Piloter scientifiquement l’émergence d’un marché ? Directeurs commerciaux et représentants de commerce dans Le lancement du Pathé‑Baby, 1922‑années 1930
p. 187-208
Texte intégral
1En 1922 et en 1923, Pathé Consortium Cinéma met sur le marché deux appareils sous la marque Pathé-Baby, un appareil de projection cinématographique et une caméra de formats réduits, à usage de particuliers. Au début des années 1920, en France, l’accès aux projections cinématographiques, pratique dont l’émergence remonte alors à une vingtaine d’années seulement, est possible principalement dans deux espaces, touchant un public diversifié, mais avec une forte composante populaire1 : celui du cinéma forain, qui agrémente foires et marchés, et celui des cafés-concerts et des salles de cinéma, qui commencent à se disséminer dans le tissu des moyennes et grandes villes. La projection cinématographique dans ces deux contextes est alors le fait d’acteurs semi-professionnels, qui diffusent une production dominée, en France, par deux sociétés aux logiques industrielles, Pathé frères2 et Gaumont. Les circuits de distribution du matériel de projection, destiné à ces usages professionnels, restent confidentiels, et, si un public de cinéastes amateurs existe, il reste restreint et il emploie le même matériel qu’utilisent les professionnels. L’idée de Charles Pathé de développer des appareils de projection et de prise de vues à destination d’amateurs, qu’il commence à faire étudier dès la fin des années 19003, constitue à ce titre une nouveauté puisqu’elle consiste à penser un autre usage possible du cinéma, au sein d’espaces domestiques et par des amateurs davantage tournés vers un usage privé ou mondain4. Lors de leur sortie en 1922 et 1923, ces appareils proposés à la vente ne répondent pas à des pratiques déjà ancrées d’amateurs, ni même, a priori, à un besoin préexistant. Deux défis majeurs se posent alors, du point de vue de la société, pour faire émerger un marché : organiser la distribution des objets pour en faire un bien de consommation, sinon parfaitement courant, puisqu’il n’est pas adapté à toutes les bourses, du moins visible et commode d’accès, et susciter une appropriation ad hoc dans la vie quotidienne de la part de potentiels utilisateurs.
2La diffusion rapide du Pathé-Baby sur le marché français, au point que, six mois après son lancement, quelque 41 000 appareils de projection ont été commercialisés5, a été expliquée par la tenue d’une campagne de distribution planifiée adossée à une campagne de publicité. Les milieux émergents des techniciens de la publicité, alors en quête de légitimité, l’érigent en preuve de l’efficacité de leurs méthodes. L’historiographie a longtemps négligé le foisonnement des réflexions des années 1920 sur la modernisation des techniques de vente et leur organisation scientifique, pour reprendre les termes employés par les contemporains, masqué derrière le cas américain dont l’exceptionnalité rejetait dans l’archaïsme le fonctionnement de la distribution au détail française6. Pourtant, les pistes de réflexion données par Marie-Emmanuelle Chessel réhabilitent ces réflexions et ces pratiques françaises, non comme archaïques, mais comme adaptées aux habitudes de distribution et au fonctionnement réel d’un marché français fragmenté géographiquement7.
3Si l’on suit le grand récit des contemporains, que relaie en creux la focalisation historiographique sur les formes commerciales comme les grands magasins, l’émergence d’une production et d’un marché de masse est le fruit de grandes entreprises industrielles ayant les moyens de toucher directement le consommateur par la mise en place de techniques publicitaires. Ce récit rend à invisibiliser un ensemble d’acteurs intermédiaires, voyageurs de commerce et démonstrateurs, revendeurs détaillants, voire à les présenter, selon un postulat néoclassique, comme des coûts inutiles voués à être supprimés. Or les théories institutionnelles insistent, au contraire, sur l’utilité de ces intermédiaires dans le lien personnel qu’ils entretiennent avec la clientèle dans un contexte d’asymétrie d’information8. Confronter les discours des publicitaires et le matériel publicitaire diffusé, à des archives de la pratique des voyageurs de commerce pour Pathé conservés à la Fondation Jérôme Seydoux-Pathé, souligne la permanence du recours à ces acteurs, qu’on connaît très peu, non seulement pour le premier moment de lancement du produit, mais aussi dans le démarchage régulier des clients tout au long des années 1920 et 1930. La question qu’on pourrait se poser, dans le cadre d’une interrogation plus générale sur l’émergence d’un marché au début des années 1920, est donc la suivante : quel rôle exact jouent ces principes de vente et de publicité, conçus comme innovants, dans l’émergence d’un nouveau marché (c’est-à-dire à la fois dans la construction d’une demande et la mise à disposition des objets à l’achat) ? N’est-ce pas plutôt l’ensemble des vecteurs traditionnels de la distribution, grands magasins, revendeurs au détail, qui permet de comprendre l’essor des ventes ? Comment, dans ce contexte, la société Pathé parvient-elle à mobiliser ces acteurs traditionnels ?
4Les directeurs commerciaux proposent une lecture top-down de la campagne de lancement du Pathé-Baby, en pensant l’émergence de ce nouveau marché selon un schéma systématique. Les innovations introduites, pour partie réelles, s’appuient néanmoins sur des rouages finalement traditionnels (revendeurs au détail, voyageurs de commerce), laissant place sur le terrain à du travail de négociation et de persuasion, soigneusement orchestré mais dont la portée dépasse, pour partie, la logique top-down prônée par les directeurs commerciaux. Cela vaut autant dans l’organisation de la distribution auprès des détaillants que pour la tentative de la construction d’un nouveau besoin du consommateur. L’étude de ces deux dimensions, essentielles dans la distribution et l’adoption du Pathé-Baby en France, amène finalement à montrer le rôle déterminant des intermédiaires comme les voyageurs de commerce dans l’émergence d’un nouveau marché dans la France du début des années 1920.
I. L’ambition d’une campagne de distribution rationnelle et systématique
5Une insistance volontaire sur le moment du lancement du produit, sur une temporalité très resserrée que les dirigeants des services de vente et de publicité entendent maîtriser, en tâchant de s’adapter aux rythmes de consommation annuels des potentiels acheteurs, frappe dans l’entreprise de commercialisation du Pathé-Baby. Y affleure l’idée que l’émergence du marché autour de ce produit s’ancre dans un moment inaugural précis, celui de la campagne de publicité et de distribution de la seconde moitié de l’année 1922. Loin de suivre les hasards d’une prospection, le moment d’émergence du marché est censé se dérouler selon un processus séquentiel, piloté en amont et élaboré par avance. Ce qui apparaît nouveau, c’est la coordination systématique des acteurs traditionnels de la distribution (intermédiaires tels que voyageurs de commerce, revendeurs au détail et grands magasins) et des outils de réclame9, qu’il s’agisse d’espaces et de moments ayant pour fonction de faire connaître les producteurs (telle la foire de Paris, dont le projet vient d’être relancé après la guerre), ou encore d’images et de discours publicitaires, qui se diffusent sur différents supports (catalogues de vente, affiches, catalogues d’étrennes des grands magasins). Leur action est alors conçue comme complémentaire. En 1924, à peine un an et demi après le lancement du projecteur, est créée la Société française du Pathé-Baby (SFPB), spécifiquement chargée de la commercialisation de la gamme d’objets de format réduit pour le marché français, ce qui souligne l’importance, pour les dirigeants de l’entreprise, de l’organisation de l’offre pour soutenir le développement du marché.
6Les efforts consentis dans le domaine commercial pour le lancement du Pathé-Baby sont une nouveauté par rapport à la politique d’avant-guerre, alors que la mise sur le marché d’un objet très similaire lancé par Pathé en 1912, le projecteur KOK, s’est soldé par un relatif échec commercial. L’historienne des techniques Anne Gourdet-Marès a montré que le Pathé-Baby apporte certes une simplicité accrue de prise en main, et qu’un effort est perceptible dans la pureté des lignes de l’objet pour le fondre dans un intérieur domestique, mais que, du point de vue de l’innovation technique même (réduction du format, principe de prise en main), le Pathé-Baby n’apporte pas de différence significative par rapport au KOK qui permettrait d’expliquer l’échec de l’un ou la réussite de l’autre10. La raison de l’échec commercial du KOK, comme le souligne Elvira Shahmiri dans sa thèse soutenue en mai 202211, est triple. Il est d’abord certain que le déclenchement de la guerre met un point d’arrêt à l’essor des ventes, mais ce facteur seul ne suffit pas à expliquer l’échec, puisque les ventes peinaient à décoller avant l’été 1914. Un autre facteur d’explication tient à l’absence d’investissement dans une politique de distribution commerciale : le choix de la vente par concessionnaires (six sur tout le territoire français) limite les points de vente et l’investissement publicitaire est timide. Il semble y avoir eu un décalage entre l’ampleur envisagée du marché – à la fois en termes de nombre d’objets vendus et d’extension géographique – et l’organisation de la distribution commerciale. Enfin, cet échec s’expliquait surtout par une inadéquation entre le public ciblé et les usages sociaux rêvés de l’objet a priori, et le public qui se saisit en réalité de l’objet, avec ses usages propres. La clientèle aisée que Pathé envisageait, qui devait consommer le projecteur dans un espace domestique, garant d’un entre-soi, dans un souci de distinction par rapport à la consommation cinématographique populaire, constituait en réalité un public trop restreint. À l’inverse, une clientèle plus modeste qui envisageait des usages collectifs pour le projecteur se retrouvait de facto exclue par un prix qui restait trop élevé.
7C’est peut-être l’achoppement de cette première tentative pour faire émerger un marché autour d’un appareil cinématographique de projection à usage amateur qui explique le soin accordé à la campagne de publicité et de distribution en 1922. Celle-ci est façonnée par les idées de la « publicité rationnelle », marquée par un discours nouveau que véhiculent des acteurs neufs au sein de l’entreprise. On peut reconstituer le déroulement de cette campagne de vente à partir de deux sources principales qui se recoupent globalement, malgré leur distance temporelle : d’une part, un retour d’expérience, daté de novembre 1923, de la part du conseiller en publicité des services de Pathé, Charles Lemonnier12 ; d’autre part, un entretien oral et filmé, réalisé dans un cadre familial dans les années 197013, portant sur les souvenirs de vie de Raoul Ralph Laclôtre. Ce dernier a été l’un des voyageurs de commerce qui ont participé à la campagne de lancement de l’appareil de projection du Pathé-Baby en 1922 ; il a ensuite fondé l’ensemble de sa carrière de voyageur sur la représentation des appareils Pathé à format réduit jusqu’à sa retraite au début des années 196014. Le lancement du Pathé-Baby a lieu à la fin de l’année 1922, mais les enjeux de distribution et le lancement commercial sont anticipés en amont, donnant l’image d’une commercialisation orchestrée. Jacques Pathé prend son poste au printemps 1921. Des catalogues à destination des commerçants indépendants et des grands magasins sont imprimés (chaque support étant standardisé mais s’adressant spécifiquement aux différents types de revendeurs). Un stand à la foire de Paris en mai 1922 permet de donner une première visibilité au produit. On mobilise d’ailleurs à cette fin des techniques vues comme modernes, directement empruntées des expérimentations des vitrines des grands magasins puisqu’on emprunte des mannequins de cire au magasin Le Printemps pour reconstituer une scène de projection familiale. Une tournée de voyageurs en septembre et octobre a ensuite pour objectif de démarcher une clientèle de revendeurs au détail, ce qui aboutit à de premières commandes et de premiers envois. La publicité dans la presse ou par correspondance est lancée le 1er novembre, directement par Pathé ou par les revendeurs incités à le faire à l’échelle régionale. Le cadrage temporel resserré de la campagne de lancement avant les fêtes de la fin de l’année 1922 prend en compte le moment de consommation annuelle exceptionnel que sont les étrennes. La campagne est un succès puisque les ventes décollent avant les fêtes de fin d’année.
8La mise en récit dont fait l’objet cette campagne est le fait d’un homme, Charles Lemonnier, qui appartient à ce milieu parisien émergent et en cours de professionnalisation de techniciens de la publicité qu’a analysé Marie-Emmanuelle Chessel15. Moins connu que son homologue Octave-Jacques Gérin, qui fonde à Paris, en 1904, l’un des premiers bureaux de conseil en publicité en défendant l’autonomie d’un savoir-faire publicitaire indépendant du travail de presse, moins connu également que Paul Nicolas ou Albert Marcellin, il n’en est pas moins intégré à ce milieu, dont il partage les idées, les codes et la manière de travailler. Dans les années 1920, il est membre du Syndicat des techniciens de publicité16, organisation fondée en 1920, et il devient administrateur d’une association en hommage à Octave-Jacques Gérin en 193817. Les traces de son activité sont ténues : très classiquement pour ce profil de chef de publicité qui propose un service et moins une œuvre rattachée à un principe d’auctorialité, le nom de Charles Lemonnier s’efface derrière celui de l’Atelier spécial d’illustrations publicitaires, petite agence de publicité située au 49 rue Rochechouart, dans le IXe arrondissement de Paris18. Quelques-unes de ses productions publicitaires, portant la signature « ASIP », indiquent qu’il exerce une activité de publicitaire continue tout au long des années 1920 et 1930, notamment pour les produits d’hygiène, et surtout pour du petit matériel de bureau (colle Adhésine, stylos de luxe Aurora et Edacoto, blanc en pot Corector19). Il est toujours en activité dans le conseil en publicité en 1950, alors qu’il reçoit la croix de chevalier de la Légion d’honneur pour fait militaire20.
9Alors que la documentation archivistique ne permet d’évaluer ni le rôle exact ni les modalités du recrutement de Charles Lemonnier, celui-ci rédige un an après le lancement, pour le numéro liminaire du magazine Vendre qui vise à promouvoir l’outil publicitaire et les techniques d’organisation rationnelle de la vente21, un retour d’expérience sur la demande d’Étienne Damour, directeur de l’agence de publicité DAM22. Le récit, malgré les accents voulus d’une discrétion tout affairiste, a tout du récit à succès. S’y dégage une approche top-down de l’émergence d’un marché par l’organisation de l’offre et une volonté d’uniformisation du discours publicitaire sur l’ensemble du territoire français, centré sur un slogan, « Le cinéma chez soi », et d’une identité graphique et visuelle autour du produit, notamment dans la police du titre, qui rappelle les motifs de pellicule. L’atelier de Charles Lemonnier conçoit également des supports moins visibles par le grand public, telles les cartes de visite des représentants ; la mise en parallèle de la carte de visite de Ralph Laclôtre23 et d’autres réalisations de l’atelier dégage ainsi un style graphique caractéristique basé sur l’équilibre des noirs et blancs, un trait épais, un dessin dynamique qui s’entremêle à l’écriture et au cadre, une mise en valeur du slogan et un texte d’explication plutôt bref, privilégiant la mise en situation (voir figures 1 et 2). Le travail investi jusqu’à ce document de travail commercial – une carte de visite – montre un soin apporté à la cohérence de l’image du produit auprès de l’acheteur final comme des revendeurs.
Figure 1. Carte de visite de Ralph Laclôtre, pour envoi aux clients, après 1924 – Conception Atelier spécial d’illustrations publicitaires (ASIP)

Source : Carte de visite de Ralph Laclôtre, fonds Ralph Laclôtre © Collection Fondation Jérôme Seydoux-Pathé.
Figure 2. Publicité Charles Lemonnier pour Adhésine, marque déposée de Corector, 1930 – Conception ASIP

Source : L’École et la vie, 29 mars 1930, p. 3, accessible sur gallica.bnf.fr.
10L’exposition des méthodes de vente employées, qui relèverait de compétences nouvelles constituées en champ théorique et mises à la disposition des producteurs pour encourager efficacement la vente de leurs produits, est porteuse d’un enjeu de légitimation – et de fédération – de l’activité des techniciens de la publicité, caractéristique de ce moment d’engouement pour les nouvelles méthodes publicitaires qui marque le début des années 1920 et la reprise des affaires, avant d’être freiné par la fin de l’inflation24. Avec la montée en puissance d’une théorisation de l’activité publicitaire dans ces groupes parisiens des années 1920, une attention accrue est portée à ce moment d’émergence du marché présenté comme décisif, en systématisant la coordination entre le recours à la réclame et l’action des intermédiaires de vente. Leur discours érige la campagne de lancement du Pathé-Baby en un exemple à suivre pour nombre de fabricants français qui souhaitent lancer un produit, selon un modèle de gestion top‑down.
II. Un marché fragmenté
11Pour autant, ce discours sur ces méthodes d’organisation de la vente et les pratiques qu’elles engendrent n’interrogent pas la réception et l’intégration de cette innovation par les revendeurs dans leurs rayonnages de vente, ce qui est d’autant plus décisif que ce sont finalement eux qui sont les intermédiaires au plus proche de l’acheteur final. Se pencher sur la manière dont ils mettent en valeur le Pathé-Baby et sa gamme (projecteur comme caméra), en s’appuyant ou non sur le matériel publicitaire proposé par Pathé Consortium Cinéma, puis par la Société française du Pathé-Baby, dans la presse comme dans l’espace matériel du magasin, permet de caractériser plus finement les logiques de diffusion d’un objet innovant sur un marché fragmenté ; les revendeurs peuvent en effet être des revendeurs spécialisés en photographie dans les grandes villes, des photographes dans les villes moyennes, des pharmacies, des herboristeries ou encore des bazars dans les bourgs. Le marché du Pathé-Baby ne se développe pas en apesanteur sociale, mais il s’appuie sur les revendeurs qui ont une bonne connaissance de la demande locale. Dans les grandes et moyennes villes, où existe une clientèle aisée et intéressée par la consommation de ces nouveaux objets, les projecteurs s’adossent à un ensemble d’items déjà existants et proches par leur caractère technique, à usage domestique et destinés à intégrer un espace similaire (phonographes, postes de TSF, appareils photo), pour lesquels il existe déjà des habitudes de consommation et qui sont en passe d’être intégrés dans les pratiques du quotidien. À Brive, cœur urbain de la Corrèze (voir figure 3), l’utilisation du mur comme support publicitaire clame une spécialisation autour de ces nouveaux objets vus comme modernes, qui font pénétrer le son et l’image dans les intérieurs français, intéressant un public aisé, sportif ; la marque du Pathé-Baby apparaît ici bien en évidence, mais, d’une part, sans la police d’écriture spéciale développée par le service de publicité de Pathé, et, d’autre part, toujours en lien avec à d’autres marques, voire subordonnée à elles, pour des appareils photographiques ou des pellicules (Kodaks, Agfa, Lumière & Jougla)25. À l’inverse, le bazar à Maurs, dans le Cantal (voir figure 4), se caractérise par son offre à première vue éclectique, qui tient de la quincaillerie et de l’épicerie à la fois26 ; mais l’offre Pathé-Baby (fût-ce de simples films proposés à la vente, et non des appareils) n’apparaît pas isolée puisqu’elle vend aussi de la pellicule Kodaks. Malgré l’aspect rudimentaire de l’établissement, le tenancier, Grimal, met en valeur les marques des produits qu’il vend, les intégrant comme argument de vente et affirmant sa connexion dans un marché national plus large : au vu des chiffres de commandes annuelles croissants dans les années 1920 (571 francs en 1926, 724 en 1927, 959 en 1928, presque 3 000 en 1929)27, on peut raisonnablement penser qu’il n’a pas vendu qu’occasionnellement de la pellicule, mais qu’il a écoulé une demi-douzaine d’appareils Pathé‑Baby.
Figure 3. Photographie de vitrine – Revendeur Courbet à Brive (Corrèze), vers 1930

Source : Magasin Courbet à Brive, fonds Ralph Laclôtre © Collection Fondation Jérôme Seydoux‑Pathé.
Figure 4. Photographie de vitrine – Revendeur Grimal à Maurs (Cantal), vers 1930

Source : Boutique revendeur Grimal à Maurs, fonds Ralph Laclôtre © Collection Fondation Jérôme Seydoux‑Pathé.
12Ces photos de devantures de clients ont été prises par Ralph Laclôtre, pour un usage propre, lors d’une tournée du voyageur de commerce ; elles datent probablement de 1931. C’est sur une telle nébuleuse de modestes revendeurs au détail que Ralph Laclôtre réalise la plupart de son chiffre : si la Société française du Pathé-Baby vend également directement des appareils à son siège à Paris, le système de distribution choisi semble bien se fonder essentiellement sur des revendeurs au détail. Faute de données qu’auraient pu fournir les chiffres de vente détaillés de la Société française du Pathé-Baby, il est compliqué d’évaluer la part exacte des grands magasins et des revendeurs au détail. Les appareils Pathé-Baby sont très présents visuellement dans les catalogues d’étrennes des grands magasins, mais cela ne dit rien de leur importance relative dans les ventes. Deux éléments vont dans le sens d’une prépondérance des revendeurs au détail : la publication des listes d’adresses louant des films Pathé-Baby dans la brochure Le cinéma chez soi28 et les chiffres annuels de commandes passées par les clients de Ralph Laclôtre à partir de 1924, qui montrent que le chiffre réalisé auprès des grands magasins est négligeable par rapport à celui des détaillants indépendants (voir les graphiques ci-dessous). Ces chiffres sont certes à nuancer puisqu’ils concernent les régions démarchées par Ralph Laclôtre sur un secteur sud-ouest remontant assez haut vers le nord, qui comprend une côte méditerranéenne urbanisée, mais surtout une part importante d’espaces ruraux éloignés de l’implantation des grands magasins. Les chiffres seraient sans doute différents pour Paris, dont le paysage commercial est bien davantage marqué par les grands magasins, et il est évidemment possible que les grands magasins soient dotés de leurs circuits de distribution internes ; mais pour ces régions, le poids des petits revendeurs semble prépondérant dans l’accès aux appareils et aux films Pathé-Baby. Ces revendeurs au détail sont à même d’offrir des services personnalisés et inscrits dans la durée, en lien avec la nature technique de l’objet et ses usages pour des projections, que le caractère généraliste et distancé des grands magasins ne peut garantir. De fait, le marché autour des appareils du Pathé-Baby ne consiste pas seulement en la vente des appareils, mais aussi dans la vente et/ou la location de films du catalogue Pathé-Baby ainsi que dans un service de développement des pellicules pour les films tournés par les clients. La location et le développement des films, ou au moins le fait de servir d’intermédiaire vers le service Pathé de développement, sont des services qui comportent un aspect davantage technique que des établissements plus spécialisés de photographes sont mieux à même de fournir.
Graphique 1. Bénéfices nets de la Société française du Pathé‑Baby (1925‑1938)

Graphique 2. Chiffres de vente aux revendeurs indépendants – Ralph Laclôtre

Graphique 3. Chiffres de vente aux grands magasins – Ralph Laclôtre

Sources : fonds Ralph Laclôtre (recettes sur le secteur, 1925-1940 ; données établies à partir des listes de vente annuelles)
Sources des trois graphiques : E. Shahmiri, « Le cinéma partout et pour tous. Une histoire des formats réduits Pathé en France, 1912-1939 », doctorat, histoire du cinéma, sous la direction de Dimitri Vezyroglou, université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 2022.
13Malgré la proximité, à la fois technique et fonctionnelle, des autres objets vendus par les revendeurs, le projecteur, puis la caméra, en tant qu’innovations techniques, restent hors catégorie, ne correspondant pas à une pratique sociale établie. Comme le montre Elvira Shahmiri en analysant les catalogues d’étrennes29, le classement oscille entre la rubrique jeux et l’appareil électrique – sous-tendant, à chaque fois, une représentation sur les usages sociaux de l’objet. Cela explique le scepticisme des revendeurs au détail à prendre sur eux le risque de proposer un tel produit à la vente ; le face-à-face qui se noue entre les représentants de commerce, intermédiaires privilégiés qui présentent l’objet, et les potentiels revendeurs apparaît alors essentiel pour convaincre ces derniers d’intégrer dans leur offre les appareils, d’autant que Pathé leur impose des conditions strictes, déterminées en amont et non calquées sur les usages généraux. L’extrait du témoignage de Ralph Laclôtre soulève le problème :
« Je passais deux heures avec le client parce que le client ne savait pas ce que c’était. Quand un représentant venait porter des chemises ou n’importe quoi, il savait ce que c’était, l’acheteur, mais moi, j’arrivais chez un photographe ou un bazar et je lui disais c’est pour un cinéma c’est pour ceci… Le photographe disait toujours : “Oh mais moi je n’ai jamais fait de cinéma”… Il fallait que j’ouvre ma valise, que je montre l’appareil et tout, c’était pas drôle au départ […]. Le prix c’était 295, je crois, c’était pas trop, mais il y avait 25 % seulement alors tous en photographie, comme ils travaillaient à 40 %, ah 25 % c’est non. Et ce n’était pas tout, quand je les avais enfin décidés : “Bon alors vous m’en enverrez un.” Ah non, il faut en acheter quatre et 100 petits films30. »
14Le choix du voyageur de commerce par Pathé est déterminé par sa maîtrise des aspects techniques du projecteur (et, plus tard, de la caméra) et sa capacité à en expliquer le fonctionnement aux revendeurs. Cela s’explique très bien pour deux raisons. D’une part, mettre un projecteur dans les mains d’un amateur doit s’accompagner d’un minimum d’apprentissage de la maîtrise de l’objet, de la part du revendeur comme du client : ce point est déterminant au moment de la vente. D’autre part, après la vente, le revendeur est mis dans la position d’assurer un service après-vente auprès du client, surtout pour les aspects techniques dans le cas d’un appareil dysfonctionnel : le voyageur est alors l’interlocuteur privilégié, qui, tant par voie de correspondance que sur place, peut examiner l’objet et éventuellement régler les réclamations qui sont dues à un souci de manipulation31. Ce sont donc des profils de praticiens de la photographie et du film qui sont sélectionnés : s’adresser à des intermédiaires-techniciens spécialisés dans la connaissance technique du produit est une dynamique qui s’affirme à partir des années 1880, avec l’émergence de produits plus techniques à destination des consommateurs, dans les secteurs de la chimie32, de l’optique et de l’automobile. Laclôtre, qui a 27 ans en 1922, n’a aucune expérience préalable dans la vente lorsqu’il devient voyageur-représentant pour Pathé, mais il possède en revanche les compétences pratiques pour manier le projecteur, ainsi qu’une culture visuelle cinématographique : fils de forain qui, très tôt, propose sur des foires des projections cinématographiques, il vient d’une famille possédant trois salles de cinéma à Vichy33 ; il est en outre connu de la maison, puisqu’il entre chez Pathé en 1912 en y travaillant comme opérateur de prise de vues après la guerre, à partir de 191934. Jeune homme flexible et mobile, doté des compétences techniques pour manier une caméra, intéressé par les innovations techniques, par la perspective de voyages et de réalisations aux sujets variés, Laclôtre condense les caractéristiques de ces acteurs que Priska Morrissey analyse dans son travail sur le métier d’opérateur de prise de vues cinématographiques en France35. Les éléments dont on dispose pour l’un des trois autres voyageurs, L. Niord, sont plus minces mais vont également dans ce sens : il semble ainsi avoir été un photographe opérateur-tireur à Paris, avant de connaître une période difficile sans emploi après le déclenchement de la Première Guerre mondiale36. Un peu plus âgé que Laclôtre, il est chargé avant 1957 des départements de l’Est de la France, des Ardennes, de la Seine-et-Marne, du Centre (Yonne, Nièvre, Cher et Loiret) ainsi que de l’Ouest37.
15La relation d’affaires avec de potentiels revendeurs se noue dans une relation de face-à-face, lors de passages des voyageurs au cours de tournées. On s’adresse alors directement au chef de maison, en se rendant dans sa boutique et en ayant au préalable envoyé une carte pour prévenir de son passage ; l’argumentaire oral qui se déroule alors laisse une grande importance au capital sympathie du voyageur et au développement d’une relation interpersonnelle, permettant ainsi à une confiance mutuelle de se tisser entre le voyageur et le revendeur. Cette démarche de face-à-face est cependant ambivalente : traditionnelle, adaptée aux habitudes du petit commerce, laissant une marge de manœuvre au représentant, elle ne doit pas faire oublier que le représentant se fait également le relais des exigences de l’entreprise pour qui il travaille. Si les devantures montrent bien que la marque est intégrée comme argument de vente et si ces produits se diffusent sur le marché de façon cohérente, par groupe de produits vus comme les fers de lance de la modernité auxquels on prête des caractéristiques et des usages similaires, l’émergence du marché du Pathé-Baby reste appuyée sur des établissements préexistants et adaptés aux habitudes de consommation locales.
III. Créer des pratiques autour d’une nouvelle « précieuse mécanique »
16Le lancement du Pathé-Baby est rendu compliqué par le caractère innovant des objets : sans équivalent, ils ne sont pas intégrés dans des usages sociaux préexistants, ils ne répondent pas à une demande. Un pan de l’activité publicitaire se saisit de ce problème pour susciter une demande. Il s’agit non seulement de créer un désir pour ces produits et les pratiques qu’ils supposent, mais aussi d’apprendre à de potentiels consommateurs à manier ces objets et donc à créer les conditions de leur appropriation matérielle. Les publicités pour le Pathé-Baby répondent ainsi à deux modèles, destinés à deux usages : le premier consiste à mettre l’objet en situation pour créer le désir, le second est davantage technique et destiné à un public d’amateurs semi-professionnels qui est encore mal défini au milieu des années 1920.
17Le premier met l’objet en situation, selon un même schéma global : c’est généralement la femme qui est à la manivelle (voir figure 5), enregistrant ou projetant des moments familiaux transformés en doux souvenirs grâce à l’image animée38. Le contenu en est aussi normé : on filme des moments familiaux en plein air, des moments de vacances ou des cérémonies de mariage ou de baptême39, qui restent des moments cardinaux soutenant les valeurs familiales dans la société française des années 1920 et 1930. L’omniprésence de la femme à la manivelle dans les publicités interroge au regard de ce que d’autres sources laissent deviner d’une manipulation réelle davantage masculine de la caméra par les amateurs. De fait, ces publicités sont redoublées par des actions que Charles Lemonnier appelle de « publicité éducative », c’est-à-dire des démonstrations orchestrées, en présence du démonstrateur attitré de Pathé, Georges Duthil, avec le support matériel d’un revendeur, ou en partenariat avec un club d’amateurs local. En mai 1926, à Lille, Duthil s’appuie sur le concours de L. Leconte pour organiser des séances de prise de vues à objet scénarisé, puis de développement et de projection de la scène, en instituant des « semaines cinématographiques » qui font événement40. Devant le palais Marceau, à Lille, est ainsi joué un baptême de poupée par des enfants (voir figure 6). Duthil enchaîne ensuite à Béthune, avec l’appui du revendeur Singier et de son matériel technique, pour proposer des séances d’initiation et de perfectionnement. Ces séances d’apprentissage sont marquées par une répartition des tâches genrées : une seule femme sur quatre personnes est à la manivelle, avec une posture différente de celle des hommes puisqu’elle ne s’accroupit pas pour des raisons de convenance, tandis que les mères assistent à la scène en retrait41. Sans conclure pour autant à un monopole masculin de la manipulation du Pathé-Baby, ce décalage amène à lire l’omniprésence de la femme à la manivelle dans les publicités d’une manière différente : ces femmes représentées sont peut-être moins les manipulatrices réelles que des figures, des signes d’un contexte d’usage rêvé de l’objet. Par la représentation de figures féminines, le publicitaire à la fois signale la facilité du maniement de l’objet et, surtout, encourage son usage dans un cadre familial, domestique. Il semble quand même y avoir, de la part de Pathé, l’idée d’une manipulation féminine de l’objet, dans un parallèle avec la gestion féminine de l’atmosphère musicale lors d’une réception mondaine (chant lyrique, piano, récitation de poèmes ou gramophone), mais ces publicités informent davantage sur un usage rêvé du Pathé-Baby, envisagé ad hoc et encouragé par Pathé et les grands magasins, pour un contexte mondain centré sur les valeurs familiales, qui correspond finalement au même usage et au même public envisagé que pour le Pathé-KOK avant la guerre et par rapport auquel les usages et les attentes des utilisateurs réels divergent, notamment en termes de genre.
Figure 5. Publicité pour la caméra Pathé‑Baby

Source : Le Cinéopse : organe mensuel de l’industrie cinématographique : la projection, la photographie, l’optique, dirigé par Georges Michel Coissac, 1er juin 1924, n. p. [p. 481]. Bibliothèque nationale de France, consultable sur http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34420609s.
Figure 6. Photographie – Prise de vues scénographiées – Première semaine cinématographique, 12 mai 1926, palais Marceau, Lille

Source : Dossier de presse Lille, fonds Gabriel Duthil © Collection Fondation Jérôme Seydoux‑Pathé.
18De fait, le discours publicitaire en 1922 échoue à anticiper le marché d’un autre type de public, semi-professionnel. Un second modèle de publicité s’apparente davantage à une fiche technique d’objets destinée à des périodiques pour amateurs42. Les éditions Charles Lemonnier publient en 1924 un manuel pratique à destination du cinéaste amateur, signé par Duclair-Northy43, qui est un instrument de promotion à la fois du Pathé-Baby et du cinéma d’amateur. Celui-ci s’inscrit délibérément dans une rhétorique à la gloire du progrès et, en insistant de manière un brin exagérée, sur la nouveauté du cinéma amateur et de ces appareils. Le manuel s’attache à des points techniques (éclairage, cadrage, sujet) mais ne dessine pas clairement une figure de ces amateurs. On devine pourtant qu’il est plus large que le simple chef de famille, bien qu’il soit encore mal défini dans le discours de l’entreprise. Les figures d’utilisateurs numériquement et symboliquement importants du Pathé-Baby, qui, comme l’a souligné Elvira Shahmiri dans sa thèse, se saisissent très rapidement de ces objets dans l’entre-deux-guerres et les emploient dans des cadres semi-professionnels (au sein de patronages, dans l’éducation primaire44, dans des brasseries de campagne ou au sein de clubs sportifs45), ne sont ni cernées, ni encouragées dans le discours publicitaire lors du lancement de l’objet. Le marché pour ce public émerge dans un deuxième temps, davantage en sous-main, avec un recours réduit aux supports publicitaires, cantonnés à des titres spécialisés (même s’il existe, dans les années 1930, des publicités dans les publications internes de la SFPB), et se développe par un réseau de recommandations et de bouche-à-oreille autour de personnages clés. Dans le réseau de clientèle de Ralph Laclôtre, l’abbé Régis, à Marseille46, joue ainsi un rôle central dans l’emploi du Pathé-Baby pour l’enseignement.
19Le cas du Pathé-Baby et de la gamme de produits et de services qui lui sont attachés cristallise les réflexions qui animent les cercles de techniciens de la publicité au début des années 1920 autour de ce qu’est l’émergence d’un marché. Elles amènent d’indéniables innovations dans l’usage d’une campagne publicitaire et dans la manière de créer un désir de consommation, en créant, hors des foires, des événements amenant le public à manipuler l’objet et à le rendre familier. Mais l’ambition de « piloter scientifiquement l’émergence d’un marché », selon un schéma top-down, a ses limites, en ce qu’elle échoue à anticiper le marché du public semi-professionnel, qui émerge sans grand effort publicitaire initial. Ces dispositifs s’appuient sur des rouages finalement assez traditionnels du commerce (revendeurs de détail, voyageurs de commerce) et sur un travail de terrain composé de négociations, de persuasions et de formations à la manipulation de l’objet qui s’effectue dans un face-à-face où se crée une relation s’inscrivant dans la durée. Tant dans l’organisation de la vente (et du service après-vente) que dans la construction d’un nouveau désir de consommation, le travail récurrent effectué par les voyageurs de commerce, soigneusement sélectionnés dans ce but, s’avère essentiel. C’est cette étroite association entre ces outils novateurs et ces supports traditionnels, intégrant ces nouvelles pratiques publicitaires selon des intérêts propres, qui explique le succès de la commercialisation du Pathé-Baby, et non pas seulement la capacité à piloter scientifiquement l’émergence d’un marché.
Notes de bas de page
1Jean-Pierre Jeancolas et Michel Marie, « 1. Le temps du muet, 1896-1929 », dans idem, Histoire du cinéma français, 4e éd., Paris, Armand Colin, 2019 (1re éd. 1995), § 20 et 21, https://shs.cairn.info/histoire-du-cinema-francais--9782200625399-page-11?lang=fr
2Sur l’orientation industrielle de cette société, voir la référence centrale : Stéphanie Salmon, Pathé à la conquête du cinéma, 1896-1929, Paris, Tallandier, 2014.
3Fondation Jérôme Seydoux-Pathé (désormais FJSP), Procès-verbal du conseil d’administration de la Compagnie générale de phonographes, cinématographes et appareils de précision [Pathé] du 14 janvier 1904, cité par Elvira Shahmiri, « Le cinéma partout et pour tous. Une histoire des formats réduits Pathé en France, 1912-1939 », doctorat, histoire du cinéma, sous la direction de Dimitri Vezyroglou, université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 2022, p. 11.
4Simon Daniellou, Roxane Hamery et Gregory Wallet (dir.), De l’écran géant à l’espace domestique. Histoires et esthétiques des formats cinématographiques, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2023.
5Anne Gourdet-Marès, « Un anniversaire : le Pathé-Baby et le format 9,5 mm, 1922 », conférence au Conservatoire des techniques cinématographiques, 9 novembre 2012. Le chiffre exact d’appareils produits cité est 40 897.
6Caroline Ardelet et Michel-Pierre Chélini, « À quand remonte le marketing du point de vente en France ? La pratique de la science de l’étalage dans les magasins de nouveautés entre 1900 et 1938 », Décisions Marketing, vol. 104, n° 4, 2021, p. 119-138.
7Marie-Emmanuelle Chessel, La publicité. Naissance d’une profession, 1900-1939, Paris, CNRS Éd., 1998, p. 14 et chap. 3, p. 83-101.
8Sur la question des intermédiaires dans les théories économiques, voir Marc Filser, « Intermédiation et création de valeur dans les canaux : une revue de littérature », Management & Avenir, vol. 51, n° 1, 2012, p. 122-136, https://doi.org/10.3917/mav.051.0122.
9Marc Martin, Histoire de la publicité en France, Nanterre, Presses universitaires de Paris Ouest, 2012, renouvelée actuellement par des interrogations sur les supports d’affichage et les modes de réception des lecteurs et des passants : Roxane Bonnardel-Mira, « Nouvelles pratiques de l’affichage commercial et recomposition de la culture urbaine parisienne à la fin du xixe siècle », Revue d’histoire du xixe siècle, vol. 63, n° 2, 2021, p. 181-204, https://doi.org/10.4000/rh19.7925.
10A. Gourdet-Marès, « Le projecteur KOK : le cinématographe à l’épreuve des salons », dans S. Daniellou, R. Hamery et G. Wallet (dir.), De l’écran géant à l’espace domestique…, op. cit., p. 34-51.
11E. Shahmiri, « Le cinéma partout et pour tous… », op. cit.
12Charles Lemonnier, « Le lancement du Pathé-Baby », Vendre, novembre 1923, p. 19‑22.
13FJSP, Fonds Ralph Laclôtre, Entretien mené avec Michel Dupuy, 16 décembre 1979 et s. d., spéc. cassette 6.
14FJSP, Fonds Ralph Laclôtre, Certificat de travail établi par A. Comte, directeur adjoint de Pathé Société commerciale et industrielle, Paris, 13 septembre 1962.
15M.-E. Chessel, La publicité…, op. cit., p. 19‑24.
16Annuaire du commerce Didot-Bottin, « Publicité », 1927, p. 3322.
17La Publicité. Journal technique des annonceurs, 1er juin 1938, p. 455.
18Annuaire du commerce Didot-Bottin, 1927, p. 314. ; cf. également une annonce publiée dans L’Intransigeant du 13 décembre 1927 (p. 6), qui offre des emplois de dessinateur au trait.
19Voir notamment Publicité Charles Lemonnier pour Adhésine, marque déposée Corector, L’École et la vie, 29 mars 1930, p. 3.
20Archives nationales (désormais AN) 19800035/1367/58084, Dossier de réception de la Légion d’honneur de Charles Jules Albert Lemonnier.
21Corroborant l’article de Vendre, Charles Lemonnier collabore en automne 1923 à La Publicité de France, revue mensuelle de vulgarisation publicitaire, en tant que « chef de publicité de Pathé-Baby » ; Mon Bureau, 1er septembre 1923, p. 774.
22Sur cette agence de publicité et sur le magazine Vendre, voir Mathilde Kiener, « Les annonces des publicitaires parues en France dans les revues spécialisées de l’entre-deux-guerres », Focales, n° 3, 2019, https://journals.openedition.org/focales/902.
23FJSP, Fonds Ralph Laclôtre, Carte de visite de Ralph Laclôtre, ASIP, non daté.
24La temporalité restreinte de cet engouement, stoppé par l’inflation, est soulignée par Pierre-Antoine Dessaux pour le secteur des pâtes alimentaires : « Entre espoirs et déceptions : l’industrie des pâtes alimentaires », dans Sabine Effosse, Marc de Ferrière le Vayer et Hervé Joly (dir.), Les entreprises de biens de consommation sous l’Occupation, Tours, Presses universitaires François-Rabelais, 2010, p. 129-144.
25FJSP, Fonds Ralph Laclôtre, Photographie de vitrine, Courbet à Brive, non datée, prob. vers 1930.
26FJSP, Fonds Ralph Laclôtre, Photographie de vitrine, Grimal à Maurs, non datée, prob. vers 1930.
27FJSP, Fonds Ralph Laclôtre, Chiffres de vente Laclôtre de la Société française du Pathé-Baby 1926, 1927, 1928, 1929.
28Trois listes sont données en 1928, 1933 et 1937, dans Le cinéma chez soi. Voir E. Shahmiri, « Le cinéma partout et pour tous… », op. cit., p. 41‑47.
29Ibid., p. 47-49.
30FJSP, Fonds Ralph Laclôtre, Entretien, Retranscription Leïla Laclôtre.
31FJSP, Fonds Ralph Laclôtre. Voir notamment la lettre d’un revendeur-projecteur, E. Fousset, sr de P. Gaude, Photo-échange à Grenoble, 15 cours Berriat, « Spécialiste de la photo d’amateur et du cinéma », à Laclôtre, Grenoble, 24 décembre 1937.
32Églantine Cussac, « Produire et vendre sur le marché français L’implantation de la branche industrielle allemande de matières colorantes en France, 1881-1914 », mémoire de master 2 sous la direction de Michel Margairaz, université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 2018, p. 152‑167.
33Données orales recueillies auprès de Myrtil Laclôtre-Regnault et de Leïla Laclôtre, filles de Ralph Laclôtre.
34FJSP, Fonds Ralph Laclôtre, Certificat de travail établi par A. Comte, directeur adjoint de Pathé Société commerciale et industrielle, Paris, 13 septembre 1962.
35Priska Morrissey, Les as de la manivelle. Le métier d’opérateur de prise de vues cinématographiques en France, 1895-1930, Histoire culturelle, AFRHC, 2021.
36Au 27 octobre 2022, quatre occurrences sur Gallica se rapportent à « L. Niord », les recherches avec les mots-clés « Louis Niord » ou « Lucien Niord » n’apportant pas d’éléments cohérents. La première, dans le numéro Excelsior : journal illustré quotidien du 6 janvier 1914, l’identifie comme l’auteur d’une photographie de la tour Saint-Paterne à Orléans ; il signe dans la seconde, dans un organe spécialisé en optique et en photographie pour les praticiens, un article technique pour reprendre la pose d’épreuves mal tirées et jaunies : Photo-index : organe bi-mensuel : photographie, astronomie, optique, sciences, rédacteur en chef Charles Lansiaux, 20 mars 1914, p. 140, 8e année. Les deux dernières, publiées dans des journaux à grand tirage, dans Le Matin du 19 septembre 1914 (p. 2) et dans Le Journal du 25 décembre 1915 (p. 5), à plus d’un an d’intervalle, sont des annonces de demande d’emploi dans lesquelles L. Niord s’identifie comme un photographe professionnel.
37FJSP, Fonds Ralph Laclôtre, Lettre manuscrite de L. Niord à Laclôtre du 18 janvier 1950 (sans lieu). Accompagnée du côté de Laclôtre d’une carte administrative des départements de la France crayonnée au stylo pour situer la modification des contours des secteurs.
38Voir, à titre d’exemples, la publicité pour la caméra Pathé-Baby dans l’Almanach Hachette (Paris, Librairie Hachette et Cie), en 1925 ou encore l’encart publicitaire pour la caméra Pathé-Baby, L’Illustration, 2 mai 1925.
39Voir les présentations des fonds Joliot-Curie-Langevin par Hélène Langevin, Pierre Joliot et Nicolas Nogues (association INEDITS) et les fonds du Museo nazionale del cinema di Torino, Fondazione Maria Adriana Prolo par Gabriele Perrone lors du colloque « Du Pathé-Baby au 9,5 mm, l’invention du cinéma chez soi », 5 et 6 décembre 2022, INHA/FJSP.
40FJSP, Fonds Georges Duthil, Coupure de presse « Chronique d’amateur » de L. Leconte, Le Courrier du cinéma, 28 mai 1926.
41FJSP, Fonds Georges Duthil, Photographie N/B, Prise de vues scénographiées, Première semaine cinématographique, 12 mai 1926, Palais Marceau, Lille.
42Voir, à titre d’exemple, l’encart publicitaire pour la caméra et le projecteur Pathé-Baby, La Photo pour tous, janvier 1926.
43Duclair-Northy, Pour bien tourner. Guide du cinégraphiste amateur, Illustrations de Marjollin, 3 planches hors texte d’après films des auteurs, Paris, C. Lemonnier Éd., 1924, 18,5 × 19 cm, 149-VII p. Nous remercions Julie Guillaumot (association Inédits) de nous avoir indiqués l’existence de cet ouvrage. L’association Inédits est une association européenne, à but non lucratif, créée en 1991 pour encourager la collecte, la conservation, l’étude et la mise en valeur des films amateurs, notamment ceux produits avec des Pathé‑Baby.
44E. Shahmiri, « Le cinéma partout et pour tous… », op. cit.
45FJSP, Fonds Ralph Laclôtre, Coupures de presse annonçant ou chroniquant une projection Pathé-Baby par Ralph Laclôtre au sein de clubs de ski, sur la période 1934-1938 ; sur l’utilisation par des clubs de randonnée, voir par ex. les fonds de films amateurs conservés par la Filmoteca de Catalunya.
46FJSP, Fonds Ralph Laclôtre, Chiffres de vente 1935, première année où figure dans la source une rubrique spécifique « Enseignement ».
Auteur
Ancienne élève de l’École normale supérieure, agrégée d’histoire, Églantine Cussac est doctorante à l’université de Strasbourg (UR 3400 Arche). Ses travaux de thèse portent sur les voyageurs et représentants de commerce en France des années 1880 à 1937, dans une perspective d’histoire sociale et économique des pratiques commerciales. Dans ce cadre, elle a publié « Fragiles réputations : défendre la respectabilité du voyageur de commerce dans la France des années 1920 et 1930 », ART, n° 5, Tours, Laboratoire ICD, 2022, disponible en ligne : https://art.icd.univ-tours.fr/la-revue-a-r-t/revue-a-r-t-n5, et elle a notamment participé, avec Leïla Laclôtre et Myrtil Laclôtre-Regnault, au colloque international organisé par la Fondation Jérôme Seydoux-Pathé et l’Institut national d’histoire de l’art à l’occasion du centenaire du Pathé-Baby.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Le grand état-major financier : les inspecteurs des Finances, 1918-1946
Les hommes, le métier, les carrières
Nathalie Carré de Malberg
2011
Le choix de la CEE par la France
L’Europe économique en débat de Mendès France à de Gaulle (1955-1969)
Laurent Warlouzet
2011
L’historien, l’archiviste et le magnétophone
De la constitution de la source orale à son exploitation
Florence Descamps
2005
Les routes de l’argent
Réseaux et flux financiers de Paris à Hambourg (1789-1815)
Matthieu de Oliveira
2011
La France et l'Égypte de 1882 à 1914
Intérêts économiques et implications politiques
Samir Saul
1997
Les ministres des Finances de la Révolution française au Second Empire (I)
Dictionnaire biographique 1790-1814
Guy Antonetti
2007
Les ministres des Finances de la Révolution française au Second Empire (II)
Dictionnaire biographique 1814-1848
Guy Antonetti
2007
Les ingénieurs des Mines : cultures, pouvoirs, pratiques
Colloque des 7 et 8 octobre 2010
Anne-Françoise Garçon et Bruno Belhoste (dir.)
2012
Wilfrid Baumgartner
Un grand commis des finances à la croisée des pouvoirs (1902-1978)
Olivier Feiertag
2006