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    Plan

    Plan détaillé Texte intégral Introduction 1. Historique de la recherche sur les habitats ruraux médiévaux 2. Les sites de référence du corpus 3. Caractéristiques des habitats ruraux alto-médiévaux en Eure-et-Loir Synthèse Bibliographie Notes de bas de page Auteurs

    L’archéologie des ve-xiie siècles en région Centre-Val de Loire

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    Archéologie des habitats ruraux alto-médiévaux en Eure-et-Loir

    Archaeology of alto-medieval rural habitats in Eure-et-Loir

    Cyrille Ben Kaddour, François Capron et Olivier Labat

    p. 127-141

    Résumés

    Depuis une trentaine d’années et le développement de l’archéologie préventive, les données concernant l’habitat rural du haut Moyen Âge se sont accumulées en Eure-et-Loir. Un bilan de ces connaissances devenait nécessaire. Celles-ci sont assez hétérogènes d’un site à l’autre, résultant de contextes d’interventions divers : certaines occupations ont été mises au jour fortuitement sur des sites dont la fouille était motivée par des vestiges d’autres périodes chronologiques, d’autres ont été abordées de manière superficielle ou étudiées sur des superficies restreintes, et d’autres encore ont pu faire l’objet d’études beaucoup plus poussées, menées sur de vastes emprises très denses témoignant d’habitats groupés et pérennes sur le temps long. Seront abordés ici l’organisation et l’évolution des sites, ainsi que leurs équipements et les activités qu’ils abritaient, au prisme des différents types de structures (bâtiments sur poteaux, fonds de cabanes, silos, fours, sépultures, etc.), mais aussi du mobilier et des écofacts.

    For the past thirty years and the development of preventive archaeology, numerous data about the Early Middle Age rural Settlement have accumulated in Eure-et-Loir. We present here a review of this heterogeneous knowledge: few rare structures on sites whose excavation was motivated by remains from other chronological periods, sites very superficially excavated or on restricted areas, but also vast and very dense sites wich indicate grouped and perennial habitats. We will discuss the organization and evolution of the sites, as well as their equipment and their activities, through the prism of the different types of structures (buildings, pit-houses, silos, ovens, burials, etc.), but also artifacts and ecofacts.

    Entrées d’index

    Mots-clés : haut Moyen Âge, habitat rural, Eure-et-Loir, bâtiments sur poteaux, fonds de cabane, fours domestiques, silos, sépultures, activités agro-pastorales

    Keywords : early Middle Age, rural settlement, Eure-et-Loir, wooden buildings, pit-houses, ovens, silos, burials, agropastoral activities

    Texte intégral Introduction 1. Historique de la recherche sur les habitats ruraux médiévaux 2. Les sites de référence du corpus 3. Caractéristiques des habitats ruraux alto-médiévaux en Eure-et-Loir 3.1. Les biais de la recherche 3.2. Implantation et organisation des sites 3.3. Chronologie des sites 3.4. Équipements des habitats et activités 3.4.1. Le mobilier 3.4.2. Productions et consommations végétales et animales 3.5. Les vivants et leurs morts Synthèse Bibliographie Notes de bas de page Auteurs

    Texte intégral

    Introduction

    1Les nombreuses données archéologiques collectées sur le haut Moyen Âge dans le département d’Eure-et-Loir méritent aujourd’hui un bilan d’étape. Celui-ci s’appuie à la fois sur les recensions et notices de sites réalisées dans le cadre du PCR sur l’habitat rural en région Centre (de 2007 à 2013), sur les rapports d’opérations ainsi que les notices mises en ligne par les revues Archéologie Médiévale et Archéologie de la France – Informations (AdlFI).

    2Le corpus couvre un grand éventail de sites, de la ferme isolée au village, en pleine campagne, en contexte villageois actuel ou en milieu péri-urbain. Ont été exclus les dispositifs de type “motte castrale” pour lesquels, sur ce territoire, les données sont anciennes et peu détaillées. Ces occupations particulières mériteraient, par ailleurs, de faire l’objet d’une étude thématique. Pour les bornes chronologiques, un constat d’homogénéité, nous a conduits à privilégier une vision assez large du haut Moyen Âge : entre la fin du ve s. et le début du xiie s.

    3Le cadre départemental ne recouvre aucune réalité politique alto-médiévale et constitue simplement le cadre administratif de nos recherches. Une certaine unité topographique existe toutefois au sein de ce territoire puisque la majeure partie des sites sont implantés dans la région naturelle de la Beauce. En effet, les observations sont plutôt regroupées sur la partie est du département (la partie beauceronne) et beaucoup plus ponctuelles dans la partie ouest (la partie percheronne, plus vallonnée et moins concernée par de grands travaux d’aménagement du territoire, Fig. 1).

    Fig. 1 - Localisation des observations concernant l’habitat rural du haut Moyen Âge dans le département d’Eure-et-Loir, sur fond de carte Corin Land Cover simplifié.

    DAO : C. Ben Kaddour.

    4Après un rapide historique de la recherche seront présentés les sites les plus riches en informations. Puis nous décrirons les composantes des habitats et les témoignages d’activités.

    1. Historique de la recherche sur les habitats ruraux médiévaux

    5Avant 1985, les travaux d’érudits portent très peu (voire pas) sur ces habitats, probablement en raison du caractère fugace des vestiges1.

    6Les éléments alto-médiévaux mis au jour avant cette date sont divers : un atelier de potier (à Chérisy “les Osmeaux” fouillé entre 1975 et 1981), l’occupation alto-médiévale de la villa antique de “Mienne” à Marboué (fouillée au xixe s., avec reprise des données et publication en 1981), des fosses “isolées” (à Châteaudun à “la Cavée du Griffon”) et de la céramique reconnue dans les assemblages de certaines fouilles ou prospections sans association avec un habitat contemporain.

    7De 1985 à 2000, comme ailleurs en France, les recherches sur l’habitat rural médiéval démarrent réellement avec l’archéologie de sauvetage puis préventive. Au cours de cette période s’enchaînent le sauvetage d’un fond de cabane à Saumeray, la fouille du “Lycée Saint-Chéron” à Chartres et un diagnostic à Villemeux-sur-Eure, etc. Il faut aussi noter la fouille programmée sur le prieuré de Nottonville (sous la direction de Philippe Racinet), qui a livré, entre autres, quelques vestiges fossoyés dont le mobilier céramique est daté des ixe-xie s. (Racinet 2006). Au cours de cette période, des prospections livrent parfois du mobilier céramique alto-médiéval sans qu’un lien avec une occupation rurale puisse être défini. Les premières synthèses réalisées au cours de cette période qui abordent ce thème dans le département (Provost et al. 1995) ou qui étudient ces établissements sur un territoire plus large ne mentionnent qu’un nombre très réduit de sites. La seconde publication, plus intéressante dans le cadre de notre travail, retient seulement deux habitats euréliens dans son corpus (Peytremann 2003).

    8De 2001 à aujourd’hui, avec la montée en puissance de l’archéologie préventive et une meilleure reconnaissance des habitats ruraux, la masse d’informations sur le sujet explose. Ainsi, le corpus de sites alto-médiévaux en Eure-et-Loir retenu pour cette synthèse comporte 53 sites (sans comptabiliser les diagnostics suivis d’une fouille), répartis sur 34 communes (Fig. 2).

    Fig. 2 - Inventaire des sites euréliens présentant des vestiges d’habitat rural du haut Moyen Âge.

    Tableau : F. Capron, C. Ben Kaddour.

    9La nature de l’aménagement, l’emprise du projet et le type d’opération qui en découle conditionnent évidemment l’état de la connaissance. Ainsi, certains diagnostics et un certain nombre de fouilles ont livré des informations importantes sur l’habitat alto-médiéval, alors que d’autres ne comportaient que de rares vestiges alto-médiévaux sur des emprises prescrites à la fouille pour d’autres périodes chronologiques. Outre la périphérie de Chartres, qui a fait l’objet de nombreuses observations et d’une publication de synthèse (Ben Kaddour 2015), on peut noter des secteurs plutôt bien documentés comme celui d’Illiers-Combray (Labat et Perrichon 2016), Courville-sur-Eure ou la zone d’Épernon/Hanches.

    10Les opérations qui ont apporté un grand nombre d’informations et qui ont pu être fouillées sur de grandes superficies représentent un tiers du corpus des fouilles (soit une dizaine de sites). Elles sont présentées ci-après (voir Fig. 3).

    Fig. 3 - Plan des principaux sites alto-médiévaux d’Eure-et-Loir (1/2).

    DAO : C. Ben Kaddour, d’après Assémat 2019, Bailleux 2005, Bailleux 2007, Bailleux 2009, Capron 2013, Hamon 2008, Gauduchon 2012, Morin 2003, Wavelet 2008.

    2. Les sites de référence du corpus

    11Les fouilles réalisées dans le lycée Saint-Chéron concernent une importante nécropole antique et mérovingienne à laquelle se superpose un habitat du haut Moyen Âge, entre le viie et le xie s. Pour le détail de ces occupations, nous renvoyons le lecteur à l’article de Dominique Joly dans ces présents actes. Les structures rencontrées correspondent essentiellement à des cabanes semi-excavées et des fosses (dont de possibles silos), ainsi que quelques tronçons de fossés. Pour plus de détails, nous renvoyons à l’article de Dominique Joly présenté dans cet ouvrage.

    12La fouille menée sur le contournement de la RN154 au Boullay-Mivoye “les Baudets-Bronville” (Fig. 3, no 3), à Tremblay-les-Villages, a livré une occupation du premier haut Moyen Âge à l’emplacement d’une agglomération antique (Morin et al. 2003). Un hiatus s’observe cependant entre les deux. Les structures archéologiques sont situées de part et d’autre de la voie d’origine antique. Elles se composent d’une quinzaine de fonds de cabane, de trois fours domestiques, de fosses (dont une d’extraction de limon), de deux fossés et de quelques trous de poteau. Le rare mobilier céramique et les datations archéomagnétiques effectuées sur les fours permettent de dater cette phase des viie-viiie s.

    13Sur le site “le Radray”, à Gellainville (Wavelet et al. 2008), fouillé sur 3,8 ha, une occupation prend place à la charnière des ve et vie s. sur un terroir déjà habité et exploité pendant toute l’Antiquité (Fig. 3, no 2). Elle se compose d’un ensemble de fonds de cabane aux types architecturaux variés et de tailles très diverses, de plusieurs bâtiments sur poteaux et de quelques fosses. Plusieurs fours domestiques (et un probable four de potier) ont été aménagés le long d’un long et profond fossé antique. En bordure orientale de l’emprise, une petite nécropole regroupe des inhumations plus récentes (viie s.).

    14Les opérations archéologiques d’Alluyes “la Pierre Aigüe” ont permis de découvrir plusieurs occupations médiévales (Hamon et Detante 2008 et 2011). La plus importante est un habitat du viie s. installé à proximité d’une voie d’origine antique, de part et d’autre d’un chemin perpendiculaire à cette voie (Fig. 3, no 5). Il est constitué de quelques bâtiments sur poteaux, de fonds de cabane, de fours, d’un puits et d’un lieu d’inhumation d’une quarantaine d’individus. À l’ouest, le long de la voie antique, une activité de forge attribuée à l’époque mérovingienne avait été décelée lors du diagnostic. Au sud, une occupation des xe-xie s. est perceptible grâce à un unique four domestique. Ce site est important en raison de la bonne lisibilité de son plan, sa courte durée d’occupation et son aspect “complet”, rassemblant à la fois des vestiges domestiques, artisanaux, agro-pastoraux et un lieu d’inhumation. Il a fait l’objet d’une publication (Capron et Dubuis 2017).

    15À Épernon, le quartier de la Savonnière a fait l’objet de trois campagnes de fouille (Bailleux 2005, 2007 et 2009), sur une superficie de 1,8 ha (Fig. 3, no 6). Les structures du premier haut Moyen Âge sont relativement peu nombreuses, mais l’habitat se densifie à partir du milieu du viiie s., pour aboutir au xe s. à une juxtaposition d’unités domestiques constituées de bâtiments sur poteaux, de fonds de cabane et de silos, avec l’existence de plusieurs fours, plutôt organisés en “batterie” ou “série”.

    16La fouille de “l’Hermitage” à Auneau a permis la découverte d’une occupation des vie-viie s., non loin des bâtiments d’une villa antique (Gauduchon 2012). Le lien entre les deux n’est toutefois pas totalement assuré en raison de l’absence de vestiges au Bas-Empire dans l’emprise de la fouille. Les structures du premier haut Moyen Âge s’émancipent également des axes structurels antiques. La mise au jour d’un lot de céramique de la fin du ixe s. pose aussi la question d’une continuité de l’occupation à proximité au cours du second haut Moyen Âge.

    17La construction d’un lotissement à Marboué à “la Remise Saint-Martin” a permis la fouille d’une occupation agro-pastorale des ixe-xe s. (Dalayeun 2009). Neuf bâtiments sur poteaux, cinq palissades, quatre fonds de cabane, un foyer, un fossé et de nombreux trous de poteau composent cet habitat (Fig. 4, no 5). Les structures s’organisent le long d’un axe de circulation encore en usage aujourd’hui. Trois unités domestiques séparées d’espaces presque vides peuvent être restituées. La fouille ne concerne qu’une partie de cet habitat : le diagnostic avait permis de révéler un probable axe de circulation au nord ainsi qu’un ensemble funéraire d’une dizaine de sépultures. Ce site, comme celui de Mignières, “le Clos de l’Ouche” a la particularité de se trouver aux abords directs du centre du village actuel.

    Fig. 4 - Plan des principaux sites alto-médiévaux d’Eure-et-Loir (2/2).

    DAO : C. Ben Kaddour, d’après Dalayeun 2009, Jaffrot 2017, Labat 2017, Labat à paraître, Lichon 2004b, Verneau 2015.

    18Une déviation routière en périphérie du bourg d’Allonnes a permis l’ouverture d’une fenêtre de fouille sur une largeur limitée d’une cinquantaine de mètres au lieu-dit “la Mare des Saules” (Capron et al. 2013). Dans l’emprise a été mise au jour la frange sud d’un vaste ensemble funéraire dont les sépultures fouillées sont attribuées à la fin du vie et le début du viiie s. Il est bordé d’un chemin au-delà duquel se développent des habitats dont deux unités ont été reconnues. Après l’abandon de ces derniers, au début du ixe s., un nouvel habitat s’implante sur l’ancien espace funéraire, tandis que ses marges sont exploitées pour l’extraction de marnes calcaires (Capron et Vanderhaegen 2019). Cette occupation d’une courte durée est remplacée par un édifice religieux dans le courant des ixe-xe s. (Capron et Carron 2018).

    19Sur le site “ZA de la Haute Borne” à Toury, une grande densité de structures se succèdent de la période gauloise au début du Moyen Âge central (Fig. 3, no 4, Assémat 2019). Un établissement constitué de bâtiments sur fondations en pierre est abandonné vers le ive s., puis son espace est réinvesti à la transition des ve-vie s. Pour toutes les phases du haut Moyen Âge existent de multiples structures s’apparentant à des fonds de cabane, mais sans poteaux de charpente. Il faut aussi signaler un important corpus de silos.

    20Deux fouilles récentes, dont les études sont en cours, devaient faire l’objet de présentation lors du colloque AFAM de Chartres. L’établissement “l’Enclos, la Couture”, à Mainvilliers, est un des plus remarquable du corpus, en terme de superficie, de densité de vestiges et de durée d’occupation. Le site carolingien de “Villeneuve” à Poupry, est également très prometteur.

    21À ces principaux sites, s’ajoutent d’autres occupations explorées sur de plus petites superficies ou moins bien conservés : à Anet “les Terres Franches”, Illiers-Combray “les Fourneaux”, Courville-sur-Eure “l’Orme des Mûriers”, Amilly “Pécante”, etc.) ou ne comportant que des vestiges isolés (“le Poirier” à Nogent-le-Roi, “le Vallier” à Mainvilliers, “ZAC du Jardin d’Entreprise”, “Petit Archevilliers”, “Pôle Synéo” à Chartres, etc., Fig. 3 et 4).

    3. Caractéristiques des habitats ruraux alto-médiévaux en Eure-et-Loir

    3.1. Les biais de la recherche

    22Plusieurs biais existent quant à la compréhension des habitats ruraux alto-médiévaux dans le département.

    23Premièrement, le dynamisme différentiel des territoires aménagés engendre des zones de connaissance disparate sur le territoire eurélien.

    24Par ailleurs, l’exiguïté de certaines fenêtres d’observation ne permet d’étudier qu’une partie des occupations médiévales qui peuvent, en réalité, couvrir des milliers de mètres carrés (Peytremann 2003 : 320-321). Dans le tableau 2, les quelques emprises de fouilles importantes concernent le plus souvent des sites multi périodes et peu dépassent une surface de deux hectares. Ainsi, peu d’occupations, à l’instar d’Alluyes “la Pierre Aigüe (Zone 3)” du vie s. et de Gellainville “le Radray” sont complètes ou au moins largement explorées.

    25Des difficultés de phasage ou d’attribution des vestiges à la période médiévale sont également parfois rencontrées du fait de l’indigence du mobilier et ceci est aggravé dans le cas de superposition d’occupations alto-médiévales sur des sites antiques. Un exemple édifiant : le fond de cabane retrouvé à Nogent-le-Roi a livré 37 tessons antiques et un seul tesson des xe-xiie s. datant la structure, soit une écrasante majorité de céramique antique résiduelle. L’auteur souligne à juste titre que cette structure est en position isolée sur le site mais que certains trous de poteau attribués à la phase gallo-romaine pourraient en réalité être contemporains de la cabane (Verneau et al. 2012 : 128). Sur le site de Tremblay-les-Villages, le mobilier résiduel antique atteint régulièrement 70 à 80 % de la totalité du mobilier (Morin et al. 2003 : 44). Pour le site d’Allonnes “la Mare des Saules”, où les occupations médiévales sont situées en périphérie de l’agglomération secondaire antique, les terres cuites architecturales sont un meilleur vecteur de datation que les autres types de mobilier dont la poterie (Capron et Vanderhaegen 2017).

    26Enfin, tout travail de synthèse se confronte à une carence de publications monographiques. Une part importante de notre travail a donc résidé dans la constitution du corpus des sites et dans le dépouillement des rapports d’opération.

    3.2. Implantation et organisation des sites

    27Certaines occupations alto-médiévales sont implantées dans des espaces déjà habités à la période antique (Auneau, Courville, Gellainville, Toury, Tremblay-les-Villages, etc.). À Gellainville ou Toury, il s’agit d’une réappropriation de grandes fermes avec des bâtiments sur fondations en pierre, à Tremblay-les-Villages, c’est la reprise d’une agglomération gallo-romaine en bordure de la voie Chartres-Dreux (actuelle RN 154), au “lycée Saint-Chéron”, l’habitat et la nécropole mérovingienne s’installent sur un espace funéraire antique.

    28Toutefois, ce phénomène de continuité est loin d’être systématique et, même quand une occupation antique est attestée, il peut y avoir un hiatus (à l’exemple d’Auneau ou de Tremblay-les-Villages, où il n’y a pas de trace d’un habitat tardo-antique).

    29Les occupations du haut Moyen Âge prennent fréquemment la forme de regroupements de plusieurs unités agricoles ou domestiques (assez bien perceptibles à Marboué ou à Épernon), qui peuvent constituer des hameaux.

    30La plupart des sites sont organisés de manière assez lâche, sans parcellaire strict (par exemple à Marboué). Cependant, il n’est pas exclu que les limites fossoyées (fossés) ou les limites superficielles (haies, palissades) aient pu disparaître par érosion comme à Alluyes. Plusieurs systèmes enclos ont cependant été perçus (englobant généralement une partie seulement des structures) : à Gellainville, le noyau d’habitat de la fin ve et du début du vie s. est en partie inclus dans un enclos plus ou moins triangulaire, interrompu (2 000 m2). La majorité des structures d’Auneau sont aussi regroupées dans un enclos, malheureusement mal conservé et en partie hors emprise. À Courville-sur-Eure (Verneau et al. 2015a), l’occupation du second haut Moyen Âge est également en partie insérée dans un enclos en fer à cheval (850 m2). L’occupation du second haut Moyen Âge de Toury est, quant à elle, plutôt située dans la partie ouest d’un grand enclos quadrangulaire dont la majorité des structures respectent l’orientation. Deux sites du second haut Moyen Âge présentent des enclos de grandes dimensions enserrant la majorité de l’habitat : Mainvilliers et Poupry (sites encore en cours d’étude). Celui de Mainvilliers est penta- ou hexagonal (son angle nord-est est hors-emprise) et on peut restituer sa superficie à plus de 1,5 ha. L’enclos de Poupry est de forme trapézoïdale et mesure 5 000 m2. Ses fossés sont assez conséquents et il présente un aménagement de forts poteaux à son entrée.

    31Sur la plupart des sites, les cheminements restent hypothétiques. On peut mettre à part le cas de Tremblay-les-Villages où des tessons retrouvés sur la voie antique suggèrent une continuité de son utilisation lors du premier haut Moyen Âge. À Alluyes, au viie s. un chemin secondaire est également bien perceptible au travers de ses deux fossés bordiers. Il serait perpendiculaire à une voie d’origine antique (hors emprise, mais détectée plus au nord). À Marboué, “la Remise Saint-Martin”, les structures s’alignent le long d’une rue actuelle, signe que celle-ci existait déjà au ixe s.

    3.3. Chronologie des sites

    32L’importance du corpus et la diversité des occupations offrent un grand panel de chronologies. Comme nous l’avons vu, si certaines occupations se superposent à des occupations antiques, cela n’est pas la norme et, bien souvent, il est difficile d’assurer une continuité stricte. Plusieurs sites sont néanmoins occupés dès la transition entre le Bas-Empire et le premier haut Moyen Âge (en premier lieu Gellainville). D’autres sont occupés sur une courte durée (par exemple l’occupation du site d’Alluyes dans le courant du viie s. ou celle d’Anet autour du milieu du xie s.). Inversement, de nombreux sites restent mal datés ou datés dans une fourchette très large (surtout les sites fouillés anciennement et les opérations de diagnostic). La période de transition entre le premier et le second haut Moyen Âge (autour du viiie s.) n’est pas toujours perceptible.

    33Enfin, seuls de rares sites, tous fouillés sur des superficies appréciables, couvrent toute la période du haut Moyen Âge (Allonnes, Mainvilliers, Toury et Épernon). Ce sont, bien entendu, plutôt des habitats groupés denses et vastes, de type villageois.

    3.4. Équipements des habitats et activités

    34Les occupations sont principalement tournées vers l’agro-pastoralisme, comme l’attestent clairement les structures archéologiques, même si le mobilier et les écofacts sont souvent assez peu loquaces. Les corpus, souvent très réduits, n’ont pas systématiquement été étudiés dans le cadre des rapports de fouilles préventives.

    35Des activités artisanales sont régulièrement présentes au sein de ces habitats, comme en témoignent certains équipements ou éléments de mobilier.

    36Les fonds de cabane (au nombre de 181) sont bien représentés sur tout le territoire (Fig. 5). Ceux de la première moitié du haut Moyen Âge sont plus nombreux et surtout, plus diversifiés, notamment pour la période de la fin du ve et du vie s., ce qui ressort également du large corpus francilien de fonds de cabanes (Ben Kaddour et al. 2022). On compte peu d’individus présentant des négatifs de montants de métiers à tisser et ceux-ci sont plutôt datables de la fin du haut Moyen Âge (cas de Nogent-le-Roi).

    Fig. 5 - Les fonds de cabane d’Eure-et-Loir classés par grands types et par périodes chronologiques.

    DAO : C. Ben Kaddour, d’après les différents rapports de fouille.

    37Si les structures de production sont rares, plusieurs sites ont livré du mobilier lié au tissage : quatre fusaïoles et deux aiguilles à chas à Toury, un poinçon et une broche de tisserand en os dans la cabane de Nogent-le-Roi. Les lissoirs en verre, traditionnellement associés aux activités textiles, sont attestés sur au moins deux sites : Épernon (1 ex.) et Toury (2 ex.).

    38Les silos sont également bien représentés (246 occurrences) mais essentiellement pour le second haut Moyen Âge et la période suivante (de la fin du xe au xiie s.). Pour le premier haut Moyen Âge, l’absence ou la faible fréquence de silos avérés n’est pas inédite : près de la moitié des sites des vie-viie s. du nord de la Gaule n’en comporterait pas (Peytremann 2013 : 43). On compte peu de silos sur le territoire proche de Chartres (et ils sont, sur deux sites périurbains, plutôt attribuables au Moyen Âge, à partir du xiiie s., Ben Kaddour 2015 : § 80). Trois sites centralisent la majorité des découvertes : 87 sur le site de Poupry, une soixantaine sur les sites d’Épernon, 53 sur le site de Toury. D’autres sites comptent seulement quelques exemplaires : à Marboué, Allonnes ou Illiers-Combray.

    39Des petites constructions sur quatre ou six poteaux pourraient constituer des greniers, participant au stockage des céréales. On les trouve sur les sites de Marboué et d’Épernon.

    40La plupart des bâtiments d’habitation ou d’exploitation restitués à partir des groupements de trous de poteau (aucun bâtiment alto-médiéval sur fondations en pierre n’a été détecté sur le sol eurélien) sont de moyennes dimensions (entre 20 et 60 m²), constitués généralement de six à douze poteaux. Ils sont, à de très rares exceptions à une ou deux nefs (Fig. 6) et sont souvent en nombre réduit sur chaque site.

    Fig. 6 - Les principaux plans restituables de bâtiments sur poteaux, par tailles et par périodes chronologiques.

    DAO : C. Ben Kaddour, d’après les différents rapports de fouille.

    41Les fours domestiques (103 occurrences), traditionnellement destinés à la cuisson du pain et au séchage/maltage des céréales, sont eux répartis sur la quasi -totalité des sites explorés sur des grandes superficies. Les sites du “Radray” à Gellainville et de “la Savonnière” à Épernon en centralisent près de la moitié. Ces fours sont presque exclusivement creusés en sape dans le substrat. Seuls trois fours présentent une voûte construite, sur les sites d’Alluye et d’Anet (pour des occupations des xe-xie s.). Il semble qu’il y ait assez peu d’évolution typologique entre le début et la fin du haut Moyen Âge, si ce n’est une diminution du nombre d’occurrences par site au fur et à mesure du temps et la plus grande fréquence de groupements de fours au premier haut Moyen Âge.

    42Sur le site de Gellainville, on note la présence d’un four plus élaboré avec des stigmates de cuisson à plus haute température. Il servait vraisemblablement à produire des poteries pour un usage local (Ben Kaddour 2015 : § 91).

    43Concernant la métallurgie, une activité de réduction de minerai de fer est attestée sur le site d’Alluyes “la Pierre Aigüe (Zone 1 et 2)” pour le premier haut Moyen Âge. La fouille d’Allonnes a également livré un foyer de forge plutôt bien conservé (Capron et al. 2013 : 246-248). Des scories de post-réduction, liées au travail de forge, se retrouvent régulièrement dans les habitats ruraux euréliens, généralement en petites quantités (sauf à Epernon et Toury, comptant respectivement 190 et 54 kg de scories). Le site d’Épernon a également livré un creuset archéologiquement complet.

    44Certains sites comportent des petites fosses quadrangulaires à fond plat avec des dépressions, localisées généralement dans les angles. Ce type de structures a été détecté (exclusivement à partir du second haut Moyen Âge) sur les sites d’Épernon (5 ex.), de Marboué (1 ex.), de Courville (1 ex.) et d’Illiers (1 ex.). Il a fait l’objet de diverses interprétations : pressoir, coffres enterrés ou support de meules à émoudre2 (Petit 2000 ; Gentili 2009 et Poignant 2013). Ces structures pourraient aussi tout à fait constituer des petits celliers, plutôt à l’intérieur de bâtiments (ce qui est vraisemblablement le cas pour l’exemplaire de Courville).

    45De manière générale, on compte étrangement peu de structures liées à l’eau (puits, citerne, mare) sur les sites euréliens. Des puits à eau sont supposés sur le site d’Alluyes et à Courville-sur-Eure mais n’ont été que partiellement fouillés. Un autre puits carolingien a été fouillé intégralement en périphérie de Chartres, sur le site du Bourneuf (14 m de profondeur).

    46Les sites d’Allonnes et de Marboué comportaient des chapelets de fosses d’extraction de limon dont on suppose qu’elles permettaient d’acquérir la matrice du torchis destiné aux bâtiments sur poteaux plantés. Sur le premier site, au second haut Moyen Âge, des fosses plus profondes entaillant la marne calcaire pouvaient permettre l’approvisionnement en matériaux pour l’amendement des champs et pour produire du liant pour la construction (technique mise en évidence sur l’édifice religieux présent dans l’emprise).

    3.4.1. Le mobilier

    47Le mobilier métallique et l’instrumentum sont généralement assez peu représentés sur les sites ruraux euréliens et renseignent peu sur les activités exercées sur ceux-ci. On note par exemple un petit ensemble de cinq couteaux à Gellainville et deux couteaux à Illiers-Combray. A contrario, le site de Toury a, lui, livré un bel ensemble d’outils (notamment dans un seul silo du second haut Moyen Âge) témoignant du travail de la pierre et du cuir ou des peaux. Un silo de Marboué “les Terres d’Ecoublanc” comportait également un dépôt de deux faucilles sur le fond de la structure attribuée au second haut Moyen Âge (Lichon 2004b). Les fragments d’une faucille ont été mis au jour au sein d’une fosse dépotoir sur l’habitat d’Allonnes.

    48Les sites livrent peu de mobilier macrolithique lié à la mouture a pu être prélevé. Quand c’est le cas, il s’agit régulièrement de mobilier protohistorique ou antique en position résiduelle : par exemple à Toury, une fosse du second haut Moyen Âge comportait un fragment de meta en basalte, probablement antique et un fragment de grande meta en meulière a également été retrouvé dans un silo (ayant livré à la fois du mobilier protohistorique et médiéval). À Nogent-le-Roi, des éléments de meule antique, voire protohistoriques sont aussi retrouvés en position résiduelle dans des structures alto-médiévales. Citons néanmoins deux catilus, retrouvées à Allonnes, dont l’une date du début du ixe s. D’un diamètre restituable de 42 cm, elle comporte un emmanchement latéral, ce qui suggère une utilisation manuelle.

    49La vaisselle en verre est peu répandue sur les sites euréliens (sept tessons à Allonnes, cinq à Épernon, trois à Illiers-Combray, etc.). On note la présence de verre à vitre (quatre fragments) sur le site d’Allonnes. L’association de ces objets avec des terres cuites architecturales produites à Saran (45) permet de poser la question d’éventuels bâtiments assez luxueux dans ce secteur du village.

    50La question des échanges et du commerce est difficilement abordable par le biais des monnaies. Ainsi, comme pour la majorité des sites ruraux alto-médiévaux, les habitats euréliens sont exempts de numéraire (sauf monnaies antiques). Il ne faut cependant pas y voir l’absence de circulation de la monnaie pour le haut Moyen Âge : à proximité du site d’Alluyes, à Saumeray, a été découvert un trésor monétaire (Lafaurie 1965). Ce dépôt, daté entre 880 et 882, est constitué de 63 deniers, dont 54 de Charles le Chauve (33 frappés à Orléans, 6 au Mans, 2 à Chartres) et 3 de Louis II ou III (frappés à Tours). Cet assemblage reflète-t-il des réseaux commerciaux davantage tournés vers le secteur d’Orléans (au sud) que celui de Chartres pourtant plus proche ? Cette question mérite d’être posée à la lumière des résultats des études des sites ruraux du secteur beauceron (dont Allonnes) qui montrent que les productions en terre cuite proviennent des ateliers de Saran (45) situés à quelques kilomètres de la ville orléanaise. Les structures et ateliers de potiers alto-médiévaux du département sont publiés dans une synthèse régionale qui indique trois ateliers (Bouillon 2015). Elle est complétée par des études de sites (Labat et Sellès 2017 ; François, Lefèvre et Verneau 2021). La consommation réalisée sur les sites euréliens fait aussi l’objet de synthèses, plutôt en fonction d’aires de diffusion et de consommation des ateliers : Saran pour la Beauce du sud-est (Jesset 2013), Dangeau pour le sud-ouest (et peut être tout l’ouest, Labat et Sellès 2017), Cherizy (et peut-être des ateliers franciliens) pour le nord (François, Lefèvre et Verneau 2021). Une présentation au cours du colloque montre que le secteur autour de Chartres possède ses propres ateliers (Gibut et al. 2021),

    51Les contextes funéraires semblent mieux refléter les échanges sur de plus longues distances que les structures d’habitat. Ainsi, dans l’ensemble funéraire communautaire d’Allonnes, on observe notamment l’emploi de plâtre de provenance probablement francilienne pour des contenants funéraires et d’un pendentif en cristal de roche qui en l’absence d’analyse peut seulement être considéré comme extérieur au département.

    3.4.2. Productions et consommations végétales et animales

    52Tous les sites, même ceux fouillés récemment, n’ont pas fait l’objet d’études archéozoologiques, souvent car les lots recueillis étaient trop indigents. Les rares études ne concernent que des volumes relativement limités : à Toury, un des sites les mieux pourvus, les restes déterminés pour le haut Moyen Âge sont au nombre de 1 020. Le bœuf est presque toujours largement majoritaire, porcs et caprinés présentent un rapport équilibré. Sur plusieurs sites de la région Centre-Val de Loire, c’est plutôt le porc qui domine pour le premier haut Moyen Âge (Clavel et Yvinec 2010) mais ce n’est pas systématique3.

    53Les équidés sont bien représentés sur le site de Gellainville aux ve et vie s. mais aussi sur le site péri-urbain du Bourneuf à Chartres pour tout le haut Moyen Âge (avec la présence de l’âne). La faune sauvage est essentiellement représentée par le cerf (de très rares restes sur les sites de Toury et Épernon) et un squelette de lynx sur le site de “Saint-Chéron” à Chartres.

    54Seuls de rares sites ont pu bénéficier d’études carpologiques. À Marboué “les Terres d’Ecoublanc”, les prélèvements de quatorze structures ont livré un important corpus de graines, issues principalement d’une seule structure. L’avoine y domine largement, suivi de l’orge vêtu et beaucoup plus marginalement du seigle et du froment, avec quelques restes de millet. Les fruitiers, peu nombreux sont représentés par le prunier, la vigne, le noyer, les fraises et les mûres. On note également quelques rares semences de lin et de légumineuses (vesce, fève et pois). À Allonnes, les prélèvements dans deux silos du ixe s. ont livré de l’orge (39 % des restes cultivés), du seigle (24 %), de l’avoine (18 %) et du blé nu (18 %), les légumineuses sont représentées par de petits lots de lentilles et de vesces. Les plantes sauvages sont plutôt des adventices de cultures d’hiver.

    55Des prélèvements en vue d’une étude palyno- logique ont été effectués dans l’Aunay, le petit cours d’eau qui borde le site archéologique d’Auneau. Ils indiqueraient une déprise agricole entre les ive et vie s., avant un recul net du couvert agricole entre le vie et le xiiie s.

    56Les éléments organiques minéralisés sur les objets métalliques des sépultures d’Allonnes nous procurent une illustration des productions vestimentaires (cuir et tissus). À l’inverse de certains des contenants funéraires ou de quelques objets qui impliquent des échanges sur de longues distances (cf. supra), la quasi-totalité des textiles sont associés à une production locale, semi-professionnelle ou domestique Seuls quatre individus se distinguent par leur finesse et pourraient être tissés par des professionnels ou importés.

    3.5. Les vivants et leurs morts

    57Les sépultures sont relativement peu présentes4 au sein des habitats euréliens (sur seulement neuf sites). Sur les sites du premier haut Moyen Âge, les petits groupes funéraires sont plutôt denses et situés en périphérie de l’habitat (Alluyes, Gellainville – sur ce dernier, les sépultures, localisées en bordure d’emprise, sont sensiblement postérieures à l’habitat observé et pourraient provenir d’un habitat non perçu situé hors emprise). Les sept inhumations retrouvées à Toury sont organisées en une rangée parallèle à un long fossé d’enclos (parcellaire non daté). Seule l’une des sépultures est datée par radiocarbone entre le dernier tiers du viie s. et le deuxième tiers du ixe s.

    58De rares sites du second haut Moyen Âge (qui ont généralement pu faire l’objet de décapages sur des superficies plus importantes) comportent des sépultures isolées ou en petits groupes au contact direct des structures d’habitat ou de production. À Épernon, quatre sépultures sont implantées dans des zones de fours domestiques (au moins en partie encore en fonctionnement : une sépulture recoupe une aire de chauffe du premier haut Moyen Âge, une autre est recoupée par celle d’un four carolingien). Les sépultures du second haut Moyen Âge d’Anet (au nombre de douze) sont installées à proximité directe d’un grand bâtiment sur poteaux et d’une zone de fours. Deux d’entre elles seront rapidement perturbées par deux cabanes semi-excavées. Trois sépultures dispersées ont aussi été retrouvées sur un des sites de Marboué.

    59Il faut noter l’absence de sépultures en silos ou en structures domestiques dans le département.

    Synthèse

    60En gardant à l’esprit les biais explicités plus haut, le corpus des sites euréliens est riche et les données suffisamment importantes pour être statistiquement valables. Ce corpus d’une cinquantaine de sites couvre toute la période (avec une assez bonne répartition chronologique : quatorze sites du premier haut Moyen Âge (ve-viiie s.) et dix-huit sites du second haut Moyen Âge (viiie-xiie s.), onze sites occupés aux deux périodes et dix sites datés largement du haut Moyen Âge, sans précision). Certains sites sont habités sur de courtes durées : au tout début du premier haut Moyen Âge pour Gellainville et vers le milieu du xie s. pour Anet, d’autres ont une chronologie longue (Mainvilliers ou Allonnes). Le corpus comporte des habitats vastes et pérennes qui peuvent être qualifiés de village ou de hameau, tandis que d’autres semblent constitués d’un nombre limité d’unités agricoles/unités d’habitation. Des habitats en rase campagne, n’ayant laissé aucun héritage particulier suite à leur abandon, se distinguent des habitats pérennes, qui, même au gré de légers déplacements, ont abouti à nos villages actuels. Cet éventail de types d’occupation permet une vraie réflexion sur l’occupation du sol, sur la diversité des modes d’habitat et de production, et probablement aussi sur les différences de statut social qui existaient au haut Moyen Âge. Ces données seraient à comparer non seulement à celles acquises dans le Loiret, un terroir proche et assez similaire d’un point de vue géographique, mais également aux nombreuses données issues du territoire francilien. Les études de la faune et de la flore doivent se poursuivre de manière à affiner les connaissances sur l’environnement et l’économie des habitats ruraux.

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    Morin et al. 2003. Morin J.-M., Cammas C., Fay M. J., Georges P., Moret F., Sellès H. et Warmé N. - RN 154 - Déviation du Boullay-Mivoye : communes de Tremblay-les-Villages et du Boullay-Thierry (28) : Les Baudets/Bronville. Agglomération du Haut-Empire et habitat groupé mérovingien, Rapport de fouille, AFAN/Inrap, 2 vol. (266 et 137 p.).

    Musch et al. 2017. Musch J., Linger-Riquier S., Devillers P.-Y., Tellier A. et David F. - Prunay-le-Gillon (28), “Centre Bourg” : diagnostic archéologique préalable à un projet de lotissement, Rapport de diagnostic, Inrap CIF, Pantin, 79 p.

    Noël et al. 2011. Noël J.-Y., Payraud N., Louis A. et Sellès H. - Poupry (28), “Les Hernies, Les 36 Mines et La Fromagée”, Rapport de diagnostic archéologique, CG 28, Chartres, 321 p.

    Payraud 2013. Payraud N. - Illiers-Combray (28) : Projet d’échangeur autoroutier sur l’A11 : Des vestiges du Néolithique, deux habitats protohistoriques et un enclos médiéval, Rapport de diagnostic d’archéologie préventive, CD 28, Chartres, 161 p.

    Petit 2000. Petit M. - Bases de pressoirs du haut Moyen Âge, in : Actes des journées archéologiques d’Île de France, Service régional de l’archéologie, Paris : 26-27.

    Perrichon à paraître. Perrichon P. - Thimert-Gatelles “Déviation de Châteauneuf-en-Thymerais”, Rapport de fouille, CD 28 Chartres.

    Perrichon et al. 2015. Perrichon P., Labat O., Borderie Q., Boulogne N., Chamaux G., Fencke E. et Noël J.-Y. - Illiers-Combray (28), projet d’aménagement de la ZA d’Illiers-Combray et Blandainville : des occupations du Paléolithique jusqu’au xiie s., Rapport de diagnostic, CD 28, Chartres, 2 vol. (246 et 378 p.).

    Peytremann 2003. Peytremann É. - Archéologie de l’habitat rural dans le nord de la France du ive au xiie siècle, Association française d’Archéologie mérovingienne Saint-Germain-en-Laye, 2 vol. (451 et 442 p.) (Mémoires de l’AFAM ; 13).

    Peytremann 2013. Peytremann É. - Structures et espaces de stockage dans les villages alto-médiévaux (6e-12e s.) de la moitié septentrionale de la Gaule : un apport à l’étude socio-économique du monde rural, in : Vigil-Escalera Guirado A., Bianchi G. et Quirós J.-A. (dir.), Horrea, barns and silos. Storage and incomes in Early Medieval Europe, Documentos de Arqueologia medieval, Universidad del País Vasco, Servicio editorial; Euskal Herriko Unibertsitatea, Argitalpen Zerbitzua, Bilbao: 39-56.

    Poignant 2013. Poignant S. (dir.) - Bondy, Seine-Saint-Denis, Rue Henri Barbusse, rue Polissard. Opération “Cœur de ville”, Rapport de fouille archéologique, Inrap CIF, Pantin, 635 p.

    Provost et al. 1995. Provost M., Joly D. et Ollagnier A. (dir.) - Carte archéologique de la Gaule, Eure-et-Loir, Éditions de la MSH, Paris, 369 p.

    Racinet 2006. Racinet P. (dir.) - Archéologie et histoire d’un prieuré bénédictin en Beauce : Nottonville, Eure-et-Loir, xe-xviie siècles, Archéologie et histoire de l’art no 21, CTHS, Paris, 504 p.

    Sellès 2006. Sellès H. - Voves (28), “Le Moulin Geargeot” (2e tranche), Rapport de diagnostic, Inrap/CD 28, Pantin/Chartres, 91 p.

    Talin d’Eyzac 1998. Talin d’Eyzac S. - Dammarie, site n° 28.122.901 A.H., Cour Saint-Pierre - Rue Mignières, Rapport d’évaluation archéologique, Service régional de l’archéologie, Orléans, 10 p. et 7 fig.

    Verneau à paraître. Verneau F. - Mainvilliers (28) “L’Enclos, la Couture”, Rapport d’opération de fouille archéologique, Inrap CIF Pantin.

    Verneau et al. 2012. Verneau F., Perrichon P., Leconte L., Frère S., Guérit M., Robin B., Coussot C. et Bryant S. - Nogent-le-Roi (28), “Le Poirier, Les Gués” - Établissement rural gallo-romain, fond de cabane de tissage médiéval et abris de la Seconde Guerre mondiale, Rapport d’opération de fouille archéologique, Inrap CIF, Pantin, 314 p.

    Verneau et al. 2015a. Verneau F., Brutus F., Creusillet M.-F., Fournier L., Fourré A., Guérit M., Lallet C., Leconte L., Liard M., Linger-Riquier S., Musch J., Noël M., Rivoire E., Serre S. et Warmé N. - Courville-sur-Eure (28), L’orme des Mûriers : Aqueduc romain et établissements ruraux de La Tène au Moyen Âge, Rapport de fouille, Inrap CIF, Pantin, 316 p.

    Verneau et al. 2015b. Verneau F., Coussot C., Creusillet M.-F., Fourré A., Francois P., Josset D., Noël M., Linger-Riquier S., Tane F., Tricoire J., Villenave C. et Wedajo B. - Beauvilliers (28), La Fosse Aubert, tranche 3 : Indices paléolithiques, occupations gauloises, romaines et médiévales, Rapport de diagnostic archéologique, Inrap CIF, Pantin, 109 p.

    Verneau et al. 2018. Verneau F., Mercey F., Villenave C., Musch J., Bouillon J., Creusillet M.-F., Fourré A., Aubazac G., Pautrat P., Wedajo B., David F. et Herment H. - Champhol (28), ZAC des Antennes, Rapport de diagnostic, Inrap CIF, Pantin, 101 p.

    Viret et Acheré 2020. Viret J. et Acheré V. - 13, 15 rue du Bourgneuf à Chartres (28). De la Préhistoire au faubourg moderne de Saint-Maurice, 6 000 ans d’occupation sur la rive gauche de l’Eure, Rapport de fouille archéologique, Direction de l’archéologie de Chartres Métropole, 4 vol. (214, 396, 357 et 305 p.).

    Wavelet et al. 2008. Wavelet D., Delhoofs H., Ben Kaddour C. et Hérouin S. - Le Radray, Gellainville (28). Une occupation rurale gallo-romaine et mérovingienne, une nécropole mérovingienne, Rapport de fouille, Direction de l’archéologie de Chartres Métropole, 7 vol. (258, 273, 10, 264, 264, 202 et 264 p.).

    Notes de bas de page

    1On s’appuiera notamment sur le bilan récent de la Société Dunoise qui après 150 ans d’étude active d’une partie du département reconnaît que, pour la période mérovingienne, “l’habitat est très mal connu”. L’époque carolingienne et le bas Moyen Âge sont renseignés par leurs monuments, pour le second principalement “les édifices fortifiés ou religieux”, un peu sur le village mais rien sur l’habitat rural (Comité Archéologique d’Eure-et-Loir 2014 : 227-228).

    2Meule à aiguiser, avec refroidissement à l’eau.

    3Citons, par exemple, le site d’Amboise “la Boitardière”, en cours d’étude.

    4Chiffre peu important si on le compare, par exemple, au territoire proche et bien documenté de l’Île-de-France (Mahé-Hourlier 2017).

    Auteurs

    Cyrille Ben Kaddour

    Éveha, UMR 7324 CITERES-LAT.

    François Capron

    Inrap Centre-Île-de-France.

    Olivier Labat

    Institut National du Patrimoine.

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      Kaddour, C. B., Capron, F., & Labat, O. (2024). Archéologie des habitats ruraux alto-médiévaux en Eure-et-Loir. In B. Bazin, F. Capron, A. Corrochano, & S. Joly (éds.), L’archéologie des ve-xiie siècles en région Centre-Val de Loire (1‑). Fédération pour l’édition de la Revue archéologique du Centre de la France. https://doi.org/10.4000/13ibo
      Kaddour, Cyrille Ben, François Capron, et Olivier Labat. « Archéologie des habitats ruraux alto-médiévaux en Eure-et-Loir ». In L’archéologie des ve-xiie siècles en région Centre-Val de Loire, édité par Bruno Bazin, Capron François, Alexis Corrochano, et Stéphane Joly. Tours: Fédération pour l’édition de la Revue archéologique du Centre de la France, 2024. https://doi.org/10.4000/13ibo.
      Kaddour, Cyrille Ben, et al. « Archéologie des habitats ruraux alto-médiévaux en Eure-et-Loir ». L’archéologie des ve-xiie siècles en région Centre-Val de Loire, édité par Bruno Bazin et al., Fédération pour l’édition de la Revue archéologique du Centre de la France, 2024, https://doi.org/10.4000/13ibo.

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      Bazin, B., Capron, F., Corrochano, A., & Joly, S. (éds.). (2024). L’archéologie des ve-xiie siècles en région Centre-Val de Loire (1‑). Fédération pour l’édition de la Revue archéologique du Centre de la France. https://doi.org/10.4000/13ib9
      Bazin, Bruno, Capron François, Alexis Corrochano, et Stéphane Joly, éd. L’archéologie des ve-xiie siècles en région Centre-Val de Loire. Tours: Fédération pour l’édition de la Revue archéologique du Centre de la France, 2024. https://doi.org/10.4000/13ib9.
      Bazin, Bruno, et al., éditeurs. L’archéologie des ve-xiie siècles en région Centre-Val de Loire. Fédération pour l’édition de la Revue archéologique du Centre de la France, 2024, https://doi.org/10.4000/13ib9.
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