Managérialisme
p. 442-444
Texte intégral
1Le managérialisme est un concept central dans les débats autour de la gestion publique depuis les années 1990. Il imprègne à la fois une partie des réformes mondiales conduites dans le secteur public, qui ont pour objectif d’améliorer la performance des organisations et des services publics, et aussi un courant de littérature scientifique, qui critique la prégnance croissante du management dans le fonctionnement des organisations publiques.
2Dans la littérature scientifique, le managérialisme reste un concept polémique. Au contraire d’autres concepts discutés de la gestion publique, tels que le néolibéralisme ou le New Public Management, le managérialisme n’a jamais bénéficié d’une description formelle. La divergence dans la littérature est fondée sur le fait que le managérialisme revêt une multitude de manifestations dans plusieurs disciplines et induit des perceptions variées.
3L’analyse de la littérature permet d’identifier six approches différentes du concept de managérialisme :
l’assimilation du managérialisme à l’utilisation d’outils et de méthodes de gestion du service privé dans le service public : Total Quality Management (TQM), reengineering, empowerment, sont des solutions en soi ;
la perception du managérialisme comme une montée en puissance des managers : remplacement de professionnels et intellectuels par les technocrates au sein des organisations et au niveau de la société ;
la conceptualisation du managérialisme comme un nouvel archétype organisationnel adapté à tout type d’organisation visée ;
la conceptualisation du managérialisme comme un processus de réification : remplacement de la subjectivité par l’objectivité dans les rapports sociaux ;
l’association du managérialisme au New Public Management, le NPM, est le processus de réforme de la gestion publique, alors que le managérialisme est une approche idéologique de la gestion publique ;
la différenciation entre le managérialisme – un concept universel – et le new managerialism : le processus de managérialisation dans le secteur public exclusivement.
4Les réformes basées sur l’idéologie du managérialisme affichent l’objectif d’améliorer la performance des organisations et des services publics et d’augmenter leur efficacité. L’objectif de performance regroupe deux points :
la qualité de service et prestation – la qualité souvent comprise comme étant la transparence des activités et la rapidité de service, et
le bon fonctionnement des organisations – qui peut être garanti en se débarrassant de la lourdeur administrative traditionnelle.
5L’objectif d’efficacité se traduit souvent par :
la rationalité économique, et
l’appropriation des valeurs du marché. Ainsi, les valeurs comme la productivité, la rentabilité ou la diminution des coûts sont promues par le concept. La culture de résultats et la mesure en chiffres sont également liées à l’objectif d’efficacité.
6Un exemple de réformes managérialistes dans la gestion publique française est la loi organique relative aux lois des Finances (Lolf). Ce n’est pas uniquement une réforme budgétaire, c’est également un changement de culture profond qui substitue à la logique de moyens la logique de résultats. La loi met au cœur du fonctionnement administratif le triptyque « pertinenceefficacité-efficience », soubassement doctrinal du contrôle qui offre une analyse usuellement conduite a posteriori. Enfin, la Lolf, comme c’est souvent le cas des réformes managérialistes, a aussi un impact sur la culture. Il s’agit de responsabiliser les gestionnaires sur l’atteinte des objectifs des politiques publiques (efficacité socio-économique), la satisfaction des usagers (qualité de service) au moindre coût (efficience). Pour ce faire, les managers publics disposent de marges de manœuvre accrues en matière d’affectation des moyens à leur disposition.
Bibliographie
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Dunand Christophe, « Dépasser un Managérialisme insoutenable », Actualité sociale, 2011, n° 35, p. 14‑16.
Enteman Willard F., Managerialism: The Emergence of a New Ideology, Madison, The University of Wisconsin Press, 1993.
Hood Christopher, « Paradoxes of Public-Sector Managerialism, Old Public Management and Public Service Bargains », International Public Management Journal, 2000, vol. 1/3, p. 1‑22.
10.1016/S1096-7494(00)00032-5 :Locke Robert R., « Managerialism and the Demise of the Big Three », Real-world economics review, 2009, n° 51, p. 28‑47.
Tandilashvili Nino, « Le managérialisme et l’identité universitaire. Le cas de l’université française », thèse de doctorat en sciences de gestion sous la direction de Patrick Gibert, université Paris Nanterre, 2016.
Auteur
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Nino Tandilashvili
Enseignante-chercheuse, ISC Paris Business School, chercheuse associée, laboratoire Ceros, université Paris Nanterre.
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