Chapitre 4. La reconstruction du centre-ville de Beyrouth

p. 101-134


Texte intégral

1En avril 1975, dès le début de ce qu'on appelait au Liban les « événements », suite à un conflit armé entre des parties locales nourri par des conflits d'intérêts régionaux et internationaux, le centre-ville fut le premier secteur de Beyrouth investi par les combattants. Si le centre fut vite élu comme terrain de combat, c'est afin de détruire sa symbolique de coeur de la capitale et de lieu de rencontre des différentes communautés libanaises, où s'affichaient les signes d'une richesse croissante provenant de l'afflux des revenus pétroliers arabes, à côté des manifestations d'une angoissante pauvreté, celle d'une couche de travailleurs immigrés dans l'attente d'opportunités de travail.

2En 1977, profitant d'une période d'accalmie, l'État s'engage dans une politique de reconstruction visant à restituer le centre à la ville et à lui redonner son rôle de lieu de rencontre de tous les Libanais. La Municipalité de Beyrouth demande à l'APUR de préparer un plan d'aménagement. Un organisme public, Le conseil du Développement et de la Reconstruction (CDR), est créé et chargé de superviser les opérations1.

« Dans une forme prudente et synthétique, la proposition de reconstruction élaborée par l'APUR présente toutes les qualités d'un projet qui se base sur l'intérêt porté à un tissu existant capable de subir des améliorations : un travail méthodique d'estimation des destructions (encore limitées à l'époque), de la hauteur et de la qualité architecturale du bâti ; la définition des zones à conserver, à remodeler ou à réaménager, dans un contexte d'amélioration des réseaux routiers, de création de zones piétonnes et d'espaces paysagers ; l'ouverture sur la mer par une succession de façades et de perspectives. Apparaît alors cette volonté d'“aseptiser” certains quartiers dits à problèmes, au détriment d'un bâti “dénué d'intérêt”, et qui sera voué à la démolition. »2

3De multiples procédures sont engagées, dès janvier 1977, pour assurer la couverture juridique nécessaire pour la mise en exécution du plan de l'APUR, soit par l'approbation de nouveaux textes de loi ou par amendement et adaptation des textes existants. Par la suite, le plan est approuvé par le Conseil des ministres le 15 avril 1978 (décret n° 1163). Une reprise des combats suspend toute démarche jusqu'en 1982, date à laquelle le projet est adapté au nouveau contexte survenu sur le terrain. Un plan d'aménagement et une réglementation détaillés sont approuvés le 28 décembre 1982 (décret législatif n° 83). Des dispositions pour l'expropriation anticipée dans le centre-ville sont même mises en application (décret n° 429 du 31 mars 1983). Signalons qu'à cette époque une société privée (OGER) va établir un plan pour la reconstruction, une maquette du nouveau centre-ville est également construite.

4Fin 1983 : nouvelle reprise des combats et nouvelle interruption des efforts pour la reconstruction. Cette interruption se prolonge jusqu'en 1991 et, entre-temps, toute la conjoncture se modifie.

5La dernière bataille sur le plan militaire est livrée au mois d'octobre 1990, mettant fin à plus de quinze aimées de guerre. Sur le plan politique, la Deuxième République est instaurée et ses « piliers » prétendent diriger le pays vers la réconciliation, le développement économique et les réformes constitutionnelles et institutionnelles. La reconstruction est naturellement l'une des premières préoccupations, sur laquelle toutes les parties sont d'accord. La reconquête du centre étant toujours le symbole de la réconciliation et du développement économique, un plan directeur d'aménagement est proposé en 1991.

« Le projet de 1991 renvoie à l'image d'une ville médiévale enfermée dans une énorme ceinture fortifiée qui, ayant absorbé tous les espaces libres, se trouve contrainte à se développer en hauteur. Ce projet conçu par Dar al-Handassah, sous la direction de l'architecte Henri Eddé, est en apparence sans proportion par rapport aux besoins réellement exprimés, mais s'inscrit dans une politique volontariste fortement symbolique. L'image internationale est d'abord exprimée par la rupture avec le passé et la création de nouveaux repères urbains ; ils ponctuent les sites stratégiques sur une trame de base qui, dans sa morphologie, se schématise par une multitude d'axes et de noeuds, des droites ouvrant la perspective sur des parcs d'affaires, sur la mer, ou sur des vestiges historiques mis en exposition ; des cercles qui symbolisent la convergence, la concertation et les échanges. Ce projet a soulevé d'intenses débats et controverses. »3

6Le projet est médiatisé par Dar al-Handassah. en collaboration avec le CDR – seul héritage toujours opérationnel de la politique de reconstruction de 1977. On commence à parler d'une société foncière privée qui sera créée pour diriger à elle seule toute l'opération après acquisition de tous les biens-fonds – et des droits afférents – situés à l'intérieur du secteur du centre-ville. Le concept de ce nouveau projet (qui fait en partie table rase de l'ancien tissu partiellement endommagé), ainsi que la solution proposée pour sa gestion soulèvent d'intenses débats et controverses, partageant les intéressés entre partisans et détracteurs. Les partisans prônent

« [...] une ville moderne, conçue et construite par des professionnels pour satisfaire les exigences de la vie urbaine de cette fin de millénaire, tandis que les détracteurs, eux, avancent que la reconstruction n'est qu'une vaste opération de spéculation foncière aux ramifications politiques sordides à peine voilées. »4

7Les critiques des opposants n'ont, dans un premier temps, aucune portée sur le terrain. Elles sont étouffées par le double soutien, politique et financier, dont bénéficie le projet : les représentants de l'État d'une part, les grands groupes d'investisseurs de l'autre. Ce soutien crée également une vague d'optimisme autour de la reconstruction, et accélère la suite des étapes conduisant à l'approbation du plan directeur et à la création de la société foncière.

8La première étape est l'approbation, le 7 décembre 1991, de la loi n° 117, portant amendement au décret législatif n° 5 du 31 janvier 1977, concernant les prérogatives du CDR, ainsi que la création des sociétés foncières d'aménagement et les dispositions auxquelles elles sont soumises. Le CDR se voit accorder le pouvoir

d'« entreprendre directement ou par l'entremise de toute administration, institution publique ou municipalité, de toute société anonyme ou société d'économie mixte ou par l'intermédiaire de toute société foncière constituée dans l'esprit de l'article 2 du Code de l'urbanisme, l'exécution de tout projet dont l'aura chargé le Conseil des ministres, dans l'une des régions visées au paragraphe 4 du présent article. »5

« Lorsque le conseil du Développement et de la Reconstruction accomplit les tâches prévues à l'alinéa 6 du présent article par l'entremise d'une société foncière, celle-ci doit être créée et ses statuts approuvés en Conseil des ministres.

« Ces statuts déterminent tous les points relatifs à la constitution de la société, en fixent l'objet, en organisent le fonctionnement ainsi que la répartition des compétences entre les organes sociaux et la liquidation de la société.

« Les statuts peuvent prévoir des dispositions transitoires susceptibles de permettre la constitution et le démarrage de la société, préalablement au vidé définitif des litiges relatifs aux droits des propriétaires des biens-fonds ou concernant d'autres droits sur ces biens-fonds.

« Ces statuts doivent demeurer en tous points conformes aux lois en vigueur, notamment aux prescriptions du Code de commerce. »6

9Dans son ensemble, la loi n° 117 est taillée à la mesure du soutien dont va bénéficier la future société foncière, ouvrant ainsi la voie à sa création immédiate.

10Le 19 février 1992, le Conseil des ministres délimite le secteur concerné par la reconstruction (décret n° 2236), et confie l'opération à la Société libanaise pour le développement et la reconstruction du centre-ville de Beyrouth (solldere). Les statuts de la société sont approuvés le 22 juillet 1992 (décret n° 2537).

11Le plan directeur général est approuvé le 15 octobre 1992 (décret n° 2786). La surface totale du secteur étudié est de 146 hectares et la surface construite maximale de l'ensemble de l'opération est fixée à 4 446 000 mètres carrés ! Cette limite est calculée d'après une évaluation de la future demande de surface bâtie,

« fondée sur diverses considérations d'ordre macro-économique, démographique et urbanistique. »7

12Le comité fondateur de solldere est formé le 23 décembre 1992. Il regroupe douze membres, dont un représentant du cdr, les autres étant les représentants des ayants droits (5 membres) et des groupes d'investisseurs (6 membres).

13Le principe et le concept de la société foncière d'aménagement existent dans la législation libanaise depuis 1962 (tableau IV. 1). Néanmoins, les applications de ce principe sont exceptionnels vu la rareté, voire l'inexistence dans la pratique, de plans d'aménagement ayant pu pleinement bénéficier de conditions et d'un contexte favorables pour les rendre opérationnels.

14A la suite d'un conflit survenu entre Eddé – jusqu'alors chef de projet – et le comité fondateur de solldere, ce dernier fait appel à l'expertise française (l'iaurif puis l'urbaniste Louis Sato) pour réévaluer le projet et demande à Dar al-Handassah de modifier la conception et d'en établir les plans détaillés.

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Tableau IV. 1 : Je principe de la société foncière et ses applications,

Sources : comité fondateur de solidere, Imar Bayrout wassat et-tassa'oulat (La reconstruction de Beyrouth en questions). Beyrouth, mars 1993, p. 40 (édition en arabe).

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Figure IV. 1. : éditorial de Le nouvel Economiste, numéro 1057 paru le 19 juillet 1996,

Source : Le Nouvel Économiste, numéro 1057 paru le 19 juillet 1996.

15Ce bouleversement créera l'occasion de prendre en compte, dans un nouveau plan, une partie des critiques soulevées par les opposants de la première heure et d'atténuer, sans toutefois la neutraliser, la vague des contestations.

16La dernière version du projet est présentée en 1993, accompagnée d'un échéancier en trois phases (tableau IV.2) pour la durée et la nature des opérations à entreprendre.

« Le projet de 1993 est élaboré par l'urbaniste français Louis Sato, suite à la demande de la société foncière solldere. Il réimagine le centre-ville en essayant de composer cette fois-ci sur un fond existant, réaliste, la rencontre d'une ville moderne, attrayante, avec un patrimoine urbain qui assure la continuité dans le processus de production de l'espace. Vu d'un angle différent, c'est l'insertion d'un tissu traditionnel, portant les indices de la mutation urbaine, dans un contexte contemporain de grand développement économique. Considéré a posteriori, le “projet Eddé” a été le passage obligé pour aboutir au projet Sato, qui sera la version finale adoptée et présentée aux futurs actionnaires du centre-ville. »8

17Le 26 août 1993, la Commission supérieure d'évaluation (désignée par le décret n° 2237 le 19 février 1992) fixe et publie la valeur globale des biens-fonds du centre-ville, estimée à 1 170 000 000 de dollars américains. Le 2 octobre 1993, le comité fondateur de solidere annonce l'ouverture de la souscription au capital de la société. La valeur de l'action est fixée à 100 dollars américains (article 6 des statuts).

18Selon l'article 7 des statuts de solidere,

« le droit de souscription en numéraire est limité et appartient en priorité aux souscripteurs ci-après selon l'ordre suivant :

« 1 – Les propriétaires des biens-fonds et portions de biens-fonds ayant fait l'objet d'apports en nature et les titulaires de droits sur ces biens-fonds.

« 2 – Les ressortissants libanais et les sociétés exclusivement libanaises telles que définies par la loi sur l'acquisition par des non-libanais des droits réels au Liban.

« 3 – L'État, les établissements publics et la Municipalité de Beyrouth.

« 4 – Les personnes d'origine libanaise, les institutions officielles et semi-officielles arabes et les ressortissants des pays arabes. »

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Tableau IV.2 : échéancier en trois phases, mis au point pour le projet.

Source : comité fondateur de solidere. La reconstruction du centre-ville de Beyrouth, Brochure d'information, Beyrouth, octobre 1993, p. 23.

19Le plan de détail, assez différent du plan directeur général, est approuvé par le décret n° 4830 du 4 mars 1994. portant amendement au décret n° 2786 du 15 octobre 1992 (approbation du plan directeur général). Le décret 4830 du 4 mars 1994 sera amendé six mois plus tard par le décret 5609 du 3 septembre 1994 pour l'élargissement de la zone du remblai gagnée sur la mer (élargissement de 150 000 m2 au sol. ce qui porte la surface totale du remblai à 608 000 m2) et l'ajout de 290 000 m2 de surface constructible. Le décret 4830 et son amendement approuvent également les règles et les dispositions à observer dans le secteur du « nouveau » centre-ville. Équivalent – juridiquement – du PAZ français, c'est ce décret qui régit actuellement le plus grand chantier du Liban, celui de la reconstruction du coeur de la capitale. De ce fait, la reconstruction en cours du centre de Beyrouth est tout à fait comparable à l'aménagement d'une ZAC9 française sur le plan réglementaire. Elle s'en différencie dans ses aspects financiers.

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Figure IV.2 : les principales caractéristiques du plan de détail

Source : comité fondateur de solidere. La reconstruction du centre-ville de Beyrouth. Brochure d'information, Beyrouth, octobre 1993. p. 14.

A. LA RÉGLEMENTATION DE LA RECONSTRUCTION (DÉCRET 4830 DU 4 MARS 1994 ET SON AMENDEMENT PAR LE DÉCRET 5609 DU 3 SEPTEMBRE 1994)

20Quelles sont les principales caractéristiques du plan détaillé du centre-ville de Beyrouth que nous pouvons dégager à travers une première lecture du règlement approuvé par les décrets n° 4830/94 et 5609/94 ?

21Les tableaux IV.3 et IV.4 montrent les principaux titres et thèmes traités dans ces deux décrets.

22Par souci de montrer l'évolution de la réglementation, même si cette évolution intervient assez tôt dans le processus de fabrication de la nouvelle structure urbaine et de la création du nouveau tissu du centre-ville, le contenu de chacun des deux décrets 4830/94 et 5609/94 est exposé séparément dans les tableaux et illustrations qui suivent, pour mieux mettre en évidence l'importance et la portée de cette évolution.

1. Les principaux titres de la réglementation.

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Tableau IV.3 : titres du règlement détaillé du secteur du centre-ville.

Source : El Achkar. D'après le Plan et Règlement détaillé du centre-ville commercial de Beyrouth, approuvé par le décret n° 4830 du 4 mars 1994 (texte en arabe).

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Tableau IV.4 : portée des modifications apportées par le décret 5609/94 au décret 4830/94

Source : El Achkar. D'après les Modifications du Plan et Règlement détaillé du centre-ville commercial de Beyrouth, approuvés par le décret n° 5609 du 3 septembre 1994 (texte en arabe).

2. Les thèmes de comparaison

23Si ce plan d'urbanisme opérationnel dirigé par solidere introduit une rupture avec les modes de création du tissu urbain pratiqués avant 1975 et les mutations naturelles du tissu social au sein de la zone concernée par l'aménagement, quels sont les principaux agents de rupture, ou de continuité que le nouveau règlement introduit, dans l'évolution de la réglementation appliquée dans le secteur du centre ville, avant son entrée en vigueur ?

24Les comparaisons que nous allons établir ne sont pas exhaustives. Néanmoins, elles peuvent mettre en relief des points fondamentaux du nouveau plan d'aménagement, tout en suivant, à travers sa réglementation, l'évolution des thèmes développés antérieurement dans notre étude.

a. Le paysage et les surfaces plantées des biens-fonds

25Le règlement détaillé porte une attention particulière au verdissement du centre-ville, à travers des dispositions imposées à tous les biens-fonds à construire (une première à Beyrouth) concernant la sauvegarde des espaces verts existants ou l'aménagement en jardins des surfaces libres conservées au sol après construction.

« L'implantation et les plans des constructions doivent être étudiés de façon à permettre la conservation d'une plus grande quantité de surfaces plantées à l'intérieur d'un bien-fonds [...].

« Le dossier du permis de construire doit comprendre : un plan des surfaces plantées à conserver et les surfaces à démolir, avec la mention des types d'arbres, leurs dimensions et leur nombre, ainsi que les espaces verts créés avec également la mention des types d'arbres, leurs dimensions et leur nombre [...]

« La végétation doit occuper au moins 50 % des surfaces libres conservées à l'intérieur de chaque parcelle, avec un minimum de 75 % pour les parcelles d'angle [...]

« Des arbres doivent être répartis proportionnellement aux surfaces plantées : un arbre tous les 100 mètres carrés avec un minimum d'un arbre par parcelle [...] »10

26Par ailleurs, un « plan vert » est établi pour l'ensemble du secteur du centre-ville.

« L'architecture du paysage sera une composante essentielle de l'environnement du centre-ville et un facteur majeur de plus-value. Le centre-ville dont le caractère typique sera préservé, est conçu comme un ensemble de secteurs modernes reliés par des allées piétonnières. Trente-cinq jardins et parcs publics, variant entre 100 m2 et 72 000 m2 pour le grand parc sur le remblai, s'offriront aux 40 000 résidents et 100 000 employés du centre-ville. »11

« C'est une équipe française. l'atelier de Thierry Huau Interscène, qui a remporté le concours d'idées jugé en 1994. Paysage est une notion un peu courte pour traduire la tâche dont il est chargé, qui comprend tout à la fois des recherches sur les espaces verts, les revêtements de sols, la signalétique. le mobilier urbain, jusqu'aux supports de communication culturelle de la municipalité de Beyrouth.

« C'est unique, apprécie Thierry Huau. toute la palette du paysage est là, et avant le reste. D'habitude nous arrivons après les urbanistes et les architectes, et un peu tard. Dans ce projet, l'arbre n'est pas là pour accompagner le bâti, nous intervenons sur tous les programmes, comme des chefs d'orchestre, non pour diriger, mais pour coordonner. »12

b. Les parkings et garages de voitures

27Même si nous n'avons pas exposé antérieurement l'évolution de la réglementation des garages à travers les différentes modifications du code de la construction (ce qui nous prive d'un élément de référence)13, nous pouvons noter que le nouveau règlement du centre-ville exige la présence, dans chaque construction, de lieux de garage pour les voitures adaptés à l'utilisation et à la surface du bâtiment concerné, en soulignant l'impossibilité de modifier, a posteriori, l'usage des locaux prévus comme garages. Un tableau est établi pour fixer le nombre de places de stationnement à assurer selon ces critères. Quant aux règles techniques et normes de construction des garages, il est stipulé qu'elles sont soumises aux dispositions du décret n°2791 du 15 octobre 1992 (modalités d'application du code de la construction).

c. L'étage des pilotis

28La construction d'un étage de pilotis est interdite pour tous les bâtiments élevés dans le secteur du centre-ville.

d. Le zonage

29Le centre-ville est divisé en secteurs et sous-secteurs de servitudes. Contrairement au zonage appliqué depuis 1954 à Beyrouth, le règlement du centre-ville définit les fonctions admises ainsi que les fonctions interdites dans chaque secteur, en interdisant la transformation ultérieure des usages identifiés sur les permis de construire. Des voies exclusivement piétonnes sont également prévues. Cette répartition tient compte des immeubles conservés en les intégrant dans des zones mixtes ou résidentielles. La nouvelle cité d'affaires et le futur parc urbain sont programmés sur des terrains gagnés sur la mer (un remblai de 45 hectares d'abord créé par le traitement de la zone de la décharge publique du Normandy puis son extension en utilisant les déblais extraits des zones détruites du centre-ville) pour Fan 2010 selon l'échéancier présenté.

30L'amendement apporté par le décret 5609/94 concerne l'aménagement du front de mer et de la zone du remblai. La surface de cette dernière a été augmentée de 15 hectares supplémentaires par rapport à la surface définie par le décret 4830/94 (figures IV.3 et IV.4).

31Outre le découpage en secteurs et sous-secteurs et la définition des fonctions admises et interdites dans chaque secteur (tableau IV.5), le plan directeur définitif, à travers la réglementation de chaque secteur, vise

« à mettre l'accent sur la topographie du centre-ville, les bâtiments ayant survécu à la guerre, le panorama urbain, la structure des quartiers et les différentes strates de mémoire historique constituant le patrimoine de la ville. Il se propose de plus d'assurer une liaison efficace entre le centre-ville traditionnel et les nouvelles constructions qui seront réalisées sur les terrains gagnés sur la mer, ainsi qu'entre l'ensemble du projet et les zones environnantes. »14

32Paradoxalement, les plans publiés ne représentent que très schématiquement les éléments de cette dernière liaison à assurer (liaison entre les différents secteurs du centre-ville et les zones environnantes).

33Si le règlement détaillé du projet du centre-ville définit les fonctions admises et leur répartition dans les différents secteurs ainsi que les surfaces construites totales autorisées par secteur toutes fonctions confondues, ce règlement ne fixe pas la répartition de ces surfaces entre les différentes fonctions. Toutefois, dans différentes publications et brochures d'information. solidere diffuse une répartition des surfaces réservées à chaque groupement de fonctions (tableau IV.6). Nous pouvons ainsi nous forger une idée de ce que vont être les fonctions dominantes du centre, tout en notant que cette répartition n'est pas fixée par le règlement et qu'elle peut être modifiée selon la demande sur le marché et selon les choix que la société peut être amenée à faire pour répondre à cette demande.

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Figure IV.3 : plan de zonage

Source : feuille G3 des Plans joints au Plan et Règlement détaillés du centre-ville commercial de Beyrouth, approuvés par le décret n° 4830 du 4 mars 1994.

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Figure IV.4 : plan définitif de zonage.

Source : feuille G'3 des plans joints aux Amendements du plan et du règlement détaillés du centre-ville commercial de Beyrouth, approuvés par le décret n° 5906 du 3 septembre 1994.

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Tableau IV.5 : répartition des fonctions admises dans les différents secteurs du centre-ville.

Source : El Achkar. D'après le Plan et Règlement détaillés du centre-ville commercial de Beyrouth, approuvé par le décret n° 4830 du 4 mars 1994.

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Tableau IV.6 : surfaces construites relatives à chaque groupe de fonctions admises dans les différents secteurs du centre-ville.

Source : comité fondateur de solidere, La reconstruction du centre-ville de Beyrouth, Brochure d'information, Beyrouth, octobre 1993 et solidere Rapport annuel 1994.

e. Les surfaces et la propriété du sol des secteurs et sous-secteurs du centre-ville

34La brochure d'information publiée par solidere (1993) précise que l'ensemble de l'opération couvre une surface d'environ 160 hectares au sol, 180 hectares après modification (1994). Le plan et le règlement détaillés ne précisent pas les surfaces au sol des secteurs et sous-secteurs. L'utilité de cet élément pour le calcul des densités nous pousse à calculer nous-mêmes ces surfaces. Les chiffres figurant ci-dessous (tableaux IV.7 et IV.8) ne sont donc pas officiels. Ils sont le résultat d'un calcul sur ordinateur des surfaces délimitées dans le dessin ci-dessous (figure IV.5), qui est une copie assez précise du plan de zonage.

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Figure IV.5 : découpage et évaluation des surfaces (en m2) des secteurs et sous-secteurs du centre-ville.

Source : El Achkar

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Tableau IV.7 : évaluation des surfaces au sol des différents secteurs de l'opération, d'après les plans du projet initial avant modification par le décret 5609/94.

Source : El Achkar

35Le décret 5609 ratifiant l'élargissement de la zone du remblai est approuvé le 3 septembre 1994.

36Le 20 septembre 1994, solidere signe un accord avec le CDR pour le financement et l'exécution des travaux d'infrastructure dans le centre-ville, le remblai et les terrains gagnés sur la mer, conformément au plan directeur définitif. Cet accord est ratifié le 21 septembre par le Conseil des ministres. Le coût des travaux devant être entrepris par SOLIDERE pour le compte de l'État a été estimé dans l'accord à la somme de 475 000 000 dollars américains.

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Tableau IV.8 : Evaluation des surfaces au Sol des différents secteurs de l'opération, d'après les plans du projet définitif aptes modification par le décret 5609/94.

Source : El Achkar

37Selon les termes de l'accord signé entre solidere et l'État,

« solidere s'est engagée à exécuter les travaux, à ses propres frais et sous sa responsabilité, quel que soit le coût réel, sous la surveillance et la direction du cdr et conformément à un calendrier et à un cahier des charges approuvés par le cdr.

« En contrepartie de ces travaux, la Société a reçu la propriété de 291 800 m2 de terrains dans la zone gagnée sur la mer. Cette superficie a été calculée de la manière suivante : 35 % des terrains qui seront gagnés sur la mer (soit 35 % des 608 000 m2, dont 150 000 m2 supplémentaires) en échange du traitement des remblais, de l'assainissement des terrains, des ouvrages maritimes et des travaux d'infrastructure sur les terrains gagnés sur la mer, soit 212 800 m2, auxquels s'ajoutent 79 000 m2 en échange des travaux effectués dans le centre-ville traditionnel. »15

38Cet accord vient en application de l'article 3 de la loi 117/91 du 7 décembre 1991

39qui stipule dans son premier paragraphe que

« [...] L'État peut signer avec la société foncière une convention ayant pour objet le remblayage d'une partie de la mer. sur la base d'un plan et d'un schéma directeur régulièrement approuvés. Les terrains émergés seront aménagés et répartis entre l'État et la société en vertu d'un accord établi par le conseil du Développement et de la Reconstruction et approuvé par décret en Conseil des ministres sur proposition des ministres des Finances, des Travaux publics et des Transports. »

40Les termes de cet accord laissent également supposer que l'État garde 65 % des terrains gagnés sur la mer, soit 395 200 m2.

41Le rapport annuel de 199416 diffusé par solidere déclare pourtant que l'ensemble de la surface au sol du projet (180 hectares) est répartie comme suit :

  • 853 000 m2 environ en espaces publics incluant l'ensemble des voiries et espaces paysages ;

  • 863 000 m2 environ en îlots à construire appartenant à soudere ;

  • 83 000 m2 environ consacrés à des édifices religieux ou des bâtiments publics (lots exemptés).

42Nous constatons que la part des terrains qui reviennent à l'État ne peut qu'être incluse dans les surfaces consacrées à l'ensemble des voiries, aux espaces publics et aux quelques bâtiments publics et administratifs qui lui appartenaient déjà. Ceci exclut toute possibilité pour l'État de pouvoir intervenir dans l'avenir dans l'aménagement des lots à construire qui auraient pu lui être réservés.

f. Densités et surfaces construites

43Le nouveau règlement du centre-ville ne fixe pas une valeur pour le CET. Par contre, il fixe une valeur maximale des surfaces construites totales (y comprises celles déjà existantes) dans chaque secteur. Nous pouvons donc calculer la densité brute17 de chaque secteur ainsi qu'une densité moyenne du futur centre (tableau IV.9).

44D'après les rapports annuels et les brochures d'information de SOLIDERE, la surface des lots à aménager est de l'ordre de 52,5 % de la surface totale au sol de l'opération, le reste comprenant les surfaces des voies, places et jardins publics. Par ailleurs, le règlement stipule (article 9-2) que lors d'un lotissement18, 10 % de la surface à aménager doit être réservée à la circulation, aux passages pour piétons et aux dégagements (jardins, placettes)19. D'après ces données, on peut trouver une valeur équivalente au CET de chaque secteur en multipliant par 2,11 la valeur de sa densité brute. La valeur moyenne du CET est donc de 5,5 c'est la densité effective du nouveau centre. Cette valeur du CET est approximativement égale à celle appliquée avant la guerre, avec la différence que dans le passé, c'était une limitation théorique qui n'a pratiquement jamais été atteinte20, tandis qu'avec le nouveau règlement, c'est une valeur pratique, calculée à partir des surfaces à construire fixées. Notons que cette valeur se rapproche de 9 dans le secteur B, ainsi que dans la partie centrale du secteur D où le plan d'aménagement signale une forte densité et une hauteur élevée des constructions.

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Tableau IV.9 : densités brutes dans les différents secteurs du centre-ville de Beyrouth

Source : El Achkar

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Figure IV. 6. : représentation graphique des densités brutes dans les différents secteurs du centre-ville de Beyrouth,

Source : El Achkar

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Figure IV. 7 : représentation volumétrique des différents secteurs du centre-ville de Beyrouth correspondant aux densités brutes relatives au plan approuvé par le décret 4830/94.

Source : El Achkar

g. La prise en compte de la situation géographique.

45La conception du projet tient compte des éléments de son environnement physique : aménagement de couloirs visuels orientés vers la mer et la montagne ; développement d'activités liées au transport maritime à proximité du port (bien que l'intégration de ce dernier dans le réseau de voirie ne soit pas claire d'après les documents en notre possession) ; limitation des hauteurs des constructions dans la zone du dégagement de la colline du Grand Sérail (figure IV.8).

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Figure IV.8 : axes des dégagements visuels établissant un rapport avec la mer (au nord) et. la montagne libanaise (au nord-est).

Source : El Achkar (cliché et dessin).

h. Les gabarits et les alignements

46Le plan détaillé du centre-ville fixe, sur l'ensemble des secteurs, la répartition et les types de gabarits réglementaires à respecter (figures IV.9 et IV. 10). A la différence des règles du gabarit appliquées sur l'ensemble de la ville, la nouvelle réglementation se caractérise par une limitation en hauteur des bâtiments (obligatoire) ; le respect des alignements (obligatoire) ; le découpage horizontal de la façade et le couronnement du corps de bâtiment par une corniche (obligatoire) ; l'introduction d'une galerie qui longe la base du bâtiment pour certains (obligatoire) et d'un recul au niveau de la base pour d'autres (facultatif). Sur les tronçons de rues qui ne sont soumis à aucune réglementation concernant les gabarits identifiés sur les plans, seront appliquées les dispositions relatives aux gabarits selon les modalités d'application de la loi de la construction en vigueur, à savoir le décret n° 2791 du 15 octobre 1992.

47Bien qu'il soit présenté comme étant indépendant des textes du code de la construction applicable sur l'ensemble de la ville, le nouveau règlement du centre-ville renvoie souvent aux dispositions du décret n° 2791 en les combinant avec de nouvelles dispositions. Ceci pourrait expliquer que la date du dernier amendement des modalités d'application de la loi de la construction (15 octobre 1992) coïncide avec celle de l'approbation du nouveau plan directeur du centre-ville. Les dispositions communes concernent surtout les lignes du gabarit sur les cours intérieures, les reculs par rapport aux parcelles limitrophes, le dégagement minimal du champ visuel, l'implantation de deux immeubles ou plus sur une même parcelle et les immeubles de plus de 40 mètres de hauteur.

48Les plans détaillés fixent, sur chaque îlot, les hauteurs maximales autorisées. La réglementation des immeubles de plus de 40 mètres de hauteur sera appliquée, là où cette hauteur est admise, simultanément avec les règles des gabarits fixées ci-dessous. C'est la définition, selon l'article 16 paragraphe (d) du règlement détaillé du centre-ville, du gabarit qui résulte de cette combinaison. Ce gabarit est identifié par (SW5), il ne figure pas dans notre illustration, ni sur les plans détaillés.

49Quand aux gabarits (SWA1) et (SWA2), ils sont appliqués dans des cas très particuliers, dans le secteur G, sur la rue Maarad pour le premier et les rues Allenby et Foch pour le second.

50La définition des gabarits dans les différents secteurs du centre-ville exclut toute application des dispositifs de la loi 6/80 du 17 mai 1980 (étage El-Murr) et de ses prolongations actuelles et à venir.

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Figure IV. 9 : les gabarits réglementaires applicables aux différents secteurs du centre-ville

Source : d'après les articles 16 et Glu du Plan et Règlement détaillés au centre-ville commercial de Beyrouth approuvés par le décret n° 4830 du 4 mars 1994.

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Figure IV. 10 : exemple d'alignements fixés et de lu répartition des types de gabarits sur les plans détaillés. Secteur (B), une zone mixte du centre-ville.

Source : copie retouchée de la feuille R2 des plans joints au Plan et Règlement détaillés du centre-ville commercial de Beyrouth, approuvés par le décret n° 4830 du 4 mars 1994.

i. Les lotissements et les moyennes d'exploitation au sol

51Le règlement des lotissements fixe les dimensions minimales par secteur (ou sous-secteur) du nouveau parcellaire à créer. La plus petite de ces surfaces est deux fois plus grande que la surface minimale admise par l'ancien règlement, et quatre fois plus grande que la surface minimale des parcelles constructibles fixée par le règlement du zoning (zones 1 et 2) établi en 1954. L'ancien parcellaire étant déjà aboli par le principe de la société foncière unique, le nouveau aura donc des dimensions et une configuration tout à fait différentes. Ce qui implique des nouvelles dimensions, plus importantes, se traduisant dans la volumétrie et la morphologie du nouveau tissu urbain.

52Dans l'intention de réserver un maximum de surfaces libres au sol (qui seront d'ailleurs compensées par l'augmentation des surfaces construites), la moyenne d'exploitation au sol de 100 % fixée par le règlement du zoning de 1954 sera réduite, suivant les secteurs.

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Tableau IV.10 : moyennes d'exploitation au sol des différents secteurs (suite tableau suivant).

Source : El Achkar. D'après le Plan et Règlement détaillés du centre-ville commercial de Beyrouth, approuvés par le décret n° 4830/94 et amendés par le décret 5609/94. Le plan est une copie retouchée du Plan de Zonage, feuille G'3 des plans joints au Plan et Règlement détaillés du centre-ville commercial de Beyrouth.

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Tableau IV. 11 : moyennes d'exploitation au sol des différents secteurs.

Source : El Achkar. D'après le Plan et Règlement détaillés du centre-ville commercial de Beyrouth, approuvés par le décret n° 4830/94 et amendés par le décret 5609/94. Le plan est une copie retouchée du Plan de Zonage, feuille G'3 des plans joints au Plan et Règlement détaillés du centre-ville commercial de Beyrouth.

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Tableau IV.12 : dimensions et surfaces minimales des parcelles issues d'un lotissement.

Source : El Achkar. D'après le Plan et Règlement détaillés du centre-ville commercial de Beyrouth, approuvés par le décret n° 4830 du 4 mars 1994 et amendés par le décret 5609 du 3 septembre 1994.

53En superposant les données des tableaux (IV. 10 à IV. 12) ci-dessus, nous constatons l'évolution de la réglementation des grands ensembles étudiée auparavant. C'est sur les plus grandes parcelles (minimum 2 500 m2) que le constructeur garde une liberté d'exploitation au sol, et que le projet est soumis à l'approbation préalable, par solidere, de son plan masse. Cette réglementation concerne les sous-secteurs Bb, Db, Hc et Ja.

54Le sous-secteur De bénéficie d'un traitement encore plus particulier étant donné qu'il se situe dans le prolongement de l'axe visuel de la place des Martyrs ; il s'agit de conserver le dégagement de cet axe vers l'horizon.

B. SURVI DE L'OPERATION

55La durée de la Société est fixée à 25 ans à compter de sa constitution définitive21. On ne peut donc pas établir un bilan objectif de son action surtout que la plus grande part des travaux est programmée pour la période située entre les années 2000 et 2008. Cependant, nous pouvons noter que le plan détaillé approuvé en 1994 profite d'une certaine souplesse due essentiellement aux vastes fouilles archéologiques toujours en cours. Le plan est susceptible de s'adapter aux résultats de ces fouilles et des mesures de report de surfaces construites autorisées, entre secteurs, sont prévues au cas où des terrains constructibles d'un des secteurs seraient classés et exploités comme sites historiques.

56Dans une volonté affichée de faire participer le plus grand nombre de professionnels aux réflexions sur l'espace public, solidere lance des concours internationaux d'idées pour établir des plans d'aménagement partiels, portant sur l'étude de sites clefs. Citons :

  • Le plan paysager : concours d'idées remporté en 1994 par l'atelier Interscène (France).

  • L'aménagement du secteur des souks : concours d'idées lancé en novembre 1993 et jugé en juin 1994, remporté par trois équipes : Dirsin-Mc Farlane (États-Unis), A. K. Kassar & Valode & Pistre (France) et Mark Saadé et associés (Grande-Bretagne). solidere fait ensuite appel à Jade Tabet pour établir, en se basant sur les projets lauréats, le plan final des souks à adopter.

  • Aménagement de la place des Martyrs et son prolongement vers la mer : concours à lancer22.

57Sur un autre plan, solidere a déjà dressé des schémas d'urbanisme détaillés pour les secteurs de Saïfi et de Wadi Abou Jmil. Plusieurs permis de construire ont déjà été obtenus pour des constructions neuves dans ces deux secteurs. On peut aussi mentionner les permis de construire obtenus pour deux bâtiments portant les symboles de la nouvelle vocation du centre-ville : Le Beirut Trade Center (l'ex-tour el-Murr) et le siège central de l'escwa. Ce dernier a été livré fin 1997.

58Des opérations de restauration des bâtiments exemptés sont en cours. La plus importante de ces opérations est actuellement la restauration par solidere, et par les propriétaires ayant conservés leurs droits, des bâtiments situés dans le secteur Foch-Allenby.

59Sur le plan financier, solidere a adopté d'importantes mesures pour réaliser ses objectifs, et s'est munie d'éléments et d'outils avancés. Le comité fondateur de solidere avait publié en 1994. lors du lancement de la souscription aux actions, ses prévisions pour les bénéfices annuels. Les résultats et les bénéfices réels de 1994 et 1995 se sont avérés très proches de ces prévisions23.

« La valeur des échanges des actions de solidere au courant de l'année 1995 a atteint près de 168 millions de dollars. La société est intervenue et a acheté près de 33 millions de dollars d'actions. L'activité nette du marché était donc d'une valeur de 135 millions de dollars. En d'autres termes, de nouveaux investissements sont entrés sur le marché avec 135 millions de dollars, ce qui représente un chiffre important comparé au volume du marché des investissements au Liban. »24

60Lors de son Assemblée générale du 29 juin 1996, solidere annonce le fractionnement de ces actions au dixième, pour faciliter les échanges sur le marché. La valeur nominale de l'action passe de 100 à 10 dollars américains.

61Nous ne risquons rien à affirmer que la réussite de la reconstruction – ou son échec – dépend uniquement du bon fonctionnement et de la stabilité financière de solidere. C'est dire si les enjeux de la reconstruction sur les plans politique et économique ainsi que la portée de cette opération sur le plan social se jouent dans l'engagement de la société privée, vis-à-vis de l'Etat, de ses actionnaires et de la collectivité, à atteindre les objectifs fixés. Dès lors, une question se pose : dans quelle mesure solidere pourra-t-elle allier un principe de gestion libérale aux exigences d'une opération d'aménagement d'intérêt avant tout public ? Question à laquelle il est encore tôt pour répondre.

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Figure IV.l1 : le plan directeur des souks dessine par Jade Tabet, en collaboration avec Benjamin Thomson et associés (consultants), Isométrie du projet.

Sources : (1) feuille R5 des plans joints au Plan et Règlement détaillés du centre-ville commercial de Beyrouth, approuvés par le décret n° 4830 du 4 mais 1994. (2) Citation : sabbah C, « Reconstruire Beyrouth », dans Techniques & Architecture, n° 425, avril-mai 1996, p. 26-31.

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Figure IV. 12 : plan des alignements de la place des Martyrs.

Source : feuille R8 des plans joints au Plan et Règlement détaillés du centre-ville commercial de Beyrouth, approuvés par le décret n° 4830 du 4 mars 1994.

Notes de bas de page

1 Le cdr est créé par le décret législatif n° 5 du 31 janvier 1977.

2 Charara M., « Beyrouth, le choix d'un centre », dans Monde arabe, Maghreb-Machrek, numéro spécial, 1er trimestre 1994, p. 174-185. Citation p. 175.

3 Charara M., op. cit., p. 176.

4 Davie M. F., « La reconstruction de Beyrouth... », op. cit., p. 66.

5 Article 1 de la loi n° 117, portant amendement à l'alinéa 6 de l'article 5 du décret législatif n° 5 du 31 janvier 1977. Le paragraphe 4 cité ci-dessus correspond à l'article 5 du décret législatif n° 5.

6 Alinéa 9 rajouté à l'article 5 du décret législatif n" 5 du 31 janvier 1977, par l'article 2 de la loi n° 117.

7 Comité fondateur de solidere, La reconstruction du centre-ville de Beyrouth, Brochure d'information, Beyrouth, octobre 1993, p. 22.

8 Charara M. op. cit., p. 176.

9 PAZ (Plan d'Aménagement de Zone) et ZAC (Zone d'Aménagement concerté) sont des techniques d'urbanisme utilisées en France. L'ensemble des techniques de l'urbanisme, pratiquées actuellement ou par le passé en France sont exposées dans merlin P., Les techniques de l'urbanisme, PUF « Que sais-je ? ». Paris 1995. C'est de cet ouvrage que sont tirées les notions et les explications suivantes :
PAZ : Plan d'Aménagement de Zone. Est établi pour la ZAC et se substitue au POS dans celle-ci (p. 17. 64, 72. 75, 106-108 et 123).
POS : Plan d'Occupation des Sols. Opposable à tous. Il indique les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols, ce qui peut comporter l'interdiction de construire. Dans les communes ne disposant pas de POS. s'appliquent les règles générales d'urbanisme (ou RNU), sous la responsablité de l'État (p. 16. 18-20. 26, 27, 30, 33, 47-49, 59, 62-77, 80. 88, 93. 105-108. 111. 123).
PSMV : Plan de Sauvegarde et de Mise en Valeur. Est établi par l'Etat dans les secteurs sauvegardés qu'il a délimités. Le secteur sauvegardé est proposé par la commune ou par l'Etat (commission nationale des secteurs sauvegardés) qui recueille alors l'avis de la commune. Celte procédure a initialement été définie par la loi Malraux du 4 août 1962, pour les zones urbaines présentant « un caractère historique, esthétique ou de nature à justifier la conservation, la restauration ou la mise en valeur de tout ou partie d'un ensemble d'immeubles » (p. 64, 72, 74, 75, 123).
RNU : Règlement National d'Urbanisme, constitué par les règles générales d'urbanisme. Edictées pour la première fois par un décret du 25 août 1955, elles ne s'appliquent qu'en l'absence de plan local (POS ou autre). Néanmoins, si les documents locaux (POS, PSMV ou PAZ) ne les respectent pas, en cas de conflit, ce sont les règles générales de l'urbanisme qui s'appliquent (p 72).
SDAU : Schéma Directeur d'Aménagement et d'Urbanisme – sauf pour Paris – : opposable aux collectivités publiques mais pas aux tiers (p. 16, 18, 19, 57 et 58).
SEM : Société d'Économie Mixte, associant les communes (ou les établissements publics territoriaux les regroupant) qui doivent avoir la majorité en capital et en voix, et les agents privés. La SEM a un champ d'activités assez étendu : opérations d'aménagement, services publics à caractère industriel ou commercial ou toute autre activité d'intérêt général. Mais elles doivent se limiter à leur circonscription territoriale et ne pas porter atteinte au principe de liberté du commerce et de l'industrie. On distingue les SEM d'aménagement, les SEM de construction et les SEM de rénovation (p. 14, 32, 44, 45, 48, 49, 92, 100 et 102).
ZAC : Zone d'Aménagement concerté. C'est une procédure qui a été définie par la loi du 30 décembre 1967 en réaction contre les ZUP jugées trop rigides. Elle doit être compatible avec le SDAU, mais peut déroger au POS (p. 17, 18, 29, 32. 35. 46, 47, 59, 64, 70. 75, 104-109 et 112). On distingue :
Les ZAC dites publiques, qui succèdent en quelque sorte aux ZUP. réalisées en régie par une collectivité publique ou concédées à une SEM. La collectivité publique en assume la responsabilité financière.
Les ZAC dites privées, faisant l'objet d'une convention entre la collectivité publique, qui en prend l'initiative, et un aménageur-promoteur qui se charge de la réaliser en assumant la responsabilité financière.
ZUP : Zone à Urbaniser par Priorité : Première procédure d'urbanisme opérationnel. Créée en 1958, elle vient régulariser la pratique des grands ensembles. Elle introduit le droit de préemption et est remplacée par la ZAC par la loi de 1967 (p. 11-14. 17, 47, 104 et 117).

10 Article 13 du règlement détaillé approuvé par le décret n" 4830 du 4 mars 1994.

11 solidere. Rapport annuel 1995. p. 21.

12 Sabbah C, « Reconstruire Beyrouth », dans Techniques & Architecture, n°425, avril-mai 1996, p. 26-31. Citation p. 30-31.

13 L'étude de la réglementation des garages s'est avérée fastidieuse et nous l'avons reportée pour ne pas trop surcharger la recherche. Néanmoins, nous précisons que selon la réglementation appliquée sur l'ensemble de la ville, l'utilisation des locaux prévus comme garages peut être modifiée moyennant le paiement d'une amende. Cette dérogation est généralisée dans la pratique architecturale, et le manque de places de stationnement est compensé par l'exploitation, par la municipalité mais également par des particuliers, de terrains non-construits qu'on va baptiser « parkings publics ». Ces parkings deviennent très vite nombreux et ils vont créer des vides et des ruptures dans la continuité du tissu urbain et renforcer la discontinuité des alignements.

14 solidere, Rapport annuel 1994, p. 21.

15 solidere, Rapport annuel 1994, p. 23.

16 Ibid. p. 21.

17 La densité brute est le rapport entre la surface totale des planchers et la surface totale au sol de la zone touchée par le plan d'aménagement (surfaces constructibles, voierie. espaces verts, espaces publics).

18 Le lotissement peut être opéré soit par la société foncière soit par l'acquéreur du terrain.

19 L'article 8-2 du décret 4 830 du 4 mars 1994 stipule que les 10 % ainsi aménagés seront annexés au domaine public. Le règlement ne définit pas clairement les modalités de cette annexion.

20 Avant la guerre, il y avait dans le centre-ville environ 47 millions de mètres carrés de plancher construit sur 112,8 hectares de terrain, dont 55.2 hectares d'espaces publics, cela correspond à une densité brute de 1,5 et un CET effectif de 2,95, cf. D. G. II., Le centre-ville de Beyrouth en 1974, mai 1980, étude réalisée par le Bureau d'Études et de Recherches du Mouvement Social en 1977.

21 Article 4 des statuts de SOLIDERE approuvés par le décret n° 2537 du 22 juillet 1992.

22 Selon l'article H(l) du plan et règlement détaillés approuvés par le décret n° 4830 du 4 mars 1994.

23 Mansour A. H, « L'action de solidere : une valeur sûre et garantie », dans Magazine n° 2022 du 9 août 1996, Beyrouth, p. 50-51.

24 Ibid.


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