La végétation et les cultures
p. 322-323
Texte intégral
1Bosra était une ville étape et une ville commerçante, mais elle était et elle reste encore un gros bourg agricole, dont la richesse s’appuie sur des terres fertiles, lorsqu’elles sont bien arrosées par les pluies. Tout autour de la ville se trouvait une zone de jardins et de vergers, enclose par de hauts murs de pierres sèches. Ces petites propriétés familiales pouvaient être arrosées avec l’eau des citernes et des birket. Elles servaient à cultiver les légumes et les fruits assurant la subsistance des habitants. Le territoire de la ville situé au-delà de cette couronne maraîchère était subdivisé de façon plus régulière et plus systématique, comme les exemples de cadastration le prouvent. À ces parcelles, plus grandes, plus éloignées de la ville, et sans arrosage manuel, étaient réservées des cultures plus étendues, comme les cultures de céréales.
Jardins à la périphérie de Bosra : culture de la vigne et du figuier.

2C’est en effet la prédominance de la culture des céréales, en plus de quelques légumineuses, que le Dr Delbet a notée à Bosra au milieu du XIXe siècle. En 1596, d’après des registres fiscaux ottomans, la culture des blés et de l’orge était également dominante dans toute la région, la montagne comme le plateau. Pour l’Antiquité, l’abondance des petites meules constituées de deux disques ou de la meule dite « romaine », constituée de deux troncs de cônes évidés pivotant autour d’un cône, prouve que le broyage du grain et sa consommation faisaient partie de la vie domestique la plus banale.
3En ce qui concerne la vigne, actuellement replantée dans les jardins de Bosra, sa culture est attestée dans l’Antiquité par un pressoir à raisins, creusé dans le roc en plein champ, à l’ouest de Bosra, qui a été découvert par la Direction des Antiquités de Bosra (2003).
4Les travaux effectués sur le tell de Bosra, au nord-ouest de la ville, par la mission archéologique de l’Université américaine de Beyrouth, ont révélé dans les niveaux archéologiques, de l’âge du Bronze à l’époque moderne, des graines de céréales (blé dur, blé tendre, orge), des légumineuses (lentilles, pois), des fruits (figues, olives, raisin) et des plantes sauvages (mauve, coronille, gaillet). On a constaté à l’époque omeyyade une forte augmentation des grains d’orge et l’apparition des graines de fruit du cornouiller mâle et de pommes de pin. Les informations apportées par l’échantillonnage produit par l’équipe américaine sont corroborées sur d’autres sites de la région, notamment pour l’époque du Bronze à Jawa en Jordanie.
5Des informations complémentaires sur l’environnement naturel et les cultures ont été recueillies sur les fouilles françaises de Bosra pour une longue durée allant de l’époque hellénistique à l’époque moderne. À partir de macrorestes végétaux prélevés sur les différents chantiers de fouille de cette ville, on peut reconstituer des pratiques alimentaires où la cueillette des fruits sauvages de la région a gardé sa place. Aux pistaches, figues, baies, cynorrodons, mûres s’ajoutent des céréales poussant à l’état naturel, comme l’orge, l’engrain (blé sauvage), l’amidonnier, l’avoine, qui servait de fourrage, et des légumineuses, pois et lentilles.
Vergers du camp romain.

Photo Y. Guichard
6Cependant, dès les époques nabatéenne et romaine, les traces de plantes cultivées deviennent plus évidentes, notamment céréales et légumineuses : blé dur, blé tendre, orge, lentilles. À la période byzantine, la présence de dattes, de noix, d’amandes, de pistaches, de pêches, de raisin et d’olives est attestée, soit que les fruits aient été importés de régions proches, soit que l’on ait déjà développé les cultures pour certains. La fève et le pois chiche ne sont présents que dans les niveaux modernes, de même que tomates, aubergines et citrouilles, en provenance du Nouveau monde, n’apparaissent qu’à partir du XIXe siècle.
7De ces échantillons végétaux, on peut déduire que le régime alimentaire de base de la Bosra antique était assez riche, composé essentiellement de blé, d’orge, de quelques légumineuses et de fruits (olives, figues, pistaches et raisin). On peut également supposer qu’en complément un ramassage de plantes sauvages était effectué dans un but sans doute alimentaire, pour la consommation des hommes, pour le fourrage du bétail (avoine, orge, engrain, lentilles, amidonnier, certains pois, tous présents à l’état naturel), mais aussi dans un but médicinal et artisanal (teinture par exemple).
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Bosra. Aux portes de l’Arabie
Jacqueline Dentzer-Feydy, Michèle Vallerin, Thibaud Fournet et al. (dir.) منار حمـّـــــاض (trad.)
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