Pratiques d'acquisition de l'eau et modalités de peuplement dans les Marges arides de la Syrie du Nord
p. 25-43
Résumés
Les marges arides de la Syrie du Nord, région de steppe aride située au sud-est d’Alep, se sont révélées très riches en sites archéologiques. La répartition de ces derniers est dictée par une contrainte majeure, l’aridité climatique, de plus en plus marquée d’ouest en est. Mais d’autres éléments interviennent dans cette répartition. Le relief local, la qualité des sols, la ressource en eau, très variables selon les lieux, génèrent une mosaïque de micro milieux aux potentiels très différents. Vient se greffer sur ces réalités géographiques l’intervention humaine, guidée par la nécessaire adaptation aux rigueurs de l’environnement. Cette intervention est multiforme, mais se traduit souvent par l’introduction, au fil des siècles, de nouvelles techniques, notamment hydrauliques, censées répondre à la contrainte majeure et l’atténuer. Une fois mises en œuvre, ces techniques vont ouvrir des secteurs, jusqu’alors répulsifs, à l’occupation humaine, qu’elle soit permanente ou temporaire. Dans certains cas, cette ouverture va se révéler permanente et correspondra donc, pour ce qui concerne l’occupation du sol et le peuplement, à une transformation des conditions environnementales originelles.
The fringes of northern Syria, a land of arid steppe to the south-east of Aleppo, were discovered to have a large number of archaeological sites. The distribution of these sites is conditioned by the main constraint, the climatic aridity, more marked from west to east. However other factors contribute to this distribution. The relief, the types of soil, the water resources, strongly varied from place to place, determine a patchwork of micro environments offering very different potentialities. The human activities are conditioned by the necessary adaptation to these hard geographical conditions. They take many forms, and mostly by the introduction of new techniques, namely hydraulic, to face the major constraint and minimize it. Once put to practice, these techniques will open areas previously inhospitable to human occupation, whether permanent or temporary. When the occupation turns permanent, the change corresponds, as far as the settlement pattern and the agricultural conditions are concerned, to a transformation of the original environmental conditions.
لقد كشفت الهوامش الجافة في سورية الشمالية، في منطقة البادية الواقعة جنوب شرق حلب، عن غنى كبير بالمواقع الأثرية. ويحدد توزع هذه المواقع عائق أساسي وهو جفاف المناخ الذي يزداد حدة كلما اتجهنا شرقاً. ولكن هناك عناصر أخرى تتدخل في هذا التوزيع، كالتضاريس المحلية ونوعية الترب والموارد المائية التي تختلف كلها بحسب الأماكن، مولدة بهذا الشكل فسيفساء من الأوساط الطبيعية الصغيرة ذات الإمكانيات المختلفة جداً. وينضم تدخل الإنسان إلى هذه الحقائق الجغرافية، والذي توجهه الحاجة الضرورية للتأقلم مع قسوة البيئة. إن هذا التدخل متعدد الأشكال ، ولكنه يترجم غالباً عبر القرون من خلال إدخال تقنيات جديدة، لاسيما المائية، التي يفترض منها أن تتجاوب مع العائق الرئيسي وأن تخفف من حدته. وما أن توضع هذه التقنيات قيد التطبيق تُعمّر مناطق كانت تعتبر حتى الآن غير صالحة للسكن الدائم أو المؤقت. ويظهر في بعض الأحيان أن فتح هذه المناطق للإعمار ذو طبيعة دائمة ويرتبط في هذه الحالة، فيما يتعلق بالزراعة والإعمار، بتحول في الظروف البيئية الأصلية.
Texte intégral
Introduction
1En région aride comme ailleurs, les besoins en eau des hommes comme de la plupart des animaux d'élevage sont quotidiens. Les nomades et leurs troupeaux peuvent résoudre le problème en se déplaçant de manière à s'abreuver à des points d'eau, sous réserve que ces derniers ne soient pas trop distants. Quant aux populations sédentaires, liées à la terre, elles doivent pourvoir à ces besoins sur place 1.
2En région steppique, l’offre de la nature est, sur ce plan, réduite et ne répond que peu à ces exigences pourtant vitales. Dans les marges arides de la Syrie du Nord, le climat méditerranéen, dégradé2, se traduit par une longue saison chaude (5 à 6 mois, parfois plus) privée de pluies, alors que l'évapotranspiration potentielle atteint des valeurs très largement supérieures au total des précipitations. Sous des sols souvent minces et érodés, les substrats géologiques et les formations superficielles y sont généralement peu aptes à la rétention des eaux, soit du fait de leur capacité d’absorption (chapes basaltiques fissurées, couvertures alluvio-colluviales), soit du fait de leur compacité (affleurement de roches massives, dalles superficielles cimentées). Dans les deux cas, le ruissellement à la surface est limité dans l’espace et, surtout, dans le temps.
3L’accès direct à l'eau libre est donc restreint à de rares points (sources) ou à de brefs moments (crues d'oueds ordinairement secs), voire à des lieux où cette eau se révèle inutilisable parce que salée (lacs salés ou sebkhas). La répartition spatiale de ces accès à l’eau se révèle enfin très irrégulière, laissant de vastes secteurs impropres à l’installation humaine du fait de l’indigence des ressources directes.
4Afin de répondre aux exigences alimentaires quotidiennes, il faut donc, en l’absence de ressource suffisante, être en mesure d'accéder aux réserves naturelles souterraines (puits) ou de stocker l'eau des précipitations. Ce stockage peut être réalisé sur les pentes (mares aménagées, citernes, etc.) ou dans les talwegs (barrages, birkés, etc.).
Une région aride, mais riche en sites archéologiques
5La région étudiée 3 se situe au sud-est d’Alep. Elle fait partie de la Badiya syrienne, domaine de marges arides qui correspond à la frange interne du Croissant fertile (fig. 1) 4. Au nord, la région comprend la partie basse du glacis d'Al-Bāb, fragment aval du piémont du Taurus. Au sud, incliné en sens contraire, c’est-à-dire sud-nord, le glacis de piémont nord-palmyrénien relaie le versant pentu du Ğabal Bal‘as. Au contact des deux ensembles se situe une dépression centrale qui accueille plusieurs cuvettes endoréiques (sebkhas 5). À proximité de la dépression centrale se dressent des collines plus ou moins tabulaires, protégées par une ancienne coulée basaltique : les Ğabal al-Ḥaṣ, Šbayṭ, ‘Ubaysān et le Hummat al-Ḫayl. Le tout est limité à l'ouest par le massif du Ğabal al-‘Alā, en grande partie basaltique, qui borde le glacis de piémont des Massifs calcaires de Syrie du Nord, à l'est par le rebord du plateau aride d’Al-Rasafa.
Fig. 1 – Carte de localisation

6La région est soumise à une contrainte majeure : l’aridité climatique6. Celle-ci impose ses diktats à toute tentative d’implantation ou de mise en valeur. La carte des précipitations moyennes annuelles (fig. 2) en révèle la pesanteur : de 300 à 350 mm à l’extrême ouest, les moyennes tombent à près de 150 mm à l’est de la région.
Fig. 2 – Carte des précipitations moyennes annuelles

7Mais l'importance – et la variabilité – de la pluviosité7 ne sont pas les seuls éléments qui influent sur le peuplement et la mise en valeur : le degré de fertilité des sols et la qualité des ressources en eau jouent un rôle tout aussi déterminant. Ces différents facteurs se révèlent très diversifiés dans cet espace de transition entre la zone bioclimatique méditerranéenne et la steppe hyperaride. Les conditions de l’environnement jouent un rôle décisif sur les possibilités d’occupation, que ce soit de nos jours8 ou dans le passé9. Ainsi, la limite des cultures pluviales, que l'on fait coïncider habituellement avec l’isohyète des 200 ou des 250 mm de précipitations moyennes annuelles, se révèle ici théorique, puisque, même en dessous de 200 mm, la culture pluviale reste possible dans des contextes spécifiques tels que les fonds d'oueds, les petites dépressions fermées, les faydas 10. Leurs potentiels particuliers ont été largement exploités au cours des temps et ce ne sont pas moins de 1000 sites archéologiques qui ont pu être découverts sur une surface de 10.000 km2 11.
8Le grand nombre de sites relevés permet de se faire une idée assez précise des limites d’expansion de l’occupation sédentaire au cours du temps. Il en ressort que cette occupation a connu des épisodes de flux et de reflux bien marqués.
Flux et reflux de l’occupation
9Si l’on excepte les périodes anté-néolithiques 12, pour lesquelles il semble que seules des implantations temporaires nous soient connues, les premiers sites occupés par des sédentaires sont attestés au Pre Pottery Neolithic B (PPNB). Ces installations sont encore peu nombreuses (moins d'une demi-douzaine ont été repérées), mais les sites non sédentaires sont plus fréquents et dénotent des stratégies d’implantation qui se révèlent particulièrement intéressantes (cf. ci-dessous). Par la suite, l'occupation du sol a beaucoup varié selon les époques, allant du peuplement sédentaire dense au nomadisme quasi généralisé. Si aux époques du Bronze ancien et romaine correspond une occupation sédentaire semblable, dans son extension, à l'actuelle (fig. 3), certaines périodes ont connu une expansion considérable de cette occupation – c’est le cas de l’époque byzantine –, alors que d’autres ont été marquées par un recul important – les époques d’Uruk, du Fer ou hellénistique –, sinon un abandon quasi total de la région – le Bronze récent 13 ou la période ottomane –.
Fig. 3 – Carte de l'extension de l'occupation sédentaire à diverses périodes

10Si ces faits sont relativement bien cernés, les causes des fluctuations du front pionnier sont forcément diverses et encore trop souvent imprécises.
11Les caractéristiques du milieu naturel (dont une fragilité intrinsèque des milieux steppiques, et donc une possible dégradation des ressources et du support édaphique) ont joué un rôle certain. L’influence des fluctuations climatiques, même s’il s’agit là d’une explication trop souvent avancée, est, évidemment, également à prendre en compte. Les données historiques (faits sociaux, événements politiques ou économiques) ont largement influé : on prendra comme exemple le quasi abandon de la région par les sédentaires après les invasions mongoles14. Mais on oublie trop souvent le rôle important de l’introduction de techniques nouvelles, et notamment de techniques d’acquisition de l’eau15, dans la conquête de nouvelles terres en régions sèches.
12Dans un contexte d’aridité marquée, l’usage intensif et diversifié de techniques d’acquisition de l’eau est d’autant plus important que leur efficacité peut être relativement peu dépendante des fluctuations de la ressource en eau. Une fois mises en œuvre, ces techniques vont ouvrir des secteurs, jusqu’alors répulsifs, à l’occupation humaine, que celle-ci soit permanente ou temporaire. Le raisonnement explicatif des flux et des reflux peut s’en trouver modifié, de même que le potentiel d’attractivité de ces secteurs.
Des zones répulsives disséminées dans toute la région
13À l’échelle de la région, la répartition des aires écogéographiques est globalement calquée sur celle de l’aridité climatique. Mais les potentiels d’utilisation de la terre sont aussi réglés par le jeu des interférences entre les facteurs géologiques, hydrologiques, morphologiques et pédologiques. Ce sont ces déterminants écologiques qui façonnent les paysages ; ce sont leurs interférences qui confèrent aux biotopes leur personnalité géographique : l’ensemble compose une mosaïque de terroirs. Il n’est pas question d’analyser ici toutes ces unités spatiales, souvent très petites. Mais la prise en compte de leurs caractéristiques majeures permet, par généralisations successives, de circonscrire des ensembles spatiaux possédant des contraintes et des potentiels relativement similaires. Même si le paysage n’y est pas uniforme, ces ensembles associent de manière répétitive des terroirs complémentaires et forment des unités cohérentes.
14Une fois cette étape de l’étude acquise, qui a autorisé l’élaboration d’une carte de répartition et de classification des aires écogéographiques16, et en prenant simultanément en compte l’incidence de l’aridité climatique et l’impact des facteurs édaphiques, on peut découper la région en un certain nombre d’unités territoriales potentiellement plus ou moins attractives quant aux desiderata des cultivateurs sédentaires. La carte ainsi obtenue (fig. 4) fait ressortir une imbrication des niveaux d’attractivité, même si ceux-ci se dégradent globalement d’ouest en est.
Fig. 4 – Carte des zones d'attractivité

15Ainsi, dans l’est de la région, où il tombe moins de 200 mm de pluie, l’aridité climatique suffit à rendre compte d’une moindre attractivité, et donc de la rareté des sites occupés par les sédentaires. Pour autant, l’uniformité n’y est pas la règle. Les territoires où ne se déplacent que les nomades se limitent de fait à un petit quart sud-est et à la montagne palmyrénienne : ils laissent une place dans le centre à un domaine de transition où s’installent préférentiellement des semi-sédentaires17. Dans ces deux cas, il existe également des noyaux de sédentaires (et l’on sait que les populations de ces zones marginales peuvent passer rapidement d’un état à un autre) lorsque les conditions locales (micromilieux) le permettent.
16Inversement, à l’ouest de cette « ligne des 200 mm », il subsiste, dans des contextes édaphiques diversifiés, des espaces enclavés, cultivés, plus ou moins étendus, mais qui ont toujours été à peu près inhabités ou le sont longtemps restés (fig. 5). Les implantations y sont extrêmement réduites (région de Ḍuhūr al-Ṭuwāl), voire tout à fait inexistantes (sur le plateau du Hummat al-Ḫayl), ou n’y sont observables qu’à partir d’une certaine époque (plateau basaltique du Ğabal ‘Alā). Les terres y sont pourtant mises en valeur. Il en allait de même durant l’antiquité : ce ne sont donc pas les lenteurs de la recolonisation qui expliquent ce phénomène. Il s’agit là de territoires qui sont ou ont été, jusqu’à une certaine période, perçus comme répulsifs, bien qu’englobés dans le domaine durablement conquis par les sédentaires. L’absence d’habitats sédentaires peut s’expliquer de plusieurs manières : perméabilité trop forte du substrat dans le cas de calcaires karstifiés ou de massifs dunaires, affleurement d’un conglomérat ou d’une roche massive dont le sol a presque entièrement disparu, contexte topographique de dissection qui intensifie le ruissellement et l’érosion, etc.
Fig. 5 – Les zones répulsives

17Que ce soit à l’est ou à l’ouest, les Hommes ont cherché, lorsque le besoin s’en faisait sentir, à coloniser de nouvelles terres. Cela signifiait souvent une implantation, temporaire ou permanente, dans des secteurs pauvres en ressources en eau, et qu’il fallait donc aménager avant de pouvoir s’y installer.
Le cas du Néolithique ou la première quête de l’eau
18Le premier exemple d’une telle entreprise a été noté dans l’extrême est de la région étudiée. Sur les derniers contreforts du piémont nord des chaînes des Palmyrénides, Tulūl al-Ḥafyān (lat. 35° 13’ 32” ; long. 37° 59’ 26”) se présente comme une croupe rocheuse dénudée, en bordure d’une fayda propice à la pâture, dans un environnement calcaire, très aride (fig. 6), défavorisé tant par des précipitations faibles et erratiques que par des conditions édaphiques très rudes. Si la fayda est susceptible de fournir du fourrage vert durant la saison humide, les écoulements de surface, rares et limités dans le temps, sont insuffisants à assurer une alimentation en eau régulière, même sur un laps de temps court.
Fig. 6 – Tulūl al-Ḥafyān : la croupe calcaire au premier plan, en bordure de la fayda visible au second plan.

19Pour pallier cet inconvénient majeur et pouvoir profiter des ressources saisonnières offertes par la fayda, il fallait stocker un minimum de réserves d’eau, permettant ainsi un séjour au moins temporaire. Pour ce faire, et prenant sans doute exemple sur les kamenitsas 18, des hommes ont amélioré les petites retenues naturelles ainsi formées ou en ont créées de nouvelles.
20Des « mares aménagées », de divers types adaptés au contexte environnemental et constituant autant de petites réserves d’eau temporaires, ont été retrouvées sur de nombreux versants, notamment sur le site de Tulūl al-Ḥafyān 5 (fig. 7).
Fig. 7 – Le site de Tulūl al-Ḥafyān 5

21Les plus fréquentes de ces « mares », installées sur des versants dénudés, sont délimitées à l’aval par un muret courbe constitué en gros blocs de calcaire partiellement pris dans de la terre (fig. 8). Elles peuvent avoir jusqu’à une vingtaine de mètres de « diamètre », leur bassin d’alimentation s’étalant en amont (fig. 9). Sur un des talwegs débouchant dans la fayda, des aménagements équivalents ont été installés en série : trois « mares », pouvant avoir jusqu’à 40 m de long sur 20 m de large, retiennent les écoulements fugaces concentrés dans l’oued (fig. 10). Ces mares sont, ici, associées à des artefacts néolithiques, notamment de nombreuses « pointes de Byblos ».
Fig. 8 – « Mare » amont sur le site de Tulūl al-Ḥafyān 5

Fig. 9 – Kamenitsa aménagée en « mare » sur le site de Tulūl al-Ḥafyān 5 ; à droite, une partie de l’impluvium

Fig. 10 – « Mare aménagée » dans un talweg sur le site de Tulūl al-Ḥafyān 5

22Il est difficile, en attendant les études détaillées du matériel lithique 19 récolté à proximité immédiate de ces aménagements, de dire s’ils ont été conçus à l’origine pour permettre au bétail de boire ou pour attirer du gibier. Ils permettaient en tout cas aux hommes de s’implanter dans ces zones sèches et ont été, de toute évidence, fréquemment réutilisés. Ils sont, pour certaines d’entre eux, encore entretenus de nos jours. De la céramique a été retrouvée, certes en quantités faibles, dans le secteur des « mares aménagées » de Tulūl al-Ḥafyān : sont représentées les périodes du Bronze ancien, romaine, byzantine, ayyoubide et contemporaine. Cela correspond aux périodes d’occupation maximale de la steppe aride par les nomades et atteste de la fréquence, sinon de la permanence, de l’occupation sur ces rares points d’eau.
Le cas de l’âge du Bronze ancien iv ou la quête de nouvelles terres de culture
23L’âge du Bronze ancien correspond incontestablement à la première grande période d’expansion du peuplement sédentaire dans la zone étudiée20. Les régions de marges arides situées sur la frange interne du Croissant fertile font l’objet d’un grand intérêt tout particulièrement au Bronze ancien IV. Les sédentaires conquièrent alors des terres jusqu’alors peu occupées, sinon délaissées. Confrontés à des milieux naturels contraignants du fait de l’aridité mais très diversifiés, ils adaptent les modes d’occupation du sol à la réalité des potentiels de ces milieux.
24Si l’on compare la répartition du peuplement au Bronze ancien IV (BA IV) et celle au Bronze moyen II (BM II), qui correspondent aux deux périodes du Bronze les plus représentées dans la région, on constate, pour le BM II, une évidente rétraction du peuplement au fur et à mesure que l’on s’enfonce vers l’est (fig. 11). Les sites, nombreux au BA IV dans le centre de la région, se raréfient par la suite, alors qu’ils se révèlent plus nombreux dans les terres très attractives de l’ouest.
Fig. 11a – Carte de répartition des sites de l'âge du Bronze ancien IV

Fig. 11b – Carte de répartition des sites de l'âge du Bronze moyen II

25Celles-ci correspondent en fait au plateau (une mesa basaltique) du Ğabal ‘Alā. Bien que situé à l’ouest de notre région, dans une zone privilégiée tant d’un point de vue climatique qu’édaphique, cette surface correspond pourtant à une zone répulsive (cf. fig. 5). Certes, les terres y sont fertiles, grâce à des sols souvent profonds et lourds, mais la ressource en eau y est difficilement accessible. En effet, la fracturation de la nappe basaltique provoque l’enfouissement des eaux de ruissellement et leur accumulation sous forme de nappe phréatique « infra basaltique », au contact des calcaires crayeux et marneux sous-jacents. Accéder à une eau quotidienne, vitale pour toute installation permanente, nécessite donc de pouvoir foncer des puits dans les basaltes, localement fragilisés par la fissuration mais durs et résistants 21. Attaquer le basalte n’est guère possible qu’avec des outils en métal. Ceci peut expliquer la rareté, sinon l’absence de sites antérieurs à l’âge du Bronze sur ces surfaces pourtant très attractives si l’on considère le seul intérêt agricole. Par contre, une fois la technique acquise et, surtout, une fois les puits foncés, le plateau du Ğabal ‘Alā fera l’objet d’un intérêt évident.
26Tall Ẓahab (fig. 12; lat. 35° 12’ 42”, long. 37° 01’ 10”), implanté sur la mesa du Ğabal ‘Alā (fig. 13), dans un vallon très évasé en tête de réseau, est un exemple caractéristique de ces installations « pionnières ». Occupé au Bronze ancien 22, au Bronze moyen, à l’âge du Fer, aux époques byzantine, ayyoubide et mamelouke, le site, en grande partie recouvert par le village contemporain, est installé sur un ancien puits d’environ 40 m de profondeur qui suffirait, d’après un informateur local, à alimenter tout le village.
Fig. 12 – Tall Ẓahab, sur la mesa basaltique du Ğabal ‘Alā

Fig. 13 – Le village de Tall Ẓahab et la mesa basaltique du Ğabal ‘Alā, vus du tell

27Al-Ḥaqiyya 1 (fig. 14 ; lat. 35° 28’ 41”, long. 37° 00’ 33”), petit tell très caillouteux, en est un autre exemple. Il est installé en lisière du talweg d’une petite reculée dans la mesa, à la confluence de deux oueds primaires peu marqués et juste en amont de la confluence avec la vallée principale. Au pied du tell, à proximité du talweg, se trouve un puits ancien, réutilisé récemment. Le site a été occupé au Bronze ancien IV et au Bronze moyen ainsi qu’à l’âge du Fer. Au sud du tell, sur la surface de la mesa, apparaissent les ruines d’un village antique, occupé aux périodes hellénistique, romaine et ayyoubide, ainsi que quelques maisons modernes.
Fig. 14 – Le tell de Al-Ḥaqiyya 1

28Le plateau du Ğabal ‘Alā présente une occupation quasi continue depuis l’âge du Bronze, fondée sur les mêmes aménagements : des puits. L’exemple n’est pas unique dans la région, puisque le plateau marneux et marno-calcaire de Menbij a révélé une histoire sensiblement proche. J. Besançon et P. Sanlaville23 notent que ce plateau fertile, mais pauvre en eau superficielle, « n’a pu être véritablement colonisé que lorsque les hommes ont pu maîtriser les techniques de fonçage des puits ». Leur prospection a révélé que cette occupation a commencé au Bronze ancien IV et qu’elle s’est développée au Bronze moyen.
Le cas de l’époque byzantine ou la colonisation systématisée
29À la période byzantine correspond, dans la région, une expansion forte de l’occupation sédentaire24. Le mouvement avait certes débuté durant l’époque romaine, mais c’est alors qu’elle atteint le maximum d’extension et de densité. La région d’Andarin (l’antique Androna) offre un exemple particulièrement intéressant de zone de marge aride entre le Croissant fertile et la steppe désertique. Le nombre de sites repérés (près de 400) y est suffisamment élevé pour que l’on puisse proposer un schéma d’occupation du sol en cinq zones différentes, d’ouest en est (fig. 15), dans lesquelles la part croissante de l’élevage souligne l’aggravation de l’aridité. Cette zonation semble traduire une organisation de l’espace parfaitement contrôlée, bien maîtrisée, malgré les contraintes.
Fig. 15 – Attractivité et zonation de l’occupation du sol à l’époque byzantine

30L’occupation des zones I et II ne posait pas de problèmes particuliers : l’attractivité y est globalement forte et l’économie fondée sur la culture, qu’elle soit pluviale ou irriguée. La zone I, il est vrai, peut être considérée comme faisant partie intégrante du Croissant fertile, avec une économie fondée sur la céréaliculture pluviale, associée à de l’arboriculture et à de l’élevage. Quant à la zone II, elle a alors bénéficié de grands travaux hydroagricoles avec la multiplication de qanats 25 qui autorisaient le déploiement à grande échelle de la culture irriguée.
31Il en va tout autrement dès que l’on aborde la zone III, vouée avant tout à l’élevage, et a fortiori dans la zone IV où les sédentaires ne sont présents que dans des fermes pionnières, sortes de « ranchs » adaptés aux spécificités du milieu. L’aridité, climatique et édaphique, y est plus contraignante et les ressources en eau faibles. Les nappes superficielles des oueds ne charrient plus assez d’eau pour rentabiliser l’aménagement de qanats. Les surfaces emblavables, plus rares, sont de superficies de plus en plus réduites. La culture n’est plus ici une réponse adaptée aux conditions environnementales, sauf sur des micro-milieux favorisés. On entre là dans le domaine de l’élevage extensif, sur les surfaces herbeuses offertes par les glacis de piémont des Palmyrénides. Mais cette activité économique demande elle aussi des ressources en eau quotidiennes, tant pour les Hommes que pour les bêtes. Or la zone en est pauvre ; la nécessaire adaptation aux contraintes environnementales implique donc une mobilisation artificielle des ressources en eau. La technique adoptée de manière privilégiée s’est avérée particulièrement bien adaptée, tant à la diversité des milieux qu’à celle des ressources. Le choix s’est porté sur une technique permettant une mobilisation ponctuelle des ressources : la citerne.
32Le site de Rasm Ğnayna 1 (lat. 35° 19’ 34”, long. 37° 35’ 29”), occupé à l’époque byzantine, présente un bon exemple d’utilisation de la citerne. La localité est installée sur le versant du W. Zarub. Son noyau central, dense, laisse apparaître de très nombreuses arases de murs et buttes de leben 26. Sur le versant, parmi d’autres, une citerne antique, alimentée par le ruissellement sur la pente, a été curée récemment et réutilisée. Au pied du site, une grande citerne de talweg, de forme parallélépipédique (fig. 16), est ouverte vers le lit de l’oued. Creusée dans la roche marneuse, elle a pour plafond la dalle calcaire qui chapeaute les marnes. Dans cette dalle a été aménagé un orifice permettant de puiser l’eau. Alimentée par les eaux de débordement de l’oued, la citerne a, elle aussi, été réutilisée récemment.
Fig. 16 – Citerne de talweg à Rasm Ğnayna 1

33Le très grand site de Rasm al-Aḥmar 3 (lat. 35° 19’ 15”, long. 37° 43’ 35”) a été occupé aux périodes byzantine et omayyade. Il s’étend sur 850 m environ du nord au sud et sur 700 m environ d’est en ouest (fig. 17) et présente de nombreuses installations espacées, marquées au sol par des arases de murs et des buttes de leben. Des masses de leben imposantes marquent l’emplacement de grands bâtiments. Au sud se trouvent deux groupes de vastes citernes cubiques sur pente (fig. 18) qui, nettoyées, ont resservi il y a peu.
Fig. 17 – Vue partielle du site de Rasm al-Aḥmar 3

Fig. 18 – Citerne cubique sur pente à Rasm al-Aḥmar 3

34Ḫirbat al-Ğā‘ad (lat. 35° 24’ 03”, long. 37° 32’ 38”) a été occupé à l’époque byzantine. Ce grand site de 500 m de long sur environ 200 m de large est installé sur un replat d’interfluve à la confluence de deux oueds. Parmi les nombreuses buttes de leben, au nord-est une masse imposante culminant à 4 m marque l’emplacement d’un important bâtiment. Ailleurs, des arases de murs entourent de vastes cavités sous roche. Dans l’agglomération sont disséminées plusieurs citernes, dont une a gardé sa margelle (fig. 19). Dans un des oueds, une très grande citerne est toujours fonctionnelle.
Fig. 19 – Citerne avec sa margelle à Ḫirbat al-Ğā‘ad

35À Fayḍat ‘Adūl 1 (lat. 35° 09’ 33”, long. 37° 39’ 30”), deux buttes de leben, des arases de murs et des enclos marquent l’emplacement d’une probable ferme byzantine. Le bâtiment occupe un espace quadrangulaire de 20 m sur 17 à 18 m. Des abris sous dalle complètent l’ensemble, localisé un peu en retrait d’une fayda, en bordure d’un petit oued où se trouvent deux citernes de talweg, encore entretenues (fig. 20).
Fig. 20 – Une citerne de talweg à Fayḍat ‘Adūl 1

36La citerne a donc été déclinée sous toutes ses formes durant la période byzantine et n’a cessé d’être utilisée depuis : citernes sur pente, citernes piriformes, citernes isolées ou de talweg, etc. Elle a permis, du fait de la facilité de sa mise en œuvre, l’occupation permanente (ou temporaire) de secteurs jusqu’alors peu fréquentés. Aisée à entretenir ou à remettre en fonction, elle a perduré, souvent jusqu’à nos jours, servant de points de fixation du peuplement, qu’il soit le fait de sédentaires, de semi-nomades ou de nomades.
Conclusion
37Les sédentaires, qui avaient quitté les régions de marges étudiées ici depuis les invasions mongoles, ont longtemps fondé leur retour, entamé dès le milieu du XIXe siècle, sur la mise en œuvre des techniques inaugurées par leurs lointains devanciers27. À leur arrivée, les nouveaux occupants se sont astreints à curer les citernes et les vieux puits, à désobstruer les qanats. Les nomades, quant à eux, ont, certainement de tout temps, entretenu les citernes et réutilisé les anciennes mares présentes sur leurs parcours. En agissant ainsi, ils ne faisaient que profiter des aménagements réalisés lors des trois périodes d’expansion remarquables de l’occupation du sol, périodes qui ont connu le développement d’implantations pionnières, permanentes ou temporaires, sur des terres jusqu’alors peu ou pas occupées.
38Le maître mot de ces fortes expansions est « techniques ». Et c'est bien le Néolithique, puis l’âge du Bronze ancien IV, et enfin la période byzantine 28 qui ont correspondu à des sortes « d'âges d'or » de la steppe, aux maxima d'expansion et de prospérité. La mise en œuvre de techniques hydroagricoles, qu’elles soient rudimentaires ou sophistiquées, n'a pas à être évoquée pour expliquer les causes de cette expansion, mais bien pour en souligner les modalités, la manière dont elle a pu se réaliser et les conséquences qu'elle a pu avoir sur la distribution de l'occupation et sur l’état de la ressource en eau. L'aménagement de mares, de puits, de citernes, leur multiplication, parfois jusque dans les régions les plus sèches, a permis une appropriation de l'espace, y compris dans les secteurs les plus reculés, faisant de cette steppe aux contraintes fortes une sorte de « monde plein », ce dernier concept étant, bien sûr, à relativiser en fonction des périodes étudiées.
39La mare aménagée, le puits, la citerne, techniques d’acquisition de l’eau « sans âge » parce qu’aisément réalisables par de petites communautés, se révèlent avoir été des éléments de transformation des potentiels du milieu naturel sur la longue durée. Le caractère répulsif de la zone concernée par l’aménagement en est réduit, la contrainte n’est plus aussi prégnante. La résultante en est une ouverture à la colonisation qui peut se révéler permanente et correspondre donc, pour ce qui concerne l’occupation du sol, le peuplement et la mise en valeur, à une transformation des conditions environnementales originelles. Il n’y a pas nécessité de transmission d’un savoir ou d’une connaissance particulière : même après plusieurs siècles d’abandon, l’évidence s’impose et les nouveaux occupants profitent « naturellement » d’une ressource pourtant d’origine artificielle.
Bibliographie
Al-Dbiyat et Jaubert 2006M. Al-Dbiyat et R. Jaubert, « Le repeuplement sédentaire des marges arides à l’époque contemporaine (1848-1960) », dans R. Jaubert et B. Geyer (éd.), Les marges arides du Croissant fertile. Peuplements, exploitation et contrôle des ressources en Syrie du Nord, TMO 43, Maison de l’Orient, Lyon, 2006, p. 71-79.
Besançon et Geyer 2006
J. Besançon et B. Geyer, « Contraintes écogéographiques et modes d’occupation du sol », dans R. Jaubert et B. Geyer (éd.), Les marges arides du Croissant fertile. Peuplements, exploitation et contrôle des ressources en Syrie du Nord, TMO 43, Maison de l’Orient, Lyon, 2006, p. 11-53.
Besançon et Sanlaville 1985
J. Besançon et P. Sanlaville, « Le milieu géographique », dans P. Sanlaville (éd),Holocene Settlement in North Syria. Résultats de deux prospections archéologiques effectuées dans la région du nahr Sajour et sur le haut Euphrate syrien, BAR IS 238, 1985, p. 7-40.
Geyer 2001
B. Geyer (éd.), Conquête de la steppe et appropriation des terres sur les marges arides du Croissant fertile, T.M.O. 36, Lyon : Maison de l’Orient, 2001, 218 p.
Geyer et Calvet 2001
B. Geyer et Y. Calvet, « Les steppes arides de la Syrie du Nord au Bronze ancien ou “ la première conquête de l’est ” », dans B. Geyer (éd), Conquête de la steppe et appropriation des terres sur les marges arides du Croissant fertile, T.M.O. 36, Lyon : Maison de l’Orient, 2001, p. 55-67.
Geyer et alii2001
B. Geyer, Y. Calvet et P.-L. Gatier, « Les marges arides du Croissant fertile : en guise d’introduction », dans B. Geyer (éd), Conquête de la steppe et appropriation des terres sur les marges arides du Croissant fertile, T.M.O. 36, Lyon : Maison de l’Orient, 2001, p. 9-12.
Geyer et Rousset 2001
B. Geyer et M.-O. Rousset, « Les steppes arides de la Syrie du Nord à l’époque byzantine ou “ la ruée vers l’est ” », dans B. Geyer (éd), Conquête de la steppe et appropriation des terres sur les marges arides du Croissant fertile, T.M.O. 36, Lyon : Maison de l’Orient, 2001, p. 111-121.
Jaubert et alii 1999
R. Jaubert, F. Debaine, J. Besançon, M. Dbiyat, B. Geyer, G. Gintzburger et M. Traboulsi, Land Use and Vegetation Cover in the Semi-Arid and Arid Areas of Aleppo and Hama Provinces (Syria), Cahiers du GREMMO, hors série, 1999.
Jaubert et Geyer 2006
R. Jaubert et B. Geyer, Les marges arides du Croissant fertile. Peuplements, exploitation et contrôle des ressources en Syrie du Nord, TMO 43, Maison de l’Orient, Lyon, 2006, 205 p.
Métral 2006
F. Métral, « Transformations de l’élevage nomade et économie bédouine dans la première moitié du vingtième siècle », dans R. Jaubert et B. Geyer (éd.), Les marges arides du Croissant fertile. Peuplements, exploitation et contrôle des ressources en Syrie du Nord, TMO 43, Maison de l’Orient, Lyon, 2006, p. 81-101.
Peltenburg 2003
E. Peltenburg, “ Identifying Settlement of the Xth-IXth Millenium B.P. in Cyprus from the Contents of Kissonerga-Mylouthkia Wells”, dans J. Guilaine et A. Le Brun (éd.), Le Néolithique de Chypre, BCH supplément 43, 2003, p. 15-33.
Rousset (sous presse)
M.-O. Rousset, « Le peuplement des Marges arides (région de Salamiyya) à l’époque islamique », Actes du colloque de Hama, AAAS, Damas.
Traboulsi 2004
M. Traboulsi, Les précipitations au Proche-Orient : variabilité spatio-temporelle et relations avec la dynamique de l’atmosphère (1960-1961/1989-1990), Thèse de l’Université de Bourgogne, Dijon, 2004.
Notes de bas de page
1 Les réflexions qui font l’objet de cette communication ne sont pertinentes que pour des sociétés traditionnelles dans lesquelles le moteur ne tient qu’un rôle restreint, sinon aucun.
2 Traboulsi 2004.
3 L’étude a été réalisée dans le cadre d’un programme de recherche intitulé « Marges arides de la Syrie du Nord » et diligenté par le laboratoire Archéorient (UMR 5133), Maison de l’Orient et de la Méditerranée, Université Lumière-Lyon 2 - CNRS, par l'Institut Universitaire d’Études du Développement (Genève) et par la Direction Générale des Antiquités et des Musées de Syrie (Damas). Il a été réalisé en collaboration avec l’ICARDA (Alep), l’UMR 5189 - Hisoma (Lyon), l’IFEAD (IFPO, Damas) et l’IGARUN (Nantes) ; il est financé par le Ministère Français des Affaires Etrangères, le CNRS et la Coopération Suisse. Ont pris part aux travaux de terrain : N. al-Awad, M. al-Dbiyat, J. Argant, O. Aurenche, O. Barge, J. Besançon (†), Y. Calvet, B. Chalich, F. Debaine, C. Duvette, P.-L. Gatier, H. Morel, J.-C. Moncel, S. Muhesen, H.-G. Naton, M.-O. Rousset, S. Sanz, J. Vaudour, sous la direction de B. Geyer et de R. Jaubert.
4 Le Croissant fertile correspond à un domaine bioclimatique en forme de croissant, qui s’étend de la Palestine aux piémonts du Zagros en passant par la Jézireh. Il assure, au Levant, la transition entre la zone proprement méditerranéenne, plus ou moins montagneuse, et le désert vrai de l’Arabie. Originellement pauvre en arbres (pistachier, amandier, etc.), il était couvert de formations herbacées, incluant notamment diverses graminées (dont des céréales sauvages) et légumineuses, et favorisa l’invention de l’agriculture au Néolithique. À la domestication des végétaux (orge, blé, pois, etc.) s’ajouta celle de certains mammifères grégaires (bovidés, ovicapridés) qui y paissaient naturellement. Les potentiels de mise en valeur variaient, et varient toujours, principalement en fonction de la pluviosité et de la fertilité des sols.
5 En région aride, les sebkhas correspondent aux parties basses des dépressions endoréiques où se rassemblent les eaux de ruissellement ou de source. Saisonnièrement inondées, elles s’assèchent plus ou moins complètement en été. Les sels solubles s’y concentrent, rendant les eaux impropres à la consommation.– L'endoréisme correspond à un système hydrographique dans lequel les eaux courantes ne peuvent atteindre la mer et se rassemblent dans des dépressions topographiques d’où elles ne peuvent s’échapper que par évaporation et infiltration.
6 Besançon & Geyer 2006.
7 Traboulsi 2004.
8 Jaubert et al. 1999, Jaubert et Geyer 2006.
9 Geyer 2001.
10 Les faydas (terminologie locale) sont des évasements des fonds de vallées profitant de sols d’apport, profonds et bien alimentées par les eaux de ruissellement, localisés soit à la confluence des oueds soit sur des replats structuraux ou autour des dépressions endoréiques.
11 Si le permis de prospection couvrait effectivement près de 10.000 km2, seuls 7.000 km2 ont fait l’objet d’une prospection approfondie.
12 L'ensemble des artefacts lithiques récoltés lors de la prospection est en cours d'étude par É. Coqueugniot (UMR 5133).
13 Comme cela pourrait être le cas pour la période d’Uruk, il faut cependant rester prudent lorsque l’on évoque la rareté des sites du Bronze récent : les vestiges matériels, et particulièrement la céramique, peuvent être difficilement différentiables de ceux du Bronze moyen. C’est en tout cas ce qui a pu être mis en évidence lors des prospections réalisées autour de Qatna (D. Morandi Bonacossi, communication personnelle).
14 Rousset, sous presse.
15 Geyer et al. 2001.
16 Besançon et Geyer 2006.
17 Métral 2006.
18 Vasques naturelles formées par dissolution, de dimensions métriques, située généralement dans des roches calcaires massives. Elles retiennent souvent les eaux de ruissellement, autorisant la formation de petites mares temporaires.
19 La datation des sites néolithiques a été établie par É. Coqueugniot (Archéorient - UMR 5133).
20 Geyer et Calvet 2001.
21 Des puits ont été foncés bien avant l’âge du Bronze, dès le Néolithique (PPNB), par exemple à Chypre, sur le site de Kissonerga-Mylouthkia (Peltenburg 2003), mais dans des roches notablement plus tendres (havara).
22 La datation des sites des âges du Bronze et du Fer a été établie par Y. Calvet (Archéorient - UMR 5133), celle des sites des périodes hellénistique à moderne par M.-O. Rousset (Orient et Méditerranée - UMR 8167).
23 Besançon & Sanlaville 1985, p. 17.
24 Geyer & Rousset 2001.
25 Une qanat est une galerie drainante souterraine mise en œuvre pour l’exploitation de nappes phréatiques superficielles, parfois de sources. Elle est aussi appelée foggara en Afrique du Nord, feledj dans le Golfe arabo-persique et en Arabie, karez au Balouchistan.
26 Nom donné, en arabe, à la brique crue.
27 Al-Dbiyat et Jaubert 2006.
28 Certes ce mouvement d'expansion vers les régions sèches avait débuté dès l'époque romaine et il s'est poursuivi, au moins localement, au début de l'époque islamique, mais c’est bien durant l’époque byzantine qu’il a atteint son maximum (Geyer et Rousset 2001).
Auteur
CNRS/UMR 5133 - Archéorient, Maison de l’Orient et de la Méditerranée (France)
bernard.geyer@mom.fr
bernard.geyer@mom.fr
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Stratégies d'acquisition de l'eau et société au Moyen-Orient depuis l'Antiquité
Mohamed Al-Dbiyat et Michel Mouton
2009
L’époque des premiers bourgs fortifiés
Pertinence de l’existence d’un processus d’urbanisation dans le Levant sud au troisième millénaire
Christophe Nicolle
1999
Le sacré et le salut à Antioche au IVe siècle apr. J.-C.
Pratiques festives et comportements religieux dans le processus de christianisation de la cité
Emmanuel Soler
2006