1L’apprentissage organisationnel est le plus souvent défini comme la capacité d’une organisation à modifier ses pratiques pour répondre à une évolution de l’environnement (Cyert, March, 1963), ou comme la volonté de corriger un échec ou une mauvaise performance (Argyris, Schön, 1978). Il combine alors des dimensions individuelles et structurelles pour dépasser les routines de l’organisation, en mobilisant des processus innovants d’articulation des compétences individuelles présentes dans l’organisation, notamment au travers de l’expérimentation.

2Dans ce sens, Valérie Inès de La Ville (1998) propose trois formes d’apprentissages, correspondant à des adaptations stratégiques de l’organisation à son environnement, soit par une modification de ses pratiques émanant de la génération d’informations apprenantes, soit par sa culture ou par sa structuration.

3L’approche cognitive prône alors une connaissance produite, diffusée, mémorisée, et utilisée comme gage d’apprentissage organisationnel. Dans ce sens, Gérard Koenig (1994) définit l’apprentissage organisationnel comme un « phénomène collectif d’acquisition et d’élaboration de compétences qui, plus ou moins profondément, plus ou moins durablement, modifient la gestion des situations et les situations elles-mêmes ». Cette approche est alors liée au processus rationnel de prise de décision décrit par David Garvin (1993), par quatre phases de production, de diffusion, de mémorisation, et d’utilisation de connaissances.

4L’approche culturelle traduit, elle, la génération d’une culture synergique commune, gage d’adaptation à l’environnement. Dans ce sens, Peter Senge (1990) évoque que les apprentissages individuels se diffusent à travers les unités de l’organisation grâce à une culture commune partageant un certain nombre de valeurs, de règles, et de comportements.

5L’approche structuraliste s’appuie, enfin, sur l’adaptation stratégique de la structure organisationnelle aux réalités de l’environnement. Dans ce sens, plusieurs auteurs, dont Alfred D. Chandler (1962), avancent que les organisations peuvent adopter des structures qui encouragent l’apprentissage, la stratégie jouant le rôle de filtre entre la structure et l’environnement.

6Dans ce cadre, les niveaux d’apprentissage organisationnel peuvent être aussi différents. Ainsi, Chris Argyris et Donald Schön (1978) distinguent des apprentissages adaptatifs et génératifs.

7Le premier, dit en simple boucle, permet d’ajuster les pratiques de l’organisation, mais ne conduit pas à des changements de valeur importants. Il peut par exemple concerner la modification des ressources organisationnelles (financières, par exemple), sans changement stratégique majeur. L’organisation consolide ainsi ses compétences et pratiques dans le cadre de représentations et de normes établies.

8Le second complète le premier. Il est celui par lequel l’organisation révise ses valeurs et critères au travers desquels sont définies ses performances. C’est donc un processus d’apprentissage qui cherche à trouver des solutions plus durables, structurantes et long-termistes. L’apprentissage génératif, dit en double boucle, vise alors à favoriser un changement majeur dans le système de normes et de croyances, ou dans les objectifs stratégiques. Il s’agit d’un changement radical qui suppose le plus souvent un processus intentionnel de la part de l’organisation.

9Dans l’environnement public, plusieurs études abordent l’apprentissage organisationnel, en particulier en lien avec les systèmes de contrôle. Dans ce sens, Louise Kloot (1997) confirme la similarité des objectifs dans la définition des systèmes de contrôle et de l’apprentissage organisationnel : les deux concernent le changement ou l’adaptation d’une organisation afin de maintenir l’adéquation avec son environnement. Julien Batac et David Carassus (2009) démontrent, eux, comment l’utilisation d’un système de contrôle approprié peut faciliter la génération d’informations apprenantes, nécessaires durant les périodes de changement organisationnel. Sur la base d’une grille d’analyse mettant en relation les différents systèmes de contrôle interne d’une collectivité locale avec les apprentissages potentiellement générés, ils montrent l’importance de la dimension politique, notamment des élus, pour expliquer en quoi les systèmes de contrôle peuvent être bloquants ou apprenants.

10Le contexte public actuel invite les académiques et les praticiens à s’intéresser davantage à l’organisation apprenante comme cadre théorique et empirique adapté et profitable.