Chapitre V. Les conséquences sociales et politiques du commerce atlantique
p. 147-165
Texte intégral
1. AGRICULTURE ET DEMOGRAPHIE
1La conséquence la plus immédiate de l’instauration du commerce atlantique est un renversement de la situation géopolitique de Fetu. En effet, avant l’arrivée des Européens, Fetu se trouvait à l’extrémité méridionale des routes du commerce longue distance qui reliaient la Côte de l’Or à la zone soudanaise ; le commerce atlantique confère à Fetu, en raison de son ouverture sur la mer et de sa proximité avec Elmina, une position stratégique. On a vu avec quel succès les Fetu ont su exploiter politiquement et économiquement cet avantage.
2Comme tous les Etats de la Côte de l’Or, Fetu a de plus bénéficié, grâce aux Portugais, de l’importation de semences de plantes américaines. Avant l’arrivée des Portugais, la base de l’alimentation des populations de la Côte de l’Or était constituée d’igname, de mil et de sorgho. Les Portugais introduisirent notamment le maïs1, mais aussi le manioc, la patate douce, le piment, le tabac, des arbres fruitiers...2. Le maïs fut rapidement adopté et diffusé sur la Côte de l’Or. Selon D. Juhé-Beaulaton, "Le récit de Pieter de Marees... est le premier ouvrage à attester avec certitude la présence du maïs sur la côte ouest africaine3”. Pieter de Marees précise en effet en 1605 : "Ce ble nommé des Indiens Mays & par les Portugalois ou Espagnols fourment ou ble d’Inde & des Italiens ble de Turquie, est ung grain presques cogneu par tout le monde il fut apporte des Portugois en S. Thomé des Indes Occidentales, & d’illecq en ces pais”4.
3Dominique Juhé-Beaulaton a identifié, d’après les descriptions de M. Hemmersam, deux céréales cultivées à Fetu dans les années 1640 : le maïs et le sorgho5. W.J. Müller signale par ailleurs que dans les années 1660 le maïs était le grain le plus communément utilisé à Fetu pour faire du pain6.
4Ces plantes vont permettre dès le XVI° siècle de dynamiser la production agricole. L’accroissement du surplus agricole va permettre une accélération de la croissance démographique ainsi que le développement du réseau urbain par création de nouveaux établissements ou la transformation de villages en villes7. Les traditions orales relevées par E. Meyerowitz témoignent de ce dynamisme démographique : le fait que Fetu soit le point de départ de migrations sur la côte à la fin du XVI° siècle, migrations qui donnent lieu à l’implantation de nouveaux établissements dans la partie orientale de la Côte de l’Or8, est une preuve de dynamisme démographique à cette époque. Ce dynamisme est également parfaitement perceptible dans les sources européennes. Towerson signalait en 1555 que "la ville de Don John [Cape Coast] est assez petite, d’environ vingt maisons, et la plupart de la ville est entourée d’un mur de la taille d’un homme...."9. Un siècle plus tard, Villault de Bellefond écrit : "Le village [de Cape Coast] contient plus de deux cents maisons, & dans la place qui est au milieu, il s’y tient tous les jours un marché fort célèbre"10. J. Barbot qui a vu Cape Coast vers 1680 précise : "la ville d’Ooegwa contient environ 500 maisons"11. R. Kea estime qu’entre 1555 et le début du XVIII° siècle, la population de Cape Coast est passée d’environ cent personnes à 3 000 ou 4 000 personnes12. Le témoignage de W.J. Müller permet également de déceler le dynamisme urbain qui résultait de la hausse démographique. Il signale ainsi que dans les années 1660, prés du fort de Frederiksborg "un homme important d’Accania appelé Aucuma a commencé à bâtir un nouveau village ... Cet endroit est appelé Amanfro, ce qui signifie la ville nouvelle. A l’est du fort précité [Frederiksborg] en pays Sabu, les pêcheurs ont fondé un nouveau village il y a cinq ou six ans, non loin de la mer, ils l’appellent Hittacqui"13. Amanfro, dès la fin des années 1660, compte environ 1500 personnes dont un grand nombre d’artisans : charpentiers, orfèvres, tailleurs, fabricants de canots, de nattes14 Ce même auteur précise : "Le village ou ville de Fetu est vraiment grand et populeux"15. Cette évolution démographique s’est accompagnée en effet de l’augmentation de la part de la population urbaine non impliquée dans la production agricole.
2. LES AKANISTES A FETU
5L’intégration et le rôle des akanistes à Fetu paraissent particulièrement importants. W.J. Müller précise par exemple que les akanistes avaient leur jour réservé lors de la fête du Nyeyi (le jeudi)16, ce qui est une preuve de bonne intégration et souligne l’importance accordée aux akanistes à Fetu. Par ailleurs, W.J. Müller signale qu’un puissant akaniste nommé Aucuma a fait bâtir un village prés du fort de Frederiksberg dans les années 1660 et que de nombreux akanistes s’y sont installés17, ce qui prouve que l’installation des akanistes à Fetu était durable.
6L’étude des journaux d’Elmina de 1645 à 1647 permet de saisir le rôle et la place des akanistes dans le royaume. En ce qui concerne leur nombre, ces journaux permettent de supposer qu’ils étaient plusieurs centaines. En effet, un de ces journaux stipule qu’un puissant akaniste nommé Kwawu (appelé Quauw, Speckie ou Speck par les Européens) est arrivé en octobre 1645 à Fetu accompagné d’au moins cent autres akanistes, puis s’est rendu à Elmina accompagné de trois cents hommes18 ! En outre il y avait trois capitaineries akanistes à Fetu : une à Cape Coast, une à Frederiksberg et une à Efutu19. Ce grand nombre d’akanistes posait parfois problème et donnait lieu à des incidents. Ainsi le même journal rapporte que le 13 novembre, une grande bagarre impliquant des akanistes a eu lieu à Fetu, ce qui affectait le commerce. Cet incident nécessita le retour de Kwawu à Fetu en compagnie de Hennequa afin de résoudre cette affaire20. Malgré cette ambassade, le problème n’est toujours pas résolu le 24 novembre, et les arrivées d’or à Elmina sont "retardées"21. Cet incident détermina le capitaine akaniste d’Efutu, Bofo, à s’installer à Mori.
7Au début de l’année 1646, un messager du roi de Fetu vient à Elmina annoncer aux Hollandais l’arrivée de Kwawu au fort, afin qu’il soit reconnu capitaine des akanistes d’Elmina. Il arrive à nouveau en compagnie d’une centaine akanistes habitant à Moure et à Fetu, ainsi que d’une centaine de serviteurs et porteurs de sièges, puis il retourne à Fetu22. Kwawu apparaît ensuite à plusieurs reprises dans les journaux d’Elmina, et à chaque fois, il est noté qu’il a effectué des séjours de plusieurs semaines à Fetu23. Par ailleurs, le roi de Fetu convoquait les akanistes à Fetu en cas de problèmes, et des akanistes étaient employés par le roi de Fetu comme ambassadeurs auprès des Hollandais d’Elmina, qui en retour envoyaient des émissaires akanistes auprès du roi de Fétu24. Plus important encore, un capitaine akaniste est utilisé comme médiateur entre les Mina et les Fetu lors du traité de paix que ces deux Etats concluent en juin 1646 à la suite d’une longue guerre25.
8Par ailleurs, un des journaux d’Elmina signale en décembre 1645 la mort du frère du roi de Fetu26 et précise en mars 1646 que la plupart des akanistes partent pour Fetu afin d’aller pleurer une fois de plus la mort du frère du roi27. Cet hommage appuyé des akanistes au frère du roi de Fetu est une nouvelle preuve des liens étroits qui unissent la monarchie de Fetu aux akanistes.
9Ces liens sont pour Fetu d’une très grande importance en raison de la place prise par le commerce atlantique à Fetu, mais ils semblent bien plus précieux encore sur le plan politique. Ainsi lorsqu’en août et en novembre 1646, les Abrem menacent de déclarer la guerre à Fetu, les akanistes de Fetu envoient une balle en plomb aux Abrem et les menacent d’une intervention de l’Akani aux côtés des Fetu28, menace qu’ils réitèrent en novembre ! Ceci signifie que les akanistes protègent Fetu de leur redoutable voisin, car "ceux de Abrahembou ont toujours peur des acanistes et ceux de Fetuyw des Abrahembou"29. Les Abrem sont en effet à cette époque tributaires de l’Akani30 : la présence d’un grand nombre d’akanistes à Fetu protège donc le roi de Fetu d’une attaque des Abrem31 dans une période de grande tension avec ce puissant voisin, protection d’autant plus efficace que les akanistes prennent fait et cause pour le roi de Fetu et menacent d’engager leur pays dans la guerre aux côtés de Fetu, chaque fois que les Abrem se font menaçants. L’épisode de 1666, qui voit tous les akanistes déserter Fetu dès que les relations se tendent entre Fetu et l’Akani, montre par ailleurs que les akanistes de Fetu proviennent exclusivement d’Akani.
10De plus, lors de l’attaque d’Eguafo par les Fetu en novembre 1646, des akanistes participaient à cette guerre aux côtés des Fetu32. L’alliance politique de l’Akani avec Fetu se double donc d’un soutien militaire.
11Il ressort de l’étude des journaux d’Elmina que les akanistes sont une des pièces maîtresses de l’équilibre complexe et instable qui s’instaure sur la côte entre royaumes africains et avec les Européens. En leur qualité de ressortissants d’un des plus puissants pays de l’intérieur, les akanistes doublent leur poids économique d’un poids politique dont les Fetu se servent, en vertu de leur ancienne alliance avec l’Akani et de leurs liens privilégiés avec les akanistes, notamment pour faire face aux Abrem. Toutefois, l’épisode de 1666 qui voit brusquement les akanistes déserter le royaume, à l’exception de Cordirqui, permet d’insister sur la fragilité de cet équilibre. Remarquablement intégrés dans la société Fetu, les akanistes participent activement à la fête du Nyeyi, sont installés avec leur famille sur la côte et représentent une puissance politique et économique dont les Fetu ne peuvent se passer. Ils n’en sont pas moins, avant tout, des ressortissants étrangers.
12Les journaux d’Elmina révèlent également qu’il existait des dissensions entre certains akanistes. Malheureusement nous ne savons pas quelles étaient les raisons de ces dissensions ; peut-être s’agit-il simplement d’akanistes de nationalité différente. Un des rédacteurs des journaux d’Elmina, J. Ruychaver, directeur-général d’Elmina, note le 2 novembre 1645, que Quawu, avant de se faire reconnaître capitaine des akanistes d’Elmina par les Hollandais, dut promettre à ces derniers de rester fidèle à la fois aux " Cocoritische" et aux "Crisacqueesche"33. En outre Quawu fut reconnu capitaine des akanistes d’Elmina par les caboceeros de son pays "après six ans de querelles entre les akanistes Cocoriteese et les Crysakeese "34, ce qui laisse penser qu’il y avait deux sortes d’akanistes à Elmina35.
13Toujours est-il que les Hollandais devaient s’arranger pour que certains d’entre eux ne se rencontrent pas à Elmina, ce qui arriva en 1646, lorsque l’akaniste Amin arriva au fort alors que Kwawu y négociait son or. Il s’agit pour les Hollandais d’un désastre car Kwawu menace immédiatement de repartir pour Fetu. Les Hollandais le retiennent finalement au fort en promettant le départ immédiat d’Amin36 !
3. LES PRINCES-MARCHANDS
14Les journaux de compte de Jost Cramer, commandant Danois de Frederiksborg de 1660 à 1662, et ceux de son successeur van Groenestein37, font état de l’activité commerciale des princes-marchands, et des akanistes installés à Fetu, avec les Danois.
15Jan Claessen et Hennequa, dont nous avons déjà parlé, n’étaient pas les seuls dignitaires de Fetu qui commerçaient avec les Européens. Les journaux de compte de Jost Cramer et de van Groenestein contiennent par exemple un compte au nom de Ahen qui fut braffo puis fetere de Fetu, et sur lequel apparaît également son cousin qui effectue en son nom un certain nombre d’opérations commerciales38. Par exemple le 2 octobre 1668, Ahen achète pour 1 296 dambas de marchandises (soit 3,3 onces d’or) à van Groeneistein. En août 1669, un employé commercial des Danois de nationalité Fetu appelé Aduaffo est pris en gage par van Groenestein qui veut prendre des garanties face au dey Jan Claessen Cuttà, celui-ci ayant contracté une dette de 6 144 dambas (soit 16 onces d’or) ! En octobre 1671, un autre employé Fetu des Danois appelé Obiri est capturé par un commerçant appelé Ofori qui veut faire pression sur van Groenestein qui lui doit des marchandises39 ! On voit donc que les relations commerciales entre les Danois et les Fetu n’étaient pas exemptes du recours à la violence en cas de litige.
16Le dey Jan Claessen Cuttà apparaît également sur ces livres de compte de 1668 à 1672. Il semble que Cuttà menait l’essentiel de ses activités commerciales à Cape Coast et Elmina. Toutefois, en sa qualité de dey, donc de protecteur des Européens, il recevait une rente d’environ 1 000 dambas d’or40 par mois. De plus, il empruntait et prêtait de l’or aux Danois. En 1669, il emprunte 6 144 dambas en or aux Danois et en mai 1671, il emprunte à nouveau 12 288 dambas. Par contre en mars 1669, Cuttà prête 18 432 dambas au commandant Danois. Ces transactions financières impliquent probablement le trésor royal41, Cuttà ayant par ailleurs un crédit personnel.
17Les journaux de compte de van Groenestein mentionnent également Ando Wassa "le capitaine des Mores de Frederiksborg" de 1661 à 167442. Ando Wassa n’était pas un courtier : il fournissait des gardes à la forteresse et vendait aux Danois du mil, de l’igname, de l’eau et du bois. Pour ces services, il recevait un paiement mensuel en or, tissus, mousquets et bétail et il avait la possibilité d’ouvrir des crédits. Ses revenus annuels provenant du fort sont estimés par R. Kea de 1 600 à 2 900 dambas43.
18Jantie Snees, un puissant commerçant et collecteur d’impôts (marini) de Cape Coast apparaît également fréquemment sur les livres de compte de Frederiksberg de 1668 à 1672. Contrairement aux frères Acrosan, au dey Cuttà, à Ahen ou Ando Wassa, Jantie Sness n’est pas de sang royal. Il est le fils d’un piroguier d’Eguafo. Jantie Snees fut un employé commercial de la W.I.C. dans les années 1640. Dès les années 1650, il est un personnage éminent (il participe à la signature d’un traité entre Eguafo et la W.I.C. en 1659) et en 1660 il est un des commerçants les plus importants de Petit Komenda. Marié à une femme du lignage royal Fetu, il s’installe à Cape Coast dans les années 1660. Il devient rapidement le marini de Cape Coast, et transmet trimestriellement au dey de Fetu les taxes, amendes et impôts qu’il collecte : Son activité commerciale à Cape Coast et Elmina se monte annuellement à environ 150 000 dambas. Snees ouvrait de nombreux crédits auprès des Danois qu’il remboursait irrégulièrement, et donnait en gage aux Danois des esclaves et des marchandises. Parmi ces marchandises, on trouve des tissus mandingues, d’Ardra ou provenant du Bénin. Le 9 novembre 1669, van Groenestein avance 14 592 dambas de marchandises à Snees "pour son voyage à Ardra"44. Ce commerçant était donc activement engagé dans le commerce entre les ports de Cape Coast et d’Offra, sur la Côte des Esclaves, florissant à cette époque. Quant aux textiles mandingues, ils proviennent sans doute d’une place commerciale de la région de l’ancienne Begho par l’intermédiaire des réseaux commerciaux animés par les akanistes d’Amanfro. On voit donc l’ampleur des transactions et la multiplicité des réseaux commerciaux dans lesquels était impliqué ce grand commerçant.
19En outre, comme Joao Serrao un siècle et demi plus tôt, Snees, bien qu’il ne soit pas originaire de Fetu, se lie au clan royal Fetu et il s’intégre au pouvoir politique traditionnel en devenant marini de Cape Coast. Cette collusion de Snees avec les dirigeants politiques de Fetu est souligné par les transactions effectuées à la mort de Snees, en août 1676. Snees laisse en effet en mourant une dette de 19 560 dambas. Son frère, Pim Quassj, également grand commerçant, solde cette dette en présence du dey de Fetu, en remettant aux Danois un sabre plaqué d’or. Snees fut sans doute dans un premier temps un des bénéficiaires des fêtes d’anoblissement, et poursuivit son ascension sociale en se liant au clan royal de Fetu.
20Des akanistes installés à Elmina, Cape Coast, Amanfro, Mori (port d’Asebu), Anomabu et Kormantse, et des courtiers provenant des Etats côtiers et de l’intérieur, apparaissent également sur les livres de compte de Frederiksborg45. Le capitaine akaniste d’Amanfro, Akuma46 contractait par exemple des dettes auprès de van Groenestein et Cuttà avait des dettes auprès d’Akuma : les livres de compte font donc état de transferts de crédits, les paiements mensuels de Cuttà étant transférés au compte d’Akuma qui remboursait ainsi ses dettes auprès des Danois47. On voit par cet exemple à quel point les transactions commerciales étaient imbriquées, le trésor royal de Fetu étant lui-même mis à contribution. Contrairement aux frères Acrosan qui effectuèrent d’importantes transactions commerciales à Frederiksborg, le dey Cuttà y effectuait surtout des opérations financières, la pratique du crédit s’étant considérablement développée sur la Côte de l’Or dans la deuxième moitié du XVH° siècle48. Les akanistes et les Danois sont les plus gros prêteurs d’or, les princes-marchands étant de gros emprunteurs. Tous ces acteurs sont cependant à la fois emprunteurs et créditeurs, y compris l’Afutuhene qui prête de l’or aux Danois49 et en emprunte à Akuma. Akuma et un autre important akaniste, Cutterique (il s’agit probablement du fameux Cordiqui), recevaient des paiements mensuels des Danois. Cutterique reçut 284 dambas par mois à la fin des années 1660 et au début des années 1670, puis 480 dambas dans les années 1680 ; Akuma reçut entre 576 et 624 dambas par mois à la fin des années 1660 et au début des années 1670. En outre, un akaniste de Cape Coast, Kwassi Tutu, apparaît épisodiquement sur ces livres de compte comme emprunteur.
21L’étude réalisée par R. Kea des livres de compte de van Groenestein50 montre que Frederiksborg était intégré dans le circuit de collecte des revenus de l’Etat, ce qui était sans doute également le cas de Cape Coast. De plus, une centaine de personnes sont impliquées dans le commerce mené avec les Danois de Frederiksborg dans les années 1660. La plupart de ces personnes viennent d’Amanfro, Cape Coast et Efutu. Parmi celles-ci on trouve l’Afutuhene, des dey, braffo et Fetere de Fetu, des marini de Cape Coast et Amanfro. La monarchie et les membres du clan royal de Fetu sont donc activement impliqués dans le commerce atlantique ; les princes-marchands agissent soit en leur nom propre, soit en qualité de hauts dignitaires de l’Etat.
22Le commerce atlantique semble avoir eu pour conséquence un enrichissement considérable de la classe dirigeante. N. Villault de Bellefond précise par exemple : "Le Roy de Fetu a une cuirasse d’or & un casque fait d’une manière admirable... Les femmes & filles des Rois et Marchands ou Nobles du païs, sont si chargés de bagues, menilles & fétiches, sur tout lors qu’elles vont au bal, que telle portera sur soy en ces bagatelles vingt et vingt-cinq marcs d’or, & les hommes trente et quarante"51. R. Kea estime que le volume des transactions commerciales de Snees devait se monter de 1668 à 1672 à environ 60 000 dambas par an52. Ses profits devaient donc être considérables.
23Certains auteurs signalent également que les plus riches adoptent par prestige certaines pratiques européennes. Ainsi N. Villault de Bellefond précise-t-il : "les gros marchands qui se font servir par des Esclaves à table, mangent à l’européenne, & se font faire des ragoûts aussi délicats qu’en France, ce qu’ils ont appris de nous autres"53. W.J. Müller a également décrit les riches marchands de la côte mangeant à l’européenne dans de la vaisselle fine en argent, utilisant des nappes et des serviettes en tissus précieux, vivant dans d’élégantes maisons, décorées de nattes provenant de Sierra Léone, et de peaux d’animaux rares (notamment de léopards)54.
4. LES EMPLOYES DES EUROPEENS
24Outre les princes-marchands de Fetu et des akanistes, apparaissent sur les livres de compte de Frederiksberg des piroguiers55. artisans56, soldats57, serviteurs et employés commerciaux58. Les Européens ont donc fait apparaître sur la côte un type nouveau de producteur : le salarié qui bénéficie d’un salaire versé régulièrement. Les Européens avaient également des esclaves59. Cette population qui vit au contact des Européens et qui bénéficie indirectement du commerce atlantique reste contrôlée en grande partie par les responsables politiques de Fetu. Ainsi, lorsque Carloff revient sur la Côte de l’Or en 1658 dans le but de reprendre Carolusburg aux Suédois pour la donner aux Danois, Acrosan lui donne son appui et appelle les esclaves de la compagnie suédoise résidant à Oguaa afin de les inciter à aider Carloff à prendre la forteresse60. De même, lorsqu’Acrosan tente d’expulser en 1659 les Danois de Cape Coast, il exerce à cette fin des pressions sur les esclaves et les employés des Danois afin de les affamer, de les isoler et de bafouer leur autorité61.
25Les Européens employaient également des interprètes, personnages importants car indispensables pour le commerce. Il est remarquable que Diego de Azambuja parlait déjà en 1482 à Caramanse par le truchement d’un interprète africain, soit à peine douze ans après que le premier bateau portugais ne fut parvenu sur la Côte de l’Or62. Ces interprètes sont parfois des employés commerciaux (des makelaers pour les employés des Hollandais), qui sont bien payés et influents. Ces makelaers sont d’origine sociale très diverse (ils peuvent être d’origine servile ou appartenir à un clan royal) et forment une force politique nouvelle et indépendante des structures traditionnelles63. Connaissant les secrets politiques des Européens, ils établissent le contact entre Européens et les dirigeants africains, ce qui leur confère une importance politique et commerciale déterminante. A la fin du XVII° siècle certains d’entre eux sont des figures éminentes de la Côte de l’Or. Peu contrôlables, leur montée en puissance constitue une perte de contrôle par les dirigeants politiques des Etats côtiers des acteurs et des modalités du commerce atlantique. L’action de l’un d’entre eux (Edward Barter), sera particulièrement importante dans l’histoire de Fetu. L’alliance des princes-marchands avec ces puissants commerçants indépendants et liés aux Européens balaiera toute prise de la monarchie sur le commerce atlantique.
26L’enrichissement d’une partie de la population, enrichissement lié au commerce atlantique, a eu de multiples conséquences sociales et politiques : une société ne s’enrichit pas uniformément et sans que cela ne remette en cause les structures sociales établies antérieurement. Fetu n’échappe pas à cette règle et semble, au moment même de son apogée, traversé de crises et de fractures qui contrastent fortement avec sa prospérité et sa puissance politique.
5. LES PROBLEMES DE LA MONARCHIE A L’INTERIEUR
27Nous avons vu que le pouvoir monarchique à Fetu se caractérise par une relative faiblesse face aux conseils et aux dignitaires, et que le roi reste lié à sa popularité, c’est-à-dire qu’un contrôle social s’exerce sur lui afin qu’il remplisse certaines obligations liées à sa fonction. Loin de constituer une décadence du pouvoir monarchique, on, trouve ici l’expression d’une idéologie particulière du pouvoir monarchique qui vise à prévenir l’instauration d’un pouvoir autocratique et n’affecte en rien la popularité et le prestige de cette institution.
28Certains indices permettent cependant de penser que, dans la deuxième moitié du XVII° siècle, ce prestige se dégrade. Ainsi Müller, après avoir précisé que le roi Aduaffo "était honoré comme un roi et tenu en grande estime"64 souligne qu"’ils élisent généralement [comme roi] une personne de grand âge et qui n’a pas une grande fortune ni beaucoup de puissance. Au roi actuel Aduaffo, succédera un homme de la famille royale appelé Cobri65. Il semble avoir 70 ans, peu de fortune et comprendre peu". Müller donne lui-même un explication à cet état de fait : "Les Grands de Fetu cherchent un tel roi afin que leur autorité, puissance et pouvoir soient préservés, c’est-à-dire qu’ils puissent diriger beaucoup et lui peu"66. De plus, lorsque les Grands de Fetu élisent le dey prince-marchand Jan Claessen comme roi, celui-ci refuse l’honneur qui lui est fait67. De même à la mort du roi Ahen Penin Aschrive en 1697, un puissant commerçant de Fetu nommé Midy fut élu pour succéder au roi décédé, honneur qu’il refusa en proposant à sa place le frère du roi décédé nommé Ahenaco68. Ceci signifie sans doute que l’exercice d’activités commerciales était incompatible avec l’exercice du pouvoir monarchique, ne serait-ce que parce que devenir roi aurait privé Jan Claessen du contact quotidien avec les Européens. Il est clair en effet que la fonction de dey permet d’accroire sa fortune privée, pas celle de roi69.
29Les cinq journaux d’Elmina de 1645 à 1647 montrent par ailleurs que la richesse et le mode de vie de certains marchands de Cape Coast était déjà une source de tensions entre le roi et ces marchands dès les années 164070. En outre, les intérêts de ces marchands entrent parfois en contradiction avec la volonté du roi. Ceci apparaît nettement lorsque les frères Acrosan et les Caboceeros de Fetu demandent aux Anglais de bâtir une loge à Cabo Corso malgré la volonté du roi : en novembre 1646, une délégation d’akanistes et de Caboceeros vient à Elmina et le directeur Hollandais se voit expliquer "qu’il est bien vrai qu’ils sont soumis au roi de Fetu avec lequel je suis allié, mais qu’ils cherchent à défendre leur place et leur profession... et disent ne pas être mes esclaves71". Il est donc clair que pour ces commerçants, le profit commercial passe avant la volonté du roi qui lui, privilégie son alliance avec les Hollandais72. La réaction du directeur général hollandais qui traite le roi et les Caboceeros de bandits n’a sans doute pas contribué à apaiser les tensions entre les Caboceeros et le roi. Quoi qu’il en soit, la loge anglaise sera effectivement construite en 1647.
30D’autre part, Jan Claessen et Hennequa, en bons commerçants, recherchent la paix en période de tensions avec les voisins. Ainsi, lors de la guerre de 1646 opposant les Fetu aux Mina, les frères Acrosan demandent à deux reprises aux Hollandais (en avril et en mai) de trouver un moyen de faire la paix entre Myna et Fetu73.
31W.J. Müller signale également : "on trouve des personnes de haut statut à Fetu dont la richesse et le nombre d’esclaves surpassent ceux du roi"74. Ceci signifie que la hiérarchie des honneurs ne coïncide plus avec la hiérarchie des richesses. La raison en est sans doute la multiplication des profits du commerce atlantique. En effet, alors que la vraie source de richesse à Fetu est devenue précisément le commerce avec les Européens, le roi, pour des raisons religieuses, ne peut se rendre sur la côte75 et se trouve donc coupé du lieu de l’acquisition des richesses. Il ne peut par conséquent ni contrôler le flux des richesses, et par la même, remplir son rôle de redistributeur des richesses, ni réaliser l’accumulation que l’on attend de lui, accumulation à laquelle est liée son prestige. Annexé par les princes-marchands, le commerce atlantique favorise en même temps que leur enrichissement leur montée en puissance. Ceci souligne le fait qu’à Fetu le pouvoir reste lié à l’acquisition et à l’accumulation des richesses. Les rois n’ont donc pas pu, ou nese sont pas donné les moyens, de contrôler les flux de richesses, ce qui se répercute sur leur prestige.
32Dès lors, la richesse n’est plus le symbole du rang, la monarchie voit s’éroder son pouvoir et son crédit à l’intérieur ; le vote des dignitaires sanctionne cette évolution par l’élection de rois vieux et faibles, ce qui est un moyen de circonscrire le pouvoir monarchique, tandis que les princes-marchands refusent de devenir roi. Ceci se traduit en outre par l’élimination brutale du roi en avril 164676 et par un complot visant à chasser le roi77 en mai 1646, ainsi que par la rébellion des ofan de Fetu en 1663.
33Alors que les Européens n’ont encore ni la volonté ni les moyens de déstabiliser la monarchie78, ce sont donc les profits du commerce atlantique qui le font et engendrent une instabilité sociale. A Fetu, les profits du commerce atlantique, à eux seuls, ont eu un effet déstructurant. Ce phénomène a dû s’amplifier progressivement dès le XVI° siècle et aboutir à un point de rupture qui se situe à la fin du XVII° siècle.
34Sur le plan politique, ces tensions prennent la forme d’une opposition systématique des dey aux rois. L’attitude des frères Acrosan qui autorisent les Anglais à bâtir une loge à Cape Coast, contre la volonté du roi, puis l’opposition du dey Cuttà au roi Aduaffo en ce qui concerne l’attitude à adopter face aux Danois79 en 1663, loin d’être des oppositions de personnes, trouvent en effet des prolongements tout au long de la deuxième moitié du XVII° siècle. Ceci débouche sur une crise grave en 1688, puis sur la guerre civile.
35Les Européens vont s’engouffrer dans cette brèche, d’autant plus facilement que la position de Fetu est, à cette époque, fragilisée par la montée en puissance des Etats de l’intérieur.
Notes de bas de page
1 Voir l’article de D. Juhé-Beaulaton : "La diffusion du maïs sur les Côtes de l’Or et des Esclaves aux XVII° et XVIII° siècles" in Revue d’histoire d’outre-mer, n° 287, 1990, pp. 177-198.
2 Sure les plantes cultivées à Fetu au XVII° siècle, voir le chapitre sur les activités économiques, pp. 106-108.
3 Juhé-Beaulaton, D., 1990, p. 178.
4 de Marees, Pieter, 1605, p. 36.
5 Voir Hemmersam, M., in Jones, A. 1983, p. 110 et Juhé-Beaulaton, D., 1988, p. 84.
6 Voir Müller, W.J. in Jones, A. 1983, p. 220.
7 Selon R. Kea, la Côte de l’Or connaît dès la fin du XVI° siècle et jusqu’à la fin du XVII° siècle "des développements et des changements majeurs dans l’organisation sociale et territoriale et les techniques de production et de distribution". Voir à sujet Kea, R., 1982, pp. 6-7.
8 Voir pp. 17-18.
9 Premier voyage en Guinée de William Towerson, 1555-1556. Voir Blake, J.W. 1942, p. 383.
10 Villault de Bellefond, N. 1669, p. 194. J.B. Labat reprend le même chiffre mais on ne peut y voir une confirmation, cet auteur ne cessant de recopier Villault de Bellefond. Voir Labat, J.B., 1730, p. 301.
11 Barbot, J., in Churchill, J., 1732, p. 168.
12 Kea, R. 1982, p. 38.
13 Millier, W.J., in Jones, A. 1983, p. 141.
14 Voir Villault de Bellefond, N., 1669, p. 301. R. Kea a réalisé un étude sur Amanfro qui montre que 300 à 430 personnes étaient occupées à des activités autres que la production agricole. Voir Kea, R., 1982, p. 42.
15 Müller, W.J., in Jones, A. 1983, p. 139. L’hésitation de Müllier (village ou ville) se réfère à la difficulté qu’il éprouvait à qualifier des concentrations urbaines où "il n’y a pas de fortification, rempart, mur de protection, tour, grand palais ou maison, comme on en voit bâti dans les villes fameuses d’Europe".
16 Müller, W.J., in Jones, A. 1983, p. 169.
17 Ibid., p. 141.
18 Ratelband, K., 1953, p. 84.
19 D’autres capitaines akanistes installés à Fetu sont connus. Notamment Cobri, qui est un des signataires de l’accord de 1650 avec les Suédois et de l’accord du 20 décembre 1659 conclu avec les Danois, Cordirqui (ou Cutterique) dont l’action fut vitale pour les Fetu en 1666 et Akuma, capitaine des akanistes d’Amanfro. Bofo était le capitaine d’Efutu en 1645, Kwawu fut capitaine des akanistes d’Elmina de 1646 à 1652. En août 1652 Oten Agyei, capitaine des akanistes d’Efutu lui succède à Elmina tandis que Kwawu devient capitaine des akanistes de Cape Coast. Dodei Formosa succède à Oten Agyei à Efiitu. Oten Agyei est resté capitaine des akanistes d’Elmina jusqu’en 1659 et Kwawu fut remplacé à Cape Coast par Korankyi en 1655. Ces capitaines akanistes étaient donc très mobiles. Korankyi fut par exemple également capitaine à Mankessim et Kormantin. Il y eut des capitaines akanistes à Elmina jusqu’au début du XVIII° siècle. Voir Müller, W.J., in Jones, A. 1983, pp. 141, 200, 262 ; Kea, R. 1982, pp. 266-267, 280.
20 Ratelband, K. 1953, p. 87.
21 Ibid., p. 89.
22 Ibid., p. 137.
23 Ibid., pp. 137, 143, 149, 159.
24 Les akanistes sont par exemple convoqués à Fetu en juillet 1645 ; le 07.04.1646 le directeur général d’Elmina envoie par exemple un akaniste nommé Coronkijn au roi de Fetu afin de se faire livrer un délinquant. Ibid., pp. 65, 159.
25 Ibid., p. 190.
26 Ibid., p. 94.
27 Ibid., p. 154.
28 Ibid., p. 226.
29 Ibid., p. 225.
30 Le 13.11.1646, les journaux d’Elmina précisent : "ceux de Abrahembou sont subordonnés aux acanistes et doivent annuellement leur payer une somme importante”. Voir Ratelband, K., 1953, p. 260. Une guerre entre Abrem et l’Akani ayant eu lieu en 1618 est relatée par S. Brun. Cette guerre fit selon cet auteur au moins 40 000 morts et se termina par la victoire de l’Akani. Une autre défaite d’Abrem face à l’Akani est signalée par A. Jones en 1639. La défaite de 1618 aurait permis aux Akani de monopoliser le commerce au détriment des Abrem. Voir Brun, S., in Jones, A., 1983, p. 92 et note 275.
31 A ce sujet il est noté le 13.11.1646 : "si les acanistes restent à Fetu cela rendra un grand service au roi de Fetu et les Abrahembo n’oseront pas attaquer". Le 14.11.1646, le rédacteur du journal note que le roi de Fetu lui a envoyé un messager qui rapporte que le roi "était content que j’étais d’avis, comme lui, que les acanistes restent là-bas jusqu’à ce qu’on voie comment se comportent les Abrahembou". Voir Ratelband, K., 1953, p. 260.
32 Ratelband, K., 1953, p. 257.
33 La partition entre ’’Cocoritische" et "Crisaqueesche" recoupe peut-être celle entre "Acanes Grandes" et "Acanes Pequenos" qui étaient en guerre de 1549 à 1557 et qui firent l’objet de deux missions de conciliation mises sur pied par les Portugais. Voir pp. 40-41.
34 Ratelband, K. 1953, p. 85.
35 L’étude de A. Van Dantzig sur les akanistes tend à prouver qu’il y avait en fait trois sortes d’akanistes. Un rapport du directeur général d’Elmina Heerman Abramsz daté du 23 novembre 1679 précise en effet que "le grand pays d’accanien" est divisé en trois parties : "au nord d’Elmina vivent les Crysakeese, au nord de Cormantyn les Cocoriteese, et au nord de Craa [Akra] les acannists Akimse". Les Cocoriteese seraient des commerçants fréquentant Adanse-Akrokyere, un des plus ancien royaume Akan situé dans une zone aurifere, les Crysakeese seraient un groupe allié aux Nkyiraafo, qui constituèrent plus tard l’Etat du Denkyira, les Akimse seraient les akanistes d’Akyem (Akim ou Grand Acanij, sur la carte de 1629). Voir Van Dantzig, A., 1990, pp. 210-211.
36 Ratelband, K., 1953, p. 152.
37 Je n’ai pas consulté directement cette source ; R. Kea en a retranscrit de courts extraits et en propose une étude. Voir Kea, R., 1982, pp. 227-282. Jost Cramer est mort en juin 1662 et Henning Albrecht lui succède. C’est ce dernier que J. Barbot a rencontré en 1667. van Groenestein resta en charge à Frederiksborg de 1668 à 1674. Il fut chargé de redresser la situation financière du fort et de vérifier les comptes de son prédécesseur Henning Albrecht qui était soupçonné de s’être lancé dans des opérations trop coûteuses, van Groenestein ne vit arriver un nouveau bateau qu’en 1672 et ne put résister à la concurrence de plus en plus forte des Anglais. Il mourut à son poste en 1674. W.J. Müller et H.J. Zur Eich étaient à Frederiksborg en même temps que Cramer et Albrecht. Sur les commandants du fort de Frederiksborg, voir Nörregard, G., 1966, pp. 29-34.
38 Voir la reproduction des mentions du 2 octobre 1668 du livre de compte de van Groenestein effectuée par Kea. Kea, R., 1982, p. 227.
39 Kea, R. 1982, p. 228, d’après les journaux de compte de van Groenestein.
40 Soit 2,6 onces d’or. Un dambas est une petite unité de poids et équivaut environ à 0,0026 onces d’or.
41 Il ne s’agissait pas d’une pratique exceptionnelle. Par exemple en 1681, le commandant Danois de Frederiksborg emprunte 3 702 dambas en or à l’Afutuhene afin de pouvoir s’approvisionner au marché d’Amanfro. Kea, R. 1982, p. 237.
42 W.J. Müller parle également d’un certain Ando "de sang royal” qui vivait entre Cabo Corso et Frederiksborg dans un village appelé Ando-Crum. Ando Wassa était sans doute l’ofan d’Amanfro ou Amanfrohene. Son père Ofori était un frère de Jan Cabbes. Ando Wassa fut rétribué par l’Eguafohene en 1654 pour négocier avec les Anglais la construction d’une loge à Petit Komenda, puis il devint l’ahene d’Amanfro au début des années 1660. Voir Müllier, W.J., in Jones, A., 1983, pp. 140-141 ; Kea, R. 1982, pp. 229-230.
43 Kea, R., 1982, p. 230.
44 R. Kea a reproduit cette liste et le prix des tissus en dambas. On y trouve notamment "un vêtement fin Mandinque avec lacets en or" coûtant à lui seul 2 496 dambas. Voir Kea, R. 1982, pp. 234, 319.
45 Apparaissent également sur les livres de compte Jem, Jan Lentse, akanistes d’Amanfro, et Ansaku.,
46 W.I. Müller parle également de ce puissant akaniste installé à Amanfro. C’est lui qui a suscité, sous l’impulsion de Henning Albrecht, second commandant Danois de Frederiksborg, l’installation d’une importante communauté akaniste au pied de la forteresse et la construction du village Manfro (Amanfro signifie "ville nouvelle"). Voir, Müller, W.J.–, in Jones, A., 1983, p. 141 et Nörregord, G., 1966, p. 29.
47 Les opérations financières réalisées entre les acteurs du commerce atlantique sont d’une grande complexité. Ainsi Akuma prêtait également dans les années 1660 de l’or au roi de Fetu, au dey Jan Claessen et au commandant Danois Jost Cramer ! Voir Kea, R., 1982, pp. 222 et 280.
48 W.J. Müllier précise que les Danois pouvaient difficilement refuser des crédits à des personnes de haut rang dont les services étaient indispensables aux Danois. Selon Millier, cela posait parfois des problèmes de recouvrement, notamment lorsque le débiteur décédait. Voir à ce sujet Müllier, W.J., in Jones, A., 1983, pp. 250-251.
49 En 1681, le commandant danois de Frederiksborg emprunte 3 702 dambas en or à l’Afutuhene afin de pouvoir s’approvisionner au marché d’Amanfro. Voir Kea, R. 1982, p. 237.
50 Voir notamment Kea, R., 1982, pp. 235-237.
51 Soit entre 160 et 200 onces (4,8 à 6 kg d’or) pour les femmes et de 240 à 320 onces d’or pour les hommes (de 7,3 à 9,7 kg d’or). Voir Villault de Bellefond, N., 1669, pp. 393-395.
52 Soit 156 onces d’or. Voir Kea, R., 1982, p. 316.
53 Villault de Bellefond, N., 1669, p. 247.
54 Müller, W.J., in Jones, A., 1983, pp. 202, 211.
55 Les piroguiers Fanti proposent sur toute la Côte de l’Or leurs services aux Européens pour passer le triple rouleau de vagues (la barre) qui rend malaisé l’accès des plages aux navires.
56 Les journaux d’Elmina signalent par exemple le 19 juin 1646 la mort d’un esclave apprenti-forgeron "qui pouvait exécuter son travail comme un maître". Voir Ratelband, K. 1953, p. 188. R. Kea estime, en se basant sur les livres de comptes de Frederiksborg, qu’un bûcheron était payé 144 dambas par an et un forgeron 1 152 dambas. Voir Kea, R. 1982, p. 230.
57 J. Barbot note en 1679 : "Dans la majeure part des forteresses qui sont sur la coste d’Or, chaque commandant y entretient 50, 60 jusques à 100 Noirs qui leur tiennent lieu de soldats". Selon cet auteur, il y avait à Cape Coast une garnison composée de "80 hommes blancs et 200 noirs". Voir Barbot, J., in BIFAN, 1978, pp. 302, 338-339.
58 Obiri et Aduqffo à Frederiksborg, par exemple.
59 Römer a vu par exemple plus de cent esclaves à Cape Coast, esclaves employés à la culture des "jardins" des Anglais. Voir Römer, L.F., in Dige-Hess, Mette, 1989, p. 200.
60 Nörregard, G., 1966, pp. 16-17.
61 Voir la déclaration des six facteurs Danois qui justifie l’abandon du fort Carolusburg par Samuel Schmidt, annexe II.
62 Joao de Barros in Crone, G.R., 1937, p. 118.
63 Sur les makelaers, voir Van Dantzig, A., 1980, pp. 33-36.
64 Müller, W.J. in Jones, A., 1983, p. 182.
65 W.J. Müller précise en effet que le successeur du roi est élu du vivant du roi en exercice, ce qui est confirmé par les journaux d’Elmina qui précisent en 1646 que Jan Hennequa succédera à l’actuel roi. Voir Müller, W.J., in Jones, A., 1983, p. 184 et Ratelband, K., 1953, p. 257. Nous ne savons pas si Cobri a effectivement succédé à Aduaffo.
66 Müller, W.J., in Jones, A., 1983, p. 184.
67 Daaku, K.Y., 1970, p. 109. Si l’on en croit Barbot, cela n’etait pas exceptionnel. Cet auteur indique en effet au sujet de l’obligation faite aux rois d’être généreux : "c’est peut-être la considération de cette grande charge qui amène certains de ceux qui pourraient être choisis, en accord avec les coutumes du pays, de renoncer à leur droit préférant plutôt une vie privée que d’être obligés de traiter leurs sujets si coûteusement". Voir Barbot, J., in Churchill, J. 1732, p. 287.
68 Ceci est précisé par John Hillier dans sa lettre du 3 janvier 1698 reproduite par Barbot. Selon Hillier, Midy n’était "pas de sang royal", mais fut choisi "car il avait le pouvoir de faire ce qu’il voulait et ils ne pouvaient rien contre lui". Voir Barbot, J. in Churchill, J. 1732, p. 444.
69 Il est important de préciser à cet égard que les Akan font clairement la distinction entre la fortune privée (du lignage) et le trésor du siège. A la mort du détenteur d’une charge, ses richesses se transmettent au sein de son abuswa, les richesses liées à sa charge, suivent le sort de cette charge.
70 Ratelband, K. 1953, p. 271.
71 Ibid., p. 267.
72 Il appraît nettement dans les journaux d’Elmina que le roi de Fetu serait même prêt à interdire le commerce interlope sur son littoral pour rester en bons termes avec les Hollandais. Ainsi le 31 décembre 1646, le roi de Fetu fait dire au directeur d’Elmina "que le bateau [anglais] amarré devant Cabo Cors n’a pas fait de commerce, et a été interdit par lui". Il est vrai toutefois que le roi de Fetu demande une récompense, qu’il obtient une fois que le bateau anglais est parti. Ibid, pp. 285-286.
73 Ibid., pp. 168-171.
74 Müller, W.J., in Jones, A., 1983, p. 182.
75 Voir pp. 59-60.
76 76Ratleband, K., 1953, p. 163.
77 Un tel complot a eu lieu en mai 1646 : le frère du roi s’est allié avec les rois de Komendo et de Sabu afin de chasser le vieux roi, puis est venu demander de la poudre et du plomb aux Hollandais. Voir Ratelband, K., 1953. p. 174.
78 Ceci apparaît nettement dans les journaux d’Elmina. Les directeurs hollandais d’Elmina s’opposent à toute action visant à déstabiliser le roi de Fetu. Ainsi lors du complot de mai 1646 visant à chasser le roi de Fetu, le directeur note : "je leur ai fortement déconseillé leur projet car de cette guerre on ne peut attendre qu’un grand préjudice pour le commerce... De plus, nous ne pouvons avoir de meilleur roi à Fetu, car il accueille et traite bien les acanistes". Voir Ratelband, K., 1953, p. 174.
79 Müllier, W.J., in Jones, A., 1983, pp. 186-187.
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