de production. Il faut, certes, beaucoup de bonne volonté pour accepter ce postulat. Mais on voudra bien admettre que, seule, une production négociée est valable, dans une étude de conjoncture. Or, la connaissance d’un grand trafic maritime — nous avons déjà tenté de soutenir ce point de vue3 — serre, au maximum, la partie négociée de la production. La connaissance du mouvement — mieux, des mouvements — de l’Atlantique espagnol et hispano-américain est donc l’élément essentiel de notre construction en conjoncture, ample et riche à souhait, puisqu’on n’en possède pas seulement le global, mais une ample moisson des moindres composantes, directions, provenances, et qu’il comprend de nombreuses séries : séries volumétriques, séries en valeur, connaissance approximative des marchandises qui le constituent4
8Mais une seule série ou un ensemble de séries, exprimant finalement un même ordre de phénomènes, ne peuvent suffire à la constitution d’une conjoncture. Il faut autre chose. Ce sont les prix qui, de nos jours, dans une économie libre ou incomplètement planifiée, surtout, — mais il n’en existe pas qui le soit totalement — constituent l’élément de vérification indispensable : indices des prix de gros, indices des prix de détail, dans l’espace économique envisagé, prix des différents éléments constitutifs de la production. Or, avouons-le, la connaissance insuffisante des prix est le grand point faible de notre étude. Nous en sommes, au vrai, médiocrement responsables : historiens d’un trafic, nous pouvions difficilement nous faire les historiens des prix et nous avons dû recourir à la bibliographie existante.
9Il nous aurait fallu, pour parvenir parfaitement à nos fins, rencontrer plusieurs études des prix non seulement en Espagne mais aussi aux Indes de Castille, dans les centres les plus actifs, comme Nombre de Dios-Puerto-Belo, Panama en Terre Ferme, avec l’arrière-plan du Pérou, la Vera-Cruz et l’espace économique mexicain, en Nouvelle-Espagne. Mais une étude des prix des différents marchés clefs de l’Hispano-Amérique, de 1504 à 1650, n’est encore qu’un rêve. Pas un mythe, certes. Les documents qui permettront, un jour, de la concrétiser existent, sans doute. Les bases d’une enquête sont déjà jetées pour un point au moins, pour la Vera Cruz et le Mexique5 (mais il faut encore attendre, pour qu’on puisse espérer en tirer raisonnablement profit.
10Nous ne disposions, donc, pour l’heure, que de l’étude des prix espagnols réalisée de main de maître, il y a plus de vingt ans déjà, par Earl J. Hamilton6. Mais le travail de Hamilton, aussi admirable soit-il, — on ne le dira jamais assez — ne saurait satisfaire pleinement aux exigences de l’économique contemporaine. Ni l’effort, ni l’intelligence du très grand historien ne sont en cause, mais, ce qui est infiniment plus grave, parce que irrémissible, les sources. On cherchera, vainement, la distinction prix de gros, prix de détail ; on trouvera presque exclusivement des prix de détail. Les différentes catégories de marchandises n’y sont pas dégagées toujours aussi nettement qu’on aimerait. Dans les quatre séries : Andalousie, Nouvelle-Castille, Vieille-Castille, Valence, la première, celle qui présente pour nous le plus d’intérêt, est de beaucoup la plus faible : 15 séries de nombres indiciels, seulement, de 1501 à 1550, il de 1551 à 1600, 49 de 1601 à 1650. Aucune indication, enfin, sur le loyer de l’argent. Mais ce sont griefs, encore une fois, qui ne vont pas à l’auteur, sinon aux limites du temps ; il n’était guère en son pouvoir qu’il en fût autrement et sans son travail toute tentative de reconstitution empirique d’une conjoncture descriptive pour l’espace envisagé eût été impossible7. Si l’on en venait, un jour, à posséder pour la Terre Ferme, le Pérou, la Nouvelle-Espagne, des études comparables à la Price Revolution in Spain, on pourrait légitimement considérer le problème de la conjoncture de l’Atlantique espagnol et hispano-américain comme susceptible d’une solution presque parfaite.
11Nous disposions d’un mouvement et d’une étude de prix : il fallait encore une source d’atmosphère. Les nécessités de la reconstitution du mouvement nous ont donné de la rencontrer dans les différentes séries que l’on peut grouper sous le générique de Correspondance de la Casa de la Contratación.
12Cette source8 ne peut être considérée, on l’a vu, comme une source uniquement officielle. Elle n’en a, par conséquent, ni la rigidité, ni les limites. La Casa, d’une part, incorpore au texte de ses lettres, avec un soin presque naïf, tous les mémoires qui lui sont adressés, qu’elle les approuve ou non. Elle a sauvé, par ce biais, une partie d’une correspondance, sinon d’affaires, au sens où nous l’entendons, maintenant, du moins, de gens d’affaires. Sans doute, ces fragments sont-ils moins spontanés, moins libres, que ceux livrés ailleurs9. On peut leur faire confiance, pourtant, dans la mesure, précisément, où, d’autre part, les officiers de la Contratación sont trop intimement liés aux milieux d’affaires de Séville, pour ne pas représenter beaucoup plus qu’un point de vue officiel (mais qu’est-ce qu’un point de vue officiel ?), le point de vue des marchands. N’avons-nous pas dit et redit, trop dit peut-être, au risque d’ébranler la confiance, que la Casa de la Contratación était devenue, très tôt, une sorte de second Consulado, un autre conseil des marchands de Séville10 ? Il est difficile, dans ces conditions, de lui contester toute valeur comme expression des milieux d’affaires sévillans. Ce qui rendra son témoignage suspect à certains, en tant que source quantitative sérielle — on n’est pas en droit pourtant, on a vu pourquoi, de le mettre en doute —, renforcera la valeur de son témoignage, comme source d’atmosphère. Les séries de la correspondance de la Casa de la Contratación, outre leur valeur pour l’histoire quantitative, sont une source d’état d’esprit d’entreprise et de psychologie collective, comme il en existe peu, même pour le xixe siècle. Nous avons, donc, pour illustrer le chiffre, le témoignage des hommes d’affaires engagés dans le commerce de la Carrera. Cette donnée est indispensable, à double titre, pour une étude de la conjoncture : non seulement ces témoignages contrôlent, utilement, les séries chiffrées, les renforcent et les affinent, mais ils personnalisent, humanisent ce que les chiffres, à eux seuls, peuvent avoir, parfois, d’artificiel, d’abstrait, d’insignifiant par multivalence. Les économistes actuels de la conjoncture, les historiens du Business Cycle de la seconde moitié du xixe siècle procèdent-ils, ont-ils procédé autrement ?
13Munis de ces trois données, nous étions prêt à risquer l’aventure, à tenter, pour la première moitié des temps modernes, une de ces études de conjoncture globale, comme on n’en avait jamais risqué encore, en deçà de 1850. C’était de l’outrecuidance, avec des données aussi minces, aussi mouvantes. Et pourtant, s’en était-il trouvé, jamais, réunies de pareilles, pour un tel espace ? Pour une telle période ? Concours de circonstances, certes, dont on ne cherchait pas à tirer orgueil, mais réconfort. Il n’en fallait pas moins beaucoup d’outrecuidance, pour entreprendre avec si peu, sans attendre la réalisation possible et souhaitable d’études statistiques parallèles, sur l’histoire des prix, aux Indes de Castille, par exemple, sans attendre le mûrissement des grandes enquêtes, à l’heure actuelle, en cours en plusieurs points du front mouvant de l’histoire quantitative, au Centre de Recherches historiques, même.
14Mais cet excès de hâte aura été efficace, nous l’espérons, du moins. Ce sera notre seule excuse : dans un domaine où les méthodes ne sont pas encore fixées — elles ne peuvent l’être, a priori, sinon par une réflexion après coup sur les premières réalisations concrètes — : fallait-il attendre de trop avoir, pour intégrer ? Il est apparu plus rentable de le faire, d’abord, pour un nombre volontairement réduit de données sérielles, afin de faciliter la tâche, plus noble, de ceux qui, après nous, écriront cette Conjoncture véritable de la première modernité, par rapport à laquelle notre essai de conjoncture empirique et descriptive ne peut se définir qu’en tant que matière première. Elle se veut, seulement, comme telle.
15Cette hâte, cette hardiesse, préférable aux inhibitions tranquilles, portait en elle, au moins, une chance : que cette tentative, rapidement démolie, permette d’autres études, d’autres recherches et finalement, d’autres synthèses, mieux étayées, plus rationnelles, plus larges, plus compréhensives, donc plus valables. C’est notre espoir et notre vœu. Puisque ceux « qui ne veulent rien faire de rien... ».
II. — ESSAI DE CHRONOLOGIE RATIONNELLE11
16On a désormais la prétention de rendre au temporel sa primauté sur toute autre forme de classification, le problème est de taille, mais la méthode s’impose d’autant plus que notre Atlantique a moins de passé. Il n’existe pas avant le xvie siècle, puisqu’il ne saurait y avoir d’Atlantique, sans un Outre-Atlantique, et que cet Atlantique est, finalement, tout entier contenu dans son propre devenir.
17Si la cause est plaidée, quelle chronologie suivre ? Celle, naturellement, que dicte la dynamique économique. On se reporte, donc, aux tables et aux graphiques. S’il existe une conjoncture, on doit pouvoir la lire, avant même tout artifice et tout calcul.
Le choix d’un guide : les mouvements globaux en volume
18Le plus sage, pour se laisser conduire dans cette masse assez considérable de séries et de représentations graphiques est encore de choisir une série ou un ensemble de séries et de se laisser porter par elles. Ici, pas d’hésitation : la série des mouvements globaux en volume s’impose12.
19Le mouvement en volume est, avec le prix, une des rares connaissances chiffrées des économies anciennes, que l’historien puisse, raisonnablement, saisir. Il repose sur la donnée la plus solide, la plus objective, la moins dangereuse, parce que la plus éloignée de toute préoccupation fiscale. De plus, il n’existe pas d’autre série — à l’exception des prix d’Hamilton, et encore, puisque les prix andalous, sont pour le xvie siècle, en grande partie, hypothétiquement reconstitués — qui soit aussi parfaitement continue que les mouvements globaux en volume : de 1504 à 1560 pour les Allers, de 1506 à 1650 pour les Retours et Allers et retours ; seule, cette série permet de couvrir le grand désert documentaire de la première moitié du xvie siècle.
20Les mouvements en volume Allers, Retours, Allers et retours, se présentent — autre mérite — sous une double série : celle des mouvements en volume en unités pondérées13 et celle des mouvements en volume en unités non pondérées14 L’allure générale des courbes n’est pas sensiblement différente, qu’on adopte la pondération ou qu’on s’en tienne à la non-pondération. Tout au plus, les courbes en unités pondérées sont-elles davantage accentuées. La pondération rapproche, certainement, de la réalité, mais la non-pondération permet de pallier l’aléa toujours possible, bien que peu vraisemblable, des coefficients adoptés. La lecture de la double série offre, ainsi, le maximum de garanties, si on se borne — nous avons toujours suivi strictement cette règle — à des divisions chronologiques valables à la fois pour les séries pondérées et pour les séries non pondérées.
21Les 6 courbes représentatives des mouvements globaux annuels en volume, Allers, Retours, Allers et retours, en unités pondérées et en unités non pondérées15 présentent, toutes, dans leurs grandes lignes, une même physionomie qui se retrouve, d’ailleurs, au delà, dans les mouvements particuliers les plus importants et même dans les mouvements en valeur, à quelques ajustements près. Il s’agit bien d’une physionomie propre à la dynamique de l’économie de l’Atlantique espagnol et hispano-américain. Le mouvement en volume impose donc, sans peine, son rythme à tout l’espace atlantique : autre raison qui invite à se laisser guider par lui. Et la réussite de l’entreprise, entendez d’une dynamique de l’Atlantique, partant du mouvement global en volume et s’imposant, finalement, à tous les autres phénomènes connus et mesurés de l’espace atlantique, ne sera-t-elle pas, si elle couronne l’effort, la meilleure justification, la validation du choix nécessairement hasardeux qu’il y a toujours, à l’origine de toute entreprise analogue ?
Le renversement de la tendance majeure
22Les représentations graphiques des mouvements globaux donnent les grandes lignes de la chronologie. Deux périodes se dégagent avec une absolue netteté : une longue phase ascendante des trafics, de 1504 à la fin de la première décade du xviie siècle, puis une longue phase descendante, au-delà du rebroussement de 1608-1610.
231608 représente l’année record dans la série des mouvements globaux en volume en unités non pondérées et en unités pondérées pour les Allers (45 008 toneladas et 50 093,6 tonneaux de 2,8 m3) et pour les Allers et retours (60 007 toneladas et 72 800,5 tonneaux de 2,8 m3)., Le rebroussement de pente des courbes annuelles des Retours en unités non pondérées et en unités pondérées se place, deux ans plus tard, en 1610, année record, avec 27 300 toneladas et 32 773,2 tonneaux de 2,8 m316.
24Les dates de 1608-1610 peuvent être raisonnablement retenues comme dates charnières. Il ne s’agit pas d’un simple accident cyclique, l’étude des tables et graphiques le prouve, des plus simples, construits sur une échelle arithmétique, aux plus élaborés, soumis déjà à un rudiment d’analyse mathématique.
25Les tables semi-décadairés17 (et leurs représentations graphiques en tuyaux d’orgue sont, évidemment, les plus simples, certains diront les plus simplistes, mais aussi les moins suspectes, parce que les moins élaborées. Le procédé est enfantin, la coupure aux années, dont la millésime se termine par un 6 ou un l, purement arbitraire et pourtant, dans le mesure, précisément, où le choix de la coupure n’a pas été déterminé par une présupposition quelconque de fluctuation, le procédé n’en sera que plus rassurant, si, par hasard, on parvient, quand même, par lui, à une contre-épreuve. Or, tables semi-décadaires du trafic global et graphiques en tuyaux d’orgue correspondants, en unités non pondérées ou en unités pondérées, justifient le choix des dates 1608-161018.
26La demi-décade 1606-1610 atteint, en effet, en unités non pondérées, les chiffres records suivants : pour le volume global du mouvement Allers, 127 200 toneladas, pour le volume global du mouvement Retours, 100 767 toneladas et pour le volume global du mouvement Allers et retours, 227 967 toneladas ; la demi-décade conserve cette position, si l’on passe de la tonelada variable au tonneau constant de 2,8 m3, puisque nous proposons pour les Allers, Retours, Allers et retours, les chiffres suivants : 152 640,120 920,4 et 273 160,4.
27La méthode des moyennes mobiles conduit à des conclusions analogues, à quelques nuances près19. Les moyennes mobiles de 11 ans et surtout, celles de 5 ans et de 13 ans, donnent les meilleurs résultats. Les moyennes de 5 ans permettent d’éliminer les vibrations les plus courtes ; les moyennes de 11 ans, mieux, celles de 13 ans, surtout, quand elles sont appliquées aux séries établies en unités pondérées homogènes de 2,8 m3, dégagent assez bien la tendance majeure des fluctuations les plus courtes et celle de la fluctuation cyclique, en gros, décennale que nous croyons pouvoir affirmer. Or, sur les différents graphiques tirés des moyennes mobiles, il est possible d’observer, en général, entre 1600 et 162020 (une certaine hésitation du trend. Le rebroussement s’y marque, pourtant, d’ordinaire, au début de la quatrième demi-décade du xviie siècle, entre 1615 et 1618, donc, 7 à 8 ans plus tard que sur une courbe annuelle, ce qui ne doit pas surprendre, puisque les trois demi-décades, 1606-1610, 1611-1615, 1616-1620 renferment la masse la plus considérable des années fortes, d’autant plus que l’on tiendra compte de la correction des tonnages exigée par le passage de la série brute aux séries pondérées.
28Le renversement de la tendance majeure se placerait dans les premières années de la demi-décade 1616-162021 (d’après les résultats de la moyenne mobile de 13 ans appliqués aux unités pondérées (la moyenne mobile qui permet le meilleur rabotage), plus exactement, en 1614 pour les Allers (29 141,7 tonneaux de 2,8 m3) et les Allers et retours (53 265,46 tonneaux de 2,8 m3) et en 1618 seulement, pour les Retours (24 655,684 tonneaux de 2,8 m3). Rien d’étonnant, les années fortes en Allers se répercutent toujours sur les Retours avec un certain retard.
29On est donc en droit d’hésiter entre la date de 1608, donnée par la majorité des séries semi-décadaires et celle de 1614, donnée par la majorité des séries de moyennes mobiles, voire 1620, position d’une moyenne arrière. Mais peu importe, là n’est pas le problème : en fait, comme on le verra plus tard22 (les trafics globaux s’établissent, pendant 20 ans, sur un palier, avant de s’engager sur une pente descendante. On retiendra seulement, pour notre présent propos, l’étonnante concordance des résultats obtenus par les méthodes les plus diverses. Ils affirment, incontestablement, l’existence, dans l’Atlantique espagnol et hispano-américain, de deux trends opposés, un trend ascendant, du début du xvie siècle à 1610 et un trend descendant, à la pente presque symétrique, au delà de 1610.
30Pour le trend ascendant, on passe, sur la courbe représentative du mouvement global en volume Allers et retours en unités pondérées, de 15 680 tonneaux de 2,8 m3 dans la demi-décade 1506-1510 aux 273.560, 4 tonneaux de la demi-décade 1606-1610, soit, pratiquement, du simple au vingtuple. Les résultats sont analogues sur la courbe des Retours (6 027 et 120 920 tonneaux) et sur celle des Allers et retours (9 653 et 9 562 d’une part, 162 640 d’autre part). Quant au trend dégagé par les moyennes mobiles, il donne, sur la courbe Allers et retours des moyennes de 13 ans en unités pondérées, le passage de 3 981,92 en 1512, à 53 265,46, au rebroussement de 1614. Parfaite concordance des résultats, comme ces chiffres permettent de le constater. Pour le trend descendant, dont la pente est presque symétrique, on passe de 53 265,46 en 1614 (mouvement annuel en volume en unités pondérées, moyennes mobiles de 13 ans, Allers et retours) à 23 248,23 en 1644, ou bien dans le mouvement total Allers et retours, de 273 560 pour la demi-décade 1606-1610 à 121 308 tonneaux pour 1646-1650. Là aussi, une simple observation attentive des représentations graphiques sur échelle arithmétique permet de conclure à l’étonnante symétrie des trends à la hausse et à la baisse23.
31N’est-ce point là le passage d’une phase A à une phase B, s’il est possible d’étendre au trafic une terminologie, que le regretté François Simiand avait créée, jadis, pour les prix ? Or, cette remarque valable pour les mouvements en volume dans l’Atlantique espagnol est nettement confirmée par les prix en Espagne et, avec des modalités spécifiques, pour l’ensemble de l’Europe24.
32On ne dispose, pour l’instant, à l’intérieur de l’espace étudié, que des prix espagnols calculés par Earl J. Hamilton et c’est regrettable, mais ces prix sont, fort heureusement, moteurs. On recourt, alternativement, aux prix en monnaie courante et aux prix argent25. Or si les prix réels sont les plus intéressants pour l’étude des fluctuations de courte durée26, il est indispensable de recourir aux prix-métal, pour une étude valable des fluctuations longues, surtout, quand les phénomènes de la phase longue risquent d’être masqués, comme c’est le cas, ici, par des phénomènes importants d’inflation. Ce recours est, en outre, indispensable pour rendre possibles des comparaisons entre les différents espaces monétaires.
33La représentation graphique des composite index numbers of silverprices27 permet bien de lire deux trends : un trend ascendant de 1501 à 1601 et un trend descendant au-delà de 1601, ou plus exactement, un palier descendant, entre 1601 et 1610, puis un rebroussement vrai, au-delà de 161028.
34Parallélisme, ainsi, entre les pentes respectives des mouvements en volume dans l’Atlantique et des prix indices espagnols de Hamilton, parallélisme, mais sur des échelles différentes. L’indice d’activité du mouvement épouse, en l’exagérant, la fluctuation des prix. La courbe séculaire des prix est aplatie par rapport à celle des volumes. Elle a, dans l’ensemble, de 1506 à 1610, d’une part, de 1610 à 1650, d’autre part, la même orientation, mais avec une pente trois ou quatre fois moindre. Pour la période ascendante : multiplication des prix par cinq environ ; par 15 ou par 20, pour les trafics. Pour la phase descendante, par contre, réduction des trafics du plus du double au simple, tandis que les prix métal fléchissent de 20 à 30 %. Il existe donc entre les deux phénomènes, en dépit de cette inévitable disparité, une co-variation véritablement troublante. Le rebroussement des prix précède, tout au plus, de quelques années, le rebroussement des trafics : ce qui laisse supposer, a priori, une certaine antériorité du phénomène prix sur le phénomène trafic, à l’échelle, du moins, du mouvement séculaire.
35On pourra pousser l’analyse plus avant29. Il suffisait, pour le moment, de justifier la prise de position chronologique qui commande cette étude construite sur le renversement de la tendance majeure, à la charnière de la première et de la deuxième décade du xviie siècle. Ce phénomène dépasse, sensiblement, l’espace de l’Atlantique espagnol et hispano-américain. Il n’est que l’expression espagnole et hispano-américaine du passage de la phase A du xvie siècle à la phase B du xviie, bien connues, l’une et l’autre, de l’historiographie économique. On aura noté, d’entrée de jeu, l’antériorité du phénomène espagnol et hispano-américain sur le phénomène européen considéré dans son ensemble : 1627 marque le renversement de la tendance des prix allemands, 1637, celui des prix hollandais, d’après Posthumus 30. En France, le Beauvaisis de Goubert le montre ; le décalage s’accentue, au Sud, précoce, au Nord, plus tardif. S’il est vrai — on pouvait l’imaginer, a priori, et il sera peut-être possible de le démontrer définitivement un jour —, que la conjoncture de l’Atlantique hispano-américain commande l’ensemble de la conjoncture européenne, nulle surprise.
36Séries et représentations graphiques les plus générales ont permis de déceler, d’emblée, la grande articulation de la conjoncture Atlantique. Elle est conforme à celle de la conjoncture mondiale qu’elle anticipe de dix à quinze ans. L’observation des mêmes séries et de leurs représentations graphiques permettra, naturellement, de pousser plus avant le découpage chronologique de la conjoncture.
La grande récession interdécennale du xvie siècle
37La phase ascendante — son articulation principale apparaîtra tout de suite évidente — est construite sur un schéma tripartite. L’ascension des trafics, en effet, est coupée en deux, entre 1550 et 1559, voire 1562, par une anomalie d’une certaine ampleur que nous proposons d’appeler la grande récession interdécennale du xvie siècle ; elle correspond, très approximativement, à la décennie des années 1550-1560. L’ascension des trafics, au cours du xvie siècle, n’est donc pas continue, elle se fait suivant un rythme ternaire : une phase longue d’ascension jusqu’en 1550, une seconde phase longue d’ascension, exactement symétrique au-delà de 1560, coupée d’une phase courte, à contre-pente, la grande récession. Séries et graphiques annuels et semi-décadaires, en unités pondérées ou en unités non pondérées, donnent l’ampleur exacte de cette grande récession.
38Dans la série du mouvement global semi-décadaire Allers en unités non pondérées, par exemple31, les deux demi-décades 1551-1555 et 1556-1560, avec 59 690 et 46 870 toneladas, sont nettement plongeantes. Il faut attendre la demi-décade 1566-1570, avec 80 029 toneladas, pour retrouver un chiffre supérieur à la demi-décade 1546-1550 (73 895 toneladas) et pour avoir un chiffre aussi bas que la demi-décade 1556-1560 (46 67 toneladas), il faut aller, vingt ans plus tôt, en 1536-1540 (46 180 toneladas).
39Dans la même série, la constatation reste vraie pour les Retours. Le phénomène de récession, moins creusé pourtant, semble plus étalé après la demi-décade 1546-1550 et ses 53 385 toneladas, un creux de 15 ans : 1551-1556, 47 826 ; 1556-1560, 43 440 ; 1561-1565, 48 460 ; le creux est moins profond, puisque le fond de la vague 1556-1560, 43 440, reste supérieur à la demi-décade 1541-1545, avec ses 37 840, mais la remontée est plus lente. La différence de comportement des courbes d’Allers et de Retours s’appréciera mieux encore sur les tendances majeures dégagées par le procédé des moyennes mobiles (la moyenne mobile de treize ans, surtout, ici, la plus apte à l’élimination d’une fluctuation cyclique très creusée de 10 à 11 ans).
40Les Allers et retours réalisent, évidemment, une synthèse entre les comportements précédents, en empruntant davantage à l’allure des Allers, élément guide du mouvement global auquel il donne la tonique, ne serait-ce que par la masse. Après le record de la demi-décade 1546-1550 et ses 127 200 toneladas, prodigieusement redressées sur les 87 578 toneladas de la demi-décade 1541-1545, la vague se creuse pour quinze ans, très profonde, comme celle des Allers, avec les 90 31 toneladas de la demi-décade 1556-1560, de 4 % supérieure, seulement, à la demi-décade 1541-1545, de moins de 20 % supérieure à la demi-décade 1536-1540, très étalée, comme les Retours, avec une belle contrepente marquée à mi-chemin des chiffres de 1546-1550 et de 1556-1560, avec les 107 316 toneladas de la demi-décade 1561-1565, avec les 116 065 toneladas de la demi-décade 1561-1565, en dessous encore de la demi-décade record 1546-1550. Quant à la demi-décade 1566-1570, avec 139 900 toneladas, elle n’est encore que de 10 % supérieure aux 127 280 toneladas de la pointe semi-décadaire de 1546-1550.
41Tout ceci reste vrai, dans la série du mouvement global semi-décadaire en unités pondérées32, à peine oblitéré par la légère augmentation de l’unité de tonnage que nous supposons à partir de 1566-1570.
42Mais le procédé des moyennes mobiles de 13,11 et 5 ans (de 13 ans surtout), en unités pondérées et en unités non pondérées, met en relief, d’une façon beaucoup plus spectaculaire, le phénomène du contre-courant, puisque la contre-pente s’y marque, d’ordinaire, sur un laps de temps de 10 à 15 ans.
43La plus belle représentation du phénomène se lit sur la courbe de la moyenne mobile des Allers et retours en unités pondérées de 13 ans33 ; le rebroussement y est sensible dès 1546, effectif en 1547, creusé jusqu’en 1548, et les cotes de 1547 ne se retrouvent pas avant 1561-1562-1563.
44La moyenne mobile de 13 ans donnait, en effet, pour les Allers et retours en unités pondérées, à la place du chiffre de 1546, la moyenne de 16 645,38, à la place de 1547, la moyenne record de 16 682,61. Or, à partir de cette date, le trend ne réussit plus à dépasser les 16 000 (1551 : 16 938,69 et il descend jusqu’à 14 669,92 en 1558). Il faut attendre 1553, avec 17 847,05, pour que le trend dégagé par la moyenne mobile dépasse, pour la première fois, l’échelle des 16 000 atteints dès 1546 et frôlés presque, déjà, en 1545. Quant au point bas de 1558, il nous ramenait à une position intermédiaire entre le niveau de 1543 et celui de 1545. Ce raisonnement fait, ici, dans les conditions qui nous paraissent les meilleures, reste entièrement valable, indépendamment de l’unité choisie (brute ou pondérée) et de la longueur de la moyenne adoptée34.
45La superposition des représentations graphiques des moyennes mobiles de 13 et de 5 ans donne encore de meilleurs résultats35. La moyenne de 5 ans utilisée pour l’analyse des fluctuations les plus courtes a l’avantage, en effet, de permettre l’élimination des aberrances d’ordre extra-économique dues aux aléas et aux à-coups d’une navigation à voile dépendante de la météorologie ; elle permet, aussi, l’élimination des fluctuations les plus courtes, de 3 ans et demi — dirons-nous un pré-cycle de Kitchin ? — que nous avons cru pouvoir déceler dans les phénomènes économiques du xvie siècle.
46Les graphiques construits sur les moyennes de 5 ans livrent donc le phénomène dans toute sa brutalité et la comparaison de la courbe représentative des moyennes de 5 ans avec celle des moyennes de 13 ans est particulièrement révélatrice, surtout dans la série des mouvements Allers et retours en unités pondérées.
47La courbe des moyennes de 5 ans, qui se tenait, en général, en-dessous de la courbe des moyennes de 13 ans, entre 1542 et 1546, passe, brusquement, au-dessus de cette dernière en 1547 et s’y maintient jusqu’en 1552, sous l’influence des très gros mouvements des années 1548-1549, 1550 et 1551 ; la courbe représentative des moyennes de 5 ans que l’on peut considérer un peu comme la courbe représentative du mouvement cyclique décennal — « pré-cycle de Juglar » ? — dégagée de toute aberrance, se redresse par rapport au trend, comme jamais, proportionnellement, elle ne le fera : l’expansion atteint un ordre de grandeur de 25 % en 1550. Il s’agit de la plus forte anomalie des moyennes mobiles de 5 ans, par rapport à celles de 13 ans, observée sur les courbes des mouvements Allers et Retours en unités pondérées, comme il serait facile d’en juger, graphiquement, par une transposition des données sur un canevas semi-logarithmique. Or la contre-pente qui se dessine sur le graphique des 5 ans, au-delà de 1552, est, aussi, proportionnellement, la plus marquée, puisque l’on passe de 21468,90 en 1550 à 13 365,85 en 1555, ou, mieux encore, de 20 361,15 en 1551 à 13 781,1 en 1554, soit une descente de 40 % en 3 ans. Il faut attendre 1567 (22 116,36), pour que le chiffre indiciel de 1550 (21468,90) soit dépassé, et 1564, pour que la courbe des 5 ans passe à nouveau sur celle des 13 ans.
48On peut donc mesurer à sa juste valeur, par ces quelques considérations sommaires, sur les graphiques globaux en volume, l’ampleur de la grande récession du milieu du xvie siècle. Elle sépare, sans conteste, les deux périodes d’expansion de la phase ascendante. On ne rencontrera jamais d’anomalie comparable, ni dans la phase A d’expansion, de 1550 à 1610, ni dans la phase B de contraction, au-delà de 161036 (Il y a donc bien sur les mouvements, outre les deux trends symétriques dégagés, une seule grande période inter-cylique de variation négative.
49La récession intercyclique du milieu du xvie siècle décelée à partir des trafics en volume trouve son garant dans le comportement des prix espagnols calculés par Hamilton. Le phénomène, assez flou sur les composite index numbers pour l’ensemble des prix espagnols, est très net, si on se reporte aux seuls prix andalous37, prix moteurs dans la conjoncture atlantique — ceux, du moins, dont le comportement pèse le plus lourd sur l’ensemble du trafic espagnol et hispano-américain. Si la décade 1550-1560 est marquée sur la courbe générale des prix par un palier sensible, suivi d’une remontée tardive, la construction graphique réalisée par nos soins38, à partir des prix andalous de Hamilton, assez grossière, au vrai, et critiquable, dénote une inflexion intercyclique d’ampleur inégalée39.
50La récession intercyclique du milieu du xvie siècle séparant la première phase d’expansion de la seconde phase d’expansion est donc vraie pour les prix presque au même titre que pour les trafics.
51Ainsi, une première division chronologique s’impose : quatre grandes périodes intermédiaires entre le cycle de Juglar et la tendance séculaire, nous proposons pour la commodité de les désigner en A’ et B’ : un premier intercycle de hausse en A’(1504-1550) ; la grande récession B’(1550-1562-1563) ; le second intercycle d’expansion 1562-1563-1610 et au-delà de 1610, jusqu’en 1650, le seul grand intercycle qu’il soit possible de distinguer, pour l’instant, tant que l’étude ne sera pas poursuivie au-delà de 1650. Nous ne pouvons pas préjuger du comportement des trafics après cette date. La division en intercycles restera sans doute valable pour la phase B du xviie siècle, quand nous en connaîtrons mieux le détail.
52Cette grande division quadripartite serait donc raisonnable. Nous introduirons, pourtant, pour les commodités mêmes de l’exposé, une cinquième partie, car le renversement de la tendance majeure dans les premières décades du xviie siècle mérite une place spéciale. Les séries semi-décadaires des mouvements en volume en unités pondérées et en unités non pondérées et leurs graphiques correspondants révèlent, en effet, un palier de 25 ans, environ, sur lequel les trafics s’établissent de 1595 à 162040.
53Certes, le palier n’épouse pas exactement les mêmes formes, suivant que l’on s’adresse aux pondérées ou aux non pondérées41, suivant que l’on s’adresse aux Allers, aux Retours, ou aux Allers et retours : les points hauts, pour les Retours, notamment, sont de dix ans décalés dans le temps, par rapport aux Allers et aux Allers et retours. Sur les semi-décadaires-Retours en unités pondérées (tonneaux de jauge de 2,8 m3), un palier très net de vingt ans, de 1606 à 1625, avec 120 920,4 tonneaux dans la demi-décade 1606-1610, 106 804,8 dans la demi-décade 1611-1615, 11207,6 dans la demi-décade 1616-1620 et encore 105 439,2 pour la période 1621-1625, parfaitement encadré par les points bas de 1601-1605, 86 501,8, 1626-1630, 1631-1635, 96 000 et 63 645,6. Moins bien dessiné et surtout chronologiquement avancé, le palier subsiste dans les représentations graphiques des mouvements globaux en volume semi-décadaires, en unités pondérées de 2,8 m342 ; pour les Allers, il s’établit nettement entre 1596 et 1620, sur 25 ans, puisque les chiffres du mouvement semi-décadaire de 1596 à 1620 forment un tout homogène, avec 132 709,5, 130 199,3, 152 540, 121 900,8 et 137 007 encadrés entre les 97 569 de 1591-1595 et les 124 389,6 et 125 522,4, puis 94 769,2 qui suivent immédiatement la demi-décade de 1620. Même configuration, en gros, pour les Allers et retours qui, là encore, doivent plus aux Allers qu’aux Retours, palier entre 1596 et 1620, avec les chiffres de 218 988, 216 701,1, 273 560,4, 228 715,6 et 229 828,8 encadrés par les 162 323 de 1591-1595 et les 229 828,8, 221 522,4 et 158 414,8 de 1621 à 1635.
54Le tracé du trend obtenu par les moyennes mobiles43 (et surtout, le trend calculé par les moyennes mobiles de 13 ans, sur le mouvement Allers et Retours en unités pondérées, dénote le même phénomène : un presque-palier s’y dessine assez nettement, de 1600 à 1620. Les hésitations de la courbe qui, tout à fait exceptionnellement dans cette période, ne parvient pas à donner un rabotage satisfaisant, traduisent le renversement de la tendance, d’une manière expressive.
55Les prix espagnols de EJ. Hamilton traduisent aussi le même phénomène. Toutes les courbes des prix espagnols44 présentent, entre 1600 et 1620, un long palier plongeant qui correspond, nettement, avec une antériorité ou une anticipation aisément explicables, au palier qui apparaît à la même époque sur les représentations graphiques des mouvements en volume. L’histoire de prix vient donc, une fois de plus, corroborer nos premiers résultats.
56C’est pourquoi — cette manière de voir pouvant également se justifier dans l’optique de l’histoire des prix — nous ferons une place dans notre exposé à la période 1595-1620, ou plus exactement, 1593-1622, au cours de laquelle nous procéderons à l’analyse des phénomènes qui accompagnent et provoquent le renversement de la tendance majeure à la charnière des deux siècles. Nous proposons donc, pour l’étude de la conjoncture de l’Atlantique espagnol et hispano-américain, les cinq divisions chronologiques suivantes : 1504-1550, 1550-1562, 1562-1563-1592, 1593-1622, 1623-1650.
III. — POSSIBILITÉS D'UNE CHRONOLOGIE CYCLIQUE DANS L’HISTOIRE DE L’ATLANTIQUE ESPAGNOL ET HISPANO-AMÉRICAIN
57Tâcher d’aller plus oultre, de reconstituer, pour l’Atlantique espagnol et hispano-américain des xvie et xviie siècles, un ou plusieurs de ces business cycles, qu’économistes et historiens des xixe et xxe siècles ont coutume de distinguer dans la réalité économique de notre temps, pouvait paraître souhaitable et le travail risquait d’être grandement facilité par les admirables modèles d’analyse de la conjoncture dont on dispose pour l’âge contemporain.
58Mais loin d’y recourir, dans cette première approche, on s’est volontairement borné, toutefois, aux démarches les plus élémentaires, les plus empiriques, partant, les moins suspectes d’introduire dans la masse à éclairer les présuppositions d’un quelconque formulaire des sciences économiques. Ces premières démarches — combien élémentaires, on le verra — ce sont celles aussi, qui nous ont convaincu de l’objective réalité des fluctuations cycliques, dans la masse économique, voire dans le flux humain tout entier de l’Atlantique espagnol, ces fluctuations qui dictent notre plan et nous conduisent dans nos moindres démarches, tout au long de la dernière partie de cette étude. Les résultats auxquels elles permettaient d’aboutir — la suite de notre enquête donne l’occasion de la vérifier — donnaient de la géographie cyclique définitive une approche valable à 90 %. L’analyse plus poussée des pages ultérieures, la prise en considération de données nouvelles, quantitatives et qualitatives, permettra de préciser, de nuancer, d’accorder..., par l’élimination, notamment, de l’accident et par une obéissance plus totale à la chronologie vraie, au-delà des illusions des découpages du calendrier.
59Bien sûr, on aurait pu réaliser l’économie de ces premiers tâtonnements. Il n’est apparu ni honnête, ni rentable de le faire. Pour des raisons de méthode — puisque, au-delà de nos modestes résultats, c’est un peu une méthode que nous avons cherchée —, parce que nous pensons que les démarches très simples, que nous avons suivies, peuvent servir à d’autres études. Parce que ces tâtonnements plaident en faveur d’une chronologie cyclique, en montrant combien elle est peu subjective, pour résister à des approches aussi maladroites. Parce qu’elle montre l’efficace, enfin, de ces méthodes grossières, mais économiques, dont nous préconisons l’emploi systématique et préalable dans des études analogues de mouvements d’échanges45.
LES MÉTHODES
60Trois méthodes, au moins, s’imposaient pour cette étude : séries et représentations graphiques semi-décadaires, moyennes mobiles et points de rebroussement. On pouvait attendre beaucoup aussi, dans le pur domaine de l’empirisme graphique46, des constructions sur canevas semi-logarithmiques de différents modules. Toutes ces méthodes ont été. utilisées, successivement ou simultanément. Les plus simples, les pionnières, celles qui ont orienté d’abord notre recherche ne sont pas, forcément, les moins sûres, ni les moins valables.
1. Méthode empirique et premiers résultats
61Le calcul des mouvements semi-décadaires et leurs représentations graphiques par une courbe en tuyaux d’orgue sur un canevas arithmétique constituent un point de départ. Peut-on parler de méthode ? On sait la valeur des objections contre ce pur empirisme. Mais ces critiques sont sans portée, s’il s’agit d’un point de départ.
62a. Discussion. — Rien de plus arbitraire, sans doute, que le choix imposé par le calendrier : découpage purement formel, qui conduit le flux économique du 1er janvier de l’année au millésime terminé par 6 au 31 décembre de l’année au millésime terminé par 0, puis du 1er janvier de l’année terminée par 1 au 31 décembre de l’année terminée par 5. Découpage bien formel, auquel le découpage annuel, d’ailleurs, n’a rien à envier (cf. Annexe I). Qu’est-ce que le 1er janvier ? Qu’est-ce que le 31 décembre, sinon conventions ? L’historien des prix, qui dégage un mouvement saisonnier par rapport au mouvement annuel, le sait bien, lui qui cherche à dépasser le caractère arbitraire de la chronologie du calendrier. Mais est-il plus rationnel de s’enfermer dans la durée légale du jour civil de 0 à 24 heures, groupant arbitrairement cette réalité économique qu’est le jour et cette réalité de moindre activité économique qu’est la nuit ? Il n’y a pas de science, pas plus que de vie en société, sans un minimum d’indispensables conventions. Dans la mesure, précisément, où le découpage semi-décadaire comporte le maximum de convention et d’arbitraire, s’il lui arrive de dégager, quand même et comme par inadvertance, la réalité d’une fluctuation, d’un rythme, cette fluctuation, ce rythme sera d’autant moins douteux.
63Cette méthode — ou cette non méthode — mérite donc d’être retenue, du moins pour les xvie et xviie siècles, où l’approche de la réalité économique reste assez sommaire et comporte — la rigueur des chiffres ne doit pas faire illusion — une certaine marge d’imprécision. Elle donnera une première ébauche d’analyse dégagée de toute présupposition et pourra ainsi orienter utilement des recherches ultérieures. Elle permettra — autre avantage — de prendre une vision syncopée, non artificielle du mouvement envisagé. Elle calmera, enfin, les craintes de certains historiens — ils sont nombreux — qui reprochent aux méthodes de l’analyse statistique de permettre aux trop habiles de démontrer ce que bon leur semble.
64b. Détermination d’un « précycle de Juglar ». — L’application de cette simple méthode empirique aux trois séries du mouvement global en volume semi-décadaire — en unités pondérées, ou en unités non pondérées, le choix importe peu — et aux représentations graphiques correspondantes mène à une première constatation.
65Si on représente graphiquement, sur l’échelle arithmétique, les deux tendances majeures du mouvement par un trait pointillé, réunissant la base du graphique 1506-1510 à la demi-décade tournante 1606-1610, pour l’expansion, et la demi-décade 1606-1610 à la demi-décade 1646-1650, pour la contraction, on peut déceler aussitôt une étonnante alternance de demi-décades d’expansion relative et de contraction relative. On appellera demi-décades a, les périodes représentées par un tronçon de courbe de pente supérieure à la pente de la droite représentative du trend dans la phase ascendante (phase A de 1506 à 1610) et demi-décades b, les périodes représentées par un tronçon de courbe d’inclinaison moindre ou inverse à l’inclinaison de la droite représentative du trend dans la pente ascendante et de pente supérieure à la droite représentative du trend dans la phase descendante. On peut constater que les demi-décades a et b se succèdent, avec une certaine régularité, une phase de contraction alternant le plus souvent avec une phase d’expansion absolue. Phénomène d’autant plus troublant que le découpage des mouvements en tronçons rigides de cinq ans était purement arbitraire et n’obéissait à aucun désir préconçu de démonstration (Cf. Annexe II, p. 43).
66On peut aboutir ainsi, indifféremment, sur les Allers, Retours, Allers et retours. Le travail fait sur les unités non pondérées, afin d’écarter, précisément, toute possibilité d’accusation de truquage par la pondération, pourrait être reporté, à deux ou trois iotas près, sur les échelles en unités pondérées. Dans le tableau ci-joint, chaque demi-décade des Allers, Retours et Allers et retours a reçu, d’après la convention passée tout à l’heure, l’indicatif a ou b — ces indicatifs qui ont été décernés d’après la méthode graphique auraient pu l’être aussi bien par le calcul. Les demi-décades, dont le caractère de forte expansion ou de forte contraction est particulièrement net, ont reçu sur notre tableau l’indicatif a + ou b +, voire même, exceptionnellement, pour le spectaculaire décrochage de la demi-décade 1631-1635, l’indicatif b Les demi-décades sont groupées par deux, chaque fois qu’il est possible, chaque fois qu’existe l’alternance binaire expansion-contraction, contraction-expansion. Quand cette alternance binaire n’existe pas, on a eu recours à un schéma ternaire, quaternaire, ou même, deux fois, quinternaire, lorsque ces schémas ont été nécessaires pour retrouver sur une période de 15, 20 ou 25 ans, l’alternance désirée de la contraction à l’expansion, de l’expansion à la contraction. Chacun de ces groupements a reçu, suivant son comportement par rapport au trend, d’après notre convention, l’indicatif a pour l’expansion, et b' pour la contraction. La décade 1631-1640 de spectaculaire contraction, lors du prodigieux décrochage de la descente du trafic, a reçu, toujours d’après notre convention, l’indicatif b'+. Le tableau montre clairement ainsi que les phases A et B des mouvements en volumes Allers, Retours et Allers et retours peuvent être considérées comme constituées par un certain nombre de ces tronçons a' et b' de contraction ou d’expansion relative : 4 en phase B pour les Allers, Retours et Allers et retours, 8 en phase A pour les Allers, 7 pour les Retours et Allers et retours.
67Un tel découpage n’est guère valable, certes, en théorie économique et pourtant à partir de 1591 — laissons tomber les constructions faussement complexes de la période antérieure — jusqu’en 1650, chaque décade des Allers, des Retours et des Allers et retours en imités pondérées et en unités non pondérées, est formée par une première demi-décade de contraction b terminée par l’année 5 et une deuxième demi-décade d’expansion a terminée par l’année du millésime 0. Il y a là, pour le moins, une présupposition valable de « cycle de Juglar ». Bien peu de nos économies traitées par une méthode aussi primitive en laisseraient apparaître une semblable.
68c. Vérification sur les prix. — Il existe — et la valeur de la constatation s’en trouve sensiblement renforcée — une concordance grossière entre l’évolution du mouvement semi-décadaire en volume et les prix espagnols et surtout andalous, établis par Hamilton, envisagés dans le même cadre arbitraire de la demi-décade. Ce rapprochement a fait l’objet d’une de nos récentes études47 ; nous renvoyons aux données qui y ont été fournies. On s’est borné dans cette étude à mettre en parallèle, pour la seule période 1560-1650, la courbe semi-décadaire des Allers en unités non pondérées et celle des prix andalous de Hamilton. Le parallèle aurait pu être renouvelé, dans les mêmes termes, entre les prix andalous et l’une quelconque des séries semi-décadaires des mouvements globaux en volume Allers, Retours, ou Allers et retours, en unités nominales ou en unités pondérées48.
2. Méthodes rationnelles et détermination des fluctuations courtes
69Serait-ce suffisant pour affirmer la présomption d’une fluctuation cyclique en gros décennale, pour soixante ans au moins du mouvement global dans l’Atlantique ?
70Des méthodes plus efficaces et, pourtant, inattaquables en raison de leur extrême simplicité, la méthode des points de rebroussement, celle des moyennes mobiles et les transcriptions graphiques sur canevas semi-logarithmiques, aptes à conserver l’ampleur relative de la fluctuation, permettent de reconnaître et de mesurer deux types de fluctuations courtes : une fluctuation d’environ 3 ans 1/2 et une autre, très légèrement supérieure à 10 ans ; engendrée, d’ordinaire, par l’enchaînement de deux à trois fluctuations de trois à quatre ans. L’économiste y reconnaîtra les ancêtres des deux cycles courts les plus couramment étudiés dans l’économique actuelle, le « cycle de Kitchin » et le « cycle de Juglar ».
71Le « cycle de Juglar » de l’Atlantique des xvie et xviie siècles parait, toutefois, nettement plus long que la fluctuation décennale courante des xixe et xxe siècles. Il la dépasserait de trois ans environ. Ce fait confirme le raccourcissement général moyen de toutes les fluctuations économiques, depuis l’accélération technique des 150 dernières années.
72a. Méthode des points de rebroussement. — On sait en quoi consiste la méthode dite des points de rebroussement, des maxima et des minima, appliquée couramment dans l’étude des mouvements des prix.
73Cette méthode appliquée aux séries annuelles des mouvements en volume Allers, Retours et Allers et retours, en unités pondérées ou en unités non pondérées, permet une approche plus sérieuse du nombre et de la forme des fluctuations les plus courtes. Un pas est fait en direction de leur délimitation définitive49. Elle donne des résultats satisfaisants, à condition, toutefois, de ne pas l’appliquer avec une rigidité excessive. Il ne serait pas raisonnable, par exemple, de retenir comme point de rebroussement des maxima et des minima, dont la position sur l’échelle des ordonnées ne fait avec la position de l’année précédente et celle de l’année suivante qu’un écart de quelques centièmes. Appréciation d’ensemble qui fait intervenir, tout de suite, pour les cas douteux, des éléments soit quantitatifs, tirés des séries annexes plus particulières, soit, qualitatifs, des sources d’atmosphère. De bon sens, afin de ne pas surestimer la précision des mesures et de tenir compte, surtout antérieurement à 1550, de la large part d’appréciation que les chiffres comportent. Il suffit, le plus souvent, de se reporter aux constructions sur canevas semi-logarithmique : le choix est, alors, facile et la fluctuation s’impose à l’œil, en quelque sorte.
74Les points que nous avons éliminés, parce qu’ils présentaient, par rapport au point précédent, une variation trop infime pour être considérée comme une contre-pente, sont trop peu nombreux, même si on contestait leur rejet, pour porter atteinte à la validité des résultats : deux pour les Allers, 1645 écarté comme minimum, 1646, comme maximum ; 8 pour les Retours, 1526, 1533, 1548, 1613 comme minima, 1525, 1532, 1547 et 1614 comme maxima, et 8, également, pour les Allers et retours, tous situés dans la période antérieure à 1550, dans la période de plus grande imprécision du chiffre, 1513, 1519, 1526, 1546 comme minima, 1512, 1518, 1525, 1545, comme maxima. Les esprits scrupuleux pourront toujours réintégrer ces années comme points de rebroussement : on ne parviendrait pas, en le faisant, à des résultats sensiblement différents des nôtres.
75b. Détermination d’un « cycle de Kitchin ». — On arrive ainsi à déterminer et à mesurer sur les mouvements globaux en volume les distances d’un cycle court dont les dimensions correspondent bien à notre actuel « cycle de Kitchin ». On pourra retenir, pour les Allers, par exemple, soit 40 maxima et minima, soit 36 engendrant, pour 145 ans — 75 ans d’expansion et 70 ans de contraction — de 1506 à 1650, un cycle court de 3 ans 625 ou de 4 ans 0277, ce qui fait, dans l’hypothèse des 40 maxima et minima, un temps moyen d’expansion de 1 an, 875 et un temps de contraction de 1 an 75.
76On peut adopter, pour les Retours, une fluctuation un peu plus courte, mais qui ne correspond peut-être pas à la réalité économique : au-delà de 1560, en effet, quand fonctionne le système des convois, quand l’ennemi oblige à adopter le mécanisme des Retours combinés, un facteur extra-économique, stratégique ou météorologique intervient — il est difficile de l’éliminer sans introduire par trop d’arbitraire50 (On aboutit, avec 43 maxima et 45 minima, à une fluctuation courte de 3 ans 268, soit 1 an 528 pour le temps moyen d’expansion et 1 an 644 pour le temps moyen de contraction. On dégage, enfin, pour les Allers et retours, avec 45 maxima et 41 minima, un cycle court de 3 ans 6 049, soit, pour 80 ans d’expansion et 65 ans de contraction, un temps moyen d’expansion de 2 ans et un temps moyen de contraction de 1 an 49.
77La durée du cycle varie assez sensiblement de 1506 à 1650. La fluctuation est plus longue dans l’ensemble au début qu’à la fin. Le phénomène vaut d’être étudié plus en détail.
II — LA FLUCTUATION COURTE : ÉBAUCHE D’UNE CHRONOLOGIE
1. Le mouvement aller
78a. La phase A (1506-1608). — On peut distinguer pour le mouvement global Allers en unités non pondérées, dans la première période d’expansion de 1506 à 1550, 10 fluctuations pleines jalonnées par les minima de 1506, 1510, 1513, 1518, 1522, 1528, 1532, 1537, 1541, 1544, 1546 et les maxima de 1508, 1512, 1517, 1520, 1525, 1530, 1536, 1540, 1542, 1545, puis un demi-cycle dans sa période d’expansion, de 1546 à 1550. Soit 10 fluctuations courtes de 4, 3, 5, 4, 5, 5, 4, 3, 2 ans et une fluctuation exceptionnellement longue de 8 ans, à la charnière de l’expansion et de la grande récession interdécennale du xvie siècle. Cette fluctuation est limitée par les minima de 1546 et de 1555. La fluctuation courte est abolie, ici, par le renversement de la tendance. Le cycle court est, donc, pour les Allers, en cette première période d’expansion de 1506 à 1550 — 28 ans d’expansion et 17 ans de contraction — de 4 ans, 285, soit un temps moyen d’expansion de 2 ans, 8 et un temps moyen de contraction de 1 an, 485.
79Pour la récession interdécennale du xvie siècle (1550-1560), la fluctuation est plus ramassée et la contraction gagne au détriment de l’expansion : 3 ;minima (1554, 1556, 1559), 2 maxima (1555, 1557), ce qui donne un cycle court de 3 ans 1/3, avec un temps moyen d’expansion d’un an seulement et un temps moyen de contraction de 2 ans 1/3.
80Pour la deuxième période d’expansion (1561-1608), les fluctuations courtes sont jalonnées par les minima de 1563, 1566, 1568, 1571, 1573, 1575 — le rythme normal de la contraction est perturbé, au cours de ces années, par la mise en place du système des convois — 1578, 1583 — ici, le rythme redevient normal — 1587, 1591, 1595, 1598, 1603, 1607, puis au-delà de notre période, 1611 ; par les maxima de 1562, 1565, 1567, 1569, 1572, 1574, 1576, 1582,1586, 1588, 1594, 1596,1601, 1605,1608. Soit 15 fluctuations cycliques courtes de : 4, 3, 2, 3, 2, 3, 5, 4, 4, 4, 3, 5, 2 et 4 ans et en moyenne, un cycle court de 3 ans 1/3 (de même dimension que celui de la grande récession (interdécennale) pour 28 ans d’expansion et 22 ans de contraction. Les proportions entre expansion et contraction sont modifiées, naturellement, au profit de l’expansion — la tendance majeure d’une période est, d’ordinaire, acquise plus par la durée relative des temps d’expansion et de contraction que par le gradient de la pente à peu près égal, le plus souvent, dans les deux sens, contraction ou expansion.
81On pourrait, peut-être, apporter une légère modification à ces données, en essayant de tenir compte de la perturbation causée par le système des convois, lors d’une mise en place qui ne s’est pas faite sans de graves problèmes d’adaptation : l’élimination, par exemple, des deux fluctuations cycliques de deux ans construites sur les minima de 1566 et de 1575 permettait un cycle de 3 ans 846 qui pourrait paraître plus plausible. Un tel procédé serait pleinement justifié, nous y recourerons plus tard, dans l’analyse détaillée, mais nous nous en abstenons présentement afin de ne pas encourir le reproche de plier les résultats aux besoins d’une interprétation.
82Si on récapitule l’ensemble de ces résultats pour la phase A d’expansion de 1506 à 1608, on obtiendra, dans l’hypothèse la moins contestable de 28 maxima et minima, une fluctuation courte de 3 ans 678, soit 58 ans d’expansion et 45 ans de contraction, soit encore un temps moyen d’expansion de 2 ans 071 et un temps moyen de contraction de 1 an 775. Résultat prévisible en phase longue d’expansion.
83b. La phase B (1609-1650). — Elle comprend 11 fluctuations cycliques ou 10 fluctuations pleines et 2 fragments, limités par les minima de 1611, 1613, 1616, 1622, 1625, 1629, 1632, 1635, 1639, 1641 (le minimum de 1645 peut être éliminé sans inconvénients), 1649 et les maxima de 1608, 1612, 1615, 1617, 1624, 1626, 1630, 1633, 1636, 1640, 1644 (le maximum de 1646 peut aussi être éliminé) et 1650. Soit des fluctuations cycliques de 4, 3, 2, 7, 2,4, 3,4, 4, 2 et 4 ans ; la combinaison de 2 et de 4 ans peut être remplacée, dans l’hypothèse de l’élimination minima et maxima de 1645 et 1646, par une fluctuation de 6 ans, ce qui donne, dans la première hypothèse, une fluctuation moyenne de 3 ans 1/2, avec une expansion de 17 ans et une contraction de 25 ans, soit un temps moyen d’expansion de 1 an 466 et un temps moyen de contraction de 2 ans 0833.
84Ces résultats ne prennent leur pleine valeur qu’à la condition d’être mis en regard des chiffres obtenus en phase A, de 1506 à 1608, 3 ans,678, 2 ans 071 pour l’expansion, 1 an 775 pour la contraction. On note, naturellement la permutation circulaire des durées relatives moyennes de l’expansion et de la contraction dans la phase A et dans la phase B. On parviendrait aux mêmes constatations, en comparant 1609-1650 à 1506-1550 ou à 1560-1608, inversion des temps de contraction et d’expansion. Concordance, par contre, entre 1609-1650 et la grande récession 1550-1560, qui présente des temps d’expansion plus réduits encore que ceux de la phase B.
85Toutes ces observations restent valables, à quelques nuances près, pour les mouvements globaux Retours et Allers et retours.
2. Le mouvement retour
86a. La phase A (1506-1608). — On distingue dans la première période d’expansion 8 ou 11 cycles courts, suivant que l’on retienne ou non les minima de 1526, 1533, 1548 et les maxima de 1532, 1547. Dans l’hypothèse de l’élimination, les cycles courts sont construits sur lès minima de 1506, 1510, 1516, 1524, 1528, 1531, 1537, 1544 et 1554, en dehors de la période, sur les maxima de 1509, 1514, 1518, 1527, 1529, 1536, 1541 et 1551. Dans l’hypothèse des 11 fluctuations, il suffit d’ajouter 1526,1533,1548 aux minima et 1525, 1542 aux maxima. Soit, dans la première hypothèse, 8 fluctuations de 4, 6, 8, 4, 3, 6, 7 et 10 ans, et dans la seconde hypothèse, 11 fluctuations de 4, 6, 8, 2, 2, 3, 2, 4, 7, 4 et 6 ans. Le cycle court est donc en moyenne de 4 ans 1818 ou de 5 ans 75, ce qui donne, avec 23 ans d’expansion et 21 ans de contraction, un temps moyen d’expansion de 2 ans,2727 et un temps moyen de contraction d’1 an,90909.
87Dans la récession interdécennale, 3 cycles sont jalonnés par les maxima de 1551, 1556, 1558, 1561 et les minima de 1554, 1557, 1558, soit un cycle de 3 ans en moyenne et avec 3 ans d’expansion, 6 ans de contraction, un temps moyen d’expansion d’1 an, un temps moyen de contraction de 2 ans. L’absolue similitude des résultats avec ceux obtenus à l’Aller vaut la peine d’être retenue.
88Pour la seconde période d’expansion enfin, la perturbation due à la mise en place du système des convois sera plus sensible encore que pour les Allers. La fluctuation économique risque d’être marquée par le rythme souvent binaire des Retours combinés. 16 fluctuations, 2 fragments de fluctuations limités par 17 minima et maxima : minima de 1562, 1565, 1567, 1569, 1574, 1578, 1582, 1586, 1588, 1590, 1592, 1594, 1597, 1599, 1601, 1604, 1607 et maxima de 1561, 1564, 1566, 1568, 1573, 1577, 1580, 1584, 1587, 1589, 1591, 1593, 1595, 1598, 1600, 1602, 1605, 1610. Soit des fluctuations de 3, 2, 2, 5, 4, 4, 4, 2, 2, 2, 2, 3, 2, 2, 3 et 3 ans, un cycle court moyen de 2 ans 941176, une expansion de 27 ans, une contraction de 23 ans, un temps moyen d’expansion de 1 an 588235, un temps moyen de contraction de 1 an 3529.
89Une analyse plus poussée permettra peut-être de dégager la fluctuations — dans la mesure où elle n’est pas une vue de l’esprit — de l’aberrance binaire que les structures défensives extra-économiques de l’Atlantique espagnol et hispano-américain lui ont imposée au cours de cette période. Cette fluctuation courte épurée dépasserait sensiblement les 2 ans 941176 obtenus par l’application orthodoxe de la méthode des rebroussements. Quant à l’importance relative des périodes d’expansion et de contraction, le rapport n’en serait sans doute pas modifié ; tout au plus, peut-être, le temps d’expansion serait encore un peu gonflé par rapport aux périodes de contraction.
90b. La phase B (1608-1650). — Elle est construite autour des minima de 1611, 1615, 1618, 1623, 1625, 1628, 1631, 1634, 1638, 1640, 1642, 1644, 1646 et 1650, des maxima de 1610, 1612, 1616, 1619, 1624, 1626, 1630, 1633, 1636, 1639, 1641, 1643, 1645, 1647. Soit en partant du minimum de 1607 une série de fluctuations de 4, 4, 3, 4, 3, 3, 3, 3, 4, 2, 2, 2, 2, et 4 ans, une fluctuation cyclique moyenne très courte de 2 ans,928, 17 ans pour l’expansion, 24 ans pour la contraction, un temps d’expansion moyen d’1 an 73 et un temps de contraction moyen d’1 an 62. La durée de la fluctuation présente une assez belle homogénéité : 5 fluctuations de 4 ans, 5 fluctuations de 3 ans et 4 fluctuations de 2 ans.
91Les remarques faites, précédemment, restent valables. La durée respective des temps d’expansion et des temps de contraction en phase A et en phase B est inversée pour le mouvement Retours, comme pour le mouvement Allers. D’autre part, le rythme binaire qui s’est manifesté, pour le mouvement Retours, lors de la seconde phase d’expansion, est particulièrement marqué dans la phase de contraction, Surtout à partir de 1640, quand le système de défense devient de plus en plus astreignant, quand l’espace atlantique échappe de plus en plus aux Espagnols. C’est ce phénomène extra-économique qui confère aux constructions graphiques annuelles des Retours, sur le canevas arithmétique51 (et mieux, sur le canevas semi-logarithmique52 (l’allure en dents de scie qui caractérise la courbe des Retours, par rapport à celles des Allers et des Allers et retours. Le plus étonnant, dans de telles conditions, n’est-ce pas que la fluctuation courte résiste et ne soit pas totalement abolie ? Preuve, sans doute, que le pré-cycle de Kitchin est autre chose dans le commerce de l’Atlantique espagnol et hispano-américain qu’une simple vue de l’esprit. L’obtention d’une fluctuation moyenne de 3 ans 258, pour les 145 années des Retours, de 1506 à 1650, semble particulièrement encourageante.
3. Le mouvement Allers et retours
92Cette série présente un intérêt particulier, car l’addition, au sein de l’année, des Allers et des Retours tend à abolir sur les courbes l’influence des facteurs extra-économiques. Aussi s’appuiera-t-on, de préférence, sur les résultats de cette troisième série pour démontrer l’existence d’un « précycle de Kitchin » dans l’économie de l’Atlantique des xvie et xviie siècles. Nous en rappelons les données : un cycle court de 3 ans 6049,80 ans d’expansion, 65 ans de contraction, un temps moyen d’expansion de 2 ans, un temps moyen de contraction de 1 an,6049.
93a.La phase A. — Dans le premier intercycle de la phase A de 1506 à 1550, les minima de 1513, 1519, 1526, 1546 et les maxima de 1512, 1518, 1523, 1545 qui présentent entre eux une différence généralement inférieure à 2 % sont difficilement acceptables, vu l’imprécision de la mesure du siècle. On peut donc procéder à leur élimination. On délimité ainsi 7 fluctuations cycliques pleines, plus une moitié de fluctuation, construites autour des minima, incontestables de 1506, 1510, 1516, 1522, 1528, 1532, 1537, 1544, 1554, en dehors de la période et des maxima de 1508, 1514, 1520, 1527, 1530, 1536, 1542, 1550. Soit des fluctuations de 4, 6, 6, 6, 4, 5, 7 et 10 ans dont on peut apprécier l’homogénéité. Le passage du premier au second intercycle, autour de 1550, entraîne la disparition de la fluctuation très courte : seul, subsiste le « cycle de Juglar ». Les Retours, enfin, ont imposé leur rythme aux Allers et retours de 1540 à 1554. On remarquera souvent, en effet, que les Allers imposent leur allure aux Allers et retours dans la phase longue et dans l’intercycle, tandis que la courbe des Retours est déterminante de celle des Allers et retours, à l’échelle des fluctuations courtes, dans la mesure précisément où elle est plus tourmentée, où ses minima sont vigoureusement creusés.
94La fluctuation obtenue, élimination faite des points contestables, 1512, 1513, 1518, 1519, 1525, 1526, 1545, 1546, est particulièrement longue, 5 ans,625, avec un déséquilibre spectaculaire entre temps d’expansion et temps de contraction, 32 ans d’expansion et 13 ans de contraction, soit un temps moyen d’expansion de 4 ans et un temps moyen de contraction d’1 an 625.
95La grande récession présente trois fluctuations construites autour des minima 1554, 1556, 1559 et des maxima 1550, 1555, 1557, 1561, soit un cycle court de 3 ans 1/3 ; avec le déséquilibre accoutumé entre l’expansion et la contraction. Nulle période dans l’histoire de l’Atlantique ne fait la part aussi belle au temps de contraction, par rapport au temps d’expansion : 3 ans d’expansion, 7 ans de contraction, soit un temps moyen d’expansion de 1 an, pour un temps moyen de contraction de 2 ans 1/3.
96Dans le second intercycle de la phase A d’expansion séculaire dé 1560 à 1608, le mouvement Allers et retours garde les caractéristiques majeures des Allers et des Retours, mais surtout celles des Retours dont les minima sont — on l’a vu — particulièrement accusés. L’addition des Allers et des Retours risque, dans ces conditions, d’éliminer bien imparfaitement — comme on pouvait pourtant l’espérer — ce fameux rythme binaire dû au système des flottes, aux conditions stratégiques de la navigation espagnole dans l’Atlantique espagnol et hispano-américain et que nous considérons comme une aberrance de caractère extra-économique.
97L’homogénéité des résultats dégagés sur les séries Allers, Retours et Allers et retours, dans le second intercycle de la phase A, entre 1560 et 1608, reste extrêmement satisfaisante : 16 fluctuations cycliques construites autour des minima 1559, 1563, 1568, 1571, 1573, 1575, 1578, 1585, 1587, 1590, 1592, 1594, 1597,1599, 1601, 1604,1607 et des maxima de 1561, 1565, 1569, 1572 1574, 1576,1584,1586,1589,1591, 1593, 1596, 1598,1600, 1602, 1605,1608, soit des fluctuations de 4, 5, 3, 2, 2, 3, 7, 2, 3, 2, 2, 3, 2, 2, 3 et 3 ans. L’irrégularité est due aux aberrances extra-économiques, et l’on trouve, par conséquent, une concordance à peu près parfaite avec les résultats obtenus sur les retours : une fluctuation de 2 ans 941176, soit un temps d’expansion moyen de 1 an 5 et un temps de contraction de 1 an 441166. Autre conséquence fâcheuse du rythme binaire extra-économique et qu’on n’arrive pas vraiment à éliminer, l’illusion d’une presque égalité entre temps d’expansion et temps de contraction. Pour la période 1560-1608, il pourrait donc y avoir avantage à préférer, pour l’exacte délimitation des périodes d’expansion et des périodes de contraction, la série des Allers plus épurée dans une large mesure de l’extra-économique que la série des Retours et celle des Allers et retours, contaminée par les Retours.
98b. La phase B. — On distingue de 1609 à 1650 sur la série des Allers et retours, 13 fluctuations 1/2 construites autour des minima des années 1609, 1611, 1613, 1618, 1622, 1625, 1628, 1631, 1634, 1638, 1641, 1644, 1648, 1650 et des maxima des années 1608, 1610, 1612, 1617, 1619, 1624, 1626, 1630, 1633, 1636, 1639, 1643, 1645, 1649. Soit des fluctuations de 2, 2, 2, 5, 4, 3, 3, 3,3,4,3,3,3 et 2 ans, une fluctuation moyenne de 3 ans 0714, 21 ans d’expansion, 21 ans de contraction, un temps moyen d’expansion de 1 an 6153 et un temps moyen de contraction de 1 an, 4561. Le temps moyen de contraction est donc sensiblement égal, voire légèrement inférieur au temps moyen d’expansion, phénomène imprévu, presque paradoxal en période de contraction et dont les graphiques rendent assez bien compte : la descente est due, en effet, moins à la durée qu’à la violence de la contraction, par rapport à l’expansion.
99L’analogie des comportements des trois séries principales Allers, Retours, et Allers et retours soumises à l’analyse des points de rebroussement, malgré quelques variantes, milite, sans conteste, en faveur de la réalité profonde de cette fluctuation courte dans la vie économique de l’Atlantique espagnol et hispano-américain des xvie et xviie siècles.
III. — UNE CONTRE-ÉPREUVE53
1. La méthode des moyennes mobiles de 5 ans
100S’il existe — comme une observation attentive des séries et leur analyse par la méthode des points de rebroussement le laissent supposer — une forte présomption, de fluctuation courte dépassant légèrement 3 ans 1/2, une moyenne mobile débordant cette fluctuation doit l’éliminer à peu près complètement et en dégager une autre. Les résultats obtenus avec les moyennes mobiles de 5 ans, sur les séries pondérées, dépassent toute espérance : on voit, en effet, se dessiner d’une manière à peu près parfaite, de part et d’autre du trend établi par les moyennes mobiles de 13 ans, une fluctuation en gros décennale de 8 ( ?) à 15 ans. La moyenne mobile de 5 ans contribue à prouver donc avec plus de certitude l’existence objective d’une fluctuation courte de 3 ans 1/2 environ, celle, précisément, qu’elle a réussi à éliminer. Elle prouve aussi, a fortiori, l’existence d’une fluctuation décennale, de ce « précycle de Juglar » engendré d’ordinaire, dans notre économie Atlantique, par deux ou trois « précycles de Kitchin ».
2. La méthode des canevas semi-logarithmiques
101Ce procédé offre, aussi, une possibilité de contre-épreuve. Le report des fluctuations sur les canevas semi-logarithmiques, en conservant, pendant toute la période quelque soit le niveau du trafic, l’importance relative de la fluctuation, permet, avec un peu d’entraînement, de suivre à l’œil, sur le graphique, le tracé de la fluctuation courte et le tracé, au sein de la fluctuation courte, de la fluctuation très courte. Or, la transposition, sur un canevas semi-logarithmique à un module, des séries d’index numbers des prix espagnols et surtout andalous, prix-argent et prix nominaux, permet, également, de suivre sur l’ensemble de la courbe sinon une fluctuation de 3 ans 1/2 — les mesures de Hamilton ne semblent pas assez sensibles, en effet, pour être à même de capter ces ondes ultra-courtes de la vie économique — du moins la fluctuation en gros décennale. La fluctuation déjà apparente, avec la méthode — ou la non-méthode — toute empirique et grossière, du découpage semi-décadaire, est plus certaine encore, quand on a recours à la méthode, plus précise, des graphiques à ordonnées logarithmiques.
**
102Pousser la démonstration plus avant n’entrait pas dans notre propos54 (Il nous suffisait de convaincre le lecteur, à l’aide des courbes et des représentations graphiques qu’il nous a été permis, pour la première fois — on sait par quels moyens et à la suite de quelle bonne fortune — de tirer d’une documentation des xvie et xviie siècles, à l’aide, aussi, de la remarquable reconstitution d’histoire statistique de E. J. Hamilton. Oui, on peut retrouver dans l’économie et dans l’espace économique de l’Atlantique espagnol et hispano-américain des xvie et xviie siècles — et ce domaine est assez vaste pour forcer la créance — les quatre fluctuations fondamentales reconnues, analysées, étudiées par les économistes contemporains, dans les économies postérieures à la Révolution industrielle : trend séculaire des prix et des volumes des marchandises créées, remplacés par le plus spectaculaire des trafics ; mouvements interdécennaux compris entre le trend et la fluctuation décennale ; fluctuation décennale et finalement, même, ce fameux cycle de 3 ans 1/2, l’ancêtre, sans doute, de cette fluctuation, que beaucoup d’économistes considèrent, maintenant, comme la plus importante.
103Ces quatre fluctuations existent, il est possible de tout ordonner autour d’elles, de tout intégrer dans leur cadre, elles permettent de tout mesurer, de tout comprendre, même le qualitatif, l’événementiel économique, voire l’événementiel tout court, entendez l’histoire. Il ne reste plus qu’à présenter la conjoncture de cet Atlantique espagnol et hispano-américain, depuis le début du xvie siècle jusqu’au milieu du xviie
104Cette conjoncture provisoire, essentiellement descriptive et presque uniquement empirique, ne saurait satisfaire, pleinement, ni l’historien, ni l’économiste. Elle est, tout au plus, un pont. une étape vers des études de conjoncture plus rationnelles, plus scientifiques et beaucoup plus conquérantes de faits et d’espaces. Sans cet échelon intermédiaire, toutefois, sans cette modeste et tâtonnante épreuve, les grandes victoires de demain seraient-elles aussi faciles ? Elle n’a d’autre ambition que de les hâter.
105Le cadre en est simple : cinq grandes périodes correspondant aux quatre intercycles et au renversement de la tendance majeure : 1504-1550, 1550-1562-1563, 1562-1563-1592, 1593-1622, 1623-1650. Il suffit de se laisser guider, au sein de ces cinq grandes articulations, par la fluctuation en gros décennale, chaque fluctuation constituant la matière analytique, tandis qu’au sein de chaque chapitre ou groupe de chapitres, le cycle très court, le « pré-cycle de Kitchin » donnera, naturellement, l’ordre chronologique qu’il faut toujours s’efforcer de suivre en histoire.
106La réussite de l’entreprise peut, seule, prouver la réalité, l’objectivité de ces fluctuations, de cette dynamique économique que nous croyons aussi vraie aux xvie et xviie siècles que de nos jours ; le propre d’une hypothèse scientifique étant, finalement, de permettre d’ordonner les connaissances acquises, le lecteur est juge d’apprécier si l’hypothèse quadri-cyclique est parvenue à sa fin, s’il existe bien, dès le xvie siècle, un Atlantique de la conjoncture.
Annexe
ANNEXE 1. PROBLÈME DE MÉTHODE. — PRÉCISION ET EFFICACITÉ
Petit problème de méthode, dont il vaut mieux se débarrasser, tout de suite, en tête de cette étude de conjoncture : celui de l'année. Notre découpage chronologique, au cours de cette première approche, est simple, on s’est borné à respecter l’année civile, telle qu’elle est donnée par les documents, de même que pour les dates, on n’a pas essayé la conversion de l’ancien style, dans le nouveau style. Cette simplification est, en partie, inhérente à la documentation, et en partie voulue.
Parce que les bribes chronologiques dont on dispose, pour la première moitié du xvie siècle, sont trop infimes, pour qu’il soit possible de raffiner à l’intérieur de l’année. Notre découpage suit donc, pas à pas, celui du document-clef, le Livre de Registres.
Parce que, surtout, les études auxquelles on peut se livrer, pour les époques qui offrent des données chronologiques suffisantes (1551-1650), permettent de constater (Cf. t. VI1, tables 18 à 128, p. 178-319 et t. VII, p. 24-25) que le découpage de l’année civile se trouve, par un heureux hasard, être le meilleur possible. Il apparaît, en effet, que le mois de décembre, le mois de janvier, pour des raisons géographiques évidentes, représentent, dans le trafic du complexe portuaire andalou-canarien avec les Indes, une période d’activité presque nulle. Il suffit de se reporter aux répartitions interannuelles des départs du complexe, en direction, par exemple, des deux principaux ensembles géographiques : la Nouvelle Espagne et la Terre Ferme (t. VI1, tables 18, 19, 20 et 21, p. 180-184) ou aux répartitions interannuelles des arrivées en provenance de ces deux ensembles géographiques (t. VI1, tables 87, p. 259 et table 104, p. 283) : toute la vie des ports andalous-canariens, du moins toutes leurs activités avec l’Amérique, ou presque, ont lieu au printemps et au début de l’été, pour les Allers ; à la fin de l’été et à l’automne, pour les Retours, avec deux coupures naturelles, la fin août et surtout, le début de notre année civile, du début de janvier à la fin mars, début avril. Pourquoi, dans ces conditions, se montrer plus royalistes que le Roi ? L’année civile se trouve être, chance supplémentaire, nonobstant l’emploi du nouveau et de l’ancien style, le découpage le plus justifié au point de vue économique.
Au vrai, même s’il en avait été autrement, nous n’en eussions, vraisemblablement, pas usé, d’abord, d’une autre manière. Parce que nous sommes disposé à reprendre à notre compte, en les dépouillant de leur caractère inutilement polémique et blessant, certaines remarques de René Baehrel, dans un domaine différent, il est vrai, mais voisin, celui des prix. Comme lui, nous estimons primordiale l’introduction de la notion de rentabilité du travail, pour la recherche scientifique, dans le domaine extensif de l’histoire statistique des temps modernes. Il y a, peut-être, pour une histoire des prix relativement ancienne, pourtant, des raffinements inutiles, qui ne payent pas. Pas forcément, d’ailleurs, là où René Baehrel les voit. Ne serait-ce qu’en raison de l’imprécision des observations, sur lesquelles repose l’édifice mathématique, qu’on prétend, un peu vite, édifier sur elles — observations qui ne dépendent pas de l’historien, mais d’hommes, nos témoins, dont les exigencess et rigueur n’étaient pas les nôtres. N’en ira-t-il pas, à plus forte raison, de même, dans cette autre branche plus récente de l’histoire statistique, l’histoire des trafics, fille cadette, ici, de l’histoire des prix ? On ne saurait trop, en effet, conseiller à cette jeune science, aux démarches fragiles, une extrême prudence et une bonne orientation de ses premières ambitions. Le domaine qu’elle a devant elle est trop vaste, il nécessite une exploitation extensive, d’abord, non pas un jardinage extrême-oriental. Ou, plus exactement, il nécessite, à la fois, l’un et l’autre. Méthodes d’exploration extensive et d’investigation intensive doivent se succéder, à des moments différents de la recherche. Ce que nous écrivions, au stade de l’exploration documentaire (t. I, p. 26, note 2), sur la nécessité d’associer la méthode d’exploration extensive du « manager » à la méthode intensive du médiéviste, s’applique dans notre esprit, par simple transposition, aux démarches de l’analyse statistique.
Nous ne sommes pas éloigné de penser que les conseils de Baehrel, inactuels, là où il les place, en ce qui concerne, notamment, l’histoire des prix, restent, dans une large part, valables pour l’histoire plus jeune des trafics. Méthode d’exploration, extensive d’abord, pour les trafics, mais qu’il faudra enrichir, dès qu’ils seront sortis des premiers balbutiements, par les méthodes d’exploration raffinée, mises au point, depuis plusieurs années, en liaison avec les statisticiens purs, par nos meilleurs historiens des prix.
Puisse notre effort avoir hâté le moment où ce débroussaillage provisoire sera totalement dépassé.
ANNEXE II. APPROCHE GRAPHIQUE DE CHRONOLOGIE CONJONCTURELLE SEMI-DÉCADAIRE
On se borne à donner le résultat d’une construction graphique dont on a cru bon de faire l’économie à la publication.
Notes de bas de page
1 Pour le moment limitées aux structures géographiques. Cf. t. VIII1.
2 Nous pensons à quelques études récentes d’historiens, le beau, grand et décisif travail de Pierre Goubert, par exemple, où l’on voit, sous l’expression de Conjoncture, une approche analytique encore et non globale de la réalité.
3 Cf. t. I, p. 7 sq.
4 Cf. t. VI1 et VI2.
5 C’est l’objet d’une étude entreprise par un jeune historien français, Jean-Pierre Berthe.
6 E.J. Hamilton, American treasure and the Price Revolution in Spain (1501-1650), Cambridge, 1934, in-8, XXXV, 428 pages.
7 Il suffit, pour s’en convaincre, de comparer aux richesses dont on dispose, grâce à E.J. Hamilton, pour l’Espagne du xvie et de la première moitié du xviie siècle, les pauvretés voisines.
8 Cf. t. I, p. 239-244.
9 On pense aux correspondances des archives Ruiz que publie, méthodiquement, le Centre de Recherches historiques, pour le xvie siècle ; on pense, surtout, aux belles archives d’entreprise, en partie inventées et remarquablement utilisées par Bertrand Gille, dans sa thèse, pour la première moitié du xixe siècle français.
10 Cf. t I, p. 111-114.
11 Cf. Annexe I, p. 41. Nous nous excusons auprès du lecteur de l’exposé qui va suivre, indispensable, mais fastidieux. Il risque de paraître lassant aux historiens de tradition humaniste, puéril aux autres, rompus aux méthodes plus fines de l’économique ou de l’histoire statistique des périodes tout à fait contemporaines. On y trouvera la transposition prudente à l’étude des trafics pris comme indices d’activité, des méthodes les plus simples et les plus sûres de l’histoire des prix, sans raffinements inutiles, telles qu’elles sont exprimées dans les exposés méthodologiques classiques de M.C.E. Labrousse. Le refus des raffinements inutiles, qui vaut pour les relatives splendeurs statistiques des prix au xviiie siècle, est plus justifié encore, ici, dans le cas des trafics du xvie et du xviie siècle.
12 Cf. t. VI1, tables 129-143, p. 327-341 et t. VII, graphiques correspondants, p. 42-43, 44-45.
13 Cf. t. VI1, tables 140-143, p. 338-341.
14 Ibid., tables 130-139, p. 328-337.
15 Cf. t. VII, p. 42-43, 44-45.
16 Ibid.
17 Sur l’acception marginale du mot, cf. t. VI2, p. 1057.
18 Cf. t. VIl, table 139, p. 328 et table 143, p. 341 ; t. VII, p. 45.
19 Ibid., tables 144-158, p. 342-363 ; t. VII, p. 50-51.
20 Cf. ci-dessous, T. VIII2bis, p. 851-919-
21 Tout cela, vrai pour les moyennes médianes que nous avons adoptées dans les tables et graphiques des tomes VI et VII et que nous préférons, en général, dans les analyses des chapitres ultérieurs, le resterait avec des moyennes arrière, au prix d’un décalage de cinq à six ans, dans le temps. Tout ce que l’on a dit de la quatrième demi-décade du xviie s’appliquerait alors à la cinquième.
22 Cf. ci-dessous, T. VIII p. 851-919
23 Cf. t. VI1, tables 150-158, p. 347-355 ; t. VII, p. 50-51.
24 Dans l’ensemble, le renversement de la tendance majeure est d’autant plus tardif que l’on monte du Sud, zone où prend naissance l’onde de cboc, vers le Nord.
25 Tables et graphiques des index-numbers of comodity prices, tels qu’ils sont publiés dans l’ouvrage de Hamilton (EJ. Hamilton, op. cit., m. 189-191, 198-200,215-216) ne permettraient pas, pourtant, de faire cette observation, d’emblée. Earl J. Hamilton, en effet — et il s’en est justifié — a fait reposer tout son travail sur les prix réels donnés en maravedis de monnaie courante, sans tenir compte de la légère dévaluation du maravedί entre 1501 et 1650 et surtout, de la prodigieuse inflation du vellón (monnaie de cuivre) qui vient, au-delà de 1620, relayer la hausse des prix-métal du xvie siècle. Le point de vue de Hamilton est parfaitement justifié dans le cadre de son étude. Historien et savant d’une grande probité parfaitement maître de son métier, il a fourni, d’ailleurs, la possibilité de recourir, le cas échéant, au prix-métal par la publication des tables de l’inflation (Ibid., p. 96-97) et par le calcul de ses composite index numbers of silver prices (Ibid., ap. VII, p. 403).
26 Cf. ci-dessous, T. VIII2bis, cinquième partie, p. 1530-1953
27 Cf. t. VI1, tables 161-164, p. 359-363 et t. VII, p. 52-53.
28 On peut noter des indices de reprises, après 1640, mais les index numbers of silver prices, au-delà de cette date, n’ont peut-être pas été toujours suffisamment épurés des phénomènes d’inflation et de déflation qui viennent altérer le phénomène du prix métal, puisque, comme les calculs d’Hamilton le montrent pour la période 1651-1700 (E.J. Hamilton, War and prices in Spain, 1651-1800), la tendance à une légère plongée parmi se maintenir bien au-delà des aberrances de la décade 1640-1650.
29 Cf. ci-dessous, tout au long du livre et plus particulièrement, t. VIII2bis, p.852-919 et p. 1530-1569.
30 Elsas, Posthumus... et tous les classiques de l’Histoire des prix.
31 C£. t. VI1, table 139, p. 337 et t. VII, p. 45.
32 Cf. t. VI1, table 143, p. 341 et t. VII, p. 45.
33 Cf. t. VI1, tables 156-158, p. 353-355.
34 Cf. ci-dessous, ch. 1, 2e partie, p. 259-295.
35 Cf. t. VII, p. 50-51.
36 Tout au plus, pourrait-on déceler, mais sur le seul mouvement Retours, et moins nette, une contre-pente, entre 1583 et 1595, telle qu’elle apparaît, tout particulièrement sur la représentation graphique des moyennes mobiles de 13 ans, du mouvement global retour en imités pondérées, tonneaux de jauge de 2, 8 mètres cubes (cf. ci-dessous, cb. 7 à 10, 3e partie). Mais comme ce mouvement ne trouve de répondant, ni sur les Allers, ni même sur les Allers et retours, il n’a pas sa place ici, et on peut seulement le faire entrer en ligne de compte (comme on le fera ci-dessous, p. 773 sq.), dans une analyse détaillée du mouvement.
37 E.J. Hamilton, op. cit. (1501-1650), p. 189-191 ; 198-200.
38 La construction graphique elle-même a été sacrifiée à la publication.
39 Sans entrer plus avant, dès maintenant, dans l’explication de cette courte récession des trafics et des prix, notons, on aura l’occasion d’y revenir, les analogies avec les grands mouvements monétaires tels que Frank C. Spooner les propose dans son livre (L’économie mondiale et les frappes monétaires en France de 1493 à 1680, Paris, in-8,547 pages, pl. cartes et graphiques hors texte). 1530-1540 marque le passage de l’or dominant (Cf. E.J. Hamilton, op. cit. 1504-1650, p. 4041-42) à un cycle que nous appellerions, volontiers, celui de l’argent doré. De 1531 à 1560, d’après Hamilton, en effet, l’or et l’argent, en valeur sinon en poids, s’équilibrent à peu près. Avant 1531, l’or représente près de 100 % des exportations d’Amérique. Au-delà de 1560, l’argent s’élève progressivement jusqu’à atteindre 90 % et plus même en valeur, des exportations. La récession de l’Atlantique espagnol paraît correspondre au contre coup du passage du cycle de l’or dominant au cycle monétaire de l’argent doré, d’une part, tout en anticipant, peut-être, le passage, après 1560, du cycle de l’argent doré au cycle de l’argent dominant. Et puisqu’il y a, dans ces aimées révolutionnaires de la récession interdécennale atlantique, passage pour l’Atlantique et passage pour l’Europe d’un système monétaire reposant essentiellement sur l’or à un système monétaire reposant essentiellement sur l’argent (de même que le renversement de la tendance majeure des trafics représente, en gros, un passage de la monnaie-argent à la monnaie-cuivre, de l’étalon argent à l’étalon cuivre), ces quelques considérations justifieront plus encore la grande cassure chronologique que nous proposions : elle correspond presque à une rupture de structures.
40 Cf. t. VI1, tables 139, p. 337 et 143, p. 341 et t. VII, p. 4547.
41 Cf. t. VI1, table 139, p. 337 et t. VII, p. 45.
42 Cf. t. VI1, table 143, p. 341 et t. VII, p. 47.
43 Cf. t. VII, p. 50-51.
44 E.J. Hamilton, 1501-1650, op. cil, p. 216.
45 Le lecteur pressé ou, à l’avance, convaincu, pourra en faire l’économie et reprendre, sans inconvénient, cette lecture au début du chapitre premier
46 On peut substituer, par exemple, pour la commodité de la construction graphique, au moment des tâtonnements préliminaires, à la construction courante en tuyaux d’orgue, une construction en points. Le chiffre de la demi-décade est représenté sur l’échelle arithmétique des ordonnées non plus par un tiret de la largeur choisie pour représenter la demi décade sur l’échelle arithmétique des abcisses, mais par un simple point. Le fragment de droite réunissant le point d’une demi-décade à une autre demi-décade figure alors le mouvement d’expansion ou de contraction qu’implique le passage d’un chiffre à un autre.
47 Huguette et Pierre Chaunu, A la recherche des fluctuations cycliques dans l’économie des xvie et xviie siècles. Crise de tonnage, crise de fret, dans Hommage à Lucien Febvre, Éventail de l’histoire vivante, tome II, p. 389-407.
48 Il est inutile d’aller plus avant dans la démonstration ; quiconque désirerait pousser la vérification, pourrait le faire en s’appuyant sur les tables et graphiques des tomes VI et VII.
49 Un définitif provisoire, comme tout définitif, en matière scientifique, celui, simplement, sur lequel nous nous sommes arrêté, au terme, provisoire, lui aussi, de ces démarches.
50 Il convient de faire, pour les retours, la constatation que nous faisions, précédemment déjà, pour les allers, le renversement de la tendance, de A1 en B1, se marque par une élimination de la fluctuation très courte au profit d’un cycle, ici, parfaitement décennal.
51 Cf. t. VII, p. 4445.
52 Cf. t. VII, p. 54-55.
53 Cf. t. VII, p. 54-55. Pour des raisons d’économie et pour ne pas alourdir, démesurément, notre Atlas qui valait par la concision, nous avons dû renoncer à publier toutes nos « études graphiques », (cf. t. VII, p. 11). Elles sont facilement reconstituables par quiconque désirerait en faire l’épreuve.
54 Cette première démonstration s’adressait, dans notre esprit, à l’historien humaniste, méfiant à l’égard de la transposition dans un lointain passé des fluctuations unanimement admises pour les économies occidentales des xviiie, xixe et xxe siècles. Depuis la rédaction de ces pages, les rangs des sceptiques se sont éclaircis. C’est à leurs scrupules respectables, toutefois, que nous avons songé, c’est la raison pour laquelle nous avons renoncé, dans cet exposé introductif, à toute espèce de calculs, même les plus élémentaires — les seuls auxquels nous ayons eu recours — c’est pourquoi, dans cette démonstration préalable, destinée à lever les méfiances préalables, nous avons voulu écarter un procédé, même aussi simple, que les pourcentages d’écart à la moyenne (t. VI2, p. 36-38 et tables 159-164, p. 356-363 ; t. VII, p. 52-53). Puisque la naïve réalité de la fluctuation cyclique dans le premier Atlantique transversal sans passé, matrice d’une première économie monde, n’a cure d’artifice. Elle s’imposera, toute seule, à l’évidence de ceux-là même qui seraient les plus inutilement prévenus contre elle.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Meurtre au palais épiscopal
Histoire et mémoire d'un crime d'ecclésiastique dans le Nordeste brésilien (de 1957 au début du XXIe siècle)
Richard Marin
2010
Les collégiens des favelas
Vie de quartier et quotidien scolaire à Rio de Janeiro
Christophe Brochier
2009
Centres de villes durables en Amérique latine : exorciser les précarités ?
Mexico - Mérida (Yucatàn) - São Paulo - Recife - Buenos Aires
Hélène Rivière d’Arc (dir.) Claudie Duport (trad.)
2009
Un géographe français en Amérique latine
Quarante ans de souvenirs et de réflexions
Claude Bataillon
2008
Alena-Mercosur : enjeux et limites de l'intégration américaine
Alain Musset et Victor M. Soria (dir.)
2001
Eaux et réseaux
Les défis de la mondialisation
Graciela Schneier-Madanes et Bernard de Gouvello (dir.)
2003
Les territoires de l’État-nation en Amérique latine
Marie-France Prévôt Schapira et Hélène Rivière d’Arc (dir.)
2001
Brésil : un système agro-alimentaire en transition
Roseli Rocha Dos Santos et Raúl H. Green (dir.)
1993
Innovations technologiques et mutations industrielles en Amérique latine
Argentine, Brésil, Mexique, Venezuela
Hubert Drouvot, Marc Humbert, Julio Cesar Neffa et al. (dir.)
1992