Chapitre VI. La Grande Guerre, 1914-1918
p. 321-361
Texte intégral
I. LES DOUANIERS DANS LA GUERRE
1C’est une administration, entièrement tournée vers la guerre que Jean-Marie Branet et Ernest Bolley conduiront de 1914 à 1918. Dès que la tension politique entre l’Allemagne et la France a laissé présumer une nouvelle confrontation armée, les douaniers des régions menacées ont quitté leur poste du temps de paix pour aller exercer, conformément à leurs consignes, une surveillance spéciale à l’extrême frontière. Ils avaient la charge de garder les passages importants (ponts, viaducs, voies ferrées) et de s’opposer à toute tentative de sabotage susceptible de retarder ou d’empêcher les mouvements et la concentration des unités militaires.
2Après la publication de l’ordre de mobilisation générale, daté du 1er août 1914, les unités constituées des douanes actives ont été placées ipso facto à la disposition du ministre de la Guerre sur toute l’étendue du territoire.
3Dans un premier temps, le commandement militaire, soucieux d’éviter tout incident, a décidé de maintenir les troupes à au moins dix kilomètres de la frontière. Seuls les douaniers et les forestiers ont assuré la surveillance aux limites du pays. Des fusillades les ont opposés aux patrouilles allemandes pendant les premiers jours de la guerre, alors même que la troupe était revenue en première ligne.
4L’honneur d’avoir fait le premier prisonnier allemand revient sans doute à la brigade des douanes de Chèvremont dans le Haut-Rhin. Cette unité, en surveillance le 2 août, a été prise à revers par une patrouille de dragons allemands. Ceux-ci, reçus à coup de fusils, se sont enfuis laissant l’un d’entre eux, désarçonné et blessé, qui a été fait prisonnier et remis à l’autorité militaire.1
5Le 3 août, Viviani, président du Conseil, déclare à la Chambre : « Des coups de fusils ont été tirés sur nos soldats et nos douaniers. Il y a eu des morts et des blessés. »
6Les agents du service sédentaire, libérés de toute obligation militaire des directions d’Épinal, de Nancy, de Charleville, de Valenciennes et de Lille, se sont repliés, dès le 2 août. « Leur froide initiative s’est employée à mettre à l’abri d’une main mise de l’ennemi les fonds dont ils étaient détenteurs et les archives de leurs bureaux ; à liquider dans la mesure du possible les droits en suspens ; à évacuer sur des bureaux de l’intérieur les marchandises non dédouanées ; plaçant parfois le souci de la sauvegarde des droits du Trésor avant celui de leur sécurité personnelle. »2
7Leur repli a procédé aussi d’une autre raison. La convention de La Haye permet à l’envahisseur de lever, pendant l’occupation d’un pays, les impôts existants. Le recouvrement en est confié aux fonctionnaires du pays envahi qui peuvent être requis par les autorités d’occupation. Le départ des agents chargés de percevoir les impôts et notamment des douaniers, avait donc pour autre but de contrarier l’organisation des services allemands.
8Rappelons que la loi du 24 juillet 1873 et le décret du 22 septembre 1882 ont déterminé les principes fondamentaux de l’organisation du corps spécial des douaniers, organisation défensive au premier chef. Les agents du service actif sont partagés en deux catégories. La première reprend tous ceux servant à proximité des places fortes et est formée en bataillons, compagnies ou sections de forteresse. La seconde, qui reprend tous les autres agents des brigades, est constituée en bataillons, compagnies et sections actifs, appelés à seconder, « dans la région de leur service de paix », les armées en opérations.
9Cette répartition est arrêtée par le ministre de la Guerre, après accord du ministre des Finances. Les cadres sont ceux de la douane. Une compagnie comprend un capitaine, deux lieutenants, le sergent-major, un sergent fourrier, quatre sergents, huit caporaux, deux clairons ou tambours. L’état-major du bataillon est composé d’un inspecteur, chef de bataillon, d’un capitaine ou d’un lieutenant-adjudant-major qui peut être pris parmi les officiers de l’armée active.
10L’uniforme et les insignes restent ceux qui existent en douane. Les officiers sont nommés par décrets du président de la République. Toutes les mutations ou nominations doivent être notifiées au bureau de recrutement du ressort. La situation militaire des douaniers est réglée par des feuilles d’affectation spéciale.
11Au début de la guerre, le corps armé des douanes comprend 31 bataillons actifs, 5 bataillons de forteresse et un bataillon mixte situé en Corse. Il comprend, en outre, des compagnies et des sections indépendantes actives ou de forteresse, et des sections alpines. Ces unités sont rattachées, pour l’appel à l’activité, au corps d’armée dans la région duquel se trouve l’Inspection des douanes.
12Le ministre de la Guerre a fait connaître à l’avance les unités qui doivent être mises à la disposition de l’autorité militaire, les autres continuant à fonctionner comme en temps de paix.3 Les douaniers appelés à l’activité sont soumis à toutes les obligations du service militaire. Ils sont assimilés aux soldats de l’armée active pour les prestations et indemnités.4
13Les unités du service actif, après avoir assuré à l’extrême frontière la défense du territoire national, ont peu à peu cédé la place aux troupes constituées et se sont fondues avec les éléments de l’armée de première ou deuxième ligne.
14Tandis que les unités de forteresse ont renforcé les garnisons des places fortes qui leur ont été assignées, certaines unités ont fourni aux troupes combattantes, notamment dans les massifs des Vosges, des guides expérimentés et courageux.
15Il y a une distinction à faire entre les brigades appelées à participer aux opérations de l’armée et entrant dans l’organisation militaire et celles qui continuent leur service du temps de paix suivant les règles de l’organisation administrative.
16Alors que ces dernières unités restent des organismes purement fiscaux, ne se rattachant à l’armée que par le concours qu’elles lui prêtent, les brigades comprises dans la zone des opérations et qu’un ordre du ministre de la Guerre a appelé à l’activité, font partie des troupes combattantes et relèvent exclusivement de l’autorité militaire.
17Le sort particulier réservé aux douaniers a vite heurté les responsables de l’armée et suscité des réactions dans la population. Dans l’intérieur, la présence d’agents appartenant à des classes mobilisables était considérée comme une anomalie. Dans la zone de guerre, les unités douanières faisaient partie des unités territoriales et, autre anomalie, comprenaient de jeunes agents.
18À l’initiative de Jean-Marie Branet, un millier d’agents – officiers, sous-officiers et préposés – a été prélevé sur les brigades de l’intérieur pour assurer la formation des recrues de la classe 1914.
19Il est possible d’évaluer à 8 000 le nombre d’agents du service actif à la disposition du ministre de la Guerre. Ce chiffre sera porté à 10 000 au début de 1915. Pour les agents du service sédentaire, la non disponibilité a été levée pour tous les hommes âgés de moins de 35 ans. Par ailleurs, des agents de tous âges, du grade d’officier et se trouvant en position hors cadre se sont portés volontaires pour partir au combat. C’est ainsi que plus du tiers de l’effectif des bureaux s’est trouvé incorporé.
20Par la suite, et le conflit se prolongeant, les officiers et sous-officiers des douanes appartenant aux classes 1896 et plus récentes ont été affectés dans le corps de troupe de leur arme d’origine en remplacement d’un même nombre d’anciens servant dans les dépôts ou sur le front.
21Par ailleurs, Jean-Marie Branet a décidé la levée dans la zone de l’intérieur d’un nouveau contingent de la réserve de l’active, destiné à remplacer les douaniers âgés de plus de 45 ans ou pères de famille de plus de 6 enfants, qui seraient en conséquence remis à la disposition de la douane.
22Cette décision a pour but de rendre possible, sans désorganiser l’administration des douanes, l’incorporation dans leur arme d’origine, de nouveaux douaniers de la réserve de l’armée active restés à leur poste du temps de paix. Il devait être ainsi possible de renforcer les troupes du front, tout en donnant acte à l’opinion publique de son étonnement de voir de jeunes douaniers rester cantonnés à des tâches administratives.
23Quelques semaines plus tard, le ministre de la Guerre a décidé que tous les douaniers de la classe 1892 et des classes plus anciennes seraient rendus à l’administration. Le ministre, constatant qu’il y avait trop d’officiers dans les bataillons douaniers, a décidé de réduire le nombre des unités douanières de la zone des armées, et de verser dans leur arme d’origine les officiers des classes 1896 et plus récentes.
24Il a remis les autres à la disposition de la Douane. Jean-Marie Branet et ses services ont affecté ces cadres dans les directions de l’intérieur où, du fait de l’envoi aux armées des jeunes officiers, le contrôle des brigades n’était plus fait dans des conditions suffisantes.5 Les bataillons de la zone des armées ont été ultérieurement transformés en compagnies actives, affectées sur les frontières de Suisse et d’Alsace. Les bataillons de Dunkerque et de Belfort, ce dernier substantiellement renforcé, sont restés sur le front. Par contre les bataillons de Rouen et du Havre ont été démobilisés fin 1915.
25Début 1917, Jean-Marie Branet a obtenu le retour des agents du service actif, classés dans le service auxiliaire, afin de renforcer la surveillance des frontières maritimes et terrestres.
26En revanche, le gouvernement a voulu se libérer de la contrainte imposée par le décret du 22 septembre 1882, qui disposait que les unités de douaniers mobilisés seraient appelées « à seconder dans la région de leur service de paix, les opérations des armées actives ».
27Cette disposition, nuisible à l’intérêt de la défense nationale, a été modifiée par un décret d’octobre 1917, qui prévoit : « Le personnel des douanes est partagé en deux catégories :
La première catégorie comprend les préposés stationnés à proximité des places et ouvrages fortifiés ; elle est constituée en compagnies et section de forteresse.
La deuxième catégorie comprend tout le personnel valide non compris dans la première catégorie, elle est constituée en sections, compagnies et bataillons actifs.
Ces unités sont employées au mieux des intérêts de la défense nationale. »6
28C’est ainsi que sous l’impulsion des directeurs généraux, d’abord Jean-Marie Branet, puis ensuite Ernest Bolley, les services extérieurs ont pu prêter à la défense nationale un constant concours sans pour autant que soient compromis les intérêts économiques que la douane était chargée de défendre.
29Le concours du corps militaire des douanes lui a valu l’estime du Haut Commandement militaire et du gouvernement, qui a décidé que son drapeau prendrait part, le 14 juillet 1919, au défilé de la victoire à Paris.
30Ernest Bolley, successeur de Jean-Marie Branet depuis janvier 1918, en a informé l’ensemble du service en ces termes : « Partout où les unités de douaniers mobilisés ont servi, elles ont su faire apprécier leurs qualités de discipline et de dévouement patriote et, de leur côté, celles qui n’avaient pas été appelées à l’activité ont apporté un concours des plus utiles à la défense nationale. Le gouvernement de la République a tenu à donner au Corps Militaire des douanes ce témoignage particulier d’estime. Nul hommage ne pouvait mieux adoucir les douloureux regrets qu’ont causés au personnel les vides, si nombreux, que la guerre a causé dans ses rangs. »7
31Dans le défilé triomphal des drapeaux et des délégations des régiments français et alliés, a figuré une délégation de douaniers. Les Annales des douanes, rendant compte de la cérémonie, insistent sur cet « honneur bien mérité par ce corps d’élite qui, dans toutes les missions dont il fut chargé, se montra à la hauteur de ses devoirs et de ses traditions. »8
II. LA POLITIQUE DOUANIÈRE
32La politique douanière a pris l’aspect d’une guerre économique. Il s’agissait en effet de poursuivre un double but : d’une part, gêner le commerce de l’ennemi et, en conséquence, le ravitaillement de sa population et de son armée, ainsi que l’approvisionnement de son industrie ; d’autre part, économiser ou accroître les ressources économiques et financières de façon à être en mesure de faire face à la lutte d’usure imposée à la France et à ses alliés.
33Sur ce dernier point, la politique suivie par le gouverneur de la Banque de France, Georges Pallain, pendant les premières années du XXe siècle, a été déterminante. Nous avons vu, dans le chapitre précédent, que ce directeur général des douanes, instruit des difficultés connues par la France après la guerre de 1870, a constitué, lorsqu’il a occupé le poste de gouverneur de la Banque de France, un véritable trésor de guerre, qui allait permettre à la France de faire face sans trop de gêne aux dépenses de la guerre.9
34Par ailleurs, voici une fois de plus le gouvernement amené à prendre des mesures d’urgence concernant le commerce international. À l’instar de ses prédécesseurs, il va recourir à une loi vieille d’un siècle, lui permettant, s’il est pressé par la situation, d’édicter des prohibitions et de déterminer des droits de douane.
35Les dispositions prises par décrets doivent être soumises au Parlement, sous la forme de projet de loi, soit avant la fin de la session s’il est assemblé, soit à la session suivante dans le cas contraire.10
36La France va s’efforcer de contrecarrer les actes de commerce des ennemis, qu’ils soient directs ou par personne interposée, avec les sujets des deux empires allemand et austro-hongrois, ainsi qu’avec les personnes, de quelque nationalité qu’elles soient, résidant dans ces deux pays ou dans leurs colonies. De même, il est défendu aux sujets des dits empires de se livrer, directement ou par personne interposée, à tout commerce sur le territoire français ou dans un protectorat français.11
37Par la suite, vont être édictées des sanctions pénales pour les infractions à l’interdiction faite aux Français d’entretenir des relations d’ordre économique avec les sujets ennemis. Les infractions seront justiciables de peines de 500 à 20 000 francs d’amende, ainsi que d’un emprisonnement pouvant aller de 1 à 5 ans.12
38Jean-Marie Branet s’est tout de suite attaché à trouver le moyen pratique d’appliquer les dispositions du décret interdisant toute opération de commerce avec l’ennemi. Il provoque une décision interministérielle qui instaure un certificat de nationalité pour les expéditions de marchandises à destination de la France ou en transit à travers la France.13
39Ce document est établi par l’ambassade ou le consulat français, accrédité dans le pays où réside l’exportateur. Il y est certifié, après enquête, la nationalité du producteur ou du négociant et il est également attesté que les capitaux employés par l’intéressé ne proviennent pas de ressortissants de puissances en guerre avec la France.
40Le certificat doit également couvrir le transitaire ou l’agent de transport. Valable six mois, il couvre les envois importés par les bureaux d’une même direction. Les bureaux d’entrée doivent s’assurer de la régularité des opérations.
41Il leur appartient de participer à la détection des opérations commerciales effectuées en infraction à ces dispositions. Si le service a la preuve que des marchandises vont faire l’objet d’un acte de commerce interdit, il a mission de retenir ces marchandises et de saisir la justice. Ceci doit jouer même s’il n’existe pas de preuves matérielles, mais seulement des présomptions sérieuses d’un tel acte.
42Pour faciliter l’application de ces interdictions, le gouvernement a établi des listes des personnes ou sociétés considérées comme ennemies ou comme jouant en faveur de l’ennemi le rôle de personne interposée. Les premières listes, reproductions de listes établies par le gouvernement anglais, ont directement été communiquées au service des douanes.14
43C’est par le Journal officiel que les commerçants français ont pu prendre connaissance de ces listes et des listes, conformes à l’usage, publiées ultérieurement.15
44Si la douane doit s’opposer à toute action commerciale des sujets ennemis, elle a aussi, et surtout, en application des interdictions énoncées par le décret du 27 septembre 1914, à assujettir l’importation des marchandises de certains pays à la présentation de certificats d’origine.16
45Ces documents, visés par la douane du pays d’exportation, sont dispensés de légalisation consulaire. Ils doivent attester de l’origine de la marchandise et certifier que celle-ci n’a pas été placée en transit, en entrepôt ou admission temporaire. Les douanes étrangères peuvent établir leur conviction par les moyens de leur choix, cependant la douane française est légalement fondée, en cas de doute sur la sincérité d’un certificat, à faire appel à l’expertise légale.
46Lorsqu’il y a transit en France, c’est le bureau d’entrée qui procède aux vérifications nécessaires tant sur la nationalité des opérateurs que sur l’origine des produits. Les justifications nécessaires sont à produire avant la formalité de mise en transit.17
47Des dérogations sont prévues pour les marchandises destinées à la fabrication de matériel de guerre. D’autres, prises tout au long des hostilités, concernent certaines marchandises en provenance des pays neutres susvisés.18
48Pour ce qui concerne les produits métallurgiques intéressant la défense nationale, en provenance d’Espagne, des Pays-Bas, du Danemark, de la Suède et de la Norvège, et pour lesquels le certificat d’origine n’est pas fourni, le ministère de l’Armement et des Fabrications de guerre peut demander à la direction générale des Douanes la dispense des justifications réglementaires. Celle-ci peut autoriser l’importation, sous réserve du paiement des droits repris au tarif général.19 Ces mesures s’appliquent aux matières premières, aux produits laminés, étirés, tréfilés etc. et aux appareils et engins mécaniques.
49Des procédures particulières sont applicables pour les envois en provenance de Suisse, le service des douanes est autorisé à considérer comme étant d’origine suisse les envois qui font l’objet d’une autorisation d’exportation du gouvernement suisse.
50Des dispositions spéciales sont également prévues pour les marchandises en provenance de la Belgique. Les demandes d’importation sont soumises au « comité de restriction des approvisionnements et du commerce de l’ennemi ». Ce comité statue sur le dossier présenté par la légation de Belgique. Il décide si l’importation est subordonnée au paiement des droits du tarif général et à la consignation en numéraire de la valeur des marchandises. Dans les autres cas, il y a application de la réglementation antérieure à la guerre et applicable en vertu d’accords franco-belges : admission en franchise, dispense de consignation, application du tarif minimum.
51Ce sont les bureaux de Jean-Marie Branet qui donnent aux services locaux les instructions nécessaires. Une procédure identique est prévue pour les importations de Belgique, transitant par la France à destination d’un pays allié ou neutre.20
52R. Pommereuil précise dans son livre sur La guerre économique que bien que la Belgique soit momentanément occupée par les armées ennemies, il eut été d’une rigueur excessive et manifestement contraire aux intérêts alliés, d’appliquer strictement aux marchandises belges la prohibition édictée par la loi du 17 août 1915 à l’encontre des produits allemands ou austro-hongrois.21
53S’agissant de marchandises obtenues ou fabriquées dans les pays tiers avec des matières originaires des Empires centraux, celles-ci ne peuvent être considérées comme originaires des pays tiers que si, d’une part il y a eu transformation complète ou si d’autre part il s’agit de marchandises dans lesquelles les produits et/ou le travail ennemi ont une valeur inférieure à 25 % de celle du produit fini. Si ce pourcentage est dépassé, les marchandises doivent être considérées comme étant d’origine ennemie.22
54Sur instructions de la direction générale des Douanes, les services de vérification des marchandises doivent porter une attention particulière aux documents présentés à l’appui des déclarations d’importation ou de transit déposées en application des diverses procédures ci-dessus énoncées.
55Par la suite, et consécutivement à des mesures prises par l’Allemagne sur la navigation dans la « zone de guerre », le gouvernement a prescrit de « considérer comme marchandises expédiées sur l’Allemagne tous articles et marchandises, de quelque matière que ce soit, expédiées directement ou par voie de transit sur l’Allemagne ou sur un pays voisin de l’Allemagne, lorsque les documents qui accompagnent les dits articles ou marchandises ne fournissent pas la preuve d’une destination finale et sincère en pays neutre. »23
56La marine française est donc chargée d’arrêter et de conduire dans un port français ou allié les marchandises appartenant à des sujets allemands venant d’Allemagne ou expédiées vers l’Allemagne. Celles-ci seront débarquées et mises sous séquestre si elles appartiennent à des Allemands. Si elles appartiennent à des neutres, elles pourront être renvoyées vers le port de départ.
57La Douane et plus particulièrement ses services de vérification sont amenés à prêter leur concours aux services dépendant de la Marine et notamment au Conseil des prises.
58Jean-Marie Branet rappelle : « Aucune disposition législative n’exempte, en effet, des droits actuellement existants les marchandises de cette catégorie. Il est donc indispensable qu’elles demeurent, pendant toute la durée de leur séjour dans le port, sous la surveillance de la douane qui aura soit à contrôler leur réexportation si elles sont renvoyées à leur port étranger de départ ou sur un port allié ou neutre, soit à assurer leur réexpédition sous régime de douane si elles sont dirigées sur un autre port français, soit enfin à liquider et à recouvrer les droits exigibles si elles sont vendues pour l’importation ».24
59Jean-Marie Branet doit prendre des mesures pour assurer la surveillance des envois à destination des pays neutres et collaborer à la visite des navires dans les ports et à la surveillance des trafics suspects avec l’ennemi.25
60C’est en application du décret du 13 mars 1915, qu’est arrêtée la procédure à suivre :
61– dans chaque port, un vérificateur est désigné pour examiner les justifications produites et pour délivrer les « autorisations de passer ».
62– tout exportateur de marchandises à destination d’un pays neutre devra fournir une « annexe » affirmant, après enquête effectuée par ses soins, que le destinataire réel n’est pas, à sa connaissance, un ressortissant ennemi et que les marchandises expédiées ne sont pas destinées à être ultérieurement dirigées vers un pays ennemi.
63– pour les marchandises prohibées à la sortie, un exemplaire de l’autorisation de sortie sera produit à l’appui de la déclaration.
64Il appartient au vérificateur de porter une attention particulière sur les exportations destinées aux pays voisins des Empires centraux. Des listes de négociants suspectés de trafic avec l’ennemi ainsi que des commerçants ressortissant des nations en guerre avec la France, établis en pays neutre, seront fournies au service.
65Si une enquête plus approfondie s’avère nécessaire, des exemplaires de déclaration annexe seront envoyés au consul du lieu de destination par l’intermédiaire de la direction générale et du ministère des Affaires étrangères.26
66Soulignons que ces dispositions ne visent pas les marchandises considérées comme contrebande de guerre.
Contrebande de guerre
67Le gouvernement va d’abord utiliser les dispositions existantes en matière de contrebande. Il fait « savoir aux intéressés que, pendant les hostilités, il considérera comme contrebande absolue les armes et munitions de toute nature, les habillements et équipements militaires, les animaux de selle, de bât ou de trait, les bateaux de guerre et leurs pièces détachées, les avions et ballons et leurs pièces détachées. »
68Il indique qu’il est susceptible « de considérer comme contrebande conditionnelle les vivres et les fourrages, l’or et l’argent en lingots ou en monnaies, les papiers représentatifs de la monnaie, les véhicules pouvant servir à la guerre, les navires de tous genres, les combustibles, les poudres et explosifs et les instruments nautiques ou d’optique pouvant être utilisés à des fins militaires. »
69Il est tout à fait vraisemblable que Jean-Marie Branet et ses services ont été mis à contribution pour la rédaction de cette liste, parue dans les premiers jours de la guerre, ainsi que des listes complémentaires qui ont fait connaître de nombreuses adjonctions.27
70C’est aux services de vérification des marchandises qu’il appartient de faire toute vérification nécessaire en la matière. Si leur tâche est relativement facile lorsqu’il s’agit de matériels de guerre faisant partie de la catégorie « contrebande absolue » qui sont saisissables sans condition d’usage, le travail est plus délicat pour les objets de la catégorie « contrebande conditionnelle » que l’on ne peut saisir que lorsqu’il est à présumer d’une utilisation militaire.
71Le service est donc invité à agir avec perspicacité et à redoubler de vigilance dans ses contrôles. Ceux-ci, précédemment limités aux opérations d’importation, vont porter également sur les exportations. Ils vont, bien entendu, accroître sensiblement la charge de travail de bureaux déjà en sous-effectif du fait de la mobilisation d’une partie importante des agents sédentaires.
72Jean-Marie Branet précise : « L’examen des papiers de bord (manifeste, connaissements, etc.) sera fait avec la plus grande attention et il y aura lieu de procéder à une visite minutieuse de tout le bâtiment, sans que cette visite dégénère, cependant, en une occupation dont le capitaine pourrait légitimement se plaindre. Cette visite sera effectuée par les agents ordinairement chargés de se rendre à bord des navires dès leur arrivée dans le port ; on leur adjoindra un ou plusieurs vérificateurs, suivant le cas, qui auront à se livrer à des investigations aussi complètes que possible, étant entendu que les colis ne seront pas ouverts ».
Prohibitions de sortie
73Du fait de la guerre, le gouvernement a été amené à pratiquer une nouvelle politique en matière d’exportation. En règle générale les prohibitions de sortie ne font pas la différence entre les pays de destination des marchandises, ainsi qu’entre les régimes douaniers sous lesquelles celles-ci sont placées. Dès le début des hostilités, le gouvernement a cherché à contrecarrer l’approvisionnement de l’ennemi. Il a voulu aussi retenir sur le sol national les produits nécessaires à son industrie et au ravitaillement de la population.
74Peu de temps avant la déclaration de guerre, le gouvernement a fait préparer un texte répondant à cette préoccupation.
75C’est ainsi qu’un décret pris le 31 juillet 1914, préparé avec la collaboration de Jean-Marie Branet et de ses services, prohibe la sortie et la réexportation en suite d’entrepôt, de dépôt, de transit, de transbordement et d’admission temporaire, c’est-à-dire sous un régime quelconque, des principaux produits susceptibles d’alimenter la contrebande de guerre.28
76Ce décret a été pris en vertu des dispositions de l’article 34 de la loi du 17 décembre 1814 déjà évoqué en début de chapitre et dont le paragraphe 3 autorise le gouvernement à permettre ou à suspendre, par décret, l’exportation des produits français, et à fixer des droits de douane à la sortie. Ces mesures devaient faire l’objet d’un projet de loi présenté au Parlement avant la fin de la session s’il est assemblé ou à la session suivante dans le cas contraire. Ces pouvoirs exorbitants ont déjà été utilisés à maintes reprises tout au long du XIXe siècle et le seront encore pendant les premières années de la Grande Guerre, notamment en matière d’importation, comme nous le verrons plus loin.
77Les sanctions prévues par la loi du 17 décembre 1814 en matière de marchandises prohibées étant manifestement insuffisantes en période de guerre, le gouvernement a fait adopter par le Parlement, une loi comportant des sanctions plus sévères. Les infractions de l’espèce seront punies d’un emprisonnement pouvant aller jusqu’à deux ans, l’amende sera portée de 500 à 5 000 francs. La confiscation des marchandises et des moyens de transport, déjà prévue par le texte de 1814, est maintenue dans la loi du 17 août 1915 « relative à la répression des infractions aux dispositions réglementaires portant prohibition de sortie ».
78R. Pommereuil souligne : « Les délits prévus par cette loi tiennent à la fois, du droit commun et de la législation douanière et peuvent être poursuivis concurremment par le Ministère Public et par l’Administration des Douanes ».29
79Pour limiter les entraves à l’industrie et au commerce français causées par la décision de prohibition de sortie évoquée plus haut, le gouvernement a instauré une « commission des dérogations aux prohibitions de sortie ». Elle comprend des délégués de tous les ministères concernés et est présidée par le directeur général des douanes agissant par délégation du ministre des Finances.
80Elle prépare les décrets de prohibition et examine la possibilité d’accorder des dérogations générales en faveur de certains produits et pour certaines destinations.
81Jean-Marie Branet et les autres membres de la commission ont décidé, devant les nombreuses difficultés d’application de la loi du 17 août 1915, de promouvoir une politique de contingentement qui a été ensuite adoptée par tous les pays alliés. Ce sont les services douaniers qui établissent les statistiques des quantités réellement exportées, au moyen d’états de quinzaine produits par les directeurs régionaux.
82La commission a eu pour tâche délicate l’instruction des demandes individuelles de dérogation.
La réglementation à l’importation
83À l’importation, le gouvernement a poursuivi un double but : il convenait, d’une part, d’assurer le ravitaillement de la population et, d’autre part, de veiller à l’approvisionnement de l’industrie et en premier lieu de l’industrie nécessaire à la défense nationale.
84Comme à l’exportation, le gouvernement a d’abord utilisé les pouvoirs spéciaux donnés par la loi du 17 décembre 1814. De nombreux décrets ont réduit, et le plus souvent suspendu, les droits de douane à l’importation. Il a été décidé de l’admission en franchise du matériel des armées alliées et de leur approvisionnement. Le Parlement a toujours ratifié facilement ces textes justifiés par l’urgence.
85Jean-Marie Branet et son administration centrale ont eu un accroissement sensible de travail en matière de personnel et de comptabilité pour faire face à l’appel à l’activité des unités douanières des frontières du Nord et de l’Est et à des mobilisations individuelles. Par ailleurs, les problèmes d’ordre tarifaire se sont amplifiés avec les mesures inhérentes à l’effort de guerre.
86Jean-Marie Branet a donc été amené à renforcer sensiblement l’effectif du bureau du tarif et à créer une cellule chargée des contrôles de l’exécution des mesures de prohibition, de contingentement et des dérogations aux prohibitions d’entrée et de sortie.
87C’est à la lumière de l’expérience qu’il est apparu nécessaire de conforter la position gouvernementale en matière de « pouvoirs spéciaux », découlant de la loi du 17 décembre 1814. Pour ce faire, la loi du 6 mai 1916 « autorise le Gouvernement à prohiber l’entrée des marchandises étrangères ou à augmenter les droits de douane pendant la durée des hostilités par décrets rendus en conseil des ministres ». Ces décrets devront être soumis à ratification parlementaire dans les deux mois qui suivent leur promulgation. Ils peuvent être rapportés par décrets rendus en Conseil des ministres.30
88Rappelons que parmi les mesures engendrées par la guerre économique, le gouvernement avait rapidement décidé de faciliter les approvisionnements en denrées alimentaires et en produits utiles à la défense. C’est ainsi qu’il avait pris par décrets, ratifiés ensuite par le Parlement, des suspensions de droits d’entrée sur de nombreux produits.
89De même, et tout en s’efforçant de prévenir les abus, il avait admis en franchise les importations effectuées pour le compte des forces alliées.
90Bien que justifiées, ces mesures avaient eu l’inconvénient d’accroître le volume des importations, dans le même temps que les prohibitions de sortie avaient réduit très sensiblement les envois sur l’étranger.
91Si, parmi les importations, il y en avait qui étaient indispensables à la vie de la population et à la victoire de la nation, d’autres concernaient des marchandises de luxe dont l’importation avait entraîné d’importantes sorties de capitaux. Mais, dans le même temps, les rentrées de devises se trouvaient amenuisées par la prolifération des prohibitions d’exportation. Aussi le taux de change était-il devenu de plus en plus défavorable et les réserves accumulées par le gouverneur de la Banque de France, Georges Pallain, avaient diminué de façon préoccupante.
92Le gouvernement a été amené à prendre une série de mesures de prohibition ou d’augmentation des droits d’entrée pour des marchandises pour lesquelles l’appoint des pays étrangers n’était pas nécessaire à l’approvisionnement du pays.
93Les services de la direction générale des Douanes, sous la conduite de Jean-Marie Branet, ont été amplement sollicités pour l’établissement des listes des produits concernés par ces dispositions.
94Les différentes mesures gouvernementales évoquées ci-dessus ont eu un impact sur les recettes douanières. En 1911 et 1913, leur niveau avait atteint le chiffre record de 800 millions de francs. En 1914, les recouvrements ont affiché une baisse de 20 % et se sont établis à 630 millions de francs pour remonter à 925 millions de francs en 1915, à 1,5 milliard de francs en 1916 et à 1,8 milliard de francs en 1917.
95En 1918, les recettes ont chuté d’un demi-milliard. Jean Clinquart note : « L’accroissement des recettes douanières ne doit rien ou presque à la dépréciation de la monnaie, car les droits étaient perçus dans leur écrasante majorité sur des bases spécifiques. Il est la conséquence de l’extraordinaire gonflement de nos achats à l’étranger, dont on a vu plus haut qu’ils avaient triplé en francs courants dès 1916. Il témoigne aussi de l’augmentation de la charge de travail des services de dédouanement ; en particulier de ceux des ports maritimes ».31
96Par ailleurs, et comme en 1871, le gouvernement a demandé à la douane des ressources nouvelles pour faire face aux dépenses inhérentes à l’effort de guerre. Des droits de sortie ont été instaurés sur les produits chimiques et pharmaceutiques dont l’exportation a été autorisée en application de dérogations à la prohibition de sortie32.
97Les pouvoirs publics se sont aussi rendu compte qu’il ne fallait pas paralyser complètement le commerce extérieur de la France. Il a donc été prévu que des exceptions aux prohibitions d’exportation pourraient être instaurées par une commission interministérielle fonctionnant tous les jours à la direction générale des Douanes, sous la présidence effective de Jean-Marie Branet.33
98L’amélioration de la statistique douanière a permis aux organismes chargés de la confection de ces listes, d’apprécier au plus juste la portée des mesures envisagées. Il a fallu, entre autres, prendre en compte le fait que la suppression totale du commerce avec les Empires centraux avait éliminé une notable partie des importations.
99Cette mesure, bien que ne pouvant avoir le même effet qu’en temps normal, a atteint des courants commerciaux importants. Elle a été arrêtée par la loi de 6 mai 1915 et par deux décrets du 11 mai suivant.
100Par contre, l’effort d’armement et d’équipement des armées consenti par la France, a amené un accroissement particulièrement important des importations. « Celles-ci sont passées de 7,7 milliards de francs par an en moyenne entre 1910 et 1914, à près de 21 milliards de francs en 1916. L’excédent des entrées sur les sorties, qui était de 20 % avant guerre, a atteint 232 % en 1916. »34
101Le gouvernement s’est tout d’abord efforcé au cours des années 1915 et 1916 de n’user qu’avec pondération des pouvoirs spéciaux des lois du 17 décembre 1814 et du 6 mai 1916. Il a veillé à rendre compte, le plus scrupuleusement possible, des degrés de priorité des diverses catégories d’importation et des possibilités d’utilisation des transports maritimes.35
102La guerre se prolongeant, il a été amené à généraliser les prohibitions, en exécution d’un plan donnant la possibilité d’atteindre l’ensemble du commerce d’importation. Par un décret du 23 mars 1917, l’importation en France et en Algérie, sous un régime douanier quelconque, de toutes les marchandises d’origine ou de provenance étrangère, a été prohibée.36
103Tout comme pour les prohibitions à l’exportation, les prohibitions à l’importation ne pouvaient être appliquées strictement. Le décret du 22 mars 1917 les a édictées, d’ailleurs, à titre général. Des dérogations devaient être prévues à titre global ou à titre individuel pour les approvisionnements des usines d’armement et pour certaines industries d’exportation.
104En avril, un arrêté interministériel publie une liste des « marchandises bénéficiant de dérogations générales à la prohibition d’importation ». D’autres produits sont autorisés à l’importation « sous le couvert d’autorisations spéciales » sur avis du comité des dérogations aux prohibitions d’entrée ou sur avis de la commission des bois et métaux et fabrications de guerre.
105Il a fallu aussi tenir compte de certains statuts douaniers spéciaux tels que celui des zones franches de la Haute-Savoie et du pays de Gex. Il convenait enfin de ne pas gêner les opérations intéressantes pour l’économie nationale comme celles qui s’effectuaient sous le régime de l’admission temporaire.
106Le décret du 22 mars 1917 a prévu le classement des produits nouvellement prohibés en trois catégories :
Marchandises faisant l’objet de dérogations générales à la prohibition d’entrée et continuant à entrer librement : produits alimentaires et matières premières nécessaires au fonctionnement des industries d’armement et d’exportation.
Marchandises dont l’entrée est prohibée : d’aucunes pouvant faire l’objet de demandes de dérogations exceptionnelles instruites par le comité ad hoc.
Produits contingentés : en effet, en vue de mieux cerner le degré des besoins pour certaines catégories de marchandises, il a été prévu de les contingenter.
107Le gouvernement a instauré auprès du ministre du commerce un comité des dérogations aux prohibitions d’entrée au sein duquel les présidents des commissions des douanes au Sénat et à la Chambre, mais aussi le directeur général des douanes, ont été appelés à jouer un rôle particulièrement important. Ce comité établit et soumet à l’approbation du ministre du Commerce :
Des propositions de dérogation générale pour certaines marchandises.
Un contingent trimestriel des importations pour des produits déterminés par espèce et provenance.
Pour chaque contingent, un plan de répartition entre les divers groupements industriels ou commerciaux au prorata de leurs besoins industriels.
108Le rôle de la douane a été limité à la délivrance des licences autorisées par les ministères techniques. Répondant à une interpellation, le ministre des Finances explique ainsi à la tribune de la Chambre des députés, les attributions de Jean-Marie Branet : « L’administration des douanes ne délivre les autorisations d’importation que sur l’avis favorable du ministère du commerce et des comités qui siègent auprès de ce département. Son rôle se borne ainsi à enregistrer les décisions qui lui sont transmises ; elle n’a d’ailleurs communication des demandes d’autorisation que par l’intermédiaire du département du commerce et après qu’il a statué. Depuis le 18 octobre [1917], les autorisations sont annotées par la direction générale des Douanes dans les locaux mêmes du ministère du Commerce ».37
109Des dérogations particulières ont été accordées aux importations en provenance des pays anglais. C’est ainsi que la direction générale des Douanes a installé à Londres un échelon chargé d’instruire les demandes d’exportation sur la France de produits anglais. Cet organisme a fonctionné à partir de 1916. Les demandes de licence devaient être revêtues d’un certificat délivré par la chambre de commerce anglaise attestant que le lieu de production ou de fabrication des marchandises était situé dans l’Empire britannique. Devait y être jointe une attestation d’origine émanant de la chambre de commerce. Le dossier devait être adressé au ministère du Commerce britannique pour visa et transmission au bureau français.
110Alors que les ministres, notamment ceux des Finances et du Commerce, ont conservé en temps de guerre leurs attributions ordinaires, des organismes ont été créés pour l’examen des problèmes nés de la guerre. C’est ainsi que le directeur général des douanes a fait œuvre utile au sein du comité de restriction des approvisionnements et du commerce de l’ennemi, chargé des mesures à prendre pour définir les actions de contrebande de guerre et les produits qui sont soumis au décret du 13 mars 1915 concernant ces actions. Il a eu aussi pour mission de définir les prohibitions d’exportation.38
111Jean-Marie Branet, ou son représentant, siégeait au comité des transports maritimes. Il faisait partie des comités des dérogations aux prohibitions d’entrée et de sortie ainsi que de la commission des changes.
112Pour définir au mieux sa politique douanière, en ces temps de variations rapides et importantes de la valeur des marchandises, le gouvernement s’est vu dans l’obligation de cerner de très près la balance du commerce extérieur. Se rendant compte de l’imprécision des taux d’évaluation fixés par la commission permanente des valeurs en douane, il décide d’astreindre les déclarants en douane à indiquer désormais la valeur des marchandises importées ou exportées.
113Un décret du 25 octobre 1916 prévoit qu’indépendamment des qualifications et unités exigées pour l’application du tarif, les déclarations d’importation et d’exportation doivent énoncer la valeur des marchandises calculée au moment et dans le lieu de la déclaration en douane. Nous verrons dans la section relative à la gestion de l’administration les modalités pratiques de ces dispositions.
III. LA GESTION DE L’ADMINISTRATION
Jean-Marie Branet (18 juillet 1911-8 janvier 1918)
114Les effectifs de la douane s’établissaient, en 1914, à 21 443 agents, se décomposant en 185 agents supérieurs de direction et de contrôle, 2 080 agents des bureaux, 18 798 agents des brigades et 380 auxiliaires.39
115Précisons, pour les auxiliaires, que ce cadre précaire avait déjà été créé pour mieux assurer l’exécution du service et comprenait des dames chargées de la fouille à corps des personnes de leur sexe.
116Dès les premiers jours de la guerre, Jean-Marie Branet a donné l’ordre aux directeurs régionaux de faire replier le personnel des bureaux et les agents des brigades non mobilisables. Nous avons vu que ce repli s’est effectué en bon ordre. Par contre les directeurs régionaux ont été invités à rester à leur poste. Ils ont été amenés à s’occuper du sort de leurs subordonnés qui n’avaient pu se replier, ainsi que de toutes les familles de douaniers restées en zone occupée. Ils furent en mesure de régler les traitements en instance et d’attribuer des secours. Pour cela il leur a fallu s’ingénier à trouver les sommes nécessaires et recourir, en quelque sorte, à l’emprunt, notamment auprès des municipalités.
117Par ailleurs, un vaste mouvement de solidarité s’est engagé : dans la plupart des circonscriptions, le personnel a décidé de s’imposer une retenue variant de 2 à 3 % du traitement. Les sommes ainsi recueillies ont été utilisées pour soulager les infortunes des agents blessés et des familles nécessiteuses. Le conseil d’administration de l’Union générale du service actif a pris l’initiative de verser 1 000 francs par mois à la Croix-Rouge et au comité de secours national.
118Les agents des circonscriptions de l’intérieur, notamment celles de l’Ouest, ont offert l’hospitalité aux familles de douaniers du Nord et de l’Est, chassées de leur domicile par la guerre.
119Devant l’avance foudroyante de l’armée allemande, un plan de repliement des administrations centrales a été mis sur pied, début septembre 1914. Le directeur général, Jean-Marie Branet, et les chefs de bureau, chargés du tarif et des prohibitions, de la comptabilité et du matériel, de l’organisation militaire des brigades et enfin du personnel, partent dans le plus grand secret à Bordeaux. Ils s’installeront dans l’hôtel des douanes, place de la Bourse. Aidés par le personnel de la direction de Bordeaux, ils assureront la liaison avec les autres rouages centraux et traceront aux services extérieurs les directives imposées par la situation militaire et économique. C’est au début de 1915 que cette « mini direction générale » revient à Paris.
120La mobilisation a amené des vides importants dans tous les services, aussi bien à la centrale que dans les bureaux des directeurs. L’arrivée des agents repliés des directions envahies a permis de combler quelques vides. Les divers bureaux de la direction générale, et en particulier ceux du personnel et du tarif, ont vu leur charge de travail augmenter dans des proportions importantes. Un bureau spécial a été créé en 1915 pour l’étude des dérogations en matière de prohibition.
121En 1916, le nombre maximum des agents de la centrale a été fixé à 18 rédacteurs principaux, 10 rédacteurs, 16 commis principaux et commis d’ordre et de comptabilité, et 17 expéditionnaires, soit un total de 67 agents d’exécution. Un nouveau cadre fait son apparition, celui des commis d’ordre et comptabilité, distinct de celui des expéditionnaires.40
122Pour ce qui concerne les services extérieurs, Jean-Marie Branet avait prévu au début de la guerre que les concours devaient être ajournés, les agents mobilisés ne pouvant y participer.41 Cette situation allait se prolonger pendant presque toute la durée de la guerre. C’est ainsi qu’en 1916, a été confirmé l’ajournement des concours pour les grades d’inspecteur, de rédacteur, de contrôleur-rédacteur, de vérificateur et de lieutenant.42
123Il a fallu aux directeurs régionaux faire marcher, vaille que vaille, des services où la mobilisation tout comme les engagements volontaires, ainsi que les détachements dans des postes d’instruction au sein de l’armée, ont creusé de grands vides.
124Début 1916, Jean-Marie Branet fait part de son intention de renforcer les effectifs des bureaux devenus insuffisants, au moyen d’auxiliaires recrutés soit parmi les retraités, soit dans l’élément féminin.
125Le 4 avril, il prescrit aux directeurs de rechercher des candidatures. Pour ce qui concerne les femmes, il indique que le ministre estime que leur rémunération « doit tenir compte du coût de la vie et du prix de la main d’œuvre féminine à la résidence et de la durée du travail accompli ». Les instructions ministérielles donnent un salaire maximum de 4,50 francs pour une journée de 8 heures, mais admettent le paiement d’une « majoration pour les femmes appelées à servir en dehors du lieu où elles habitent ».
126Elles laissent aux directeurs régionaux le soin d’indiquer pour chacun des bureaux de leur circonscription, le taux de la rémunération susceptible d’être allouée en cas de « création d’emploi d’auxiliaires féminins temporaires ». Jean-Marie Branet ajoute : « Vous ne devez d’abord accueillir que les demandes de personnes présentant toutes les garanties désirables sous le rapport de l’honorabilité, de la tenue, et de l’aptitude physique ». Il prévoit la création d’une épreuve permettant d’apprécier l’aptitude des intéressées aux travaux d’écriture et de chiffres, et prescrit de tenir compte des titres universitaires et brevets spéciaux présentés. Le choix doit d’abord porter sur les parentes d’agents des douanes mobilisés ou de soldats tués ou blessés pendant la guerre.
127Les intéressées devront être formellement prévenues qu’elles sont admises dans les bureaux à titre provisoire.
128Après cette sélection, les directeurs établiront une liste où ils pourront puiser au fur et à mesure des nécessités du service. Ils auront à informer l’administration des désignations intervenues et des radiations éventuelles.
129Jean-Marie Branet ajoute : « Je n’ai pas de besoin d’insister sur l’intérêt que présente, dans les circonstances actuelles et que peut avoir dans l’avenir, l’utilisation de l’élément féminin dans les bureaux des douanes. Vous voudrez donc bien suivre cette expérience avec la plus grande attention, afin de pouvoir, le cas échéant, formuler sur la question un avis ferme et motivé. Je ne doute pas que le personnel en fonction ne s’applique, de son côté, à faciliter la tâche des intéressées, en les mettant à même de rendre les services que l’administration attend d’elles.
130« Si la présence de ce personnel nouveau dans les bureaux obligeait à apporter aux installations existantes de légères transformations, vous auriez à en prendre l’initiative ».43
131C’est donc par la porte de l’auxiliariat, en principe ouverte provisoirement, que les femmes sont entrées dans les douanes et l’on peut qualifier de prophétique l’affirmation de Jean-Marie Branet lorsqu’il indique tout l’intérêt que peut avoir, dans l’avenir, l’utilisation du personnel féminin.
132En octobre, Jean-Marie Branet invite les directeurs régionaux à remplacer aussi vite que possible par des dames auxiliaires, les agents des brigades occupant des emplois sédentaires pouvant être confiés à des dames. Ceci pour permettre l’exécution du service d’une façon aussi complète que possible dans les circonstances du moment.44 Les bureaux des directions étant pourvus de machines à écrire, on s’attachera à recruter des dames connaissant déjà la dactylographie.45
133L’affirmation de Jean-Marie Branet, évoquée ci-dessus, verra une première confirmation lorsque, juste avant la fin de la guerre, son successeur, Ernest Bolley, annoncera la création d’un grade de dames-contrôleurs aux statistiques.
134Par ailleurs, il a fallu déroger à l’interdiction de l’affectation des agents des brigades à un service de bureau, autrement qu’à titre exceptionnel et pour des courtes durées. Jean-Marie Branet a été amené à autoriser l’emploi dans les sections d’écriture, d’agents du service actif inutilisables dans les brigades en raison de leur état de santé.46 Il rappelle néanmoins, en 1917, que ces dérogations doivent être limitées aux cas les plus justifiés. D’autres palliatifs ont été utilisés par les services de Jean-Marie Branet pour remédier à la diminution des effectifs entraînée par la guerre. Les départs à la retraite ont été supprimés, dès le début des hostilités. Il en a été de même des congés d’affaires.47
135Jean-Marie Branet a essayé, en 1915 et 1917, de faire appel à des retraités encore valides, en leur servant une petite indemnité complémentaire. Le succès de cette initiative a été des plus limités. Il a également suspendu les mutations et a restreint les avancements au strict minimum.48 Il lui fallait, en effet, veiller à ne pas défavoriser les agents mobilisés dans le déroulement de leur carrière.
136Les droits des combattants ne sont pas oubliés. Ceux des agents cités à l’ordre de l’armée bénéficieront lors de leur prochain avancement d’une rétroactivité d’ancienneté d’un an avec rappel de solde. Les agents qui auront obtenu, pour faits de guerre, un grade militaire à titre définitif, pourront être pourvus directement du grade administratif assimilé.49
137Ce n’est qu’en 1917 que Jean-Marie Branet tenant compte du fait que « la prolongation pouvant, en raison du nombre des vacances à pourvoir, devenir préjudiciable aux intérêts du service, a décidé de procéder à une première série d’épreuves ». Il commence par le concours pour le grade d’inspecteur, et, pour sauvegarder le droit des agents mobilisés, il spécifie que les agents, remplissant les conditions et qui « n’ayant pas plus de 45 ans ou de 44 ans au 1er janvier 1917 auraient été en situation de se présenter aux concours de 1915 pour les premiers et de 1916 pour les seconds, s’ils avaient eu lieu, pourront se présenter ».
138Les agents mobilisés, en mission, ou servant dans les colonies pourront prendre part à un concours spécial organisé ultérieurement à leur intention. Le concours pour 15 postes est prévu pour novembre.50
139Après la proclamation des résultats, Jean-Marie Branet a tenu à féliciter les candidats qui s’étaient imposés un réel surcroît de travail pour mener à bien leur préparation.
Horaire des bureaux
140Le principe d’un horaire fixe pour l’ensemble des bureaux avait été posé en 1791. Mais ce n’est que sous le Second Empire que le directeur général de l’époque, Gréterin, avait décidé que les horaires seraient adaptés localement aux exigences de la situation du commerce international.
141À ces mesures concernant l’amplitude de l’ouverture des bureaux ont été adjointes des formules permettant le dédouanement des marchandises et la libération des moyens de transport tant maritimes que ferroviaires. Des accords avaient été passés localement, tout au long de la fin du XIXe siècle et pendant la première décennie du XXe siècle, avec les chambres de commerce et les compagnies de chemin de fer.
142Une redevance était perçue au profit des agents amenés à travailler en dehors des heures légales. En 1874, Amé avait fait adopter par le ministre « le principe d’une indemnité équitable, tant pour tenir compte aux hommes de la fatigue que leur [imposaient] les redoublements de service que pour contenir les exigences du commerce dans des limites telles que la marche régulière du service n’en puisse être affectée ». Il était précisé que les agents devraient continuer à « assurer gratuitement » le service des dépêches, des voyageurs et de la pêche du littoral.51
143Cette décision qui ne visait que les ports ne réglait que partiellement la question. Il a fallu attendre la Grande Guerre, et une accélération des mouvements de marchandises, pour qu’elle soit abordée dans son ensemble.
144C’est sur doléances du ministre de la Guerre qu’elle a été à nouveau examinée. Celui-ci avait appelé l’attention sur la fermeture des bureaux de douane, dans les ports, le dimanche. Jean-Marie Branet, contacté par l’état-major, a convenu d’un service extraordinaire de dédouanement les dimanches et jours fériés.
145Après avoir indiqué qu’un tel service existait déjà non seulement au Havre, à titre expérimental, mais aussi dans les gares frontières de la Suisse, de l’Italie et de l’Espagne, il a invoqué la réduction des effectifs ne permettant pas d’établir des roulements comprenant des repos compensateurs. Il ne lui paraissait « pas possible d’imposer aux agents des douanes un travail supplémentaire non rétribué ». Le principe d’une rémunération lui semblait d’autant plus justifié qu’en pareille matière, il avait toujours été admis que les opérations, effectuées pour le compte du commerce, donnaient lieu au paiement d’indemnités spéciales.52
146Venons-en à une notion qui prendra par la suite toute son importance : la valeur des marchandises au moment du dédouanement. La taxation ad valorem, tentée dans les débuts de la Troisième République, avait été vite abandonnée devant la montée en puissance des récriminations contre des évaluations soumises à tant de changements, et tributaires de si nombreux paramètres. C’est pour ces raisons que les traités de commerce avaient le plus souvent tenu compte d’une protection exprimée en pourcentage de valeur, qu’il fallait ensuite transcrire en droits spécifiques.
147Cependant, et quelle que soit l’assiette des droits de douane, les statistiques du commerce international se devaient d’être exprimées en valeur. C’est ainsi que la douane avait, depuis longtemps, essayé d’affiner ses statistiques et, dans ce but, avait astreint les déclarants à un effort important dans la précision des données relatives à l’importation comme à l’exportation.
148La guerre a amené une accélération de la montée des prix et donc une grosse instabilité des notions attachées à la valeur. Par ailleurs, et dans le cadre de la guerre économique, le gouvernement a tenu à cerner au mieux la connaissance des volumes des entrées et des sorties de devises. Aussi Jean-Marie Branet et ses services ont-ils été amenés à publier des instructions très précises dans ce domaine.
149La valeur à l’importation devait représenter le prix en francs sur le lieu d’introduction et à la date de la déclaration en douane. Les frais de transport devaient être ajoutés et les escomptes déduits. À la sortie, c’est aussi en francs que devait être déclarée la valeur qui devait comprendre les frais de transport intérieur.
150Il ne pouvait être accepté de valeur globale pour tous les articles d’une même déclaration. Pour chaque article, devait figurer la valeur correspondante.
151Le service des douanes pouvait, en cas de doute, exiger le dossier commercial de l’opération : factures, contrats, bons de commande, lettres, titres de transport, etc.53
152Comme pour les marchandises déjà taxées ad valorem, les prix indiqués en monnaies étrangères devaient être convertis en francs d’après le cours de change publié au Journal officiel.54
153Par ailleurs, le gouvernement se devait de veiller à ce qu’il ne fut pas constitué des stocks inutiles ou facilitant les spéculations. Il convenait donc de connaître la destination réelle des importations. Les importateurs étaient tenus de mentionner sur leurs déclarations en douane, les noms des destinataires réels et de préciser si les marchandises étaient destinées à l’État.
154Le service de vérification pouvait exiger tout document justificatif de cette destination. En cas de doute, il pouvait placer les marchandises sous le lien d’un acquit à caution, qui devait être déchargé à l’arrivée par le service des douanes locales, ou à défaut, par l’autorité municipale.55
155Le commerce international, loin d’être stoppé par la guerre, a connu une expansion spectaculaire induite par les besoins du ravitaillement des populations et par l’approvisionnement des industries, tout particulièrement de celles spécialisées dans l’armement.
156Le transit international a connu un essor exceptionnel et c’est un service des bureaux, amputé d’un tiers de son effectif, qui a dû faire face à cet accroissement de trafic. Notons qu’il a été l’objet de nombreuses critiques de la part des opérateurs du commerce extérieur et que ces reproches étaient largement injustifiés. Il fallait défendre les douaniers contre de telles accusations et il est vraisemblable que c’est Jean-Marie Branet qui a inspiré la lettre du ministre des Finances à son collègue de la Guerre, qui indique notamment : « Par suite de l’état de guerre les agents des douanes ont vu leurs attributions s’accroître au-delà de toute prévision. Chargés d’assurer pour des quantités plus considérables les dédouanements à l’entrée, de déjouer les introductions de produits austro-allemands tentées sous le couvert de l’origine d’un pays neutre, de veiller à la stricte application des prohibitions édictées à la sortie, ils ne font face à leurs attributions nouvelles qu’au prix des plus grands efforts ».56
157Par ailleurs, Jean-Marie Branet a vraisemblablement inspiré l’article des Annales des douanes, dans lequel la douane est défendue contre les attaques de certains parlementaires, accusant le service d’entraver la circulation du matériel roulant, par des exigences inadmissibles dans les circonstances du moment. Le rédacteur a d’abord donné les explications du chef du 4e bureau de l’état-major, qualifié de « véritable ministre des Chemins de fer », qui a démontré que la crise était générale en Europe et qu’elle était motivée par un afflux de transports, auquel les installations ne pouvaient faire face. Puis il poursuit : « Nous sera-t-il permis d’ajouter qu’aussi bien dans les ports que dans les gares, le service des douanes ne mérite aucune des critiques qui lui ont été adressées ; que son personnel fournit en ce moment un effort considérable et que, loin d’apporter un esprit étroit dans l’application des règlements, il est le premier souvent à suggérer les solutions propres à résoudre les difficultés locales qui se produisent. De nombreuses enquêtes faites dans ces derniers temps ont d’ailleurs démontré l’inanité des griefs formulés contre l’Administration des douanes et la facilité avec laquelle cette Administration a su se plier à toutes les exigences du commerce et de la guerre, sans compromettre les intérêts dont elle à la charge. »57
Répression de la fraude
158Avant la guerre, Jean-Marie Branet avait fait porter ses efforts sur la modernisation de la surveillance maritime. Il avait obtenu les crédits nécessaires à l’acquisition, en 1912 et 1913, de plusieurs canots automobiles « destinés à donner la chasse aux embarcations ayant des allures suspectes », pour équiper les brigades de Marseille, Nantes, Rouen, Bordeaux et Le Havre. En 1914, il avait fait mettre en service deux vedettes pour la surveillance de la Basse-Seine et un canot pour la baie d’Arcachon et pour chacun des ports du Havre et de Nantes.
159D’après lui : « Il apparaît qu’étant donné le développement des routes et voies de communication, au lieu de brigades s’échelonnant tous les 5 ou 6 kilomètres, il suffirait dans chaque port important d’une brigade fortement composée, chargée non seulement de la garde du port, mais encore de rayonner dans les divers sens : les agents qui en feraient partie étant pourvus de moyens de locomotions, tels que bicyclettes, motocyclettes et peut-être même automobiles, pourraient se transporter rapidement sur un point ou l’autre de la côte et s’assurer qu’aucune tentative frauduleuse ne se prépare ou n’a été mise à exécution ».
160Il a fait ressortir que l’adoption de ce nouveau mode d’exécution du service devrait permettre de supprimer un certain nombre d’agents des brigades, d’abandonner des corps de garde et d’économiser ainsi leur loyer.58
161Dès le début des hostilités, les unités de douaniers stationnées sur les frontières non touchées par la guerre eurent à combattre à la fois l’espionnage et la fraude habituelle. Elles ont participé à des services spéciaux de sûreté, de police et même de surveillance de la circulation. Par contre, les troupes territoriales, ainsi que la gendarmerie et la police, ont eu dans leurs missions la recherche de la contrebande. En 1917, pour prévenir de futures difficultés, des zones de surveillance spéciales ont été créés, dirigées par des commissaires du gouvernement chargés d’harmoniser « l’action des différents services dans l’exécution des ordres émanant des autorités compétentes civiles et militaires ».59
162Déjà, en 1915, Jean-Marie Branet avait été obligé de revenir sur ’allégement de la surveillance des côtes, décidée en 1908 par son prédécesseur Marcel Delanney. Il avait préconisé un renforcement du service en ces termes : « Depuis le début des hostilités, l’Administration a eu, à plusieurs reprises, l’occasion d’insister sur la nécessité, pour le service de surveillance, de s’acquitter de ses obligations avec la plus rigoureuse exactitude.
163« Les actes de piraterie, commis récemment par les sous-marins allemands à proximité de nos côtes, dans des parages où, jusque-là la navigation avait paru à l’abri de tout attentat, font un nouveau devoir à la douane de redoubler de vigilance.
164« Sans doute les effectifs des brigades du littoral ont, en général, subi des réductions qui ne permettent pas d’exercer partout une surveillance aussi complète qu’il conviendrait. L’Administration s’en rend compte ; elle estime, cependant que, malgré ces conditions défavorables, nos agents peuvent encore rendre des services appréciables à la défense nationale, si, bien pénétrés de leur rôle, ils le remplissent avec zèle et ponctualité. Nous sommes, au surplus, à un moment où chacun doit, par devoir patriotique, produire le maximum d’efforts.
165« Dans cet ordre d’idées, il y aura lieu, jusqu’à la fin de la guerre, de ne pas s’en tenir aux règles fixées pour les heures de service. Partout où cela sera jugé nécessaire, les moyennes admises devront être dépassées dans une mesure laissée à l’appréciation des chefs, sous réserve, bien entendu, qu’il ne sera pas demandé aux agents plus qu’ils ne peuvent réellement produire. Dans les brigades cyclistes, on multipliera les circulations en traçant les itinéraires de manière que les hommes perdent le moins longtemps possible de vue la mer et qu’ils aient ainsi le moyen de se rendre compte des mouvements tant des navires passant au large que des embarcations de pêche ou autres fréquentant les points d’atterrissage susceptibles de servir de base de ravitaillement aux submersibles allemands [...].
166« Quant aux brigades maritimes, elles devront, de leur côté, augmenter autant que possible le nombre de leurs croisières et les effectuer dans les secteurs les plus exposés. Enfin, les chefs de poste, les officiers et les inspecteurs s’attacheront à recueillir tous les renseignements utiles, en interrogeant, notamment, les équipages des navires pêcheurs ou marchands ».60
167Ce regain d’activité, demandé aux brigades maritimes, a surtout visé à empêcher les opérations de la marine allemande, la question de la fraude paraissant secondaire, au cas particulier.
168Dans les bureaux, les vérificateurs ont dû lutter contre l’ingéniosité des fabricants allemands qui ont pris la précaution d’envoyer dans des pays neutres des quantités considérables de produits qui prenaient l’étiquette de ces pays et étaient ensuite réexpédiés en France sous cette origine.
169L’exigence de la production de certificats d’origine et de nationalité et, en cas de doute, la saisie du tribunal arbitral siégeant à Paris dans le cadre de l’expertise légale permettaient de déjouer ces manœuvres. À l’initiative de la direction générale des Douanes, désireuse d’éviter la multiplicité de ces recours, le gouvernement s’est préoccupé de faire augmenter la force probante des certificats d’origine, en leur faisant conférer une autorité telle que, le plus souvent, les vérificateurs aient la possibilité de tenir pour vraies leurs affirmations.
Traitements et retraites. Les relations avec les organisations professionnelles
170Jean-Marie Branet s est attache à suivre la voie qu’avait tracée Marcel Delanney en matière de traitements et de retraites. Ces deux questions ont été au premier rang de ses préoccupations. Et il s’est efforcé d’avoir des rapports réguliers avec les organisations professionnelles. Mais la question des rémunérations a pris un tour dramatique à cause de l’augmentation du coût de la vie dont les incessants soubresauts réduisaient à néant les palliatifs trouvés pour augmenter le pouvoir d’achat des douaniers. Ces envolées se sont particulièrement accélérées au cours de la guerre.
171Comme expliqué ci-dessus, à son arrivée en douane, Jean-Marie Branet jouissait d’un préjugé favorable. C’est ainsi que L’Action douanière s’exprime en termes mesurés, dès après sa prise de fonctions : « Nous nous sommes abstenus de porter quelque appréciation que ce fût sur la personne de M. Branet, qui nous arrive, du reste, précédé de la meilleure réputation ; nous ne voulons juger que sur ses actes. Mais la façon particulièrement accueillante avec laquelle il a reçu tout dernièrement une délégation de l’Union générale ; le langage qu’il lui a tenu ; le souci qu’il manifeste, dès son entrée en fonctions, de chercher à améliorer le régime des retraites du service actif ; tous ces faits nous autorisent à concevoir les plus belles espérances. Nous ne voulons pas croire que notre attente pourrait être déçue. »61
172Les mesures déjà prises en 1909 et 1910, n’avaient permis que les légers rattrapages de salaires prévus par le plan quadriennal, tel que vu au chapitre précédent. En 1911, diverses augmentations de crédit ayant été inscrites dans la loi de finances, un décret, pris à l’initiative de Marcel Delanney, a refondu les divers textes en vigueur sur les soldes des douaniers. « Il a paru bon d’y ajouter les modifications qui découlent du nouvel état de choses ou que le contrôle de l’expérience conseille d’adopter. »
173Jean-Marie Branet, qui découvre ce décret en arrivant en douane, précise que les modifications portent sur le relèvement de la solde de début des inspecteurs, des contrôleurs principaux et des capitaines, et la suppression des hors classe pour toutes les catégories d’agents, et leur conversion en classes normales. Satisfaction était ainsi donnée à une revendication de l’ensemble des organisations professionnelles. Il conclut sa transmission en portant témoignage de la constante sollicitude des pouvoirs publics.62
174Il vante les importants relèvements de crédit accordés, alors que selon les termes du docteur Defontaine, les douaniers avaient seulement obtenu « des traitements qui ne soient pas des traitements de famine. »63
175Ce n’est qu’après qu’est intervenue, en 1912, une augmentation du traitement des postiers que fut envisagée une nouvelle révision des traitements des douaniers.
176Le ministre des Finances, Klotz, affirma dans l’exposé des motifs du projet de loi de finances : « Il ne paraît pas contestable qu’en raison de la nature de leurs fonctions les agents des brigades n’aient des titres à des émoluments au moins aussi élevés que ceux des facteurs... Le service de ces agents est singulièrement pénible et dangereux, car ils opèrent surtout la nuit, souvent très loin des agglomérations, et ont fréquemment à engager avec les fraudeurs des luttes à main armée. »64
177Rappelons qu’en 1912, Jean-Marie Branet, recevant une délégation de l’Union douanière pour le compte du ministre Klotz, empêché, a exposé comment serait réparti un crédit de 1 899 000 francs prévu en faveur des agents des brigades, somme répartie sur quatre exercices et devant être entièrement distribuée fin 1916.65
178Dans le même temps, Jean-Marie Branet, arrivé en douane pour officialiser la suppression du grade de sous-lieutenant initiée par Marcel Delanney,66 obtient l’amélioration de la carrière des lieutenants par la création d’une classe supplémentaire, ainsi que de celle des préposés visiteurs par la décision de l’attribution de ces emplois à la suite d’une simple inscription au tableau d’avancement.67
179Il annonce qu’il a fait prendre la décision de favoriser les pères de famille dans les changements de direction. Il recommande aux directeurs, en ce qui concerne les changements de résidence à l’intérieur de leur circonscription, « de s’attacher également à donner la préférence à l’agent qui a le plus grand nombre d’enfants à sa charge. »68
180C’est sur le budget de 1913 qu’intervient le premier relèvement. Les services de Jean-Marie Branet en profitent pour rendre plus attrayants les emplois dans les directions. Branet explique que ce recrutement ne peut être convenablement assuré que si des avantages sont attachés à ce cadre. En attendant la création d’une indemnité de fonction, il décide de « placer les intéressés dans les mêmes conditions que les vérificateurs à condition, bien entendu, qu’ils satisfassent au même concours. » Il réalise ainsi l’unification des carrières des contrôleurs-rédacteurs, des vérificateurs et des rédacteurs de l’administration centrale.69
181Jean-Marie Branet s’est aussi penché sur le sort des agents des cadres sédentaires du service extérieur. Les augmentations de 1912, destinées à compenser l’augmentation du coût de la vie, furent vite annihilées par de nouveaux bonds des prix. En 1913 et 1914, des corrections intervinrent pour corriger, partiellement, les erreurs de répartitions de 1912.70
182En 1914, les traitements s’étageaient de 1 840 à 3 100 francs pour le cadre secondaire, et de 2 000 à 5 000 francs pour le cadre principal.71
183Le cadre supérieur, qui percevait jusqu’en 1908 la même rémunération que sous la monarchie de Juillet, avait obtenu, lors de la réorganisation introduite en douane par Marcel Delanney, une majoration de traitement permettant de maintenir l’écart entre les inspecteurs principaux et les inspecteurs, et leurs subordonnés. En 1914, une nouvelle revalorisation vint augmenter cet écart.
184Pour les directeurs, le seul avantage retiré de la réforme Delanney avait été la suppression d’une classe, ce qui permettait un avancement accéléré. Par contre, au cours du directorat de Jean-Marie Branet, le montant des traitements de chaque classe est resté le même jusqu’à la guerre. Ceux des administrateurs n’ont pas varié. On peut dire que Jean-Marie Branet a fait moins que son prédécesseur en faveur de ses collaborateurs immédiats.
185Les augmentations, prévues par les mesures ci-dessus et étalées jusqu’en 1916, auraient pu amener une amélioration du niveau de vie des agents du cadre subalterne des brigades, si les prix étaient restés stables. Or la cherté de la vie qui se faisait sentir de plus en plus en 1913 et 1914, ira crescendo pendant la guerre. Un rapport sur le budget de 1914, de la commission ad hoc de la Chambre, avait déjà démontré qu’il convenait de relever tous les traitements des fonctionnaires.
186Et avec Jean Clinquart, on doit « conclure sur une note pessimiste en ce qui concerne le sort de 90 pour cent des agents des douanes à la veille de la Grande Guerre. »72
187Au cours des trois années précédant le conflit, l’Union du service actif s’est montrée de plus en plus hostile envers Jean-Marie Branet, dont elle condamne « la politique de l’autruche ». Elle se déclare, en juin 1914, décidée à la rupture absolue avec un chef « qui ne voudra rien reconnaître du mal qu’il a créé. »73
188Pendant la guerre, c’est vers les personnels mobilisés que la sollicitude de l’administration s’est portée. C’est ainsi que, fin 1915, Jean-Marie Branet explique que les concours prêtés par les agents à l’armée leur ont valu distinctions honorifiques et promotions de grade et note : « Les services rendus à ce titre n’ont procuré jusqu’ici aux intéressés aucun avantage administratif. Il m’a paru que, dans les circonstances présentes, il y avait là une lacune à combler. Il serait, en effet, peu équitable de considérer comme étant sans influence sur la carrière administrative, des titres acquis sur le champ de bataille par des fonctionnaires dont le plus grand nombre sont soumis dès le temps de paix à un statut militaire ».
189Il précise qu’un décret rendu sur sa proposition permettra « d’adapter l’avancement à la situation créée par la guerre. » Une rétroactivité d’ancienneté d’un an, avec rappel de solde, bénéficiera aux employés des deux services titulaires de la croix de guerre avec palme. Les récompenses d’un ordre moins élevé seront classées dans les dossiers des intéressés pour servir d’élément moral d’appréciation. Par ailleurs, les agents des brigades, incorporés dans les unités combattantes, conserveront le grade acquis sous les drapeaux.74
190Rappelons que les avancements ont été suspendus et les concours ajournés du fait des hostilités. Branet a expliqué qu’il compte : « Dès que les circonstances le permettront, faire procéder aux mouvements utiles, en assignant à ceux-ci la date à laquelle ils auraient dû avoir lieu normalement et en procédant, dès lors, aux rappels d’ancienneté et de solde correspondants. »75
191Par ailleurs, transmettant un décret suspendant les conseils de discipline, il attire ainsi l’attention des directeurs : « Le droit pour l’Administration de statuer d’office sur les affaires disciplinaires n’exclut pas la faculté qu’ont les intéressés de produire un mémoire en défense. Il importe au contraire que, pour suppléer au débat oral, les agents, sous le coup de mesures disciplinaires, soient appelés à fournir des explications écrites aussi complètes que possible sur les faits qui leur seront reprochés ».76
Retraites
192Jean-Marie Branet avait pris son poste au moment où le ministre des Finances, Joseph Caillaux, voulait garder à l’administration non seulement le pouvoir discrétionnaire de maintenir, selon ses besoins, ses agents dans les cadres, mais aussi celui de prononcer des mises à la retraite d’office. Il avait affirmé dans un rapport à la commission du budget de la Chambre : « Si l’on enlevait au gouvernement le droit de prononcer des retraites d’office, cette mesure compromettrait gravement la marche des services publics sans réduire dans une mesure appréciable les charges de la dette viagère. »77 Cette commission affirma que le gouvernement devait « pouvoir opposer aux candidats à la retraite encore valides, l’influence ou l’épuisement des crédits ».
193Ce n’était, bien sûr, pas l’opinion des intéressés dont les organisations réclamaient depuis longtemps la reconnaissance de leur droit absolu à pension. C’est le nouveau ministre L.L. Klotz qui, en 1912, tenant compte de l’ancienne revendication de parité entre les traitements de la douane et de la gendarmerie, a instauré une commission ad hoc à laquelle furent nommés deux collaborateurs de Jean-Marie Branet.78
194Il y avait effectivement un litige tout aussi ancien entre le gouvernement et les organisations professionnelles : c’était la parité douane/gendarmerie sur le plan des retraites. Dès son arrivée à la direction générale des Douanes, Jean-Marie Branet s’est préoccupé des conditions permettant de poursuivre l’extension au profit des agents du service actif des douanes, des nouveaux tarifs de pension qui venaient d’être accordés à la gendarmerie.
195Il adressa au ministre un rapport résumant l’état de la question et examinant les répercussions susceptibles d’être entraînées, au point de vue budgétaire, par l’obtention de nouveaux tarifs. Fixant à 15 ans la période durant laquelle le retraité pourrait continuer à jouir de sa pension, il détermina qu’il faudrait, pour ce faire, un crédit de 2 800 000 francs par an à inscrire au budget.
196L’Action douanière se félicita de voir le chef de l’administration « aborder un problème dont la solution est impatiemment attendue par le personnel des brigades et réclamée par le plus élémentaire esprit de justice. » Mais elle affirma aussi que la solution était loin d’aboutir et qu’il faudrait non seulement l’appui du groupe parlementaire chargé de la défense des intérêts des douaniers, mais encore l’action de l’administration et de son chef Jean-Marie Branet.
197Le rédacteur en chef, Fabien Albertin, avocat de profession, poursuivit : « Une intervention pressante de la Direction générale auprès du ministre sera d’autant plus nécessaire que nous aurons à contrebalancer l’influence de la Dette inscrite qui, elle aussi, a voix au chapitre. Or, on ne sait pour quelles raisons, la Dette inscrite a toujours considéré les douaniers comme très privilégiés au point de vue de leurs retraites. » Et il conclut que pour vaincre la résistance de la Dette inscrite, le concours le plus absolu de l’administration serait indispensable.79
198Les travaux de révision de la loi de 1853 régissant les pensions n’avancèrent guère jusqu’en 1915. Le docteur Defontaine, membre influent du groupe parlementaire, mit une fois de plus en évidence la rupture parité douane/gendarmerie, intervenue après l’augmentation, en 1911, des retraites des gendarmes, par une mesure excluant forestiers et douaniers.
199Pour sa part, Jean-Marie Branet persuada le ministre L.L. Klotz, qui avait déjà montré de la bienveillance pour les douaniers, de rétablir cette parité. Juste avant la guerre, intervint une loi permettant à un préposé de bénéficier d’une retraite de 900 francs après 25 ans de service, et pouvant aller jusqu’à 1 250 francs maximum, avec un accroissement de 35 francs par année de service.
200Ces chiffres étaient de 1 200, 1 650 et 45 francs pour les brigadiers et patrons et de 2 800, 3 800 et 50 francs pour les capitaines.80
201Jean-Marie Branet, dans sa transmission, mit l’accent sur l’importance de l’augmentation consentie. Il précisa, en outre, pour les agents titulaires de la médaille des douanes, que le supplément de solde de 50 francs attaché à cette récompense et qui disparaissait au moment du départ à la retraite, serait maintenu, même après leur sortie des cadres.
202Il indiqua que les « pensions des veuves et des orphelins [seraient] fixées à l’avenir, c’est-à-dire déterminées d’après le grade du mari ou du père sans tenir compte de la durée des services ». Il terminait en faisant remarquer au personnel « ce nouveau témoignage de la haute sollicitude du Gouvernement et des Chambres ».81
203Le coût de la vie avait sérieusement augmenté depuis le début de la guerre. En janvier 1916, cette escalade atteignit presque 50 %. Le 5 décembre 1914, une petite revalorisation intervenait. Elle portait de 1 140 à 1 180 francs le traitement de début des préposés, et de 1 840 à 1 880 francs celui des brigadiers et patrons en fin de carrière, les autres catégories connaissant des améliorations du même ordre. À noter que, dans le cadre supérieur, les traitements n’ont pas connu de majoration mais qu’il a été créé une classe supplémentaire d’inspecteur faisant passer les traitements de fin de carrière de 5 000 à 5 375 francs.82.
204Des améliorations moins importantes ont touché les rémunérations des receveurs principaux et contrôleurs principaux. Dans une circulaire émise après le retour de Bordeaux sur Paris de Jean-Marie Branet et de sa petite équipe, il est rappelé que les crédits avaient initialement été « aménagés de manière à répartir entre plusieurs annuités l’effet de ces améliorations. [...] Toutefois les dispositions budgétaires permettant le paiement de deux annuités, il suffira donc d’une dernière annuité pour que l’ensemble des améliorations soit complètement réalisé ».83
205Pour leur part, les organisations professionnelles ont décidé de reprendre leur activité de défense des intérêts matériels de leurs adhérents. L’Union générale du service actif n’entend plus se cantonner dans le domaine de la solidarité. Des questions pressantes, telles que l’état de l’avancement ou le problème angoissant que pose la cherté croissante des vivres, l’obligent à rechercher et à proposer les solutions les mieux appropriées.
206En 1916, L’Action douanière va reparaître avec une périodicité réduite. Dans le premier numéro, c’est la situation économique des préposés qui est évoquée : « Avec un salaire inférieur à 4 ou 5 francs par jour, suivant les résidences et déjà reconnu insuffisant en temps normal, comment assurer la nourriture et l’entretien d’une famille, toutes les choses ayant doublé de prix ? Nous croyons, comme M. Branet, que la question des indemnités de vie chère ne sera résolue que par une mesure s’étendant à l’ensemble des petits fonctionnaires. Nous réclamons une indemnité de un franc par jour ».84
207Mais les contraintes de la guerre ne permettaient pas un réexamen rapide de la question. Déjà, en 1916, au cours de la discussion au Parlement, un député membre du groupe de défense des agents des douanes, G. Sibille, avait fait observer à la tribune que le préposé des douanes avait un salaire de base de moins de 5 francs par jour, alors que le ministre de la Guerre venait de déclarer que ce chiffre était le minimum « indispensable aux manœuvres des établissements de l’artillerie ».85 Le ministre des Finances ayant reconnu le bien fondé de cette position a substitué à l’allocation pour cherté de vie et à sa majoration pour enfant, un supplément temporaire de traitement et a instauré une « indemnité pour charges de famille ».
208C’est seulement en 1917 que, dans sa séance du 3 avril, la Chambre a décidé de l’attribution d’une indemnité de cherté de vie à partir du 1er janvier 1917 et jusqu’à une date postérieure d’un an à la cessation des hostilités. Cette allocation sera de 120 francs par an pour les célibataires, veufs ou divorcés, et de 180 francs pour les agents mariés. Il est prévu une majoration de 100 francs par an et par enfant âgé de moins de 16 ans.86
209Ces mesures sont remplacées, en août 1917, par l’institution d’un supplément de traitement et par des indemnités pour charge de famille, variables en fonction du rang de l’enfant. Ces suppléments ne portant que sur les traitements inférieurs à 5 000 francs, concernaient la quasi totalité des agents des douanes.87
210Jean Clinquart déclare : « Ces mesures n’étaient pas négligeables. Elles correspondaient, pour la grande majorité du personnel des douanes, à une majoration de traitement de l’ordre de 15 à 45 %, compte non tenu de l’incidence éventuelle de l’allocation familiale. Elles ne compensaient cependant pas les effets de la hausse des prix et elles consacraient, plus qu’elles ne la corrigeaient, la tendance au nivellement des rémunérations. En outre, elles ne profitaient pas au personnel auxiliaire ».88
211Début 1918, un deuxième supplément temporaire a été créé, dont le personnel auxiliaire n’était pas exclu.89
212Jean Clinquart estime : « Compte non tenu de ces allocations familiales, les majorations de traitement représentaient, par rapport à la situation de janvier 1916, de 30 à 90 % pour tout le cadre secondaire et une grande partie du cadre principal. Seuls les directeurs, dans les services extérieurs, et à l’administration centrale, les chefs de bureau, les administrateurs et le directeur général, se trouvaient hors du champ d’application de la loi. »
213Mais ce rattrapage s’est vite révélé insuffisant : en 1919, l’indice des prix va dépasser 300 par rapport à 1914. Une « indemnité exceptionnelle du temps de guerre » d’un montant de 720 francs a été accordée aux fonctionnaires dont les traitements étaient inférieurs à 6 000 francs, c’est-à-dire, une fois de plus, à la grande majorité des douaniers.90
214Ernest Bolley, successeur de Jean-Marie Branet depuis le début de 1918, et ses services ont étudié, dès le vote de la loi budgétaire du 29 juin 1918, les moyens de répartir au mieux un crédit d’un million, établi au profit du ministère des Finances et destiné à l’amélioration du sort des douaniers. Le directeur général explique : « Chargée d’assurer l’exécution de cette décision, l’Administration a tenu à cette occasion, à réaliser dans la plus large mesure possible, les vœux du personnel en ce qui a trait aux avancements de classe ». Il s’est d’abord attaché à procéder, en vue de l’application de nouvelles règles d’avancement, à un reclassement général du cadre secondaire des brigades. Il a ensuite fait établir les rappels de solde pour les agents à qui le système de l’avancement régional avait été préjudiciable. Nous verrons dans le chapitre suivant les démêlés d’Ernest Bolley avec l’Union générale des agents du service actif.91
L’Œuvre des orphelins
215Nous avons vu, dès le début des hostilités, un vaste mouvement de solidarité jouer en faveur des douaniers et de leurs familles atteints par les événements.
216La direction générale, pour sa part, a attribué ou fait attribuer des secours destinés à soulager les détresses criantes. Elle a laissé se développer les initiatives locales et a encouragé les organisations professionnelles qui se sont montrées déterminées à prendre une part prépondérante dans cette action de solidarité.
217Nombreux ont été les douaniers qui ont proposé d’héberger les familles repliées au moment de l’invasion. Les chefs locaux ont trouvé des solutions soit dans les casernes, soit en intervenant auprès des municipalités. Des collectes ont été organisées au sein du service et beaucoup d’agents du service sédentaire ont abandonné une partie de leurs traitements en faveur de leurs collègues dans le besoin. Ce mouvement s’est ensuite porté vers les prisonniers ainsi, bien sûr, que vers les veuves et orphelins.
218C’est surtout le cas de ces derniers qui a été au premier plan des préoccupations des organisations professionnelles. Elles ont commencé à distribuer des secours pour assurer leur entretien et leur éducation. Comme pour la défense de l’ensemble de la corporation, elles ont décidé d’unir leurs efforts au sein de la Fédération douanière. Celle-ci a obtenu l’accord du personnel pour une double contribution se montant à, d’une part, 2 % de la rétribution des heures supplémentaires et, d’autre part, 8 % de la part des saisissants sur le produit des amendes et confiscations.92
219Lors d’une audience à la direction générale, le 12 juin 1916, le président de la Fédération a exposé l’œuvre accomplie, en faveur des orphelins, par les trois associations fédérées qui a permis l’attribution d’un secours de 50 francs à chaque orphelin, plus une mensualité de 10 francs. Il a fait ensuite ressortir que si l’œuvre entreprise par la Fédération n’était pas encore constituée sous la forme définitive et durable qui ne pourrait être fixée qu’après les hostilités, du moins représentait-elle déjà un effort sérieux et digne d’intérêt. Jean-Marie Branet a déclaré qu’il serait heureux que ce soit une administration qu’il avait appris à aimer à cause de son esprit de famille, qui réalise, une des premières, une œuvre collective en faveur des orphelins.93
220L’Action douanière rapporte que c’est sur la suggestion de l’Union du service actif que le congrès de l’Union générale du service sédentaire, tenu le 14 août 1916, a adopté le principe d’une œuvre à réaliser en faveur de tous les orphelins des familles douanières et qui compléterait ce qui avait déjà été fait pour les seuls orphelins de guerre.
221Si cette création rencontrait la faveur des autorités, la décision sur les ressources de cette belle œuvre se fit attendre et n’intervint qu’après la guerre. Dans une circulaire expliquant un nouveau mode de répartition du produit des amendes Ernest Bolley, le successeur de Jean-Marie Branet, expliqua : « Par l’organe de leurs délégués, les agents des deux services m’ont fait part du désir unanime du personnel de voir affecter une partie du produit des saisies aux œuvres d’assistance intéressant le service des douanes et, d’ores et déjà, k l’Œuvre de l’Orphelinat des Douanes de France et des Colonies. L’Administration ne pouvait que s’associer avec empressement à une initiative qui témoigne du plus louable esprit de solidarité. Le vœu du personnel, qui était aussi le sien se trouve réalisé par la disposition du nouveau règlement instituant au profit desdites œuvres, un prélèvement de 10 pour cent sur le produit de toutes les affaires constatées à la requête de l’Administration des Douanes. »
222Le décret institutif de ce prélèvement précisa qu’il « sera effectué sur le produit net des amendes et confiscations, en faveur des œuvres d’assistance issues de la guerre et intéressant le personnel des Douanes, qui seront désignées par le Ministre des Finances. »
223Cette précision permettra, par la suite, d’alimenter de la même façon les caisses de la mutualité douanière. Les saisissants abandonnant une fois de plus dix pour cent du produit des affaires contentieuses.
224Ernest Bolley fit, à son tour, preuve d’équité lorsqu’il décida, à la même occasion « de reprendre au nombre des bénéficiaires de ces répartitions tous les agents qui, à un titre quelconque, se seront distingués en contribuant à la perception des droits ou à la sauvegarde des intérêts du Trésor ».94
Conclusion
225Dès 1914, les conseils de discipline furent suspendus. Cependant, il fut prévu que « tout fonctionnaire qui, pendant la durée des hostilités, aurait subi une peine disciplinaire, pourrait, à la cessation des hostilités, se pourvoir en révision devant le Conseil de discipline ».95 Rappelons qu’au tout début de la guerre, les agents du service actif et du service sédentaire ont manifesté leur intention de s’abstenir de toute action corporative et que leurs journaux ont suspendu leur parution jusqu’au printemps 1916.
226En revanche, les Annales des douanes, organe officieux de la direction générale, ont maintenu leur activité d’information des services et du commerce. Elles ont, dans une rubrique intitulée « Ephémérides », relaté les activités des unités engagées dans les combats, donné les rares nouvelles parvenues des agents restés dans les régions occupées ou prisonniers, raconté les actes de solidarité à l’égard des familles en détresse, décrit les visites de Jean-Marie Branet dans les directions de province, etc.
227Jamais avant la Grande Guerre, la politique douanière n’a pris une importance plus grande que dans la préparation, l’exécution et le suivi de la guerre économique entre la France et les Empires centraux.
228Au cours de la guerre de 1870, seul un petit nombre de décrets de prohibition avait été pris, visant la sortie de certains produits utiles à la défense nationale. Il faut noter que le commerce spécial de la France représentait, en 1869, un peu plus de 6 milliards de francs pour arriver à 15 milliards de francs en 1913, et atteindre des sommets au cours de la guerre, du fait de la fantastique hausse des prix et des énormes besoins de la défense nationale.
229Par ailleurs, en se prolongeant sur quatre années, les hostilités ont amené le gouvernement à prendre des dispositions spéciales, dont on ne trouve pas d’exemple antérieur.96 Le Blocus continental lui-même ne peut être comparé au régime douanier de la France dans la deuxième partie du conflit de 1914- 1918.
230Les controverses sur la protection et le libre-échange n’ont plus été portées devant l’opinion publique. Seuls les intérêts de l’industrie de défense et les obligations du ravitaillement de la population ont influé sur les décisions gouvernementales en matière de commerce extérieur. Sont venues s’y ajouter des mesures particulières destinées à aider les autres industries et commerces.
231Cependant, les milieux économiques se préoccupaient déjà de la politique douanière à mener après la guerre. Un rapport de la commission des douanes affirme : « L’abrogation des traités de Francfort, dont l’article 11 n’a pas cessé de peser sur notre politique douanière, aura pour nous le principal avantage de priver l’Allemagne du bénéfice de la clause de la nation la plus favorisée, et de nous rendre la liberté de contracter, c’est-à-dire de nous permettre de remanier nos tarifs sans avoir à accorder à nos voisins de l’Est le bénéfice gratuit des diminutions de taxes que nous serons amenés à consentir ».
232Le rapporteur poursuit : « Une quadruple entente économique doit sortir de la Quadruple Entente militaire victorieuse. Il faut enlever à l’Allemagne vaincue les moyens de reconquérir, au lendemain de la guerre, sur le marché mondial, son hégémonie industrielle et commerciale. L’atmosphère de haine que ses crimes ont créée chez les Alliés et même chez les neutres, sera sans doute un obstacle à une nouvelle expansion de son industrie et de son commerce. Mais la haine s’atténuera peut-être trop vite. Il ne faut pas se reposer exclusivement sur les sentimentalités individuelles. Il faut dresser entre nous et l’Allemagne un rempart économique fait de lois et de traités. »97
233Dans le même temps, apparaît l’Association nationale d’expansion économique qui va jouer un rôle important après guerre. Elle publiera au terme d’une enquête qui durera deux ans, un rapport destiné à documenter le gouvernement sur la concurrence que les pays ennemis faisaient à chacun des éléments de la production industrielle et agricole. Au-delà d’une utilisation immédiate des renseignements provenant de cette enquête minutieuse, le but de l’association a été de préparer les négociations de paix. Le rapporteur y précisait : « L’opinion qui paraît en somme la plus répandue, dans le monde industriel, c’est qu’il conviendrait de ne toucher que d’une main assez légère à notre édifice douanier actuel. Le reprendre par la base, sur un plan quelconque, avant que l’on ait pu mesurer les répercussions économiques de la guerre, semblerait à beaucoup de bons esprits, une réelle imprudence. La thèse que nous avons recueillie le plus généralement est celle-ci : considérer, en principe, le régime actuel comme intangible ; examiner, à propos de tel ou tel point précis, les abaissements de tarifs que nous croirons devoir consentir à nos alliés, soit dans un intérêt politique supérieur, soit pour obtenir d’eux, en échange, des avantages réciproques ; étudier de la même façon les relèvements de tarifs qui paraîtront nécessaires pour nous défendre contre tels ou tels produits ennemis. On écarterait ainsi l’aléa et les dangers inséparables d’une refonte générale, on procéderait à de simples remaniements de détail. Il serait toujours possible de poursuivre dans cette voie, ou au contraire de s’arrêter, suivant que le commanderaient les circonstances. La même souplesse pourrait se rencontrer dans nos tractations avec les neutres. »98
234Le même rapporteur, analysant les discussions intervenues entre les alliés, ajoute : « Dans l’ensemble, – et en tenant compte de quelques oppositions et de beaucoup de réserves – le monde industriel et commercial français est disposé à admettre les principes directeurs posés par la conférence économique des Alliés. C’est-à-dire qu’ils envisagent le monde économique de demain comme divisé en trois éléments : deux groupes fortement constitués, les alliés d’aujourd’hui et les ennemis d’aujourd’hui ; entre ces deux groupes, on ne saurait parler d’un groupe des neutres, mais bien d’une masse indistincte, qui est allée se réduisant au cours de la guerre, qui se rétrécit peut-être encore et dont les diverses unités composantes inclinent, les unes vers l’Entente, les autres vers les Empires centraux. »
235Aucune réforme importante n’a affecté la douane au cours de la Grande Guerre. Cependant, ce problème a agité les esprits, tant dans les milieux économiques et parlementaires qu’au sein de l’administration. Les Annales des douanes ont lancé, courant 1917, une vaste enquête sur la réforme administrative. Une fois de plus, il fallait tenir le plus grand compte de « la nécessité de ne pas aggraver les charges du Budget ». Il s’agissait donc de trouver « le moyen d’améliorer la situation matérielle des agents sans bourse déliée ».
236Le projet, publié par les Annales des douanes, prend en considération la disparition de la contrebande sur les frontières maritimes et prône un desserrement des mailles du réseau douanier sur les côtes. L’utilisation de vedettes automobiles pourrait largement suppléer à la surveillance à partir de la terre. Par ailleurs, la création de brigades, fortement composées dans les grands ports, pourvues de moyens de locomotion tels que les bicyclettes, motocyclettes et peut-être même (sic) automobiles, permettrait de contrer toute tentative frauduleuse en préparation.
237Le chroniqueur des Annales des douanes, rappelant que la fraude est le fait d’entreprises de contrebande portant sur le tabac et les allumettes belges, préconise pour les frontières terrestres l’utilisation des mêmes moyens de locomotion.
238Il augure que la Belgique voudra tirer les ressources nécessaires à sa reconstruction, d’un impôt portant sur ces produits ce qui réduira, voire annulera tout intérêt à la fraude. Il pense donc que le personnel des brigades pourra « sans inconvénient être diminué au minimum du quart de son effectif ».
239Rappelons que, depuis le 9 janvier 1918, Ernest Bolley a remplacé Jean-Marie Branet aux commandes de la direction générale des Douanes. Nous verrons dans le chapitre suivant se dérouler le directorat d’Ernest Bolley et ses difficultés avec les organisations professionnelles.
Notes de bas de page
1 Annales des douanes, n° 18, 15 septembre 1918, p. 236.
2 Annales des douanes, n° 16, 15 août 1914 ; ibid., n° 17, 1er septembre 1914.
3 Décret du 15 mars 1890.
4 Annales des douanes, n° 19, 1er octobre 1915, p. 240 : chronique sur le statut et le rôle militaire des douaniers.
5 Décision administrative de la direction générale des Douanes (D.A.) du 8 novembre 1915, citée dans les Annales des douanes, n° 14, 15 juillet 1917, p. 174.
6 Décret du 7 octobre 1917.
7 Circ. SG n° 51 et SS n° 14 du 29 septembre 1919.
8 Annules des douanes, n° 15, 2 août 1919.
9 Voir biographie de Georges Pallain.
10 Loi du 17 décembre 1814, art. 34.
11 Décret du 27 septembre 1914, art 1.
12 Loi du 9 avril 1915.
13 Décision du 19 décembre 1914.
14 Statuory list. Note du 12 août 1914 et décision du 21 août 1916.
15 JO du 27 novembre 1916.
16 Pays neutres, Suisse, Pays-Bas, Espagne, Danemark, Suède, Norvège.
17 Pour le transit de la Suisse vers l’Angleterre, le certificat d’origine peut être présenté au bureau d’entrée ou à celui de sortie, le document de transit devant être annoté en conséquence.
18 Décisions des 18 janvier, 28 avril, 20 et 27 mai, 12 juin, 17 et 27 juillet, 9 et 23 août, 22 décembre 1915 ; 3 et 18 janvier 15 avril, 27 mai et 28 juin 1916.
19 Décisions des 18 avril et 20 juin 1916.
20 Décision du 21 juin 1916.
21 R. Pommereuil, La guerre économique, Précis de législation et de réglementation douanières, 1914-1917, Poitiers, Oudin, 1917, p. 37.
22 Le service doit considérer qu’il y a transformation complète lorsque le produit initial a perdu son individualité d’origine. Par exemple minerai transformé en barres, lingots ou fils ; sucre provenant de betteraves ; farines issues de grains, huiles extraites d’olives ou d’arachides, etc.
23 Article 3 du décret du 13 mars 1915, pris en exécution de la déclaration gouvernementale de renforcement du blocus des Empires centraux.
24 Décision du 20 avril 1915 : Annales des douanes, n° 9, 2 mai 1915, p. 112.
25 R. Pommereuil, op. cit, p. 122
26 Décision du 1er mai 1916. Des engagements généraux annuels pourront remplacer la production des déclarations annexes. Ils couvriront toutes les opérations de sortie, dans un même bureau, dans le cours d’une même année, par un même exportateur.
27 JO des 11 août 1914, 14octobre 1915 ; 27 janvier, 13 avril, 28 juin, 12 octobre et 23 novembre 1916 ; 3 janvier 1917.
28 Ratifié par la loi du 15 novembre 1915.
29 R. Pommereuil, op. cit., p. 50.
30 Annales des douanes, année 1916, p. 123-124 et 149.
31 J. Clinquart, L’administration des douanes en France de 1914 à 1940, Paris, CHEFF, 2000, p. 36.
32 Décret du 5 janvier 1917
33 Annales des douanes, n° 6, 15 mars 1915, p. 62.
34 J. Clinquart, L’administration des douanes... de 1914 à 1940, op. cit., p. 32.
35 Décrets des 2 mars, 11 mai, 24 juin, 18 juillet 1916 ; 16, 26 et 28 septembre ; 12 octobre et 22 décembre 1916.
36 JO des 24, 26 et 28 mars 1917.
37 Cité par les Annales des douanes, année 1917, p. 311.
38 Décrets des 14 et 24 décembre 1917, cités par J. Clinquart, L’administration des douanes... de 1914 à 1940, op. cit., p. 37.
39 Annales des douanes, année 1923, p. 231.
40 Décret du 15 septembre 1916 et circ. n° 4820 du 23, cités par J. Clinquart, L’administration des douanes... de 1914 à 1940, op. cit., p. 39.
41 Décret Bordeaux du 24 novembre 1914.
42 Annales des douanes, n° 9, 1er avril 1916, p. 96 (décision sans n°).
43 Décret du 22 avril 1916 : Annales des douanes, n° 7, 1er mai 1916, p. 100.
44 Note S.G. du 27 octobre 1916.
45 Note du 20 novembre 1916.
46 Déc. 3043 du 2 août 1917 : Annales des douanes, n° 16, 15 août 1917, p. 200.
47 Déc. des 22 février, 10 mars et 21 août 1915, citées par J. Clinquart, L’administration des douanes... de 1914 à 1940, op. cit., p. 45.
48 Déc. de Bordeaux du 24 novembre 1914.
49 Déc. du 19 novembre 1915 : Annales des douanes, n° 23, 1er décembre 1915.
50 Arrêté du 5 juillet 1917, cité par J. Clinquart, L’administration des douanes... de 1914 à 1940, op. cit., p. 61.
51 Décision ministérielle du 2 octobre 1874, citée par J. Clinquart, L’administration des douanes... de 1914 à 1940, op. cit., p. 276 et p. 632.
52 Décisions n° 132 du 16 janvier 1916 et du 17 mars 1916 : Annales des douanes, n° 7, 1er avril 1916.
53 Décision n° 611 du 6 novembre 1916.
54 Décision du 13 décembre 1916.
55 Décision du 19 décembre 1916.
56 Lettre du 6 mars 1916 communiquée par décision du 17 : Annales des douanes, n° 7, 1er avril, p. 78.
57 « La crise des transports et la douane », Annales des douanes, n° 8, 15 avril 1916, p. 95 : rendant compte d’un débat à la Chambre.
58 Rapport du député Nail sur le budget des Finances : Annales des douanes, n° 4, du 5 février 1914.
59 Décret du 8 octobre 1917, cité par J. Clinquart, L’administration des douanes... de 1914 à 1940, op. cit., p. 54.
60 Décision du 17 septembre 1915 . Annales des douanes, n° 19, 1er octobre 1915, p. 239.
61 L’Action douanière, n° 16, 15 août 1911.
62 Circ. 4169 du 31 juillet 1911
63 Débats à la Chambre, séance du 6 avril 1911 : cités par J. Clinquart, L’administration des douanes... sous la Troisième République..., op. cit., p. 524. Le docteur Defontaine faisait partie du groupe de députés défendant les douaniers.
64 Document parlementaire 2038 cité par J. Clinquart, L’administration des douanes... sous la Troisième République..., op. cit., p. 524.
65 L’Action douanière, n° 13, 10 juillet 1912.
66 Décret du 28 juillet 1911 et circ. n° 4169 du 31.
67 Articles 7 et 9, décret du 25 octobre 1913.
68 Article 23, même décret.
69 Article 5, même décret et circ. n° 4457 du 22 novembre.
70 Bulletin officiel de l’Union générale des agents du service sédentaire des douanes, n° 92, 1914.
71 Renseignements tirés de J. Clinquart, L’administration des douanes... sous la Troisième République..., op. cit., p. 530.
72 J. Clinquart, op. cit., p. 527.
73 L’Action douanière, n° 12, 25 juin 1914. Voir aussi chapitre V.
74 Décret du 15 novembre. Circ. n° 4735 du 27 novembre 1915.
75 Lettre au ministre des Finances du 25 juin 1915 : Annales des douanes, n° 14, 15 juillet 1915, p. 172.
76 Décrets des 10 et 16 septembre 1914, circ. n° 4599 du 17 : Annales des douanes, n0 22, 15 octobre 1914, p. 298.
77 Rapport préliminaire à la commission du budget, n° 3146 de 1911, cité par J. Clinquart, L’administration des douanes... sous la Troisième République..., op. cit., p. 536.
78 Annales des douanes, n° 13, 10 juillet 1912.
79 Annales des douanes, n° 16, 26 août 1911.
80 Loi du 25 juin 1914.
81 Circ. 4559 du 16 juillet 1914.
82 Arrêtés des 5 février 1914 et 5 décembre 1914 et décision Bordeaux du 11 décembre.
83 Décision n° 4641 du 12 janvier 1915 : Annales des douanes, n° 4, 15 février 1915, p. 42.
84 L’Action douanière, n° 6, 10 juin 1916.
85 Débats parlementaires des 10 et 11 décembre 1916. Loi du 4 août 1917 et décret du 18, cités par J. Clinquart, L’administration des douanes... de 1914 à 1940, op. cit., p. 65.
86 Décret du 3 mai 1917. Cette allocation venait remplacer un secours, institué au niveau du ministère des Finances, d’un montant de 70 francs pour les agents du service actif, déjà bénéficiaires d’une indemnité pour charges de famille de 30 francs. Ce secours était de 100 francs pour le cadre secondaire des bureaux, cités par J. Clinquart, L’Administration des Douanes de 1914 à 1940, op. cit., p. 64.
87 Loi du 4 août 1917 et décret du 18, cités par J. Clinquart, L’administration des douanes... de 1914 à 1940, op. cit, p. 65.
88 J. Clinquart, L’administration des douanes... de 1914 à 1940, op. cit., p. 65.
89 Décrets du 27 mars et 10 avril 1918, cités par J. Clinquart, L’administration des douanes de 1914 à 1940, op. cit., p. 66.
90 Loi du 14 et décret du 15 novembre 1918 : Annales des douanes. n° 23, 1er décembre, p. 294.
91 Annales des douanes, n° 20, 15 octobre 1918, p. 260.
92 J. Clinquart, L’administration des douanes... de 1914 à 1940, op. cit., p. 68.
93 L’Action douanière, n° 3, 10 août 1816.
94 Décret du 18 mai 1918 et circ. S.G. n° 17 du 1er juin 1918.
95 Décret du 10 septembre 1914 : Annales des douanes, 1er octobre 1914, p. 249.
96 Chronique « La Douane et la guerre », parue dans les Annales des douanes, n° 3, 1er juillet 1916, p. 145, p. 149, résumant une communication faite par L.S. Magnan, chef du bureau du tarif à la Société de statistique de Paris.
97 Rapport de M. de la Trémoille : Annales des douanes, n° 1, 1er janvier 1916.
98 Rapport de M. Hausser : Annales des douanes, n° 21, 15 novembre 1917, p. 277.
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