Vénézuéla : travailleurs et villes du pétrole
|Première partie. Le groupe des travailleurs du pétrole. Essai de définition
Chapitre I. La formation du groupe des pétroliers : les migrations humaines
Texte intégral
1Les activités pétrolières ont attiré au Vénézuéla des milliers d’étrangers et mis en mouvement, à l’intérieur même de la nation, des centaines de milliers de personnes. Ces déplacements spontanés ont dangereusement affaibli certaines régions et densément peuplé des plaines presque vides d’hommes en y faisant apparaître des paysages tout nouveaux que la seconde partie essaiera de définir.
2Ces mouvements ont eu pour effet de fournir une masse importante de main-d’œuvre aux compagnies : les pétroliers, pour la plupart, sont des déracinés. En éloignant ces hommes de leur pays, souvent de leur famille et en mêlant ces contingents d’origines diverses, les migrations ont constitué une masse assez amorphe, perdant ses traditions et ouverte à toute influence nouvelle. Le haut niveau de vie, les techniques très particulières de l’exploitation du pétrole, l’action matérielle et morale des compagnies ont alors marqué cette pâte que leur avaient préparée les migrations en lui donnant l’empreinte définitive. Ainsi, les mouvements de population n’ont pas eu seulement, dans la formation du groupe des pétroliers, des effets quantitatifs, mais aussi qualitatifs, c’est dire leur importance.
3Leur étude trouve cependant plusieurs obstacles. Elle doit être dynamique, puisqu’il s’agit de suivre divers contingents humains dans leur évolution chronologique et leurs déplacements dans l’espace ; la clarté de l’exposé oblige à séparer ces éléments au risque de devoir répéter la même idée dans deux paragraphes distincts. Plus grave est l’infidélité des sources.
4Il est intéressant d’interroger les pétroliers sur l’évolution des mouvements de population ; leurs réponses, fort semblables, tiennent moins compte de l’importance numérique d’un contingent que de son influence sociale. Ainsi, tous citent les Margariteños et les Andins qui accaparent en effet les postes de commande dans les compagnies pétrolières et le commerce, bien qu’ils ne soient pas les plus nombreux. L’enquêteur dispose là d’un moyen de nuancer la sécheresse des chiffres officiels. Ces réponses, éminemment subjectives, sont évidemment sujettes à caution. Leur principale faiblesse est due à une sorte de sclérose de l’esprit humain : on continue à répéter que le contingent le plus nombreux est celui des Margaritefios, alors que c’était vrai il y a trente ans mais ne l’est plus aujourd’hui. Les réponses en somme sont valables mais vieillies, ce qui leur donne un bien plus grand intérêt car elles témoignent qu’à la période initiale où les travailleurs étaient tous plus ou moins des déracinés, a succédé une période de stabilité. Le groupe des pétroliers est devenu assez homogène et assez cohérent pour ne plus remarquer la venue de contingents du Falcon, bien plus nombreux pourtant que les précédents.
5Il reste que les principales sources sont les recensements dont la valeur est très inégale. Ceux qui ont été faits avant 1936 présentent de graves erreurs au point qu’il convient dans certains cas (1920) de majorer les chiffres de 20 % ! De plus, certains documents sont introuvables, malgré l’extrême amabilité des services du Censo. Pour des états comme l’Anzoategui, les mouvements de populations sont cités d’une façon trop imprécise pour être utilisable et le commentaire contredit parfois les chiffres cités.
6La dernière difficulté, enfin, vient de ce que le Censo n’indique que les mouvements globaux, sans distinguer ce qu’a provoqué le pétrole et ce qui est dû aux autres formes d’activité industrielle ou à l’agriculture. En fait, cela est heureux, car il est impossible de distinguer exactement les mouvements dûs au seul pétrole. Bien des paysans venus dans les champs pétrolifères n’ont pu trouver d’embauche, ou bien ont été licenciés lorsque les crises provoquaient une contraction de la main-d’œuvre. D’autre part, chaque poste de travail offert fait venir non seulement un ouvrier pour l’occuper, mais aussi sa famille, des commerçants, des parasites ; on peut estimer que chaque nouvelle place offerte attire entre quinze et vingt personnes. Enfin, les mouvements ruraux eux-mêmes s’expliquent souvent par l’ébranlement des traditions et des coutumes que provoque l’apparition, assez loin parfois, de nouvelles exploitations industrielles.
7Pour tenir compte de toutes ces difficultés, l’étude se fera sur trois plans différents. Elle tentera d’abord de donner une image globale des mouvements à l’échelle de la nation ; elle s’intéressera ensuite aux divers états ayant participé aux mouvements humains, puis, à l’intérieur des deux principaux états pétroliers, elle s’attachera aux transformations de l’équilibre régional.
1 - ETUDE HISTORIQUE DES MIGRATIONS PETROLIERES
8L’importance de ces mouvements se résume en quelques chiffres : de 1873 à 1950, le Zulia a vu sa population décupler. Si cet état s’était développé au même rythme que la nation, les 117 500 habitants qu’il comptait en 1920 auraient dû devenir 356 300 en 1961. Si l’on prend pour référence l’année 1873, (59 235 habitants), la population extrapolée pour 1961 devrait être du même ordre, soit de 257 200. En somme, le seul accroissement végétatif (on peut négliger ici l’immigration étrangère) donne au Zulia environ 300 000 habitants en 1961, alors qu’il en comptait cette année-là 919 800. La différence, soit près de 600 000 personnes, les deux-tiers de l’état, s’explique directement ou indirectement par les mouvements de population. Il en va de même, à une échelle moindre, dans les autres états intéressés par l’activité pétrolière : Anzoategui, Monagas et Falcon. Ces mouvements ont une histoire compliquée qui explique aujourd’hui la distribution d’une bonne partie de la population vénézuélienne. L’ouverture ou la fermeture des puits provoquèrent la naissance ou la disparition des courants de migration, leur renversement parfois.
a. Les états pétroliers avant le pétrole
9A l’époque de la 1ère Guerre Mondiale, les états des Llanos et en particulier, les futurs états pétrolifères de l’Anzoategui et du Monagas, sont en crise. L’élevage des Llanos, l’une des principales ressources du Vénézuéla au XIXe siècle, est en plein déclin. Le paludisme sévit si gravement que les hommes quittent les plaines centrales du Monagas. Cet état voit sa population tomber de 74 503 habitants en 1891 à 64 421 en 1920. Même si l’on doute de ce dernier chiffre, avec quelques raisons, on le verra, il n’en reste pas moins qu’en 1910, 40 % des décès de l’état étaient dus au paludisme. Quant au cœur de l’Anzoategui, il n’était guère peuplé que de tribus indiennes mal fixées.
10Le Zulia, sans connaître une crise aussi profonde, souffrait gravement de l’isolement. Deux voies seulement permettaient d’y accéder aisément, l’une par terre, venant du Trujillo, l’autre par mer. Cela explique que le gros des Zulianos quittant leur pays soient partis vers Trujillo et que, dès avant 1920, de nombreux habitants des îles de Margarita soient venus travailler dans les salines. Un petit courant d’immigration venait aussi du Falcon. Au total, le bilan des mouvements humains devait être équilibré, mais des transformations commençaient déjà à se faire sentir : aux environs de 1920, les Zulianos partent beaucoup moins vers le Trujillo et davantage vers le Distrito Federal, preuve que l’influence de Caracas commençait à pénétrer dans cet état excentrique. D’autre part, le Zulia gagnait des places dans l’Union, passant de la 16e place, par la population, en 1881, à la 8e en 1920, grâce sans doute au recul des Llanos. C’est donc dans un état sain, à la démographie équilibrée, que l’essor pétrolier va brusquement éclater.
11Le Falcon était alors l’un des états les plus peuplés de l’Occident vénézuélien. Les Censos lui attribuent 139 000 habitants en 1891 et 128 000 en 1920. Ce dernier est certainement fort inférieur à la réalité. Il est bien plus probable que la population a lentement grandi, dans les deux premières décades du XXe siècle, car les épidémies y étaient moins fréquentes que dans le reste de la nation et les discordes civiles qui l’avaient beaucoup agitée, à peu près terminées. Il existait alors un léger courant d’émigration vers le Lara ; les mouvements vers le Zulia étaient négligeables.
12En 1922, un jaillissement formidable d’huile de pétrole dans le Zulia marquait le début d’une ère nouvelle. La situation démographique de ces divers états allait être bouleversée de fond en comble (cf. figure 1).
b. La première période : 1920-1926
(par an) |
Zulia |
Monagas |
Falcon |
Habitants nés dans l’état |
+ 11 550 |
+ 150 |
+ 8 400 |
Habitants nés dans d’autres états |
1 900 |
670 |
0 ? |
Habitants nés à l’étranger |
1 000 |
33 |
0 ? |
Habitants de l’état partis vers d’autres états |
500 |
- 670 |
- 4 800 ? |
Bilan des mouvements |
+ 2 400 |
+ 33 |
- 800 ? |
13Le tableau ci-dessus a été établi en soustrayant les chiffres du Censo de 1920 de ceux qui leur correspondent dans le Censo de 1926 et en les ramenant tous à l’intervalle d’une année. Ces données n’ont qu’une valeur approximative car les Censos sont inexacts ; il a même fallu parfois estimer, par comparaison avec les périodes voisines certains chiffres faisant défaut. Cependant, on obtient ainsi une image aussi fidèle que possible de la réalité, et d’autant plus estimable qu’à partir de 1936, les Censos deviennent dignes de foi. Ce n’était pas encore le cas en 1920. Le tableau indique, pour le Zulia, un accroissement brut (nés dans l’état) de 9,55 % par an, ce qui est absurde. Il est certain que le chiffre de 1920 est trop faible.
14Il n’en est pas moins vrai que le Zulia a fait un bond énorme en quelques années, dû au grand essor pétrolier après 1922 (cf. figure 2). Cas absolument exceptionnel, cet état passe au 1er rang de la nation, avant le Distrito Federal, iors du recensement de 1926. Il est notable, aussi, qu’un petit courant existe alors, pendant peu de temps il est vrai, du Distrito Federal vers le Zulia. D disparaîtra bientôt et ces deux centres de l’Union ne connaîtront jamais de grands échanges démographiques : le pétrole a évité au Zulia cette épuisante ponction que Caracas a fait subir à tous les autres états vénézuéliens. Dès ce moment, le bassin de Maracaibo attire les voisins, les gens du Falcon commencent à arriver ;le courant venant de la Margarita s’enfle fortement, car la Creole, ou plutôt la Lago Petroleum C°, a besoin de ces pêcheurs pour pratiquer les premiers forages sous les eaux du lac : le courant du Trujillo, enfin, s’inverse et cet état, le seul aisément accessible par terre, devient alors une région de départ.
15Dans le Monagas, le pétrole a été découvert à Quiriquire en 1924, mais la production est encore faible et ses effets démographiques sont largement contrebalancés par l’action du paludisme : le Município Punceres (Quiriquire) voit sa population tomber de 5 000 habitants en 1891 à 2 100 en 1926. Aussi bien, le bilan des mouvements est encore à peu près nul.
16Des puits ont été mis en exploitation dans le Falcon en 1922, mais ils sont excentriques, leur production est faible et l’état commence à envoyer des hommes dans le Zulia. Le taux apparent d’accroissement végétatif est faible pour une région vénézuélienne (2,4 %) ce qui décèle une émigration importante, très importante même si le chiffre de 1920 est sous-évalué, comme il est probable.
17Dès 1926, les principales caractéristiques démographiques de l’Occident vénézuélien sont fixées : le Zulia progresse puissamment et régulièrement, le Falcon lui servant de réservoir d’hommes. La capitale fédérale reste à l’écart.
c. La période 1926-1936
(par an) |
Zulia |
Monagas |
Falcon |
+ 4 770 |
+ 1 860 |
+ 4 600 |
|
+ 2 400 |
+ 600 |
+ 470 |
|
- 50 |
- 60 |
- 50 |
|
- 400 |
- 130 |
- 1 300 |
|
+ 1 950 |
+ 530 |
780 |
18Si cette période confirme définitivement l’écrasante supériorité de la production du Zulia (82,5 % du total national en 1936), elle n’est pas marquée par un essor démographique comparable. Le bilan annuel est plus faible que pendant la période précédente (cf. figure 3). L’analyse du tableau ci-dessus montre que le mouvement interne ne s’est pas tari, mais au contraire, a augmenté : 2 400 nouveaux venus au lieu de 1 900. Les Zulianos ne sont pas partis vers d’autres états en nombre plus grand. La différence provient du départ de nombreux étrangers (cf. figure 3) abandonnant des champs désormais équipés pour aller commencer l’exploitation d’autres régions.
19L’essor que connaît alors le pétrole du Monagas confirme cette interprétation. De 1930 à 1931, la production de cet état bondit de 170 000 m3 à 500 000 m3 et il devient bientôt le second producteur vénézuélien (15 % de la production en 1936). Les régions intéressées progressent : le Município Punceres atteint 5 000 habitants en 1936. Mais ce développement est encore assez lent et n’a rien de comparable à celui du Zulia.
20Le Falcon a connu lui aussi son boom pétrolier, mais il a été beaucoup trop bref pour modifier le régime démographique. En 1930, cet état est le second producteur de l’Union, sa production atteint un maximum en 1933 puis décline rapidement et se trouve bientôt dépassée par celle du Monagas. Ce bref essor explique la venue d’un petit contingent d’étrangers, probablement partis du Zulia, mais celui-ci continue à attirer des Falconianos, en nombre trente fois plus grand.
d. Les débuts de la IIe Guerre mondiale (1936-1941)
(par an) |
Zulia |
Monagas |
Falcon |
Anzoategui |
+ 8 080 |
+ 3 300 |
+ 3 300 |
+ 1 300 |
|
+ 6 000 |
+ 2 600 |
+ 300 |
+ 3 520 |
|
- 20 |
+ 40 |
0 |
+ 330 |
|
- 900 |
- 940 |
- 3 700 |
- 1 140 |
|
+ 5 080 |
+ 1 700 |
-3 500 |
+ 2 600 |
21Après dix années à peu près calmes pendant lesquelles les mouvements commencés précédemment se sont poursuivis sans grand changement, la période 1936-1941 est marquée par deux évènements graves qui vont modifier le sens et le volume des courants migratoires. Le conflit mondial renvoie nombre d’étrangers dans leur patrie et entraîne un développement considérable de la production de pétrole, par conséquent des mouvements humains. Les victoires des sous-marins de l’Axe pendant l’année 1941 provoquent un à-coup dans cet essor : les expéditions de pétrole, donc la production, baissent soudain, pour reprendre de plus belle dès que les alliés contrôlent de nouveau les mers. D’autre part, une nouvelle région entre en scène : l’Anzoategui produit de l’huile à partir de 1937 et progresse si vite qu’il devient en 1941 le second producteur, à égalité avec le Monagas.
22Pour toutes ces raisons, les mouvements migratoires, pendant cette période, atteignent une remarquable intensité. Il n’est pas exagéré d’estimer à 1 000 ou 1 500 par mois le nombre des Vénézuéliens qui, à cette époque, quittent leur domicile pour aller vers une région pétrolière. Le taux annuel de croissance du Zulia est alors de 4,7 %, celui de l’Anzoategui, qui commence à devenir une région d’arrivée, de 3,64 %, celui du Monagas, enfin, qui fait preuve alors d’un dynamisme démographique exceptionnel, de 5,82 % : tous ces chiffres montrent bien l’effet des migrations puisque le taux annuel national est alors d’environ 3 % et que ceux des états ne devraient guère s’en écarter.
e. La période 1941-1950
(par an) |
Zulia |
Monagas |
Falcon |
Anzoategui |
+ 15 550 |
+ 3 900 |
+ 2 000 |
+ 5 500 |
|
+ 6 800 |
+ 1 900 |
+ 480 |
+ 3 530 |
|
+ 1 550 |
+ 120 |
+ 400 |
+ 590 |
|
- 1 220 |
- 1 500 |
- 2 800 |
- 1 370 |
|
+ 7 130 |
+ 520 |
- 1 920 |
+ 2 750 |
23Après les bouleversements dus au conflit mondial, cette longue période de neuf années va augmenter les divergences entre les régimes démographiques des états et fonder la prépondérance du Zulia.
24Celui-ci absorbe un courant migratoire considérable : plus de 7 000 personnes par an. Le rôle de l’exploitation pétrolière est aisément prouvé par les progrès de la capitale elle-même : de 1941 à 1950, Maracaïbo grandit au rythme étonnant de 7,7 % par an : dans le même laps de temps, les puits forés à quelques kilomètres autour de la ville voient leur production bondir de 1,6 millions de barils par an à 61,7 millions de barils. Encore, la ville de Maracaïbo a-t-elle des activités suffisamment variées 18 pour que les conséquences démographiques de cet essor pétrolier aient été fortement atténuées ; l’effet doit être, à fortiori, plus grand dans une région où le pétrole est la seule source d’activité.
25Cependant que le courant migratoire prend de l’importance, la part relative des nouveaux immigrés dans la population du Zulia reste assez faible (cf. figure 4). En 1950, cinq états comptent proportionnellement plus de nouveaux arrivés que le Zulia :
Distrito Federal |
42,5 % |
Portuguesa |
34,1 % |
Aragua |
27,4 % |
Monagas |
25 % |
Anzoategui |
23,7 % |
26de la population totale.
27Auprès de ces chiffres, le taux du Zulia (22,9 %) paraît assez bas. Cela s’explique aisément par les progrès mêmes de l’état, dont la population est devenue si nombreuse que les courants migratoires, malgré leur importance, ne la modifient plus beaucoup. Sur le plan humain, c’est à ce moment que les Zulianos, en particulier dans les agglomérations pétrolières si hétérogènes jusqu’alors, commencent à prendre conscience de leur originalité, à se créer de nouvelles traditions et à oublier leurs origines si différentes : le groupe humain des pétroliers commence à apparaître.
28Le taux de développement du Zulia (5,53 % par an), presque le double du taux végétatif, s’explique avant tout par les pertes du Falcon qui continue à servir de réservoir d’hommes à son trop puissant voisin. Le tableau ci-dessus présente une anomalie : il arrive chaque année presque autant d’étrangers que de Vénézuéliens. Cela s’explique par l’installation de la Mene Grande à Punto-Fijo dès 1946 et surtout par la construction d’un oléoduc joignant, à partir de 1948, les champs du Distrito Bolivar à la péninsule de Paraguana. Les étrangers viennent diriger ces nouvelles installations et le Falcon, où les recherches de pétrole tournaient court, est en train de devenir le principal centre d’embarquement. Aussi bien, la cadence des départs commence à se ralentir.
29La production d’huile du Monagas a décliné brusquement à partir de 1947, le taux de croissance démographique aussi : il n’est plus, pour cette longue période, que de 4,06 % par an, se rapprochant du taux végétatif. La cadence des départs augmente : le boom pétrolier est terminé dans cet état qui ne produit plus, en 1950, que 9,2 % du pétrole de l’Union.
30Au contraire, l’Anzoategui est alors en plein essor : il est le second producteur en 1950 (15,9 % de l’Union) et l’appel de population est intense. Les nouveaux arrivés sont presque aussi nombreux que l’excédent de la population locale, ce qui est rare (3 530 nouveaux arrivés par an contre 5 500 personnes nées sur place). Du coup, cet état, qui était une zone de départ en 1936 (cf. figure 4) devient une région d’arrivée importante. L’évolution de leur production en sens contraire, inverse les courants migratoires qui existaient entre le Monagas et l’Anzoategui : en 1936, 1200 habitants du Monagas vivaient dans l’Anzoategui, et 3000 natifs de cet état, dans le Monagas ; en 1950, au contraire, si l’on trouve 5 000 natifs de l’Anzoategui dans le Monagas, 9 000 habitants de cet état ont été attirés par le voisin. Ce renversement caractéristique des courants montre combien ils sont sensibles aux variations de la production pétrolière, et, plus profondément, combien cette population est bien peu enracinée : son extrême mobilité constitue sans doute l’un des plus graves problèmes humains du Vénézuéla.
f. Les dernières années : 1950-1961
31Paradoxalement, cette période est une des plus mal connues, car les résultats du recensement de 1961 sont publiés très lentement. En plus des résultats globaux, qui ne donnent guère de renseignement sur les mouvements migratoires, l’auteur ne disposait, au milieu de 1965, que du premier volume des statistiques détaillées consacrées à l’état du Zulia, le plus important heureusement. La population de cet état a grandi à la même cadence que pendant la décade précédente, mais les composantes de cet accroissement ont connu des changements notables :
- nés dans le Zulia |
+ 24 300 par an |
- nés dans d’autres états |
5 050 |
- nés à l’étranger |
3 510 |
- partis vers d’autres états |
? |
- Bilan des mouvements |
+ 8 560 ? |
32Comme le Censo est muet sur le volume des sorties, le bilan des mouvements est approximatif. De toute façon, la régularité avec laquelle le Zulia aspire les populations voisines est une fois de plus confirmée. L’importance du contingent étranger mérite d’être soulignée : il faut y voir l’effet à la fois de la large politique d’immigration du général Pérez Jiménez et de l’essor de la production pétrolière lors de la crise de Suez. Plus remarquable encore est la relative faiblesse du courant purement vénézuélien : les figures 3 et 4 l’illustrent clairement. Le Zulia est devenu assez peuplé pour que l’accroissement végétatif passe au premier plan et que les migrations ne jouent plus qu’un rôle secondaire dont l’importance ira en diminuant. Pendant la décade 1950-60, le Zulia est devenu une région démographiquement indépendante connaissant, mutatis mutandis, la même transformation que les Etats-Unis dans les années 1930. Cela correspond, sur le plan moral, à l’apparition d’un chauvinisme régional et à la prise de conscience, par les travailleurs du pétrole, de leur originalité. Les pétroliers du Zulia apparaissent alors comme un groupe humain homogène.
33Auprès de ce phénomène capital, les mouvements migratoires intéressant les autres états pétroliers sont secondaires. Le Falcon croît un peu plus vite, grâce sans doute au développement des raffineries de Punto-Fijo. Le taux d’accroissement annuel reste pourtant bien inférieur au taux national (2,71 % contre 3,99 %). La production du Monagas continue à décliner, les mouvements de population également : le taux n’est plus que de 3,35 %, proche du taux végétatif ; le bilan des mouvements doit être à peu près nul. Il est probable qu’un courant assez fort existe du Monagas vers l’Anzoategui qui continue à se développer rapidement : le taux y est de 4,55 %.
34On ne dispose d’aucun renseignement numérique sur les mouvements qui ont pu se produire depuis 1961. Il est probable que l’essor du Zulia s’est poursuivi, que le courant migratoire a tenu encore moins de place dans ce progrès démographique, mais que le flux en provenance du Falcon n’a certainement pas diminué de volume. Le bilan des migrations intéressant le Monagas a dû rester à peu près nul et l’essor de l’Anzoategui a été certainement interrompu. Peut-être même, les mouvements ont-ils complètement changé, car le développement de la sidérurgie du Bolivar semble, depuis 1960, avoir attiré un grand nombre d’habitants des deux états pétroliers de l’Oriente.
Conclusion
35L’exploitation pétrolière a mis en mouvement des centaines de milliers de personnes et a transformé complètement la situation démographique des années 1920. Même lorsque ces mouvements ont été brefs, ils ont donné un grand avantage aux états pétroliers. La figure 5 indique, pour chacune des trois périodes 1936-41, 1941-50et 1950-61, le rapport du taux d’accroissement annuel d’un état au taux national. Elle permet de reconnaître aisément les états qui sont en retard ou en avance sur les autres.
36Cela conduit à distinguer trois types d’état pétrolier. Viennent d’abord ceux qui ont connu un essor soudain mais bref, comme le Monagas et sans doute l’Anzoategui. Ils ont ainsi évité la grande crise des états agricoles et l’attraction ruineuse de Caracas, mais on peut imaginer les conséquences humaines de ces violents à-coups démographiques. Puis le Zulia dont le développement étonne par sa puissance et sa régularité. Les migrations ont fait de cet état jadis secondaire et excentrique le deuxième centre humain de l’Union. Enfin, le perdant, le Falcon, exemple de toutes les malchances. Les essais de production ont tourné court ; l’installation de puissantes raffineries a appelé à Punto-Fijo une vague humaine, puis l’a laissée sans travail une fois les usines mises en marche ; enfin, la proximité du Zulia a attiré les paysans que la crise agricole et le climat trop sec chassaient de leurs terres. Tout a donc contribué à l’étonnant déclin de cet état.
37Il est tentant d’essayer d’établir un rapport entre la quantité de pétrole produit et la population d’une région. La figure 6 montre que ce rapport existe et la convergence des résultats pour les districts pétroliers du Zulia et ceux de l’Anzoategui est convaincante. Le rapport varie lentement en fonction du temps, de 1,5 à 1,2 habitants pour 1 000 barils par an. Cela s’explique par la diversification progressive des activités, même dans les districts où le pétrole joue un grand rôle. Il est aussi une autre explication, redoutable pour l’avenir de ces régions productrices, c’est qu’un bassin une fois équipé, a besoin de moins de main-d’œuvre. En d’autres termes, il apparaît au bout d’un certain temps, une discontinuité entre l’essor démographique et l’essor de la production, qui pose tout le problème de la reconversion des agglomérations pétrolières.
II - LES CONTINGENTS MIS EN MOUVEMENT
38Les centaines de milliers de personnes accourues vers les champs de pétrole pour obtenir leur part de cette manne providentielle sont moins différentes qu’elles ne le paraissent. Chaque contingent a ses traditions et aussi sa réputation, bonne ou mauvaise. Toutes subjectives que soient ces indications, le géographe doit en tenir compte et leur reconnaître une certaine valeur. Il dispose également de renseignements numériques - sex ratio et classes d’âge - dont l’analyse est instructive.
a. Evolution de la Sex Ratio
39La figure 7 représente l’évolution de la sex ratio dans les principaux contingents venus s’installer dans le Zulia. La décroissance régulière de ce rapport est normale : les hommes arrivent d’abord pour chercher du travail, puis font venir les femmes.
40Une analyse plus détaillée permet cependant de distinguer trois phases. En 1926, la proportion de deux ou même trois hommes pour une femme (contingent du Lara) caractérise une époque pionnière ; l’équilibre est alors rétabli par la prostitution, avec ce qu’elle implique de désordre social. Entre 1936 et 1950, les contingents se rapprochent de la normale : les femmes arrivent à leur tour. C’est le moment, on l’a vu plus haut, où la population du Zulia devient à peu près homogène. Entre 1950 et 1961, le mouvement continue au point que la sex ratio de certains contingents tombe entre 44 % et 45 %. L’explication est sans doute à chercher dans l’arrivée de familles entières avec les ascendants parmi lesquels les femmes sont toujours plus nombreuses. Cela est confirmé par le fait qu’il s’agit d’états andins, Trujillo et Mérida, où les familles ont toujours fait preuve d’une grande cohésion. Ainsi, il y a eu une nette transformation des types de mouvements : d’abord, des migrations où l’attraction du pétrole joue le rôle principal ; puis, dans la dernière décade, une véritable fuite par familles entières, devant la misère et les tristes conditions de vie des campagnes andines.
41La figure 7 montre aussi deux grandes exceptions à l’évolution générale. Le contingent provenant de l’étranger est très en retard sur les autres, ce qui se comprend aisément : il en reste à la phase pionnière et n’atteindra sans doute jamais la phase familiale. Par contre, la sex ratio des Margaritenos suit la même évolution, ce qui pose un problème.

Fig. 7 - Evolution de la sex-ratio des divers contingents d’immigrants venus s’installer dans le Zulia (rapport du nombre d’hommes au nombre total)
42L’évolution de chaque sexe à l’intérieur des contingents venus du Vénézuéla apparaît sur la figure 8. D’une façon générale, les courbes des hommes et des femmes sont légèrement convergentes, surtout à partir de 1941, ce qui confirme cette reconstitution des familles indiquée plus haut. Il y a presque toujours plus d’hommes que de femmes : la phase pionnière est seulement en train de disparaître. Deux états font exception : la Nouvelle-Esparta, dont le contingent ne s’accroît guère, et où les femmes restent bien peu nombreuses. Le contingent du Tachira, cas unique, est à majorité féminine, sans doute parce que cet état est la porte de l’immigration colombienne ; déjà fort peuplé, il accueille difficilement les Colombiens chassés par la misère et après une étape, ceux-ci repartent vers le pétrole. Comme il s’agit d’immigrants pauvres, sans aucune qualification et déjà complètement déracinés, on conçoit que les femmes soient aussi mobiles que les hommes. Au reste, l’expérience montre qu’une très forte proportion des prostituées du Zulia sont Colombiennes ou natives du Tachira.
43La figure 9 permet d’analyser de la même manière les contingents d’origine étrangère. La IIe guerre mondiale, puis la politique de Pérez Jiménez expliquent le déclin de 1941, puis le bond de 1950, notable surtout chez les Italiens. Les courbes des deux sexes sont ici à peu près parallèles ; on ne retrouve pas cette tendance à la reconstitution des familles signalée pour les contingents vénézuéliens. Le contingent des Etats-Unis rejoint rapidement celui de la Grande-Bretagne, effet des progrès rapides de la Creole en face de la Shell. Le groupe des Colombiens fait exception, car les femmes y ont été longtemps plus nombreuses que les hommes ; il semble que ce déséquilibre ait réapparu pendant la dernière décade. L’explication donnée plus haut pour le Tachira vaut également ici.
44Il fallait s’attendre à retrouver dans ces migrations pétrolières un plus grand nombre d’hommes que de femmes. Mais l’analyse montre aussi une grande complexité de détail. Le mouvement pionnier des années 1920-30 a fait place à un déplacement généralisé de familles complètes déracinées par le contraste entre leurs tâches quotidiennes et la vie urbaine moderne. Ce n’est plus seulement l’attrait économique des activités pétrolières qui en est responsable, mais plus encore leurs effets psychologiques. D’autre part, certains contingents, comme celui de la Nueva Esparta, entre autres, ont un comportement curieusement original.
b. La répartition des contingents selon les classes d’âge
45Les divers contingents venus s’installer dans le Zulia en 1936 et en 1961 ont été reportés sur le graphique de la figure 10 selon l’importance des trois groupes d’âge : jeunes (moins de quinze ans), adultes (de 15 à 50 ans) et vieillards (au-delà de 50 ans). En 25 ans, l’ensemble a évolué selon un axe qui marque une forte diminution relative des adultes, une faible augmentation de la proportion de vieillards et surtout un progrès considérable des “jeunes”. Comme il ne s’agit que des personnes nées hors du Zulia, cela confirme de nouveau le changement de l’immigration, qui touche désormais des familles entières se déplaçant au complet.
46Certaines évolutions sont aberrantes. Le contingent venu de l’étranger, et à un moindre degré, celui du Distrito Federal restent à l’arrière du mouvement : leur immigration est encore bien peu familiale. Au contraire, ce sont des familles constituées qui arrivent du Falcon et aussi des états andins (Mérida et Trujillo). La Nueva-Esparta a évolué dans une direction nettement différente, oblique par rapport à l’axe général : le pourcentage des “vieillards” a augmenté davantage et celui des jeunes beaucoup moins que dans les autres contingents. Cela prouve que les Margaritenos ont fondé des familles sur place (les enfants nés dans le Zulia n’apparaissent pas sur le graphique) et ont fait venir leurs parents : mélange curieux de solidité familiale et de rupture avec le lieu de naissance.
c. Les types de contingent
47La répartition des immigrants selon le sexe et l’âge a montré que si les lois communes à ces mouvements étaient respectées, certaines exceptions réclamaient des explications particulières. De plus, il semble s’être introduit de plus en plus de différences entre les courants humains. Les hommes, au début de l’ère du pétrole, étaient attirés par le travail offert et les premières différenciations étaient le fait des moyens de transport : d’où la prédominance initiale des gens de la Nueva-Esparta, venus par mer et du Trujillo, le seul état aisément relié par terre avec le Zulia. Depuis la IIe guerre mondiale, les voies de transport sont devenues trop également commodes pour introduire des différences. Le mouvement se fait aujourd’hui par familles entières et reflète beaucoup mieux la conjoncture économique et sociale des régions de départ.
48Le premier type de mouvement est celui qui affecte des régions rurales densément peuplées, en grave crise économique et morale. C’est le cas du Falcon, du Sucre et, à un moindre degré, du Trujillo. La politique de développement des latifundia et de concentration des terres, qui a sévi dans ces régions de la fin du XIXe siècle jusqu’au premier conflit mondial, a chassé des campagnes nombre de paysans. L’intervention de l’Etat, techniquement justifiée, n’a pas toujours été heureuse ; dans le Falcon, on a lutté avec raison contre les cultures sur brulis mais sans donner aux habitants les moyens de développer des cultures irriguées. Dans le Sucre, les montagnes trop sèches parviennent difficilement à nourrir une population en plein essor qui les ravage. Jusqu’en 1958, la vaste plaine de Guiria, dans la moitié sud de l’état était presque vide d’hommes et occupée par de très vastes haciendas d’élevage, fort peu productives. Depuis cette date et la chute de la dictature, la propriété privée a été moins respectée et des milliers de personnes sont descendues occuper de fait et sans droit ces vastes terres : ce mouvement a coïncidé avec une nette diminution des départs vers les champs pétroliers. Il est vrai que les terres de Guiria ne sont pas mieux cultivées et que là n’est pas la solution. Du moins est-il certain que ce manque de travail dans les campagnes a été le principal facteur qui a jeté les habitants du Sucre et du Falcon sur les routes.
49Cela apparaît dans l’enquête que l’auteur a effectuée à Anaco, ville pétrolière de l’Anzoategui. Afin de déterminer l’origine des habitants, tous immigrés puis qu’Anaco n’existait pas il y a 20 ans, un échantillon a été constitué en relevant, dans le registre des naissances de 1957, le lieu de naissance des parents des nouveaux-nés. Afin de mieux couvrir toute l’étendue du registre, le relevé a été fait une page sur cinq. L’échantillon ainsi établi représente 92 hommes et 160 femmes (la proportion de filles-mères est grande), soit un peu plus de 1 % de la population totale. Certes, il ne concerne que les femmes en âge d’être mères, mais comme il a été indiqué plus haut, la proportion d’adultes dans une ville constituée exclusivement d’immigrants est exceptionnellement forte. Les résultats, reportés sur la figure 11, mènent aux conclusions suivantes.
50Les immigrants nés dans l’Oriente sont généralement d’origine rurale :
-
21,3 % sont nés dans de petits villages (moins de 1 100 habitants)
-
35,8 % sont nés dans de petits bourgs (1 100 - 5 000 habitants)
-
25,5 % sont nés dans de petites villes (5 000 - 11 000 habitants)
-
17,4 % sont nés dans de grandes villes (plus de 11 000 habitants)
51Plus de la moitié (57,1 %) sont venus d’agglomérations rurales de moins de 5 000 habitants. En fait, la plupart des petites villes de moins de 10 000 habitants sont des noyaux ruraux.
52La distance à franchir ne parait guère entrer en ligne de compte, non plus que le tracé des grandes voies de communication (Valle de la Pascua, par exemple, n’a envoyé personne, à l’inverse de Guiria ou de Caïcara, beaucoup moins bien reliées pourtant, à Anaco).
53Les grandes villes et les campagnes disposant d’activités non agricoles ne sont pas des régions de départ : ni la côte très peuplée qui s’étend entre Cumana et Barcelona, ni la région pétrolière d’El Tigre, ni la sidérurgie de San Felix n’ont fourni de contingents importants. Au contraire, le coeur de la Nueva Esparta (la côte vit de la pêche et du tourisme), le nord et l’est du Sucre, les plaines d’élevage de Bergantin ou de Caïcara sont de vrais réservoirs d’hommes.
54Enfin, la carte confirme le caractère familial des départs. Dans le cas de ces hameaux de quelques centaines d’habitants qui envoient 6 ou 8 personnes, il est évident que l’une d’entre elles est venue d’abord courir sa chance et, qu’après avoir trouvé du travail, elle a appelé le reste de sa famille. Il faut noter la régularité et la puissance de ces courants qui amènent par familles entières les gens du Sucre vers l’Anzoategui ou le Monagas, ceux du Falcon ou du Trujillo vers le Zulia. Ces mouvements peuvent s’accroître quand les besoins en main d’œuvre des compagnies pétrolières diminuent, comme c’est le cas depuis 1959, parce que le départ de ces hommes est moins provoqué par l’essor des champs pétrolifères qui les attirent que par le déclin de l’agriculture qui les chasse.
55Il convient de mettre à part le Merida, état densément peuplé malgré des techniques agricoles vieillies. Le retard même dont il souffre l’a partiellement protégé, jusqu’ici, d’un exode rural aussi violent. Certes, sa population a tendance à descendre vers les plaines du Zulia comme vers celles du Portuguesa, mais une bonne partie de ce courant se dirige vers les exploitations agricoles, si bien que cet état contribue beaucoup moins que le Falcon à peupler les champs de pétrole du Distrito Bolivar.
56Un autre type, bien différent, est constitué par les courants d’origine lointaine venus principalement des villes. Dans l’échantillon de la population d’Anaco étudié plus haut, toutes les personnes nées dans le centre et l’ouest du pays viennent de grandes villes (sauf une, native de Bocono, ville des Andes petite mais ancienne). Le Zulia a puisé dans toute la nation, et il n’est pas jusqu’aux lointains territoires de l’Amazone ou du Delta Amacuro qui n’y soient représentés. La capitale joue ici un rôle important : le Censo de 1961 montre que, sauf pour les états contigus, 10 à 20 % des contingents venus dans le Zulia ont fait un séjour à Caracas. Ce rôle est encore plus apparent pour les nouveaux venus qui ont fait des études supérieures ou sont membres des professions libérales :
39 administrateurs publics ou privés sur 102 |
(38 %) |
191 diplômés d’Université sur 656 |
(29 %) |
161 employés de bureau sur 437 |
(37 %) |
57étaient originaires du Distrito Federal.
58Enfin, il faut classer dans un type à part les étrangers, dont la principale caractéristique démographique est de rester très longtemps à la phase pionnière, ce qui montre combien ils se mêlent peu avec la population vénézuélienne.
59On peut, en somme, ramener les divers contingents que le pétrole a mis en mouvement à deux types bien différents. D’une part, des ruraux chassés de leurs campagnes par le déclin d’activités traditionnelles que rien n’est venu remplacer et qui se dirigent vers les secteurs IIe et IIIe, c’est-à-dire vers les régions urbaines. Ce n’est pas particulièrement l’activité pétrolière qui les attire et ils émigrent aussi bien vers les usines textiles de Barquisimeto ou vers Caracas. Les bidonvilles qu’ils viennent construire à La Rosa, près de Cabimas, ressemblent étonnamment, par leur architecture et leur contenu humain, à ceux qui entourent la capitale.
60Un type tout différent est constitué par les cadres, attirés directement ou indirectement par le pétrole et les activités connexes ; ils ont une qualification considérable, viennent d’une grande ville, et trouvent assez aisément une situation. Le premier type est de beaucoup le plus nombreux, le plus misérable, aussi. Malheureusement, les chances que l’activité pétrolière, en 1965, peut lui offrir sont à peu près nulles.
III - LES TRANSFORMATIONS REGIONALES DES ETATS PETROLIERS SOUS L’EFFET DES MIGRATIONS
61Les chapitres précédents ont insisté sur l’histoire, le volume et l’origine des courants migratoires. Il reste à préciser les effets que des mouvements de cette sorte ont pu avoir sur les régions d’arrivée. L’un des principaux est la destruction de l’équilibre démographique établi entre les districts, aggravée encore par les migrations intérieures à l’état. Quarante cinq années d’évolutions démographiques différentes permettent alors de distinguer des types de districts. D’autre part, l’un des effets les plus spectaculaires de ces migrations est la croissance numérique exceptionnelle de quelques régions ou de certaines agglomérations : le pétrole a ses villes-champignons qui méritent de retenir l’attention.
a. L’évolution différente des districts
62Le Zulia est évidemment le meilleur endroit pour étudier ce phénomène. Afin d’éliminer l’influence des courants migratoires venus d’autres états, il est commode de rapporter le taux d’accroissement moyen annuel de chaque district (taux géométrique) au taux moyen annuel du Zulia (cf. tableau). Comme l’on peut admettre que les taux de reproduction bruts des divers districts sont très proches les uns des autres, les rapports calculés de cette manière expriment clairement l’effet des mouvements entre les districts. Les cartons de la figure 12 illustrent ces données. Le dynamisme démographique du Distrito Bolivar est remarquable. Cependant, les figures 13 et 14 montrent que le Bolivar constitue en fait, une exception. Le Baralt, et de moindres producteurs comme le Colon et le Mara, ont une évolution démographique qui ressemble davantage à celle de l’Anzoategui et du Monagas : un essor violent, certes, mais assez bref, interrompu de ralentissements. Il semble que ce soit essentiellement le bond démographique très rapide au début de l’exploitation qui caractérise ces régions pétrolières ; lorsque, au bout de quelques années, la pente de la courbe s’est adoucie, il n’est plus guère possible de la distinguer de celles des autres districts : il est notable que sur la figure 13, représentant la place relative des districts dans le Zulia, la courbe du Baralt, second producteur de pétrole de l’état, et celle du Périja, district purement agricole, soient à peu près parallèles.
63Les districts ruraux, pourvu qu’ils soient éloignés des zones pétrolières, n’en reçoivent guère d’influences. Le Colon, le Périja, le Sucre, n’ont pas subi ces appels ruineux de population dont on parle trop souvent. Au contraire, les activités pétrolières d’autres régions de l’état ne les ont pas empêché de recevoir eux aussi des courants migratoires : le Sucre, au moins jusqu’à la IIe guerre mondiale, a fortement grossi grâce, sans doute, à la descente dans la plaine des paysans andins.
64Ceux qui ont le plus gagné d’habitants sont les districts ayant une fonction industrielle (Bolivar) ou urbaine (Maracaïbo). Celle-ci semble pourtant moins constante dans son action : la croissance de Maracaïbo a subi des à-coups que le Bolivar n’a pas connus. Les perdants sont leurs plus proches voisins : le Miranda où a puisé le Bolivar, le Paez et l’Urdaneta, saignés à blanc par Maracaibo. La très grave situation du Paéz s’explique par la combinaison de plusieurs actions : l’appel de Maracaibo, l’attraction des champs de pétrole en arrière de cette ville et la crise qu’ont connue les Indiens de la Guajira au contact de la civilisation moderne.
b. Les types de districts
65Les figures 15 et 16 répartissent les districts du Zulia et de l’Anzoategui selon l’origine de leur population. Trois types se distinguent aisément. Les districts de départ ont une population née principalement sur place. Son volume relatif mesure la violence des forces migratoires ; dans le cas du Paéz, dont la population est presque exclusivement autochtone, elles ont été très grandes. L’étalement entre Paéz et Urdaneta indique la présence de Zulianos nés dans d’autres districts. La population née hors du Zulia est négligeable.
66Les districts d’arrivée sont de deux genres bien distincts. Les districts pétroliers sont peuplés pour la moitié (Bolivar) ou même les deux-tiers (Baralt) de personnes nées hors du Zulia. Par contre, les Zulianos nés dans d’autres districts y sont, à tout prendre, bien peu nombreux : environ 10 % du total. Au contraire, le district de Maracaïbo est peuplé, pour l’essentiel, de gens du Zulia : c’est là la grande région d’accueil des migrations internes, beaucoup plus que les champs de pétrole. La figure 17 qui représente les courants de migrations internes et externes recensés en 1950 le confirme. Les courants intérieurs à l’état se dirigent essentiellement vers la capitale ; les régions pétrolières attirent surtout les habitants des états voisins.

Fig. 15 - Zulia : classification des districts selon la proportion de population allogène (d’après le Censo de 1950)
67Un type intermédiaire est formé, au milieu du graphique, par les districts principalement ruraux qui ont tout de même attiré une certaine immigration : la position du Sucre confirme la descente des Andins vers cette région.
68Bien que moins évolué démographiquement, l’Anzoategui montre les mêmes phénomènes. On y distingue aussi des districts de départ, Peñalver et Bruzual, et des zones d’arrivée où la population autochtone est faible : districts pétroliers du Freites, et surtout du Sotillo (raffineries) et du Simon Rodriguez. Ici encore, la capitale (Distrito Bolivar) compte beaucoup moins de personnes nées hors de l’état que les champs de pétrole.
c. Le rythme de croissance démographique des régions pétrolières
69Le pétrole a la réputation d’avoir créé d’étonnantes villes-champignons, ce que semble confirmer la puissance des mouvements migratoires étudiés plus haut. La figure 18 représente le développement démographique des principales régions pétrolières du Vénézuéla et de leurs capitales : Maracaïbo, le Distrito Bolivar (Zulia), le plus grand champ de pétrole de la nation, le Município Centaura, principal centre de l’Anzoategui dont sera détaché le Distrito Simon Rodriguez (pour la commodité de la comparaison, la population de ce dernier a été ajoutée à celle du nouveau Município Cantaura afin de considérer la même région tout au long de la période), Maturin capitale du Monagas et centre pétrolier aussi, le Município Cardon, où se trouve Punto-Fijo, le plus grand centre de raffinage de la nation, et enfin Puerto-laCruz, port d’embarquement et de raffinage du pétrole d’Oriente. A titre de comparaison, le graphique porte aussi les courbes de Caracas et du principal centre de constructions mécaniques du Vénézuéla, Valencia. L’échelle semi-logarithmique permet de comparer la pente des courbes.
70Deux types de régime bien différents apparaissent sur la figure. Lorsque le pétrole est découvert ou raffiné dans des régions peu densément habitées, la courbe démographique indique un essor formidable pendant quelques années, qui se ralentit ensuite et prend un rythme comparable à celui des autres agglomérations humaines. C’est le cas du Distrito Bolivar, du Município Cantaura ou de Puerto-la-Cruz. S’il s’agit d’un centre déjà constitué avant que ne s’y développent les activités pétrolières, il conserve le rythme des grandes villes vénézuéliennes, comme Maracaïbo ou l’adopte lentement, comme l’a fait Maturin, ville endormie dont la courbe présente ainsi une concavité régulière.
71De toute façon, ce n’est pas ce développement calme et assez régulier qui peut caractériser les centres pétroliers. Leur seule originalité paraît être ce bond démographique initial qui porte en quelques années au rang de ville des hameaux presque vides. Le taux géométrique est alors tout-à-fait exceptionnel :
- Distrito Bolivar (1920-26) |
19,42 % par an |
- Município Cantaura (1936-41) |
20,76 % |
- Puerto-la-Cruz (1936-41) |
32,48 % |
(1941-50) |
15,81 % |
72Ensuite, lorsque l’agglomération ou la région a adopté ce qu’on pourrait appeler un “rythme de croisière”, elle ne se distingue plus des autres régions florissantes du Vénézuéla : il est caractéristique de voir la courbe de Valencia, ville industrielle sans aucun rapport avec le pétrole, devenir parallèle à celle du Distrito Bolivar, l’un des bassins pétroliers les plus riches du monde et dont on a vu plus haut avec quelle puissance il pouvait attirer les immigrants.
73La figure 19 permet de mieux étudier ce bond initial. Elle représente, toujours avec une échelle semi-logarithmique, le développement de huit villes-champignons parmi les plus remarquables du Vénézuéla moderne. Trois seulement vivent du pétrole ; les autres ont profité de l’extraction minière (San Felix, en Guyane), de l’industrie chimique (Moron), ou du trafic portuaire (Guanta, Anzoategui). El Vigia a servi à loger les ouvriers construisant la grande route panaméricaine. Calabozo, vieille ville des Llanos, a été ressuscitée par la construction d’un important barrage et le développement de l’agriculture irriguée. Depuis 1950, alors que la production pétrolière battait tous ses records, les trois centres pétroliers ont grandi à un rythme égal ou même inférieur à celui des autres. Il est remarquable que Punto-Fijo ait progressé moins vite que le centre agricole de Calabozo ! Ici encore, c’est la puissance incomparable du bond initial qui caractérise le développement des agglomérations pétrolières.
74Ainsi, la véritable originalité démographique des villes du pétrole réside dans la phase initiale ; leur croissance ressemble, une fois cette période terminée, à celle de n’importe quel centre industriel, politique ou même agricole moderne. On retrouve ici la distinction faite précédemment entre une première phase migratoire de type pionnier, fort originale, et une seconde correspondant à un exode rural assez commun.
Conclusion
75La mobilité de la population vénézuélienne n’a cessé de croître au fil des années :
Population habitant l’état de naissance |
Population habitant hors de l’état de naissance |
% |
|
1 |
2 |
2/1 |
|
1936 |
3 317 000 |
376 000 |
10,9 |
1941 |
3 795 000 |
546 000 |
15,4 |
1950 |
4 626 000 |
908 000 |
19 |
76Le rôle de l’activité pétrolière dans ces migrations est fort grand. Il faut cependant distinguer deux types de mouvement, bien différents par leur forme et par leurs causes. Le mouvement de type pionnier comprend une majorité d’hommes. Il conduit des travailleurs attirés par l’activité pétrolière et ses offres d’emploi vers des régions souvent vides ou peu habitées, ce qui explique la violence du bond démographique qu’il fait faire aux villes ainsi créées. De ce type, qui caractérise la migration pétrolière, se distingue un type “banal”, manifestation de l’exode rural. Il met en mouvement des familles entières chassées de leurs campagnes par des crises à la fois sociales, économiques et psychologiques, et qui se dirigent vers n’importe quel centre d’activités secondaires ou tertiaires. La sex ratio de ces contingents indique une légère majorité féminine. Le rythme des départs n’est pas lié à l’offre d’emplois et ne correspond donc pas aux fluctuations de celle-ci : c’est pourquoi les Falconianos continuent à affluer dans le Distrito Bolivar cependant que les compagnies licencient du personnel. Ce type de mouvement se dirige, à l’inverse du premier, vers les villes et les centres industriels déjà créés.
77Cette distinction explique le changement de rythme dans le développement des villes pétrolières : dans une première phase, c’est un mouvement pionnier qui appelle des travailleurs pour l’équipement des lieux d’extraction : dans une seconde, c’est un mouvement semblable à celui qui se dirige vers les autres villes, avec les mêmes causes, donc le même rythme.
78Les grands mouvements pionniers provoqués par l’exploitation pétrolière se sont terminés après la Ile guerre mondiale, en même temps que s’aggravait l’exode rural. Depuis 1950, les centres pétroliers n’ont plus déterminé de mouvements, mais accueilli seulement les ruraux que la crise avait de toute façon déracinés. Les mouvements n’ont pas été beaucoup moins violents vers le piémont agricole des Andes. Le rôle du pétrole n’a donc pas été néfaste, au contraire. La masse importante des salaires versés a contribué, en élevant quelque peu le niveau de vie moyen, a stabiliser une population formée en grande partie de déracinés. En 1950, 29 % des hommes et 28,2 % des femmes étaient mariés dans ce Vénézuéla dont un des principaux fléaux est les naissances illégitimes (49 % du total des naissances en 1961) ; or, le Zulia présentait des chiffres supérieurs : 30,2 % des hommes et 32 % des femmes légalement mariés. Le recensement de 1961 montre que dans les villes et les camps pétroliers de cet état, il y a davantage d’hommes mariés ou divorcés que dans les campagnes, et beaucoup moins de concubinage. Les femmes y sont aussi plus souvent mariées, divorcées ou célibataires, beaucoup moins fréquemment concubines que dans les régions rurales. On peut déceler, en somme, dans les agglomérations pétrolières, une nette tendance à légaliser davantage la vie sexuelle, à fonder un foyer ou, pour les femmes surtout, à être plus indépendantes.
79L’activité pétrolière parvient aussi plus rapidement à assurer l’équilibre des sexes que l’exploitation agricole, sans doute parce que les tâches administratives attirent davantage les filles et que les travailleurs aux salaires relativement élevés peuvent plus aisément faire venir leur femme. En 1950, parmi les personnes âgées de plus de quinze ans, le nombre d’hommes pour cent femmes était le suivant :
- pétrole : Lagunillas |
130 |
Distrito Baralt |
125 |
- agriculture : Distrito Colon |
134 |
Município Urribarri.... |
200 |
80Enfin, il ne faut pas oublier que l’appel des activités pétrolières a empêché le départ des Zulianos vers Caracas, à la différence des autres états qui en ont gravement souffert, surtout après 1936. Le Tachira, par exemple, pourtant plus éloigné de la capitale et moins peuplé que le Zulia, a envoyé chaque année vers le Distrito Federal deux fois plus de personnes que son puissant voisin.
81En somme, les migrations pétrolières ont eu certainement un effet favorable sur l’équilibre de la population vénézuélienne et les critiques violentes que certains adressent aux compagnies ne paraissent pas, sur ce point, justifiées. En fixant des masses humaines déracinées dans des régions en général très peu peuplées, le pétrole a freiné le dangereux mouvement de concentration dans les grandes villes et grandement diminué la congestion dont celles-ci commencent à souffrir. Dans un pays où l’évolution moderne tend à accroître les disparités entre les régions, cette action est inappréciable. Certes, les migrations violentes de la phase pionnière et plus encore sans doute, l’injection violente dans l’économie vénézuélienne de masses importantes de capitaux sans planification a contribué à donner à l’exode rural cette ampleur et cette gravité aiguë qui le caractérisent aujourd’hui. Il est vrai aussi que le développement des villes-champignons, presque toujours spontané, a donné naissance à un nouveau paysage humain dont la seconde partie de cette étude montrera les problèmes.
Table des illustrations
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Légende | Fig. 1 - Evolution de la population des Etats pétroliers |
URL | http://books.openedition.org/iheal/docannexe/image/3516/img-1.jpg |
Fichier | image/jpeg, 96k |
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Légende | Fig.2 - Mouvement des Vénézuéliens vers le Zulia à partir d’autres Etats |
URL | http://books.openedition.org/iheal/docannexe/image/3516/img-2.jpg |
Fichier | image/jpeg, 580k |
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Légende | Fig. 3 - Evolution des diverses parties de la population du Zulia |
URL | http://books.openedition.org/iheal/docannexe/image/3516/img-3.jpg |
Fichier | image/jpeg, 108k |
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Légende | Fig. 4 - Mouvements de population |
URL | http://books.openedition.org/iheal/docannexe/image/3516/img-4.jpg |
Fichier | image/jpeg, 552k |
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Légende | Fig. 5 - Rapport du taux de croissance annuelle des Etats au taux national |
URL | http://books.openedition.org/iheal/docannexe/image/3516/img-5.jpg |
Fichier | image/jpeg, 228k |
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Légende | Fig. 6 - Evolution de la production de pétiole et de la population |
URL | http://books.openedition.org/iheal/docannexe/image/3516/img-6.jpg |
Fichier | image/jpeg, 108k |
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Légende | Fig. 7 - Evolution de la sex-ratio des divers contingents d’immigrants venus s’installer dans le Zulia (rapport du nombre d’hommes au nombre total) |
URL | http://books.openedition.org/iheal/docannexe/image/3516/img-7.jpg |
Fichier | image/jpeg, 452k |
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Légende | Fig.8 : Evolution des contingents venus dans le Zulia |
URL | http://books.openedition.org/iheal/docannexe/image/3516/img-8.jpg |
Fichier | image/jpeg, 160k |
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Légende | Fig. 9 - Evolution des contingents étrangers venus dans le Zulia |
URL | http://books.openedition.org/iheal/docannexe/image/3516/img-9.jpg |
Fichier | image/jpeg, 160k |
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Légende | Fig. 10 – Répartition des contigents venus le Zulia par classes d’âge |
URL | http://books.openedition.org/iheal/docannexe/image/3516/img-10.jpg |
Fichier | image/jpeg, 348k |
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Légende | Fig. 11 – Provenance des habitants d’Anaco |
URL | http://books.openedition.org/iheal/docannexe/image/3516/img-11.jpg |
Fichier | image/jpeg, 376k |
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Titre | TAUX D’ACCROISSEMENT MOYEN ANNUEL |
URL | http://books.openedition.org/iheal/docannexe/image/3516/img-12.jpg |
Fichier | image/jpeg, 256k |
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URL | http://books.openedition.org/iheal/docannexe/image/3516/img-13.jpg |
Fichier | image/jpeg, 1,1M |
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Légende | Fig. 13 - Evolution de l’importance relative des divers districts du Zulia |
URL | http://books.openedition.org/iheal/docannexe/image/3516/img-14.jpg |
Fichier | image/jpeg, 124k |
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Légende | Fig. 14 - Evolution de la population des districts du Zulia |
URL | http://books.openedition.org/iheal/docannexe/image/3516/img-15.jpg |
Fichier | image/jpeg, 140k |
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Légende | Fig. 15 - Zulia : classification des districts selon la proportion de population allogène (d’après le Censo de 1950) |
URL | http://books.openedition.org/iheal/docannexe/image/3516/img-16.jpg |
Fichier | image/jpeg, 444k |
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Légende | Fig. 16 - Anzoategui : répartition de la population selon le lieu de naissance |
URL | http://books.openedition.org/iheal/docannexe/image/3516/img-17.jpg |
Fichier | image/jpeg, 344k |
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Légende | Fig. 17 – Les courants migratoires dans le Zulia en 1950 (les chiffres indiqués sont des milliers |
URL | http://books.openedition.org/iheal/docannexe/image/3516/img-18.jpg |
Fichier | image/jpeg, 344k |
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Légende | Fig. 18 - Evolution de la population des régions et villes pétrolières (échelle semi-logarithmique) |
URL | http://books.openedition.org/iheal/docannexe/image/3516/img-19.jpg |
Fichier | image/jpeg, 144k |
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Légende | Fig. 19 - Développement de quelques “villes-champignons” au Vénézuéla (échelle semi-logarithmique) |
URL | http://books.openedition.org/iheal/docannexe/image/3516/img-20.jpg |
Fichier | image/jpeg, 197k |
© Éditions de l’IHEAL, 1971