Jean-Marie François Louis Branet (1868-1954)

Jean-Marie François Louis Branet

1Jean-Marie Branet est né le 29 juillet 1868, à Nogaro dans le Gers. À l’issue d’études de droit, il entre dans l’administration préfectorale. En 1890, il est attaché de cabinet du préfet de la Haute-Garonne et, le 5 janvier 1892, attaché de cabinet du ministre de l’Intérieur. À la fin de 1892, il occupe le poste de secrétaire général à la préfecture de l’Ariège.

2En 1894, il est sous-préfet de Pithiviers ; en 1896, secrétaire général de la préfecture de la Haute-Vienne, puis sous-préfet d’Yvetot, le 13 septembre 1897, et secrétaire général de la préfecture de la Gironde en septembre 1900.

3Il se voit confier, le 1^er décembre 1905, les fonctions de préfet de la Vendée. Dans ce département, très perturbé par la politique anticléricale du gouvernement, il se montre un administrateur avisé, faisant montre à la fois de fermeté et de bienveillance, dans ce poste difficile.

4Le 19 juillet 1907, il est nommé directeur du personnel et du matériel au ministère des Finances avec un traitement de 20 000 francs.

5Le 1^er janvier 1910, il occupe le poste de caissier payeur central du Trésor public, avec le même traitement. Il doit établir un cautionnement de 260 000 francs, fixé selon les prescriptions, en la matière, du décret du 28 septembre 1906.1

6Il est nommé officier d’académie le 28 mars 1901 et officier de l’Instruction publique le 30 septembre 1906. Il est fait chevalier de la Légion d’honneur le 1^er janvier 1907.2

7Après son départ à la retraite, il sera élevé au grade de commandeur le 11 février 1919.

8Sa carrière en douane va durer sept ans. Marcel Delanney, nommé préfet de la Seine, laisse la place de directeur général des douanes à Jean-Marie Branet qui accédera à ce poste le 18 juillet 1911. Curieusement, sa fiche personnelle ne porte pas l’indication de son nouveau traitement. On peut supposer que Marcel Delanney ayant touché 25 000 francs tout au long de son séjour en douane, il a dû en être de même pour Branet, tout au moins à ses débuts. Ce dernier attendra plus d’un an sa nomination de conseiller d’État en service extraordinaire, intervenue le 20 octobre 1912.

9 Les Annales des douanes, après avoir rapidement retracé son curriculum vitæ, concluent : « Cette carrière rapide, accomplie dans des postes difficiles ou délicats, avait permis à M. Branet de mettre en relief ses éminentes qualités d’administrateur. La fermeté bienveillante, la parfaite urbanité dont il avait fait preuve dans ces différentes fonctions, le désignèrent au choix de M. Caillaux, Ministre des Finances, lorsque s’ouvrit, en juillet 1907, la vacance de Directeur du Personnel et du Matériel. M. Branet arrive à la tête de l’Administration des Douanes précédé de la réputation d’un fonctionnaire habile et animé des meilleures dispositions à l’égard d’un personnel qu’il sait très attaché à ses devoirs ».3

10Ni ce journal, ni le recueil des circulaires de la direction générale ne font mention d’un discours ou d’une note de service de prise de fonctions, comme l’habitude en avait été prise au fil du temps.

11Pour sa part, L’Action douanière, faisant allusion à son comportement en tant que préfet de Vendée, et surtout à son attitude vis-à-vis des douaniers en tant que directeur du personnel des Finances, affirme qu’il arrive « précédé de la meilleure réputation ».4

12Ce n’est que le 10 octobre 1912, et à l’occasion d’une inspection des services de Marseille, que Jean-Marie Branet a fait allusion « à toute la responsabilité qu’il avait senti peser sur lui, le jour où la confiance du gouvernement l’avait appelé à la tête de l’Administration. Pour mener à bien une tâche aussi lourde, il se devait de faire preuve, à l’égard du personnel sous ses ordres, de la plus grande impartialité, de la plus entière justice. Aux demandes raisonnées de ce personnel, pour l’amélioration de son sort, il doit et donnera tout son concours ».5

13Si Jean-Marie Branet avait joui d’un préjugé favorable au début de son directorat, si ses efforts pour une revalorisation des traitements et une remise en ordre du système des retraites avaient été appréciés des agents, il n’en restait pas moins que les pensions et traitements des personnels subalternes qui, rappelons-le, touchaient en activité une rémunération de 3 à 4 francs par jour, les plaçaient parmi les salariés les moins favorisés.

14Soulignons que, sous le Premier Empire, la journée d’un ouvrier était évaluée à 3 francs et qu’elle n’avait pas augmenté, même légèrement, en un siècle.

15Nous avons vu que, vers le milieu de la guerre, une indemnité de cherté de vie a visé à rattraper la perte de niveau de vie des fonctionnaires.6

16 Les organisations professionnelles ont mené campagne pour que le traitement d’un préposé ne puisse plus souffrir de la comparaison avec le salaire d’un manœuvre des établissements de l’artillerie.7

17Par ailleurs, rappelons qu’au début de la guerre, les départs en retraite avaient été suspendus.

18Cependant, ultérieurement, certaines exceptions ont été décidées en cas d’invalidité ou d’incapacité. Jean-Marie Branet a été amené à refuser d’accéder à des demandes qu’il aurait certainement acceptées en temps normal.

19La stricte limitation de ces cessations de fonction était une prescription gouvernementale que l’administration a simplement appliquée.

20Cette prise de position, répercutée sur les directeurs régionaux, a amené cette réaction de L’Action douanière : « Dans une récente circulaire, notre très humain Directeur Général, toujours bien intentionné à l’égard du petit personnel qu’une fée tutélaire à mis sous ses ordres, invitait les Directeurs régionaux à se montrer très sévères vis-à-vis des vieux camarades qui, malades et à bout de souffle, sollicitaient leur mise à la retraite. »8

21Le préjugé favorable à l’égard de Jean-Marie Branet avait vécu !

22Il est symptomatique que les officieuses Annales des douanes aient lancé en 1917 une vaste « enquête sur la réforme administrative ». Il fut fait appel tant aux abonnés du service que du commerce. Le promoteur de cette action, derrière lequel on peut déceler l’ombre de Jean-Marie Branet, commença ainsi : « Nous pénétrons ici dans ce que M. Georges Pallain appelait si justement les "arcanes mystérieuses" de l’Administration. Bien que le temps du "secret des formules" soit passé, on retrouve en douane un attachement marqué en Douane à certains rites que "les enfants de la gabelle" ont recueillis et se sont transmis ».9

23L’un des soucis majeurs des correspondants vise à la « simplification » et à « l’éclaircissement » des formulaires administratifs. On réclame aux rédacteurs « d’être absolument précis et concis ». L’un préconise de raccourcir les circuits de transmission des dossiers, en s’écartant « de la sacro-sainte voie hiérarchique lorsque son maintien, à titre absolu, est le triomphe de la routine », dans les cas où le chef, appelé à exprimer un avis, n’en a pas la possibilité et doit se contenter d’un vu dont l’inutilité est manifeste. Un autre propose le remplacement des deux carnets de statistiques à l’entrée et à la sortie et du registre centralisateur par un seul, « comme le bon sens l’indique ». Un troisième suggère le remplacement des bordereaux en usage par l’apposition d’un tampon. Celui-ci voudrait que l’on se dispense de confier aux officiers « les fonctions d’officiers payeurs qui tiennent d’innombrables carnets, registres, documents en double, triple, quadruple ampliation pour la simple commodité de ceux qu’hypnotise le classement des archives ».10

24La pénurie des effectifs, prévisible en raison des vides causés par la guerre et de l’arrêt des recrutements, préoccupe nombre d’intervenants qui mettent l’accent sur la « désertion des fonctions publiques », déjà constatée avant-guerre.

25Nombreux sont ceux qui pensent que ceux qui ont acquis un grade d’officier dans l’armée voudront y rester, les traitements étant plus rémunérateurs. Certains font ressortir que l’administration ne trouvera plus d’agents du cadre supérieur, car l’élite se tournera vers des carrières industrielles ou commerciales.11

26Dans le même contexte, les Annales des douanes partent en guerre contre l’idée de la fusion des Contributions indirectes qui figure parmi les projets qu’a fait surgir le problème de la réorganisation administrative. Ce journal conclut en se disant convaincu que ce projet qui « consacrerait une nouvelle fois l’erreur de 1814 et 1852 » n’a pas de chance d’aboutir.12

27Peu après, il s’élève contre les propositions de loi « tendant au rattachement de l’Administration des Douanes au Ministère du Commerce ».13 Par contre, il se déclare favorable au rétablissement de l’inspection générale des douanes.14

28Il est vraisemblable que Jean-Marie Branet a donné son aval aux prises de position du journal, auquel nombre de ses subordonnés de la Centrale apportent une collaboration importante.

29Le directeur général se préoccupe des changements qui sont déjà intervenus dans les rapports de l’Administration avec les services d’exécution et leurs organisations. En décembre 1917, il définit devant les lauréats du premier concours d’inspecteur depuis l’ouverture des hostilités, le rôle du chef « dont l’action doit autant que possible s’appuyer sur la bonté et la fermeté ». Il indique « les difficultés de plus en plus grandes que comptera l’exercice de l’autorité. »15

30 Sur le chapitre de l’immobilier, Jean-Marie Branet a favorisé la construction de nouvelles casernes. Lorsque les bâtiments existants se sont avérés insuffisants, il a fait rechercher des solutions. C’est ainsi qu’il a fait entreprendre, au Havre, l’édification d’une nouvelle « maison des Douaniers ».

31Les Annales des douanes relatent ainsi la cérémonie d’inauguration présidée par le président de la République, Raymond Poincaré : « La construction dont il s’agit, dont l’initiative revient à M. Branet, réalisera une innovation qui peut être particulièrement féconde. Pour la première fois, les agents les plus modestes du service actif vont bénéficier de la législation sur les habitations à bon marché ».

32Dans un discours, Jean-Marie Branet a expliqué qu’il s’était adressé à une « société privée, spécialiste dans la construction économique de logements sains, et dont l’intérêt social est affirmé par la limitation obligatoire de ses dividendes ». Cela devrait permettre la mise à la disposition des plus modestes agents du Havre, de 200 logements dont les loyers seraient inférieurs aux loyers précédemment réglés pour des logements insuffisants.

33Nous avons vu que, sur le plan douanier, Jean-Marie Branet a fait prendre rapidement les mesures propres à mettre la douane en état de participer à la guerre économique avec les Empires centraux : interdiction de survol du territoire, institution de la contrebande de guerre, recherche des produits ennemis sur les navires, contrôles par la Marine nationale, intensification des contrôles à l’exportation, etc. Les unités de douaniers ont été au cœur des premiers combats et ont eu à subir les assauts des « Prussiens ».

34Les services de la direction générale ont eu à répondre aux demandes d’agents des deux services, classés dans la non disponibilité, désirant être versés dans les unités combattantes. Dans un premier temps, Jean-Marie Branet, tout en rendant hommage aux sentiments ayant inspiré ces demandes, a estimé qu’il n’était pas souhaitable de déroger à un statut fixé par le département de la Guerre et qu’il était préférable de conserver ces agents, appelés à rendre dans l’exercice de leurs fonctions, des services importants.16

35Suite à la mobilisation de toutes les classes de l’armée active et de la Territoriale, l’instruction de la classe 1914 risquait d’être confrontée à de grosses difficultés. Jean-Marie Branet indique aux directeurs régionaux : « L’Administration a pensé qu’il serait peut-être possible de faire collaborer à cette œuvre un certain nombre d’agents non encore appelés à l’activité ». Avant de soumettre cette proposition au ministre, il leur demande de rechercher les anciens gradés de l’armée susceptibles d’être utilisés comme instructeurs et qui pourraient, « sans inconvénient pour le service, être détachés dans les garnisons les plus proches ».17

36Par la suite, il proposera et mettra en œuvre le remplacement des agents âgés de plus de 45 ans, servant dans la zone des armées, par un nombre égal de leurs jeunes collègues servant à « l’arrière ».

37Cette dernière disposition a accentué un vieillissement des brigades qui n’alla pas sans poser quelques problèmes de fonctionnement. À souligner que les directions de Lille, Valenciennes, Charleville, Nancy et Épinal furent désorganisées par l’invasion allemande, Branet ordonna aux directeurs de rester sur place, de faire replier les caisses et les archives et de s’occuper des agents restés sur place et des familles de douaniers.

38Il fallut, comme en 1870, porter assistance aux prisonniers. Lors des premiers combats, un millier de douaniers, soit le huitième des effectifs de la première ligne, était tombé aux mains de l’ennemi. Jean-Marie Branet a réussi à leur faire parvenir, par la représentation française en Suisse, un secours de 50 francs leur permettant de se procurer couverture et vêtements chauds, pour remplacer les tenues d’été portées aux combats.18

39Dans les premiers mois de la guerre, il a désiré répondre à l’inquiétude des femmes d’agents des brigades du Nord et de l’Est, évacuées sur l’ouest ou le midi, qui n’avaient pas de renseignements sur le sort de leurs maris, appelés à l’activité. Il n’a pas voulu se contenter de la procédure prévue par l’autorité militaire, qui prescrit que les demandes en l’objet doivent être formulées auprès des bureaux militaires organisés, à cet effet, dans certaines grandes villes.

40Il a indiqué aux directeurs « que, dans les circonstances présentes, il est de leur devoir de se faire les auxiliaires de ces familles en prenant l’initiative de ces démarches ». Il leur prescrit de se renseigner auprès de leurs collègues du Nord et de l’Est sur la situation militaire des agents en cause (l’indication du bataillon, de la compagnie ou de la section et du lieu où se trouve l’unité). Ils devront charger l’officier le plus rapproché du domicile des correspondants de remplir les formalités prévues, voire de s’en charger lui-même.19

41L’invasion et la poursuite des hostilités ont amené l’ensemble des douaniers à montrer de réelles qualités de solidarité. Dès le début de la guerre, les Annales des douanes nous apprennent divers gestes, comme des collectes effectuées dans les services de « l’arrière » et des propositions d’hébergement. Pour sa part, Jean-Marie Branet indique aux directeurs qu’il approuve sans réserve la proposition faite par les douaniers de la région de l’Ouest de donner l’hospitalité aux familles de leurs collègues de l’Est et du Nord. Il décide de mettre à la disposition de ces familles les locaux susceptibles d’être transformés en logements.20

42Nous avons vu qu’il a encouragé la fondation de l’Œuvre des Orphelins et qu’il a contribué à faire accepter par le gouvernement que soit abandonnée, par les agents, une partie de leurs parts de saisie pour en assurer le financement. Ce sera son successeur, Ernest Bolley, qui portera le décret en l’objet à la connaissance du service.21

43Juste après l’annonce de son départ, il a reçu une lettre de la Fédération douanière qui l’informe : « L’Orphelinat est virtuellement fondé... La Fédération n’ignore pas que vous vous êtes intéressé particulièrement à cette œuvre féconde... Au nom de nos 450 pupilles, permettez-nous de vous remercier de vos bonnes intentions et de former le vœu que vous continuiez, par la suite, à manifester à ces enfants, qui sont un peu les vôtres, votre généreux appui. »

44Jean-Marie Branet a apporté son concours à nombre d’organismes économiques : en 1911, à la commission des fraudes successorales à l’étranger ; en 1912, au Conseil supérieur de la statistique, la commission chargée de constituer les nouveaux types farines, et à la commission de navigation aérienne ; en 1914, à la commission exécutive des achats et transports effectués en vue d’assurer l’alimentation nationale, à celle du ravitaillement, celle des achats et transports par mer, celle des débits de tabacs ; en 1915, à la commission d’évaluation des stocks de pétrole et de contrôle du prix de ces produits, à la commission pour l’application à l’importation des actes relatifs à l’interdiction de commercer avec l’ennemi ; en 1916, au Conseil supérieur du tourisme ; en 1917, à la commission de révision des droits de sortie sur les produits chimiques et pharmaceutiques, à la commission des changes. Rappelons qu’il a présidé la commission chargée des dérogations aux prohibitions instaurées pendant les hostilités.

45Les derniers temps de son directorat ont été assombris par un différend sur les traitements avec l’Union générale du service actif qui a pris un ton polémique, lorsque le rédacteur en chef de L’Action douanière lui a attribué une déclaration « exprimant l’espoir qu’avant peu les douaniers retrouveraient l’aisance disparue ». Le directeur général a écrit au journal en affirmant : « Je n’ai jamais dit – ni jamais pensé – que l’aisance était disparue du foyer des douaniers. Mieux que d’autres, je sais que le Douanier français n’a jamais connu l’aisance. S’il est possible de la lui donner, nul ne sera plus heureux que moi ».22

46Publiant cette mise au point, le rédacteur en chef, Fabien Albertin, reconnaissant que les renseignements qui lui avaient été fournis étaient inexacts, conclut : « Les bonnes intentions de M. Branet ne sont suspectes à personne. Je lui demande de leur donner une forme concrète et effective. Par les actes qui suivront, M. le Directeur général peut mettre fin à l’ère des déceptions et des amertumes ».

47Par décret du 8 janvier 1918, Jean-Marie Branet, conseiller d’État en service extraordinaire, directeur général des douanes, est nommé directeur général honoraire des douanes. Il est, en même temps, nommé conseiller d’Etat en service ordinaire et c’est dans cette haute assemblée qu’il terminera sa carrière.

48Dans les documents consultés, il n’apparaît pas de motif à ce départ que rien ne laissait supposer, si ce n’est les rumeurs escortant les projets de réorganisation administrative évoqués plus haut, peut-être aussi une certaine lassitude devant les attaques qu’il venait de subir. Tout aussi discret qu’à sa prise de fonction, Jean-Marie Branet n’a pas laissé de circulaire d’adieux à un service qu’il a dirigé pendant six ans et demi et avec qui il venait de vivre les vicissitudes de la guerre.

49Les Annales des douanes ne font pas état d’un discours qu’il aurait pu prononcer devant le personnel de l’administration centrale. Elles relatent son départ en page intérieure, dans la rubrique « Informations et Échos », alors qu’elles avaient consacré une annonce de première page au départ de Delanney et qu’il en a été généralement de même pour les autres directeurs généraux.

50Le rédacteur, après avoir annoncé sa nomination à de hautes fonctions, poursuit : « Ancien Préfet, M. Branet avait été placé en 1911 à la tête de l’Administration des Douanes. Si, pendant près de sept ans, sa gestion n’a pas été marquée, comme celle de son prédécesseur, M. Delanney, par des réformes radicales, elle n’en a pas moins été féconde malgré les graves éléments survenus depuis 1914.

51« S’intéressant vivement à son service, en suivant tous les détails, constamment soucieux de réagir contre les méthodes routinières et de faire de la Douane un organisme approprié aux exigences modernes du commerce, M. Branet s’était efforcé de réaliser les modifications et les simplifications propres à atteindre ce but. Son passage à la Direction Générale, laissera une empreinte durable.

52 « On ne fera aussi que lui rendre justice en reconnaissant que, chargé de coopérer à la préparation et d’assurer l’exécution des mesures nécessitées par la guerre économique, il a consacré à cette lourde tâche ses facultés d’organisateur, de fonctionnaire laborieux, et qu’il a su obtenir de tous ses collaborateurs un effort exceptionnel qui aura été difficilement égalé dans les autres services. Le personnel, qui avait pu apprécier l’esprit de bienveillance de M. Branet et qui avait fondé sur lui de grandes espérances pour l’après-guerre, n’apprendra pas sans de vifs regrets la nouvelle de son départ ».

53Le rédacteur indique ensuite qu’au moment de mettre sous presse, est intervenue l’annonce de la nomination d’Ernest Bolley.23

54Le 1^er février, ce journal publie un communiqué dans sa rubrique « Informations », disant que : « À l’occasion de son départ, M. Branet a reçu de très nombreux témoignages de sympathie. Se trouvant empêché de répondre individuellement à chacun d’eux, M. Branet a demandé à la direction des Annales des douanes d’être auprès de tous l’interprète de ses meilleurs remerciements. Durant plus de six années, il a pu apprécier la conscience professionnelle, le dévouement sans limites de ses collaborateurs et les difficultés, aggravées par la guerre, de leur labeur quotidien. Il considère comme l’honneur de sa carrière d’avoir dirigé le plus beau service de l’État, et conservera à tous ceux qui l’ont aidé dans sa lourde tâche un souvenir amical et reconnaissant ».24

55Il se montre, une fois de plus, peu enclin à la manifestation de ses sentiments. Remarquons que dans ses circulaires, comme dans ses allocutions et discours, il a toujours gardé une tonalité technique, administrative, presque impersonnelle.

56Nous venons de voir son sentiment sur le devenir des relations entre la hiérarchie et le personnel d’exécution. On ne trouve, dans les Annales des douanes, qu’une seule trace de son opinion sur les devoirs d’un fonctionnaire. Un an et demi après sa nomination à la Direction Générale, et à l’occasion de la visite du port de Marseille, il s’adresse ainsi au personnel de ce grand port : « Il ne suffit pas de remplir ponctuellement ses obligations ; il faut encore, pour réaliser l’idéal moderne du bon fonctionnaire, remplir avec goût les obligations quelquefois ingrates qui vous sont dévolues ; il faut, en un mot, aimer son métier. C’est à cette condition que les services que vous rendrez donneront pleine satisfaction à la fois à vos chefs et au public, notre maître à tous ».25

57 Il est possible de dire que, pour sa part, il a œuvré pour remplir « ponctuellement ses obligations ». Ses initiatives en matière d’amélioration de la situation des personnels se sont heurtées aux sempiternelles contraintes budgétaires. Il faut se garder de penser, comme l’ont affirmé certains responsables de l’Union générale du service actif, qu’il a pratiqué la politique de l’autruche ou qu’il a « déclaré la guerre au personnel des brigades ». Il s’est entremis auprès des ministres Caillaux et Klotz pour faire aboutir les améliorations des traitements du personnel d’exécution, qu’il projetait.

58En revanche, nous sommes amenés à constater que, pendant son directorat, les structures administratives et les procédures douanières n’ont connu que des progrès de détail. Si cela se conçoit pour la période des hostilités, c’est moins explicable pour les trois années d’avant-guerre. Mais peut-être estimait-il que la très importante réorganisation Delanney devait affronter l’épreuve du temps avant d’envisager de nouveaux changements.

59Jean-Marie Branet restera cinq ans au Conseil d’État, avant d’être admis, en 1923, à faire valoir ses droits à la retraite. Il est alors nommé conseiller d’État honoraire. Il n’a que 55 ans !

60De 1907 à 1925, il aura exercé les fonctions de secrétaire de l’Association de l’administration préfectorale qu’il a fondée.

61Il décède le 29 mai 1954 à Paris, à l’âge de 86 ans.